5ième Dimanche de Carême – par Claude WON FAH HIN (St Jn 11, 1-45)

Commentaire du  Dimanche 26 Mars 2023

 

Ézéquiel 37.12–14 ; Romains 8.8–11 ; Jean 11.1–45

Lazare est malade. Les deux sœurs, Marthe et Marie font passer la mauvaise nouvelle à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade ». Pourtant Jésus attendra encore deux jours avant de venir voir Lazare et il ne l’a pas guéri pour autant. Plus loin, au verset 36, les Juifs dirent : « Voyez comme il l’aimait » et d’autres faisaient la remarque (v.37) : Ne pouvait-il pas, lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, faire aussi que celui-ci ne mourût pas? Jésus qui aimait pourtant Lazare au point de verser des larmes, ne l’a ni guéri, ni empêché de mourir. Bien sûr que cela fait mal de voir un membre de la famille mourir. Bien sûr que c’est dur de vivre cela. Nous connaissons tous des gens qui se révoltent parce que Dieu leur a pris un membre de leur famille, parfois un bébé, ou un jeune qui avait tout l’avenir devant lui et on se pose alors des questions : qu’avons-nous fait de mal au Bon Dieu ? Pourquoi faire mourir un innocent si jeune ? Et résultat : ils finissent par être très en colère contre Dieu au point de quitter l’Eglise, et de ne plus croire en Dieu. Perte de foi à cause de la mort d’un jeune membre de la famille ou d’un compagnon de vie. Marie et Marthe ont continué, elles, à croire en Jésus et à le suivre.Et voici ce que nous dit Sagesse 4 à propos de la mort des jeunes : 7 Le juste, même s’il meurt avant l’âge, trouvera le repos. 8 La vieillesse honorable n’est pas celle que donnent de longs jours, elle ne se mesure pas au nombre des années; 9 c’est cheveux blancs pour les hommes que l’intelligence, c’est un âge avancé qu’une vie sans tache. 10 Devenu agréable à Dieu, il a été aimé, et, comme il vivait parmi des pécheurs, il a été transféré. 11 Il a été enlevé, de peur que la malice n’altère son jugement ou que la fourberie ne séduise son âme;  12 car la fascination de ce qui est vil obscurcit le bien et le tourbillon de la convoitise gâte un esprit sans malice. 13 Devenu parfait en peu de temps, il a fourni une longue carrière. 14 Son âme était agréable au Seigneur, aussi est-elle sortie en hâte du milieu de la perversité. Les foules voient cela sans comprendre, et il ne leur vient pas à la pensée 15 que la grâce et la miséricorde sont pour ses élus et sa visite pour ses saints. 16 Le juste qui meurt condamne les impies qui vivent (à cause de la noblesse de sa vie et la beauté de sa mort puisqu’il se retrouve au Ciel selon la note de Osty), et la jeunesse vite consommée (sous-entendu : condamne) la longue vieillesse de l’injuste. 17 Ils voient la fin du sage, sans comprendre les desseins du Seigneur sur lui, ni pourquoi il l’a mis en sûreté (en sûreté au Ciel). Et voici ce que nous disent les notes de la Bible des Peuples : « …(Il donne) Il est donné à certains de mûrir plus vite et d’arriver (très tôt) à la perfection que d’autres n’atteignent qu’après de longues années. Il était droit et il a plu à Dieu qui l’aimait. La personne ou le fils que Dieu a pris ne nous appartenaient pas. Des liens d’amour s’étaient établis entre eux et nous, liés à mille circonstances et souvenirs, mais un amour plus fort les unissait au Seigneur : ils étaient d’abord à Lui ». Il ne faut donc pas renier Dieu lors de la perte d’un membre de la famille. Dieu l’a pris dans son Royaume, c’était pour la gloire de Dieu comme nous le dit Jésus (v.4) : « Cette maladie…, elle est pour la gloire de Dieu : afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle », pour que la puissance, que le Fils tient du Père, éclate aux yeux du monde. – « Notre ami Lazare repose, leur dit-il; mais je vais aller le réveiller. 12 Les disciples lui dirent : Seigneur, s’il repose, il sera sauvé. 13 Jésus avait parlé de sa mort, mais eux pensèrent qu’il parlait du repos du sommeil. 14 Alors Jésus leur dit ouvertement :  Lazare est mort ». Jésus parle de la mort comme d’un sommeil. La mort ne signifie pas un anéantissement à zéro, car la personne vit toujours après la mort. Quand Dieu crée, c’est pour l’éternité, éternité au Paradis ou éternité en enfer, mais il crée pour l’éternité. Ne nous focalisons pas seulement sur notre vie terrestre, voyons toujours plus loin. C’est ce qu’on appelle l’espérance du chrétien. Rm 5,1.2 : « « Par la foi, nous sommes devenus justes et saints, et nous sommes en paix avec Dieu par Jésus-Christ. 2 Par lui, nous avons accès à cet état de grâce (de la Paix de Dieu) et nous devenons assez hardis pour espérer la gloire de Dieu ».

