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Christ est Ressuscité, libre et vainqueur, pour nous libérer et être notre victoire… (Pâques 2024) par le Diacre Jacques Fournier

          Au chapitre 8,31-36 de l’Evangile selon St Jean, Jésus déclare :

         « « Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples,

et vous connaîtrez la vérité

et la vérité vous libérera. »

Ils lui répondirent : « Nous sommes la descendance d’Abraham

et jamais nous n’avons été esclaves de personne.

Comment peux-tu dire : « Vous deviendrez libres ? »

Jésus leur répondit : « En vérité, en vérité, je vous le dis,

quiconque commet le péché est esclave.

Or l’esclave ne demeure pas à jamais dans la maison, le fils y demeure à jamais.

Si donc le Fils vous libère, vous serez réellement libres. »

Or, dans l’Evangile selon St Jean, la notion de vérité renvoie toujours à Dieu lui-même. Dès le Prologue, Jésus est ainsi ce Verbe « plein de grâce et de vérité » (Jn 1,14), et au chapitre 14,6, il se présente en disant : « Je Suis le chemin, la vérité et la vie ». Et tout comme Jésus, le Fils, est « la lumière véritable » (Jn 1,9), « la vigne véritable » (Jn 15,1), le Père, lui aussi, est, dans la bouche de Jésus, « le seul véritable Dieu » (Jn 17,3). Enfin, St Jean est l’unique Evangéliste à nous présenter l’Esprit Saint en l’appelant « l’Esprit de vérité » (Jn 14,17 ; 15,26 ; 16,13) et toute son œuvre est de « nous introduire dans la vérité tout entière » (Jn 16,13), c’est-à-dire en Dieu, en communion avec Lui…

« Vous connaîtrez la vérité », Dieu, « et la vérité », Dieu, « vous libèrera »… C’est donc en tant que Dieu Est ce qu’il Est de toute éternité qu’il libère…

Quelle est donc sa vérité ?

Là encore, c’est toujours St Jean qui nous donne, en deux fois, le résumé le plus concis, et le plus lourd de sens : « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16), et « il n’Est qu’Amour » ajoute le Père François Varillon. Tout en Lui est Amour. Telle est la base, le fondement de notre foi, sur lequel nous revenons sans cesse car tout le reste en découle…

En effet, puisque Dieu est éternellement Amour, rien de ce que nous disons, faisons, pensons ne peut l’empêcher d’être ce qu’il Est…

Le prophète Osée nous présente Israël, infidèle, courant après les idoles et déclarant : « Ce sont elles qui me donnent mon pain et mon eau, ma laine et mon lin, mon huile et ma boisson »… Et Dieu déclare juste après : « Elle n’a pas reconnu que c’est moi qui lui donnais le froment, le vin nouveau et l’huile fraîche, qui lui prodiguais cet argent et cet or qu’ils ont employés pour Baal » (Os 2,4-10). Ainsi, alors même qu’Israël lui était infidèle, Dieu continuait de la combler de ses bienfaits… « Quand nous sommes infidèles », écrit St Paul, « Dieu, lui, reste à jamais fidèle, car il ne peut pas se renier lui-même » (2Tm 2,13), il ne peut pas ne pas être ce qu’il est, il ne peut pas ne pas être amour… Or l’amour ne cherche, ne désire, ne poursuit que le bien de l’être aimé… Voilà ce que Dieu fait, toujours, inlassablement, que nous le percevions ou pas… A ce peuple infidèle qui ne cessait de l’abandonner et de se détourner de lui, il déclare dans le prophète Jérémie : « Je ne cesserai pas de les suivre pour leur faire du bien. Je trouverai ma joie à leur faire du bien, de tout mon cœur, de toute mon âme » (Jr 32,40-41). Et notre joie fait sa joie : « Le Seigneur prendra plaisir à ton bonheur, comme il avait pris plaisir au bonheur de tes pères » (Dt 30,9-10). Tous ces éléments se retrouvent dans la parabole de la brebis perdue (Lc 15,4-7) : « Lequel d’entre vous, s’il a cent brebis et vient à en perdre une, n’abandonne les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour s’en aller après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvée ? Et, quand il l’a retrouvée, il la met, tout joyeux, sur ses épaules et, de retour chez lui, il assemble amis et voisins et leur dit : « Réjouissez-vous avec moi, car je l’ai retrouvée, ma brebis qui était perdue !  » C’est ainsi, je vous le dis, qu’il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes, qui n’ont pas besoin de repentir ».

 

Alors, puisque le mal nous séduit, nous trompe et nous apporte tout le contraire du bien espéré, « souffrance et angoisse pour toute âme humaine qui fait le mal » (Rm 2,9), Dieu nous appelle tous au repentir pour que disparaisse de nos vies, autant qu’il est possible, ce qui pour nous ne peut qu’être tristesse, désespoir, désolation etc… « Le salaire du péché, c’est la mort » (Rm 6,27), ce que Dieu ne veut pas pour ses créatures, ses enfants bien-aimés…« Vois, je te propose aujourd’hui vie et bonheur, mort et malheur. Si tu écoutes les commandements de Yahvé ton Dieu que je te prescris aujourd’hui, et que tu aimes Yahvé ton Dieu, que tu marches dans ses voies, que tu gardes ses commandements, ses lois et ses coutumes, tu vivras et tu multiplieras, Yahvé ton Dieu te bénira dans le pays où tu entres pour en prendre possession. Mais si ton cœur se détourne, si tu n’écoutes point et si tu te laisses entraîner à te prosterner devant d’autres dieux et à les servir, je vous déclare aujourd’hui que vous périrez certainement et que vous ne vivrez pas de longs jours sur la terre où vous pénétrez pour en prendre possession en passant le Jourdain » (Dt 30,15-18). Mais s’ils entrent sur cette terre pour en prendre possession, c’est bien parce que Dieu la leur donne, se révélant ainsi fidèle à ses promesses faites autrefois à Abraham alors même que le peuple lui est infidèle (Gn 15,18 : « A ta postérité je donne ce pays »…) ! Nous retrouvons ainsi ce Dieu et Père, imperturbablement fidèle ! Il en sera toujours ainsi avec son Fils Jésus Christ, écrit St Paul. « En effet, c’est alors que nous étions sans force (conséquences du péché : « Le péché m’a fait perdre mes forces, il me ronge les os » (Ps 31(30),11),c’est au temps fixé que le Christ est mort pour des impies ;  – à peine en effet voudrait-on mourir pour un homme juste ; pour un homme de bien, oui, peut-être osera-t-on mourir ; mais la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous » (Rm 5,6-8). Et il meurt pour remporter la victoire sur tout ce qui, dans notre vie, est source de tristesse, de souffrance, de mort, d’angoisse et de peur… Il meurt pour notre bien, alors même que c’est nous qui le tuons par nos fautes. « Vous avez livré Jésus, vous l’avez renié devant Pilate alors qu’il était décidé à le relâcher. Vous avez chargé le Saint, le Juste et vous avez réclamé la grâce d’un assassin (Barabbas) tandis que vous faisiez mourir le prince de la vie. Mais Dieu l’a ressuscité des morts… et c’est pour vous d’abord que Dieu a ressuscité son Serviteur et il l’a envoyé vous bénir du moment que chacun de vous se détourne de ses perversités » (Ac 3,11-26).

