Dimanche des Rameaux et de la Passion du Seigneur – Homélie du Père Louis DATTIN (Mt 26, 14-27)

 Entrée de Jésus à Jérusalem

Mt 26, 14-27

Au début de cette liturgie, nous voyons Jésus entrant dans les murs de Jérusalem : il est acclamé par une foule enthousiaste « Hosannah ! Béni celui qui vient ! ». Les branches agitées disent la création toute entière qui exulte : « Elle aussi, nous dit St-Paul, est libérée de la servitude ». Les manteaux et les châles sont étalés sur son passage. Tous crient : « Voici ton roi ! »

 

Quelques jours plus tard, cependant, voici Jésus. Il sort des murs de Jérusalem. L’âne n’est plus là pour le porter, au contraire, c’est Jésus qui porte sa croix, dépouillé de ses vêtements, il va mourir au milieu d’une foule haineuse ou indifférente.

Que s’est-il passé entre cette entrée triomphale et cette sortie misérable ? Voilà ce que la liturgie d’aujourd’hui nous force à revivre, bon gré mal gré, car aujourd’hui, nous aussi, nous avons fait entrer Jésus dans nos murs. C’était à nos risques : quelle bêtise ! Aucun de nous n’en sortira intact. Aucun de nous ne pourra supporter le regard et le silence de ce condamné. Nous le renierons, nous le tuerons, nous aussi, c’est sûr.

Nous serons à la fois tous les personnages de la Passion et nous le savons bien et nous le sentons bien ! Nous avons été les hommes de main qui ont arrêté Jésus, les grands prêtres et le Sanhédrin qui se sont permis de le juger.

Nous sommes aussi Ponce Pilate qui n’ose pas se compromettre et qui laisse faire et aussi Hérode, à la fois curieux et voulant lui faire faire des miracles comme un prestidigitateur.

Nous sommes Pierre, qui suit Jésus, de loin, et qui le renie trois fois : « Je ne connais pas cet homme ».

Nous sommes les valets et les soldats qui l’affublent comme un roi de comédie, le soufflètent et se moquent de lui et se mettent à genoux devant lui : « Salut, roi des juifs, devine qui t’a frappé ? »

Nous sommes cette foule qui a crié : « Hosannah ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur » et qui maintenant réclame sa mort.

₋ « Vais-je le libérer ? »

₋ « Non ! Libère plutôt Barrabas ! »

₋ « Et lui ? Que vais-je en faire ? »

₋ « Crucifie-le ! », « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants ».

Ils ne croyaient pas si bien dire. C’est le Baptême et l’Eucharistie qui sont annoncés.

Nous sommes Judas, qui, pendant ce temps-là, n’a pu survivre à sa trahison. Il n’a plus osé croiser le regard de Jésus, il savait, dès lors, que sa vie était finie, sans objet… A-t-on jamais été plus bas dans le désespoir ? Comme il a dû souffrir ! « Il eut mieux valu pour lui ne pas naître ».

Pierre, lui, a osé revoir Jésus et la miséricorde est venue sur lui à gros sanglots. Jésus est dans nos murs et nous n’allons pas nous en tirer à si bon compte. Judas, Pierre, Caïphe ou Pilate mais peut-être aussi ce drame va-t-il, non pas nous enfoncer mais nous promouvoir : pécheur libéré comme Barrabas, porteur de croix derrière Jésus comme Simon de Cyrène peut-être y a-t-il parmi nous des bons ou des mauvais larrons. Celui qui est sauvé : « Aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis », « Seigneur, souviens-toi de moi », « Si tu es le Christ, sauve-toi toi-même et nous avec toi ! », il ne croyait pas si bien dire, lui aussi !

Peut-être aussi pendant cette Sainte Semaine, serons-nous au pied de la croix, en compagnie de Madeleine qui comprend maintenant pourquoi elle a pu être pardonnée, en compagnie de Jean, le seul à avoir suivi Jésus jusqu’au bout, en compagnie de Marie qui se rappelle la prophétie de Siméon :

« Un glaive te transpercera le cœur », « Cet enfant causera la chute et le relèvement de beaucoup ».

Nous entendons les injures et les moqueries des passants, les soldats qui se partagent ses vêtements tandis que leur chef, en regardant Jésus, déclare : « Vraiment, cet homme est le Fils de Dieu ».

« Qu’il descende de la croix maintenant, crient certains, et nous croirons en lui » et c’est justement parce qu’il n’en est pas descendu, que nous croyons en lui, parce qu’il nous a aimés jusqu’au bout, jusqu’à la mort… et la mort de la croix !

 « Eh bien, voyons si Dieu va le sauver » ; oui il le sauvera, il le ressuscitera et nous avec lui ; c’est le sauvetage collectif de la mort et du péché.  Ce sera Pâques : le passage de la mort à la vie.  « Seigneur, laisse-moi malgré tout, t’acclamer aujourd’hui. Hosannah ! »

Cette semaine qui vient sera dure. Mon péché sera mis à nu ; ce sera l’agonie au Mont des Oliviers ; ce sera Vendredi Saint. Mais, mieux loti que Pierre ou Judas, je sais que ta miséricorde en moi, aura le dernier mot ; ce sera le dimanche de Pâques.

D’ici là, avec tous mes frères, je crie :

« Hosannah, au plus haut des cieux ! », « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ».

Le Royaume entrevu aujourd’hui sera mon espérance tout au long de cette semaine de descente aux enfers, avant de voir se lever le petit matin du soleil levant : celui de Pâques.  AMEN

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