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18ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN (St Luc 12,13-21)

Un homme a un problème d’héritage à régler avec son frère. Comme bon nombre de personnes, chacun ne pense qu’à ses intérêts. Il a dû entendre Jésus parler de « partage », de « fraternité » ou encore de « solidarité », et il en profite, de la sagesse de Jésus, pour lui demander d’intervenir, en sa faveur, auprès de son frère afin qu’il partage avec lui leur héritage. Autrement dit, il veut tirer un profit personnel à partir de la parole de Jésus. Et Jésus lui répond qu’il n’est pas qualifié pour régler les problèmes d’héritage. En effet, ceux qui écoutent la parole de Dieu ont parfois tendance à utiliser les paroles du Christ dans leurs propres intérêts. Par exemple, j’ai entendu un homme dire un jour à sa femme en citant Ep 5,24 : « comme l’Église est soumise au Christ, que les femmes soient soumises en tout à leurs maris ». Et il dit à sa femme : « tu dois m’obéir puisque c’est écrit dans la Bible ». Or tous ceux qui ont étudié un peu les textes savent parfaitement bien qu’il ne s’agit nullement de la soumission de la femme par rapport à l’homme. Il est dit que la femme est l’égale de l’homme. Gn 1, 27 ; « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme ». Homme et femme créés à l’image de Dieu. Les mathématiciens le comprendront très vite : si l’homme est créé à l’image de Dieu et que la femme est aussi créée à l’image de Dieu, les deux êtres humains sont créés avec une égale dignité. Prenons un 2ème exemple : l’expression « Dieu qui sonde les reins et les cœurs» (Ap 2,23). Certains chrétiens ses sentent mal à l’aise devant cette expression parce que le mot « rein », chez le créole, a parfois une connotation sexuelle, et comme ils se sentent mal à l’aise, ils le rejettent. Or les reins, dans la Bible, désignent le siège, la source des passions, des pensées secrètes, des sentiments cachés. Dire que « Dieu sonde les reins », c’est dire que Dieu est capable de connaître le fond de nos pensées secrètes, conscientes ou inconscientes, ce qu’il y a de plus intime au plus profond de nous-mêmes et que rien ne peut lui être caché. Ainsi devant les êtres humains on peut passer pour quelqu’un d’honnête alors qu’au plus profond de nous-mêmes, Dieu sait que nous pouvons être des hypocrites. On pourrait trouver d’autres exemples, d’autres expressions bibliques, où certaines personnes pourraient essayer de tirer un avantage, un intérêt pour en tirer profit, ou encore un désavantage pour les gommer, les refouler ou les rejeter. Il n’y a pas à accepter ou à rejeter les expressions bibliques, il faut surtout essayer de les comprendre pour bien les interpréter. Paul nous dit en 1 Co 10,24 : « Que personne ne cherche son propre intérêt, mais celui d’autrui » ; 1Co 10,33 : « je m’efforce de plaire en tout à tous, ne recherchant pas mon propre intérêt, mais celui du plus grand nombre, afin qu’ils soient sauvés ». Et quand on parle d’intérêt personnel, il peut s’agir de l’argent (c’est ce que font les faux prophètes qui fondent leurs propres groupes sectaires pour s’enrichir), il peut s’agir aussi des honneurs, de la gloire, de la reconnaissance, du pouvoir qu’on pourrait avoir sur d’autres personnes. Il ne faut pas se tromper de but dans notre vie qui est de s’unir au Christ par la foi afin d’être sauvé et avoir la vie éternelle, et que par l’évangélisation, l’humanité entière soit sauvée. C’est pourquoi, à part tout ce qui concerne Dieu, sa volonté, ses enseignements, ses commandements, « tout est vanité » nous dit le premier texte d’aujourd’hui. Tout ce que nous faisons dans notre vie, le travail, le savoir, la réussite sur tous les plans, tout cela ne nous amènera pas forcément à la vie éternelle, à la vie au Royaume de Dieu, au partage de la vie divine où se trouve le bonheur éternel. Aucune satisfaction terrestre ne peut assouvir, contenter, satisfaire, apaiser, combler la soif du bonheur qui, en fait, ne se trouve qu’en Dieu seul. La réponse de Jésus à l’homme qui lui a parlé de l’héritage est : « Attention, gardez-vous de toute cupidité (c’est-à-dire du désir immodéré de l’argent et des richesses) car, au sein même de l’abondance, la vie d’un homme n’est pas assurée par ses biens ». La réussite matérielle sur terre ne garantit ni le bonheur, ni la vie éternelle avec Dieu. La richesse peut nous détourner de Dieu et du prochain. Les mauvais riches, nous dit Père Antoine Baron, sont ceux qui mettent leur espoir dans leur satisfaction et spécialement dans leur orgueil. « En soi, la possession de biens matériels est un don de Dieu pour que le bonheur soit partagé. Dieu n’a jamais désiré l’appauvrissement des gens ou la pauvreté en elle-même, ou encore la privation de toutes richesses pour les chrétiens. Ce serait une injustice que d’affirmer le contraire. Les pauvres, autant que les riches, peuvent être de grands pêcheurs et des monstres d’orgueil, nous dit Père Antoine Baron. La souffrance liée à la misère peut amener les pauvres au vol et au crime, et la jalousie à l’égard des riches peut induire une révolte contre Dieu. La pauvreté matérielle n’entraîne malheureusement pas la justice et la sainteté de manière automatique, ce serait trop beau. Inversement, certains riches mettent généreusement leurs ressources matérielles au service des autres. Il s’agit d’imiter le Christ. L’idéal n’est pas d’être pauvre, mais d’avoir le bonheur de soulager les malheureux, à la manière de Jésus » (Père Antoine Baron). Toute sa vie, Jésus n’a cessé de secourir les pauvres, de prendre soin d’eux. Dieu invite plutôt à accueillir dans un esprit de pauvreté la gestion des biens matériels. Le problème est spirituel : il ne porte pas sur la possession de biens matériels en soi. – Jésus donne une parabole : celle d’un riche dont les terres avaient beaucoup rapporté. Il pense alors agrandir ses greniers pour entreposer davantage de blé, et avoir ainsi une grande réserve pendant de nombreuses années. Il va pourvoir alors se reposer, manger, boire et faire la fête. Malheureusement pour lui, le soir même, il meurt. Il a voulu avoir beaucoup de richesse pour lui-même, et il n’aura rien. Le trésor qu’il faut amasser n’est pas celui de la richesse matérielle, mais bien celui qui est fait en vue de vivre éternellement avec Dieu. Aux fidèles du Christ, Saint Paul dit que le chrétien doit rechercher les choses d’en haut et non celles de la terre car « vous êtes morts », c’est-à-dire que par le baptême nous sommes morts au péché et unis au Christ, participant déjà réellement à sa vie céleste, mais cette vie, qui demeure spirituelle et cachée sur terre, sera manifeste, c’est-à-dire évident, visible, au moment de la Parousie, c’est-à-dire à la fin des temps lorsque reviendra le Christ pour le jugement dernier. – Et puisque le Christ a quitté ce monde terrestre et qu’il est ressuscité, nous aussi nous devons quitter ce monde terrestre, par le détachement aux biens matériels, par un certain dépouillement, renoncement, privation de choses non utiles pour notre salut. Ce détachement ne pourra jamais se faire par notre seule force, ni par notre volonté personnelle mais par la foi en Jésus Christ qui nous aidera petit à petit à nous délaisser, un peu plus chaque jour, des choses matérielles pour nous tourner davantage vers les choses d’en haut. Il faut de la patience et de la persévérance dans son union au Christ. C’est la foi en Jésus qui nous amènera à nous mortifier, et la mortification nous conduira, avec la grâce de Dieu, à fuir, à combattre, à éliminer la fornication c’est-à-dire les relations sexuelles hors mariage, l’impureté, les mauvais désirs, la cupidité, la colère, l’emportement, la malice, les outrages, les vilains propos, le mensonge etc…Cette mortification est une lutte permanente contre la recherche de la grandeur, de l’estime, de la reconnaissance, de son intérêt personnel….