Autrement dit, Dieu nous bénit toujours, toujours, quoique nous disions, fassions, pensions, et telle est bien la caractéristique première de l’Amour, nous l’avons vu, mais pour recevoir cette bénédiction, il nous faut bien nous tourner de tout cœur vers Celui qui nous la donne ! D’où cette première parole de Jésus en St Marc : « Le Royaume de Dieu est tout proche : repentez-vous », retournez-vous, détournez-vous du mal et tournez-vous vers votre Dieu et Père, « et croyez à la Bonne Nouvelle » de l’Amour Inconditionnel (Mc 1,15)… Cessez de faire ce mal qui vous tue, et tournez vous vers votre Dieu et Père pour recevoir, gratuitement, par Amour, ce qu’il veut vous donner pour votre plus grand bonheur, ce qu’il ne cesse de donner d’ailleurs, cet Esprit Saint qui n’est rien que moins qu’une participation à sa Plénitude d’Être, de Lumière et de Vie…

Mais nous l’avons entendu : « Quiconque commet le péché est esclave » du péché qu’il commet (Jn 8,34). C’est ce que disait déjà le Livre de l’Exode dans un des textes les plus importants de l’Ancien Testament, « les Dix Paroles ». En effet, là où nous lisons dans nos traductions « Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux (les idoles), tu ne les serviras pas » (Ex 20,5), le texte hébreu a littéralement : « Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux, tu ne te laisseras pas faire serviteurs d’eux », autrement dit, « tu ne te laisseras pas asservir par eux »… Et il est impossible, pour « l’esclave » du péché, de se libérer lui-même. Tous ses efforts, toutes ses tentatives n’aboutissent finalement qu’à l’échec… C’est le Christ qui vient nous libérer… Mais pour le lui demander, encore faut-il bien sûr prendre conscience que nous sommes esclaves, et cela encore, c’est le Christ qui nous le donne… Se repentir est un Don de Dieu : «Le Dieu de nos pères a ressuscité ce Jésus, que vous, vous aviez fait mourir en le suspendant au bois du supplice. C’est lui que Dieu, par sa main droite, a élevé, en faisant de lui le Prince et le Sauveur, pour accorder par lui à Israël la repentance et le pardon des péchés. Quant à nous, nous sommes les témoins de tout cela, avec l’Esprit Saint, que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent » (Ac 5,30-32). Et si cette affirmation concerne ici Israël, Pierre déclarera un peu plus loin : « Dieu a accordé aux païens le même don qu’à nous ». Et ses interlocuteurs Juifs lui répondront : « Ainsi donc aux païens aussi Dieu a donné la repentance qui conduit à la vie » (Ac 11,18).

          Cette œuvre de libération est centrale et elle intervient tout de suite en St Luc dans ce qui apparaît comme étant le programme d’action de Jésus (Lc 4,16-20) :

          Jésus vint à Nazara où il avait été élevé, entra, selon sa coutume le jour du sabbat, dans la synagogue, et se leva pour faire la lecture. (17) On lui remit le livre du prophète Isaïe et, déroulant le livre, il trouva le passage où il était écrit (cf. Is 61,1-2) :

(18)    L’Esprit du Seigneur est sur moi,

          parce qu’il m’a consacré par l’onction,

          pour porter la bonne nouvelle aux pauvres.

          Il m’a envoyé annoncer aux captifs la délivrance        

          et aux aveugles le retour à la vue,

          renvoyer en liberté les opprimés, (Is 58,6 : « Renvoyez les opprimés en liberté »)

(19)    proclamer une année de grâce du Seigneur.

 (20)  Il replia le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous dans la synagogue tenaient les yeux fixés sur lui. (21) Alors il se mit à leur dire: « Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles ce passage de l’Ecriture. » (22) Et tous lui rendaient témoignage et étaient en admiration devant les paroles pleines de grâce qui sortaient de sa bouche.

 

          Or derrière nos traductions « délivrance », « liberté », se cache un seul et même mot grec, que St Luc prend la peine de répéter par deux fois en insérant dans Is 61,1-2 un extrait d’Is 58,6 « ἄφεσις, aphêsis ». Dans tous les autres emplois, aussi bien dans l’Evangile que dans les Actes des Apôtres,  il s’agira toujours du « pardon des péchés, ἄφεσις ἁμαρτιῶν ». Déjà, avant Lc 4,18, ἄφεσις est apparu deux fois en ce sens :

                    1Lc 1,77 : cantique de Zacharie :

(76)    Καὶ σὺ δέ, παιδίον,                                 « Et toi, petit enfant,

          προφήτης ὑψίστου κληθήσῃ·                   tu seras appelé prophète du Très-Haut ;

          προπορεύσῃ γὰρ ἐνώπιον κυρίου ἑτοιμάσαι ὁδοὺς αὐτοῦ,

                        tu marcheras en effet devant le Seigneur pour préparer ses chemins

(77)     τοῦ δοῦναι γνῶσιν σωτηρίας τῷ λαῷ αὐτοῦ ἐν ἀφέσει ἁμαρτιῶν αὐτῶν,

             pour donner la connaissance du salut à son peuple « dans » (par…) le pardon de ses péchés,

           (CNPL : Pour donner à son peuple de connaître le salut par la rémission de ses péchés.)

(78)    διὰ σπλάγχνα ἐλέους θεοῦ ἡμῶν,  « à cause de… » (grâce aux…)                                                                                        entrailles de miséricorde de notre Dieu

          ἐν οἷς ἐπισκέψεται ἡμᾶς ἀνατολὴ ἐξ ὕψους,

            en lesquelles nous visitera « l’Astre levant venu d’en haut » (TOB)

(79)     ἐπιφᾶναι τοῖς ἐν σκότει καὶ σκιᾷ θανάτου καθημένοις,

          pour se manifester à ceux qui habitent dans les ténèbres et l’ombre de la mort

          τοῦ κατευθῦναι τοὺς πόδας ἡμῶν εἰς ὁδὸν εἰρήνης.

          pour diriger (mettre droit, redresser) nos pas vers le chemin de la paix.

                    2 – Lc 3,3 : Jean-Baptiste vint dans la région du Jourdain « pour proclamer un baptême de repentir pour le pardon des péchés, κηρύσσων βάπτισμα μετανοίας εἰς ἄφεσιν ἁμαρτιῶν. Jean-le Baptiste proclame « un baptême de repentir », c’est à dire un rite qui signifie « le repentir » afin de préparer les foules à accueillir par ce repentir « le pardon des péchés » apporté par le Christ.

 3 – Lc 24,47 : au début de l’Evangile de Luc, le ministère de Jésus est donc immédiatement précédé par la proclamation de ce « baptême de repentir pour la rémission des péchés » que Jésus recevra (annonce de la Passion) dans son désir de totale solidarité avec ce monde pêcheur qu’il est venu rejoindre au plus profond de son mal pour l’arracher à ses ténèbres… Telle sera la victoire de la résurrection où Jésus sort victorieux de tous les assauts du mal… et l’Evangile se termine par les dernières paroles du Ressuscité à ses Apôtres avant l’Ascension :

            Lc 24,46-48 : « Il leur dit : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, (47) et qu’en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés (εἰς ἄφεσιν ἁμαρτιῶν) serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. (48) De cela vous êtes témoins. » »

St Luc utilisera encore l’expression « ἄφεσις ἁμαρτιῶν, pardon des péchés » dans le livre des Actes des Apôtres, en Ac 2,38 ; 5,31 ; 10,43 ; 13,38 ; 26,18. Lisons ce dernier texte où Paul rapporte au roi Agrippa les paroles que lui adressa le Christ ressuscité lorsqu’il lui apparut sur la route de Damas. Nous retrouvons les images du Cantique de Zacharie et de Lc 4,18 :

            Ac 26,15-18 : « « Qui es-tu, Seigneur ? » (dit Paul au Christ ressuscité). Le Seigneur dit : « Je suis Jésus, que tu persécutes. (16) Mais relève-toi et tiens-toi debout. Car voici pourquoi je te suis apparu : pour t’établir serviteur et témoin de la vision dans laquelle tu viens de me voir et de celles où je me montrerai encore à toi. (17) C’est pour cela que je te délivrerai du peuple et des nations païennes, vers lesquelles je t’envoie, moi, (18) pour leur ouvrir les yeux afin qu’elles reviennent des ténèbres à la lumière, et de l’empire de Satan à Dieu, et qu’elles reçoivent par la foi en moi, la rémission de leurs péchés, ἄφεσιν ἁμαρτιῶν, et une part d’héritage avec les sanctifiés » ».

