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L’Eglise
Jn 14, 23-29
En ce dimanche, les textes de la parole de Dieu nous invitent à une méditation sur l’Eglise. C’est, sans doute, ce dont nous avons le plus besoin pour assurer notre foi. Que nous ayons la foi, que nous ayons l’amour, que nous soyons animés d’une espérance sans faille, que nous sachions bien prier et nous remettre sans cesse à l’écoute de la Parole de Dieu, tout cela ne servirait pas à grand- chose, si toutes ces activités chrétiennes ne s’exerçaient pas dans le cadre de l’Eglise.
Il y a peu de temps encore, certaines personnes âgées considéraient leur religion comme une affaire privée, personnelle, individuelle et n’allaient guère à l’église que pour ressourcer et nourrir leur dévotion intime. Le cadre de leur vie spirituelle, c’était leur chambre, leur prie Dieu, leur gros missel, quelques images pieuses sur leur table de nuit et la messe elle-même n’était considérée que comme station-service purement individuelle. Bien que très pieuses et de parfaite bonne foi, ces personnes, et c’était l’époque qui les y portait, n’avaient pas pris conscience, qu’elles faisaient partie, qu’elles étaient partie prenante, d’une Famille spirituelle, d’une communauté, d’un réseau intérieur et extérieur qui nous établit entre nous, comme des frères et sœurs d’une même Famille dont Dieu est le Père, Jésus-Christ : le Fils aîné, l’Esprit-Saint : l’animateur et dont nous sommes tous, tant que nous sommes, des membres plus ou moins actifs.
Si nous l’avions oublié, la Parole de Dieu à cette messe, est là pour nous le rappeler vigoureusement.
Que voyons-nous dans la 1ère lecture ? Un groupe, une communauté d’apôtres réunis ensemble à Jérusalem pour prendre des décisions. Au 1er concile, celui de Jérusalem, il s’agit de prendre une décision grave : « Allons-nous nous enfermer dans nos petites pratiques d’autrefois et rester entre nous, frileusement installés dans nos dévotions d’hier ou d’avant-hier, ou allons-nous ouvrir toutes grandes les portes de l’Eglise, à des non-Juifs, incirconcis, quitte à bouleverser nos mentalités et à faire passer un grand courant d’air dans notre Cénacle ? »
Sous l’action de l’Esprit, qui ne l’oublions pas, apparaît sous le signe d’un vent violent, d’une tempête (rappelez-vous la Pentecôte), les apôtres décident l’ouverture : ils quittent le port bien abrité du judaïsme pour se lancer en haute mer et c’est l’aventure de l’Eglise, sous le souffle de l’Esprit, avec Pierre, le 1er pape, à la barre de l’Eglise et nous avons entendu, dans la 1ère lecture, cette phrase surprenante :
« L’Esprit-Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous des obligations judaïques, notamment la circoncision ». « l’Esprit-Saint et moi-même ».
Dès le 1er concile, dès sa sortie du port, la barque de l’Eglise est dirigée par qui ? L’Esprit-Saint et moi-même : c’est-à-dire c’est par le pape qui, lui-même est à l’écoute de l’Esprit qui lui souffle la conduite qu’il faut tenir, le cap qu’il faut prendre.
Si vous allez dans un port d’une station touristique vous verrez le long des quais, deux sortes de bateaux.
Les 1ers sont destinés à une promenade en mer. Il y a un capitaine à la barre et puis partout sur le pont ou les entreponts, des bancs où les touristes pourront s’asseoir, installer leurs affaires, tirer leurs jumelles pour inspecter le paysage, tous assis, inactifs, bavardant ensemble.
Un seul travaille dans ce navire: celui qui est à la barre et tous ceux qui sont autour de lui, font, ce qu’on appelle « une promenade en mer » ; le bateau, la direction, son énergie, sa navigation, ça ne les intéresse pas, ils ne sont là que pour se faire véhiculer d’un point à un autre : est-ce là une image de l’église ? A certains moments, j’ai bien peur que oui : quelques responsables avec une foule de consommateurs inactifs, assis et attendant qu’on les mène au bout.
Au port, il y a aussi, un autre bateau, pas un rafiot avec des bancs, mais un beau bateau effilé, racé, plein de cordages, de poulies, d’amarres, d’instruments de navigation et dans celui-ci, ce n’est pas un homme mais tout un équipage, actif, attentif, chacun à sa place, chacun ayant son rôle, paré à virer au moindre commandement du barreur. Ah si ce navire-là pouvait être l’Eglise ! Où chacun a un rôle actif, chacun a sa fonction, sa place à tenir, une Eglise qui ne soit pas un magma de touristes passifs, mais un équipage sous les ordres du skipper, prêts à manœuvrer d’une façon coordonnée et efficace pour le lancer en haute mer !