Notre vie en Dieu nous donne l’espérance et l’espérance, c’est selon une note de la Bible de Jérusalem, c’est l’attente des biens que l’on aura à la fin des temps : l’héritage des saints, la résurrection du corps, la vie éternelle, la gloire, Dieu lui-même, en un mot l’attente du salut. CEC 1818 « La vertu d’espérance répond à l’aspiration au bonheur placée par Dieu dans le cœur de tout homme ; elle assume les espoirs qui inspirent les activités des hommes ; elle les purifie pour les ordonner au Royaume des cieux ; elle protège du découragement ; elle soutient en tout délaissement ; elle dilate le cœur dans l’attente de la béatitude éternelle. L’élan de l’espérance préserve de l’égoïsme et conduit au bonheur de la charité ». – Jésus assure à Marthe que Lazare ressuscitera. Et Marthe répond (v.24) : « je sais qu’il ressuscitera à la résurrection, au dernier jour ». Et quand on parle de résurrection, il s’agit bien de faire revivre le corps, même décomposé en poussière et ce corps ressuscité rejoindra son âme à la fin des temps. Nous nous demandons alors : s’il faut attendre la fin des temps pour que notre corps s’unisse à notre âme, que devient l’âme en attendant la fin des temps? Gabriel Amorth, prêtre paulinien mort en 2016 à Rome nous amène cette réflexion : « Si nous pensons aux saints – qui jouissent déjà du paradis, mais dont les corps ne sont pas encore unis à leurs âmes, ce qui n’adviendra qu’à la fin des temps -, nous pouvons être certains qu’ils vivent déjà heureux sans le corps, mais aussi qu’ils ne parviendront à la béatitude suprême que lorsque leur corps et leur âme se rejoindront ». Il y aurait comme une sorte de résurrection en deux temps. Premier temps : à la mort, les saints vont au Paradis et jouissent déjà de la vie éternelle et deuxième temps, ce sera seulement à la fin des temps que leurs corps seront de nouveau réunis à leur âme, ce sera alors la plénitude de la vie éternelle. Père Sesbouë, prêtre jésuite mort en 2021, a la même idée. Une question se pose : « Mais, dira-t-on encore, avant la fin des temps (nous ne serons pas encore ressuscités. N’y a-t-il pas quelque contradiction à parler du bonheur immédiat de la vision de Dieu après la mort de chacun et de remettre à la fin des temps la résurrection ? On peut répondre à cette question en disant qu’il y aura deux temps dans la résurrection: un premier encore inachevé et invisible pour nous (mais jouissant réellement de la présence de Dieu), et un second temps d’accomplissement de la résurrection de tous au regard de tous ». Et pourquoi la résurrection des corps est-elle importante ? Parce que, nous dit Gabriel Amorth, « ce n’est que lorsque l’âme et le corps seront réunis, lorsque les temps seront accomplis, qu’il y aura la véritable plénitude de vie. Pour le moment, les saints ont ce pourcentage de bonheur qui peut être « contenu », pour le dire simplement, par la seule âme ».

