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Seconde session Cycle Long à Cilaos (7/03/2020)

Eglise et cure de Cilaos

Un tang dans le jardin de la cure…

Alain, cuisinier à la retraite, et Jonathan aux fourneaux, admiré par Yoland…

Au menu : en entrée, beignets de carottes et salade russe ; puis canard fumé et camarons…

avec un bon petit extra ouvert par P. Séraphin…

P. Victor, Curé de Cilaos, et Noéline…

Les Soeurs Franciscaines Missionnaires de Marie avaient une journée détente à Cilaos,

et elles ont partagé leur repas sous la véranda, derrière la cure…

Puis vint le temps du travail en carrefours…

Et à 17h 00, nous nous sommes retrouvés à l’Eglise pour la célébration de l’Eucharistie…

 




Fiche n° 5 : La purification du Temple (Jn 2, 13-22)

La purification du Temple (Jn 2,13-22)

            La fête de « la Pâque des Juifs » apparaît pour la première fois dans notre Evangile en Jn 2,13. Elle y intervient en tout dix fois : Jn 2,13.23 ; 6,4 ; 11,55 (2x) ; 12,1 ; 13,1 ; 18,28.39 ; 19,14. Remettons-nous dans le contexte de cette fête.

            D’après le tableau chronologique situé au dos de nos Bibles, Abraham est situé vers 1850 avant Jésus-Christ. D’après Gn 11,28.31 ; 15,7, il est originaire de la ville d’Ur, au sud est de Babylone. Voilà celui que Dieu appellera pour se constituer un Peuple, Israël. Sa vocation sera d’être au service de Dieu (Is 41,8-9 ; 44,1-2 ; 49,3) pour que sa bénédiction puisse être révélée et accueillie par la terre tout entière (cf. Gn 12,1-4). Abraham aura pour fils Isaac (Gn 17,19 ; 21,3-5), Isaac engendrera Jacob (Gn 25,26), et Jacob aura douze fils qui deviendront les douze ancêtres des douze tribus d’Israël (Ruben, Siméon, Lévi, Juda, Issachar, Zabulon, Joseph, Benjamin, Dan, Nephtali, Gad, Asher). A la suite d’une famine, tous allèrent s’installer dans le delta du Nil, en Egypte. Là, ils prospérèrent jusqu’à devenir un peuple nombreux. Les Pharaons se succédèrent… Si les premiers étaient accueillants, Ramsès II, vers 1250 av JC, verra en ce peuple une menace pour son Royaume (Ex 1,9-10). Il leur imposera des travaux épuisants (Ex 1,11-14) et ira même jusqu’à ordonner la mort de tous les nouveaux-nés de sexe masculin (Ex 1,15-22). Alors, un jour, Dieu se manifestera à Moïse et lui dira : « J’ai vu, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte. J’ai entendu son cri devant ses oppresseurs ; oui, je connais ses angoisses. Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de cette terre vers une terre plantureuse et vaste, vers une terre qui ruisselle de lait et de miel », la Terre Promise (Ex 2,7-8)… A l’invitation de Dieu, Moïse ira voir plusieurs fois le Pharaon oppresseur pour lui demander de les laisser partir… Mais celui-là refusera à chaque fois… Toute une série de catastrophes naturelles contribueront alors à ce que Pharaon lâche enfin prise : eau imbuvable, invasions de grenouilles, de moustiques, de taons et de sauterelles, grêle, épidémies… L’auteur du Livre de l’Exode présente « dix plaies », un chiffre symbolique qui renvoie aux « Dix Paroles » de la Loi de Moïse (Ex 20,1-17 ; Dt 5,6-22). Or, « tout ce que Dieu dit, il le fait » (Ps 115(113b),3 ; 135(134),6). Cette conviction s’exprimera de façon poétique dans le récit de la création du monde, lui aussi en Dix Paroles (Gn 1,1‑2,4) : « Dieu dit : « Que la lumière soit », et la lumière fut… Dieu dit : … et il en fut ainsi »… Le chiffre « dix » renvoie donc symboliquement dans la Bible à la Parole de ce Dieu qui fait toujours ce qu’il dit. Il avait dit à Moïse qu’un jour il délivrerait son Peuple de la main de ses oppresseurs… Il l’a dit, il a fait en sorte qu’il en soit ainsi à travers de multiples circonstances naturelles (« les dix plaies ») et c’est arrivé…

            Avec la fête de Pâque, Israël sera invité par la suite à se souvenir, chaque année, de cette libération d’Egypte dans la certitude qu’il est toujours en relation avec le même Dieu. Autrement dit, ce que Dieu a fait autrefois pour la génération de Moïse, il peut toujours le refaire dans les circonstances différentes de « l’aujourd’hui » de l’histoire. C’est ainsi que chaque génération est invitée à dire : « Nous étions esclaves de Pharaon en Egypte » (Dt 6,20-25)… La libération est à chaque fois réactualisée…

Le mot « pâque », en hébreu, est expliqué par un verbe qui veut dire « passer » : Dieu est « passé » en Egypte pour que son Peuple puisse « passer » avec Lui de « la misère » au bonheur, des « cris » de souffrance aux cris de joie, des « angoisses » à la paix, de l’esclavage à la liberté… Pour célébrer cette fête, on sacrifiait un agneau et on le mangeait tous ensemble en famille (Ex 12,1-14 ; Dt 16,1-8).

            En évoquant en Jn 2,13 « la pâque des Juifs », c’est à tout ce contexte que St Jean fait allusion. En effet, comment a-t-il déjà présenté Jésus en Jn 1,29 et 1,36 ? Et il mourra sur la Croix la veille de cette grande fête de Pâque qui tombait, cette année-là, un jour de Sabbat. Parmi les dates possibles (les années 27, 30 et 33), les spécialistes retiennent le plus souvent le vendredi 7 avril 30. Jésus sera donc crucifié en ce « jour de la Préparation » de la fête (Jn 19,14.31.42) où l’on immolait dans le Temple de Jérusalem tous les agneaux qui allaient ensuite être mangés en famille… En relisant cet événement tragique à la lumière de leur foi, les disciples de Jésus comprendront plus tard qu’il est le vrai Agneau pascal immolé pour que nous « passions » avec lui de « la misère » du péché au bonheur, des « cris » de souffrance aux cris de joie, des « angoisses » à la paix, de nos multiples esclavages à la liberté, de la privation de la Plénitude de la Vie par suite de nos fautes à l’expérience de cette Plénitude… « Le salaire du péché, c’est la mort, mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus » (Rm 6,23). Heureux alors ceux et celles qui acceptent de faire la vérité dans leur vie pour offrir au Christ, en vérité, leurs multiples misères. Avec « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde », l’Agneau immolé pour nos péchés, ils feront l’expérience de la vraie Lumière et de la vraie Vie, dès maintenant, dans la foi… « Heureux ceux qui ont cru », dira alors Jésus (Jn 20,29)…

            La fête de Pâque était donc une des trois grandes fêtes de pèlerinage où Ies Israélites étaient invités à monter au Temple de Jérusalem. C’est ce que fait ici Jésus… Et en entrant dans la grande cour du Temple (400m x 300m), il y trouve tous les animaux qui étaient utilisés dans les différents sacrifices pratiqués à cette époque, et notamment « les sacrifices pour le péché » (Lv 4-5). En signe de résistance vis-à-vis de l’occupant romain, toutes les transactions devaient s’effectuer non pas avec la monnaie romaine, mais avec celle utilisée à Tyr, au Nord d’Israël. Pour acheter un animal en vue de l’offrir en sacrifice, il fallait donc commencer par changer ses sesterces en monnaie tyrienne… Mais Jésus chasse ici tous ces animaux et renverse les tables des changeurs… « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de commerce », déclare-t-il. Tous faisaient en effet beaucoup de profit sur le dos des pèlerins : les marchands bien-sûr, mais aussi les changeurs et le grand-Prêtre responsable du Temple qui percevait un pourcentage sur toutes ces activités… Or, nous dit Jésus, « nul ne peut servir deux maîtres : ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l’Argent » (Mt 6,24). La logique de l’argent est en effet trop souvent : accumuler pour soi au détriment des autres. Et parfois tous les moyens sont bons pour arriver à ses fins : vols, mensonges, injustices… Autant d’attitudes contraires à celles que Dieu attend de nous… Dieu en effet est Amour (1Jn 4,8.16), et « aimer, c’est tout donner et se donner soi-même », disait Ste Thérèse de Lisieux… « Aimer » n’est donc pas un « pour soi » mais un « pour l’autre ». Toute l’œuvre du Christ consistera, petit à petit, à nous arracher aux ténèbres du repli sur soi, pour nous ouvrir à l’Autre et au même moment aux autres… « L’amour du Christ nous presse », écrit St Paul, « à la pensée que, si un seul est mort pour tous, alors tous sont morts. Et il est mort pour tous, afin que les vivants ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux » (2Co 5,14-15). Ainsi, « nul d’entre nous ne vit pour soi-même… si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur » (Rm 14,17-18). Et ce « vivre pour le Christ » se traduira par un « vivre pour les autres », leur bien, leur vie, leur Plénitude… En effet, nous dit Jésus, « si vous m’aimez, vous garderez mes commandements »… « Et voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés. Et nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » (Jn 14,15 ; 15,12-13)…

Par son geste prophétique, Jésus cherche donc à secouer les consciences pour les réorienter vers une recherche authentique de Dieu qui ne pourra que se concrétiser dans une recherche effective de ce qui est bien pour autrui… Mais au même moment, en chassant tous ces animaux du Temple, il devient impossible d’offrir un sacrifice… Mais souvenons-nous, qui est celui qui accomplit ce geste (Jn 1,29.36) ? Que faisait-on au Temple au moment où il mourût sur la Croix ? Quel sens aura son offrande sur la Croix d’après Hb 9,26b ; Hb 10,5-14 ? Et à l’invitation de son Seigneur, l’Eglise fait mémoire de cette offrande unique chaque fois qu’elle célèbre l’Eucharistie (cf. Lc 22,19‑20 ; 1Co 11,23-25). Elle s’approprie pour elle-même, et elle propose au même moment au monde entier, les bienfaits de l’unique Passion du Christ vécue pour le salut de tous les hommes (Jn 3,16-17)… St Jean suggère encore cet événement central pour notre foi par la citation du Ps 69(68),10 ; noter que dans l’Ancien Testament, le verbe « dévorer » est traduit ou bien par un présent (Bible de Jérusalem), ou bien par un passé (TOB), les deux exprimant les nuances possibles du temps hébreu utilisé. Or St Jean l’a remplacé par un futur qui renvoie à la Passion du Seigneur… C’est là en effet que « le zèle de la maison de Dieu dévorera » le Christ jusqu’au bout (Jn 13,1), jusqu’à la mort sur une croix. Et sa Résurrection manifestera à quel point « son amour envers nous s’est montré le plus fort » (Ps 117(116)) : plus fort que tous nos péchés, nos trahisons, nos injustices, nos méchancetés, notre cruauté… « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). Et il offrira sa vie pour ceux-là même qui le tuent (Ac 3,26)… Désormais, un seul sacrifice sera pleinement efficace pour tous les hommes de tous les temps : celui de « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde »… Car c’est « le sang du Christ », et lui seul, qui peut « purifier notre conscience des œuvres mortes » que nous avons pu accomplir « pour que nous rendions un culte au Dieu vivant » par toute notre vie, une vie de charité (Hb 9,14)… Tel est « le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle versé pour la multitude en rémission des péchés »…

            En chassant les animaux, Jésus supprime par un geste prophétique le culte du Temple, avec tous ses sacrifices. Ses interlocuteurs ne s’y trompe pas, et ils lui demandent un signe venant du ciel qui authentifierait sa mission… Mais cette demande prouve qu’ils sont « aveugles de cœur » (cf. Mt 13,10-17). En effet, ils ont sous les yeux « le Verbe fait chair » (Jn 1,14), « le Fils Unique de Dieu, de même nature que le Père », disons-nous dans notre Crédo. « Il est Dieu né de Dieu »… Son humanité est donc le signe visible de la Présence de Dieu au milieu des hommes… « Il est l’image du Dieu invisible » dit St Paul (Col 1,15), là, sous leurs yeux, tout près, tout proche, offert à leurs regards, mais ils ne le reconnaissent pas !

Noter alors ce que Jésus leur déclare en Jn 2,19. Comment comprennent-ils cette Parole ? La mention des « 46 ans » permet de dater la scène : Hérode le Grand avait entrepris les travaux de restauration et d’agrandissement du Temple en 20-19 avant Jésus-Christ. Nous sommes donc en 27-28 après Jésus-Christ. Souvenons-nous qu’une des trois dates où la Pâque tombait un jour de sabbat était justement l’an 27 après Jésus-Christ. Nous constatons ici qu’elle ne peut correspondre à l’année de la mort de Jésus…

            La réponse est dans la question, mais noter quel terme St Jean a employé jusqu’à maintenant pour parler du Temple de Jérusalem (cf. Jn 2,14-15 ; « iéron », en grec). Puis relever celui qui intervient dans la Parole de Jésus et le commentaire qui suit immédiatement en Jn 2,19-21 (« naos », en grec). Combien de fois apparaît-il (le chiffre « trois » renvoie à Dieu en tant qu’il agit…) ? Or le mot employé désignait l’édifice central du Temple, là où se trouvait la pièce appelée « le Saint des saints », là où, croyait-on, Dieu habitait… Dans le régime de la Nouvelle Alliance, quel sera donc le Temple nouveau (cf. Jn 2,21) ? Et de fait, où « habite » Dieu le Père d’après Jn 10,38 ? Conclusion : à qui doit aller celui ou celle qui désire rencontrer Dieu ? 

Par rapport au régime de l’Ancienne Alliance et de ses multiples sacrifices, nous voyions à quel point Jésus « n’est pas venu pour abolir la Loi ou les prophètes : il n’est pas venu abolir, mais accomplir » (Mt 5,17). La Loi de Moïse, avec ses multiples commandements et préceptes, est désormais remplacée par « le bon vin de l’Esprit Saint » (Message du Miracle des Noces de Cana, Jn 2,1-12). Et le Temple de Jérusalem laisse la place à Jésus Lui-même, le Temple de Dieu, au sens où il vit en parfaite communion avec le Père dans l’unité d’un même Esprit (Jn 10,30). Plus tard, cette notion de Temple sera élargie à tous les disciples de Jésus rassemblés en son Nom pour célébrer et vivre leur foi. En effet, « lorsque deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux » (Mt 18,20), uni à chacun d’eux dans ce même mystère de communion. Jésus est ainsi la « pierre vivante » sur laquelle repose tout l’édifice constitué des multiples « pierres vivantes » que sont les croyants (1P 2,4-5)… Le Temple Nouveau de la Nouvelle Alliance est donc tout à la fois Jésus et la communauté des croyants réunie en son nom : l’Eglise « Corps du Christ » dira St Paul… Nous voyons que l’élément qui lie de ces deux points de vue complémentaires est le Mystère de Communion dans l’unité d’un même Esprit. C’est ce que Jésus vit depuis toujours et pour toujours avec le Père, c’est ce qu’il est venu partager avec tous ceux et celles qui accepteront de le recevoir dès maintenant, par leur foi et dans la foi… Et ce mystère d’union avec Dieu en un seul Esprit (cf. 1Co 6,17 ; 1Th 5,9-10 ; Ep 4,3) s’accomplira pleinement par-delà notre mort, en cet état de « ressuscités avec le Christ » où nous verrons enfin ce que nous ne pouvons pour l’instant que pressentir dans la foi (cf. 1Co 13,12 ; Col 3,1-4 ; 1Jn 3,1-2 ; 1P 1,6-9)…

Admirons la beauté du plan de St Jean. Après l’introduction générale du Prologue (Jn 1,1-18), il présente rapidement Jésus par l’intermédiaire de tous ses titres (Jn 1,19‑51). Puis il montre ce que sont devenus les deux piliers de la foi juive accomplie par le Christ : la Loi laisse la place à l’Esprit, le Temple à Jésus Lui-même en tant qu’il est venu nous révéler que Dieu est un Mystère de Communion. En effet, le Père, le Fils et le Saint Esprit vivent unis l’un à l’autre dans la communion d’une même nature divine qui est tout à la fois Amour (1Jn 4,8.16), Esprit (Jn 4,24), Lumière (1Jn 1,5)… Et c’est ce Mystère de Communion que le Christ est venu révéler et offrir à tous les hommes, pourvu qu’ils acceptent de renoncer à tout ce qui lui est contraire… Alors, « ce n’est plus à Jérusalem ou sur telle ou telle montagne » qu’il faudra se rendre désormais pour adorer Dieu… Il suffira de retrouver le chemin de son cœur pour « l’adorer en Esprit et en vérité » (Jn 4,24)…

Ci-dessous la correction :

Correction Fiche n° 5 Evangile de Jean

 

 




3ième Dimanche de Carême – par Francis COUSIN (St Jean 4, 5-42)

La Samaritaine,

missionnaire sans le savoir.