          Ainsi le grand cadeau que Jésus est venu offrir aux pécheurs est « le pardon des péchés », un pardon qui est offert instant après instant par l’Amour, inlassablement, en surabondance, d’une manière incroyablement fidèle… Ecoutons la première parole que Jean Baptiste nous dit de Jésus lorsque ce dernier entre en scène dans l’Evangile de Jean : « Jean Baptiste voit Jésus venir vers lui et il dit : « Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » » (Jn 1,29). Or, en grec, nous avons pour le verbe « enlever », un participe présent : « ὁ αἴρων τὴν ἁμαρτίαν τοῦ κόσμου, l’enlevant le péché du monde ».  Or, Dieu se présente à Moïse en disant : « Je Suis Celui qui Est », en grec, « Ἐγώ εἰμι ὁ ὤν, Je Suis l’Etant »(Ex 3,14). Avec le Christ, l’éternel « Unique Engendré » (Jn 1,18), « l’Etant » apparaît comme « l’Enlevant » le péché du monde… Etant donné que Dieu Est ce qu’Il Est, face au péché, il n’a qu’un geste, qu’un acte, qu’un mouvement : « l’enlever »… Il suffit que nous consentions à le lui offrir de tout cœur, ce qui revient bien sûr à y renoncer, à se repentir, à se convertir… instant après instant, tout au long de notre vie… Jésus est en effet « l’image du Dieu invisible » (Col 1,15), « l’expression parfaite de son Être » (Hb 1,3) la révélation de ce Dieu Amour qui ne cesse de se donner en tout ce qu’il est, « ce Soleil qui donne la grâce, qui donne la gloire » (Ps 84,12), en donnant « l’Esprit de la grâce » (Hb 10,29), « l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu » (1P 4,14), cet Esprit Saint qui est Lumière (Jn 4,24 ; 1Jn 1,5), une Lumière qui brille dans nos ténèbres et que « les ténèbres n’ont pu saisir » (Jn 1,5)… L’Amour Infini ne peut qu’être victorieux dès lors que nous lui offrons tout…

          Il est aussi cette Source d’Eau Vive qui ne cesse de jaillir (Jn 4,10-14 ; 7,37-39), une eau vive « qui vivifie » (Jn 6,63 ; 2Co 3,6) et qui est aussi tout en même temps « eau pure qui purifie »… « Je verserai sur vous une eau pure et vous serez purifiés ; de toutes vos souillures,  de toutes vos ordures, je vous purifierai… Je mettrai en vous mon Esprit » (Ez 36,24-29). « Vous avez été lavés, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés par le nom du Seigneur Jésus Christ et par l’Esprit de notre Dieu » (1Co 6,11).

          Et c’est ce même Don gratuit de l’Esprit qui, petit à petit, de pardon en pardon, nous libère et nous donne la force de dire non à tout ce qui nous tue : « L’épreuve qui vous a atteints n’a pas dépassé la mesure humaine. Dieu est fidèle : il ne permettra pas que vous soyez éprouvés au-delà de vos forces. Mais avec l’épreuve il donnera le moyen d’en sortir et la force de la supporter » (1Co 10,13). « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint » (Ac 1,8), ce Don de Dieu qui ne cesse de jaillir de Lui de toute éternité, gratuitement, par amour…

 

Jacques Fournier

 

 

 

 

 

 




« Messe Christmale (27/03/24) : homélie de Mgr Pascal Chane Teng »

       Voici l’homélie de Mgr Pascal Chane Teng donnée en l’Eglise de Saint Louis ce mercredi 27 mars 2024 à l’occasion de la Messe Chrismale… Belles et heureuses fêtes de Pâques à tous, en laissant la Lumière du Ressuscité accomplir son œuvre de Vie au cœur de chacun d’entre nous…

 

 

Pour lire ou imprimer le document en PDF cliquer ici : Homélie Messe chrismale 2024




Le pardon et la conversion (Vendredi saint 29 mars 2024) par le Père Rodolphe EMARD

En ce vendredi saint, réfléchissons sur les notions de « pardon » et de « conversion ».

▌Le terme « pardon »

Dans le langage religieux, le terme « pardon » et le terme « rémission » ont un sens voisin. Le terme « rémission » vient de « remettre », remettre dans le sens d’une dette. Le terme « pardon » vient du latin per qui exprime l’idée de perfection et de donare qui signifie « donner ». Littéralement, le pardon est un don parfait.

Le pardon vient de Dieu. Lui seul est un Dieu d’amour et de miséricorde. Le pardon de Dieu nous est obtenu par le Christ, dans son mystère pascal, sa mort et sa Résurrection. Jésus a versé son sang pour le pardon, la rémission des péchés. C’est Dieu qui fait le travail de pardon dans nos vies, il faut nous disposer à sa grâce !

Dans la prière du « Notre Père », prière parfaite puisqu’elle vient du Christ, nous disons : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés » (cf. Luc 11, 4 ; Matthieu 6, 12). Le « Notre Père » étant la charte du chrétien, nous devons prendre en considération cette demande à Dieu.

Le pardon s’exprime dans une attitude concrète. Le nouveau Théo – L’encyclopédie catholique pour tous souligne : « Le pardon, c’est l’attitude de celui qui, ayant été offensé, prend l’initiative d’annuler la dette morale contractée par celui qui l’a offensé. C’est bien un don parfait car, sur un plan juridique et humain, le pardon ne se justifie pas »[1].

Puissions-nous oser le pardon en cette sainte journée !

▌Le terme « conversion »

Dieu appelle à la conversion. Il ne désespère jamais du pécheur. Par le thème conversion, entendons un retour radical à Dieu. Il s’agit bien de revenir à Dieu. La conversion implique la transformation du cœur et du comportement. La conversion implique également la confiance en Dieu qui peut nous régénérer, nous ressusciter.

Le Christ n’a pas cessé d’appeler à la conversion, c’est une exigence pour l’entrée dans le Royaume de Dieu. Puissions-nous entendre profondément son appel à la conversion : « Le temps est accompli et le Royaume de Dieu est tout proche : repentez-vous et croyez à l’Évangile » (Mc 1, 14).

 

 

[1] Le nouveau Théo – L’encyclopédie catholique pour tous, Mame Éditions, Paris, 2009, page 735.

 




Méditation en lien avec le chemin de croix du diocèse par Père Rodolphe EMARD

La compassion

Notre chemin de croix nous donne l’occasion de méditer sur la compassion. Mais comprenons-nous bien ce terme ?

Le dictionnaire Larousse définit la compassion comme un « sentiment de pitié qui nous rend sensible aux malheurs d’autrui »[1].

Le site de la Conférence des Évêques de France, « Église catholique en France », définit la compassion comme un « sentiment par lequel on est porté à percevoir ou ressentir la souffrance des autres et qui nous y fait participer de cœur. » Le site rajoute : « Jésus était ému de compassion et guérissait les malades »[2]. Ce rajout est extrêmement important !

N’oublions pas que le grand compatissant, le seul vrai compatissant c’est le Christ. Face aux souffrances que nous portons, Jésus est remué jusqu’aux entrailles par un sentiment de pitié qui le pousse à agir et à venir nous secourir. Puissions-nous vraiment nous ouvrir à sa compassion, sans réserve… Cette compassion sauve !

En nous ouvrant à sa compassion, Jésus nous donnera d’être compatissants avec les autres. C’est une grâce à demander constamment. Mettons-nous à l’école de la compassion, chacun peut se demander concrètement quels seront ces gestes de compassion qu’il posera durant cette sainte journée, là où il est inséré : à commencer dans sa famille !

Si une famille se déchire constamment, comment pourrait-elle s’ouvrir à la compassion ? Oui la compassion commence dans nos familles et elle doit continuer ensuite dans nos autres milieux de vie : nos quartiers, nos milieux professionnels et associatifs…

Ne cherchons pas à vouloir trop faire au risque de ne rien faire. Posons des gestes humbles, simples mais vrais, dans la plus grande gratuité. C’est ainsi que nous aurons notre récompense auprès de Seigneur.

Oui, posons des gestes humbles, simples mais vrais à l’image de Simon de Cyrène, de Marie, de Véronique, des femmes de Jérusalem, de Joseph d’Arimathie, de Nicodème et de Marie Magdeleine de la croix qui nous accompagnent dans notre chemin de croix. Qu’ils nous inspirent en ce vendredi saint !

 

Ensemble, prions le Seigneur :

Seigneur Jésus, toi qui nous aimes tant, prends pitié de nous, apprends-nous à être compatissants envers nos frères et sœurs. Mère Marie Magdeleine de la Croix, toi qui as vécu la compassion auprès des plus pauvres de ton temps, prie pour nous !

 

 

[1] Lien : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/compassion/17625

[2] Lien : https://eglise.catholique.fr/glossaire/compassion/




Introduction à la Liturgie des Heures à Bagatelle

Introduction à la liturgie des Heures

Les samedis :

13 Avril,  4 Mai et 1er Juin 2024

de 13h30 à 15h30

à Ste Suzanne Bagatelle

Pendant ces trois rencontres, nous allons nous familiariser avec le livre du temps présent, son contenu et comment l’utiliser en fonction des différentes célébrations liturgiques.