Saint Bernard de Clairvaux (XIIè siècle) avait déjà la même idée (Saint Bernard – Chemin d’Eternité – Philippe Barthelet – P.82) : « Le degré suprême de perfection, Bernard doute qu’on puisse l’atteindre en cette vie, sinon par éclairs, retenus que nous sommes par les soins de notre corps mortel. Nous pourrons l’atteindre facilement quand nous serons « libérés des charmes et des embarras de la chair ». 2è texte d’aujourd’hui (R8,8) : « ceux qui sont dans la chair ne peuvent plaire à Dieu ». Pourtant les âmes séparées (de leurs corps), celles qui sont dans « l’océan de lumière éternelle et d’éternité lumineuse » (c’est-à-dire les âmes déjà au Ciel sans leurs corps), ne connaîtront pas encore cette « défection (c’est-à-dire cette plénitude de vie avec Dieu) qui est comme la perfection suprême de leur état »; elles ne l’éprouveront qu’à la restauration glorieuse de leur corps. L’âme séparée du corps ne peut en effet s’oublier tout entière en Dieu, elle a la nostalgie de son corps et de la gloire où il est recréé, et désire ardemment se réunir à lui ». Ainsi, l’âme séparée du corps et qui se trouve déjà au Ciel a la nostalgie de son corps et voudrait se réunir à lui et donc cette âme ne peut se perdre entièrement à Dieu, même au Ciel. – Dieu qui connaît tout cela n’a pas fait la résurrection pour rien. Il est bon de rappeler ces paroles de Jésus-Christ (v. 26-26) : « Moi, je suis la Résurrection. Qui croit en moi, même s’il meurt, vivra. Et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais ». Encore une fois, ne nous tournons pas vers d’autres dieux (avec un petit « d »), parce que ces dieux sont appelés dans la Bible des « idoles ». Le 2è texte d’aujourd’hui, Rm 8,9 nous dit « Qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas ». Ne croyez qu’en Jésus-Christ, parce que se tourner vers des idoles, c’est avoir un doute que Jésus est Dieu. « Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu », tu verras la gloire de Dieu pour l’éternité, dans la plénitude de vie avec Dieu. – « Jésus versa des larmes ». Cela montre qu’il est vrai homme, sans péché. « Verser des larmes » peut être une consolation divine. Dans une communauté de prières, il arrive parfois de voir des fidèles pleurer. N’interprétez pas ces larmes ! Thérèse d’Avila (Chemin de la Perfection – P.117) nous dit: « Les âmes qui sont privées de telles consolations (les fidèles qui ne versent pas de larmes) se tiennent dans l’humilité. Elles craignent qu’il n’y ait eu de leur faute et elles s’appliquent toujours à réaliser des progrès. Voient-elles les autres répandre une seule larme, elles s’imaginent que, n’en répandant point elles-mêmes, elles sont fort en retard dans le service de Dieu; mais peut-être seront-elles beaucoup plus avancées que les autres. Les larmes, quelque bonnes qu’elles soient, ne sont pas toutes parfaites. L’humilité, la mortification, le détachement et les autres vertus offrent toujours plus de sécurité, et n’exposent à aucun danger. Soyez donc sans crainte; vous pouvez arriver à la perfection comme les plus hauts contemplatifs ». – Lazare est ressuscité, mais il va mourir une deuxième fois. La résurrection de Jésus est différente puisque le corps de Jésus ne sera plus tout à fait le même à sa résurrection. Jésus pouvait apparaitre sous forme de jardinier, d’un promeneur sur la plage, de pèlerin, et les gens avaient du mal à le reconnaître. Le même problème se rencontre aujourd’hui. Il apparaît sous forme d’hostie et bon nombre de gens ont du mal à le reconnaître. Alors qu’il affirme lui-même : ceci est mon corps (Jn 2,21), …Dans l’histoire de l’Eglise, il y a eu de nombreux miracles concernant les hosties: des hosties volées et retrouvées des années plus tard sont toujours intactes et parfois gardées comme reliques; des infirmes guéries en recevant l’hostie; des hosties « volantes » qui passent des doigts du prêtres à la bouche du fidèle alors que la main du prêtre est à quelques centimètres de la bouche du fidèle ; des hosties transformées en chair vivante (le plus connu est le miracle de Lanciano). Pour ceux qui ne connaissent pas ce miracle, on en parle sur Internet ou dans Youtube. Raison de plus pour recevoir cette hostie, ce corps du Christ avec respect et cœur propre de toute souillure.  Il faut prier dans la semaine afin de bien recevoir cette hostie le samedi ou dimanche car c’est le Christ ressuscité que nous recevons. Il ne faut pas que la réception de cette hostie soit mécanique, mais toujours après la prière, sans oublier de remercier le Seigneur après avoir reçu cette hostie. Recevons le Christ dans notre cœur et pas seulement dans notre corps.  – « Lazare, viens dehors ». Jésus commande aux morts (il les resuscite), il commande aussi aux malades, aux handicapés (il les guérit), à la nature (il calme les tempêtes), il commande encore aux démons (il chasse les démons des possédés), rien ne lui résiste…à part les hommes, parce que, par amour pour les hommes, Jésus leur laisse la liberté de le suivre ou non. Et les hommes lui résistent par leur désobéissance à ses commandements, par leur manque d’amour, par leur orgueil. Lorsqu’un homme a la richesse, les honneurs ( recherche du prestige, de la reconnaissance), le pouvoir, il a réuni en lui tous les vices du monde. Le pouvoir pour lutter contre tout cela, c’est la prière de l’humilité : « Jésus, doux et humble de cœur, délivre-moi de l’esprit de critique et de jugement, du désir d’être honoré, du désir d’être distingué, du désir d’être loué et félicité, du désir d’être préféré à d’autres, du désir de briller et d’être admiré, du désir d’exercer la puissance ». Une prière que chacun devrait dire tous les jours, chacun à sa manière. « Ceux qui sont dans la chair, nous dit Saint-Paul aux Romains, ne peuvent plaire à Dieu », et ceux qui sont dans la chair justement sont ceux qui recherchent la richesse (avec le sentiment de sécurité dans la richesse, le sentiment de supériorité), les honneurs, la reconnaissance ( le plaisir d’être félicité, d’être choyé par beaucoup de personnes), la recherche du  pouvoir ( le plaisir de commander, de se sentir « chef », celui qui prend les décisions), tout cela fait partie de la panoplie de ceux qui vivent dans la chair. Mais nous dit Paul, « vous, chrétiens, vous n’êtes pas dans la chair mais dans l’esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Qui n’a pas l’Esprit du Christ (donc celui qui vit dans la chair) ne lui appartient pas ». Il nous faut vivre dans l’Esprit de Dieu. Et c’est Marie, pleine de grâces, qui nous aidera à vivre dans l’Esprit de Dieu qui nous mène au Christ et à son Père.

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