Ce bateau, vous l’avez reconnu, c’est l’Eglise avec son pilote : le pape, son équipage : nous tous, à notre place, sortant vers le large, sous l’impulsion de l’énergie de l’Esprit.
La seconde lecture, elle, nous donne une autre image de l’Eglise, très belle, elle aussi : une ville qui descend du ciel, la Jérusalem glorieuse, resplendissante, une ville lumière, mais sans soleil ni lune. C’est la gloire de Dieu qui l’illumine et sa source de lumière, c’est l’Agneau Jésus-Christ, lumière du monde. Elle avait une grande et haute muraille : une muraille qui nous protège, mais qui ne nous enferme pas. La preuve : elle possède douze portes : l’Eglise n’est pas un ghetto, ni un château-fort avec pont-levis.
Elle reste ouverte et accueillante à tous, aux quatre points de l’horizon : trois portes à l’orient, trois portes au nord, trois au midi, trois à l’occident.
La muraille de la cité reposait sur douze fondations : les douze apôtres de l’Agneau, l’Eglise fondée sur les apôtres et ses successeurs, le pape et les évêques. Peut-être êtes-vous étonnés, que dans cette ville-là, il n’y a pas de temple, pas d’église. C’est toute la ville qui est l’Eglise, car son temple, c’est Jésus-Christ. Plus besoin d’église de pierres, de rassemblement pour le culte, nous sommes déjà tous unis autour de l’Agneau, autour de Jésus-Christ, notre soleil, source de notre lumière.
Là encore, cette ville, image de l’Eglise, c’est une vie ensemble, une communion de tous avec Jésus-Christ, protégée par les hautes murailles de la Garde de Dieu, éclairée par la lumière du Christ, fondée sur le roc de la foi des apôtres: « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise », c’est-à-dire : « Je construirai l’unité de ma famille, animée par mon Esprit, conduite par mon Fils, aimée et protégée par le Père ».
Dans cette cité sainte, sommes-nous des citoyens à part entière ?
Des bâtisseurs, des ouvriers de paix travaillent-ils à l’unité de cette cité ?
Travaillons-nous à la sainteté de l’Eglise ?
Quelle est la place de l’Eglise dans notre prière ?
Savons-nous rayonner d’un amour qui rassemble, avec la joie d’être ensemble ?
Avons-nous conscience d’être le Peuple de Dieu, le Peuple où il se trouve ?
C’est l’Evangile d’aujourd’hui qui nous fait sentir le mieux, après le 1er concile de Jérusalem et la vision de l’Apocalypse, la cité nouvelle. Quelles sont les sources de cette unité des chrétiens, de cette vie d’Eglise ?
La 1ère source, c’est la fidélité à la Parole de Dieu : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole » et dans ce cas : le Père aime l’Eglise et ajoute Jésus : « Nous irons demeurer en elle ».
La présence de Jésus à l’Eglise est provoquée par notre fidélité à écouter et à mettre en pratique ce qu’il nous dit, ce qu’il nous demande et cette parole-là, elle n’est pas seulement de lui, elle est du Père qui l’a envoyé.
Mais cela ne suffit pas : notre fidélité, le Seigneur, le sait par expérience, est bien faible, bien fragile, souvent clignotante, aussi nous envoie-t-il le Défenseur : l’Esprit-Saint qui est à la fois notre moniteur, notre éducateur et qui nous rappelle toutes les consignes de Jésus et c’est la 2e source de l’unité de l’Eglise et de sa croissance. Rappelez-vous ce que dit le prêtre au début de la messe : « Que la communion de l’Esprit Saint soit toujours avec vous ». Nous ne sommes vraiment unis entre nous, nous ne formons l’Eglise, nous ne faisons « Eglise » que si l’Esprit Saint est là pour nous réunir, nous unir, nous lier ensemble autour de Jésus-Christ, c’est lui le rassembleur.
Frères et sœurs, le ciel, qu’est-ce-que c’est ?
C’est l’Eglise rassemblée définitivement autour du Père qui nous comble de sa tendresse, du Fils qui nous a sauvés et de l’Esprit qui assurera définitivement notre unité dans la joie et dans la paix. AMEN