Vous pouvez vous inscrire dès à présent :

Email : secretariat@sedifop.com – Tel :  0262 90 78 24 (de 8h à 12h)




Retraite de Carême 2024 sur jevismafoi.com

Le Sedifop est heureux de vous proposer sur jevismafoi.com une retraite de Carême en ligne sur le thème : « Avec le Christ Lumière, en ce temps d’incertitude »… Une quinzaine de personnes, prêtres, religieux, diacres, laïcs, vous offriront chaque jour une méditation sous formes écrite et audio. Cette même méditation sera aussi diffusée sur les ondes de Radio Arc en Ciel…

Si vous désirez la recevoir directement dans votre boîte mail, il suffit d’aller sur jevismafoi.com. Vous verrez alors une petite enveloppe se balancer devant vous : vous y écrivez votre adresse mail et le tour est joué. Nous nous engageons bien sûr à ne la communiquer à personne…

Nous vous souhaitons tous « le meilleur », avec le Christ, Lui qui, en cette vie qui est loin d’être tous les jours facile, nous accompagne et nous soutient pour que « tout puisse concourir à notre bien » (Rm 8,28)…




Enseignement de Carême 2024 par le père Jean François LACO à l’Eglise de Ste Suzanne

 

« Laisse partir mon peuple »

Les Dimanches
18 et 25 Février
3, 10 et 17 Mars
Exposition du St Sacrement
à 15h

Enseignements bibliques
par père J.F LACO
à 15h30

Prière commune
et
bénédiction du st Sacrement

 

Pour tous renseignements
Paroisse Ste Suzanne
2 Chemin des 3 Frères
97441 Sainte Suzanne
Tél. 0262. 29.04.09
Mail : père.lacojf97441@gmail.com

 

Pour voir l’affiche en pdf cliquer sur le lien suivant : Moise – careme 2024 – P – Copie




« Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ » (D. Alexandre ROGALA – M.E.P.)

À l’époque de Jésus, il y avait de nombreux pillards et les banques n’existaient pas. Donc, lorsque quelqu’un avait de l’argent, il était courant qu’il le mette dans une caisse et de l’enterrer pour le cacher.

Au début des vacances, j’ai animé un camp avec des enfants et des adolescents de la ville de Saint-Denis (93). À la fin de ce camp, nous avons célébré l’eucharistie ensemble. Le prêtre qui présidait la célébration a eu l’idée de faire intervenir les enfants pendant l’homélie. Au début de l’homélie, les jeunes n’intervenaient pas beaucoup et je me disais que la tentative du prêtre de faire participer les enfants était un échec. Mais au bout de quelques minutes, l’un des enfants a parlé de l’argent. Et à partir de ce moment là, tout a changé. Les enfants ont tous levé la main pour participer et donner leur opinion.

L’argent est un sujet qui déchaîne les passions. L’argent permet de faire beaucoup de choses. Il permet d’acheter à manger, de payer ses factures, de voyager, de faire des cadeaux etc. Bref, l’argent est indispensable pour vivre dans notre société. Toutefois, il existe des richesses bien supérieures à l’argent.

Les lectures de ce dimanche nous en parlent…

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Dans la première lecture tirée du Premier Livre des Rois, il est question du don de la sagesse que Dieu accorde à Salomon en réponse à son humble prière. La sagesse est assurément un don bien supérieur à l’argent puisqu’il est un des dons du Saint-Esprit.

Au Ier siècle avant notre ère, un juif pétri de culture grecque vivant à Alexandrie, a écrit un livre qu’on appelle le Livre de la Sagesse. À cette époque, Alexandrie était un grand centre intellectuel. Il y avait non seulement une immense bibliothèque, mais aussi une école de philosophie dans laquelle ont étudié et enseigné des philosophes et théologiens célèbres: Ammonius Saccas, Plotin, Clément d’Alexandrie, Origène…

S’il est permis de mentionner le Livre de la Sagesse alors que la première lecture est tirée du Premier Livre des Rois, c’est parce que l’auteur du Livre de la Sagesse a écrit son œuvre sous l’autorité de Salomon. Il l’a écrite à la première personne comme s’il était lui-même le roi Salomon. C’est ce qu’on appelle une pseudépigraphie. Puisqu’il écrit sous l’autorité de Salomon, l’auteur du Livre de la Sagesse connait la valeur inestimable de la sagesse. Écoutez ces magnifiques lignes:

« la Sagesse est pour les hommes un trésor inépuisable, ceux qui lacquièrent gagnent lamitié de Dieu (…) Elle est plus belle que le soleil, elle surpasse toutes les constellations ; si on la compare à la lumière du jour, on la trouve bien supérieure car le jour sefface devant la nuit, mais contre la Sagesse le mal ne peut rien » (Sg 7, 14 ; 29-30).

Depuis les origines de l’humanité, l’homme a recherché cette sagesse. Dans le troisième chapitre du Livre de la Genèse, trompés par le serpent, l’homme et la femme pensent pouvoir acquérir par eux-mêmes cette sagesse en saisissant et en dévorant le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal.

Or, comme l’enseignent plusieurs textes bibliques, la véritable sagesse est celle qui « commence avec la crainte de Dieu » (cf. Pr 9; Ps 110 (111); Jb 28). Par conséquent, pour nous qui sommes croyants, la vraie sagesse ne peut en aucun cas être acquise par nos propres forces. La véritable sagesse ne peut être que reçue comme un don.

L’auteur du Livre de la Sagesse qui, comme on l’a dit, écrit sous l’autorité de Salomon, relit l’épisode du songe de Salomon à Gabaon (1 R 3) et écrit:

« je savais que je ne pourrais jamais obtenir la sagesse si Dieu ne me la donnait, et il me fallait déjà du discernement pour savoir de qui viendrait ce bienfait. Je me tournai donc vers le Seigneur et lui fis cette prière… » (Sg 8, 21)

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Dans la deuxième lecture tirée du chapitre 8 de la Lettre aux Romains, saint Paul nous parle de la Grâce, qui est évidemment elle-aussi, bien supérieure à l’argent. Dans l’Église nous employons souvent le mot « grâce » pour parler d’un bienfait reçu du Seigneur. Et nous avons raison de le faire, car par nature, la Grâce est un don totalement gratuit de Dieu.

Mais la Grâce avec un « G » majuscule dont nous parle saint Paul dans la Lettre aux Romains, désigne l’action de Dieu dans notre vie de croyant.

Saint Paul écrit: « Ceux qu’il a appelés, il en a fait des justes et ceux qu’il a rendu justes, il leur a donné sa gloire ». Ou encore, « ceux que, davance, il connaissait, il les a aussi destinés davance à être configurés à limage de son Fils ».

En lisant ces lignes de l’Apôtre, nous comprenons que par la Grâce, Dieu non seulement nous justifie, c’est à dire qu’il nous soigne du mal qu’est le péché ; mais Dieu nous divinise aussi en nous donnant sa gloire, et en nous configurant à l’image de son Fils.

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Dans l’évangile de ce dimanche, nous poursuivons la lecture du chapitre 13 de l’évangile de Matthieu commencée depuis deux semaines. Il s’agit du troisième discours de Jésus. Dans le premier, que l’on a l’habitude d’appeler « sermon sur la montagne », Jésus a parlé à la foule de la justice du Royaume des Cieux. Puis, avant d’envoyer ses apôtres en mission proclamer le Royaume des Cieux, il leur a exposé tout ce qu’implique la proclamation du Royaume. Enfin, depuis deux dimanches, dans son troisième discours Jésus nous parle du mystère de ce Royaume.

Le Royaume (ou le Règne) de Dieu est la réalisation des promesses que Dieu a faites à son peuple par les prophètes:

« Je mettrai en vous mon esprit, je ferai que vous marchiez selon mes lois, que vous gardiez mes préceptes et leur soyez fidèles…vous, vous serez mon peuple, et moi, je serai votre Dieu… (Ez 36) « Je mettrai ma Loi au plus profond deux-mêmes ; je linscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple….je ne me rappellerai plus lors péchés (Jr 31);  je répandrai mon esprit sur tout être de chair (Jl 3) ».[1]

Si le Royaume de Dieu qui est l’objet principal du message de Jésus et des apôtres, est la concrétisation de ces promesses que nous venons d’évoquer, le Royaume a évidemment infiniment plus de valeur que l’argent. Par ailleurs, comme nous le constatons dans les paraboles proposées par Jésus ce dimanche, le Royaume des Cieux implique la grâce et le don de la sagesse.

