Jésus, en marche vers sa Passion, prépare ses disciples à la mission (Luc 9,51-10,42)

Ici commence la deuxième grande partie de l’Evangile selon St Luc. Jusqu’à présent, Jésus annonçait la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu (Luc 4,42-44; 6,20 ; 8,1-3.9-10 ; 9,10‑11.27) dans la région de la Galilée, au nord de la Palestine. Maintenant – et St Luc emploie une tournure grecque unique pour le décrire[1] – il va prendre gravement, avec courage, le chemin de Jérusalem, cette ville où il s’offrira sur le bois de la Croix pour le salut du monde. Les termes choisis suggèrent la difficulté de la démarche : le Christ, si humain, ne voit pas s’approcher avec joie l’heure de la souffrance et de la mort. Il prendrait bien un autre chemin si cela lui était possible : « Père, si tu veux, éloigne de moi cette coupe ! », dira-t-il au mont des Oliviers, juste avant son arrestation. Mais son amour du Père et des hommes, qu’il est venu arracher aux griffes du mal pour leur donner de connaître avec Lui la Vie, la Paix et la Joie, lui donnera le courage d’aller jusqu’au bout : « Cependant, que ce ne soit pas ma volonté, mais ta volonté, qui se fasse »… « Allons, il faut que le monde reconnaisse que j’aime le Père et que je fais comme le Père m’a commandé » (Luc 22,42-44 ; Jean 14,31). Alors, « louez le Seigneur, tous les peuples ; fêtez-le, tous les pays ! Son amour envers nous s’est montré le plus fort » (Psaume117(116))…

Dieu Père (Giovanni Battista Cima)

Notons aussi que St Luc a déjà employé plusieurs fois le verbe « s’accomplir » pour bien montrer que le projet de Dieu annoncé dans les Ecritures d’Israël s’accomplissait parfaitement avec le Christ (Luc 1,20 ; 4,21). Nous le retrouvons en Luc 9,51 (cf note 1), puis il disparaît de l’Evangile pour réapparaître seulement au moment de la Passion (Luc 21,24 ; 22,16) et dans la bouche du Ressuscité expliquant les Ecritures à ses disciples (Luc 24,44). Toute la seconde partie de l’Evangile est donc tout entière tendue vers cet accomplissement du projet de Dieu pour le salut du monde : Jésus prend ici avec courage le chemin de Jérusalem, les yeux fixés sur la Croix qui l’attend… Son souci, désormais, sera de bien préparer ses disciples à la mission qui sera la leur après sa mort et sa Résurrection…

Un village de Samaritains refuse d’accueillir le Christ

Le début du ministère de Jésus avait commencé par l’accueil éphémère (Luc 4,22) puis le rejet des habitants de Nazareth (Luc 4,28-30). Cette seconde étape commence elle aussi par un rejet, celui d’un village samaritain[2]. Certes, ses habitants ne savent pas « qui » est Jésus. Ils refusent de le recevoir pour la seule raison qu’il va à Jérusalem, une ville qui centralisait pour eux toutes leurs rancœurs vis-à-vis des Juifs. Jacques et Jean se proposent alors de réagir comme Elie le fit autrefois face à ses adversaires (2Rois 1,1-18). Mais Jésus n’est pas ainsi. L’amour seul l’anime, un amour universel, offert même à ceux qui le rejettent (Luc 6,27-35 ; 23,34 ; Romains 5,6-8)… Il respectera donc leur décision et partira pour un autre village… Bien sûr, il ne leur gardera pas rancune de ce refus, bien au contraire… Un peu plus tard, il donnera même à un Juif Maître de la Loi, l’exemple d’un « bon Samaritain » qui sut se faire le prochain d’un homme dans le besoin, alors qu’un prêtre et un Lévite[3] venaient de passer à ses côtés sans réagir (Luc 10,29‑37). Il guérira aussi dix lépreux, dont un samaritain (Luc 17,11-19) que Jésus donnera à nouveau en exemple : il sera en effet le seul à revenir sur ses pas pour lui dire « Merci ! »… Et St Jean nous rapportera de son côté le bon accueil que lui réserva tout un village de Samaritains (Jean 4,1-42). Plus tard, après sa Résurrection, Jésus demandera à ses disciples de retourner en Samarie pour leur annoncer la Bonne Nouvelle du Salut et de la Vie (Actes 1,8 ; 8,4-8 ; 8,14-15 ; 8,25 ; 9,31). Lui-même sera avec eux (Matthieu 28,18-20), agissant avec la Toute Puissance de l’Esprit Saint, pour que sa Parole de Vérité soit accueillie (Ephésiens 1,13-14 ; Jean 15,26 ; 1Thessaloniciens 1,4-6 ; Luc 24,32 ; Jean 8,40 avec 17,7-8.20)… Et s’ils ouvrent la porte de leur cœur, il sera encore le premier à être heureux de pouvoir établir avec eux une communion de Vie et d’Amour (Apocalypse 3,20 ; Jean 14,21-23 ; Luc 15,7.10) qui débouchera au ciel dans la Plénitude même de Dieu (Ephésiens 1,3-6)…