 

Traversant la Samarie, Jésus s’arrête au puits de Jacob, près de Sykar, fatigué par la voyage. Il envoie ses apôtres jusqu’à la ville pour aller chercher des victuailles. C’est leur mission du jour.

Arrive une samaritaine, en plein midi, pour puiser de l’eau. Suite à la discussion avec Jésus, toute bouleversée, elle retourne à la ville en s’interrogeant : « Serait-ce le Messie ? », et elle en parle à tout le monde. Elle s’est faite missionnaire, sans la savoir.

Les deux parties vont à la ville, mais pas pour les mêmes raisons. Les premiers, pour satisfaire leurs besoins ; la seconde, pour partager avec les gens une bonne nouvelle, ou une interrogation.

A priori, ce n’est pas ce qu’on attend d’eux : on attend des apôtres qu’ils annoncent la Bonne Nouvelle, et de la femme qu’elle s’occupe de sa maison, fasse ses courses … même si au départ elle était partie pour chercher de l’eau au puits …

On a une inversion des attentes.

On peut trouver des raisons à cela. Si l’on s’en tient à la chronologie de l’apôtre Jean, les apôtres en sont au tout début de leur enseignement par Jésus, et ils ne sont pas encore ’’affûté’’ pour annoncer la Parole de Dieu. Il leur faudra encore pas mal de temps pour qu’ils soient au point, après la Pentecôte.

La femme, elle, commence par s’insurger de l’attitude de Jésus : « Comment ! Toi, un Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? », puis s’étonne des réponses de Jésus : « D’où as-tu donc cette eau vive ? », puis elle va l’appeler Seigneur, Prophète, puis poser une question sur le Messie qui doit venir … « Je le suis, moi qui te parle » répond Jésus. C’en est trop pour elle : Déjà ce que Jésus avait dit de sa situation matrimoniale l’avait déstabilisée, … il faut qu’elle parle, qu’elle fasse connaître cet homme à ceux qu’elle connaît … et qui la connaissent, elle, connue comme une femme de mauvaise vie …

Alors, quand ils l’entendent leur parler, elle qui s’était isolée du groupe, pour dire : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? », ils accourent auprès de Jésus. La Samaritaine a pu être missionnaire parce qu’elle connaissait les gens de la ville, et qu’elle était connue d’eux.

Elle a été missionnaire sans le savoir, puisque les gens de la ville, après avoir entendu Jésus, crurent en lui.

On pourrait penser qu’il y a en gros deux dimensions dans la mission des baptisés :

– Une dimension intellectuelle et spirituelle : connaissance des écritures, de la Parole de Dieu, animation de la prière, célébrations et liturgie des sacrements, établissement de projet pastoraux, répartition des rôles …

– Une dimension matérielle : construire et entretenir les églises, les salles d’accueil diverses, prévoir le logement, la nourriture, le nettoyage, le lavage etc …

Ces deux dimensions étaient auparavant assurées par le clergé, surtout dans les ’’pays de mission’’ ou dans les paroisses pauvres de campagne.

Avec le concile Vatican II, et le rôle plus important donné aux ’’fidèles laïcs’’, et dans nos pays avec la raréfaction des vocations sacerdotales, on constate une redistribution des rôles entre les deux dimensions : on voit de plus en plus de ’’fidèles laïcs’’ qui s’engagent dans l’animation liturgique, qui lisent la bible, qui suivent des formations exégétiques, théologiques, sur l’histoire de l’Église, etc, données par divers organismes, qui font le catéchisme, qui animent des mouvements religieux … on voit la mise en place des Conseils Paroissiaux d’Animation Pastorale et des Conseils Économiques Paroissiaux dans les différentes paroisses … et qui aident dans la dimension matérielle …

Quant au clergé, s’il garde bien évidemment la responsabilité des sacrements, l’animation de la paroisse, et est le garant de la catholicité des différents mouvements, il n’oublie pas les tâches ménagères, comme l’on fait les apôtres à Sykar.

Cependant, en fait, s’il y a plusieurs manières de vivre notre mission de baptisés, quelle qu’elle soit, il y a toujours des moments plus spirituels et d’autres plus matériels.

Reprenons ce que disait le pape François au n° 14 de ’’La joie de l’Évangile’’ : « Remarquons que l’évangélisation est essentiellement liée à la proclamation de l’Évangile à ceux qui ne connaissent pas Jésus Christ ou l’ont toujours refusé. Beaucoup d’entre eux cherchent Dieu secrètement, poussés par la nostalgie de son visage, même dans les pays d’ancienne tradition chrétienne. Tous ont le droit de recevoir l’Évangile. Les chrétiens ont le devoir de l’annoncer sans exclure personne, non pas comme quelqu’un qui impose un nouveau devoir, mais bien comme quelqu’un qui partage une joie, qui indique un bel horizon, qui offre un banquet désirable. L’Église ne grandit pas par prosélytisme mais ’’par attraction’’. »

C’est ce qu’a fait, sans le savoir, la Samaritaine.

Puissions-nous le faire, nous aussi, mais en le sachant, et ’’par attraction’’.

Seigneur Jésus,

cette samaritaine,

qui était pourtant assez hostile au départ,

a su t’écouter,

et elle a compris qui tu étais.

Grâce à elle,

les gens de la ville sont venus à toi,

ils t’ont entendu,

et ils ont cru à ta Parole.

Que nous ayons la joie et l’enthousiasme

de cette femme

quand nous parlons de toi.

Francis Cousin

  

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Prière dim carême A 3°




Fiche n°6 : Renaître de l’Esprit Saint par Jésus Sauveur et recevoir ainsi la Vie éternelle (Jn 2,23-3,8)

En Jn 1,19-51 St Jean nous a présenté le Christ et tous les titres qu’on peut lui donner. Puis nous l’avons vu accomplir à Cana (Jn 2,1-12) son premier signe qui renvoie au mystère de l’Alliance Nouvelle : au don de la Loi par Moïse succède maintenant celui de l’Esprit Saint par Jésus-Christ. Et puisque la Loi et le Temple de Jérusalem étaient les deux grands piliers de la vie religieuse en Israël, le Christ révèlera aussitôt qu’il est désormais l’unique Temple Véritable du Dieu vivant (Jn 2,13-22). Puis St Jean abordera, sans le nommer explicitement, le thème du Baptême et la Révélation se poursuivra par l’intermédiaire de personnes concrètes qui auront toutes une portée symbolique :

  1. a) Relever en Jn 3,1-10 ; 7,45-52 ; 19,38-42 les informations sur Nicodème qui nous permettent de préciser « qui » il est. Puis, quel autre personnage intervient en Jn 3,22‑27 ? A quel peuple renvoient ces deux personnages ?

  2. b) Qui apparaît ensuite en Jn 4 ? Quel peuple est alors évoqué ? Voir les précisions données en fin de fiche.

  3. c) Enfin, qui intervient en Jn 4,46 ? A l’époque où la Palestine était envahie par les Romains, à quel ensemble de l’humanité renvoie ce dernier personnage ?

Noter la progression qui apparaît ainsi avec (a), puis (b), puis (c). Retrouver cette dynamique d’ensemble en Ac 1,8 (voir aussi Jn 4,22 ; Mt 28,16-20 ; Mc 16,14-18).

1 – La nouvelle naissance de l’eau et de l’Esprit (Jn 3,1-8)

Comment d’après Jn 2,23-25 qualifier une foi qui ne se baserait que sur les signes, les miracles, et qui ne ferait que courir après le merveilleux : est-elle solide, forte, parfaite ? Noter que Jésus le sait : « lui-même connaissait ce qu’il y avait dans l’homme » (Jn 2,25). Or cette connaissance, dans la Bible, est le propre de Dieu : « Lui seul en effet sonde les cœurs et les reins » (Ps 7,10). Jésus est donc déjà présenté ici comme étant « un prophète » (Jn 4,19.44[1] ; 6,14 ; 7,40.52 ; 9,17). Mais ce prophète n’est pas « une personne humaine créée », comme chacun d’entre nous. Il est « le Fils Unique », cette Personne divine engendrée par le Père de toute éternité, vrai Dieu mais aussi vrai homme au sens où il a voulu, par le Mystère de l’Incarnation, assumer pleinement notre nature humaine…

D’après ce que nous venons de constater d’une foi qui ne serait basée que sur des signes, que peut-on dire de la foi de Nicodème (cf. Jn 3,1-2) ? Pourquoi est-il d’ailleurs venu trouver Jésus « de nuit » (cf. Jn 19,38 ; noter que le mot « Juif » ne renvoie pas ici, comme c’est très souvent le cas dans l’Evangile de Jean, à l’ensemble du Peuple Juif mais seulement à ses responsables) ? Mais que fait-il en Jn 7,45-52 et Jn 19,38-42 ? De plus, que symbolisent en St Jean les notions de « nuit » et de « ténèbres » (cf. Jn 3,19-21 ; 13,21-30 et tout spécialement le verset 30) et comment Jésus est‑il présenté (cf. Jn 1,4-5.9 ; 8,12 ; 9,4-5 ; 12,35-36.46) ? Quel a donc été le cheminement de Nicodème entre le début et la fin de l’Evangile ?

En Jn 3,2, qu’a noté Nicodème vis-à-vis de Jésus et de sa relation à Dieu ? A la lumière de Jr 1,8.19, qui est-il prêt à reconnaître en lui (Se souvenir de Jn 4,19 ; 7,40 ; 9,17…) ?

Quel est le premier verbe employé par Nicodème en 3,2 ? Que suggère-t-il, vis-à-vis de Jésus : une connaissance plutôt de cœur ou plutôt intellectuelle ? Quel est le danger d’une telle affirmation (cf. Jn 9,41 ; Jr 13,15-17 ; Ez 16,49-50 ; Os 5,5 ; 7,10). Mais Nicodème est un homme de bonne volonté, ouvert à la vérité, en marche vers la lumière… Or, comment est-il possible de connaître le Christ et les réalités spirituelles du Royaume des Cieux (Jn 16,12-15 ; 1Co 2,9‑15 ; associer Jn 4,24 avec 1Jn 1,5 puis lire Ps 36(35),10) ? Or, quel est justement le Don que le Père veut offrir à tous les hommes par son Fils (cf. Ac 2,38 ; 10,45 ; 1Th 4,8) ? Mais Dieu ne veut forcer personne… Mais nous pouvons déjà le deviner : à quelle démarche le Christ va-t-il inviter Nicodème par la suite (Voir aussi Lc 11,9‑13) ? Et cette démarche, à renouveler chaque jour dans la prière, s’accomplit par excellence lors du sacrement du baptême (cf. Ac 2,38 ; Mt 3,11 ; Jn 1,33 ; Ac 1,5 ; 9,17-18) auquel Jésus fera allusion par la suite…

L’expression « Royaume de Dieu » n’apparaît que deux fois en St Jean (3,3.5) ; St Matthieu, de son côté, parle 55 fois du « Royaume » ! D’après St Paul, « le Royaume des Cieux n’est pas une affaire de nourriture ou de boisson : il est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint » (Rm 14,17). « Dieu est Esprit » (Jn 4,24) ; Dieu est Saint (Is 6,3 ; Ps 99(98),9 ; Lc 1,49). Nous parlons donc ici de ce que Dieu est en Lui-même, de sa nature divine « Esprit Saint »… Voilà ce que le Fils est venu communiquer à toute l’humanité (2P 1,4) et que notre « esprit » est appelé à accueillir. Si nous disons « Oui ! » au Christ, « l’Esprit Saint » nature divine viendra s’unir à notre esprit : « Celui qui s’unit au Seigneur » par sa foi, c’est-à-dire en se laissant en fait unir au Seigneur par le Seigneur lui-même, « n’est avec lui qu’un seul Esprit » (1Co 6,17). Telle est l’aventure de foi, qui commence dès maintenant sur cette terre, « en énigme » (1Co 13,12) et que nous espérons découvrir en Plénitude par-delà notre mort (cf. 1Jn 3,1-2)… Cet Esprit de Dieu qui vient s’unir à notre esprit nous entraîne dans un Mystère de Communion avec Dieu, et avec tous ceux et celles qui ont accepté eux aussi de l’accueillir. Cette Communion, si mystérieuse ici-bas, est de l’ordre de la Vie, la Vie éternelle, la Vie de Dieu. En effet, « l’Esprit vivifie » (Jn 6,63), il communique ce « je ne sais quoi »[2] qui est de l’ordre de la Vie de Dieu et que nous sommes appelés à reconnaître dans notre « vivre » même… « Si l’Esprit est votre Vie », écrit St Paul, « que l’Esprit vous fasse agir ! » (Ga 5,25).

Résumons-nous : le Royaume des Cieux est « justice, paix et joie dans l’Esprit Saint », un Mystère de Communion avec Dieu par son Esprit offert à tous, mais pour le recevoir il faut accepter de se repentir en renonçant à tout ce qui lui est contraire (cf. Ac 5,32). Son premier fruit en nos cœurs est de l’ordre de la Vie, la Vie éternelle, la Vie de Dieu qui se déploie dans sa Paix (cf. Ga 5,22-23 ; Ac 9,31 ; Ep 4,3)… Nous avons dit que St Jean, à la différence de St Matthieu (55 fois), n’utilise que très rarement (2 fois) la notion de « Royaume ». En effet, ce Mystère de Communion est évoqué chez lui avec le vocabulaire de « la Vie »… C’est ainsi que le mot « vie » intervient chez lui 35 fois, alors qu’on ne le retrouve que 7 fois en St Matthieu… Nous l’avons remarqué : les proportions sont cette fois inversées… Ainsi, pour St Jean, le Fils est venu en ce monde pour que « nous ayons la Vie en surabondance » (Jn 10,10), une Vie qui nous est communiquée par « l’Eau Vive » (Jn 4,10-14) de l’Esprit Saint (Jn 7,37-39), cet « Esprit qui vivifie » (Jn 6,63)… Participer à cet Esprit grâce à la Miséricorde de Dieu, tel est « le Royaume de Dieu » qui commence dès maintenant, dans la foi…

Tout dépend bien sûr de nos traductions, mais quel est le mot qui apparaît le plus souvent en Jn 3,3-8 ? Et le chiffre « huit » dans la Bible est symbole de perfection (« sept ») infinie (« sept + un »)… Par cette nouvelle naissance évoquée ici notre vocation commune à tous  commencera à s’accomplir pleinement : devenir des enfants de Dieu (Jn 1,12) vivants du Souffle de son Esprit (Gn 2,4b-7 ; Jn 20,22) pour être « à son image et ressemblance » (Gn 1,26-27). C’est donc dans cet Esprit que nous trouverons notre Plénitude. D’où l’appel de St Paul : « Cherchez votre Plénitude dans l’Esprit » (Ep 5,18)…

Le baptême comme naissance nouvelle est aussi évoqué en Tt 3,4-7 ; 1P 1,22-23 ; 1Jn 2,29 ; 3,9 ; 4,7 ; 5,1… Et le fruit de cette naissance nouvelle est une créature nouvelle, un « être nouveau » (2Co 5,17) qu’il s’agira de faire passer par la suite dans toute notre vie, petit à petit, de conversion en conversion…

En Jn 3,3 et Jn 3,4, St Jean joue sur le double sens possible du mot grec « anôthen, d’en haut ou de nouveau ». Nicodème comprend « naître de nouveau » au sens matériel « d’entrer une seconde fois dans le sein de sa mère et naître » ! Mais Jésus évoque, lui, la nouvelle naissance « d’en-haut », celle réalisée par Dieu le Père Lui-même et mise en œuvre par le don de l’Esprit Saint. Cela ne vient pas de l’homme, mais de Dieu… D’où l’invitation : « Il vous faut naître d’en haut » (Jn 3,7)… Et cela se fera dans la mesure où nous accepterons de laisser Dieu agir en nous abandonnant avec confiance entre ses mains. « Père, en tes mains je remets mon esprit » (Lc 24,46), ma vie, tout ce que je suis… Une fois de plus, nous constatons à quel point Jésus est Lui-même le chemin qui nous mène vers le Père… « Mon Père, je m’abandonne à toi, fais de moi ce qu’il te plaira… Je remets mon âme entre tes mains… sans mesure, avec une infinie confiance, car tu es mon Père » (Charles de Foucauld).