Saint Louis-Marie Grignion de Monfort nous dit : « Tous ceux qui sont à Jésus-Christ… ont crucifié leur chair avec ses vices et ses concupiscences », c’est-à-dire qu’ils combattent activement leurs propres péchés et leur attrait naturel vers les biens matériels, terrestres…, et … se font une continuelle violence (contre leurs propres défauts, leurs propres faiblesses, leurs propres péchés), ils portent leurs croix tous les jours, et enfin sont morts (au monde terrestre qui passe ainsi au second plan dans leur vie) » afin de se dépouiller du vieil homme (celui du péché) pour se revêtir du nouvel homme qu’il devient en étant uni au Christ ressuscité. Pour avoir la Sagesse incarnée, c’est-à-dire Jésus Christ, il faut pratiquer la mortification ( Col. 3,5 ; 2è texte d’aujourd’hui), le renoncement au monde et à soi-même ». Ne vous imaginez pas, nous dit encore Grignion de Monfort (§195 – L’Amour de la Sagesse Eternelle), « que cette Sagesse, c’est-à-dire Jésus-Christ…entre en une âme et un corps souillés par les plaisirs des sens. Ne croyez pas qu’elle donne son repos, sa paix ineffable, à ceux qui aiment les compagnies et les vanités du monde ». Saint Jean de la Croix dit la même chose : « Tous doivent s’efforcer de mortifier leur être sensible qui, par le moyen des appétits désordonnés (provenant de nos cinq sens), peut être un obstacle à l’union divine.- Plus on est uni au Christ, plus les choses matérielles et terrestres vont se décanter d’elles-mêmes et plus les passions, quelles qu’elles soient, bonnes ou mauvaises, vont s’estomper, diminuer au fur et à mesure, « en douce et sans secousse » comme disent les créoles, et disparaîtront d’elles-mêmes, presque sans effort de notre part, et même sans aucun regret, par le seul fait qu’on est davantage en compagnie de Jésus-Christ qui prendra de plus en plus de place dans notre vie. Par la foi et par le seul fait de vivre en Jésus-Christ, la vie des chrétiens est débarrassée, par la grâce de Dieu, des mauvaises choses qui alourdissaient leur vie, leur permettant de vivre en paix quel que soient leur condition de vie. – C’est pourquoi Thérèse d’Avila nous dit à un certain moment de sa vie : « Que rien ne te trouble, que rien ne t’épouvante, tout passe, Dieu ne change pas, la patience obtient tout; celui qui possède Dieu ne manque de rien: Dieu seul suffit.– Même le grand Saint Thomas d’Aquin a arrêté d’écrire son 3è tome de la Somme Théologique car dit-il « tout ce que j’ai écrit me paraît de la paille » – un chef d’œuvre considéré par son auteur comme une vanité – après ce qui lui a été révélé au cours d’une messe. L’hostie que nous recevons à la messe, c’est le Christ ressuscité que nous recevons. Et ceux qui communient, nous dit Saint Thomas d’Aquin, sont appelés à se convertir et seront changés dans le Corps du Christ (Eglise). Et c’est l’Eglise qui grandit ainsi, en qualité. « C’est en communiant et en accueillant la grâce de la communion que l’Eglise se construit…au cœur de l’humanité ». Nicolas Buttet nous dit que « Le mystère (de la messe, de la communion, de l’Eucharistie) doit nous étonner. Si nous ne nous étonnons plus, c’est l’indifférence qui prendra la place de l’étonnement. Et l’indifférence conduit à la tiédeur. La fréquentation répétée des mystères et notamment de l’Eucharistie, peut conduire à un émerveillement croissant ou à une habitude mortelle. Il nous faut sans cesse nous ressaisir, nous laisser toucher par l’inaccessible afin de ne pas s’habituer ». Si la messe nous devient une habitude du dimanche, il faudra nous ressaisir pour chercher à comprendre les merveilles de la messe. Même ceux qui communient doivent rester éveillés pour rester aussi dans la communion spirituelle. Saint-Marie Grignion de Monfort nous dit qu’uni au Christ ressuscité (par la communion), ce dernier nous « donne un goût pour tout ce qui est de Dieu, et nous fait perdre le goût des créatures. Il réjouit notre esprit par le brillant de ses lumières; il verse en notre cœur une joie, une douceur et une paix indicibles, même parmi les amertumes et les tribulations les plus rudes ». C’est à la messe que nous pouvons revêtir l’homme nouveau, celui qui s’achemine vers la vraie connaissance, en se renouvelant à l’image de notre Créateur, car c’est à la messe que nous recevons l’Esprit Saint qui nous donne un cœur nouveau rempli de l’amour de Dieu ((Rm 5,5), capable de nous faire connaitre Dieu qui est Amour, et que le Christ, qui habite en nos cœurs par la foi pour nous enraciner dans l’amour ( (Ep 3,17), fait de nous un homme nouveau, une création nouvelle (2Co 5,17) à l’image du Dieu Créateur. Merci à Marie qui porte tout cela dans son cœur et qui prie sans cesse pour nous.

                                                                                   Claude Won Fah Hin

 




18ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 12,13-21)

« Recherchez les réalités d’en haut. »

 

Voilà une phrase qui ferait bien sourire bon nombre de personnes dans notre société actuelle …

« Pourquoi parler d’en haut ? Il n’y a rien là-haut ! ».

C’est ce que l’on a fait dire au premier cosmonaute, Youri Gagarine, à son retour sur terre : « J’étais dans le ciel et j’ai bien regardé partout : je n‘ai pas vu Dieu. » …

Cette phrase nous fait sourire, nous les croyants, car Dieu ne se voit pas dans notre monde avec les yeux.

Mais au-delà du ’’voir’’, il y a cette réalité, cette propension générale à considérer que les choses les plus importantes dans la vie sont celles qui permettent de ’’bien vivre’’, dans une belle maison avec tout le confort, avec une belle voiture etc …

Dans les collèges, il y a souvent des journées des métiers, pour permettre aux élèves de rencontrer des personnes de différentes professions, et pouvoir leur poser des questions. Et la question qui revient le plus souvent est : « Combien on gagne ? ».

Une année, au collège Saint Michel, on avait proposé un stand « Vocations religieuses » animé par quelques religieuses … Moins de dix élèves ont visité le stand !

Dieu ne fait pas partie des projets d’avenir …

« Vanité des vanités, tout est vanité ! »

Et la parabole que Jésus dit dans l’évangile nous le rappelle : « La vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède. », avec cet homme, déjà riche, mais qui voit encore plus grand en reconstruisant d’autres greniers, rêvant déjà : « Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. ».