 

Les conditions pour suivre Jésus (Luc 9,57-62)

 

Ces trois petits épisodes, regroupés juste avant l’envoi en mission des « soixante douze » disciples, soulignent l’urgence de la mission à laquelle il ne faut rien préférer… C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Jésus donnera plus tard comme consigne : « N’échangez de salutations avec personne en chemin ». Et a la TOB précise en note : « Les salutations orientales sont interminables. Or le message est urgent (cf 2Rois 4,29[4]) »…

figuier stérile 3

Le Christ invite donc ses disciples à faire des choix radicaux, pour Lui et pour l’Evangile. Le suivre n’est donc pas toujours facile, et il le sait bien (Actes 9,15-16) ! St Paul en a fait l’expérience, mais il a aussi constaté combien le Seigneur était toujours présent au cœur de son épreuve pour l’encourager, le soutenir, le consoler : « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des Miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console dans toutes nos souffrances »… (2Corinthiens 1,3-4 ; 1,8-10 ; 4,6-12 ; 6,4‑10 ; 11,21b-33 ; 1Corinthiens 4,9-13). St Luc insiste ici par trois fois sur l’aspect humainement exigeant de l’appel de Jésus, sans décrire, semble-t-il, les grâces, sources de joie, que le Christ donne toujours à ceux et celles qu’il appelle. Il le fera plus tard, insistant là aussi par trois fois sur la joie des disciples « d’être inscrits au Livre de Vie », sur la joie de Jésus « sous l’action de l’Esprit Saint », et à nouveau sur le bonheur de ses disciples : « Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez ! » (Luc 10,17-24). La joie de Jésus rejoint d’ailleurs celle de ses disciples, car il leur promet, s’ils acceptent de le suivre, « d’être là où Lui, il est » : « Si quelqu’un me sert, qu’il me suive, et là où Je suis, là aussi sera mon serviteur » (Jean 12,26). Et où est Jésus ? « Dans le Père » (Jean 14,10-11), c’est-à-dire uni au Père dans la communion d’un même Esprit, cet Esprit qui est Source de Vie (Jean 6,63 TOB ; Galates 5,25), de Paix (Galates 5,22-23) et de Joie (1Thessaloniciens 1,6) ! « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jean 15,11). Et il sait de quoi il parle, Lui qui est le Serviteur du Père, Lui qui « suit » le Père en accomplissant parfaitement sa volonté : là est toute sa Vie (Jean 4,34), toute sa Paix, toute sa Joie (Luc 10,21-22)…

suis-moi

A l’occasion de la première rencontre, Jésus va souligner son aspect missionnaire : il passe de villes en villages (Luc 4,42-44) pour annoncer à tous combien Dieu est tout proche (Actes 17,26-28 ; Matthieu 3,2), offert à notre bonne volonté et à notre foi… Il n’a donc pas « d’endroit où reposer la tête »… Il sait ce que cela signifie « dormir à la belle étoile », au Mont des Oliviers par exemple (Luc 21,37 ; 22,39). Il savait aussi accepter l’hospitalité avec simplicité : chez Pierre, à Capharnaüm, où il revenait souvent (Matthieu 4,12-13 ; Marc 2,1 et 9,33 où l’expression « à la maison », renvoie à la maison de Pierre. Elle a été retrouvée par des Franciscains à l’occasion de fouilles archéologiques), chez Marthe et Marie (Luc 10,38), chez Simon le lépreux (Matthieu 26,6), chez St Matthieu son tout nouveau disciple (Luc 5,27-32)… Plus tard, Jésus invitera ses disciples à accepter avec la même simplicité l’hospitalité qui leur sera offerte, mangeant ce qui leur sera servi (Luc 10,5-8)…

Dans le second épisode, l’homme que Jésus appelle lui répond : « Permets-moi d’aller d’abord enterrer mon Père ». Comme l’indique en note la Bible des Peuples, « cela signifie très probablement qu’il voulait s’occuper de son père âgé jusqu’au moment où il l’aurait enterré (cf Tobie 6,14-15) ». Répondre « oui » dans la foi et la confiance à l’appel de Jésus sera alors lui manifester la même confiance vis-à-vis des proches que nous devrons quitter : le Christ Lui-même s’occupera aussi très concrètement d’eux, d’une manière ou d’une autre, pour que tout se passe le mieux possible, et cela jusqu’à la fin… A tout appel correspond une grâce, et nous sommes tous appelés : les uns à tout quitter pour suivre le Christ, les autres à accepter cette séparation demandée par le Seigneur, dans la certitude qu’Il s’occupera aussi bien des uns et des autres pour que tous ne manquent de rien (Luc 12,22-32). Il est en effet inconcevable qu’il n’en soit pas ainsi. Le Seigneur pourrait-il en effet nous inviter à faire le contraire de la Loi de Moïse (Exode 20,12), lui qui n’est pas venu pour abolir, mais pour accomplir (Matthieu 5,17) ? Lui qui nous demande « d’aimer notre prochain comme nous-mêmes » (Matthieu 22,34-40 ; cf 19,16-22), pourrait-il nous pousser à ne pas aimer nos parents, ces tout premiers « prochains » que Dieu nous a donnés ? Lui qui a su prendre soin de sa Mère, jusque sur la Croix, en la confiant à son disciple bien-aimé, pourrait-il nous interdire de faire de même (Jean 19,25-27) ? Non… Par ces paroles qui peuvent sembler dures en première lecture, Jésus invite tout simplement ses disciples à lui faire confiance : confiance pour eux-mêmes, et confiance pour leurs parents qu’ils doivent quitter pour le suivre…

