17ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Multiplication des pains

Jn 6, 1-15

Pendant quatre dimanches de suite, frères et sœurs, nous allons aborder le thème de l’Eucharistie : le Pain Vivant, nourriture de nos cœurs, de nos esprits et de nos âmes. Dans l’Evangile de Jean, vous le savez, ce récit de la multiplication des pains se situe juste avant que Jésus ne déclare : « Je suis le Pain Vivant… celui qui mange ce pain-là, vivra pour toujours ».

 

 

Aujourd’hui, il s’agit de pains et de poissons pour apaiser la faim de nos corps, de nourriture terrestre, en quelque sorte.

Ainsi, nous est donnée la clef du miracle : la multiplication des pains annonce l’Eucharistie. Dans ce récit, on nous parle, bien sûr, de Jésus, de Philippe à qui Jésus demande : « Comment pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? », d’André aussi, qui intervient pour faire une remarque un peu ridicule semble-t-il : « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains et deux poissons ! » et puis, se rendant compte que c’est disproportionné, il ajoute : « Mais qu’est-ce-que cela pour tant de monde ! » Et pourtant c’est de là que tout va partir, que tout va se déclencher : à partir justement de ces cinq pains et de ces deux poissons !

Qui était-il, ce jeune garçon ? Appelons-le « Hamar » pour plus de commodité.

– « Hamar, où vas-tu ? » C’est sa maman qui le voit suivre tout un groupe de curieux à la recherche de Jésus, le prophète de Nazareth qui guérit les malades et qui raconte des histoires merveilleuses qui gonflent le cœur d’espérance et d’amour.

– Mais, maman, je pars avec les autres, écouter Jésus, le voir guérir les malades.

– Tu es fou, il va s’en aller de l’autre côté du lac, s’enfoncer dans la montagne. Reste ici.

– Oh maman, laisse-moi y aller. Je suis avec mon oncle Yukal. Je ne crains rien.

– Soit, mais avant de partir, prends ces cinq pains et ces deux poissons. Il n’y a rien à manger sur l’autre rive, c’est désert : d’ailleurs cette foule est folle de partir comme ça, à sa suite, sans provisions. Tiens, prends ça… »

Et Hamar se trouve depuis longtemps avec sa bertelle, assis dans l’herbe à écouter Jésus : c’est merveilleux, tellement qu’il n’a même pas pensé à manger son casse-croûte. Et voici qu’un des compagnons de Jésus, s’avance droit sur lui, oui, lui, Hamar et lui demande : « Veux-tu donner tes cinq pains et tes deux poissons ? Le Seigneur en a besoin ! » Dites, si c’était vous, ce jeune garçon, qu’auriez-vous fait ? Bien sûr, sans ses pains et sans ses poissons, le Christ aurait pu nourrir la foule : mais l’aurait-il fait ? Chaque fois que Jésus accomplit un miracle, il répond à un appel, à une proposition.

Rappelez-vous Cana, la Vierge qui lui dit : « Ils n’ont plus de vin », ça ne suffit pas : « Remplissez d’eau ces jarres ». Six cents litres à verser dans les outres, seau après seau ! Quel va et vient ! On doit faire la chaîne comme pour un incendie.

Jésus ne fait jamais un miracle s’il n’y a pas eu auparavant un effort de l’homme, un apport quelconque, une offrande, un cadeau, si minime soit-il ! Regardez à la messe, il n’y a pas d’Eucharistie, pas de Corps et de Sang du Christ, sans qu’auparavant les servants de messe n’aient présenté à l’autel un peu de pain, un peu de vin. Ici, cinq pains et deux poissons.

Hamar aurait très bien pu garder pour lui ses cinq pains et ses deux poissons ! C’est lui qui les avait apportés, sa mère lui avait donné pour lui. Il aurait pu faire une soustraction au lieu de faciliter une multiplication !

