« Les entrailles de Miséricorde de notre Dieu » (Conseil Diocésain de Pastorale).

Cette expression nous vient directement de St Luc quand il nous rapporte ce que Zacharie déclara au jour de la circoncision de son fils, Jean‑Baptiste.

I – Nous commencerons donc par relire ces lignes du « Cantique de Zacharie » que nous connaissons tous et nous verrons le sens de ce mot « entrailles ».

II – Puis, à partir de quelques textes de l’AT, nous redirons avec le Pape François le cœur de notre foi : « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16 ; NT !).

III – Nous verrons que cet Amour inconditionnel et éternel ne cesse de prendre le visage de la Miséricorde, pour nous, pécheurs…

IV – Et nous terminerons, en constatant à l’aide de quelques textes du NT, que non seulement Dieu ne cesse d’aimer ceux qui font le mal, mais qu’en plus, leur situation personnelle le bouleverse au plus profond de lui-même : en effet, celui qui fait le mal ne peut que se plonger lui-même dans la souffrance, et voir un seul de ses enfants souffrir, voilà ce qui bouleverse le cœur de Dieu… Dans le respect de notre liberté, il ne pourra alors que nous presser à cesser de faire ce mal qui nous détruit, pour nous inviter à apprendre, petit à petit, avec Lui et grâce à Lui, de Miséricorde en Miséricorde, à faire ce bien qui nous construit, et qui ne peut en fait qu’être l’expression d’un cœur comblé par ce « Dieu Amour », « qui se donne gratuitement » (Pape François). Le fruit de ce Don gratuit, pour celles et ceux qui accepteront de le recevoir, sera alors un cœur comblé, renouvelé, ‘recréé’, enfanté à une vie nouvelle par ce Dieu Père qui nous aime, infiniment, avec toute la tendresse d’une Mère…

  I – Commençons donc par relire ces lignes de ce Cantique que Zacharie adresse à son fils Jean-Baptiste :

« Et toi petit enfant, tu seras appelé prophète du Très‑Haut ; car tu marcheras devant le Seigneur pour lui préparer les voies, pour donner à son peuple la connaissance du salut, par le pardon de ses péchés, grâce aux entrailles de Miséricorde de notre Dieu (διὰ σπλάγχνα ἐλέους θεοῦ ἡμῶν) dans lesquelles nous a visités l’Astre d’en Haut, pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et l’ombre de la mort, pour redresser nos pas au chemin de la paix » » (Lc 1,76-79).

Le mot « entrailles » traduit le grec « σπλάγχνα », pluriel de « σπλάγχνon ». Le dictionnaire Grec – Français « Bailly » donne pour « σπλάγχνon » (BAILLY M.A., « σπλάγχνon« , Dictionnaire Grec-Français (Paris 1930) p. 1779) :

« les entrailles » : 

I – Au propre :

                      1 – Les viscères principaux – cœur, poumon, foie – de l’homme ou des animaux (Il s’agit donc, très, très concrètement… des tripes…).

                       2 – Le sein de la mère (Soulignons cette connotation maternelle, et le fait que ce « sein de la mère » est le lieu de l’enfantement, de la création).

II – Au figuré :

                        1 – Le cœur, l’âme, comme siège des affections.

                         2 – Entrailles, cœur, âme, terme de tendresse.

red rose

  Le P. Ceslas Spicq écrit à ce sujet : « Dès le Vè-IVè siècle av JC, les σπλάγχνα désignent les « intérieurs » d’une victime immolée, que les règlements cultuels mentionnent parmi le casuel des prêtres, si bien que le verbe correspondant signifiera « consommer les entrailles ». Il s’agit, bien entendu, des parties nobles, car le mot s’applique aussi à l’homme, où l’on compte sept viscères : « l’estomac, le cœur, le poumon, la rate, le foie et les deux reins » (Philon d’Alexandrie, 25 av JC – 50 ap JC). Mais le mot s’étend aux intestins, au ventre, sans aucune précision physiologique ». En Ac 1,18, Luc rapporte la mort de Judas : « Cet homme est tombé la tête la première et il a éclaté par le milieu, et toutes ses entrailles se sont répandues, καὶ ἐξεχύθη (de ἐξ-χέω, verser hors de…, répandre) πάντα τὰ σπλάγχνα αὐτοῦ. ».

« On localise les sentiments dans les entrailles – puisqu’elles sont ce qu’il y a de plus intime et caché (Pr 26,22 ; Ps 22,15) – et elles sont alors synonymes de ce que nous appelons aujourd’hui « le cœur ». Ainsi, « les entrailles du père sont bouleversées à chaque cri de son fils » (Si 30,7)… Dans la Bible, les entrailles (hébreu : rahamîm) sont le siège de la compassion (Gn 43,30 ; 1R 3,26). Le singulier réhém en effet, désigne l’utérus, le sein maternel » ; de sorte que les entrailles sont d’abord le siège de la pitié de la mère pour ses enfants (Is 49,15), et l’on dit qu’elles frémissent (Is 16,11), résonnent et font du bruit (Is 43,15), bouillonnent (Lam 1,20) ou sont en ébullition (Job 30,27).