Noter les deux verbes associés au Royaume de Dieu en Jn 3,3 et 3,5. Retrouver le deuxième en Mt 18,8 et 19,17 ; en comparant l’expression employée dans ces deux derniers versets avec Jn 3,5, retrouver la notion équivalente en St Jean à celle de « Royaume »… Prendre maintenant le verbe de Jn 3,3 et le retrouver en Jn 3,36 : en comparant les deux expressions, retrouver la réponse précédente…

Enfin, au verset 6, Jésus évoque l’œuvre spécifique de l’Esprit au cœur de ceux et celles qui acceptent de le recevoir, une œuvre qui apparaît avoir la même stabilité, la même permanence que « ce qui est né de la chair ». Cette conclusion apparaît du parallèle entre la chair et l’Esprit, et de la forme verbale employée en grec qui renvoie à une action passée dont les conséquences se font toujours sentir dans le présent du texte… Ainsi, les conséquences du baptême (le don de l’Esprit Saint) ne feront jamais défaut à ceux et celles qui l’ont reçu. L’Esprit donné sera toujours là, offert, pour un de ces nombreux « nouveaux départs » dont notre vie est remplie…

En Jn 3,8, St Jean joue à nouveau sur les deux sens possibles du mot grec « pneuma : ‘vent, souffle’ ou ‘Esprit’ », un mot qui intervient en Gn 1,2 dans la traduction grecque de l’Ancien Testament réalisée à Alexandrie au 3° siècle avant JC, « la Septante ». « Le souffle de Dieu », « l’Esprit de Dieu » en « planant sur les eaux » inaugurait la création et c’est toujours lui, offert par le Christ, qui permet son plein accomplissement… Mais comme le vent, il est discret, invisible, insaisissable, ce qui ne veut pas dire qu’il est impossible « d’entendre sa voix », bien au contraire… Il en est donc de même pour l’Esprit : il est possible « d’entendre sa voix » en nos cœurs, de reconnaître sa Présence, aussi mystérieuse soit-elle… Voilà « l’aventure » par excellence que Jésus nous propose… Mais cette perception « de foi » n’est pas du tout synonyme de « tout savoir », bien au contraire… « Mais tu ne sais pas ni d’où il vient, ni où il va »…

Concluons avec Rudolf  Schnackenburg et le Catéchisme de l’Eglise Catholique (& 725) : « Avant tout effort humain pour entrer dans le Royaume de Dieu, Dieu doit poser le fondement d’un nouvel « être » de l’homme, qui lui rendra aussi possible un comportement nouveau ». Ce nouvel « être » est Mystère de Communion dans l’unique Esprit… La prophétie d’Ezéchiel commence alors à s’accomplir :

Ez 36,24-29 : Ainsi parle le Seigneur Dieu :

« Je vous prendrai parmi les nations,

je vous rassemblerai de tous les pays étrangers

et je vous ramènerai vers votre sol.

(25)    Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés ;

de toutes vos souillures et de toutes vos ordures je vous purifierai.

(26)    Et je vous donnerai un cœur nouveau,

je mettrai en vous un esprit nouveau,

j’ôterai de votre chair le cœur de pierre

et je vous donnerai un cœur de chair.

(27)    Je mettrai mon Esprit en vous

et je ferai que vous marchiez selon mes lois

et que vous observiez et pratiquiez mes coutumes.

(28)    Vous habiterez le pays que j’ai donné à vos pères.

Vous serez mon peuple et moi je serai votre Dieu.

(29)    Je vous sauverai de toutes vos souillures »…

Nous l’avons noté : « Je »…, « Je »…, « Je »… Le premier à agir, c’est Dieu. Et la possibilité d’une vie nouvelle sera le résultat de cette action : « Je ferai que vous marchiez selon mes lois », des lois de vie, pour le vrai épanouissement de la vie… Dieu se propose d’agir ?… A nous de le laisser faire, de tout cœur, de nous laisser faire, de tout cœur, en lui offrant en vérité et le plus simplement possible toute notre vie… Et c’est ce qui se passe notamment en ce jour du baptême où l’Eglise, par ses serviteurs, verse « au nom du Père, du Fils et de l’Esprit Saint » (Mt 28,19) de l’eau sur les nouveaux baptisés. Cette eau est le signe visible d’une réalité invisible, l’Esprit Saint, qui vient faire toutes choses nouvelles au cœur de la personne qui le reçoit… Mystérieusement, il lave, il purifie et ce faisant, il enlève ce « cœur de pierre », dur, froid et inhumain… De son action naît alors « un cœur nouveau », « un esprit nouveau », « un cœur de chair ». Cette dernière expression est très belle car elle souligne à quel point le fruit de l’Esprit est une humanité réussie, vraiment de chair et de sang, sensible et généreuse… « Le vrai mystique est l’épanouissement suprême du véritable humanisme. La seule façon de réaliser sa plénitude humaine est de vivre à part entière dans l’Esprit de Dieu » (Maurice Morillon).

Nous n’y arriverons jamais parfaitement ici-bas… Mais l’important est de garder cet horizon devant nos yeux et de marcher, jour après jour, de miséricorde en miséricorde, vers ce plein épanouissement qui ne peut que venir de cet Esprit donné et réellement accueilli. En effet, les trois expressions « cœur nouveau », « esprit nouveau », « cœur de chair » renvoient toutes les trois à l’homme et au renouvellement de son être. Il commencera à se mettre en œuvre dans l’invisible et le secret de son cœur. Alors, petit à petit, son comportement changera : les fruits, eux, seront visibles… Et tout ceci ne sera que la conséquence d’une seule action divine : « Je mettrai mon Esprit en vous »… Nous l’avons noté, pour la première et unique fois dans notre texte le mot « esprit » renvoie cette fois à « l’Esprit de Dieu »… Dieu fait ainsi toutes choses nouvelles en nous donnant d’avoir part à son Esprit qui vient s’unir à notre esprit blessé, malade, enténébré… Et de cette union nait une créature nouvelle, un esprit nouveau, un cœur nouveau…

« Dieu est Esprit » (Jn 4,24)… « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5)… L’Esprit est donc Lumière… Si notre « cœur inintelligent s’est enténébré » par suite de nos fautes (Rm 1,21), la Lumière vient briller dans nos ténèbres par le Don de « l’Esprit–Lumière » « et les ténèbres ne l’ont pas saisie » (Jn 1,5). Rien, absolument rien ne peut l’empêcher d’accomplir son œuvre pourvu que nous le laissions faire… St Paul évoque alors le résultat en Ep 5,5-9 :

« Sachez-le bien, ni le fornicateur, ni le débauché,

ni le cupide – qui est un idolâtre –

n’ont droit à l’héritage dans le Royaume du Christ et de Dieu…

N’ayez donc rien de commun avec eux.

Jadis vous étiez ténèbres,

mais à présent vous êtes Lumière dans le Seigneur ;

conduisez-vous en enfants de Lumière;

et le fruit de la Lumière consiste en toute bonté, justice et vérité »…

« Jadis vous étiez ténèbres » : tels sont « les cœurs de pierre »… Mais lavés, purifiés, sanctifiés par le sacrement du baptême et le don de l’Esprit Saint, l’Esprit de Lumière, « ils sont maintenant Lumière dans le Seigneur »… Souvenons-nous : celui qui se laisse unir au Seigneur par sa foi n’est avec lui qu’un seul Esprit (1Co 6,17)… Le pécheur qui, dans un mouvement de conversion, accepte de laisser l’Esprit s’unir à son esprit, va bénéficier de toutes les propriétés de l’Esprit « Lumière et Vie »… Seul, il n’est que ténèbres… « Dans le Seigneur », c’est-à-dire uni au Seigneur dans la Communion d’un même Esprit, il participe à ces richesses qui n’appartiennent qu’à Dieu et à Dieu seul…

Tout ceci nous est communiqué gratuitement par Celui qui en Jésus Christ et par lui s’est révélé comme un Dieu de Miséricorde, « le Père des Miséricordes » (2Co 1,3), qui ne supporte pas que ses créatures soient privées de cette Plénitude de Vie, la sienne, pour laquelle il nous a tous créés… Mais accepterons-nous de croire en Lui ? Accepterons-nous d’aller à Lui en vérité et de tout lui offrir ? Cela suppose l’humble reconnaissance de ce mal qui habite encore notre vie… Mais si répondons à son invitation, nous vivrons, dans la foi, la rencontre avec le Ressuscité, Celui qui nous a promis « d’être avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20), Lui qui ne cesse d’être « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,19) et toutes ses conséquences… Alors, heureux serons-nous, car le Christ accomplira en nos cœurs son œuvre de Sauveur… Nous expérimenterons dès maintenant « le salut par la rémission de nos péchés » (Lc 1,76-79), et nous recevrons avec ce pardon de Dieu « quelque chose » de sa Lumière et de sa Vie qui nous comblera dès maintenant, au‑delà de toute attente…

Diacre Jacques Fournier

Les Samaritains

D’après le Livre de la Genèse, Dieu s’est constitué un Peuple en appelant Abraham, originaire d’Ur en basse Mésopotamie, (Gn 12,1-5). Son fils Isaac engendra Jacob qui eut lui-même douze fils, les douze ancêtres des douze tribus d’Israël. Suite à une famine, ils partirent s’installer en Egypte. Mais sous le Pharaon oppresseur Ramsès II, Dieu appela Moïse pour libérer son peuple et le faire sortir du pays d’Egypte. Nous sommes dans les années 1250 avant JC. Cinquante ans plus tard, Josué et tous les fils d’Israël entreront en Terre Promise. Chacune des douze tribus recevra alors son territoire, et s’organisera autour de grandes figures, « les Juges ». Mais en 1030 avant JC, il faut faire face à des ennemis venus de l’extérieur, et donc unir ses forces. Saül deviendra le premier roi d’Israël (1030 – 1010 av JC), mais il sera plus un chef militaire qu’un homme politique. Son successeur David (1010 – 970 av JC) exercera vraiment la royauté au sens fort du terme. Il fera de Jérusalem sa capitale et pratiquera une politique d’extension territoriale. Le Royaume d’Israël ne sera plus jamais aussi grand par la suite … Son fils Salomon (970 – 931 av JC) lui succéda sur le trône. Il bâtira le Temple de Jérusalem, mettra en place les institutions fondamentales d’un état, se lancera dans une politique de grandes constructions ce qui l’amènera à lever des impôts de plus en plus lourds. Très impopulaire au nord, le Royaume d’Israël se divisera en deux dès sa mort : le Royaume du Nord (Attention : il est parfois appelé dans les textes « le Royaume d’Israël »), et le Royaume du Sud (« le Royaume de Juda ») avec Jérusalem comme capitale.

On peut imaginer sans peine les tensions qui devaient exister entre ces deux royaumes. Omri, roi d’Israël (Royaume du Nord) de 881 à 841, acheta pour 68 Kg d’argent une colline située à une dizaine de kilomètres au nord-ouest de Sichem à un certain Chémer qui devait donner son nom à la nouvelle capitale qu’Omri y construisit : Samarie (Elle est située à environ 50 kilomètres à vol d’oiseau au nord de Jérusalem). En 722 av JC, Sargon II, roi d’Assyrie, prend Samarie et transforme le royaume du nord en une province assyrienne qui prit le nom de sa capitale : la Samarie. Toute cette zone ne cessera de s’appeler ainsi par la suite, et ses habitants, les Samaritains.

Juifs et Samaritains, issus d’un même peuple, seront comme des « frères ennemis ». Une des étapes marquantes qui scellera leur division fut la construction d’un Temple sur le Mont Garizim, sans doute vers 330 av JC, Temple qui faisait donc concurrence à celui de Jérusalem. Vers 180 av JC, le Livre du Siracide (ou de Ben Sira, ou encore « l’Ecclésiastique ») parle des Samaritains en terme de « peuple stupide qui habite à Sichem »… La destruction par Jean Hyrcan en 129/128 de Sichem, du Temple du Mont Garizim, puis de Samarie peu de temps après, achèvera de consommer la rupture entre Juifs et Samaritains.

Au temps du Christ, Jn 4,9 nous rapporte que « les Juifs n’ont pas de relations avec les Samaritains », explication donnée par St Jean lui-même pour expliquer l’étonnement de la femme samaritaine (Jn 4,9) : « Comment ! Toi qui es Juif, tu me demandes à boire à moi qui suis une femme samaritaine ? »

Jn 8,48 nous montre aussi que, pour un Juif, traiter quelqu’un de « Samaritain » équivalait à le déclarer possédé par un démon : « Les Juifs dirent à Jésus : « N’avons‑nous pas raison de dire que tu es un Samaritain et que tu as un démon ? » Jésus répondit : « Je n’ai pas un démon mais j’honore mon Père »… »

A l’époque de Jésus, la Palestine avait comme province, tout au nord, « la Galilée », habitée essentiellement par des Juifs. Puis juste au dessous, au sud, se trouvait « la Samarie ». Et enfin, plus au sud encore, « la Judée », habitée comme la Galilée par des Juifs, avec sa capitale « Jérusalem ». Pour se rendre de la Galilée à Jérusalem, les Juifs évitaient de traverser la Samarie. Ils passaient soit par la mer, soit par la vallée du Jourdain. Jésus, lui, n’hésitera pas à traverser la Samarie. N’est-il pas venu pour réconcilier les hommes avec Dieu et entre eux ? Mais un jour, il se verra refuser l’hospitalité par un village samaritain, et cela d’autant plus qu’il se dirigeait vers Jérusalem :

Lc 9,51-53 : « Or il advint, comme s’accomplissait le temps où il devait être enlevé, qu’il prit résolument le chemin de Jérusalem (52) et envoya des messagers en avant de lui. S’étant mis en route, ils entrèrent dans un village samaritain pour tout lui préparer. (53) Mais on ne le reçut pas, parce qu’il faisait route vers Jérusalem ».

A l’époque de Jésus, la question de la concurrence entre les deux Temples est encore sous-jacente. En effet, les Samaritains continuaient en effet à adorer Dieu sur le Mont Garizim :

Jn 4,19-23 : « La femme (samaritaine) dit à Jésus : « Seigneur, je vois que tu es un prophète… (20) Nos pères ont adoré sur cette montagne et vous, vous dites : C’est à Jérusalem qu’est le lieu où il faut adorer. » (21) Jésus lui dit : « Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père… (23) L’heure vient – et c’est maintenant – où les véritables adorateurs adoreront le Père en Esprit et en vérité, car tels sont les adorateurs que cherche le Père. »

Les Samaritains célèbrent encore de nos jours la Pâque sur le Mont Garizim, immolant l’agneau pascal selon le rituel d’Exode 12. Notons aussi que les Samaritains ne reconnaissent comme Ecriture que le Pentateuque (Les cinq premiers livres de la Bible : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome). Leurs écrits révèlent un monothéisme intransigeant, une exaltation de la figure de Moïse et du sanctuaire de Garizim sur lequel sont transférées systématiquement toutes les traditions que les Juifs reportent à Jérusalem.

