Commentaires des Lectures du dimanche 4 octobre 2015
Genèse 2, 18-24 (Tous deux ne feront plus qu’un)
Ce passage du début de la Genèse appartient au second récit de la création qui s’inspire des mythes égyptiens sur le dieu potier façonnant l’être humain. Dans la deuxième partie de cet épisode, le Seigneur offre à l’homme une compagne. Dans l’antique culture méditerranéenne de l’auteur biblique, la femme est souvent considérée comme inférieure à l’homme et parfois presque au rang de l’animal. Notre passage prend le contre-pied de ces conceptions. Si Adam peut nommer les animaux, faisant ainsi de par le Seigneur acte de propriété et de domination, il ne trouve en eux « aucune aide qui lui corresponde ». Une expression qu’une version araméenne de la Bible traduira par cette formule : « aucune partenaire semblable à lui. »
La femme sera pour le mâle un cadeau gratuit de Dieu ; elle est tirée de la même nature que lui. Elle est « l’os de mes os », déclare Adam, c’est-à-dire, selon le langage sémitique ancien, ma substance même. La langue hébraïque accentue d’ailleurs cette parenté, puisque « l’homme » se dit îsh et « la femme » ishâh.
En outre, on notera la critique du système patriarcal, si persistant en maintes cultures d’aujourd’hui : l’homme quittera son clan familial, si étouffant trop souvent, et, avec son épouse, il formera un couple autonome. Contrairement à un certain discours ecclésiastique mettant en avant, comme dans le judaïsme ancien, le devoir de procréation, ce second récit de création souligne simplement la beauté de *la vie conjugale : « Ils deviendront une chair unique ». Cette première lecture veut éclairer la leçon de Jésus sur l’indissolubilité du mariage.
* La vie conjugale. « Le mariage unit les corps et les âmes ; il mêle deux esprits et confond deux chairs. Comment te séparer sans tourment de celle que tu as nouée à ta vie, non point servante d’occasion, mais sœur, mais épouse ? Sœur selon la création et les origines. Vous êtes tous deux faits du même limon, de la même argile. Épouse, par le lien conjugal et le code du mariage. Quel nœud vas-tu trancher, toi qu’attachent la loi et la nature ? Comment oseras-tu trahir les serments que tu as prononcés le jour de tes noces ? (Astère d’Amasée [5e siècle]).
Hébreux 2, 9-11 (Jésus, notre Sauveur et notre frère)
Pendant sept dimanches, en cette fin d’année liturgique, nous lisons en lecture semi-continue des extraits de « la lettre aux Hébreux » Au vrai, ce texte n’est pas une « épître », malgré une formule épistolaire finale « bidon » (Hébreux 13, 23-25). Il s’agit, en fait, d’une homélie, d’une circulaire.
Lorsqu’on présente Jésus comme Christ, « Messie », on se rappelle que, dans l’Ancien Testament, le mot messie signifie oint par l’huile et que l’onction peut évoquer trois personnages, trois figures : le roi, le prophète et le grand prêtre. Les évangiles se sont concentrés sur les figures royale et prophétique pour présenter Jésus comme Messie. Apparemment, seul l’auteur de la Lettre aux Hébreux s’est risqué à présenter Jésus comme Messie en tant que grand prêtre juif, grand prêtre par son entrée dans le sanctuaire du ciel à travers sa Passion et sa Résurrection. Ce texte peut sembler difficile pour celles et ceux qui s’avouent légitimement ignorants des rites juifs anciens. Mais, en même temps, par le biais de la figure humaine du grand prêtre, aucun autre auteur du Nouveau Testament n’a autant souligné la fraternité du Christ, * notre médiateur médiateur de notre humanité. Judaïsant que je suis, l’auteur de cet écrit… est mon ami !
La lecture d’aujourd’hui commence par une citation, selon la Bible traduite en grec, du Psaume 8 qui chante la gloire de l’homme dans la création : « Tu l’as fait un peu au-dessous des anges. » Mais, par sa résurrection, le Christ a été élevé au-dessus des anges. Il est le seul à avoir réalisé, le premier, la beauté de la vocation humaine. Il nous précède dans « la gloire et l’honneur ». Il nous précède, parce qu’il est, en frère, « de la même race que nous ».
* Notre médiateur. « Ô Seigneur médiateur, Dieu plus haut que nous, homme à cause de nous, je reconnais ici ta miséricorde. Car, que toi, qui es si grand, tu sois ainsi troublé par une attention de ton amour, cela console bien les membres de ton corps, qui sont troublés par leur faiblesse, et cela les empêche de désespérer et de périr » (Saint Augustin).