Avant de dire quelques mots sur les paraboles, commençons par une petite remarque sur le chapitre 13 de l’évangile de Matthieu. Le fait que Jésus ne définisse pas clairement ce qu’est le Royaume des Cieux, mais qu’il choisisse d’en parler à travers différentes paraboles dévoilant chacune un aspect particulier du Royaume, suggère que celui-ci est déjà là, mais qu’en même temps, il n’est pas encore achevé. Cet achèvement du Royaume aura lieu à la fin des temps.

Que disent les paraboles que nous avons entendues ?

La première parabole est la parabole du trésor caché. Le trésor caché est une image de la Grâce, car celui qui trouve un trésor n’a rien fait pour le mériter. Et comme nous l’avons vu avec le texte de saint Paul, la grâce est un don gratuit de Dieu fait à l’humanité, alors que celle-ci n’a rien fait pour la mériter. Le texte nous dit à propos de celui qui a trouvé le trésor que « Dans sa joie, il va vendre tout ce quil possède, et il achète ce champ ».

Le Royaume des cieux suscite la joie, et appelle une réponse de la part de l’homme. Dans la parabole, celui qui a trouvé le trésor vend tout ce qu’il possède pour acheter le champ. Ce que Jésus veut nous dire, c’est qu’une fois qu’il a trouvé le Royaume, l’homme doit faire de celui-ci sa priorité.

Alors que dans la parabole du trésor caché le Royaume est immérité, dans la parabole de la perle, le Royaume est une quête, donc quelque chose qui dépend de notre responsabilité.

Nous avons vu dans la première lecture l’exemple de Salomon. Même s’il avait déjà un bon discernement, il a su dans l’humilité demander à Dieu dans la prière de lui accorder le don de la sagesse. De même nous-aussi, même si nous avons tout reçu de Dieu le jour de notre baptême, puisque Dieu s’est donné lui-même à nous, nous devons continuellement le solliciter pour lui demander son aide tout au long de notre vie.

Bref, si l’initiative première vient de Dieu et que l’homme n’a aucun mérite, celui-ci ne doit en revanche jamais se lasser de chercher Dieu.

Dans la dernière parabole, il est question d’un « filet que lon jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons ». Le premier enseignement de cette parabole est évident. Tout le monde est invité à faire partie du peuple de Dieu, à l’aimer, et à le laisser régner dans nos cœurs.

Dans la deuxième lecture, nous avons appris que nous sommes appelés à être configurés à l’image du Fils de Dieu. Cette configuration n’est malheureusement pas instantanée. C’est un processus qui prend du temps. Ceux qui sont plus avancés dans ce processus de configuration, ou plutôt ceux qui se croient plus avancés, peuvent avoir la tentation de vouloir faire le tri ; de vouloir purifier l’Église de tous ceux qu’ils pensent être plus mauvais qu’eux. Comme dans la parabole du bon grain et de l’ivraie que nous avons entendue dimanche dernier, Jésus nous rappelle qu’il ne nous appartient pas de faire ce tri, il ne nous appartient pas « de recueillir ce qui est bon et de rejeter ce qui est mauvais ». Le tri sera fait. Le texte est clair. Mais il ne sera pas fait par nous, mais par les anges à la fin des temps.

Notre mission en tant que disciples-missionnaires est de jeter encore et encore nos filets dans la mer, symbole des forces du mal, pour tirer d’autres hommes sur le rivage et les amener au Christ.

À l’exemple de Salomon, demandons le don de la sagesse véritable pour qu’elle nous aide à discerner en toute situation comment travailler plus efficacement à l’avènement du Royaume de Dieu. Amen !

[1] Nous pourrions encore citer encore bien d’autres textes.




« Les ouvriers sont peu nombreux » (Mt 9, 36 – 10, 8); d’après la réflexion du Père Luis CASASUS, Président des Missionnaires Identes.

« Jésus appela ses douze disciples et les envoya en mission » (Mt 9, 36 – 10, 8)

En ce temps-là, voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger. Il dit alors à ses disciples : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. » Alors Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir d’expulser les esprits impurs et de guérir toute maladie et toute infirmité. Voici les noms des douze Apôtres : le premier, Simon, nommé Pierre ; André son frère ; Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère ; Philippe et Barthélemy ; Thomas et Matthieu le publicain ; Jacques, fils d’Alphée, et Thaddée ; Simon le Zélote et Judas l’Iscariote, celui-là même qui le livra. Ces douze, Jésus les envoya en mission avec les instructions suivantes : « Ne prenez pas le chemin qui mène vers les nations païennes et n’entrez dans aucune ville des Samaritains. Allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël. Sur votre route, proclamez que le royaume des Cieux est tout proche. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons. Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. »

Mosaïque de la Basilique de Lisieux 

Ce texte ne laisse pas une très grande place à des interprétations sophistiquées : les ouvriers sont peu nombreux. Il s’agit d’une affirmation quantitative, arithmétique. Ce qui est pénible et constitue un défi. Personne ne conteste le fait que le nombre de vocations à la vie sacerdotale et religieuse diminue presque partout dans le monde. Ce qui est encore plus compliqué c’est que dans des régions où le nombre de vocations n’a pas chuté de façon spectaculaire, elles ne sont pas toutes authentiques et pures.

Déjà au temps du Christ, la situation était difficile. Il ne put envoyer que 12 disciples et ne réussit à en préparer 72 autres que plus tard. Visiter toutes les villes et villages de Galilée pour annoncer la Bonne Nouvelle était déjà une tâche écrasante, compte tenu de la taille de la population. Mais c’est un peu surprenant : Jésus lui-même n’a-t-il pas dit qu’il pouvait faire appel à son Père qui lui enverrait aussitôt douze légions d’anges pour l’aider (Mt 26, 53) ? S’il y a insuffisance d’ouvriers et qu’Il est capable d’en obtenir en demandant tout simplement l’aide du Père, comment se plaint-il en disant que les ouvriers sont peu nombreux ? Il semble y avoir quelque chose d’étrange.

Comme nous l’a dit un jour Fernando Rielo, il suffirait d’avoir un missionnaire authentique et zélé sur chaque continent pour déclencher une intense révolution spirituelle. Ce qui nous donne déjà un indice pour mieux comprendre ce que Jésus nous demande de faire : demander au propriétaire de la moisson d’envoyer davantage d’ouvriers pour sa moisson.

Cette demande ne signifie pas le simple fait de lever les yeux au ciel et de dire : « Père, il faut faire quelque chose ; il faut envoyer plus d’ouvriers, car le travail nous accable ». Le dialogue que nous devons entreprendre avec le Père peut se résumer en ces mots : « Père, la journée se termine. Je pense avoir tout donné aujourd’hui. Si ce n’est pas le cas, je te prie de me le faire savoir, puisqu’il me semble n’avoir rien d’autre à donner. Pardonne-moi si jamais je me trompe en croyant pouvoir te demander maintenant de toucher le cœur d’autres personnes meilleures que moi afin de se battre pour ton Règne. Je te promets que demain je continuerai à faire tout ce qui m’est possible ». Ces paroles sont un dialogue de faits et de mots. Je présente à Dieu le Père non seulement mes désirs, mais aussi les efforts réalisés. C’est l’aveu, audacieux mais sincère, du fait que je crois avoir fait le maximum possible.