 

Soulignons trois textes de l’Ancien Testament :

1 – Is 63,15-17 : « Regarde du ciel et vois, depuis ta demeure sainte et glorieuse.

Où sont ta jalousie et ta puissance ?

Le frémissement de tes entrailles et tes tendresses (rahamîmH) pour moi

se sont-ils contenus ?

(LXX : ποῦ ἐστιν τὸ πλῆθος τοῦ ἐλέους σου καὶ τῶν οἰκτιρμῶν σου

Où sont la plénitude de ta miséricorde et tes compassions)

Paris Surréalistes+annexesPourtant tu es notre Père… (Hqui aime d’un amour maternel)

Toi, Yahvé, tu es notre Père, notre rédempteur,

tel est ton nom depuis toujours. »

 

 2 – Jr 31,20 : « Je l’aime, oui je l’aime, oracle du Seigneur » (avec une nuance de tendresse maternelle).

3 – Ex 34,6 (TOB) :

Moise-buisson-ardent« Le Seigneur passa devant Moïse et proclama :

Le Seigneur, le Seigneur, Dieu miséricordieux (H) et bienveillant,

lent à la colère, plein de fidélité et de loyauté ».

LXX (34,6; la Septante, traduction grecque de l’AT (3° s ac JV ; Alexandrie):

Κύριος ὁ θεὸς οἰκτίρμων καὶ ἐλεήμων,

Seigneur Dieu compatissant (ou miséricordieux, les deux sens du Bailly) et

miséricordieux (ou compatissant, à nouveau les deux sens du Bailly).

μακρόθυμος καὶ πολυέλεος καὶ ἀληθινὸς.

           patient et « plein de miséricorde » et vrai (Bailly : véridique, sincère, vrai, réel).

Le Pape François fait allusion à ce dernier texte lorsqu’il écrit au tout début de la Bulle d’indiction de l’année Jubilaire de la Miséricorde (11 avril 2015) :

« Jésus Christ est le visage de la miséricorde du Père. Le mystère de la foi chrétienne est là tout entier. Devenue vivante et visible, elle atteint son sommet en Jésus de Nazareth. Le Père, « riche en miséricorde » (Ep 2, 4), après avoir révélé son nom à Moïse comme « Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité » (Ex 34, 6) n’a pas cessé de faire connaître sa nature divine de différentes manières et en de nombreux moments ».

 

II – Le cœur de notre foi : « Dieu est Amour »

 « Il n’a pas cessé de faire connaître sa nature divine », c’est-à-dire ce qu’Il Est en Lui-même de toute éternité. Et nous retrouvons ici le cœur de notre foi. Le Pape François écrit d’ailleurs un peu plus loin (& 8): « Le regard fixé sur Jésus et son visage miséricordieux, nous pouvons accueillir l’amour de la Sainte Trinité. La mission que Jésus a reçue du Père a été de révéler le mystère de l’amour divin dans sa plénitude. L’évangéliste Jean affirme pour la première et unique fois dans toute l’Ecriture : « Dieu est amour » (1 Jn 4,8.16). Cet amour est désormais rendu visible et tangible dans toute la vie de Jésus. Sa personne n’est rien d’autre qu’amour, un amour qui se donne gratuitement. Les relations avec les personnes qui s’approchent de Lui ont quelque chose d’unique et de singulier. Les signes qu’il accomplit, surtout envers les pécheurs, les pauvres, les exclus, les malades et les souffrants, sont marqués par la miséricorde. Tout en Lui parle de miséricorde. Rien en Lui ne manque de compassion. »

Dieu-Amour« Dieu est amour », « un amour qui se donne gratuitement » pour le seul bien de la personne aimée. En tout ce qu’Il Est, « Dieu est amour » depuis toujours et pour toujours. Il ne sait donc faire qu’une seule chose : « aimer ». Or, aimer quelqu’un, c’est vouloir son bien et tout mettre en œuvre pour l’atteindre. « La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous voir heureux, remplis de joie et de paix » (Pape François & 9). Voilà ce que Dieu veut pour tout homme sur cette terre, quel qu’il soit, car tous ont été créés par Lui « à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28), tous sont filles et fils d’un seul et même Père… « Nous sommes aussi de sa race », dit St Paul aux philosophes d’Athènes en citant l’un d’entre eux, Aratus, poète du 3° s av JC, originaire de Cilicie.

