Solennité de la Nativité du Seigneur (messe du jour) – Homélie du Père Louis DATTIN

NOËL 

Grande joie pour tout le peuple

Jn 1, 1-18

            « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». Pendant l’Avent, frères et sœurs, nous avons chanté « Peuple qui marchez dans la longue nuit, le jour va bientôt se lever ». Aujourd’hui, nous pourrions chanter « Peuple qui marchez dans la longue nuit, aujourd’hui, Jésus vous est né« .

Oui, c’est Jésus, notre lumière. C’est précisément la raison qui a fait choisir le 25 décembre comme date de sa naissance. L’Eglise, depuis le 2e siècle, a choisi ce solstice : ce moment où le soleil est vainqueur des ténèbres, pour fixer la date de l’Incarnation. Noël est une fête de lumière que l’on célèbre le soir ou dans la nuit, comme Pâques. D’ailleurs, tout l’Evangile de St-Luc semble construit pour nous donner cette sensation. Ce récit est composé de trois parties égales :

1 – Tout d’abord, au début, il y a le monde des ténèbres.

« En ces jours-là, parut un édit de César Auguste ordonnant de recenser toute la terre lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie ». Luc a voulu évoquer ce monde dur où Jésus est né, dans les premières années de notre ère.

C’est un pays occupé par une puissance étrangère : Rome qui a asservi tout le monde connu, le monde méditerranéen.

La 1ère lecture, en Isaïe, parlait déjà de ce peuple qui marchait dans les ténèbres, sous le joug et le fouet du chef de corvée et qui subissait le bruyant et pénible piétinement des bottes des soldats occupants. L’occupation romaine est sans pitié : elle impose ce recensement qui provoque bien des tracas, des déplacements.

Quelle naissance difficile pour ce jeune couple qui n’a pas pu trouver de place dans la salle commune des réfugiés et qui doit se contenter d’une étable, dans le fumier et la paille pour mettre au monde son petit enfant fragile !

C’est vraiment tout le symbole de notre monde d’aujourd’hui avec tous les sans-abri du monde, ces Kurdes, ces sans-pays habitants de Calais, ces Somaliens, tous les laissés pour compte, les pauvres qui ne savent pas se faire une place ou que l’on repousse.

Oui, le récit « commence mal » pour ainsi dire : il est aussi le récit et le symbole de tous les moments durs de notre vie : moments difficiles où l’on a envie de dire : « S’il y avait un Bon Dieu, cela n’existerait pas, cela n’arriverait pas ».

Oui, très souvent, en nous, autour de nous, nous sommes comme Marie et Joseph, comme les bergers dans la nuit ….

2 – Et puis, « l’Ange du Seigneur s’approche et la gloire du Seigneur enveloppa les bergers de sa lumière. Ils furent saisis d’une grande crainte. Mais l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple ! Aujourd’hui, vous est né un SAUVEUR. Il est le Messie-Seigneur et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ». « Et soudain, il y eut avec l’ange, une troupe céleste innombrable qui louait Dieu en disant « gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ».

Il faudrait écrire en rouge ces six versets car voilà que, soudain le récit, d’une banalité terre à terre, s’ouvre véritablement sur du céleste. Oui, soudain, on a l’impression de décrocher du réel, comme disait un homme plein de bon sens : « Ça me gêne, disait-il, tout ce merveilleux, soudain, comme dans les contes de fées pour enfants… avec des anges, des lumières dans le ciel, des voix, des visions, des musiques célestes ! »

Faudrait-il donc, dans notre monde détraqué et souvent mal à l’aise, abîmé par les dominations et les guerres qui font les immigrés, les mamans désolées, les enfants qui pleurent… faudrait-il donc refuser le bonheur de Noël qui nous offre une trêve au milieu de nos difficultés, nos malheurs, notre nuit. Faudrait-il donc refuser la lumière dans notre nuit ?

Si nous le faisions, ce serait renoncer au message de ce jour. Sans ces six lignes du texte, le récit de Noël est incompréhensible!