C’était une chance pour lui, d’avoir, de quoi manger dans le désert ! Lui, au moins, il était prévoyant ; sa mère l’avait été pour lui. Il ne mourra pas de faim. Eh bien, pas du tout !

Voici qu’Hamar donne tout, tout ce qu’il a… Il aurait pu en garder un peu pour lui : un pain, un poisson. Non ! Tout : les cinq pains et les deux poissons, il les donne au Christ qui, par son pouvoir, va multiplier.

            Raisonnons, réfléchissons : pour multiplier, il faut avoir dès le départ quelque chose. Si je n’ai « rien », multiplier par 10 ou multiplier par 100, c’est toujours « rien« , ça fait toujours zéro… Mais à partir du moment où l’homme offre au Christ quelque chose, oh, pas grand-chose ! Ce « pas grand-chose-là », va pouvoir, avec la force du Christ, être multiplié et nourrir une foule entière. Pour nous, c’est pareil. C’est avec ce que je donne au Seigneur, c’est à partir de ce que je lui offre, que le Seigneur va pouvoir aider les autres, les nourrir, les rassasier. Mais il faut, au départ, ce geste d’offrande : tout comme à la messe, il n’y a pas et il ne peut pas y avoir de communion s’il n’y a pas auparavant l’offertoire des hommes :

Notre pauvre pain, notre pauvre vin qui vont devenir Corps et Sang du Christ versés « pour vous et pour la multitude ».

Le Christ, souvenez-vous aussi de Cana, est toujours celui qui multiplie, mais à partir de ce qui lui est offert.

Hamar, c’est nous ! C’est tout chrétien. Devant l’immensité de la misère du monde – misère physique, misère morale encore bien plus – nous pensons souvent que nos ressources sont bien peu de choses, et c’est vrai ! Mais, si peu que ce soit, si nous donnons, le miracle aura lieu : la générosité entraîne la générosité, le partage entraîne le partage, l’amour entraîne l’amour, la goutte d’eau devient ruisseau puis rivière et le fleuve s’engage dans la mer.

C’est comme cela que se construit le Royaume de Dieu ! Rappelez-vous les émissions télévisées comme le téléthon pour aider les myopathes : au départ, il y a un petit don de celui qui donne le premier et au fur et à mesure, sur l’écran, on voit le chiffre des offrandes qui devient addition et multiplication. Il en est ainsi dans toute l’histoire de l’Eglise.

Regardez le « petit pauvre » d’Assise. François a tout donné, il a tout partagé, puis, avec des milliers de frères mendiants, atteint Rome pour remettre au pape un message d’amour et de charité qui sauvera l’Eglise de cette époque.

Plus près de nous, relisons la vie de St-Vincent-de-Paul avec tous ceux qu’il a entrainés dans son sillage d’amour !

Celle de St-Jean Bosco fondant partout, avec des sommes dont il n’avait pas, au départ, le moindre sou, des orphelinats, des patronages, des sanctuaires, des collèges techniques pour ses apprentis adolescents. Retrouvons le visage de mère Theresa ! Autant de miracles de multiplications dont nous sommes les témoins ; où l’amour de l’homme, multiplié par Dieu, permet de transformer le monde, à partir de quelques pains, de quelques poissons mais aussi de beaucoup d’amour, de détachement, de confiance en Dieu. Le Seigneur, au départ, ne nous demande pas de faire des miracles.

C’est lui qui s’en charge. Il nous demande seulement de donner tout simplement ce que nous avons : nos cinq pains, nos deux poissons. Il se charge du reste. Encore faut-il qu’au départ, nous lui ayons offert ce que nous avons.

Jésus attend le 1er geste de l’homme pour faire le geste de Dieu. Il multiplie ce que nous lui donnons. Mais auparavant, il faut avoir donné, offert nos pauvretés.

Payons de notre personne, humblement, petitement, et les grandes causes s’épanouiront parce que la main de Dieu fera le reste. AMEN

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