Commentaires des Lectures du dimanche 27 septembre 2015
Nombres 11, 25-29 (L’Esprit de Dieu souffle où il veut)
L’épisode s’inscrit dans la marche d’Israël au désert, depuis le mont Sinaï jusqu’aux plaines de Moab (Nombres 10, 11 – 21, 35). Plus précisément, notre page s’enchaîne avec le récit d’une révolte : le peuple se lasse de la manne quotidienne et réclame de la viande, qui lui sera donnée (Nombres 11, 31-32). Pour l’heure, désemparé et écœuré, Moïse se plaint d’une responsabilité insupportable auprès de Dieu qui lui demande alors de rassembler, dans « la tente de la Rencontre », dressée hors du camp d’Israël, soixante-dix anciens qui l’épauleront dans sa fonction. Le Seigneur leur conférera pour cela une part de « l’esprit » de Moïse, de la force et de la sagesse divines à lui accordées (Nombres 11, 4-23).
Voici, avec notre passage, le don de cet esprit aux anciens. Ils se mettent à prophétiser. Entendons qu’ils entrent en transe et prononcent des oracles mystérieux, comme Saül pris dans une bande de prophètes (1 Samuel 10, 10-12). Mais, ajoute notre texte, « cela ne dura pas ». La tr ansmission de la phrase est mal assurée. La version latine de saint Jérôme a compris qu’ils « ne purent s’arrêter ». En fait, le texte originel voulait assurer la supériorité prophétique de Moïse sur les anciens. Une tradition juive ancienne prend en réponse cette parabole : un cierge qui en allume soixante-dix autres ne perd rien de sa lumière. De même, le don de l’esprit aux anciens n’enlevait rien à Moïse.
La pointe porte sur l’acte II de la pièce, avec Eldad et Médad qui ne se sont pas rendus à la Tente et se mettent à prophétiser à l’intérieur du camp. Les légendes juives anciennes se plairont à mettre en leurs bouches une prophétie, totalement absente du texte biblique, sur l’histoire d’Israël. Les deux personnages n’ont donc pas honoré le rendez-vous sous la tente sacrée. D’où la réaction de Josué, l’auxiliaire de Moïse : « Arrête-les ! » C’est cette phrase qui commande le choix de cette lecture afin d’éclairer l’évangile où Jean dit avoir voulu « empêcher » un exorciste qui ne fait pas partie des disciples de Jésus.
Moïse déclare à Josué : « Serais-tu jaloux pour moi ? » L’Esprit de Dieu est libre ; il agit où et quand il le veut. Le rédacteur de cet épisode veut montrer que la prophétie reste libre, sans lien obligé avec l’institution. Amos (7, 14) revendiquera cette liberté, en ces termes : « « Je ne suis prophète, ni fils de prophète. » Bien plus, le Moïse du récit souhaite que le don de prophétie s’étende à tout le peuple de Dieu. Joël, de manière solennelle, reprendra le souhait de Moïse comme une réelle promesse (Joël 3, 1-3) et saint Luc verra dans la Pentecôte l’accomplissement de cet oracle (Actes 2, 16-21).
Jacques 5, 1-6 (Vos richesses sont pourries)
Dans sa série de conseils et de reproches relatifs à la vie chrétienne, Jacques vient d’évoquer les négociants (Jacques 4, 13-17). Il ne dénonce nullement chez eux une malhonnêteté, mais le danger de tout miser sur les affaires et d’ignorer la fragilité de leurs spéculations et de leur existence. À présent, l’homélie s’en prend plus directement aux propriétaires terriens et critique leur injustice. Le discours, sous l’horizon du jugement de Dieu (« nous sommes dans les derniers temps »), se divise en deux parties.
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C’est d’abord une attaque générale contre les richesses périssables selon des images fréquentes dans la tradition biblique (le pourrissement, les vers, la rouille, le feu qui ruine tout ; comparer Matthieu 6, 19-21). Retentit aussi comme en écho l’exclamation de Jésus : « Malheureux êtes-vous, les riches ! Car vous avez votre consolation » (Luc 6, 24).
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La seconde partie en vient au fait : la dénonciation de certains riches qui retiennent le salaire des journaliers. Dans ce monde ignorant les comptes bancaires, le salaire devait être versé avant le coucher du soleil : Lévitique 19, 13 ; Deutéronome 24, 14-15 ; comparer la scène de Matthieu 20, 9. « Leur salaire crie vengeance » : l’expression rappelle à la fois la justice sociale et le droit divin selon lequel, si le pauvre exploité en appelle au Seigneur, celui-ci punira l’oppresseur (Deutéronome 15, 9). La fin de l’exposé, évoquant massacres et tueries, est une exagération dramatique intentionnelle.