C’est que pour son Royaume, Dieu a une logique autre que la nôtre. Pour émouvoir les cœurs, il attend de ses ouvriers qu’ils atteignent les frontières de leurs possibilités, comme cela s’est produit dans le miracle des cinq pains et des deux poissons ou encore, il y a de nombreuses années, dans la vie d’une jeune fille :

Alors que cette petite fille sanglotait à la porte d’une église, le prêtre la vit et lui demanda pourquoi elle pleurait. Elle lui dit : je ne peux pas aller au catéchisme aujourd’hui parce qu’il n’y a plus de places. Voyant que la jeune fille était échevelée et vêtue de haillons, le prêtre compris immédiatement la situation. La prenant par la main, il la conduisit dans la salle de classe et lui trouva une place. Dans l’après-midi, la fillette se souvint qu’elle avait pu assister au catéchisme en matinée et en fut très reconnaissante. Mais en pensant aux nombreux enfants qui n’ont pas pu venir rencontrer Jésus parce que l’église était trop petite, elle décida dans son cœur d’aider à construire une église plus grande. Après deux ans, elle tomba malade et mourut. Sa famille demanda au prêtre d’officier aux funérailles. Ils découvrirent qu’elle portait une bourse avec une note. La jeune fille y avait écrit : « C’est pour le Seigneur, pour agrandir notre petite église, afin que plus d’enfants puissent venir à l’église connaître et adorer Jésus ».

À l’intérieur de la bourse se trouvaient 57 cents. La jeune fille les collectionnait depuis deux ans. En lisant la note, le prêtre pleura. Pendant le culte, il raconta l’histoire de la bourse de la fillette et de son désir, puis encouragea les paroissiens à réaliser son vœu. Un journal eu vent de l’histoire de la jeune fille et la publia. Ayant lu l’article, un riche citoyen fut ému par l’histoire de la fillette et vendit à la paroisse un terrain au prix de 57 cents.

Pendant 5 ans, les paroissiens firent des dons et tous ceux qui étaient touchés par l’histoire envoyèrent de l’argent. Ses 57 cents devinrent une grosse somme d’argent et firent que l’on trouve aujourd’hui à Philadelphie une église de 3 300 places assises avec la photo d’une jeune fille souriante et de son offrande de 57 cents.

Seuls les ouvriers qui sont comme cette fille sont capables de rapprocher n’importe quel être humain de Dieu, émouvant même les plus indifférents ou les plus égoïstes. Elle est vraie, cette parole de Jésus qui dit que Son Royaume n’est pas de ce monde…

Cette méditation se clôture par un passage de l’Ancien Testament (Juges 6-8) qui permet de comprendre davantage le fait que les vrais apôtres ne sont pas simplement ceux qui travaillent dur, mais ceux qui se donnent complètement. Avant la bataille contre les Madianites, Yahveh dit au juge Gédéon qu’il avait trop de soldats et finit par lui en faire choisir seulement 300. Comprenons-nous de quel genre d’ouvriers manque l’Église ?

Emmanuel POLA, Missionnaire Identes, Yaoundé (Cameroun)




Tous créés pour accueillir gratuitement, par amour, le Don de l’Esprit Saint (D. Jacques Fournier)

Un jour, Jésus disait à ses disciples (Luc 11,5-13) :

« Si l’un de vous, ayant un ami,

        s’en va le trouver au milieu de la nuit, pour lui dire:

                 Mon ami, prête – moi trois pains,

(6)                   parce qu’un de mes amis m’est arrivé de voyage

                               et je n’ai rien à lui offrir,

(7) et que de l’intérieur l’autre réponde:

         Ne me cause pas de tracas;

                 maintenant la porte est fermée,

                         et mes enfants et moi sommes au lit;

                                je ne puis me lever pour te les donner

(8) je vous le dis,

             même s’il ne se lève pas pour les lui donner en qualité d’ami,

                     il se lèvera du moins à cause de son impudence

                              et lui donnera tout ce dont il a besoin.

(9)                  « Et moi, je vous dis:

                                   (a) demandez et l’on vous donnera;

                                               (b) cherchez et vous trouverez;

                                                          (c) frappez et l’on vous ouvrira.

(10)                            (a’) Car quiconque demande reçoit;

                                               (b’) qui cherche trouve;

                                                          (c’) et à qui frappe on ouvrira.

(11) Quel est d’entre vous le père auquel son fils demandera un poisson,

                 et qui, à la place du poisson, lui remettra (ἐπιδίδωμι) un serpent?

(12) Ou encore s’il demande un oeuf,

                  lui remettra-t-il un scorpion?

(13) Si donc vous, qui êtes mauvais,

                  vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

                           combien plus le Père du ciel

                                   donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent! »

Jésus va donc prendre des exemples de la vie quotidienne, au niveau des différentes relations entre les hommes, pour mieux introduire ses disciples dans une relation la plus confiante possible vis à vis de leur Père qui est au ciel. Remarquer d’ailleurs l’alternance significative entre les réalités de la « terre » et celles du « ciel » en 11,1-13.

Les v.5-8 nous présentent donc le premier exemple. Nous sommes dans le cadre « ami – ami », mais le contexte général va déjà nous introduire dans celui du v.13 où Jésus déclare tous ses auditeurs, et donc tous les hommes de tous les temps, comme étant « mauvais, méchants » :

1 – « L’un de vous », face à une visite imprévue, n’hésite pas à aller déranger en plein milieu de la nuit, et donc en plein milieu de son sommeil, un de ses amis. Luc décrit une telle attitude par le terme assez péjoratif de ἀναίδεια: « absence de pudeur, de retenue; insistance déplacée » (Carrez), « impudence, manque de pitié, ressentiment implacable » (Bailly). Néanmoins, la nécessité (éventuelle!) d’offrir à manger à son visiteur nous pousse à lui accorder quelques circonstances atténuantes…

2 – Son « ami », réveillé, semble lui répondre de son lit même, et il « rouspète », il rechigne à se déranger, à se lever, une réaction qui nous est bien commune… Si l’un est « impudent », l’autre est peu serviable et assez égoïste…

Néanmoins, face à l’insistance (supposée) de son « ami impudent », il va finir par se lever « afin de lui donner tout ce dont il a besoin », non pas par amitié, mais pour qu’il arrête de lui ‘casser les pieds’ ! La demande du premier est donc exaucée, malgré le climat général peu favorable du fait de l’égoïsme du second, c’est à dire du fait qu’il est « mauvais » pour reprendre ce terme que Jésus utilisera plus tard…

Ce contexte sert donc de contraste pour inviter à une prière confiante… En effet, si la demande précédente a été exaucée dans un tel contexte qui n’est pas celui d’un amour pur et sincère, combien plus (formule ici sous entendue, qui résulte du contraste et que Jésus emploiera explicitement au v.13) celle adressée à Dieu obtiendra-t-elle satisfaction, du fait de l’indéfectible bonté de Dieu, Lui qui est vraiment « L’ami des hommes »…

Remarquons au passage que le v.8c ne reprend pas explicitement la mention des « trois pains » mais emploie l’expression « donner tout ce dont il a besoin ». Reprenons le contraste évoqué précédemment: si « l’ami égoïste » a donné à son « ami impudent » « tout ce dont il a besoin », combien plus Dieu donnera « tout ce dont il a besoin » à celui qui le prie… et nous sommes ici dans le contexte très concret d’une demande de pain… Cette situation fait écho à une demande du Notre Père (11,3): « Donne-nous chaque jour notre pain quotidien« , et Dieu le donnera bien à celui qui le lui demande… Nous retrouvons et l’expression et la même idée dans l’invitation à s’abandonner à la Providence en 12,30, où il était aussi très concrètement question de nourriture et de vêtements, le nécessaire pour toute vie… :

Lc 12,29-32 : « Ne cherchez pas ce que vous mangerez et ce que vous boirez ; ne vous tourmentez pas. Car ce sont là toutes choses dont les païens de ce monde sont en quête; mais votre Père sait que vous en avez besoin. Aussi bien, cherchez son Royaume, et cela vous sera donné par surcroît. Sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père s’est complu à vous donner le Royaume.  »

La première partie, 9 (a), du principe général des versets 11,9-10, « demandez et il vous sera donné » est donc en lien direct avec la parabole précédente… Noter l’universalité chère à Luc, qui ouvre la perspective à « tout (homme) » en 9 (a’): « quiconque demande reçoit », au présent…

La deuxième partie, 9 (b), s’inscrit dans le cadre identique d’une confiance sans limite envers Dieu, mais il s’agit de « chercher », sans aucune précision… Devons‑nous chercher « nourriture et vêtement »? Non, d’après 12,29-31, car Dieu sait que nous en avons besoin pour vivre, et il assure à ceux qui lui obéissent qu’ils auront toujours le nécessaire en ce domaine. Ces mêmes versets nous renseignent sur ce qu’il faut chercher avant tout: « cherchez le Royaume de Dieu », et 12,32 affirme qu’il est déjà donné…

Ce thème de la recherche est d’ailleurs très important pour St Luc. En effet:

Mt

Mc

Lc

Jn

Ac

ζητέω, chercher

14

10

25

34

10

ἀναζητέω, chercher, rechercher

2

1

συζητέω, chercher ensemble, discuter

(Marc: se demander)

6

2

2

On peut classer les différents usages du verbe « chercher » en trois catégories principales:

1 – Le premier à chercher, c’est Dieu. En effet, en Lc 19,10 Jésus résume toute sa mission de sauveur en ces quelques mots : « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu ».

