La Trinité – Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Laissons la parole à l’esprit

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« J’ai encore beaucoup de choses à vous dire mais vous ne pouvez pas le porter à présent ». Frères et sœurs, lorsqu’on lit l’évangile de saint Jean, on s’aperçoit que saint Jean ne s’est pas simplement appliqué comme une sorte de journaliste très scrupuleux, à consigner très exactement dans tous les moindres détails les paroles de Jésus, ses faits et gestes. La preuve c’est que chaque fois qu’il nous raconte un épisode de la vie de Jésus, l’épisode prend toujours une sorte d’ampleur et de dimension qu’on ne soupçonnait absolument pas. En fait Jean, non seulement évoque et rassemble ses souvenirs au sujet de Jésus, mais il est comme lui-même étonné de ce qu’il peut en dire. Et c’est la chose sans doute la plus étonnante qui soit, c’est qu’à certains moments rétrospectivement, on comprenne mieux ce qui s’est passé que lorsqu’on était immédiatement témoin sur le moment.

C’est ce qui s’est passé lorsque Jean nous a rapporté les dernières recommandations de Jésus. Il a compris à ce moment-là que ce que Jésus leur avait dit, ce qu’il leur avait dévoilé et révélé, était finalement encore assez peu de chose par rapport à ce qu’ils comprenaient, vingt ou quarante ans plus tard. Donc, cet évangéliste s’est attaché à découvrir petit à petit, comment il se fait que nous puissions mieux comprendre maintenant que lorsque nous étions auprès de Jésus.

Dans notre pensée à tous, c’est quand on est à la source qu’on comprend le mieux. On croit toujours que les témoins oculaires peuvent dire : « J’ai vu ça, j’ai vu ça et encore ça ! » Et souvent, c’est une des choses qui se passe dans les procès, au début il y a apparemment des évidences : c’est lui qui est coupable, c’est elle qui a tué, c’est celui-ci qui a commis le crime. Et au fur et à mesure que l’on commence à analyser tout ce qui a pu se passer, la concordance des témoignages, on s’aperçoit qu’en réalité, c’était une autre piste qu’il fallait suivre. Pour Jean, il y a un petit côté policier dans son évangile : il s’aperçoit tout à coup qu’il peut dire des choses que sans doute Jésus avait suggérées, mais comme il le dit : « Vous ne pouvez pas le comprendre maintenant, j’aurais encore beaucoup de choses à vous dire mais vous ne pouvez pas les entendre ». Alors, Jean se pose la question : « Qui peut me les faire comprendre maintenant puisqu’Il n’est plus là ? »

Bandeau-st-EspritC’est le mystère de l’Esprit. Ceci éclaire une deuxième phrase que nous entendons dans les lectures : « L’Esprit prendra de mon bien ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que l’Esprit Saint a parfaitement compris, lui, comme troisième personne de la Trinité, ce que Jésus avait voulu dire, ce que Jésus avait voulu révéler. Et maintenant, c’est lui qui prend soin invisiblement mais réellement, de le faire surgir dans le cœur et dans la mémoire des premiers témoins. C’est comme cela qu’est née la foi dans la puissance de l’Esprit Saint. C’est parce que ce qu’il leur faisait découvrir était tellement grand et les dépassaient tellement qu’ils se rendaient bien compte qu’eux n’auraient pas pu l’inventer tout seul. Ils étaient comme débordés par le mystère et la profondeur de ce qu’ils annonçaient. Ils n’avaient pas compris sur le moment ce que voulait dire que « Jésus nous sauve », ce que cela voulait dire que « Jésus est le Fils de Dieu ». Il a fallu que Quelqu’un par un cheminement très complexe, dont ils sont les seuls à avoir fait l’expérience à ce point-là, que ce qu’ils avaient vécu, c’était la transformation et le salut du monde.

D’une certaine manière lorsque nous disons que l’Église est appelée à vivre de façon permanente une nouvelle Pentecôte, c’est exactement cela qu’on veut dire. Nous, que nous soyons très croyants, ou pas très croyants, au premier degré nous avons tous une compréhension journalistique de ce que Jésus a fait : c’est un grand prophète, il a dit qu’il fallait s’aimer les uns les autres, il a dit qu’il fallait aimer Dieu. C’est un certain nombre de données un peu inoffensives et souvent inodores. Mais ce qui nous est demandé comme membres de l’Église, comme croyants, c’est de nous laisser guider par la puissance de l’Esprit, c’est de prendre par la main les témoins qui ont fait eux, la première expérience de la découverte de la présence agissante de l’Esprit dans leur vie après la résurrection de Jésus, et de nous laisser façonner par la même expérience. Alors, à ce moment-là, Jésus pourra nous dire les choses pour lesquelles au début nous avions comme les oreilles bouchées, il pourra nous révéler ce qu’est le mystère de sa présence, de son salut, ce qu’est la manière dont petit à petit il nous ouvre à ses secrets qu’il est venu nous révéler.

ESPRIT SAINT 1Frères et sœurs, que ces jours qui suivent la Pentecôte nous ramènent à ce centre même de notre vie chrétienne. Non pas regarder Jésus de l’extérieur, non pas dire : « Qu’est-ce qui me prouve qu’il est Dieu ? », toutes ces questions qu’on entend habituellement, mais nous laisser ramener au cœur même du cœur, c’est-à-dire là où l’Esprit nous parle au plus intime de nous-mêmes, au plus intime de nos communautés, de notre prière, de nos célébrations, et laissons la parole à l’Esprit. C’est lui qui nous enseignera tout ce que nous n’avons pas encore entendu et reçu de Jésus. Amen.

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