Saint Jean

Le troisième et dernier épisode insiste sur l’urgence de la mission et le don sans retour que Jésus attend de ses disciples. Elisée, avant de suivre Elie, lui avait demandé « d’aller embrasser son père et sa mère » (1Rois 19,19-21). Jésus, ici, semble encore plus exigeant, mais là encore cette position extrême n’est qu’insistance sur la détermination à le suivre que Jésus attend de ses disciples, et il sait que les « au revoir » ne sont jamais faciles… Que les cœurs ne vacillent donc pas pour répondre avec courage et chaque jour à l’appel reçu… En dehors de ce contexte immédiat, la Parole de Jésus a aussi une portée plus grande. « Suivre le Christ » est tout d’abord, et cela est valable pour toutes les vocations, « mettre le Christ en premier dans son cœur et dans sa Vie » en essayant, avec Lui, de renoncer à tout ce qui est contraire à la dynamique du Royaume des Cieux. Sans cette conversion permanente, le danger serait grand de retourner à ses fautes et à ses erreurs passées. Et celui qui agirait ainsi se détournerait du Christ « Source de Vie » et il lui serait alors impossible d’accomplir « les œuvres de Dieu ». Il deviendrait stérile comme la femme de Lot transformée en « colonne de sel » (Genèse 19,23-26 ; cf. Jean 15,4-5 ; Matthieu 5,13-16 où le sel a un autre sens symbolique, positif cette fois, de « donner du goût et de la saveur » à la vie…). Il s’agira donc désormais de faire comme St Paul : « Oubliant le chemin parcouru, je vais droit de l’avant, tendu de tout mon être, et je cours vers le but, en vue du prix que Dieu nous appelle à recevoir là‑haut, dans le Christ Jésus… C’est ainsi qu’il nous faut penser ; et si, sur quelque point, vous pensez autrement, là encore Dieu vous éclairera. En attendant, quel que soit le point déjà atteint, marchons toujours dans la même ligne » (Philippiens 3,13-16)…

La mission des soixante douze disciples (Luc 10,1-16)

« Jésus désigna 72 autres disciples et les envoya deux par deux en avant de lui dans toute ville et tout endroit où lui-même devait aller »…

Jésus avait d’abord envoyé les Douze apôtres en mission (Luc 9,1-6), ceux-là qui plus tard seront appelés à devenir les colonnes de l’Eglise naissante (Galates 2,7-10), le fondement de l’édifice étant le Christ Jésus Lui-même (1Corinthiens 3,10-15). Maintenant, Jésus envoie également en mission « 72 autres disciples » en des termes quasiment identiques … Or « 72 » est le résultat de « 6 x 12 ». En rajoutant les Douze Apôtres, on a donc « 6 x 12 + 1 x 12 » soit en tout « 7 x 12 », et le chiffre « sept » est, dans la Bible, synonyme de perfection et de plénitude. Toute l’Eglise est donc envoyée en mission[5]… Nous retrouvons la même logique à la fin de l’Evangile où le Christ Ressuscité donnera ses consignes missionnaires « aux Onze et à leurs compagnons » (Luc 24,33-36). Aujourd’hui, la mission de l’Eglise ne concerne donc pas seulement les Evêques, successeurs des Douze, et les prêtres qui collaborent avec les Evêques pour le bon accomplissement de leur ministère de Pasteur, mais aussi les laïcs… Nous sommes tous envoyés par le Christ, pour annoncer, là où nous sommes, dans nos familles, dans notre travail…, la Bonne Nouvelle du Christ Sauveur. Et le Christ invite ici à partir « deux par deux », c’est-à-dire accompagnés et soutenus par un autre[6]… Nous ne serons pas seuls : en Eglise, nous pourrons compter sur quelqu’un ou même, sur un petit groupe… De plus, le chiffre « deux » renvoie à la notion de « témoignage » : il fallait en effet au moins deux ou trois témoins pour qu’un témoignage soit recevable en justice (Deutéronome 19,15). Les disciples envoyés par le Christ seront donc avant tous les témoins de ce qu’ils auront vu, entendu et vécu avec Lui. Ils seront ainsi comme Jean-Baptiste qui invitait à « préparer les chemins du Seigneur » (Luc 3,1-6 ; cf. Isaïe 40,1-11 ; 52,6-10) où « Lui-même devait aller »… Et après la mort et la résurrection du Christ, cette dernière indication s’accomplira, dans la foi, avec la Présence même du Ressuscité qui sera là où ses disciples seront (Matthieu 28,18-20). Par son Esprit, il les aidera à trouver les mots justes pour rendre témoignage à la Bonne Nouvelle du Salut (1Corinthiens 2,13 ; cf. Luc 21,12-15 et Matthieu 10,17-20). Par son Esprit, il agira aussi au cœur de ceux et celles qui les écouteront pour que ces Paroles de Vérité soient bien accueillies (1Corinthiens 2,1-5 ; 1Thessaloniciens 1,6 ; Jean 15,26), comme l’explique une note de la Bible de Jérusalem (cf. Esprit Saint1Jean 4,13) : « Ce don de  l’Esprit annoncé pour les derniers temps a été répandu dans les cœurs et y fait naître la certitude intime de ce que les apôtres annoncent extérieurement »… La mission devient alors un acte de foi en Celui qui est en fait « le Missionnaire » par excellence : le Christ Ressuscité qui continue invisiblement, mais avec la Puissance, la Douceur, la Lumière et le Feu de l’Esprit Saint, à annoncer le Dieu d’Amour par son Eglise qui est « son Corps » (Romains 12,4-13 ; 1Corinthiens 10,16‑17 ; 12,12-30)… Mais encore faut-il que des « ouvriers » se lancent dans l’aventure. Ils sont « peu nombreux » ; le Seigneur les attend, les désire, et nous invite tous à « prier le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson »…