Dans son esprit, il n’est pas question de sa femme, de ses enfants, de ceux qu’il côtoie, ses amis, des pauvres, de ses ennemis, de Dieu. Il ne pense pas à créer des emplois, pour faire vivre son village. Il ne pense qu’à lui …

Mais il ne savait pas que Dieu lui retirerait la vie dans la nuit …

« Vanité des vanités, tout est vanité ! »

Je vous propose une autre parabole :

« Karl était un homme très riche qui possédait une grande entreprise. Un de ses passe-temps favoris était de monter au dernier étage de son gratte-ciel, et de regarder tout ce qu’il possédait et de se féliciter sur sa grande richesse. Un midi, Karl sortit de son gratte-ciel et il aperçut un de ses employés, un vieux livreur de journaux du nom de Joseph. C’était l’heure du dîner et Joseph était à l’ombre d’un arbre dans le parc, et il se préparait à manger. Mais avant de manger, il a incliné sa tête, joint les mains en prière pour remercier Dieu pour sa nourriture. Karl a regardé l’homme en prière. Puis il a regardé son repas. C’était un simple sandwich au fromage. Avec un ricanement Karl a crié, « Si c’est tout que j’avais à manger, je ne prendrais pas la peine de prier. » Joseph a répondu humblement, « Pour moi c’est suffisant et je suis reconnaissant à Dieu. »

Karl fut étonné par la réponse de Joseph.

Voyant que Karl poursuivait son chemin un peu songeur, Joseph ajouta  » Attendez une minute. J’ai besoin de vous dire quelque chose. J’ai fait un rêve hier soir. J’ai entendu une voix qui disait, « Ce soir l’homme le plus riche de la ville mourra. Ce soir l’homme le plus riche de la ville mourra « .

« Des sottises, voyons donc ! » dit Karl alors qu’il s’en retournait chez lui. Mais les mots de Joseph le tracassaient, « Cette nuit l’homme le plus riche de la ville mourra ! » Jusqu’alors il s’était tout à fait bien senti, mais maintenant il commençait à éprouver des douleurs dans sa poitrine. Il commença à se demander, « Est-ce que c’est vrai ? Est-ce que je vais mourir ce soir ? »

De retour à la maison il appela son médecin à sa clinique privée et lui raconta le rêve de Joseph et les douleurs qu’il avait ressenties. Son médecin lui dit, « Il ne me semble pas qu’il y ait de quoi s’inquiéter, mais pour vous tranquilliser, je viendrai vous examiner. »

Après l’examen, le médecin lui dit, « Karl, il n’y a aucune raison pour que vous mouriez ce soir. » Ainsi rassuré, Karl s’est mis au lit. Le matin suivant, on frappa à sa porte, et le messager dit, « Karl, le vieux Joseph, le livreur, il est mort hier soir ! »

C’était bien vrai ! L’homme le plus riche de la ville était mort hier soir ! »

Il avait bien compris la parole de saint Paul : « Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre. »

Seigneur Jésus,

pris dans l’engrenage de notre société,

qui nous pousse à la consommation,

nous oublions bien souvent

de penser à toi,

et quand on te prie,

on se laisse souvent distraire

par des choses futiles.

Aide-nous à mettre en premier

« les réalités d’en-haut ! »

 

                                              Francis Cousin

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le lien ci après : Image dim ord C 18°




18ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Les vraies richesses

 Lc 12, 13-21

« La vie d’un homme, fut-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses ».

Combien de fois avons-nous pensé le contraire ?

Combien de fois avons-nous jaugé et estimé et respecté quelqu’un parce qu’il était riche, donc influent, donc puissant ? Combien de fois avons-nous fait la différence dans notre jugement entre celui qui n’avait pas grand-chose et que nous traitions avec pitié, et celui qui avait du bien sous le soleil et que nous ménagions et traitions avec déférence ?

Notre monde actuel est tellement centré sur le profit, l’acquisition des richesses, le salaire, la vie économique que tous nos jugements sur les hommes sont faussés par cette mentalité, à tel point qu’avant même de juger un homme et d’avoir une opinion sur lui, nous regardons d’abord sa voiture, sa maison, son métier, son standing,… Autrement dit : on ne juge pas quelqu’un à cause de ce qu’il est, mais à cause de ce qu’il a. Dans notre société, nous confondons très vite et très facilement le verbe « être » avec le verbe « avoir » et l’ambiance est telle autour de nous qu’il devient plus important d’avoir plus que d’être mieux.

Si demain on proposait, dans la commune, à chaque habitant, le choix, entre un chèque de 6 000 euros ou bien l’acquisition d’une nouvelle qualité personnelle : on peut être sûr qu’à 90% les gens feraient la queue devant le guichet du chèque et non pas devant celui qui lui permettrait de se changer personnellement en mieux.

On confond l’homme lui-même avec son portefeuille et on assimile le propriétaire avec sa propriété. On dit : « L’homme ne vaut pas plus que ce qu’il possède ». S’il ne possède rien, il n’est rien ! S’il a de grands biens, il est quelqu’un ! L’homme lui-même est matérialisé, mis au niveau, rabaissé à sa valeur marchande. Ne dit-on pas, en Amérique : « Un tel vaut tant de dollars ! », ce qui veut dire son « salaire mensuel ». On le compare avec son gagne-pain !

Or, l’Evangile nous le rappelle fortement en ce dimanche : la valeur d’un homme, même s’il est riche, n’a rien à voir avec sa richesse. Il peut arriver qu’un homme riche soit un type bien, comme il peut arriver qu’il soit une crapule. C’est aussi vrai chez les pauvres : un pauvre peut avoir une valeur humaine extraordinaire ; ce peut être aussi une nullité.

Faisons bien attention, mes frères, à toujours bien distinguer le verbe être et le verbe avoir. C’est la leçon de l’Evangile d’aujourd’hui. Nous savons, nous chrétiens, où est la priorité. Attachons-nous :

– à être plus, à devenir mieux,

– à enrichir notre personnalité,

 – à étoffer notre humanité,

– à donner à notre corps, à notre esprit, à notre cœur, à notre âme de nouvelles possibilités d’être plus homme, plus femme.

Il y a dans chacun d’entre nous des qualités qui ne demandent qu’à grandir, des bourgeons qui ne demandent qu’à s’épanouir. C’est incroyable ce qu’avec l’aide de Dieu et avec la force de l’Esprit Saint, nous pourrions devenir, si nous étions un peu plus coopérants, un peu plus attentifs à ce que Dieu voudrait  faire en nous, avec nous et par nous. « Deviens ce que tu es », disait un philosophe.

Or, par le Baptême, nous  sommes  devenus  des  fils  de Dieu. Déjà par notre naissance, des créatures de Dieu : alors, quel  chemin  à  faire, quelle  distance   encore  à  parcourir  pour  atteindre  nos  possibilités personnelles et réelles ! Resterons-nous des embryons de ce que nous pourrions devenir ou, au contraire, allons-nous développer et épanouir au maximum tout ce que Dieu a déposé en nous pour l’exploiter et le faire valoir ?

Si, un jour, nous avions la possibilité de voir ce que nous aurions pu devenir et le comparer avec ce que nous sommes devenus, nous serions sans doute honteux et pleins de remords et nous dirions : « Qu’ai-je fait de ma vie ! Quel gaspillage, quel gâchis ! », et tout cela parce que je me suis attaché à de fausses valeurs, aux biens qui étaient à l’extérieur de moi, au lieu de faire valoir les richesses qui étaient en moi et qui, celles-là, sont restées au fond de moi, comme une mine ignorée et inexploitée.