Ils attendent eux aussi un « Messie » mais, à la différence des Juifs, il n’est pas « l’Oint fils de David », mais plutôt un prophète (Jn 4,19 : La femme lui dit : « Seigneur, je vois que tu es un prophète… ») qui révèlera la vérité (Jn 4,25 : « Je sais que le Messie doit venir, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, il nous expliquera tout. »), le prophète « comme Moïse » que le Livre du Deutéronome annonçait :

Dt 18,18 : « Dieu dit à Moïse : « Je leur susciterai, du milieu de leurs frères, un prophète semblable à toi, je mettrai mes paroles dans sa bouche et il leur dira tout ce que je lui ordonnerai. »

Dans les Evangiles, nous trouvons aussi des Samaritains, comme un de ces dix  lépreux guéris par Jésus qui, seul, revient lui rendre grâce (Lc 17,16), ou encore le héros de la parabole appelée justement du « bon Samaritain » (Lc 10,29-35). Et si, dans un premier temps, Jésus ordonne à ses Apôtres « d’aller plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël » sans « prendre le chemin des païens ni entrer dans une ville de Samaritains » (Lc 10,5-6), il leur ordonnera après sa résurrection d’entre les morts, de s’adresser à eux comme au monde entier (Ac 1,8). Le salut est pour tous, et il les avait préparé à avoir un regard bienveillant à leur égard notamment par cette parabole du « bon Samaritain » où il leur donnait en exemple, le comportement d’un Samaritain…

Ac 1,8 : « Vous allez recevoir une force,

celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous.

Vous serez alors mes témoins

à Jérusalem,

dans toute la Judée et la Samarie,

et jusqu’aux extrémités de la terre. »

Et de fait…

Ac 8,5 : « Philippe, qui était descendu dans une ville de la Samarie,

y proclamait le Christ »…

Ac 8,14-17 : « Apprenant que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu,

les apôtres qui étaient à Jérusalem y envoyèrent Pierre et Jean.

(15)     Ceux-ci descendirent donc chez les Samaritains et prièrent pour eux,

afin que l’Esprit Saint leur fût donné.

(16)     Car il n’était encore tombé sur aucun d’eux…

(17)     Alors Pierre et Jean se mirent à leur imposer les mains,

et ils recevaient l’Esprit Saint »…

____________________________

[1] Rappel : Jn 4,19.44 renvoie aux versets 19 et 44 du chapitre 4 de l’Evangile de Jean.

[2] « La vie est bien mystérieuse. Nous ne savons rien, nous ne voyons rien, et pourtant, Jésus a déjà découvert à nos âmes ce que l’œil de l’homme n’a pas vu. Oui, notre cœur pressent ce que le cœur ne saurait comprendre, puisque parfois nous sommes sans pensée pour exprimer un « je ne sais quoi » que nous sentons dans notre âme » (Ste Thérèse de Lisieux).

Correction de la fiche N°6 :

CV – 6 – Jn 2,23-3,8 correction




Fiche n°7 : Le Salut du monde et son Jugement (Jn 3,11-21)

  • Noter comment apparaît Jésus en Jn 3,11-13 et noter son activité principale (cf. Ap 1,5 et 3,14) ? L’emploi du « nous » en 3,11 suggère que d’autres se joignent à lui : qui sont-ils (1– Jn 5,37 ; 15,26 ; 2– 15,27) ?

  • Lire Nb 21,4-9. Quel est ici le péché du Peuple d’Israël ? Comme souvent dans l’Ancien Testament, les conséquences du péché sont directement attribuées à Dieu : comment sont-elles évoquées ici ? Comment St Paul en parle-t-il (cf. Rm 2,9) ?

Le peuple a péché… Les conséquences sont douloureuses… Moïse intercède pour lui… Dieu va lui répondre et reprendre l’initiative :

Qu’est-ce qui doit être fait ? Bien noter l’expression employée au v. 8 : à quoi renvoie la notion de « brûlure », que décrit-elle en fait (Bible de Jérusalem : « un Brûlant » ; TOB : « un serpent brûlant ») ?

2 – Où doit-être placé le résultat de ce travail et pourquoi ?

3 – Quels sont ceux qui, ensuite, seront concernés par tout cela (fin du v.8) ?

Dans un premier temps, qu’avaient-ils fait (cf. Ba 1,18) ? Et maintenant, que doivent-ils faire (cf Dt 28,2 ; Jr 42,6) ? Que suppose ce changement d’attitude (cf. première moitié de Nb 21,7 ; Jr 2,23 ; 3,13) ?

5 – Cela sous-entend que Dieu respecte infiniment une dimension fondamentale de notre aventure humaine, laquelle (cf. 2Co 3,17) ? Et si cette valeur est bafouée ou blessée, il sera le premier à tout mettre en œuvre pour la rétablir (cf. Is 35,10 ; Jn 8,31-36 ; Ga 5,1 ; Jc 1,25)…

6 – Quel est donc le but poursuivi à travers ce « serpent d’airain » (cf. le v.6 de Sg 16,5-12) ?

7 – Et qui finalement agit avec lui et par lui pour qu’il en soit ainsi (cf. les v. 7-8, le v. 10 et le v. 12 de Sg 16,5-12 ; Is 45,22 ; Ps 34(33),6) ?

St Jean fait donc allusion en Jn 3,14-15 à ce passage du Livre des Nombres. Nous allons reprendre pas à pas les étapes précédentes pour essayer de percevoir toutes les richesses de ce parallèle :

1 – A quoi le Christ est-il directement comparé en Jn 3,14 ? Or, souvenons-nous de l’expression employée en Nb 21,8 et de ce qu’elle évoquait… Cette expression maintenant s’applique au Christ (Lire Ac 3,14 ; 1P 1,19 ; 2,22) ! Que suggère-t-elle ? Retrouver la réponse avec le v. 24 de 1P 2,21-25… Mais cette perspective peut-être comprise de deux façons… En silence, sans rien dire, le Christ a supporté tout le mal que nous, les hommes, avons pu lui faire… Et il l’a offert, par amour, pour la guérison de ceux-là mêmes qui lui faisaient tout ce mal. Ainsi, en se faisant homme, le Fils a voulu vivre toutes les difficultés et les souffrances que nous pouvons rencontrer sur cette terre… Il s’est vraiment fait l’un de nous… Et lui, l’innocent, a été écrasé par la méchanceté, la violence, la soif de pouvoir et la jalousie des hommes (cf. Lc 23,41)…

Mais le Christ a aussi voulu vivre tout cela pour rejoindre tous les souffrants quels qu’ils soient… St Paul parle ainsi de la communauté humaine qu’est l’Eglise en termes de « Corps du Christ » (1Co 12,27). Autrement dit, tout ce que vivent les femmes et les hommes qui forment cette communauté est aussi, quelque part, vécu par le Christ… Ce qui les caractérise ? Ils sont comme tout le monde, blessés comme tout le monde, fragiles comme tout le monde… Mais ils ont simplement dit « Oui ! » au Christ, tels qu’ils sont, avec leurs fragilités, leurs failles, leurs blessures… Et ce qu’ils vivent avec le Christ n’est simplement que ce que le Christ veut vivre avec tout homme de bonne volonté… Ils souffrent ? Le Christ est là, présent à leur souffrance, la portant avec eux, souffrant avec eux et en eux. Tel est l’Amour face à la souffrance de l’être aimé : sa « folie » l’a poussé jusqu’à prendre sur lui cette souffrance, pour la porter avec nous, pour nous soulager de son poids, ne pas permettre qu’il nous écrase, nous donner d’en triompher… Et cette souffrance peut être le résultat non seulement de la « méchanceté » des hommes, de leurs péchés, mais aussi de notre propre « méchanceté », de notre propre péché… Même si nous sommes responsables, par notre attitude, d’une souffrance qui nous accable, le Christ est toujours là, offert, pour vivre cette souffrance avec nous et nous permettre ainsi de la surmonter… Telle est l’infinie Miséricorde qui, envers et contre tout, poursuit le bien de tous les hommes qu’Il aime. Il suffit de lui dire « Oui ! ».

Le prophète Isaïe avait déjà, quelque part, perçu tout cela à travers la figure du Serviteur souffrant… Ce serviteur est tour à tour dans son Livre « Israël » (Is 41,8-9 ; 42,19 ; 43,10 ; 44,1-2), ce peuple appelé par Dieu et qui symbolise quelque part tout ce que Dieu veut vivre avec tous les hommes, et une mystérieuse figure individuelle qui sera pleinement accomplie par le Christ… Lire Is 52,13-53,12 et faire tout spécialement attention à la première moitié du v. 4, et à la deuxième des v. 6, 11 et 12… St Paul aura une phrase très forte : « Celui qui n’avait pas connu le péché, Dieu l’a fait « péché » pour nous afin qu’en lui nous devenions « justice de Dieu » » (2Co 5,21). Dans la culture hébraïque, le mot « péché » renvoie aussi bien à l’acte commis qu’à ses conséquences : « Mon péché est trop lourd à porter », dit Caïn en Gn 4,13 après avoir tué son frère Abel. Par amour, le Christ a donc voulu être « péché » pour nous : il a pris sur lui toutes les conséquences de nos fautes, il a voulu les vivre lui-même en son âme et en son corps, pour nous en libérer et nous donner d’en triompher. Il a ainsi pris sur lui notre « péché » pour nous donner à la place « la justice de Dieu », « la justice qui vient de Dieu et donne au pécheur qui accepte de la recevoir de devenir juste »… Par amour, il est ainsi mort de notre mort pour que, tous, nous puissions vivre de sa vie…

Voilà ce que St Jean suggère également ici par le parallèle qu’il fait entre le Christ et le serpent d’airain. Le Christ est ce « Brûlant » qui, par amour pour tous les hommes, a voulu vivre en son âme et en son corps toutes leurs « brûlures », c’est-à-dire toutes les conséquences de leurs fautes… Envers et contre tout, il a ainsi poursuivi notre bien à tous… Alors, « si le salaire du péché, c’est la mort, le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 6,23), lui qui a voulu mourir des conséquences mêmes du péché pour sauver tous ceux et celles qui l’avaient commis !

Et si le Fils peut agir ainsi, il le doit au Père qui lui donne de pouvoir se donner pour le salut de tous (cf. début de Jn 5,30)… Dieu donne ainsi son Fils au monde : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils Unique » (Jn 3,16), Celui qui est tout pour lui, Celui vers lequel il est tourné de toute éternité, Celui à qui il se donne depuis toujours et pour toujours, Celui qui est « plus de prix » à ses yeux que lui-même (Is 43,4)… En St Jean, le Fils est ainsi le grand cadeau du Père… Si Jésus est en effet « le pain de vie » qui « descend du ciel » pour « donner la vie au monde », « c’est mon Père qui vous le donne, le pain qui vient du ciel, le vrai » (Jn 6,32).

2 – Où le Christ sera-t-il élevé et pourquoi (cf. Jn 19,37) ?

3 – Qui sera tout spécialement concerné par son offrande (cf. Lc 5,31-32) ? A quelle démarche sont-ils donc invités (cf. le 1° appel de Mc 1,15) ?

4 – Quelle attitude de cœur Dieu attend-il de chacun d’entre nous pour pouvoir accomplir son œuvre (cf. le 2° appel de Mc 1,15) ? Combien de fois intervient ce verbe en Jn 3,11‑18 ? Et le chiffre 7 dans la Bible est symbole de perfection : voilà donc « l’attitude parfaite » que Dieu attend tout spécialement de chacun d’entre nous… Noter l’expression que St Paul emploie en Rm 1,5 et 16,26 pour la décrire : qu’est-ce donc avant tout que la foi ? Et que signifie en fait une telle attitude face à Celui qui ne sait que donner, et donner encore (cf. le premier verbe de Jn 1,12) ? Et si nous consentons de tout cœur à une telle démarche, quel en sera pour nous le résultat final (cf. Jn 6,47 ; 3,16) ? Voilà ce que Dieu veut par dessus tout (cf. 1Jn 4,9)… Et pour cela, il est prêt à tout, prêt à mourir sur une Croix pour chacun d’entre nous…

5 – Retrouver la valeur évoquée précédemment au point 5 dans les versets suivants : Jn 6,67 ; 7,37-38 ; Ap 3,20 ; et hélas, en négatif, Jn 5,40 ; Mt 19,21-22…

6 – Quel est le but que le Père poursuit avec et par son Fils (cf. Jn 3,17 ; Jn 4,42 ; 1Jn 4,14) ? Noter combien de fois intervient le mot « monde » en Jn 3,14-18. Ce petit clin d’œil renforce l’universalité de la perspective, le chiffre 4 étant justement symbole d’universalité (Il renvoie aux quatre points cardinaux : le nord, le sud, l’est, l’ouest).

Noter également les autres expressions employées en ce sens au début du v. 15 et dans la seconde moitié du v. 16…

Ce désir de Dieu, cette volonté de Dieu, St Paul l’affirme lui aussi explicitement en 1Tm 2,4.

7 – Et qui, finalement, agit avec le Christ et par le Christ pour qu’il en soit effectivement ainsi (cf. Jn 5,17 ; 5,19 ; 6,44 ; 6,65) ?

Le thème qui intervient par la suite est celui du « jugement ». D’après Jn 3,17 ; 8,10-11 ; 8,15 ; 12,47, Dieu juge-t-il le pécheur au sens de « condamner » ? Nous allons donc regarder avec St Jean ce que signifie « juger » pour Dieu :

– La première étape est celle de la Présence de Dieu au monde. Depuis que le monde existe, sa « Lumière Véritable » (Bible de Jérusalem), sa « Vraie Lumière » (TOB)   « éclaire tout homme » (Bible de Jérusalem), « illumine tout homme » (TOB). Cette Présence de Dieu a été manifestée en Jésus Christ avec une intensité inégalée. Il est « la Lumière » car « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) : « Je suis la Lumière du monde », dit-il (Jn 8,12 ; 9,5 ; 12,46). Mais il est aussi en même temps « Vérité » car Dieu est « le Véritable » par excellence (cf. Jn 17,3) : « Je suis (…) la Vérité (…) » (Jn 14,6).

2 – Cette Lumière qui environne tout homme et qui est en même temps Vérité, l’appelle, par sa simple Présence, à se déterminer par rapport à elle…L’acceptera-t-il ?