Notons que ces « ouvriers » reçoivent, comme les Apôtres, mais bien sûr en lien avec eux (Actes 20,28), « autorité (ou pouvoir) sur tous les démons » (Luc 9,1), c’est-à-dire « l’autorité (ou le pouvoir) de fouler aux pieds toute la puissance de l’ennemi » (Satan) de telle sorte que « rien ne pourra leur nuire » (cf. Marc 16,15-18). Jésus les invite également à « guérir les malades » (Luc 9,1-2 ; 9,6 ; 10,9), une invitation qui est toujours en lien avec « la proclamation de la Bonne Nouvelle du Royaume des Cieux » : ces guérisons seront en effet les signes visibles de la Présence invisible et efficace de Dieu qui se propose à notre foi pour nous offrir le pardon de toutes nos fautes, et avec lui, le don de la vie éternelle… St Paul écrivait : « C’était Dieu qui dans le Christ se réconciliait le monde, ne tenant plus compte des fautes des hommes, et mettant en nous la parole de la réconciliation. Nous sommes donc – nous les ouvriers envoyés à sa moisson – en ambassade pour le Christ ; c’est comme si Dieu exhortait par nous. Nous vous en supplions au nom du Christ : laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2Corinthiens 5,19-20). Et les fruits de cette réconciliation seront un mystère de communion avec Dieu (Ephésiens 2,18 ; Galates 3,27-28 ; 1Jean 1,1-4 ; Jean 14,23 ; 17,20-23) où chacun trouvera, dans le don de l’Esprit Saint, le repos du cœur (Matthieu 11,28-30), la Paix intérieure (Jean 14,27), la Vie (Jean 6,47), la Joie (Jean 15,11)… Tel est ce « Royaume de Dieu qui est tout proche de nous » (Luc 10,9.11), frappant inlassablement à la porte de nos vies et de nos cœurs…

jésus frappe à la porte

Les ouvriers envoyés à la moisson doivent d’ailleurs dire en entrant dans une maison : « Paix à cette maison ! » En agissant ainsi, ils annonceront déjà « l’Evangile de la Paix » (Ephésiens 6,15), cette Paix étant synonyme en hébreu de Plénitude, « don divin qu’ils apportent dans la demeure où ils pénètrent. Qui est « fils de la paix », c’est-à-dire ouvert et réceptif à la Bonne Nouvelle du Règne et à ce don, le recevra effectivement. Et lorsque quelqu’un se ferme et ne croit pas que la paix lui vienne par la bouche du missionnaire, ce « cadeau » n’est pas perdu pour autant : ayant fait ce qu’il devait, le missionnaire demeure en paix »[7].