Ce terme « perdu », n’intervient, dans l’Evangile de Luc, qu’ici, en 19,10, et en Lc 15, dans deux des « trois paraboles de la miséricorde »:

– Le berger recherche sa brebis perdue (15,4.6).

– Le Père de l’enfant prodigue se réjouit car son fils qui était mort est revenu à la vie, il était perdu, il est retrouvé (15,24.32).

Dans la parabole de la drachme, on retrouve deux fois le même verbe conjugué, en 15,8 et 15,9, et il est dit que cette femme « cherchait avec soin » sa drachme perdue jusqu’à ce qu’elle la retrouve…

Telle est donc l’attitude de Dieu vis à vis de tout homme pêcheur : Il le cherche avec soin jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvé…

2 – La majorité des autres emplois du verbe « chercher » concerne une recherche en lien avec le Christ. Outre Lc 11,9-10 et Lc 12,29-31, nous avons:

        Lc 2,44.45.48.49 où, retournant de Jérusalem à Nazareth à l’occasion d’une fête de Pâque, Marie et Joseph recherchent Jésus âgé de 12 ans… Ne le trouvant pas dans la caravane des parents et des amis, ils reviennent à Jérusalem et le découvrent dans la maison de son Père… Qui cherche Jésus le trouve…

        Lc 4,42: Jésus est dans un endroit désert… Les foules le cherchent… et le trouvent, tant et si bien qu’elles veulent le retenir… Mais Jésus a été envoyé (sous entendu par Dieu) pour annoncer la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu… Il doit partir, car les autres villes doivent bénéficier « aussi » de cette Bonne Nouvelle… Qui cherche Jésus le trouve donc, et avec Lui le Royaume de Dieu…

        Lc 5,18: les porteurs du paralytique cherchent à l’introduire auprès de Jésus, et ils y parviennent… Qui cherche Jésus le trouve… et qui demande la guérison du corps, reçoit celle de tout son être par le pardon des péchés… Qui demande à Jésus le pardon de ses fautes le recevra de fait effectivement: Jésus est venu pour cela…

        Lc 6,19 : « Toute la foule cherchait à toucher Jésus, et la fin du verset suggère que tous y parvinrent, car Luc ajoute: « … parce qu’une force sortait de lui et les guérissait tous« … Qui cherche Jésus le trouve…

        Lc 9,9, Luc nous dit qu’Hérode cherchait à voir Jésus. En 23,8 « Hérode, en voyant Jésus, fut tout joyeux, car depuis assez longtempsil désirait le voir pour ce qu’il entendait dire de lui ». Mais sa recherche n’est pas pure… Hérode cherche un magicien, un prestidigitateur, il veut voir du merveilleux, « il espérait lui voir faire quelque miracle » (23,8), mais Jésus ne répond rien à toutes ses paroles… Qui cherche Jésus le trouve, mais qui cherche en Jésus ce que Jésus n’est pas ne trouve rien…

        Lc 11,16, où l’on retrouve une attitude identique à la précédente: certaines personnes présentes dans la foule « réclamaient de lui un signe venant du ciel pour le mettre à l’épreuve »… Réponse en 11,29:

« Cette génération est une génération mauvaise; elle demande un signe, et il ne lui sera donné que le signe de Jonas. Car, tout comme Jonas devint un signe pour les Ninivites, de même le Fils de l’Homme en sera (futur : certainement une allusion à la résurrection) un pour cette génération ».

Comme le précise une note de la TOB, la Personne même de Jésus et son action est toute entière « signe » de la Présence de Dieu au milieu des hommes. S’ils ne croient pas en écoutant les Paroles de Jésus ou à la vue des signes qu’il a déjà opérés, quoiqu’il fasse, ils ne croiront pas davantage… Jésus est donc tout entier « signe »… Ils demandent à Jésus un signe? Qui demande reçoit: ils l’ont en Jésus présent devant eux… Sauront‑ils reconnaître en Jésus le signe que Dieu leur donne, et qui est bien différent de ce à quoi ils s’attendaient?

        Lc 13,24 : à l’occasion d’une question portant sur le nombre de personnes qui seront sauvées, Jésus répond par l’image de la porte étroite:

« Luttez pour entrer par la porte étroite, car beaucoup, je vous le dis, chercheront à entrer et ne pourront pas ».

La perspective est essentiellement eschatologique. Le v.25 fait allusion à la résurrection : « Dès que le maître de maison se sera levé et aura fermé la porte, et que, restés dehors, vous vous serez mis à frapper à la porte en disant : Seigneur, ouvre-nous , il vous répondra : Je ne sais d’où vous êtes. »

Tout le temps après la résurrection est donc envisagé ici, et tout spécialement celui où chacun, au dernier jour, frappera à la porte du Royaume en demandant d’entrer… Le Seigneur répond, mais il est impossible à ceux qui font le mal d’entrer dans le Royaume de l’Amour où Dieu sera tout en tous… Si eux « commettent l’injustice », c’est qu’ils sont séparés de Dieu, étrangers à sa vie qui est communion dans l’Esprit, communion à son être même, d’où la réponse de Jésus: « Je ne sais d’où vous êtes »

Pour entrer dans le Royaume des cieux, il est donc nécessaire de rejeter tout ce qui porte la trace d’une injustice, de se détourner du mal et de se tourner vers Dieu, c’est à dire de se convertir en mettant effectivement en pratique la Parole de Jésus, ce qui suppose de l’avoir accueilli et d’avoir cru en lui…

La porte étroite est bien celle du Royaume de Dieu, qui est aussi le Royaume de Jésus: il est bien le « maître de maison » qui répond à ceux qui frappent à la porte, eux qui lui disent qu’ils ont mangé et bu devant lui, et entendu son enseignement sur les places (13,26). Nous rejoignons dans cette parabole la troisième partie de notre principe, 11,9 (c) sur laquelle nous reviendrons juste après…

Le mélange des temps des verbes, présent et futur, laisse entendre qu’il faut chercher dès maintenant à entrer dans le Royaume de Dieu, déjà présent au milieu des hommes, par la porte étroite, c’est à dire en essayant de ne pas commettre l’injustice, le mal étant incompatible avec le Royaume.

Relisons Lc 18,24-27 qui fait aussi allusion à une porte étroite, en faisant spécialement attention à la finale:

« En le voyant, Jésus dit : Comme il est difficile à ceux qui ont des richesses de pénétrer dans le Royaume de Dieu! Oui, il est plus facile à un chameau de passer par un trou d’aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu! Ceux qui entendaient dirent : Et qui peut être sauvé? Il dit : Ce qui est impossible pour les hommes est possible pour Dieu. »

La conversion n’est possible que par la force de Dieu… Il ne s’agit pas de multiplier les efforts de volonté pour se débarrasser définitivement de toute injustice, et avoir ainsi accès au Royaume de Dieu… Ceci est impossible à l’homme. Il s’agit plutôt de reconnaître sa faiblesse, d’accepter de ne pas arriver tout seul à pratiquer la justice, et de se présenter ainsi à Dieu tel qu’on est… C’est l’Esprit Saint qui a relevé Jésus d’entre les morts, et c’est ce même Esprit qui remportera en nous la victoire sur tous nos penchants mauvais, nous entraînant dans son dynamisme en nous offrant la possibilité d’agir selon la justice…

        Lc 19,3 nous présente Zachée « qui cherchait à voir qui était Jésus »… Or qui cherche Jésus de tout son coeur le trouve… Zachée petit de taille monte sur un sycomore pour apercevoir Jésus malgré la foule… et Jésus le voit et lui parle : « Zachée, descend-vite, car il me faut aujourd’hui demeurer chez toi ». Et vite il descendit et le reçut avec joie (19,5-6).

