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3ième Dimanche de Pâques – Homélie du Père Rodolphe EMARD (Lc 14, 13-35)

« Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent »

En ce troisième dimanche de Pâques, l’Église nous donne de méditer sur l’apparition de Jésus ressuscité à deux disciples qui faisaient route vers Emmaüs (un village probablement situé à une douzaine de kilomètres de Jérusalem, « à deux heures de marche »).

Ce récit nous apprend une fois de plus que la foi en la Résurrection ne s’impose pas ! Le Christ est vraiment ressuscité, encore faut-il le croire ! La Résurrection, avant d’être un concept théologique, est surtout un chemin à parcourir, une expérience à vivre.

Les deux disciples ne reconnaissent pas d’emblée le Christ ressuscité qui les rejoint en route : « Leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. » Ils partagent nettement leur déception en Jésus mort et crucifié, en qui ils avaient mis leur espoir pour leur apporter la délivrance.

Les deux disciples évoquent également le témoignage des femmes de leur groupe qui se sont rendus au tombeau et qui les rend perplexe : Jésus serait vivant, d’après une vision qu’elles auraient reçue des anges.

La foi en la Résurrection ne s’est jamais imposée ! Sous bien des traits, Cléophas et son compagnon représentent l’ensemble de notre humanité. Il nous faut bien nous engager dans un acte concret de foi mais aussi chercher le Christ ressuscité là où il est vraiment, bien localiser les nouveaux modes de sa présence parmi nous.

Les deux disciples reconnaissent Jésus à la fraction du pain et grâce aux Écritures : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? »

La table de la Parole de Dieu et la table du pain de Vie : voilà deux principaux moyens par lesquels Jésus ressuscité vient à notre rencontre. Nous pointons ici le mystère de l’Eucharistie. Privilégions ces deux moyens sûrs… Gardons-nous de chercher le Christ dans les actes « merveilleux » ou « surnaturels »…

Nous sommes conviés à entrer dans l’attitude du croyant qui écoute la Parole de Dieu pour la mettre en pratique tout en se nourrissant du pain de Vie. C’est bien ainsi que nous montrerons que nous appartenons au Christ et c’est bien ainsi que nous rencontrerons le Ressuscité de façon authentique.

Il nous arrive de nous demander comment faire pour conduire les personnes de notre entourage vers le Christ, sans les brusquer. L’Évangile nous donne de contempler la manière de faire de Jésus, sa pédagogie divine à laquelle nous devons nous inspirer.

Jésus commence tout d’abord par rejoindre les personnes. Il les écoute, il les prend là où elles en sont dans leurs histoires humaines. Jésus accueille patiemment leurs doutes, leurs questionnements, ce qui les chagrine.

Ensuite, dans un deuxième temps, Jésus enseigne la Parole de Dieu : « partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait. »

Nous devons opter pour ces mêmes attitudes dans le respect de la liberté des gens. Il s’agira toujours de proposer et de ne jamais imposer ! Le prosélytisme n’est en aucun cas une attitude à adopter par le chrétien !

C’est à la fraction du pain que Jésus se fait reconnaître. Cela nous rappelle que nous avons la mission de conduire à l’Eucharistie. Pour être crédibles dans cette démarche, nous devons avoir une franche familiarisation avec ce sacrement.

Après avoir reconnu Jésus, les deux disciples refont aussitôt route vers Jérusalem : « À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. » Nous pouvons être frappés par l’engouement et l’instantanéité des deux disciples, en pleine nuit, pressés de raconter leur expérience de Jésus ressuscité aux « onze Apôtres et [à] leurs compagnons ». Ce fait démontre que les deux disciples ne pouvaient pas garder pour eux une telle révélation. L’évènement de la Résurrection ne saurait être caché ou gardé secret !

À la Vigile pascale, nous avons renouvelé les promesses de notre baptême. Le baptême nous impose au témoignage du Christ ressuscité. Cela n’est pas facultatif même si nous devons nous confronter aux contradictions de nos contemporains.

Il nous faut prendre clairement position pour le Christ ressuscité. Qu’il nous accompagne et qu’il nous donne de mieux considérer notre rapport à l’Eucharistie.

Que nous puissions avoir un plus grand amour pour la Parole de Dieu et la fraction du pain. Je termine avec une citation de Dei verbum, la constitution dogmatique sur la « Révélation divine » : « L’Église a toujours vénéré les divines Écritures, comme elle le fait aussi pour le Corps même du Seigneur, elle qui ne cesse pas, surtout dans la sainte liturgie, de prendre le pain de vie sur la table de la Parole de Dieu et sur celle du Corps du Christ, pour l’offrir aux fidèles. » (Cf. n°21).

Ensemble, invoquons le Seigneur :

Seigneur Jésus, « reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse. » Que la lumière de ta Résurrection nous renouvelle intérieurement pour que nous puissions annoncer que tu es vraiment ressuscité et que tu es le Sauveur du monde. Amen.