Enfin, la Loi de Moïse distinguait entre les animaux purs que l’on pouvait manger, et les impurs qu’il fallait proscrire (Lévitique 11). De plus, tous ceux qui n’obéissaient pas à toutes les prescriptions de la Loi, et notamment les païens, étaient considérés comme des êtres impurs : il était alors interdit d’entrer chez eux et de manger avec eux (cf. Luc 5,29-32 ; 15,1-2 ; Jean 18,28). Mais le disciple de Jésus est libéré de toutes ces prescriptions et il n’existe plus pour lui de barrières entre les hommes (1Corinthiens 10,25-27; cf. Ephésiens 2,14-18 où la barrière séparant les deux peuples, les Juifs et les païens, est la Loi ; le Christ l’a supprimée pour que ceux qui étaient loin (les païens) et ceux qui étaient proches (les Juifs) ne fassent plus qu’un seul et même Peuple, une Humanité Nouvelle rassemblée par le Christ, dans l’Esprit, autour du Père. Voir également Actes 10,9-16; à la suite de cette vision, Pierre, qui logeait déjà chez un homme impur de par son métier, Simon le corroyeur (Actes 10,6), n’aura plus de scrupules à accueillir chez lui des païens (Actes 10,19‑23), à marcher avec eux (Actes 11,12) et à entrer chez eux (Actes 10,23-29)). Toute l’humanité, sans exception, est aimée par Dieu et appelée au salut (cf. 1Timothée 2,3-6 ; Jean 3,16-17 ; 6,39 et le Père lui a donné le monde à sauver ; 17,1-3). L’ouvrier envoyé à la moisson peut donc dire, comme St Paul (1Corinthiens 9,18-22) : St Paul« En annonçant l’Évangile, j’offre gratuitement l’Évangile, sans pleinement user du droit que me confère l’Évangile[8]. Oui, libre à l’égard de tous, je me suis fait l’esclave de tous, afin de gagner le plus grand nombre. Je me suis fait Juif avec les Juifs, afin de gagner les Juifs ; sujet de la Loi avec les sujets de la Loi – moi, qui ne suis pas sujet de la Loi – afin de gagner les sujets de la Loi. Je me suis fait un sans-loi avec les sans-loi – moi qui ne suis pas sans une loi de Dieu, étant sous la loi du Christ – afin de gagner les sans-loi. Je me suis fait faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver à tout prix quelques-uns ». Puissions-nous faire de même…

Cet épisode se termine sur l’éventualité d’un refus d’accueillir « les ouvriers envoyés à la moisson ». Comme en Luc 9,5, le geste manifestant la rupture est sans équivoque. Mais le Christ invite une nouvelle fois à annoncer cette Bonne Nouvelle, envers et contre tout : « Pourtant, sachez-le, le Royaume de Dieu est tout proche »… Si aujourd’hui, ils le refusent, peut‑être finiront-ils un jour par lui ouvrir leur cœur… Mais attention, ils seront responsables des conséquences de leur refus… Et s’ils se ferment à l’Amour, à la Miséricorde, à la Justice, au Pardon, à la Vérité et à la Paix, ils risquent de laisser le champ libre à la haine, la jalousie, l’injustice, la vengeance, le mensonge et la guerre… Autant de forces de destructions qui ne pourront laisser derrière elles qu’un immense champ de ruines. Il ne sera pas question alors de « jugement divin » ou de « châtiment de Dieu » : seuls les hommes, par leur refus de l’Amour, auront été les artisans de leur propre malheur (Jérémie 2,15-19 ; 4,18). Aussi le Christ se lamente‑t-il par avance sur eux (Matthieu 23,37-38). S’ils avaient pu accueillir celui qui, par ses envoyés, était susceptible de leur donner la Paix et la Joie…

Diapositive12« Premier lieu pourtant où Jésus avait guéri et prêché (Luc 4,23.31), Capharnaüm a fait montre d’un endurcissement du cœur » hors du commun. « Au moyen d’une allusion à Isaïe 14,13-15, le Maître signifie à l’orgueilleuse cité qu’elle va tomber de haut de façon catastrophique ; en rejetant l’Envoyé de Dieu, elle a signé son propre rejet »[9]. Comment, en effet, pourrait-être sauvé celui qui refuse de se laisser saisir par l’unique Sauveur ? Même si ce dernier le presse d’accepter son amour et son aide, son refus est synonyme pour lui de condamnation (Jean 3,16-18). Mais encore une fois, qui condamne ? Dieu ? Certainement pas (Jean 8,11 ; 1Jean 1,8-2,2 ; Romains 8,31-39) ! Il ne désire que nous sauver… C’est l’homme qui, par son refus de Dieu, se condamne lui-même…

Enfin, Jésus conclut son discours en ces termes : « Qui vous écoute m’écoute, qui vous rejette me rejette, et qui me rejette rejette Celui qui m’a envoyé ». Jésus en effet a donné à ses disciples la Parole qu’il avait lui-même reçue de son Père (Jean 17,6-8), et l’Esprit Saint aidera l’Eglise jusqu’à la fin des temps à garder intact ce dépôt (2Timothée 1,14 ; Jean 14,26 ; 1Corinthiens 2,9-13)… saint_paulSt Paul prêche ainsi « dans le Christ », c’est-à-dire « uni au Christ dans la communion d’un même Esprit » (2Corinthiens 2,17; 12,19; Romains 9,1 ; Philémon 1,8-9), « miséricordieusement investi de ce ministère » (2Corinthiens 4,1 ; 1Timothée 1,12-17), et il a ainsi conscience que le Christ parle avec Lui et par Lui (2Corinthiens 13,3). Tel est le mystère de l’Eglise « Corps du Christ », unie au Christ dans la communion d’un même Esprit, et qui ne cesse d’offrir au monde « la Parole du Christ » pour inviter tous les hommes au Salut et à la Vie…

Le retour de mission des Soixante-Douze (10,17-24)

