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16ième Dimanche du Temps Ordinaire- Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Pourquoi t’inquiéter ?

 

Enmarthe et marietre nous, ce n’est pas très gentil de choisir un évangile pareil pour évoquer la figure de sainte Marthe. Pour peu qu’on y réfléchisse, c’est comme si on choisissait le triple reniement de Pierre pour parler du premier des apôtres. Mais, après tout, peut-être que cet évangile de Marthe veut dire autre chose que ce que l’on pense habituellement. On pense que c’est comme dans tous les ménages, il y en a qui arrivent et qui se mettent directement devant la télévision, en l’occurrence c’était devant le Seigneur ce qui est bien mieux, et puis il y a l’épouse, la mère au foyer qui s’occupe des casseroles et du ménage. Et dans une vue des choses qui n’est pas très chrétienne mais profondément païenne, on extrapole en disant que, après tout, dans la vie, il y a deux métiers, deux vocations. Il y a une sorte de vocation contemplative dans laquelle on ne s’occupe de rien, on vit toujours un tout petit peu au-dessus du niveau du sol. Et puis, il y a une vocation active qui, au contraire, est celle où l’on s’occupe de toutes les tâches les plus humbles, où l’on s’arrange pour que la vie familiale puisse se dérouler le plus harmonieusement possible. D’où, à partir de ce moment-là, un certain ressentiment et quelques murmures de la part des maîtresses de maison qui n’auraient plus la liberté d’esprit et de cœur pour écouter le Seigneur comme Marie.

Si vous avez remarqué la manière dont le Christ reprend sainte Marthe, il ne lui dit pas qu’elle travaille beaucoup trop. Il lui dit simplement : « Tu t’agites et tu t’inquiètes trop ». Il ne lui reproche pas de l’accueillir à la maison et de préparer le repas. Il lui reproche de le faire dans un certain esprit qui n’est peut-être pas le meilleur. Le Seigneur lui lance un appel à la conversion en lui expliquant que le problème n’est pas une répartition des tâches. L’histoire du salut n’est pas une division du travail. Le problème est de savoir que, quelle que soit la situation dans laquelle on est, il y a toujours une seule chose qui est nécessaire : c’est la présence du Christ. Effectivement il est possible, et c’est cela que Marthe ne comprenait pas, il est possible de faire ces petites tâches en sachant que même si l’on est un peu éloigné du Christ au plan matériel, on n’est pas à ses pieds, une certaine attitude du cœur permet un véritable accueil de l’unique nécessaire.

dieu parle

Dans notre vie, contrairement à ce que nous pensons, nous vivons la plupart du temps, même les plus contemplatifs, au niveau de Marthe. Nous avons des tas de choses auxquelles nous devons faire face et l’on se trouve toujours être la Marthe de quelqu’un parce que notre égoïsme nous fait penser que peut-être on en fait trop et nous souhaitons un peu de calme. Mais ce qu’il faut bien comprendre, c’est que dans toutes ces activités, il s’agit toujours d’accueillir le Seigneur. Ce que Marthe ne comprenait pas, c’est qu’au moment où elle préparait la table, elle était en train d’accueillir le Christ. Elle avait dissocié les deux choses. Elle n’avait pas su intégrer les gestes même nécessaires dans l’unique amour du Seigneur. C’est, je crois, ce dont nous avons le plus besoin.

Une véritable sagesse chrétienne n’est pas détournée du monde, n’est pas une sorte de mépris de toutes ces petites choses quotidiennes qui recèlent une certaine profondeur et une certaine sagesse de la vie. Mais là où la foi chrétienne met quelque chose de merveilleux, c’est qu’elle apprend à Marthe à ne pas se perdre, mais au contraire à retrouver le Seigneur même dans ce qu’elle fait. Alors demandons à sainte Marthe d’intercéder pour que le Seigneur nous donne cette grâce de conversion qui a dû alors irradier son cœur en présence du Seigneur. Amen.