Jr 31,37-41 : « Je vais les rassembler (…), et je les ferai demeurer en sécurité… Je conclurai avec eux une alliance éternelle : je ne cesserai pas de les suivre pour leur faire du bien… Je trouverai ma joie à leur faire du bien,… de tout mon cœur et de toute mon âme. »

Et comment Dieu se propose-t-il de « nous faire du bien » ? En nous comblant de ses bienfaits. Et quels sont-ils ? Rien de moins que ce qu’Il Est en Lui-même… La volonté de Dieu sur toute l’humanité, sans aucune exception, est que nous partagions tous sa Plénitude de vie, de paix, et de joie… C’est ce que Jésus, vrai Dieu et vrai homme, ne cesse de nous dire : « De même le Père, qui est vivant, m’a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi… Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix… Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 6,57 ; 14,27 ; 15,11).

Esprit SaintEt Dieu ne peut pas nous donner plus que ce qu’Il Est en Lui-même… « Dieu Est Esprit » (Jn 4,24) ? « Recevez l’Esprit Saint » dit le Ressuscité à ses disciples (Jn 20,22), et « le fruit de l’Esprit est amour, joie, paix » (Ga 5,22).

« « Dieu est amour » (1 Jn 4,8.16), un amour qui se donne gratuitement », dit le Pape François. Et un peu plus loin, il ajoute : « Dans la miséricorde, nous avons la preuve de la façon dont Dieu nous aime. Il se donne tout entier, pour toujours, gratuitement, et sans rien demander en retour » (& 14). Ce que Dieu donne gratuitement, par amour, c’est en effet ce qu’Il Est tout entier, depuis toujours et pour toujours. Et « Dieu est Esprit » (Jn 4,24), et « Dieu est Saint » (Lv 11,44-45 ; 17,1 ; 19,2). Il s’agit donc du Don de l’Esprit Saint, le Don de ce qu’il Est en Lui-même. Et par ce Don de « l’Esprit qui sanctifie » (2Th 2,13), nous sommes tous appelés à devenir pleinement, selon notre condition de créature, ce que Dieu Est de toute éternité ! Il ne peut y avoir de vocation plus grande, plus belle… Et c’est ce que Dieu veut pour tout homme… Or, nous dit le Psalmiste : « Tout ce que veut le Seigneur, il le fait » (Ps 135(134),6 ; 115(114),3). Et comment le fait-il ? En donnant gratuitement, par amour, ce qu’il Est en Lui-même depuis toujours et pour toujours : le Don de l’Esprit Saint…

III – Pour nous, pécheurs, l’Amour prend le visage de la Miséricorde

Ez 36,24-27 : (Vous qui avez profané mon Nom et qui avez été dispersés par suite de vos fautes), « je vous rassemblerai, je vous ramènerai vers votre sol…

Je verserai sur vous une eau pure et vous serez purifiés ;

de toutes vos souillures et de toutes vos ordures je vous purifierai.

Et je vous donnerai un cœur nouveau,

je mettrai (En hébreu comme en grec : je donnerai…) en vous un esprit nouveau,

j’enlèverai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair.

Je mettrai (je donnerai) mon Esprit en vous

et je ferai que vous marchiez selon mes lois

et que vous observiez et pratiquiez mes coutumes. »

BaptemeLe Don de l’Amour, répété ici quatre fois, devient donc, pour le pécheur souillé, « une Eau Pure » qui le « purifie de toutes ses ordures »… Toutes, sans aucune exception, dès lors que l’on accepte de les présenter à Dieu, et de le laisser agir…

Et si le pécheur, privé du Don de l’Amour, et donc d’une Plénitude de Vie, fait l’expérience d’un état de mort intérieure, ce Don qui lui est toujours fait, envers et contre tout, sera pour lui « Eau Vive » « qui vivifie »… C’est ce qu’affirme Ezéchiel au chapitre suivant, en montrant Dieu agissant pour des morts enfermés dans leurs tombeaux, réduits à l’état de squelette, et donc, ne pouvant vraiment plus rien faire par eux-mêmes ! Tout ce qui arrivera pour eux ne pourra donc qu’être le fruit de l’initiative gratuite de l’Amour, et du Don tout aussi gratuit de l’Amour :

Ez 37,4-14 : « Ossements desséchés (et donc en manque d’eau), écoutez la parole du Seigneur.

Ainsi parle le Seigneur Dieu à ces ossements.

Voici que je vais faire entrer en vous l’Esprit et vous vivrez…

Ainsi parle le Seigneur Dieu. Voici que j’ouvre vos tombeaux ;

je vais vous faire remonter de vos tombeaux, mon peuple,

et je vous ramènerai sur votre sol.

resurrection2Vous saurez que je suis le Seigneur,  

lorsque j’ouvrirai vos tombeaux 

et que je vous ferai remonter de vos tombeaux, mon peuple.          

Je mettrai (Je donnerai) mon Esprit en vous et vous vivrez,        

et je vous installerai sur votre sol, et vous saurez que moi, le Seigneur,

j’ai parlé et je fais, oracle du Seigneur » (cf. (Ps 135(134),6 ; 115(114),3).