Les Soixante-Douze reviennent « joyeux », de cette Joie simple et discrète qui jaillit du cœur à cœur avec Jésus, le Ressuscité, le Vainqueur du mal, des ténèbres et de la mort. Et voici qu’ils se découvrent eux aussi, par leur union au Christ, « vainqueurs » (2Corinthiens 2,14 ; Romains 8,35-39 ; 1Jean 5,4-5 ; Apocalypse 3,20-21 ; 21,5-7 ; Jean 10,27-30)… Mais c’est l’Esprit Saint, l’Esprit du Christ, cet Esprit qu’ils reçoivent instant après instant du Christ dans une relation de cœur humble et confiante, qui leur donne de remporter la victoire (Matthieu 12,28 ; Luc 11,20). Qu’ils ne se glorifient donc pas de tout ce que le Christ leur a donné : ils risqueraient de tomber dans l’orgueil, et par là-même de se séparer de Lui. Ils seraient alors à la merci de celui qui, pour l’instant, leur est soumis !

Feuille lumière vie« Le vrai motif de la joie des représentants de Jésus n’est pas à chercher dans leur pouvoir sur les forces infernales, mais dans le fait que Dieu a inscrit leurs noms dans le Livre de Vie : ils ont la promesse d’hériter de la Vie qui ne finit pas », une Vie qu’ils commencent dès maintenant à recevoir dans la foi et par leur foi (Jean 6,47)[10]

Mais la joie des disciples fait la joie de Jésus ! Et lui aussi tressaille de joie dans ce même Esprit qu’il reçoit de son Père. Un mystérieux renversement se réalise : ceux qui croient tout savoir sont en fait aveuglés par l’orgueil, et ils demeurent étrangers aux réalités d’en haut (Jean 9,39‑41 ; 1Corinthiens 1,18-31 ; 2,14 où, comme l’indique en note la Bible de Jérusalem, « l’homme psychique » est l’homme laissé aux seules ressources de sa nature)… Par contre, les simples et les tout-petits ont su ouvrir leur cœur à l’action du Père qui leur a donné, grâce à l’action de l’Esprit Saint, d’entrer dans le mystère de Jésus (1Corinthiens 2,9-12 ; Ephésiens 1,17-21 ; Jean 16,12-15) … Ils sont alors « heureux » comme Jésus lui-même est « heureux » (Matthieu 16,15-17). Eclairés de l’intérieur, « leurs yeux illuminés du cœur » (Ephésiens 1,18 ; Matthieu 4,16) savent percevoir en Jésus et dans ses Paroles « quelque chose » de sa Gloire (Jean 6,40[11] ; 6,67‑69 ; 7,45-46 ; 1Jean 1,1-4 ; Luc 9,28-32… Le Christ apparaît pleinement ici comme « l’unique Médiateur » (1Timothée 2,5-6), le seul « Chemin » (Jean 14,6) par qui il nous est donné, dès maintenant, dans la foi et par notre foi, « d’oser nous approcher du Père en toute confiance » (Ephésiens 3,11‑12), et de « le connaître » (Jean 1,18) en ayant part à sa Vie (Jean 17,1-3). Il est pleinement ce « Fils » -et il en a conscience (cf. Luc 10,22 où le mot « Fils » intervient trois fois)- venu en ce monde pour que nous devenions nous aussi, et le plus pleinement possible, des fils et des filles de Dieu par notre foi en Lui (Jean 1,12-13)…

L’amour de Dieu et du prochain (Luc 10,25-42)

Mais « devenir fils et fille de Dieu » engage toute la vie, car il s’agit avant tout de recevoir dans la foi une grâce qui est de l’ordre de la Vie, la Vie même de ce Dieu qui est Amour et qui n’est qu’Amour (1Jean 4,8.16)… Cette Vie sera donc tout en même temps dynamisme d’amour et force pour aimer (Jean 6,63 avec Romains 5,5 et Galates 5,22-25)… Elle ne pourra donc que nous entraîner à vivre comme Dieu vit de toute éternité, et sa Vie n’est qu’Amour… Dès lors, le seul et unique commandement ne peut être que Celui de l’amour : un cœur tourné tout entier vers Celui qui, de son côté, est tourné tout entier vers chacun d’entre nous pour nous combler de ses dons (Jérémie 32,40-41). Et ces grâces seront « amour ». Elles nous aideront et nous soutiendront pour mettre en pratique ce que Jésus attend de chacun d’entre nous : « Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jean 15,12)… Ainsi, avec le Christ, le commandement de l’Amour de Dieu (Deutéronome 6,4-5) et celui de l’amour du prochain (Lévitique 19,18) ne peuvent plus faire qu’un seul et unique commandement. Celui qui aime vraiment Dieu en lui ouvrant son cœur ne peut pas, au même moment, témoigner de la haine ou du mépris vis-à-vis de son prochain. Si son ouverture de cœur est vraie, totale et sincère, la grâce qu’il recevra de Celui qui n’est que Source de Vie et d’Amour ne pourra que l’entraîner sur des chemins de Vie et d’Amour envers tous ceux et celles qui l’entourent…