Dans cet Evangile, le Seigneur ne nous dit pas d’être pauvres, il nous avertit seulement de ne pas nous tromper de richesses. Il y a les  vraies richesses et les fausses, les vraies valeurs et les fausses et souvent nous nous laissons séduire, par le toc, par le clinquant, par le bling bling : ce qui n’est que de la poudre aux yeux.

A quoi reconnaîtrons-nous qu’une richesse est vraie, qu’une valeur est une vraie valeur ? Comment pouvons-nous faire la différence ? Il y a trois moyens de vérifications :

  • Le 1er critère : Est-ce une chose qui passe ou qui ne passe pas ?

Le Seigneur nous le rappelle : « Amassez des trésors que les vers ni la rouille ne peuvent attaquer ».

On n’a jamais vu un coffre-fort suivre le corbillard de son propriétaire ! Devant Dieu, vous serez riches, non pas de ce que vous aurez amassé, mais de ce que vous aurez donné :

«J’étais nu, tu m’as habillé ; j’avais faim, tu m’as nourri ;

j’étais dans le besoin, tu es venu à  mon  secours ».

Voilà les richesses qui ne passent pas : celles qui produisent la bonté, la pitié, le pardon, la miséricorde, la générosité. Devant Dieu, vous serez riches des biens dont vous vous êtes dépouillés pour aider les autres, et pauvres de ce que vous avez gardé et amassé, alors que d’autres en avaient bien plus besoin que vous !

Le 2e critère : « Est-ce une richesse qui se rapporte au verbe être ou bien au verbe avoir ? » Je m’explique : on peut dire de quelqu’un « C’est une valeur », on peut dire d’une chose « Ça a de la valeur ».

Vos valeurs, sont-elles personnelles ou matérielles ? Est-ce en vous ou à côté de vous ? Vos acquisitions sont-elles un progrès que vous avez fait, une qualité développée, de la patience en plus ou seulement une nouvelle broche à votre corsage ? Une meilleure attention aux autres ou une voiture puissante ?

*Le 3e critère est celui du sens de ma vie, de ma vie définitive, totale : pas seulement celle de la terre, mais celle qui continue après.

Est-ce une richesse qui a une valeur aussi aux yeux de Dieu ?

Quelle importance Jésus-Christ lui accorderait-elle ?

Est-ce- qu’il me dirait en l’acquiesçant : « Mon pauvre ami, tu perds ton temps » ou, au contraire, «  N’hésite pas, tu en auras besoin aussi dans ta vie éternelle. Ce que tu as acquis là a de la valeur aux yeux de Dieu ».

Nous avons à devenir riches en vue de Dieu, riches de la richesse même de Dieu, riches de bonté, riches de pardon, riches  de fidélité, riches d’amour des autres, riches d’oubli de soi, de dévouement, d’efforts et de souffrances offertes, riches de joie donnée et communiquée.

Aujourd’hui, c’est aussi la fête de St-Ignace-de-Loyola, le fondateur des Jésuites, je rappellerai cette phrase de l’Evangile qui l’avait si fortement frappé et qu’il aimait redire : « Que sert à l’homme de gagner l’univers s’il vient à perdre son âme ? »  AMEN




18ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 12, 13-21)

« Vivre non pas pour soi,

mais pour les autres »

(Lc 12,13-21)…

En ce temps-là, du milieu de la foule, quelqu’un demanda à Jésus : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage. »
Jésus lui répondit : « Homme, qui donc m’a établi pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ? »
Puis, s’adressant à tous : « Gardez-vous bien de toute avidité, car la vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède. »
Et il leur dit cette parabole : « Il y avait un homme riche, dont le domaine avait bien rapporté.
Il se demandait : “Que vais-je faire ? Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte.”
Puis il se dit : “Voici ce que je vais faire : je vais démolir mes greniers, j’en construirai de plus grands et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens.
Alors je me dirai à moi-même : Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition, pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.”
Mais Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?”
Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. »

        

       Un conflit oppose ici deux frères sur une question d’héritage… L’un voudrait en avoir une part, alors que son frère a déjà tout pris pour lui. Ce dernier était peut-être l’aîné à qui tout revenait de droit… Mais il ne veut rien partager ! Et son frère de son côté ne veut rien lâcher ! Nous le constatons, les deux sont habités par cette « âpreté au gain » vis-à-vis de laquelle Jésus nous met ici en garde…

        En effet, « la vie d’un homme, fût-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses ». Il est vrai que celles-ci lui permettent de subvenir aux besoins de son corps. Il en faut donc un minimum, et « le Père sait de quoi nous avons besoin avant même que nous ne lui ayons demandé » (Mt 6,8). « Ne cherchez donc pas ce que vous mangerez ni ce que vous boirez… Ne vous tourmentez pas. Votre Père sait que vous en avez besoin. Cherchez donc son Royaume, et tout le reste vous sera donné par surcroît » (Lc 12,29-31). Et « qui cherche » son Royaume le « trouve » (Lc 11,10) car « votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume » (Lc 12,32), « Lui qui vous a fait le Don de son Esprit Saint » (1Th 4,8)… Le Royaume de Dieu est en effet Mystère de Communion avec Lui dans l’unité d’un même Esprit (cf. Rm 14,17 ; 2Co 13,13).

            Or, écrit St Paul, « l’Amour de Dieu a été versé dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5,5). Et cet Amour ne peut qu’être une Force qui entraîne les pécheurs que nous sommes sur les chemins de la conversion, c’est-à-dire du partage et de la solidarité, à contre sens de tout égoïsme… Deux logiques s’opposent donc : celle de la recherche de soi, sans se préoccuper des autres… Celle de la recherche du bien de l’autre, au prix parfois de quelques sacrifices…

            Ces deux frères, chacun ne pensant qu’à lui-même, sont plutôt dans la première. Pour les aider à en prendre conscience, Jésus va leur offrir la parabole de cet homme « dont les terres avaient beaucoup rapporté ». « Que vais-je faire ? Je vais démolir mes greniers, j’en construirai de plus grands. J’y entasserai tout mon blé… et je me dirai à moi-même : repose-toi, jouis de l’existence »… Je, je, je, je, mon, me, moi-même… Cet homme ne pense qu’à lui-même, à ses richesses, à son bien-être personnel… Aucune pensée pour autrui, et donc aucune marque d’attention… Mais il a oublié que nous ne sommes que de passage ici-bas : « Tu es fou : cette nuit même, on te redemande ta vie. Et ce que tu as amassé, qui l’aura ? »… Certainement pas lui ! Dépossédé des biens de ce monde, que lui restera-t-il lorsqu’il arrivera en l’autre ? « Tout passe, l’amour seul demeure » (Ste Thérèse d’Avila)…                DJF




17ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 11, 1-13)

« Demandez, on vous donnera. »

Jésus raconte l’histoire (inventée) de cet homme qui va demander en pleine nuit trois pains à prêter à un de ses amis pour pouvoir accueillir dignement un autre ami qui arrive de voyage, et il termine l’histoire par ces mots : « Je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut. ».

Voilà une façon bien terre à terre de voir les choses qui ne peut que nous surprendre.