 

Cette gratuité, nous la retrouvons dans le discours de Jésus sur la Montagne, lorsqu’il disait aux foules rassemblées autour de lui :

Mt 5,43-45 : « Vous avez entendu qu’il a été dit :

Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi.

Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs,

afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux,

car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons,

et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. »

Fleurs...« Dieu est Esprit » (Jn 4,24) ? « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) ? « Le Seigneur fait donc lever son soleil sur les méchants et sur les bons » en donnant la Lumière de l’Esprit aux méchants comme aux bons… « Le Seigneur Dieu est un soleil, il est un bouclier ; le Seigneur donne la grâce », « l’Esprit de la grâce » (Hb 10,29), « il donne la gloire », « l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu » (1P 4,14) . « Jamais il ne refuse le bonheur à ceux qui vont sans reproche » (Ps 84(83),12), c’est-à-dire à ceux qui demeurent, de cœur, tournés vers Lui, dans la force comme dans la faiblesse… En effet, « heureux les pauvres de cœurs, car le Royaume des Cieux est à eux ». Pourquoi ? « Parce que votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume » (Lc 12,32). Et quelle réalité se cache derrière ce mot « Royaume » ? Un Mystère de Communion « dans l’unité d’un même Esprit » (Ep 4,3 ; 2Co 13,13), cet Esprit donné gratuitement à tous par l’Amour : « Le règne de Dieu », le Royaume des Cieux, « n’est pas affaire de nourriture ou de boisson, il est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint » (Rm 14,17).

Césarée de PhilippeNous avons vu comment Dieu « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons ». Et lorsque Jésus ajoute « et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes », il redit la même chose avec, cette fois, non plus l’image de la lumière, mais celle de l’eau. En effet, Dieu est souvent évoqué dans la Bible avec l’image d’une source : « Ils m’ont abandonné, moi, la Source d’Eau vive », dit-il en Jérémie (Jr 2,13 ; 17,13). Dieu est ainsi « Source d’Eau Vive », Don de l’Eau Vive et Pure de son Esprit (Jn 7,37-39), une Eau Vive qui « tombe en pluie sur les justes » pour les vivifier, les combler, leur offrir la Plénitude même de Dieu, une Eau Pure qui « tombe en pluie sur les injustes » pour les inviter, en frappant à la porte fermée de leur cœur (Ap 3,20), à lui ouvrir, à se tourner vers Lui de tout cœur. Alors, cette Eau Pure les purifiera de toutes leurs ordures, et leur permettra d’accueillir à leur tour la Plénitude de la vie éternelle… Notons avec ces images que nul homme sur cette terre n’est « juste » au sens de « sans péché »… « Tous sont soumis au péché… Il n’est pas de juste, pas un seul… Il n’est donc pas question de l’homme qui veut ou qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde. » Ainsi, nous sommes tous « des vases de miséricorde que Dieu a d’avance préparés pour sa Gloire » en les appelant à se tourner vers Lui de tout cœur, tels qu’ils sont, avec toutes leurs blessures et leurs misères, pour se laisser remplir par le Don de Dieu, le Don de « l’Esprit de Gloire, l’Esprit de Dieu » (Rm 3,9-26 ; 9,16 ; 9,23 ; 1P 4,14).

Nous sommes tous, en effet, des pécheurs qui avons continuellement besoin d’être pardonnés, lavés, relevés, fortifiés, soutenus… « La miséricorde, c’est le chemin qui unit Dieu et l’homme, pour qu’il ouvre son cœur à l’espérance d’être aimé pour toujours malgré les limites de notre péché », écrit notre pape François (&2). Et souvenons-nous du jour de son élection, le 13 mars 2013. Le Cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, écrit ainsi dans la préface du Livre du Pape François, « Amour, Service et Humilité » : « Aussitôt connus les résultats du cinquième scrutin du Conclave que nous venons de vivre, le Cardinal Bergoglio avait à répondre aux deux questions rituelles qui marquent la fin du Conclave et la levée du secret : « Acceptes-tu ton élection ? » et « Quel nom choisis-tu ? ». A la première, il a répondu : « Je suis pécheur et j’en ai conscience, mais j’ai une grande confiance dans la Miséricorde de Dieu. Puisque vous m’avez élu ou, plutôt, puisque Dieu m’a choisi, j’accepte. » »

Logo année de la Miséricorde

Ainsi, « Dieu veut faire miséricorde à tous » (Rm 11,32), « il veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4), « et tout ce que veut le Seigneur il le fait » (Ps 115,3 ; 135,6). « Il le fait », très concrètement, en donnant la Plénitude de son Esprit à tout homme, pour son seul bien, gratuitement, par amour… Et c’est ainsi que le Dieu qui, éternellement, est Amour, prend pour nous, pécheurs, le visage de la Miséricorde, car au cœur de notre misère, nous sommes tous invités à faire l’expérience que Dieu, de son côté, n’a jamais cessé de nous aimer, et donc de se donner à nous, gratuitement, par amour…

 

IV – Ces entrailles de Miséricorde sont aussi « compassion » pour le pécheur.