Le bon Samaritain, Van GoghPour illustrer ce commandement de l’amour, Jésus donnera deux exemples. Le premier, la parabole du « Bon Samaritain », pose la question : « Qui est mon prochain ? » Jésus évite de répondre de manière trop précise : l’amour ne peut que renverser les barrières qui existent entre les hommes . Il est universel… Aussi donnera-t-il l’exemple « d’un homme », sans préciser sa nationalité ou ses origines, tombé aux mains de brigands qui le laissent « à demi-mort »… Or la Loi de Moïse interdisait de toucher un cadavre sous peine de devenir impur (Nombres19,11‑13). Le Lévite (serviteur du Temple) et le Prêtre, pour qui la Loi était encore plus exigeante (Lévitique 21,1-4 ; Ezéchiel 44,25-27) ne veulent donc pas prendre un tel risque : ils passent leur chemin… Ils n’ont pas su dépasser la barrière de la Loi et mettre à la première place la détresse et le besoin de cet homme… Par contre, un Samaritain, ennemi juré des Juifs à cette époque (Siracide 50,25‑26 ; Jean 4,9 ; 8,48 ; Luc 9,52-55), saura se laisser toucher par la souffrance de cet homme et lui ouvrir son cœur, même s’il pouvait, à priori, le considérer comme un ennemi. Et là, Jésus renverse la perspective : il ne s’agit plus de savoir « qui » est mon prochain, mais plutôt de se faire le prochain de tous ceux et celles qui nous entourent, fussent-ils nos ennemis (cf. Luc 6,27-38) !

Marthe et Marie, Jean VermeerLe deuxième exemple (Luc 10,38-42) soulignera la dynamique qui devrait être celle de tout disciple de Jésus : mettre à la première place l’amour de Dieu, « de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force et de tout son esprit », puis l’amour du prochain qui ne sera que l’expression vivante de notre amour pour Dieu (1Jean 4,7-8 ; 4,12 ; 4,19-20)… Dès lors, Marie, « assise aux pieds du Seigneur », dans la position du disciple qui écoute son Maître, « a choisi la meilleure par» en se mettant à l’écoute de la Parole de Dieu. Douce comme le miel (Ezéchiel 3,1-3), elle est la nourriture qui demeure en vie éternelle (Jean 6,27), le Pain de Vie offert à tous (Jean 6,35-47). Marthe aurait dû se préoccuper d’abord de ce Pain là avant de se laisser « absorber par les multiples soins du service »… Elle aurait alors compris « qu’elle se donnait beaucoup de soucis et qu’elle s’agitait pour beaucoup de choses », alors que le Christ recherche avant tout la simplicité du cœur et la paix… A nous maintenant d’essayer de privilégier notre relation de cœur avec le Seigneur, avant de nous laisser accaparer par les multiples soucis de la vie (cf. Luc 8,14). Comme l’écrivait St Paul aux Philippiens : « Réjouissez-vous sans cesse dans le Seigneur, je le dis encore, réjouissez-vous. Que votre modération soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. N’entretenez aucun souci; mais en tout besoin recourez à l’oraison et à la prière, pénétrées d’action de grâces, pour présenter vos requêtes à Dieu. Alors la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées, dans le Christ Jésus » (Philippiens 4,4-7)…

                                                                                                                          D.Jacques Fournier

[1] Luc 9,51, littéralement : « Et il advint, comme s’accomplissaient entièrement les jours de son enlèvement (allusion à l’Ascension de Jésus auprès du Père ; le même mot est employé en Ac 1,2.11.22), qu’il fixa (affermit, fortifia) sa face pour aller à Jérusalem »… Peut-être est-ce une allusion au troisième chant du Serviteur en Isaïe 50,5-9 : « Le Seigneur Yahvé m’a ouvert l’oreille, et moi je n’ai pas résisté, je ne me suis pas dérobé. J’ai tendu le dos à ceux qui me frappaient, et les joues à ceux qui m’arrachaient la barbe ; je n’ai pas soustrait ma face aux outrages et aux crachats. Le Seigneur Yahvé va me venir en aide, c’est pourquoi je ne me suis pas laissé abattre, c’est pourquoi j’ai rendu mon visage dur comme la pierre, et je sais que je ne serai pas confondu. Il est proche, celui qui me justifie. Qui va plaider contre moi ? Comparaissons ensemble ! Qui est mon adversaire ? Qu’il s’approche de moi ! Voici que le Seigneur Yahvé va me venir en aide, quel est celui qui me condamnerait ? » Notons combien ce texte insiste sur le fait que « le Seigneur va venir en aide » à son Serviteur… Telle est la certitude qui devait habiter le cœur de Jésus au cœur de toutes les difficultés et de toutes les souffrances qu’il a rencontrées…