Parce qu’on n’a pas l’habitude de se comporter ainsi, et on aurait honte d’être aussi sans-gêne vis-à-vis d’un de nos amis … et encore plus vis-à-vis de Dieu …

Parce que l’ami dérangé en pleine nuit, c’est Dieu !

Même s’il n’y a pas de nuit pour Dieu !

Et on ne peut pas demander quelque chose à Dieu qu’on n’oserait pas demander à un ami !

On ne peut pas être aussi sans-gêne vis-à-vis de Dieu ! Nous qui ne sommes que des humains, des pécheurs !

Nous avons surtout à accepter de recevoir, gratuitement, ce qu’il nous donne … et dans son grand amour, il nous donne beaucoup …

Et pourtant, Jésus nous le dit clairement : « Demandez, on vous donnera. »

Mais on n’ose pas ! On a peur que Dieu ne nous exauce pas ! …

Ou alors, peut-être que nous n’avons pas suffisamment confiance en lui !

Mais Dieu n’est pas comme nous … qui ne tenons pas toujours nos promesses !

Dieu, comme Jésus, est Vérité, et tout ce qu’il dit, il le fait …

Et donc il donne ce qu’on lui demande … à condition que ce soit pour le bien commun … et non pour notre satisfaction personnelle … et que ce soit la meilleure chose pour nous, selon le regard de Dieu … et nous selon le regard des hommes …

« Demandez, on vous donnera. »

On retrouve cette phrase dans les quatre évangiles, sous des formes diverses :

« Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. » (Jn 14,13)

« Tout ce que vous demandez dans la prière, croyez que vous l’avez obtenu, et cela vous sera accordé. » (Mc 11,24)

Saint Marc ajoute deux choses importantes : la première c’est que la demande doit être faite dans la prière, c’est-à-dire dans une relation directe avec Dieu ! Et la seconde, qui demande un acte de foi de notre part, c’est que nous croyions que cette demande est déjà obtenue, au moment même où nous la faisons, avant même la réalisation de celle-ci !

C’est l’histoire qu’un ami m’a confiée :

« Pour célébrer une fête patronale qui devait réunir environ mille cinq cents personnes, l’église étant trop petite, il avait été décidé de célébrer la messe en plein air. Mais ce jour-là, la météo n’était pas très favorable, et il était prévu de la pluie. Un quart d’heure avant la messe, les nuages chargés de pluie arrivaient et on se demandait si la messe pourrait avoir lieu !

Le responsable de l’organisation se tourna alors vers Dieu en lui disant « Seigneur, cette messe est trop importante pour toutes les personnes qui sont là, on ne peut pas la repousser ! Laisse-nous le temps de célébrer cette messe, et après tu pourras faire tomber la pluie. ».

Puis il alla dire à tout le monde « On y va ! Pas de problème ».

Et la messe se déroula comme sous un ciel certes nuageux, mais sans pluie.

Les premières gouttes de pluie commencèrent à tomber à la fin du chant final ! »

Certains pourraient dire : « C’est un coup de chance … le hasard … »

Mais on peut se dire aussi, et je le crois, que Dieu a voulu permettre que cette messe puisse se dérouler sans problème, sans que les participants (et le matériel) ne soient mouillés par la pluie.

Rendons grâce à Dieu !

Seigneur Jésus,

Nous sommes trop frileux

dans nos demandes.

Nous avons tellement peur

que tu ne nous exauces pas !

Fais que nous croyons en Toi qui as dit :

« Demandez, on vous donnera. »

                                              Francis Cousin

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17ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Vous  direz « Notre  Père »

 Lc 11, 1-13

Ce passage de l’Evangile, mes frères, est sans doute l’un des plus éclairants que Jésus nous ait révélé sur la nature de Dieu.   Longtemps, pendant des heures parfois, les apôtres voyaient Jésus prier. On le voit par exemple au Jardin des Oliviers ou le soir, seul, dans un endroit retiré, tandis qu’eux-mêmes, au bout de quelques minutes, un peu comme nous parfois, ils sont secs, ils ne savent plus quoi dire…

Aussi sont-ils admiratifs et en viennent-ils à demander à Jésus :

« Jésus, apprends-nous à prier ».

Mais avant de prier quelqu’un, il faut le connaître, savoir qui il est, son caractère, son tempérament, et, j’allais dire son point faible. Quand un enfant demande une permission, il sait très bien s’il doit la demander plutôt à son père ou à sa mère et quel est le moment le plus favorable et la façon dont il doit s’y prendre…

C’est ce que nous apprend Jésus aujourd’hui : « Quand vous priez, nous dit-il, vous direz « notre Père » ». Dieu : un Père, une Mère, Dieu tendresse, Dieu Amour, Dieu qui s’occupe de nous comme un père s’occupe de son fils, ça a dû faire choc dans l’esprit des apôtres !

Déjà, bien sûr, dans l’Ancien Testament, Dieu avait manifesté de l’amour pour son peuple en le défendant de ses ennemis, mais avec une « poigne forte et bras raccourci », comme dit le psaume et si, parfois, par le prophète Osée ou Isaïe, Dieu a des accents d’affection  à  l’égard de son peuple, l’éducation  qu’il lui donne ressemble parfois à un dressage.

Par quelles tribulations, par quelles dures épreuves, passe Israël, pour assouplir ce peuple dont Dieu dit, lui-même «qu’il a la nuque raide » : c’est la faim et la soif dans le désert, les batailles perdues, les pillages, les exils successifs, les invasions, la destruction du Temple, annoncés par les prophètes et qui se réalisent inexorablement.

Dieu fort, Dieu terrible, Dieu jaloux, Dieu vengeur, devant qui on se voile la face « éloigne-toi de moi, Seigneur, car je ne suis qu’un homme aux lèvres impures », Dieu tout puissant, maître des éléments, maître des évènements, Dieu exterminateur des méchants, punissant sévèrement même ses meilleurs serviteurs : Moïse qui n’entre pas dans la Terre Promise par un manque de confiance en Dieu, David dont l’enfant est tué parce qu’il a péché.

Mais quand vous priez, vous direz « notre Père », quelle révélation !

. Dieu : un père que l’on doit appeler par son nom : « Que ton nom soit sanctifié ».

. Un Père qui leur donne à manger : « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour ».

. Un Père qui pardonne : « Pardonne-nous nos offenses ».

. Un Père qui nous soutient et nous protège : « Délivre-nous du mal ».

. Un Père qui est prêt à nous donner tout ce dont nous avons besoin : « Demandez et l’on vous donnera ».

. Un Père qui est prêt à nous faire découvrir tout ce que nous désirons savoir : « Cherchez et vous trouverez ».

. Un Père qui est prêt à ouvrir la porte à chaque fois que l’on y frappe : « Frappez et l’on vous ouvrira ».

 

Cependant, attention, pas d’équivoque, pas de  malentendu. Ce  n’est pas par usure, par ennui, parce que l’on insiste trop, que Dieu nous exauce, comme l’ami qui est dérangé pendant la nuit et qui lui donne pour se débarrasser de lui. Non, c’est par amour, c’est par affection pour nous parce que sa nature est don de soi, oubli de soi, parce que sa joie c’est de donner, de se donner, de semer la joie autour de lui. Dieu n’a qu’un désir, n’attend qu’une chose, qu’on lui demande ce dont on a vraiment besoin, pour nous le donner avec joie.