Zachée s’est ouvert à Jésus, il a obéi à sa Parole, il l’a accueilli chez lui et aussi dans son coeur; son désir de partager ses biens avec les pauvres et de rendre le quadruple à celui à qui il aurait pu avoir extorqué quelque chose le prouve. Notons bien que tout ceci est dit après la mention de l’accueil de Jésus chez Zachée, et c’est debout, dans l’attitude de la résurrection, que Zachée fait cette déclaration solennelle au Seigneur. Jésus ne peut que constater que « le salut est arrivé aujourd’hui pour cette maison » (19,9).

Ainsi, qui cherche Jésus le trouve, et qui l’accueille trouve en lui le salut qu’il est venu apporter aux hommes: salut qui est pardon des fautes passées et dynamisme d’amour et de partage qui va infiltrer toute la vie du croyant…

        Lc 24,5: la découverte du tombeau vide par les femmes: elles cherchent le corps de Jésus, elles cherchent ce Jésus qu’elles ont vu mourir sur la croix, mais cette fois-çi, elles ne trouveront rien (24,3). Par contre, elles vont trouver ce qu’elles ne cherchaient pas, deux hommes en habits éblouissants qui vont leur annoncer la résurrection du Christ (24,5-6): « Et tandis que, saisies d’effroi, elles tenaient leur visage incliné vers le sol, ils leur dirent : Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts? Il n’est pas ici; mais il est ressuscité. »

Maintenant, seule la foi leur permettra de trouver sa présence dans leur vie…

     Le verbe « chercher » avec Jésus pour objet apparaît encore quatre fois dans les récits précédents la passion, en 19,47; 20,19; 22,2 pour décrire les Grands Prêtres, et les scribes qui « cherchaient » à porter la main sur Jésus afin de le tuer. Lc 22,6 montrera enfin Judas « cherchant » une occasion favorable pour le livrer…

3 – Deux textes utilisent enfin le verbe « chercher » appliqué à Dieu, mais cette fois vis à vis de la réponse qu’Il attend, avec une infinie patience, de la part l’homme:

Lc 12,48 : « Quant à celui qui, sans la connaître, aura par sa conduite mérité des coups, il n’en recevra qu’un petit nombre. À qui on aura donné beaucoup il sera beaucoup demandé, et à qui on aura confié beaucoup on réclamera davantage. »

Lc 13,6-9: « Il disait encore la parabole que voici : Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint y chercher des fruits et n’en trouva pas. Il dit alors au vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher des fruits sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le; pourquoi donc use-t-il la terre pour rien? L’autre lui répondit : Maître, laisse-le cette année encore, le temps que je creuse tout autour et que je mette du fumier. Peut-être donnera-t-il des fruits à l’avenir… Sinon tu le couperas . »

L’étude de ce verbe « chercher » en St Luc nous a ainsi conduit à découvrir trois étapes successives et complémentaires dans l’Histoire du Salut:

1 – C’est tout d’abord Dieu Lui-même en Jésus Christ qui part à la recherche de l’homme perdu, jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvé. Ces retrouvailles entre Dieu et l’homme constituent pour ce dernier « le salut », le passage de la mort à la vie (cf Lc 6,9), une joie et une fête pour son Dieu et Père (Lc 15)…

2 – Le bien réel et suprême de tout homme est alors Jésus Christ Lui‑même, « venu pour chercher et sauver ce qui était perdu ». La recherche par excellence est donc celle qui se focalise sur la Personne de Jésus, et la certitude de le trouver s’enracine dans le fait que c’est Dieu qui le premier est « parti », avec Lui et en Lui, à notre recherche. Qui cherche Jésus de tout son coeur ne peut donc que le trouver… Il est impossible qu’il en soit autrement…

En trouvant Jésus, il trouvera le salut, c’est à dire le pardon de ses péchés, la restauration de sa relation avec Dieu qui est en fait un retour à la vie et qui peut être décrite en terme d’entrée dans le Royaume de Dieu… d’où l’appel à chercher le Royaume (12,31)…

 

3 – Accueillir le Christ, son salut, le Royaume de Dieu, c’est donc vivre en relation avec ce Dieu qui ne peut commettre l’injustice… L’accueil de Dieu en son coeur est ainsi simultanément et nécessairement un rejet de tout mal pour une vie tournée vers le bien, et telle est l’aventure de notre conversion quotidienne : « L’homme bon, du bon trésor de son coeur, tire ce qui est bon » (Lc 6,45) Cette nécessité est décrite en St Luc en terme d’attente, d’espérance et de recherche de la part Dieu d’une réponse (l’éthique) de l’homme qui s’inscrive petit à petit et toujours davantage dans la dynamique des dons reçus, à l’exemple de Zachée…

La troisième partie de notre texte, Lc 11,9 (c), invite à frapper (sous entendu, à la porte) dans la certitude que celle-çi s’ouvrira… Le contexte de la relation à Dieu invite donc, dans les termes mêmes de l’image, à comprendre cette porte comme étant celle de la maison de Dieu (Jn 14,2), c’est à dire du Royaume de Dieu (Mc 1,15)… Nous retrouvons par ce parallélisme l’équivalence entre la recherche de Jésus et la recherche du Royaume, le seul bien véritable débouchant sur la vie éternelle (10,25; 18,18.30). L’image du « Royaume de Dieu » en effet renvoie à un Mystère de Communion avec Lui dans l’unité d’un même Esprit (Rm 14,17; Ep 4,3), et donc d’une même vie (Jn 6,63; 2Co 3,6; Mc 9,43.45.47).

Le verset 10 reprend en parallèle le verset 9 avec une précision supplémentaire: outre l’insistance, les verbes du v.10 sont au présent, évoquant le « déjà là » du Royaume:

9 « Demandez et l’on vous donnera… » 10 « Le demandant reçoit »…

« Cherchez et vous trouverez… » »Le cherchant trouve… »

« Frappez et on vous ouvrira… » »Au frappant on ouvre… »

Les versets 11 et suivant développent une nouvelle image, celle d’un père et de son fils. Ce dernier lui demande de la nourriture, poisson ou oeuf, c’est à dire ce qui lui permettra de vivre… A travers le poisson ou l’oeuf, c’est la vie qui est visée. Son père va-t-il répondre à sa demande en lui offrant ce qui pourrait le conduire à la mort, un serpent ou un scorpion? Certainement pas… Or tout homme étant pêcheur, c’est à dire « mauvais », c’est à dire encore peu préoccupé du bien de celles et ceux qui l’entourent, malgré cela, le père se préoccupe de la vie de son enfant… Combien plus le Père du ciel qui Lui est bon (6,35 ; 18,19), donnera-t-il lui aussi ce qui conduit à la Vie, à la Vie éternelle: l’Esprit Saint « qui vivifie » (Jn 6,63; 4,10-14; 7,37-39; 2Co 3,6; Rm 8,2; Ga 5,25).

Luc a ainsi compris que Dieu ne pouvait pas nous donner plus que l’Esprit Saint, car avec ce don, Dieu offre à l’homme ce que l’homme lui-même n’aurait certainement jamais osé demander: toutes les richesses et toutes les virtualités de son être (cf. 2P 1,4), ainsi que la possibilité concrète de réaliser sa vocation: vivre uni à Lui dans la paix et l’amour. L’Esprit Saint résume, englobe tous les dons que Dieu veut faire à l’homme… En nous donnant l’Esprit Saint, Dieu nous donne tout… Et ce n’est que dans l’accueil de ce Don que nous trouverons le seul vrai bonheur qui dure : nous avons tous été créés pour cela…

Demandez l’Esprit Saint, et il vous sera donné, car le Père du ciel donne l’Esprit Saint à tout homme qui le lui demande (11,13)… Cherchez le Christ et vous le trouverez, car le Père a envoyé (4,18; 4,43) le Fils de l’Homme chercher et sauver ce qui était perdu (19,10)… Frappez à la porte du Royaume de Dieu, et elle s’ouvrira, var votre Père du ciel s’est complu à vous donner ce Royaume (12,32). Le Royaume de Dieu est en effet arrivé jusqu’à nous en la personne de Jésus Christ, car ce dernier chasse les esprits mauvais par le doigt de Dieu, c’est à dire l’Esprit de Dieu (11,20), et ce même Esprit nous est donné…

                                                                                                           D. Jacques Fournier