[2] A la mort de Salomon (970-931 av. JC), fils du roi David (1010-970 av. JC), le Royaume d’Israël se scinda en deux, avec le Royaume du Nord et sa capitale Sichem, et le Royaume du Sud et sa capitale Jérusalem. On peut imaginer sans peine les tensions qui devaient exister entre les deux royaumes suite à cette division. Omri, roi du Royaume du Nord de 881 à 841 av. JC, acheta pour 68 Kg d’argent (2 talents) une colline située à une dizaine de km au nord-ouest de Sichem à un certain Chémer qui devait donner son nom à la nouvelle capitale qu’Omri y construisit : Samarie. Puis, après la chute du Royaume du Nord conquis en 722 par le roi assyrien Sargon II, ce dernier fut transformé en province assyrienne qui prit le nom de sa capitale : la Samarie. Toute cette zone ne cessera ensuite de s’appeler ainsi, tout comme ses habitants, « les Samaritains »…

Une étape marquante de la coupure entre les Juifs et les Samaritains fut la construction d’un Temple sur le Mont Garizim, au sud-est de Samarie, sans doute vers 330 av JC. Ce Temple faisait donc concurrence à celui de Jérusalem. Vers 180 av JC, le Livre du Siracide (appelé aussi « l’Ecclésiastique ») parle des Samaritains en terme de « peuple stupide qui habite à Sichem » (Siracide 50,26)… La destruction par Jean Hyrcan en 129/128 av JC de Sichem, du Temple du Mont Garizim, puis de Samarie peu de temps après, achèvera de consommer la rupture entre les Juifs et les Samaritains (cf Jean 4,9 ; 8,48).

[3] Un membre de la tribu de Lévi, une tribu à qui le service du Temple de Jérusalem avait été confié : « Le Seigneur mit alors à part la tribu de Lévi, pour porter l’arche de l’alliance du Seigneur, se tenir en présence du Seigneur, le servir et bénir en son nom jusqu’à ce jour » (Deutéronome 10,8).

[4] La Bible de Jérusalem écrit en note pour ce dernier texte : « Ne saluer personne : signe d’une mission pressante ».

[5] COUSIN H., « L’Evangile de Luc », dans Les Evangiles, textes et commentaires (Collection Bayard Compact, 2001) p. 677. Un double symbolisme est très certainement attaché à ce chiffre 72 qui représente en Gn 10,2-31, dans la version grecque, « la table des 72 peuples de la terre ». La mission, visée ici par St Luc, annoncerait déjà celle de l’Eglise naissante envoyée par le Christ Ressuscité dans le monde entier. Il nommera en effet en 10,13-14 deux villes païennes situées au nord d’Israël, « Tyr et à Sidon ». La première mission, celle des Douze (9,1-6) était donc plutôt dans la continuité de celle du Christ envoyé tout d’abord « aux brebis perdues de la maison d’Israël » (Matthieu 15,24 ; 10,6 en notant le parallèle entre 10,1-16 et Luc 9,1-6). Et de fait, juste après, la symbolique des chiffres employés dans la multiplication des pains (Luc 9,10-17) renverra au Peuple d’Israël (5 : les cinq livres de la Loi ; 5000 : la multitude du Peuple d’Israël appelé à mettre cette Loi en pratique ; 12 : les douze tribus d’Israël).

[6] Exemples de paires dans le Livre des Actes des Apôtres : Paul et Barnabé (13,2-4), Barnabé et Marc, Paul et Silas (15,39-40).

[7] COUSIN H., « L’Evangile de Luc », dans Les Evangiles, textes et commentaires p. 678.

[8] Si « l’ouvrier mérite son salaire », « mangeant et buvant ce qu’on lui servira » (Luc 10,7), St Paul, lui, n’usait pas de ce droit que lui offrait l’Evangile. La Bible de Jérusalem écrit en note pour Actes 18,3 : « Bien qu’il reconnaisse le droit des missionnaires à leur subsistance (1Corinthiens 9,6-14 ; Galates 6,6 ; 2Thessaloniciens 3,9 ; cf. Luc 10,7), Paul a toujours tenu à travailler de ses mains (1Corinthiens 4,12) pour n’être à charge de personne (1Thessaloniciens 2,9 ; 2Thessaloniciens 3,8 ; 2Corinthiens 12,13s) et prouver son désintéressement (Actes 20,33s ; 1Corinthiens 9,15-18 ; 2Corinthiens 11,7-12). « Je m’efforce de plaire en tout à tous, ne recherchant pas mon propre intérêt, mais celui du plus grand nombre, afin qu’ils soient sauvés » (1Corinthiens 10,33)…

[9] COUSIN H., « L’Evangile de Luc », dans Les Evangiles, textes et commentaires p. 678-679.

[10] Id. p. 680.

[11] Et la Bible de Jérusalem précise en note : « “ Voir ” le Fils, c’est discerner et reconnaître qu’il est réellement le Fils envoyé par le Père, cf. Jean 12,45 ; 14,9 ; 17,6 ». Et cette action n’est possible que grâce à celle du Père qui attire à Jésus (Jean 6,44.65) et donne de croire en Lui en envoyant l’Esprit de Lumière et de Vie dans les cœurs (1Corinthiens 12,3)….

 

Fiche n°12 – Lc 9,51-10,42 : cliquez sur le titre précédent pour accéder au fichier PDF pour lecture ou éventuelle impression.

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