Si Dieu a été créateur, si le monde existe, si nous sommes là aujourd’hui, c’est parce que Dieu est amour et qu’un véritable amour ne peut pas se garder pour soi. Il doit faire surgir la vie. Prenez deux époux qui ne sont pas égoïstes, leur amour, à eux aussi, devient pro créateur, c’est-à-dire créateur comme celui de Dieu. Ils ne peuvent garder leur amour pour eux deux, il faut qu’ils en fassent profiter d’autres êtres : leurs enfants et leur couple devient alors un foyer d’amour. Dieu, Trinité, foyer d’amour, n’a pas  voulu, n’a  pas pu garder cet amour en circuit fermé, il fallait qu’il éclate : « Amor diffusum sui » dit St-Augustin.

« L’amour, de par sa vraie nature, est don de soi aux autres » et c’est parce que l’homme a été créé à l’image de Dieu que son amour pour un autre, ou pour une autre, devient, lui aussi, créateur de vie, créateur de leurs enfants, comme Dieu, et qu’ils s’en occupent jour après jour, année après année, pour épanouir, peu à peu, leur corps, leur esprit, leur cœur, leur âme. Ils ne font pas autre chose que ce que fait Dieu avec nous !

Et c’est pourquoi, à la fin de cet Evangile, Dieu se compare lui-même aux papas et aux mamans de la terre pour nous donner un  argument  a fortiori : « Vous  les papas, vous  les mamans, qui cependant n’êtes pas parfaits, dont l’amour est encore à améliorer, qui perdez souvent patience et qui avez parfois tendance à dire à vos enfants : « Va voir ailleurs si j’y suis », vous qui êtes comme vous êtes, …, sincèrement, est-ce que vous auriez le cœur de donner un serpent à votre fils qui vous demande un poisson ? Ou un scorpion, s’il vous demande un œuf ?…Bien sûr que non, n’est-ce pas ? »

Si donc, nous qui sommes des pécheurs, qui ne sommes pas parfaits, tant s’en faut, qui sommes capables d’actions ou de pensées méchantes, nous savons si bien donner de bonnes choses à nos enfants, alors Dieu, Dieu amour, Dieu amour total, à combien plus forte raison !

Bien mieux, lui, il n’attend que cela, qu’on lui demande, pour pouvoir donner et plus fort encore, c’est lui qui nous demande de demander ! Ce n’est pas nous qui cherchons pour trouver, c’est lui qui nous cherche pour nous trouver (comme le bon pasteur avec la brebis perdue). Non seulement, il nous dit :

« Frappez et l’on vous ouvrira », mais c’est lui qui frappe à notre porte, nous dit St-Jean dans l’Apocalypse : « Voici que je me tiens à ta porte et que je frappe. Si quelqu’un m’ouvre, j’entrerai chez lui et nous dinerons ensemble, lui avec moi et moi avec lui ».

Mais, frères et sœurs, je vous vois venir avec une objection que j’ai souvent entendue : « Je sais, Dieu est Père, Dieu me veut du bien, mais souvent j’ai demandé et je n’ai pas reçu. Souvent, j’ai frappé et l’on ne m’a pas ouvert. Souvent, j’ai cherché et je n’ai pas trouvé ».

Ecoutez bien, alors, la dernière parole de notre Evangile d’aujourd’hui et nous aurons la réponse :

« Vous  qui donnez  de bonnes  choses  à vos enfants, combien plus votre Père du ciel donnera-t-il L’ESPRIT-SAINT à ceux qui le lui demandent ».

Il ne s’agit pas de demander n’importe quoi à Dieu, de frapper à n’importe quelle porte, de chercher n’importe quoi, n’importe comment. Dieu veut nous donner le meilleur, l’essentiel, ce dont nous avons d’abord besoin, un besoin indispensable, vital, essentiel : l’Esprit-Saint, son Esprit d’amour, son Esprit de famille, à lui qui est Père, lui qui est oubli de soi, son esprit de générosité.

Voilà, en priorité ce dont nous avons besoin. Voilà le cadeau nécessaire et suffisant pour réussir notre vie : être animé par cet Esprit de Dieu et c’est LUI que nous devons demander dans notre prière et tout le reste nous sera donné par-dessus le marché.

Car il est heureux, de toutes façons, même s’il passe par des épreuves, celui qui vit en fils de Dieu, parce qu’il sait qu’il a un Père qui veille sur lui et qui l’aime plus encore que n’importe quel papa ou maman aime son enfant.

Il suffit de jeter notre regard vers Lui.  AMEN

 

 




17ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 11, 1-13)

« Quand vous priez, dites : Père »

(Lc 11,1-13)…

Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière. Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda : « Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean le Baptiste, lui aussi, l’a appris à ses disciples. »
Il leur répondit : « Quand vous priez, dites : Père, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne.
Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour.
Pardonne-nous nos péchés, car nous-mêmes, nous pardonnons aussi à tous ceux qui ont des torts envers nous. Et ne nous laisse pas entrer en tentation.»
Jésus leur dit encore : « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander : “Mon ami, prête-moi trois pains,
car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir.”
Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : “Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose.”
Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut.
Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira.
En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira.
Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ?
ou lui donnera un scorpion quand il demande un œuf ?
Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »

        

 

            « Seigneur, apprend-nous à prier ». Lui qui est toujours « tourné vers le sein du Père » (Jn 1,18), il invite ici ses disciples, et à travers eux tout homme, à faire de même. Tous, en effet, « nous avons été créés à son image et ressemblance », comme un fils ressemble à son papa (Gn 1,26-28 ; 5,3). « Et Dieu veut que tous les hommes », ses enfants, « soient sauvés » (1Tm 2,3-6). Alors, « que ta volonté soit faite » !

            « Père, que ton Nom soit sanctifié ». Or, la notion de « sainteté » dans la Bible renvoie à ce que Dieu Est en Lui-même. Quand il dit « Je Suis » (Ex 3,14) ou « Je Suis Saint » (Lv 19,2), il dit en fait la même chose. La notion de « Nom » elle aussi renvoie directement au mystère de celui qui le porte. Lorsque Marie dit « Saint est son Nom » elle évoque simplement le Mystère de « Celui qui Est » (Ex 3,14)… Et les deux termes qui entourent cette déclaration nous disent alors qui Est Dieu pour Marie : « Miséricorde » (Lc 1,50) « Toute Puissante » (Lc 1,49).

            Dire « que ton Nom soit sanctifié » revient donc à souhaiter que Dieu soit connu en vérité tel qu’Il Est. Or, dans la Bible, il est le premier à « sanctifier » son Nom en manifestant, par ses actions, « qui » Il Est : « Je sanctifierai mon nom que vous avez profané au milieu des nations. Alors elles sauront que je suis le Seigneur – oracle du Seigneur Dieu – quand par vous je manifesterai à leurs yeux  ma sainteté », c’est à dire « qui » je suis… Et dans la suite, nous le voyons agir avec une incroyable Miséricorde : « Je vous prendrai du milieu des nations,… je répandrai sur vous une eau pure, et vous serez purifiés ; de toutes vos souillures, de toutes vos idoles, je vous purifierai. Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. J’ôterai de votre chair le cœur de pierre, je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon Esprit, je ferai que vous marchiez selon mes lois, que vous gardiez mes préceptes et leur soyez fidèles » (Ez 36,23-27), enfin !