Si on les supprime de l’Evangile, on ne peut plus s’expliquer, pourquoi cet enfant, né dans le fumier d’une étable a pu dépasser les siècles et remuer aujourd’hui, vingt siècles plus tard, des millions d’hommes, de femmes et d’enfants.

Tout  le merveilleux de ce récit est là pour nous crier : « Attention, attention, ne vous y trompez pas. Cet enfant sur la paille, emmailloté, signe plutôt minable évidemment, c’est le Sauveur, le Messie, le Seigneur ! », ces trois titres prestigieux écrits dans le ciel.

Il n’y a vraiment pas trop d’anges ni de lumières pour annoncer la bonne nouvelle car c’est vraiment une merveille : Dieu nous donne son Fils pour nous sortir de nos mortelles ténèbres.

Ce Jésus, c’est le Verbe de Dieu, la Parole vivante de Dieu qui est venu habiter parmi nous. Pourquoi avons-nous du mal à y croire ? Parce que nous avons toujours tendance à nous représenter Dieu à l’image des grands de ce monde : personnages lointains, absorbés dans leurs préoccupations lointaines, si loin au-dessus de nous ! Mais la grandeur  de Dieu :

c’est  au contraire  d’avoir voulu  se faire  si proche de nous au point de se passionner pour sa création,

c’est d’aimer éperdument cette Humanité qu’il a créé et dont il ne peut pas se désintéresser.

Dieu avait bien envoyé les prophètes pour nous parler, mais il ne pouvait pas se contenter de cette approche. Il a voulu s’insérer dans la vie de son peuple, s’y incarner, s’y naturaliser. Tant il est vrai que, quand on aime, on veut toujours aller plus loin dans l’amour. Désormais, par son Fils Jésus, Dieu est entré dans le déroulement de l’Histoire humaine et il en fait partie…

3 – « Lorsque les anges eurent quitté les bergers pour le ciel, ceux-ci se disaient entre eux : « Allons jusqu’à Bethléem pour voir ce qui est arrivé et que le Seigneur nous a fait connaître ». Ils se hâtèrent d’y aller et ils découvrirent Marie et Joseph avec le nouveau-né couché dans une mangeoire. Après l’avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant et tout le monde s’étonnait de ce que racontaient les bergers. Marie, cependant, retenait ces évènements et les méditait dans son cœur. Les bergers repartirent, ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu’ils avaient vu et entendu selon ce qui leur avait été annoncé ».

Oui, le ciel ne s’est ouvert qu’un instant. Maintenant, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, ils se retrouvèrent dans la condition normale, sans merveilleux et le récit reprend, de manière réaliste, sur notre terre. Mais tout, désormais, est transfiguré, illuminé par la parole qu’ils ont entendue.

A partir de ce moment-là, c’est le régime de la Foi et donc le nôtre qui commence et nous constatons toute une circulation de paroles, une « nouvelle circule de bouche à oreille avec ces mots  importants répétés : « parole » (trois  fois), « dire »  (quatre fois), « connaître » (deux fois), » voir » (trois fois) et puis « retenir dans son cœur », » méditer », « glorifier », « louer ».

 

Si on ne lit pas cette finale du récit, on peut passer à côté du message de Noël, message essentiel. Noël,

–  c’est une « communication », une bonne nouvelle que Dieu a lancée,

– c’est le thème central des anges messagers et qui se communique à la terre par des pauvres, des évangélisateurs qui l’ont reçue d’en-haut et qui la répète avec émerveillement.

Quelle est donc cette nouvelle ? L’enfant est Sauveur, Messie, Seigneur. Les guirlandes lumineuses de nos rues, les petites flammes que nous allumons dans nos crèches la disent à leur manière. Certains ne la savent même plus.

Dieu est amour : il est venu dans notre monde pour que brillent les lumières de l’amour au sein de notre pauvre monde dans la nuit.  AMEN

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