En effet, si Dieu nous a tous créés pour être remplis par ses bienfaits, connaître la Plénitude de sa Vie, participer à sa Lumière et à sa Gloire, le péché qui est abandon de Dieu, fermeture à Dieu, repli sur soi, ne peut que nous priver de tous ces dons… « Tous ont péché et sont privés de la Gloire de Dieu » (Rm 3,23).

Or, être privé de ce pour quoi nous avons été faits ne peut qu’être synonyme de souffrance, de mal être, de pleurs, de tristesse… « Souffrance et angoisse à toute âme humaine qui s’adonne au mal » (Rm 2,9).

Et le cœur de Dieu est bouleversé de compassion lorsqu’il voit un homme, un de ses enfants, souffrir, et cela quelque soit l’origine de sa souffrance, qu’il en soit responsable ou pas…

Logo année de la Miséricorde - détailOs 11,7-8 : « Mon peuple est cramponné à son infidélité.

On les appelle en haut, pas un qui se relève !

Comment t’abandonnerais-je, Éphraïm, te livrerais-je, Israël ?

Mon cœur en moi est bouleversé, toutes mes entrailles frémissent ».

Et la Bible de Jérusalem écrit en note : « Le mot « bouleversé » est très fort ; précisément celui qui est employé à propos de la destruction des cités coupables, (Gn 19,25; Dt 29,22) », conséquence de leurs péchés… Osée laisse entendre que ces conséquences désastreuses sont « comme vécues d’avance dans le cœur de Dieu. Cf. le cri de David à la mort d’Absalom, son fils (2S 19, 1) », qui pourtant s’était réjoui à l’avance de la mort de son père en accueillant le piège qu’Ahitophel voulait lui tendre (2S 17,1-4).

prodigueNous l’avons vu avec Osée, si l’homme est responsable de ses souffrances par suite du mal qu’il commet, Dieu, dans son Amour, ne peut que le presser à abandonner ce qui, en fait, malgré les apparences peut-être contraires, le plonge dans le mal être et la souffrance… Son seul désir est alors de tout nous pardonner, car Dieu ne regarde pas la faute en elle même, mais les conséquences de cette faute dans le cœur et la vie de celui qui l’a commise. Et encore une fois, son seul désir est de voir sa créature comblée par sa propre Plénitude. Alors, le premier cadeau qu’il fera au pécheur, sera le pardon de toutes ses fautes, et cela dans une attitude de Joie ( Lc 15 ; Rm 12,8) qui sera au même moment consolation (2Co 1,3-7 avec notes BJ), réconfort, encouragement pour celui qui accepte de répondre ainsi à l’Amour… En Lc 15, « Dieu est toujours présenté comme rempli de joie, surtout quand il pardonne » écrit le Pape François, car il ne poursuit que le bien de tous les hommes qu’il aime (Lc 2,14), et il se réjouit de voir ce « bien » triompher dans leur cœur et dans leur vie. « Nous y trouvons le noyau de l’Evangile et de notre foi », poursuit le Pape François, « car la miséricorde y est présentée comme la force victorieuse de tout, qui remplit le cœur d’amour, et qui console en pardonnant ».

« Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu, parlez au cœur de Jérusalem et criez-lui que son service est accompli, que sa faute est expiée, qu’elle a reçu de la main du Seigneur deux fois le prix de toutes ses fautes » (Is 40,1), deux fois le prix de tout ce qu’elle aurait dû dépenser à l’époque pour acheter les animaux prescrits par la Loi et les offrir en sacrifices pour le pardon de ses péchés… Déjà, avec cette image d’Isaïe, nous avons la réalité de la surabondance de la Miséricorde de Dieu si bien exprimée par St Paul : « Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » (Rm 5,20). « En lui », le Christ, « nous trouvons la rédemption, par son sang, la rémission des fautes, selon la richesse de sa grâce, qu’Il nous a prodiguée, en toute sagesse et intelligence » (Ep 1,7)… « Je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait en surabondance » (Jn 10,10).

 

st jeanFace à toute souffrance, fut-elle provoquée par le mal, la seule attitude de Dieu est donc de consoler, réconforter, encourager, et inviter au repentir si cela est nécessaire… « J’entendis alors une voix clamer, du trône : Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure avec eux ; ils seront son peuple, et lui, Dieu‑avec-eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n’y en aura plus; de pleur, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé » (Ap 21,3-4 ; cf. 2Co 1,3-7).