  1. a) Si « oui ! », puisqu’elle est en même temps Vérité, il ne pourra, avec elle, que « faire la vérité » dans sa vie… Et la vérité est que tout homme a péché : « Tous sont soumis a péché, comme il est écrit : Il n’est pas de juste, pas un seul… Tous, ils sont dévoyés, ensemble pervertis » (Rm 3,10-11). Ainsi, « celui qui fait la vérité vient à la Lumière» (Jn 3,21). Il accepte dans sa vie la Présence de cette Lumière et il consent à tout ce que cette Lumière met en lumière : en vérité, il est pécheur, injuste, malade, blessé… Mais si « Dieu est Lumière », il est aussi « Amour» (1Jn 4,8.16). Cette Lumière est celle de la Vérité de l’Amour… En Dieu, « Amour et Vérité se rencontrent » (Ps 85,11), ils sont indissociables… Et cet Amour pur de Dieu, qui ne se recherche jamais en rien, mais qui ne cesse de poursuive le bien de celles et ceux qu’il aime, prend, face au péché, le visage de la Miséricorde. Amour toujours… « Dieu des Pères, et Seigneur de Miséricorde », toi qui « gouvernes l’univers avec Miséricorde », « ta Miséricorde vint en aide » à ceux qui avaient péché « et les guérit » (Sg 9,1 ; 15,1 ; 16,10). Autrement dit, la vérité de notre misère, reconnue et acceptée à la Lumière Véritable de ce Dieu qui n’est qu’Amour, ne peut que rencontrer la Vérité de la Miséricorde et donc le pardon, le salut, la surabondance de Paix, de Vie et de Joie…

Ainsi, la notion de « jugement » pour Dieu renvoie à sa simple Présence qui est Lumière et Vérité pour tout homme. Quiconque l’accepte de tout cœur reconnaîtra avec elle sa misère, son péché… Mais cette Lumière est aussi celle de l’Amour, de la Miséricorde qui ne désire que le bien du pécheur. Aussi, « le Père des Miséricordes » nous offre-t-il largement son pardon et avec lui la Plénitude de Vie dont nous étions privés par suite de nos fautes. Le résultat final est le salut de l’homme… Ainsi, pour Dieu, juger c’est faire la vérité pour pardonner et donc sauver… Pour lui, juger, c’est sauver… Quiconque accueille cette démarche que Dieu lui-même nous supplie d’accepter en Jésus Christ ne pourra que connaître avec Lui le salut, le bonheur, la Plénitude de Vie et de paix…

 

  1. b) Si « Non ! », l’homme pécheur, en refusant de faire la vérité dans sa vie à la Lumière de la Miséricorde, se condamne lui-même… Il se prive du pardon que Dieu veut lui offrir pour son bien… Il se prive de la Plénitude de Vie et de Joie que Dieu désire lui communiquer depuis toujours… Ainsi, Dieu ne condamne jamais qui que ce soit ! Bien au contraire, il ne cesse de désirer, d’attendre et d’espérer le retour du pécheur, comme le père dans la parabole du fils prodigue (Lc 15,11-32)… C’est l’homme qui, en refusant Dieu, se condamne lui-même… En refusant de croire au Christ, il refuse l’Unique Sauveur du monde, celui qui, jour après jour, marche à ses côtés, main tendue, pour l’arracher à ses ténèbres, à sa tristesse, à sa mort… Malheur, malheur, malheur pour lui, et Dieu est le premier à s’en désoler ! Mais par contre, quelle joie au ciel s’il accepte enfin cette main toujours tendue : « C’est ainsi, je vous le dis, qu’il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes, qui n’ont pas besoin de repentir » (Lc 15,7 ; 15,10).… Oui, dès maintenant, dans la foi, « le Seigneur ton Dieu est au milieu de toi, en héros sauveur ! » Si tu consent à sa Présence, si tu acceptes d’accueillir tous ses bienfaits, « il exultera pour toi de joie, il tressaillira dans son amour ; il dansera pour toi avec des cris de joie » (So 3,17), heureux de ton bonheur…

            Telle est donc la notion de « jugement » en St Jean. C’est pourquoi, « celui qui croit en lui n’est pas jugé » au sens de condamner, car Dieu ne désire que son salut. Mais « celui qui ne croit pas est déjà jugé » par le simple fait « qu’il n’a pas cru au Nom du Fils Unique de Dieu », qui n’est qu’Amour, Miséricorde et Pardon… Ce n’est donc pas Dieu qui juge au sens de condamner… C’est l’homme qui, en refusant Dieu, se condamne lui-même…

Ce thème revient en Jn 5,26-27 où le Christ déclare : « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même, et il lui a donné »… ‑ la suite logique serait : « de donner la vie » à « toute chair », comme il le déclare en Jn 17,2. Mais non ; la suite est : « il lui a donné pourvoir d’exercer le jugement ». On le voit bien : pour Dieu, « exercer le jugement », c’est « donner la vie » et triompher ainsi de cette « mort » qui « est entrée dans le monde » par notre liberté mal employée (cf. Rm 5,12). Pour Dieu, juger, c’est sauver… Le prophète Ezéchiel l’avait écrit depuis longtemps (vers 600 av JC) : « Prendrais-je donc plaisir à la mort du méchant – oracle du Seigneur Dieu – et non pas plutôt à le voir renoncer à sa conduite et vivre ? (…) Je ne prends pas plaisir à la mort de qui que ce soit, oracle du Seigneur Dieu. Convertissez-vous et vivez ! Dis-leur : Par ma vie, oracle du Seigneur Dieu, je ne prends pas plaisir à la mort du méchant, mais à la conversion du méchant qui change de conduite pour avoir la vie. Convertissez-vous, revenez de votre voie mauvaise. Pourquoi mourir, maison d’Israël ? » (Ez 18,23.32 ; 33,11). Voilà la prière que Dieu ne cesse d’adresser jour après jour à tous les hommes…

En choisissant le Christ, l’homme choisit donc son Créateur qui n’a pour lui qu’un seul désir : qu’il participe à la Plénitude de sa Vie. Mais si, dans sa liberté de choisir mal employée, il « préfère » d’autres réalités, il se prive lui-même de tous ces bienfaits… C’est ce que St Jean déclare par la suite : « Et tel est le jugement : la lumière est venue dans le monde et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière » (Jn 3,19)… De plus, le péché étant mise à l’écart de Dieu, volonté de tout décider par soi-même, prétention de se réaliser tout seul, il est donc « orgueil ». Et bien sûr, celui qui est dans une telle logique ne peut envisager de reconnaître une seule seconde qu’il pourrait avoir tort… « Quiconque, en effet, commet le mal hait la lumière et ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient démontrées coupables » (Jn 3,20)… Terrible prison de laquelle Dieu seul peut nous faire sortir, notamment lors de ces multiples épreuves que la vie nous réserve au moment où nous nous y attendons le moins. Nous nous découvrons alors dans la vérité de notre être : profondément démunis… Démunis ? Oui, par nous-mêmes… Mais riches alors du secours de Dieu, si nous l’acceptons…

Jacques Fesch, un des derniers condamnés à mort en France, écrivait peu de temps avant son exécution : « Au bout d’un an de détention, il m’est arrivé une douleur affective très forte qui m’a fait beaucoup souffrir et brutalement, en quelques heures, j’ai possédé la Foi, une certitude absolue. J’ai cru et ne comprenais plus comment je faisais pour ne pas croire. La grâce m’a visité, une grande joie s’est emparée de moi et surtout une grande paix. Tout est devenu clair en quelques instants. C’était une joie sensible très forte que j’ai peut-être trop tendance à rechercher maintenant alors que l’essentiel n’est pas l’émotion, mais la foi »…

« Je m’aperçois que la foi est vraiment un don de Dieu. On croit par le cœur, sans savoir pourquoi, et sans même chercher à savoir. La certitude intime qui vous emplit suffit. L’amour est le plus fort »…

Jacques Fournier

 

Correction de la fiche N° 7 :

CV – 7 – Jn 3,11-21




Fiche n°8 : L’ultime témoignage de Jean-Baptiste (Jn 3,22-36)

Comment les interlocuteurs de Jean-Baptiste lui présentent-ils le Christ en 3,26, comme un allié ou comme un concurrent ? Le regard des Pharisiens en 12,19 est-il différent ? Jean-Baptiste adhère-t-il à cette vision des choses ? Quelle attitude adopte-t-il (cf. tout particulièrement 3,28 et 3,30) ?

A qui Jésus est-il comparé en 3,29 ? Avons-nous déjà rencontré ce thème en St Jean ? A quelle réalité renvoie-t-il (cf. Is 54,1-10 avec une attention particulière aux versets 5 et 10 ; lire, pour le plaisir, Is 61,10-62,5) ? Comment Jean-Baptiste se situe-t-il par rapport à Jésus en 3,29 ? Est-il heureux ainsi ? Quelle réalité est à la source de sa joie ? A la lumière de Jn 3,34 ; Jn 3,8 et 1Th 1,6, peut-on préciser la portée de l’expression « voix de l’époux » et ce qui est à la racine de la joie de Jean-Baptiste ? Et comment tout disciple de Jésus est-il invité à se situer par rapport à lui (cf. Jn 15,14-15) ? A quoi sommes-nous donc tous appelés (cf. Mt 25,21.23 ; Jn 3,29 ; 15,11) ? Et comment notre amour pour le Christ se manifestera-t-il par la suite (cf. Jn 15,27 ; Mt 10,18) ? Et qui nous épaulera (cf. Mt 10,19-20 et Ac 4,29-31) ?

Quelle portée a l’expression de Jean-Baptiste sur Jésus : « il est au dessus de tous (ou de tout) » ; que signifie-t-elle pour le Christ (cf. Jn 20,28) ? Retrouver la réponse avec les trois derniers versets de Ph 2,6-11. Même idée en Ep 1,19-23 ; comment St Paul appelle-t-il le Christ dans ce dernier texte ?

Lorsque Jésus « témoigne de ce qu’il a vu et entendu », que fait le Père à son égard (cf. Jn 5,37) ? Et par qui le fait-il (cf. Jn 15,26 ; et la fin de 1Jn 5,6 avec 1Jn 5,9) ? Conclusion : que fait celui qui accueille le témoignage du Fils (cf. Jn 3,33 ; le cas contraire est évoqué en 1Jn 5,10) ? Et de quel ordre est ce témoignage au cœur de celui qui l’accueille (cf. 1Jn 5,11-12) ?

Jn 3,34-36 redit tout ceci autrement ; d’après la traduction de la Bible de Jérusalem pour la fin de Jn 3,34[1], que donne Jésus en donnant les Paroles qu’il a reçues de son Père ? Que transmet à son tour ce don par sa simple Présence dans les cœurs (cf. Jn 6,63 ; Ga 5,25) ? Et par quelle Personne divine ce don nous rejoint-il très concrètement (cf. Jn 14,15-17) ? Conclusion (cf. début de Jn 3,36) ?

Enfin, d’après Jn 3,36, l’expression « colère de Dieu » renvoie-t-elle vraiment à Dieu en tant qu’il se mettrait en colère ? Que désigne-t-elle en fait (cf. Rm 2,4-11 ; 5,611 ; Ep 2,3-10 ; 5,1-11 ; 1Th 1,9-10 ; 5,9-10) ?

Ce dernier thème de « la colère de Dieu » est tout particulièrement important, et il mérite que nous nous y arrêtions un peu… Comme il nous est difficile en effet de lire tous ces textes, notamment dans l’Ancien Testament, où nous voyons un Dieu qui frappe, qui châtie, qui punit celui qui fait le mal… Disons-le tout de suite : tous ces passages appartiennent à ce qui, dans l’Ancien Testament, est, selon les termes du Concile Vatican II, « imparfait » et « caduc » (Dei Verbum, & 15) :

« L’Ancien Testament avait pour raison d’être majeure de préparer l’avènement du Christ Sauveur du monde, et de son royaume messianique, d’annoncer prophétiquement cet avènement (cf Luc 24,44 ; Jean 5,39 ; 1Pierre 1,10) et de le signifier par diverses figures (cf 1Cor 10,11). Compte tenu de la situation humaine qui précède le salut instauré par le Christ, les livres de l’Ancien Testament permettent à tous de connaître qui est Dieu et qui est l’homme, non moins que la manière dont Dieu dans sa justice et sa miséricorde agit avec les hommes. Ces livres, bien qu’ils contiennent de l’imparfait et du caduc, sont pourtant les témoins d’une véritable pédagogie divine. C’est pourquoi les chrétiens doivent les accepter avec vénération : en eux s’expriment un vif sens de Dieu ; en eux se trouvent de sublimes enseignements sur Dieu, une bienfaisante sagesse sur la vie humaine, d’admirables trésors de prières; en eux enfin se tient caché le mystère de notre salut ».

Regardons rapidement ce qui a conduit les Auteurs de l’Ancien Testament à présenter Dieu comme se mettant « en colère » devant le mal, pour ensuite « punir, châtier » celui qui l’a commis, et non seulement lui, mais encore ses descendants… Cette conception se retrouve jusques dans le cœur de la Loi de Moïse, « le Décalogue », « les Dix Paroles » :

Ex 20,5-6 : « Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux », les idoles, « et tu ne les serviras pas, car moi Yahvé, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux qui punis la faute des pères sur les enfants, les petits-enfants et les arrière-petits-enfants pour ceux qui me haïssent, mais qui fais grâce à des milliers pour ceux qui m’aiment et gardent mes commandements ».

Dans la traduction grecque de ce texte réalisé par la communauté juive d’Alexandrie vers le 3° siècle avant Jésus Christ, nous avons : « Tu ne te prosterneras pas devant eux et tu ne leur rendra pas un culte ; car moi, je suis le Seigneur ton Dieu, Dieu jaloux qui reporte les péchés des pères sur les enfants jusqu’à la troisième et la quatrième génération, pour ceux qui me haïssent, mais qui fait miséricorde sur des milliers, pour ceux qui m’aiment et pour ceux qui gardent mes prescriptions ».

Le poids de la miséricorde, « pour des milliers », apparaît déjà bien plus « lourd » que les « trois » ou « quatre générations » sur lesquelles le péché est « reporté »… Mais allez dire cela à ceux qui se croient punis par Dieu…

Remarquons simplement l’incohérence du texte : « faire miséricorde » suppose le pardon des fautes commises, la prise en compte de la faiblesse d’autrui, un regard de compréhension, de compassion… « Reporter le péché » sur les générations suivantes est une attitude contraire à celle de la miséricorde, d’autant plus qu’elle touche des personnes innocentes ! Le roi David s’insurgera face à une telle décision (2Sm 24,10-17). Comment Dieu peut-il donc se présenter comme un Dieu de Miséricorde, pour ensuite faire tout le contraire ?

De telles incohérences apparaissent ailleurs, par exemple :

Dt 32,39 : « Voyez maintenant que JE SUIS (cf. Ex 3,14) et qu’il n’est pas de Dieu excepté moi ! C’est moi qui fais mourir et qui fais vivre ; quand j’ai frappé, c’est moi qui guéris (et personne ne délivre de ma main) ».

Il frappe et il guérit ! Il vaudrait mieux ne pas frapper du tout…

Le pire est peut-être Dt 28,63, qui présente un Dieu qui prend plaisir à récompenser, mais qui prend aussi plaisir à punir ! Un Dieu sadique…

Dt 28,63 : « Autant Yahvé avait pris plaisir à vous rendre heureux et à vous multiplier, autant il prendra plaisir à vous perdre et à vous détruire. »

Nous le voyons à l’évidence, toutes ces paroles sont bien contraires à celles du Christ qui, lorsqu’il parle de son Père, le présente comme « Celui qui fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes » (Mt 5,45). Il nous faut donc apprendre à lire l’Ancien Testament comme St Luc, soit en laissant de côté ces passages « imparfaits et dépassés », soit en les réinterprétant… En effet, quand Jésus commence son ministère à Nazareth, St Luc met dans sa bouche un texte du prophète Isaïe, mais il s’arrête au milieu d’un verset…

« L’Esprit du Seigneur est sur moi », lit Jésus, « parce qu’il m’a consacré par l’onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur » (Lc 4,18-19 citant Is 61,1-2a)

Et le prophète Isaïe poursuit : « et un jour de vengeance pour notre Dieu » (Is 61,2b), ce que St Luc n’a pas cité. Il a bien compris en Jésus Christ que Dieu n’était pas un Dieu vengeur…

Gérard Von Rad (Théologie de l’Ancien Testament) a bien mis en lumière le lent cheminement de l’Ancien Testament vers la « vérité tout entière », Jésus Christ.

Dans les temps les plus anciens, les peuples voisins d’Israël, croyaient en ce que l’on appelle souvent « Le Principe de Rétribution selon les actes ». Cette croyance était totalement païenne, au sens où les dieux n’intervenaient pas. Elle est très certainement née de l’expérience, mais la vision du monde qu’elle transmet est non seulement simpliste, mais encore erronée. Selon cette conception :

1 – Lorsque quelqu’un commet le mal,

2 – il déclenche une puissance malfaisante

3 – qui, tôt ou tard, retombera sur lui et sur son entourage.

Israël va accueillir cette croyance et l’intégrer dans sa foi encore toute jeune. Lors de la sortie d’Egypte, racontée dans le Livre de l’Exode, ils ont vu le Seigneur à l’œuvre avec une grande Puissance, et ils en ont déduit que cette Puissance ne pouvait qu’être celle du Dieu Créateur, ce Dieu Tout Puissant qui a fait surgir l’univers du néant. Et ils se faisaient une idée si grande de cette Toute Puissance de Dieu qu’ils pensaient que rien ne pouvait lui échapper, pas même le mal :

Am 3,6 : « Sonne-t-on du cor dans une ville sans que le peuple soit effrayé ?

                       Arrive-t-il un malheur dans une ville sans que Yahvé en soit l’auteur ? »

Réponse : « Non ! », Dieu en est toujours l’auteur !