            Et puisque Dieu Est « Miséricorde Toute Puissante » dire « que ton règne vienne » revient à souhaiter le salut, la paix et les cris de joie pour tout homme pécheur, pourvu qu’il accepte que Dieu règne dans sa vie sur toutes ses misères, en toutes ses ténèbres : « Qu’ils sont beaux les pieds du messager qui annonce la paix, du messager de bonnes nouvelles qui annonce le salut, qui dit à Sion : Ton Dieu règne. Ensemble poussez des cris de joie, ruines de Jérusalem ! car le Seigneur a consolé son peuple, il a racheté Jérusalem. Il a découvert son bras de sainteté aux yeux de toutes les nations, et tous les confins de la terre ont vu le salut de notre Dieu » (Is 52,7-10).                   DJF




16ième Dimanche du Temps Ordinaire (Lc 10,38-42) – Francis Cousin

« Marthe … et Marie … »

Deux sœurs … deux caractères différents … mais un même désir :

Recevoir Jésus chez elles lors de son passage, et bien l’accueillir, lui et tous ceux qui le suivent, les apôtres, les disciples …

Marthe est une battante, une organisatrice. Elle est toute dans l’action … Elle s’occupe de l’aménagement de la maison, fait le menu, distribue et gère le travail des servantes … et cela fait beaucoup de travail pour nourrir tout ce monde …et elle veut faire honneur à ses invités …

Marie aussi veut faire honneur à ses invités, mais elle le fait en écoutant avec attention les paroles de Jésus …

On comprend bien que l’attitude de Marie, toute à la réflexion, exaspère au bout d’un moment Marthe, qui va de l’une à l’autre, se dépensant sans compter pour Jésus …et elle s’en plaint à lui.

La réponse de Jésus est bien connue : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. »

Jésus se met davantage du côté de Marie … mais chacune des deux sœurs a choisi ce qui leur correspondait le mieux … et Jésus respecte ces choix … et il les accueille avec la même valeur.

Il ne s’agit pas d’opposer ceux qui sont dans le domaine de l’action et ceux qui sont dans le domaine de la réflexion … les deux manières d’être sont nécessaires dans la vie du monde.

Et dans la vie spirituelle aussi …

Et les deux manières d’être coexistent en chacun de nous, les uns étant plus dans l’action, d’autres plus dans la réflexion, la méditation … Le plus difficile étant de trouver le bon équilibre entre les deux.

Il est vrai que même dans leur vie spirituelle, la plupart des gens sont dans l’action : on fait des choses, on a des activités caritatives, on a telle action ou responsabilité au niveau de la paroisse, on s’occupe de tel mouvement, etc …

Il en est de même pour les prêtres qui vont de rendez-vous en visites, de réunions pastorales en réunions de mouvements, qui sont occupés par l’entretien de l’église, etc …

Mais Jésus se met du côté de Marie, celle qui fait silence, qui écoute la Parole de Jésus, et qui vit intérieurement cette Parole …

« Marie a choisi la meilleure part. »

Jésus inverse l’ordre de nos valeurs : il préfère le silence à l’agitation, l’écoute attentive aux déversements de paroles, le recueillement aux paroles en l’air …

Dans la bible, généralement c’est Dieu ou Jésus qui choisit : Abraham, les prophètes, les apôtres … mais quand il s’agit de la meilleure part, il nous laisse choisir, … c’est nous qui choisissons.

Faisons le bon choix !

Malheureusement, souvent nous faisons le choix le moins bon … parce que nous avons peur du silence, parce que nous avons l’impression de perdre notre temps, parce que nous craignons la rencontre avec Dieu, parce que cela ne nous valorise pas, parce que …

Oh ! on ne le dit pas … mais c’est souvent cela …

Alors oui, lisons la Parole de Dieu, pratiquons la lectio Divina, faisons silence devant le saint sacrement ou le tabernacle, laissons-nous imprégner par la Parole, acceptons de nous faire petits devant Dieu …

C’est cela qui nous permettra de vivre véritablement en Chrétiens !

Seigneur Jésus,

souvent nous voulons tellement bien faire

que nous oublions de t’écouter,

de faire silence

pour intérioriser ta Parole,

de te prier seul à seul

pour que tu nous parles.

« Parles, Seigneur, ton serviteur écoute. »

 

                                                                                                                   Francis Cousin    

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16ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Marthe  et  Marie

 Lc 10, 38-42

« Méfiez-vous ! » « On ne se méfie jamais assez ! »

Notre monde est plein de ce cri. « Méfiez-vous des patrons, méfiez-vous des ouvriers, méfiez-vous des étrangers, des arabes, des voisins, des gendarmes, des voleurs,… que sais-je ».

« Méfiez-vous ! » et si vous n’entendez rien, c’est que, plus subtilement, on vous dit : « Prenez une police d’assurance, achetez un antivol, défendez vos droits ». Derrière toutes ces expressions aussi, il y a la méfiance.

Mais peut-on faire autrement ? Dans un monde de plus en plus malhonnête, combinard et violent, est-il possible de ne pas être méfiant ?

Permettez-moi, avant de vous répondre, de vous raconter une petite histoire. On la raconte, paraît-il, aux petits Chinois qui demandent la différence entre le ciel et l’enfer…

L’enfer, leur dit-on, est un lieu où se trouve un énorme tas de riz délicieusement préparé. Autour, il y a des gens maigres, désespérément maigres, affamés, car, en enfer, on ne peut  manger le riz qu’avec de très grandes baguettes, plus longues que les bras et ces baguettes sont attachées à la main et on a beau tordre sa main dans tous les sens, comme les baguettes sont trop longues, il est impossible de déposer ce qu’elles portent, dans sa bouche.

Le Paradis est aussi, dit-on, un lieu où se trouve un énorme tas de riz délicieusement préparé, comme en enfer. Mais là, les gens sont  joufflus et bien portants. Pourtant, eux aussi, ont de grandes baguettes attachées aux mains, mais ils ont trouvé un truc : renonçant à se nourrir eux-mêmes, ils se servent de leur longue baguette pour nourrir leurs voisins et, comme on est au paradis, personne n’est oublié !

Souvent, on entend dire que la vie est un enfer, que les gens sont méchants, que beaucoup vivent dans la solitude. Alors je pense que nous avons des baguettes aux mains : la voiture, la case, la télé, le lave-vaisselle, les avantages acquis, les vacances, l’argent, la culture. Nous avons trop de choses à protéger : alors nous avons peur des autres. Nous ne leur faisons pas confiance, alors, nous nous isolons et c’est l’enfer !

Pourtant, aujourd’hui, le tas de riz est grand et il y a des richesses  à  partager,  mais  l’envie,  la  jalousie  et  la  méfiance sont là qui plantent la haine partout… et le malheur… En fait, l’homme est ainsi fait qu’il ne peut pas vivre seul : il nous manque toujours quelque chose. Nous avons besoin des autres, et si ce n’est pas aujourd’hui, ce sera demain et là, je l’affirme bien fort : sans les autres, nous ne pouvons rencontrer ni Dieu, ni le bonheur.

