4ième Dimanche de l’Avent – Homélie du Père Louis DATTIN (Mt 1, 18-24)

Ne vous laissez pas distraire

Mt 1, 18-24

Dans quelques heures, frères et sœurs, c’est Noël. En ce dernier dimanche avant cette fête, notre pensée et la liturgie se concentrent sur les parents de l’enfant qui va naître : Joseph et Marie.

Très souvent, il nous arrive de n’envisager que  » le couple  » de Marie et de Joseph, de ne considérer que son aspect exceptionnel :

« “L’enfant qui va naître vient de l’Esprit Saint ” », nous dit clairement l’Evangile d’aujourd’hui. Nous y reviendrons mais, d’abord, paradoxalement, sachons voir que le couple de Marie et de Joseph est bien proche de nos situations humaines : au départ, ce sont deux fiancés heureux, entre 15 et 20 ans, qui ont fait le merveilleux projet de devenir époux.  Souvenez-vous de vos fiançailles !

Or, voici que la souffrance arrive : le projet brisé, la crise de ce couple quand Joseph apprend que sa fiancée est enceinte.  En orient, et à cette époque-là, ce n’était pas rien ! Tout le rêve de Joseph semble détruit.  Serions-nous capables de comprendre la souffrance affreuse de cet homme qui se cache derrière la sobriété de l’Evangile ? A ce stade, Joseph décide de ne pas épouser Marie et cette décision est celle d’un homme juste.

Cette histoire, dans son essentiel, est aussi un peu la nôtre : il nous arrive de faire des projets, de rêver, d’avoir des ambitions et puis, patatras ! Des circonstances que nous n’avions pas prévues, brisent net ces projets merveilleux : à ce moment-là, nous sommes invités à nous dépasser, à faire face à cette nouvelle circonstance pour trouver, en Dieu, une nouvelle solution !

C’est la situation des couples stériles ou des enfants inattendus, la crise de certains adolescents qui donnent du souci, enfants, adultes ou non qui ne veulent pas suivre nos chemins.

Dans tous ces cas-là, nous sommes tentés de nous passer de Dieu, alors que c’est justement à lui, qu’il faut avoir recours.  La solution dernière et définitive de nos problèmes humains, comme pour Joseph, ne se trouve qu’en Dieu.  Oui, c’est Dieu qui intervient pour modifier le projet de Joseph.  Oui, osons le reconnaitre, Dieu demande à cet époux de revenir sur sa décision car Dieu à cet époux de revenir sur sa décision car Dieu a besoin de lui. Dieu peut parfois nous demander de changer quelque chose dans notre vie, car il désire autre chose de nous.

Dieu confie à Joseph un double rôle :

1)- prendre Marie chez lui comme épouse

2)- donner un nom à l’enfant ; « donner un nom », en langage biblique, cela signifie : « assumer la paternité légale » de l’enfant en tant que descendant de David.

Il est choisi pour donner à l’enfant le nom qui lui est destiné d’après le droit juif ; l’enfant accédait à l’existence légale par le nom qu’on lui donnait et il était de la lignée du père : qu’il s’agisse d’une paternité biologique ou non.  Jésus, par Joseph, à cause de Joseph, sera reconnu et acclamé comme  » fils de David « .

Pour des parents, adopter un enfant, c’est l’accueillir dans la famille comme s’il était né de leur chair, comme dit la chanson : « Prendre un enfant par la main, prendre un enfant pour le sien ».

Au temps du Christ, l’adoption était plus facile et plus courante qu’aujourd’hui et surtout, elle avait beaucoup plus de valeur : le père adoptif était considéré comme le vrai père, les liens adoptifs étaient considérés comme plus forts que les liens du sang.  C’est ainsi que Joseph, en adoptant le fils de Marie, est devenu son vrai père… mais par une sorte de don de Dieu.

Aussi les gens ne se trompaient-ils pas en disant : « “N’est-ce-pas Jésus, le fils de Joseph, le charpentier de Nazareth” » ?