Lm 3,38 : « N’est-ce pas de la bouche du Très Haut

                                                           que sortent les maux et les biens ? »

Réponse : « Oui ! », tout vient de Dieu, le bien comme le mal, le bonheur comme le malheur…

            Ces conséquences mauvaises qui, soi disant, retombent sur le pécheur ne pouvaient donc venir que de Dieu. « Le Principe de Rétribution selon les actes » a donc conduit Israël à s’imaginer que Dieu était un Juge qui, du haut du ciel, récompensait les justes et punissait ceux qui font le mal :

1R 8,32 : « Toi, écoute au ciel et agis ; juge entre tes serviteurs :

déclare coupable le méchant en faisant retomber sa conduite sur sa tête,

et justifie l’innocent en lui rendant selon sa justice ».

Ez 7,3 : « C’est maintenant la fin pour toi ;

                        je vais lâcher ma colère contre toi pour te juger selon ta conduite

                        et te demander compte de toutes tes abominations. »

Ez 22,31 : « Alors j’ai déversé sur eux ma fureur ;

                        dans le feu de mon emportement, je les ai exterminés.

                        J’ai fait retomber leur conduite sur leur tête, oracle du Seigneur Yahvé. »

Insistons bien sur le fait que cette conception appliquée à Dieu est fausse…

Ses grandes étapes sont donc :

1 – Un homme commet le mal

2 – Dieu, du haut du ciel, voit et juge…

3 – Et il châtie en envoyant sur le pécheur et sur son entourage

toutes sortes de maux…

Déjà, dans l’Ancien Testament, beaucoup réagissaient en trouvant injuste que Dieu fasse retomber sur la tête des enfants la conduite de leurs parents. Aussi, certains prophètes commencèrent à annoncer que seuls ceux qui ont commis une faute recevront le châtiment qui lui correspond :

Jr 31,29-30 : « En ces jours-là on ne dira plus :

            Les pères ont mangé des raisins verts, et les dents des fils sont agacées.

Mais chacun mourra pour sa propre faute.

Tout homme qui aura mangé des raisins verts, ses propres dents seront agacées. »

Ez 18,1-3 : « La parole de Yahvé me fut adressée en ces termes :

Qu’avez-vous à répéter ce proverbe au pays d’Israël :

Les pères ont mangé des raisins verts, et les dents des fils ont été agacées ?

Par ma vie, oracle du Seigneur Yahvé,

            vous n’aurez plus à répéter ce proverbe en Israël. »

Ez 18,20 : « Celui qui a péché, c’est lui qui mourra !

            Un fils ne portera pas la faute de son père ni un père la faute de son fils :

                        au juste sera imputée sa justice et au méchant sa méchanceté. »

C’était déjà mieux, mais les croyances ont la vie dure : la question des disciples de Jésus cinq siècles plus tard le prouve ! Le Christ balaiera d’une phrase une telle conception de Dieu. Non, Dieu n’est pas un juge qui punit et nous fait du mal parce que nous-mêmes avons mal agi.

Jn 9,1-3 : « En passant, Jésus vit un homme aveugle de naissance.

            Ses disciples lui demandèrent : Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents,

                                                                                              pour qu’il soit né aveugle ?

            Jésus répondit : Ni lui ni ses parents n’ont péché,

                        mais c’est afin que soient manifestées en lui les œuvres de Dieu. »

Certes, Dieu est Juge en tant qu’il nous invite à faire la vérité dans notre vie. Cette première étape est identique à celle de la justice humaine. Mais si cette dernière condamne en cas de culpabilité, Dieu, Lui, pardonne et libère. La vérité est inséparable chez Lui de son Amour et de son infinie Miséricorde. Lorsque Dieu veut nous faire prendre conscience de notre péché, il nous révèle toujours en même temps son Amour :

Is 1,2-4 : « Cieux écoutez, terre prête l’oreille, car le Seigneur parle.

J’ai élevé des enfants, je les ai fait grandir,

mais ils se sont révoltés contre moi.

Le bœuf connaît son possesseur, et l’âne la crèche de son maître,

Israël ne connaît pas, mon peuple ne comprend pas.

Malheur ! nation pécheresse ! peuple coupable !

race de malfaiteurs, fils pervertis !

Ils ont abandonné le Seigneur, ils ont méprisé le Saint d’Israël,

ils se sont détournés de lui. »

 

Is 1,15-18 : « Quand vous étendez les mains, je détourne les yeux ;

vous avez beau multiplier les prières, moi je n’écoute pas.

Vos mains sont pleines de sang : lavez-vous, purifiez-vous !

Otez de ma vue vos actions perverses !

Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien !

Recherchez le droit, redressez le violent !

Faites droit à l’orphelin, plaidez pour la veuve !

Allons! Discutons! dit le Seigneur.

Quand vos péchés seraient comme l’écarlate, comme neige ils blanchiront ;

quand ils seraient rouges comme la pourpre, comme laine ils deviendront. »

Le Psalmiste commence donc par regarder la Miséricorde de Dieu, puis, à cette Lumière, il regarde son péché :

Ps 51,1-2 : « Pitié pour moi, Dieu, dans ton amour,

            Selon ta grande miséricorde, efface mon péché,

            Lave-moi tout entier de ma faute,

            Purifie-moi de mon offense ».

Jésus dira de même :

Jn 3,21 : « Celui qui fait la vérité vient à la Lumière »…

Or, « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) et il est aussi « Amour » (1Jn 4,8.16). Cette Lumière est donc celle de l’Amour qui veut notre bien plus que nous-mêmes et qui fait tout son possible pour nous libérer de tout ce qui sème du malheur dans notre vie, ce que nous appelons « le péché »… Mais pour qu’il puisse « enlever ce péché », il faut librement que nous acceptions de le lui donner. Et avant de le donner, il faudra bien le reconnaître… Ainsi est Dieu qui ne fait rien pour nous sans nous, dans le respect infini qu’il a de notre liberté… Alors, ce n’est que petit à petit qu’il va nous montrer ce qui ne va pas dans notre vie pour que nous puissions aller à lui sans peur et lui offrir toutes nos misères. Voilà ce qu’Il attend. Et il enlèvera bien vite tout ce qui nous empêche d’être pleinement en relation avec lui et avec nos frères…

Ps 103(102),11-12 : « Comme est la hauteur des cieux sur la terre,

            puissant est son amour pour qui le craint ;

            comme est loin l’orient de l’occident, il éloigne de nous nos péchés. »

Puis, il nous purifiera et il nous rétablira par le don de son Esprit dans cette Communion avec Lui pour laquelle il nous a créés !

Ez 36,24-28 : « Je vous prendrai parmi les nations,

            je vous rassemblerai de tous les pays étrangers

            et je vous ramènerai vers votre sol.

Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés ;

de toutes vos souillures et de toutes vos ordures je vous purifierai.

Et je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau,

j’ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair.

Je mettrai mon Esprit en vous

et je ferai que vous marchiez selon mes lois et que vous observiez

            et pratiquiez mes coutumes.

Vous habiterez le pays que j’ai donné à vos pères.

Vous serez mon peuple et moi je serai votre Dieu. »

Et c’est « là », « dans l’Esprit » (Ep 5,18), que nous trouverons la Plénitude du bonheur, de la vie et de la joie.

Ainsi, nous le voyons, cette conception d’un Dieu qui se met en colère, tape, frappe et punit le pécheur est né d’une foi encore balbutiante en Dieu influencée par les conceptions de l’époque face au bien ou au mal… Non, les réactions de Dieu face au mal ne sont pas celles des hommes, et surtout pas des hommes pécheurs…

Os 11,7-9 : « Mon peuple est cramponné à son infidélité.

On les appelle en haut, pas un qui se relève !

Comment t’abandonnerais-je, Éphraïm, te livrerais-je, Israël ?

Mon cœur en moi est bouleversé, toutes mes entrailles frémissent.

Je ne donnerai pas cours à l’ardeur de ma colère,

je ne détruirai pas Éphraïm

car je suis Dieu et non pas homme,

au milieu de toi je suis le Saint,

et je ne viendrai pas avec fureur. »

Dieu ne répond jamais au mal par le mal… Bien au contraire : il comblera de ses bienfaits celui qui fait le mal pour l’inviter, petit à petit, à cesser de faire ce mal qui le détruit et blesse tous ceux et celles qui l’entourent…

Ainsi, le mal détruit celui qui le commet… Telle est l’interprétation qu’il nous faut donner à tous ces textes de l’Ancien Testament qui nous montrent un Dieu qui tape, qui frappe ou qui punit… Derrière le thème de « la colère de Dieu » se cache en fait celui des « conséquences du péché des hommes ». Non, ce n’est pas lui qui fait venir tous ces malheurs, mais les hommes eux-mêmes dès lors qu’ils vivent dans l’injustice… Et c’est justement pour éviter toutes ces guerres, ces destructions, ces violences que Dieu va envoyer ses prophètes pour inviter les sociétés où ils vivaient à retrouver ses chemins de vérité, de justice, de droiture, et d’amour… Car une société qui ne vit pas ces valeurs ne peut que s’auto-détruire… L’Histoire ne cesse de nous donner des exemples de ces empires qui n’ont laissé derrière eux qu’un champ de ruines…

Jr 2,17.19 : « N’as-tu pas provoqué cela pour avoir abandonné le Seigneur ton Dieu,

            alors qu’il te guidait sur ta route ?

Que ta méchanceté te châtie et que tes infidélités te punissent !

Comprends et vois

            comme il est mauvais et amer d’abandonner le Seigneur ton Dieu »…

Alors, « cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien »… Et c’est pour cela que le Père enverra son Fils dans le monde, « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde », non pas pour le condamner, mais pour le sauver, pour l’arracher à tout ce qui en fait le détruit… Et c’est pour cela que « là où le péché a abondé, la grâce a surabondé », car c’est justement pas sa grâce que Dieu nous arrache à tous nos bourbiers… Et découvrir cette grâce de Miséricorde est le plus grand bonheur que nous pouvons nous souhaiter les uns aux autres…

« Tu mets dans mon cœur plus de joie,   

            que toutes leurs vendanges et leur moisson »…

Et Dieu sait si certaines vendanges sont bonnes !

D. Jacques Fournier

 

[1] Jn 3,34 (Bible de Jérusalem) : « Celui que Dieu a envoyé prononce les paroles de Dieu, car il ne mesure pas le don de l’Esprit ».

Correction de la Fiche N°8

CV – 8 – Jn 3,22-36 correction




Fiche n°9 : Le don de l’Eau Vive par Jésus Christ, le Sauveur du Monde (Jn 4)

La volonté de Dieu sur les hommes est qu’ils accomplissent pleinement leur vocation d’enfants de Dieu par la foi en son Fils envoyé dans le monde (Jn 1,12) : qu’ils vivent de sa Vie, qu’ils partagent avec Lui la Plénitude de son Esprit, qu’ils entrent dans sa Lumière et dans sa Joie. Pour atteindre ce but, le Christ va leur proposer de « naître de nouveau de l’eau et de l’Esprit » (Jn 3) par le sacrement du baptême (Mt 28,18-20). En Jn 1,33, St Jean avait déjà fait allusion à ce baptême apporté par Jésus: « C’est lui qui baptise dans l’Esprit Saint ». Souvenons-nous de la note de la Bible de Jérusalem pour ce verset : « Cette expression définit l’œuvre essentielle du Messie, annoncée dès l’Ancien Testament : régénérer l’humanité dans l’Esprit Saint. Parce que l’Esprit repose sur lui », cet Esprit qu’il reçoit lui-même de son Père, « le Messie pourra le donner aux hommes »…  Puis, en Jn 3,22-26, St Jean avait de nouveau évoqué ce baptême proposé par Jésus : « Après cela, Jésus vint avec ses disciples au pays de Judée et il séjourna avec eux, et il baptisait… (Ainsi), le voilà qui baptise et tous viennent à lui ». Et au tout début de notre texte, St Jean évoque à nouveau ce baptême de Jésus (Jn 4,1-2). Tout tourne donc ici autour du baptême, du don de Dieu (« l’eau vive », symbole de l’Esprit Saint (Jn 7,37-39)) et de sa conséquence la plus importante, la relation avec Dieu « en Esprit et en vérité » (Jn 4,24).

Jésus parle ici avec une Samaritaine, un nom qui vient de « Samarie », l’ancienne capitale du Royaume du Nord fondée par le Roi Omri (886-875 av. JC). A la mort de Salomon (931 av JC), le Royaume d’Israël s’était en effet divisé en deux : le Royaume du Nord (appelé parfois « Israël ») et le Royaume du Sud (« Juda », capitale Jérusalem). En 722 av JC, les Assyriens s’emparent du Royaume du Nord et s’y installent. Depuis lors les Juifs du Sud voient d’un mauvais oeil ce peuple à moitié païen. Ils refusent leur aide pour reconstruire le Temple de Jérusalem après sa destruction par Nabuchodonosor, roi de Babylone, en 587 av JC. Les Samaritains construiront alors le leur sur le mont Garizim. Mais en 129 av C, il sera détruit par le Juif Jean Hyrcan. A partir de cet instant, la rupture est totale…

 

Introduction

« Jésus quitte la Judée et s’en retourne en Galilée ». Se référer à une des cartes situées à la fin de nos Bibles. Repérer la Galilée au nord, la Judée au sud, et la Samarie au milieu. Constater que pour aller de la Judée à la Galilée, il était possible de prendre un bateau et de passer par la mer, ou de longer par la rive Est le Jourdain en passant par la Pérée et la Décapole. Pourtant, St Jean écrit de Jésus qu’il « lui fallait traverser la Samarie » ? D’après ce que nous venons de voir avec une carte, est-ce bien exact ? Que se cache-t-il derrière ce « il faut » ? Pour répondre à cette question, lire dans un premier temps Jn 4,34 ; 5,30 ; 6,38 ; 9,4 ; 10,16 ; 12,34 ; 13,18 ; 14,31 ; voir aussi Lc 17,25 ; 22,37 ; 24,7.44 ? Préciser quelle est « la volonté du Père » avec Jn 3,16-17 ; 6,37-40 ; 1Tm 2,3-7) (•) ? Que ne cessera alors de faire Jésus (cf. Lc 4,42-44) ? Et que feront ensuite ses disciples (Marc 16,15‑18) ? Avec eux et par eux, qui continuera « d’aller vers » les hommes pour leur offrir le Salut (Mt 28,18-20 ; 2Co 2,14-16 ; 5,20 ; Actes 14,27 ; 15,4) ? Quelle sera donc, jusqu’à la fin des temps, la mission première de l’Eglise ?