 Et cette réaction de Dieu est très concrètement manifestée dans les Evangiles chaque fois que le Christ est en relation avec des personnes qui souffrent… Notre verbe correspondant à « σπλάγχνα », écrit le P. Ceslas Spicq, est ainsi employé « trois fois pour Dieu (Mt 18,27 ; Lc 1,78 ; 15,20), une fois pour le bon Samaritain, et neuf fois pour le Christ, et cela presque toujours pour rendre compte de son intervention miraculeuse… Il s’agit d’abord d’une émotion physique, d’une authentique compassion devant l’état misérable du prochain (Lc 10,33), littéralement d’un mouvement des entrailles, suscité par la vue (Lc 7,13 ; 10,33 ; 15,20). Traduire le passif ™splagcn…sqh : « il eut pitié » serait donc presque un contre-sens ; « il fut pris (ou saisi) de pitié » serait meilleur ; le sens exact est : « il ressentit une viscérale compassion »[2]. Le Pape François écrit : « La miséricorde de Dieu n’est pas une idée abstraite, mais une réalité concrète à travers laquelle Il révèle son amour comme celui d’un père et d’une mère qui se laissent émouvoir au plus profond d’eux mêmes par leur fils. Il est juste de parler d’un amour « viscéral ». Il vient du cœur comme un sentiment profond, naturel, fait de tendresse et de compassion, d’indulgence et de pardon » (& 6).

Regardons les textes où le Christ intervient. « Ce qui animait Jésus en toute circonstance n’était rien d’autre que la miséricorde avec laquelle il lisait dans le cœur de ses interlocuteurs et répondait à leurs besoins les plus profonds » (Pape François &8).

1 – Mc 1,40-45 (v. 41) : « Un lépreux vient auprès de lui ; il le supplie et, tombant à ses genoux, lui dit : « Si tu le veux, tu peux me purifier. » (41) Saisi de compassion, Jésus (Ἰησοῦς σπλαγχνισθείς) étendit la main, le toucha et lui dit : « Je le veux, sois purifié. » (42) À l’instant même, la lèpre le quitta et il fut purifié. (43) Avec fermeté, Jésus le renvoya aussitôt (44) en lui disant : « Attention, ne dis rien à personne, mais va te montrer au prêtre, et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi : cela sera pour les gens un témoignage. » (45) Une fois parti, cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle, de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville, mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. De partout cependant on venait à lui. »

Pape François embrasse un malade

2 – Mc 6,30-44 (v. 34) : « Les Apôtres se réunirent auprès de Jésus, et lui annoncèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné. (31) Il leur dit : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux, et l’on n’avait même pas le temps de manger. (32) Alors, ils partirent en barque pour un endroit désert, à l’écart. (33) Les gens les virent s’éloigner, et beaucoup comprirent leur intention. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux. (34) En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, καὶ ἐσπλαγχνίσθη ἐπ’ αὐτοῖς, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement. »

Jésus voit « qu’ils étaient comme des brebis sans berger ». Alors, « bouleversé jusqu’au plus profond de lui-même », il agit en Pasteur qui guide son troupeau par sa Parole, au son de sa voix, « et il se mit à les enseigner longuement ». Ce « longuement » souligne sa générosité. Il répond toujours à tous nos besoins en surabondance… « Mon Dieu comblera tous vos besoins, selon sa richesse, avec magnificence, dans le Christ Jésus » écrivait St Paul (Ph 4,19). C’est pourquoi, il invitait à se tourner vers lui « en tout besoin » : « N’entretenez aucun souci ; mais en tout besoin recourez à l’oraison et à la prière, pénétrées d’action de grâces, pour présenter vos requêtes à Dieu. Alors la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées, dans le Christ Jésus » (Ph 4,6-7).

Mais à parler longuement, l’heure avancera… La nuit tombe, et les endroits où l’on peut se ravitailler sont loin… Alors là aussi, les besoins de cette foule ne laisseront pas son cœur insensible, et ce sera la multiplication des pains…

En St Matthieu (Mt 14,14), dès qu’il descend de la barque, Jésus voit des infirmes et leur situation le bouleverse : il les guérira tous… « En débarquant, il vit une foule nombreuse et il fut saisi de compassion envers eux, Ἰησοῦς εἶδεν πολὺν ὄχλον, καὶ ἐσπλαγχνίσθη ἐπ’ αὐτοῖς ; et il guérit leurs infirmes, καὶ ἐθεράπευσεν τοὺς ἀρρώστους αὐτῶν ». « Face à la multitude qui le suivait », écrit le Pape François, « Jésus, voyant qu’ils étaient fatigués et épuisés, égarés et sans berger, éprouva au plus profond de son cœur, une grande compassion pour eux (cf. Mt 9,36 : ἐσπλαγχνίσθη περὶ αὐτῶν). En raison de cet amour de compassion, il guérit les malades qu’on lui présentait et il rassasia une grande foule avec peu de pains et de poissons (cf. Mt 15,37). »