Comme nous le constatons, le rôle de Joseph n’est pas mince ! Cette paternité de Joseph eut certainement pour Jésus beaucoup plus d’importance qu’on ne le pense généralement.   Pensez que Jésus, pour nommer celui que tous appelaient Dieu, celui qui ne faisait qu’un avec lui, dont il recevait tout , Jésus reprend le nom même qu’il donnait  à  Joseph  lui-même, c’est-à-dire : « Père, abba, papa », et quand  il  eut  à  s’expliquer  sur cette familiarité  si déconcertante  avec  le  Dieu  d’Israël, Jésus  reprend les  mots  les  plus  simples de son apprentissage à Nazareth, dans l’atelier du charpentier Joseph : « Mon père jusqu’à présent est au travail et moi aussi je suis au travail », « Ce que fait le père, le fils le fait pareillement », « C’est que le père aime le fils et lui montre tout ce qu’il fait ».

Comment n’aurait-il pas trouvé dans l’affection de ses parents, Marie et Joseph, les mots les plus justes pour nous dire cette relation absolument unique qui, depuis toujours, occupait son cœur : « Moi et le Père, nous sommes un ».

La psychologie moderne nous a révélé l’importance de l’image du père pour structurer la personnalité de l’enfant. Il faut nous le rappeler, nous, habitants de La Réunion, où plus de 50% des enfants, déjà à la naissance, sont monoparentaux c’est-à-dire élevés uniquement par la mère et accessoirement par des « petits pères ». C’est auprès de Joseph que Jésus apprendra ce qu’est un père. C’est en Joseph qu’il verra le reflet humain de la paternité de Dieu : lui, qui saura si bien nous parler de son père. N’est-ce-pas en regardant Joseph qu’il a fait l’expérience humaine de la tendresse paternelle ?

« Qui, d’entre vous, si son fils lui demande du pain, lui donnera une pierre ? Ou s’il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent” ? » Jésus a appris que les pères de la terre savent donner de bonnes choses à leurs enfants : où a-t-il appris tout cela ? Auprès de Joseph !

Aujourd’hui, il est courant qu’on n’admette pas cette naissance miraculeuse. On voudrait que Jésus ait été conçu comme tout le monde. On voit dans cette intervention de Dieu, je ne sais quelle offense à l’humanité de Jésus, à celle de sa mère, à celle de Joseph. On prend des airs scandalisés. On parle de mépris à l’égard de la science, alors qu’il s’agit d’un simple effet des pouvoirs de l’Esprit Saint qui, nous le répétons chaque dimanche au Credo  « est Seigneur et qui donne la vie ».

Réfléchissons tout de même un peu. Si Dieu n’est pas plus que nous, plus puissant que nous, alors, nous n’avons pas besoin de lui. Dieu est Dieu ! S’il ne dépasse pas nos capacités à nous, alors nous sommes perdus ! Il ne peut nous sauver que, parce que, justement, il est Dieu ! Et plus puissant que nous ! Il ne nous sauve que s’il est Dieu, c’est-à-dire « Autre » que nous, tout autre que nous et cette conception virginale n’est que l’un des cas où Dieu signe son œuvre en faisant quelque chose qui nous dépasse totalement.

Seriez-vous capables, vous, de faire une seule étoile ou une seule galaxie ? Or, il en existe des milliards !

Seriez-vous capables de ressusciter un mort ou de faire ce qui arrive à chaque messe : que le pain des hommes devienne le corps du Christ ?

« Je crois en l’Esprit Saint » capable de donner la vie de manière seigneuriale car il est bien le « Seigneur » et le « Créateur ». Les plus grands des savants quand ils font une découverte, ne font que découvrir l’œuvre de Dieu et ils en sont ébahis : ce qui explique pourquoi beaucoup d’entre eux, au lieu de se croire des génies, voient dans ce qu’ils découvrent, l’œuvre d’un « Auteur », d’un Créateur qui les dépasse.

Certains passent, comme ces savants qu’étaient les mages, de l’admiration à l’adoration ! De l’intelligibilité du monde, au Dieu souverain devant qui ils s’inclinent.

Dans quelques heures, ce sera Noël !  Ce serait si bien de voir le monde et nous-mêmes un peu changés par la venue de cet enfant. Il faudrait  « qu’il nous trouve  quand il viendra  vigilants dans la prière et remplis d’allégresse » comme nous le dirons dans la préface, tout à l’heure.   AMEN

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