Jésus a tout d’abord commencé par se tourner vers le seul peuple d’Israël (Mt 15,24). Il voulait en effet l’appeler au repentir pour qu’il redevienne ce que Dieu avait toujours voulu qu’il soit : un Peuple comblé de sa bénédiction pour devenir ensuite un Serviteur de cette bénédiction, afin que toutes les familles de la terre en soient à leur tour comblées. Telle est la vocation qu’il avait donnée à Abraham et à ses descendants au jour où il l’avait appelé : « Yahvé dit à Abram : Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, pour le pays que je t’indiquerai. Je ferai de toi un grand peuple, je te bénirai, je magnifierai ton nom ; sois une bénédiction ! Je bénirai ceux qui te béniront, je réprouverai ceux qui te maudiront. Par toi se béniront toutes les familles de la terre. » Abram partit, comme lui avait dit Yahvé » (Gn 12,1-4)…

Or, à l’époque de Jésus, écrit Gerhard Lohfink (« L’Eglise que voulait Jésus »), le système des Douze tribus d’Israël avait depuis longtemps cessé d’exister. « Les contemporains considéraient qu’il n’y avait plus que deux tribus et demie : Juda, Benjamin et la moitié de Lévi. On espérait que le temps du salut provoquerait le rétablissement définitif de toutes. Déjà la fin du livre d’Ezéchiel, sous forme de programme prophétique, montrait comment, lors de la fin des temps, les douze tribus retrouveraient leur portion de territoire (Ez 37 ; 39,23-29 ; 40-48). Sur fond de cette espérance toujours très vivante, on ne peut désormais comprendre l’institution des douze apôtres par Jésus que comme un signe prophétique : les Douze montrent que Jésus inaugure le réveil et le rassemblement du peuple saint », pour lui redonner ensuite sa mission première : aller dans le monde entier pour annoncer à tous les hommes que Dieu ne cesse de les bénir en leur donnant son Esprit de Vie, de Lumière et de Paix… Les Samaritains étaient les lointains héritiers du Royaume du Nord. Les réconcilier avec ceux du Sud allait donc dans le sens de ce rétablissement d’Israël tout entier (cf. Is 11,12 ; Os 2,2 ; Jr 3,18 ; Ez 37,15-28). Puis Israël rassemblé devait ensuite travailler, avec les païens qui auraient accueilli cette Bonne Nouvelle, au rassemblement de l’humanité tout entière, cette immense famille d’enfants de Dieu que le Père invite à la table de son Royaume (cf. Jn 11,51-52 ; Ep 1,9-10) ? Telle est aujourd’hui la mission de l’Eglise. Au départ, elle n’était constituée que de fils d’Israël. Puis, des païens accueillirent l’Evangile qu’ils proclamaient et se joignirent à eux. Le résultat est l’Eglise que nous connaissons actuellement. Et les Israélites qui n’ont pas reconnu en Jésus Christ le Messie annoncé par les Ecritures, demeurent nos frères aînés dans la foi, des frères très chers vis-à-vis desquels nous ne pouvons qu’avoir de la reconnaissance… Avec Marie, le Christ est né de leur communauté, tout comme Pierre, Marc, Matthieu, Paul etc… C’est donc grâce à eux que nous avons pu découvrir aujourd’hui en Jésus Christ un trésor de Miséricorde et de Vie (2Co 4,5-7)… Et régulièrement, nous lisons avec eux les mêmes Ecritures, l’Ancien Testament…

Jacob, le fils d’Isaac (Gn 25,26), lui-même fils d’Abraham (Gn 17,19.21 ; 21,3), était une figure importante pour les Samaritains : d’après eux, c’est sur le mont Garizim que Dieu lui était apparu en songe (Gn 28,10-22). C’est là aussi, pensaient-ils, que reposait la bénédiction de Dieu sur Israël (Dt 11,29 ; 27,12). Voilà pourquoi ils choisirent cette « montagne » comme lieu d’adoration (Jn 4,20).

Le don de l’Eau Vive (Jn 4,7-15)

Notons tout d’abord comment St Jean nous présente Jésus au v. 6 ? « C’était environ la sixième heure ». D’après les notes de nos Bibles, quelle heure est-il en fait ? Toutes ces circonstances conditionneront la première parole de Jésus à la Samaritaine…

Entre Jésus et la Samaritaine, qui engage le dialogue en premier ? Quand il lui dit « Donne-moi à boire », comment se présente-t-il : comme un riche venu pour donner ou un pauvre qui a besoin de recevoir ? Et pourtant, que se passera-t-il par la suite d’après St Paul (cf. 2Co 8,9) ?

Mais en agissant ainsi, Jésus transgresse deux règles importantes de l’époque. Les retrouver avec Jn 4,9 et Jn 4,27. Voilà bien une attitude caractéristique de Jésus, laquelle d’après Ep 2,14-16 (les « deux peuples » sont : les Juifs et les païens) ?

Dans l’Evangile selon St Jean, le thème de la soif renvoie au désir profond qui habite une personne. Ainsi, sur la Croix, Jésus dit « J’ai soif » (Jn 19,28-30) pour que l’Ecriture soit parfaitement accomplie, et de fait les soldats lui donneront du vinaigre, comme le prédisait le Ps 69(68),22. Or les Ecritures révèlent la volonté de Dieu qui est le salut de tous les hommes (cf. (•)). Ainsi, Jésus avait soif de « faire la volonté de Celui qui l’a envoyé » (Jn 4,34), c’est-à-dire d’accomplir le salut du monde par son offrande sur la Croix… Derrière la question de Jésus à la Samaritaine en Jn 4,7, de quoi Jésus a‑t‑il en fait « soif » (cf. Jn 10,10 ; 3,17) ? Le verra-t-on d’ailleurs boire ou manger en ce chapitre 4 (cf. Jn 4,31-34) ? Et dès la première moitié de Jn 4,10, Jésus éveillera la curiosité de la Samaritaine sur deux points essentiels, lesquels ((a) et (b)) ?

Le deuxième (b) sera ici l’occasion de tout un cheminement ; en noter toutes les étapes en relevant en Jn 4 tous les titres et expressions qui disent quelque chose du Mystère de Jésus. Quelle progression constatez-vous ? Noter l’universalité de la perspective avec le v. 42.

Le premier (a ; cf Ac 8,20) sera précisé par une image dès la fin du verset 10, laquelle ? Quelle est d’après Jn 7,37-39 la réalité évoquée (cf. Ac 2,38 et 10,45) ? D’où vient-elle (cf. Jn 15,26) et par qui nous rejoint-elle (Ac 2,32-33) ? Pour recevoir ce don promis, que suffit-il de faire d’après Jn 4,10 (cf. Lc 11,9-13) ? Or qui est Dieu de son côté (cf. Jr 2,13 ; 17,13 ; image différente mais semblable au niveau du sens au Ps 84(83),12) ? Conclusion : est-il possible que celui qui demande de tout son cœur ne soit pas exaucé ? Et de même, celui qui demanderait la Lumière, pourrait-il d’après le Ps 84(83),12 ne pas être exaucé ? Et recevra-t-il cette Lumière parce qu’il a bien prié ? « Il suffit de demander », comme disait Ste Thérèse de Lisieux, notre demande n’étant que l’expression de notre liberté qui consent à recevoir ce que Dieu veut nous donner… Remarquons en passant qu’avec le parallèle entre Jn 4,24 et 1Jn 1,5, demander la Lumière, c’est demander l’Esprit Saint… Quels seront les effets de ce don de Dieu au cœur de l’homme qui accepte de l’accueillir (cf. Jn 4,13-14 ; 6,63 ; Ga 5,25) ? Mais pour le recevoir, il sera invité à se tourner sans cesse vers le Donateur en se détournant de tout ce qui pourrait s’opposer à cette démarche ; comment appelle-t-on dans le Nouveau Testament une telle attitude (Mc 1,15 ; début d’Ac 2,37-38. Et d’après Ac 3,26 (TOB), Ac 5,31 et Ac 11,18, cette attitude même est un don de Dieu ! Elle est le fruit de Jn 12,32, Jn 6,44 et Jn 6,65 et 17,6…

Souvenons-nous : comment Jésus a-t-il entamé la conversation avec la Samaritaine ? Et que lui demande-t-elle maintenant en Jn 4,15 ? Même si sa demande est encore imparfaite, Jésus a-t-il atteint son but ?

Adorer Dieu en Esprit et en vérité (Jn 4,16-24)

 Jésus reprend à nouveau l’initiative. En posant sa question au v. 16, qu’attend-il avant tout de la Samaritaine (cf. Jn 3,21)? A-t-elle répondu à son attente ? Une note de la Bible de Jérusalem permet d’éclairer la réponse de Jésus en 4,17‑18 : « Les Juifs expliquaient l’origine des Samaritains (2 R 17,24-41), par l’immigration forcée de cinq peuplades païennes, restées en partie fidèles à leurs dieux, que symbolisent les “ cinq maris ” ». Or 2R 17,33 affirme « qu’ ils révéraient le Seigneur et servaient leurs dieux, selon le rite des nations d’où ils avaient été déportés ». D’après la déclaration de Jésus en Jn 4,18 et 4,22, que vaut un tel culte de Dieu mêlé d’éléments idolâtriques ?

Quelle est la notion (nom et verbe) qui revient le plus souvent en Jn 4,20-24 ? La Samaritaine nomme-t-elle Celui qui est objet d’adoration ? Et Jésus ? Que retrouve-t-on indirectement (cf. Jn 1,18 ; le début de Jn 17,6 ; Jn 17,26) ? Comment se vivra l’adoration véritable ? Est-elle déjà pour l’aujourd’hui de notre foi ? Qui est le premier à la désirer ? Qui sera donc le premier à la mettre en œuvre et par qui agira-t-il (Jn 14,15‑17 ; Rm 8,26-27) ? Son travail sera de nous communiquer « le bien » de Jésus, « ce qui est à » Jésus (Jn 16,14). Or, « le bien » suprême de Jésus, c’est son Être, sa Vie de Fils qu’il tient de son Père (Jn 5,26), la Plénitude divine de l’Esprit qu’il reçoit du Père de toute éternité et qui fait qu’il est ce qu’il est : « Il est Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu ». Cette « Plénitude divine de l’Esprit » peut encore évoquer par l’expression « nature divine », car « Dieu est Esprit » (Jn 4,24). Et d’après 2P 1,4, c’est justement ce que le Père veut que nous recevions par notre foi en son Fils qu’il a envoyé dans le monde. Et ce sera tout le travail de l’Esprit Saint Troisième Personne de la Trinité de nous communiquer « l’Esprit Saint nature divine », cette Eau Vive qui sera en nous Source de Vie éternelle, Plénitude d’Être et de Vie. En acceptant de recevoir cet Esprit nous entrerons alors dans un Mystère de Communion et de Vie avec Dieu et avec tous ceux qui auront vécu la même démarche de foi (1Co 1,9 ; 2Co 13,13 ; Ph 2,1 ; 1Jn 1,3 ; Ep 2,18 ). Tel est le Mystère de l’Eglise…

Jésus est le Messie, vrai homme et vrai Dieu (Jn 4,25-26)

La Samaritaine, face à Jésus, se pose la question du Messie… Quel est, d’après Jn 4,25 sa mission principale (cf. Lc 4,15.31.43 ; 5,3 ; 6,6 ; 13,10 ; 20,1) ? Qui permet à cette mission d’atteindre son but (cf. 1Co 2,3-5 et 9-12 ; 1Th 1,4-7 ; Jn 14,26 ; 16,12-15 ; 15,26 ; 1Jn 2,27 ; 4,13) ? Nos Bibles traduisent souvent la réponse de Jésus en fonction du contexte : « Je le suis, moi qui te parle », sous entendu « le Messie, celui qu’on appelle Christ » (Bible de Jérusalem ; TOB ; se souvenir que « Messie » et « Christ » viennent tous les deux du verbe « oindre », en hébreu pour le premier, en grec pour le second). Mais St Jean fait ici, et pour la première fois dans son Evangile, une allusion au Nom divin révélé à Moïse dans l’épisode du Buisson Ardent (Ex 3,14-15) : « Je suis celui qui est » (Bible de Jérusalem), « JE SUIS QUI JE SERAI » (TOB). La traduction grecque de la Septante a : Egô eimi o ôn (litt. : « Je Suis l’Etant »). Et Jésus dit à la Samaritaine : Egô eimi o lalôn soi » (litt. : « Je Suis le Parlant à toi »). Remarquer la similitude des deux expressions. La première emploie le participe présent du verbe « être », la seconde le participe présent du verbe « parler ». Ainsi, en Jésus Christ « l’Êtant » s’est fait pour nous « le Parlant ». Il est vraiment « le Verbe fait chair » (Jn 1,14), la Parole faite chair. Avec Lui et par Lui Dieu Lui-même est venu nous rejoindre et nous parler avec une bouche de chair…Ainsi, cette si belle réponse de Jésus à la Samaritaine nous le présente, dans le contexte immédiat des termes employés par la Samaritaine, comme étant « le Messie » promis par les Ecritures, « le Christ ». Mais l’expression employée nous invite à aller plus loin : il est Dieu Lui-même en la Personne du Fils venu nous transmettre les Paroles qu’il a reçues de son Père (cf. Jn 8,28 ; 12,50 ; 17,7‑8)… Le premier verset de l’Evangile de Marc résume lui aussi de manière semblable le Mystère de Jésus : « Commencement de l’Evangile de Jésus Christ, Fils de Dieu »…

La Samaritaine devient missionnaire par son témoignage (Jn 4,27-42)

La Samaritaine abandonne sa cruche : quelle est maintenant sa priorité, l’eau du puits ou l’Eau Vive donnée par le Christ ? Puis elle court à la ville, et là, que fera-t-elle (cf. Jn 4,29 ; 15,27 ; 19,35) ? Elle devient missionnaire de la Joie qu’elle a elle-même expérimentée…

Jésus demeurera deux jours chez les Samaritains. Parfois, dans les Evangiles, nous lisons que « beaucoup crurent en lui à cause des nombreux miracles qu’il faisait » ? Est‑ce le cas ici ? Qu’est-ce qui a « emporté » leur foi (cf. Jn 4,41)? Et qui est Celui qui, discrètement mais avec puissance, a agi en leur cœur pour les inviter à cette adhésion, à cette confiance (cf. 1Co 12,3 ; 1Th 1,4-7) ? Nous avons vu que la mission première du Christ est d’enseigner, de transmettre à tous les hommes cette Parole de Vie qu’il a reçue de son Père. Nous avons vu également que la mission première de l’Eglise est de marcher sur les traces du Christ pour accomplir avec Lui et par Lui la même œuvre. Aussi, quand nous annonçons aujourd’hui la Parole, d’une manière ou d’une autre, sur quoi devons-nous compter nous aussi avec confiance pour que cette Parole puisse porter du fruit ?

Noter la perspective universelle de Jn 4,42 (cf. Jn 1,4-5.9 ; 1,29 ; 3,16 ; 11,52 ; 17,2 à la lumière de Gn 9,8-17 ; 1Jn 2,2). Et le Catéchisme de l’Eglise Catholique déclare : « Si le Baptême est nécessaire au salut pour ceux auxquels l’Évangile a été annoncé et qui ont eu la possibilité de demander ce sacrement (cf. Mc 16, 16),  » Puisque le Christ est mort pour tous, et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associé(s) au mystère pascal « . Tout homme qui, ignorant l’Évangile du Christ et son Église, cherche la vérité et fait la volonté de Dieu selon qu’il la connaît, peut être sauvé » (& 1257 et 1260).

La guérison du fils du fonctionnaire royal (Jn 4,46-54)

Jn 4,46-54 complète le panorama commencé en Jn 3. Avec Nicodème et Jean‑Baptiste, Jésus s’était d’abord adressé au Peuple d’Israël. Puis il a poursuivi son œuvre de Révélation et de Salut avec la Samaritaine, qui représente le peuple le plus proche de celui d’Israël. Enfin, il s’adresse ici, à travers ce fonctionnaire royal, aux païens appelés eux aussi à partager la Plénitude de Dieu grâce au pardon des péchés que le Christ est venu nous offrir. Nous retrouvons ainsi le plan missionnaire esquissé dans la Parole du Christ Ressuscité à ses disciples en Ac 1,8 : « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ».

Un fonctionnaire royal a donc un fils malade, et il vient trouver Jésus pour le prier de « descendre guérir son fils, car il allait mourir ». Retrouver ce verbe « descendre » en Jn 3,13 ; 6,32-35 ; 6,50-51 ; 6,58. A la lumière de tous ces textes, « qui » descend ? « D’où » descend-il et pourquoi ? La guérison de ce fils malade en sera le signe visible…

Mais en Jn 4,48, de quoi Jésus semble-t-il se désoler ? En effet, quel est le but premier qu’il poursuit avec tous ceux et celles qu’il rencontre (cf. Jn 11,42) ? Et ce but a lui-même un « but » : lequel (cf. Jn 20,30-31) ? Jésus ne fait donc pas des miracles pour faire des miracles… Il n’est pas venu enlever toutes nos difficultés d’un coup de baguette magique, et il sait que la foi qui ne recherche que le merveilleux est encore superficielle et fragile (cf. Jn 2,23-25). Lui est venu nous introduire dans le Mystère de sa Vie, pour que nous vivions unis à Lui dans un Mystère de Communion dont le fondement est l’Esprit de Force et de Paix… Alors, si tel est bien le cas, la maison de notre vie sera construite sur le Roc et rien ni personne ne pourra la démolir (cf. Mt 7,24-27).