3 – Mc 8,1-10 (v. 2 ; cf. Mt 15,32) : « En ces jours-là, comme il y avait de nouveau une grande foule, et que les gens n’avaient rien à manger, Jésus appelle à lui ses disciples et leur dit : (2) « J’ai de la compassion pour cette foule, Σπλαγχνίζομαι ἐπὶ τὸν ὄχλον, car depuis trois jours déjà ils restent auprès de moi, et n’ont rien à manger. (3) Si je les renvoie chez eux à jeun, ils vont défaillir en chemin, et certains d’entre eux sont venus de loin. » Et ce sera à nouveau une multiplication des pains…

Pape François bénit un infirme4 – Mc 9,22 :ici, c’est le père d’un enfant épileptique qui fait appel à la compassion de Jésus.  Il s’est d’abord adressé à ses disciples, mais ils n’ont rien pu pour lui… Alors, il vient voir directement Jésus et lui dit : « Si tu peux quelque chose, viens à notre secours, par compassion envers nous, σπλαγχνισθεὶς ἐφ’ ἡμᾶς » « Jésus lui déclara : « Pourquoi dire : “Si tu peux”… ? Tout est possible pour celui qui croit. » Aussitôt le père de l’enfant s’écria : « Je crois ! Viens au secours de mon manque de foi ! » » (Mc 9,23‑24).

5 – Mt 20,29-34 (v. 34) : « Tandis que Jésus avec ses disciples sortait de Jéricho, une foule nombreuse se mit à le suivre. (30) Et voilà que deux aveugles, assis au bord de la route, apprenant que Jésus passait, crièrent : « Prends pitié de nous, Seigneur, fils de David ! » (31)

La foule les rabroua pour les faire taire. Mais ils criaient encore plus fort : « Prends pitié de nous, Seigneur, fils de David ! » (32) Jésus s’arrêta et les appela : « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? » (33) Ils répondent : « Seigneur, que nos yeux s’ouvrent ! » (34) Saisi de compassion, Σπλαγχνισθεὶς δὲ ὁ Ἰησοῦς, Jésus leur toucha les yeux ; aussitôt ils retrouvèrent la vue, et ils le suivirent. »

6 – Lc 7,11-17 (v. 13) : « Par la suite, Jésus se rendit dans une ville appelée Naïm. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu’une grande foule. (12) Il arriva près de la porte de la ville au moment où l’on emportait un mort pour l’enterrer ; c’était un fils unique, et sa mère était veuve. Une foule importante de la ville accompagnait cette femme. (13) Voyant celle-ci, le Seigneur fut saisi de compassion pour elle et lui dit : « Ne pleure pas. » Καὶ ἰδὼν αὐτὴν ὁ κύριος ἐσπλαγχνίσθη ἐπ’ αὐτῇ, καὶ εἶπεν αὐτῇ, Μὴ κλαῖε. (14) Il s’approcha et toucha le cercueil ; les porteurs s’arrêtèrent, et Jésus dit : « Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. »

VATICAN CITY, VATICAN - MARCH 24: Pope Francis kisses 8-month-old Victoria Maria Marino from Sicily after delivering his blessing to the palms and to the faithful gathered in St. Peter's Square during Palm Sunday Mass on March 24, 2013 in Vatican City, Vatican. Pope Francis lead his first mass of Holy Week as pontiff by celebrating Palm Sunday in front of thousands of faithful and clergy. The pope's first holy week will also incorporate him washing the feet of prisoners in a youth detention centre in Rome next Thursday, 28th March. (Photo by Dan Kitwood/Getty Images)

(15) Alors le mort se redressa et se mit à parler. Et Jésus le rendit à sa mère. (16) La crainte s’empara de tous, et ils rendaient gloire à Dieu en disant : « Un grand prophète s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple. » »

(17) Et cette parole sur Jésus se répandit dans la Judée entière et dans toute la région. »

« Lorsqu’il rencontra la veuve de Naïm qui emmenait son fils unique au tombeau, il éprouva une profonde compassion pour la douleur immense de cette mère en pleurs, et il lui redonna son fils, le ressuscitant de la mort (cf. Lc 7, 15) » (Pape François &8).

Nous concluerons en deux points :

 

1 – « Après avoir libéré le possédé de Gerasa, il lui donna cette mission : « Annonce tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde » (Mc 5, 19). L’appel de Matthieu est lui aussi inscrit sur l’horizon de la miséricorde. Passant devant le comptoir des impôts, Jésus regarda Matthieu dans les yeux. C’était un regard riche de miséricorde qui pardonnait les péchés de cet homme, et surmontant les résistances des autres disciples, il le choisit, lui, le pécheur et le publicain, pour devenir l’un des Douze » (Pape François &8), ces Douze que Jésus avait choisi « pour être avec lui et pour les envoyer prêcher » la Bonne Nouvelle de l’Amour (Mc 3,13-19).