C’est bien ce qu’avait compris Abraham, dans la 1ère lecture. Il vit dans le désert, il est seul. Trois hommes se présentent : il pourrait les tuer, les voler, au moins se méfier. Non seulement, il les accueille, mais il leur donne ce qu’il a de meilleur. Il leur prépare un festin de roi. C’est déjà bien, mais allons plus loin : en fait, celui qu’Abraham accueille et qu’il ne connaît pas, c’est Dieu, Dieu lui-même.

A chaque fois, nous aussi, que nous accueillons quelqu’un, que notre cœur et nos mains s’ouvrent aux autres, c’est Dieu lui-même que nous accueillons. Jésus nous le rappelle dans l’évangile : « Qui vous accueille, m’accueille », et Dieu répond à l’accueil d’Abraham en accomplissant son désir le plus cher : il aura un fils, Isaac. A l’accueil, Dieu répond par le don. A celui qui saute dans l’inconnu, qui se risque, qui ne se méfie pas, Dieu donne le bonheur.

 Allons encore plus loin : voici maintenant dans l’évangile, Marthe et Marie, les deux sœurs. Marthe accueille Jésus de tout son cœur : l’hospitalité en Palestine, c’est sacré, même si l’on est très pauvre. Marthe veut faire voir au Seigneur tout l’amour qu’elle a pour lui. Jésus a certainement apprécié les allées et venues de Marthe et pourtant, il y avait mieux : c’était l’accueil de Marie, assise aux pieds du Christ.

Jésus nous rappelle dans l’évangile que l’on n’a pas à se soucier de ce qu’on doit dire pour se défendre, de ne pas se soucier pour la nourriture ou le vêtement. Tous ces soucis de la vie qui détournent de l’essentiel. Il y a une rencontre plus belle que celle de Marthe et du Seigneur, c’est celle de Marie avec Jésus. Elle écoute la parole de celui qu’elle accueille, elle sait que Dieu parle par lui, elle sent que Dieu veut nous parler et que l’accueillir, c’est d’abord accueillir son message, sa nouvelle d’amour, l’annonce de sa tendresse. Or, mystérieusement, toute personne a quelque chose à nous dire, si nous l’écoutons vraiment, même une personne ennemie.

Ce que Dieu promet, c’est le bonheur à tous ceux qui, en la personne de l’étranger, s’ouvrent à l’autre, sans méfiance, sans se faire de souci.

« Marie a choisi la meilleure part », dans celui qu’elle accueille, elle entend Dieu et en entendant Dieu, elle n’a plus aucun souci à se faire. Peut-être, vous direz-vous : « C’est impossible ». Dans la vie courante, chacun est bien obligé de se faire du souci et même parfois, de se méfier. C’est vrai, mais ce n’est pas l’idéal et nous devrions essayer de nous en sortir. 

Foi et confiance : ça va ensemble. On met sa foi en l’autre parce qu’on lui fait confiance. Sans confiance, notre foi est vaine. Qu’avons-nous admiré chez un Martin Luther King ? Sa foi, sa confiance et Dieu sait pourtant s’il a eu des épreuves : il en est mort.  Qu’admirons-nous chez la mère Theresa de Calcutta ? Est-ce sa méfiance ? A-t-elle pris une assurance-vie ? C’est son accueil, son respect, son amour des plus petits.

Qu’est-ce-qui nous frappe chez un Jean Vanier qui organise des villages entièrement gérés par des handicapés ? Chez un abbé Pierre qui a construit des milliers de maisons avec les chiffonniers d’Emmaüs pour des milliers de sans-logis ?

Chez Sœur Emmanuelle qui a vécu sur la plus grande décharge des ordures du monde, au Caire, en Egypte ? Elle nous donne la réponse : « Un soir, raconte-elle, j’étais dans ma cabane. J’entendais une chanson. C’était Fauzeya, ma voisine, une femme misérable, vivant dans une saleté indescriptible, battue, ne sachant ni lire, ni écrire. Elle chantait les versets de l’Evangile, les paroles de la vie : elle était sûre de son salut, sûre que le Christ l’aiderait, elle, et ses nombreux enfants ».

Pour elle, comme pour nous, l’échec, le mal, la souffrance, la mort, tout cela est écrasé par la Résurrection ! Avec foi, avec confiance, nous aussi, accueillons les autres. C’est la meilleure façon de recevoir Dieu dans ma maison.  AMEN




16ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 10,38-42)

« Ecoute »

(Lc 10,38-42)…

En ce temps-là, Jésus entra dans un village. Une femme nommée Marthe le reçut.
Elle avait une sœur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Quant à Marthe, elle était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ? Dis-lui donc de m’aider. »
Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses.
Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. »

        

         Marthe reçoit Jésus chez elle et commence à accomplir son devoir de maîtresse de maison avec toutes les obligations qu’elle pense être indispensables en de telles circonstances. Sa sœur Marie, elle, ne fait rien. « Assise aux pieds du Seigneur, elle écoute sa Parole », ce qui laisse supposer que Jésus parle, et que Marthe ne l’écoute pas… Elle ne le peut pas, elle a trop à faire ! Et elle est scandalisée par l’attitude de sa sœur, scandalisée et surprise que Jésus ne le soit pas lui aussi ! Elle est en effet si sûre de son bon droit qu’elle se permet de lui faire des reproches : « Cela ne te fait rien ? ». Qu’il retrouve donc son bon sens et qu’il corrige avec elle cette Marie insouciante en lui demandant de venir « l’aider » dans « les multiples occupations du service » !

            Mais non ! Ce n’est pas Marie qui se trompe… Et Jésus va interpeler Marthe en l’appelant deux fois par son nom, comme Dieu le fait lorsqu’il invite quelqu’un à le servir : « Marthe, Marthe », « Moïse, Moïse » (Ex 3,4), « Samuel, Samuel » (1Sm 3,10), « Saül, Saül » (Ac 9,4)…

            Mais Marthe est déjà, semble-t-il, à son service ! Semble-t-il, car ce qu’elle fait pour Jésus correspond-il vraiment à ce qu’il attend d’elle ? « Tu t’inquiètes et tu t’agites pour bien des choses »… Ces « choses », qui lui a demandé de les faire : le Christ, ou bien elle-même, ou une tradition toute humaine (Mc 7,1-13) ?

            N’aurait-elle pas dû d’abord demander à Jésus ce qu’il attend d’elle ? Qu’aurait-elle « fait » alors ? Elle se serait assise à ses pieds, comme sa sœur Marie,  et elle aurait « écouté sa Parole ». Alors, en se tournant vers lui, elle aurait compris qu’il est lui-même tout entier tourné vers le Père (Jn 1,18), à l’écoute de sa Parole, avec un seul désir : accomplir sa volonté (Jn 4,34 ; Lc 22,42). Et quelle est-elle ? « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4), gratuitement, par Amour…  Aussi, est-il venu les inviter, avec son Fils et par Lui, à manger à sa Table au grand festin de la Vie (Lc 14,15-24), et Lui-même les servira (Lc 12,37) !

            Marie s’est laissée invitée… Que Marthe fasse donc de même ! Alors, en accueillant cette Parole donnée par le Fils (Jn 17,8), elle recevra aussi avec elle « l’Esprit donné sans mesure » (Jn 3,34), « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63) en communiquant « la vie éternelle » (Jn 6,47 ; 6,68), cette Plénitude d’Être et de vie qui est celle de Dieu Lui-même ! Telle est « la meilleure part » qui ne leur sera pas enlevée, car Dieu nous a tous créés pour elle…

                                                  DJF