Coeur de Jésus- Paray le MonialEn accueillant pour nous mêmes le pardon de toutes nos fautes donné en surabondance par Jésus, « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29), « l’Astre d’en haut qui nous a visités dans les entrailles de Miséricorde de notre Dieu » (Lc 1,76-79), en découvrant l’absolue gratuité de l’Amour qui comble d’autant plus, par amour, ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire les plus grands pécheurs (Lc 5,31-32), ceux qui, à leurs propres yeux et aux yeux des hommes, ne méritent surtout pas ce qu’ils ont reçu, nous sommes ensuite invités à travailler le plus possible avec le Christ pour que le plus grand nombre puisse aussi bénéficier gratuitement, par amour, de tous ces bienfaits… Car là se cache la vraie vie, la vraie joie, la vraie paix, un trésor devant lequel tout le reste ne peut que faire pâle figure… « Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l’homme qui l’a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète ce champ. (45) Ou encore : Le royaume des Cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines. (46) Ayant trouvé une perle de grande valeur, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète la perle » (Mt 13,44-46).

Les disciples de Jésus sont donc avant tout invités à être les heureux témoins de cette Miséricorde infinie qu’ils ont accueillie pour eux-mêmes… Apparaissant à ses disciples, le Christ ressuscité leur dit (Lc 24,46-48) : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, (47) et que la conversion serait proclamée en son nom, pour le pardon des péchés, à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. (48) À vous d’en être les témoins » (Lc 24,46-48). Témoins de la Résurrection, mais aussi témoins qu’une « conversion » sincère est aussitôt comblée par « le pardon des péchés » donné en surabondance… « Annonce tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde » (Mc 5, 19).

2 – Nous sommes tous invités à faire miséricorde à tous ceux et celles qui nous entourent, comme le Seigneur lui-même nous a faits miséricorde… Reprenons cet extrait de la Bulle d’Indiction du Pape François pour ce Jubilé extraordinaire de la Miséricorde que nous avons déjà cité peu après le début du second point, mais que nous allons reprendre en allant plus loin, jusqu’à nous, jusqu’à notre agir qui devrait être « à l’image et ressemblance » (Gn 1,26-27) de celui de Dieu :

FILE PHOTO 27DEC83 - Pope John Paul II meets with his would-be assasin, Turkish gunman Mehmet Ali Agca in his prison cell in December 1983. Italy granted Agca clemency June 13, the presidential palace said. Agca has still to serve part of a sentence in Turkey for killing a journalist in 1978. PH

« La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous voir heureux, remplis de joie et de paix. L’amour miséricordieux des chrétiens doit être sur la même longueur d’onde. Comme le Père aime, ainsi aiment les enfants. Comme il est miséricordieux, ainsi sommes-nous appelés à être miséricordieux les uns envers les autres » (& 9). « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6,36 ; Nouvelle Traduction Liturgique). « Montrez-vous compatissants, comme votre Père est compatissant » (Lc 6,36 ; BJ). « Soyez généreux comme votre Père est généreux » (Lc 6,36 ; TOB). Telle est l’invitation que Jésus nous lance avec ce seul texte du Nouveau Testament où la notion « d’entrailles » de miséricorde et de compassion est appliquée à un homme, un Samaritain :

Lc 10,25-37 (v. 33) : « Et voici qu’un docteur de la Loi se leva

et mit Jésus à l’épreuve en disant :

« Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? »

(26) Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? »

(27) L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. »

(28) Jésus lui dit : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu vivras. »

 

(29) Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? »

(30) Jésus reprit la parole : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à moitié mort. (31) Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté. (32) De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté.

(33) Mais un Samaritain, qui était en route, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de compassion, καὶ ἰδὼν ἐσπλαγχνίσθη. (34) Il s’approcha, et pansa ses blessures en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui. (35) Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : “Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai.”

(36) Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? »

(37) Le docteur de la Loi répondit : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même. »

Pape François et l'Esprit Saint

« En résumé, nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été fait miséricorde.  Le pardon des offenses devient l’expression la plus manifeste de l’amour miséricordieux, et pour nous chrétiens, c’est un impératif auquel nous ne pouvons pas nous soustraire. Bien souvent, il nous semble difficile de pardonner ! Cependant, le pardon est le moyen déposé dans nos mains fragiles pour atteindre la paix du cœur. Se défaire de la rancœur, de la colère, de la violence et de la vengeance, est la condition nécessaire pour vivre heureux. Accueillons donc la demande de l’apôtre : « Que le soleil ne se couche pas sur votre colère » (Ep 4, 26). Ecoutons surtout la parole de Jésus qui a établi la miséricorde comme idéal de vie, et comme critère de crédibilité de notre foi : « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7). C’est la béatitude qui doit susciter notre engagement tout particulier en cette Année Sainte » (Pape François &9).

                                                                                                                      D. Jacques Fournier

[2] SPICQ C., « σπλάγχνon« , Lexique théologique du Nouveau Testament (Paris 1991) p. 1409s.

« Les entrailles de Miséricorde de notre Dieu » : cliquer sur le titre précédent pour accéder au document PDF pour lecture ou éventuelle impression.

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