Cette guérison du fils du fonctionnaire est l’exemple type d’un signe il est la rencontre de deux évènements apparemment indépendants, mais qui apparaissent en fait invisiblement liés par le Christ et son œuvre :

1 – A la prière de ce fonctionnaire, « Seigneur, descends avant que ne meure mon petit enfant », Jésus répond : « Va, ton fils vit ». L’homme accueille cette Parole avec foi. Il quitte Jésus et se met en route pour rentrer chez lui…

2 – Alors qu’il est encore en chemin, ses serviteurs viennent à sa rencontre. Ils ne savent pas qu’il a demandé à Jésus la guérison de son enfant… Ils lui disent qu’il est vivant… Bien noter l’expression : Jésus est venu pour que nous soyons tous comme lui : des « vivants » de sa Vie qu’il reçoit lui-même de son Père. « Il s’informa auprès d’eux de l’heure à laquelle il s’était trouvé mieux. « C’était hier à la septième heure que la fièvre l’a quitté » », à l’instant même où Jésus lui avait dit : « Ton fils vit ».

Pourtant, ces deux évènements sont matériellement indépendants… Mais non, un lien spirituel invisible, mystérieux, les unit : « Dieu Esprit » qui a entendu la prière de ce père et guérit son fils qui était au loin… Le père croit et raconte ce qu’il a vécu : son témoignage est missionnaire et toute sa maison croit avec lui (Jn 4,53 ; Ac 16,33)…

Un signe est souvent la rencontre de deux évènements apparemment indépendants, le deuxième correspondant pourtant parfaitement aux circonstances ou à l’attente exprimées dans le premier… Et Jésus continue d’agir ainsi tous les jours pour chacun d’entre nous. Mais seul un regard de foi, dans la lumière de l’Esprit Saint, peut le reconnaître… « Heureux sommes-nous » si tel est le cas, nous dit Jésus, car lui ne cherche, ne désire, ne poursuit que la Plénitude de notre vie…

Mt 13,16-17 : « Quant à vous, heureux vos yeux parce qu’ils voient ; heureuses vos oreilles parce qu’elles entendent. En vérité je vous le dis, beaucoup de prophètes et de justes ont souhaité voir ce que vous voyez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu ! »

                                                                                                                              D. Jacques Fournier

Correction de la fiche N°9

CV – 9 – Jn 4 correction




Fiche n°10 : L’œuvre du Fils : « juger-sauver », ressusciter (Jn 5).

Le chapitre 5 de l’Evangile selon St Jean comprend deux grandes parties : un signe et un discours, qui s’éclairent mutuellement.

La guérison d’un infirme à la piscine de Béthesda (Jn 5,1-18)

Des fouilles récentes ont mis au jour, au nord-est de Jérusalem, une piscine trapézoïdale constituée de deux grands bassins profonds de 14 mètres séparés par une digue large de 6,50 m. Le bassin sud, le plus grand, faisait 55 m sur 48. L’autre mesurait environ 40 m sur 50. Des colonnades entouraient l’ensemble ; la digue en était aussi pourvue, d’où peut-être la mention des « cinq portiques » dans notre texte. On a également découvert, près de ces bassins, des petits bains qui faisaient partie d’une installation cultuelle dédiée au dieu guérisseur égyptien Sérapis. Comment les scribes et les Pharisiens devaient-ils considérer cet endroit consacré à une idole ? Y seraient-ils entrés (cf. ­­situation semblable en Jn 18,28) ? De plus, la maladie était perçue à l’époque comme la conséquence du péché (cf. Jn 9,1-2), et le péché comme la source de toute impureté. Comment les scribes et les Pharisiens regardaient-ils ces « infirmes, aveugles, boiteux, impotents » ? Seraient-ils allés vers eux ? Et pourtant, où Jésus est-il ici et que fait‑il (cf. Mc 1,41 ; 2,15-17…) ? Quelles leçons pouvons-nous tirer de son attitude ?

Que représente d’ailleurs pour St Jean « cette multitude d’infirmes, aveugles, boiteux, impotents » (se souvenir que le chiffre 4 est symbole d’universalité (les quatre points cardinaux)) ? Et que fait Jésus vis-à-vis d’elle (Luc 15,4-7 ; Jean 3,16-17) ? Quelle situation tragique a-t-il tout de suite remarquée (cf. Jn 5,5-7) ? De plus, la croyance de cet homme exposée en 5,7 était-elle juste ? Jésus lui fait-il par la suite des reproches à ce sujet ? Dit-on d’ailleurs que cet homme a « foi en Jésus » ? Dans sa croyance, qu’espère-t-il de lui ?

Pourtant, il arrivera ce qu’il n’aurait peut-être jamais osé demander ou même imaginer… Quel est en effet le désir profond qui l’habite ? Et Jésus l’abordera en disant : « j Veux-tu k devenir l bien portant (sain) ? »

C’est toujours Jésus qui a l’initiative. Tout vient de lui, lui qui « veut » déjà notre bien le plus profond (cf. 1Tm 2,4 avec Mt 18,14 ; Jn 17,24 ; Dt 30,19 ; Ez 18,23 ; 33,11). Mais que suggère ce « veux-tu » (cf. Mc 10,51 ; Mt 19,17.21; Ga 5,13 ; 1P2,16 ; Lc 15,18) ? Que représente ici cet « infirme » couché sur son « grabat » (cf. Rm 3,9 ; 6,23) ? Dans le grec des Evangiles, le verbe traduit par « se lever » est le même employé pour décrire la résurrection du Christ ; que suggère-t-il ici ? Si le grabat peut symboliser le péché et le fait d’être couché dessus ses conséquences, avant l’intervention du Christ qui portait qui, et donc qui dominait sur qui ? Et après l’intervention du Christ, qu’en est-il (cf. 1Co 10,13)[1] ?

Jésus dit à tous ses disciples : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix et me suive » (Mc 8,34). Que signifie notamment, d’après ce que nous venons de voir, « se renier soi-même » et « prendre sa croix » ? Sommes-nous seuls pour porter notre fardeau (cf. Mt 8,17 ; 11,28-30 ; 2Co 12,9) ? Tout malade ne peut qu’espérer bien sûr une guérison totale. Mais n’oublions jamais que la maladie représente ici celle du péché, cette blessure intérieure qui nous habite tous, d’une manière ou d’une autre. Or Jésus ne dit pas ici « Veux-tu être bien portant ? », mais « Veux-tu devenir bien portant ? » Quelle nuance apporte l’utilisation par Jésus de ce verbe « devenir » ? Sa guérison physique, qu’il expérimente très concrètement en son corps, est-elle alors un point d’arrivée ou un point de départ ? Retrouver la réponse avec le troisième verbe employé par Jésus en Jn 5,8. Dans quel processus sommes-nous engagés (Ep 4,15 ; Ph 1,9-11 ; 3,12-16 ; 1Th 3,12 ; 2P 3,18) ?

 Enfin, n’oublions pas que dans la Bible, l’homme est « un ». Il n’a pas un corps, il est corps ; il n’a pas une âme, il est âme ; il n’a pas un esprit, il est esprit. L’homme ici a retrouvé la santé en son corps. Mais ce résultat visible de l’action de Dieu manifeste une transformation qui l’a atteint dans son être tout entier : corps, âme et esprit (cf. 1Th 5,23).

De plus, Jésus a accompli cette guérison sans utiliser l’eau de ce temple dédié à Sérapis, le dieu guérisseur. Dans un tel contexte, comment se présente-t-il indirectement ((a) Lc 5,31-32 ; (b) Jn 4,42 ; 1Jn 4,14 ; Lc 2,11 ; sans jamais oublier Jude 1,25 et Ac 5,31 ; 13,23 et donc Lc 1,47 ; 1Tm 2,3-4 ; 4,10 ; conclusion avec Tt 3,4-7) ?

Jésus agira par sa seule Parole ; que nous suggère cette manière de faire (cf. Gn 1,1-25 avec Jn 5,19-20) ? Quel but poursuit-il (2Co 5,17-21 ; Jn 17,24 ; Jn 14,1-4) ? De quoi cette guérison sera-t-elle donc le signe ? Et de fait, où Jésus retrouvera-t-il par la suite cet homme guéri (cf. Jn 5,14 ; se souvenir aussi de l’expression employée au début de Jn 14,2, lue avec Jn 20,17) ?

Cet infirme guéri a-t-il vraiment compris au moment de sa guérison qui est Jésus et le don incroyable qu’il vient de recevoir (cf. Jn 5,13) ? Les mariés des Noces de Cana avaient-ils eux aussi demandé quelque chose à Jésus, le connaissaient-ils, croyaient-ils en Lui, ont-ils pris conscience de tout ce qu’ils ont reçu (cf. Jn 2,1-12) ? La veuve de Naïn (Lc 7,11-17) et l’aveugle-né (Jean 9,1-7) connaissaient-ils eux aussi Jésus, avait-ils foi en Lui, lui ont-ils demandé quelque chose ? Et pourtant, que fera Jésus pour eux ? A partir de tous ces exemples, quelles conclusions pouvons-nous tirer sur Jésus, sa Présence auprès des hommes, son action à leur égard ? Ceci est-il toujours valable dans l’aujourd’hui de notre histoire (cf. Mt 28,20 ; Hb 13,8) ? Quel regard de foi sommes-nous donc invités à porter sur tous ceux et celles qui nous entourent, qu’ils soient croyants comme nous, ou croyants différemment ou encore incroyants ? La base de tout, en fin de compte, est la bonne volonté… Avec elle et par elle, que nous en soyons conscients ou pas, le Père guide ses enfants sur les chemins qui mènent à sa Maison…

Or en quel jour Jésus a-t-il accompli ce miracle ? Cela posera deux problèmes pour les scribes et les Pharisiens, lesquels (cf. j Jn 5,10 ; k Jn 5,15-16 ; Lc 13,14) ? De fait, que demande la Loi de Moïse pour le sabbat (Ex 20,8-11 ; Dt 5,12-15) ? Mais le but d’une telle demande est de se mettre dans les meilleures conditions possibles pour vivre sa relation avec Dieu. Or, qu’est-ce qui nous empêche de vivre pleinement cette relation (Rm 7,14-25)? Et d’après ce que nous venons de voir, de quoi les guérisons accomplies par Jésus sont-elles le signe ? Jésus s’oppose-t-il donc au commandement du sabbat, ou au contraire en permet-il le meilleur accomplissement possible (cf. Jn 7,19-24) ?

A l’époque de Jésus, les maladies et la mort étaient donc comprises comme des châtiments que le Dieu Juge envoyait du ciel pour punir les pécheurs (cf. 1R 8,32). Et puisque l’on pouvait tomber malade ou mourir un jour du Sabbat, on en avait déduit que l’activité du Dieu Juge ne cesse jamais… Or, pour expliquer son action, que dit Jésus en Jn 5,17 ? Quelle prétention y voient aussitôt les scribes et les Pharisiens ?

Le discours de Jésus (Jn 5,19-49)

             Au début de son discours, Jésus va tout de suite rebondir sur ces reproches que ses interlocuteurs viennent de lui faire. Ils l’accusent de « se faire l’égal de Dieu », de se mettre en avant… Mais dans ses toutes premières paroles en 5,19-20 et plus tard en 5,30, comment Jésus se présente-t-il ? Retrouver ce principe fondamental dans les versets suivants pour sa Parole (7,16-17 ; 8,28 ; 12,49-50 ; 14,10 ; 14,24 ; 17,7-8) et ses œuvres (5,36 ; 9,1-4 ; 10,36-38 ; 14,10-11). Quel est d’après Jn 14,10-11 le fondement sur lequel le Fils construit toute sa vie ? D’après les tout premiers mots de Jn 5,20, quel en est le contexte ? Et comment le Christ répond-il (cf. Jn 14,31 ; 4,34 ; Ph 2,8 ; Hb 5,8) ? Quelle devrait donc être, à l’exemple du Fils, l’attitude de base de tout chrétien « fils ou fille de Dieu » au plus profond de son cœur (Ac 5,29 ; 6,7 ; Rm 6,16 ; 16,19 ; 2Co 9,13 ; 10,4-5 ; Ph 2,12 ; 1P 1,1-2 ; 1,14.22). Par quelle expression St Paul résume-t-il cette attitude (cf. Rm 1,5 ; 16,26) ?

Dieu appelle ainsi l’homme au plus profond de lui-même, au plus profond de son être. Nous sommes ici à la source de ce que nous appelons notre « conscience »… En effet, celle-ci est la conséquence directe de l’action créatrice de Dieu qui nous a suscités dans l’existence par son Souffle, l’Esprit Saint (Gn 2,4b-7), et qui nous maintient en vie, instant après instant, par ce même Souffle (Job 34,14-15)… C’est donc une réalité de l’ordre de l’Esprit qui est à la racine la plus profonde de notre être, de notre vie… L’Esprit de Dieu a créé notre esprit, et il le maintient dans l’existence instant après instant. Et cet « esprit » participe, de par ce qu’il est, à la nature même de Dieu (Jn 4,24). Il porte donc en lui toutes les richesses divines : amour, vérité, justice, droiture, loyauté, compassion, sagesse… Et ces richesses s’expriment spontanément dans ce que nous appelons notre « conscience ». Etre fidèle à sa conscience, l’écouter, c’est donc en fin de compte être fidèle à Dieu, écouter Dieu, même si cette conscience a besoin d’être éclairée, purifiée, fortifiée… Combien vivent sans faire attention à ce trésor qui les habite déjà… C’est pour cela que découvrir le Mystère de Dieu qui s’est révélé en Jésus Christ est au même moment une découverte de soi-même, de ce que nous sommes tous : des êtres spirituels qui vivent déjà de la Plénitude même de Dieu, et qui sont appelés à partager cette Plénitude en acceptant librement de la recevoir de Celui qui ne cesse de vouloir nous la communiquer ! Nous avons tous été créés pour cela… Mais avant de recevoir, il faut d’abord prendre conscience de l’existence de Dieu, cet Être éternellement bienveillant et toujours offert. Ensuite, il faut accepter librement de se tourner vers lui pour recevoir le Don de sa Vie, de sa Paix, un Don qu’il veut voir régner en nous pour notre bien. Telles sont toutes les étapes d’une « conversion » à laquelle Dieu travaille, patiemment, inlassablement, pour que nous puissions connaître la Plénitude, la sienne ! Tel sera alors notre bonheur profond. En prendre conscience ne pourra donc qu’être pour nous synonyme de lumière, d’émerveillement, d’intensité de vie inégalée… « Heureux ceux qui croient »… Le paradoxe des paradoxes est que les hommes cherchent tous le bonheur en courant après l’argent, les biens matériels, les honneurs, alors que Dieu de son côté court après chacun de nous pour nous inviter au seul vrai bonheur pour lequel il nous a tous créés, le sien… « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 15,10)… Prendre du temps pour s’arrêter et se placer sous la lumière de cette Parole que le Fils est venue nous adresser au Nom de son Père, c’est découvrir avec lui, avec elle, dans l’invisible de l’Esprit, une réalité intense et paisible de l’ordre de la vie, qui suffit déjà à nous combler dès ici-bas ! Sa Présence en nous sera le fruit de la Miséricorde de Dieu qui veut notre bien plus que nous-mêmes. En effet, quel que soit notre « état », la gravité et l’étendue de nos blessures, « Dieu ne cesse pas de nous suivre pour nous faire du bien »… Et l’on pourrait même dire que cette Présence se fera d’autant plus insistante que nous sommes blessés, plongés dans les ténèbres, et donc finalement, sans en avoir peut-être pleinement conscience, profondément malheureux… Et voilà justement ce que notre Père à tous ne supporte pas ! Alors, s’il nous appelle à l’aimer « de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit » (Mt 22,37), c’est bien parce que Lui est le premier à le faire depuis toujours : « Je trouverai ma joie à leur faire du bien et je les planterai solidement dans ce pays » (ce Mystère de Communion avec Lui dans l’unité d’un même Esprit) « de tout mon cœur et de toute mon âme » ! Et là, le prophète Jérémie évoque l’infini du cœur de Dieu (Jr 32,39-41) !

Accepterons-nous enfin de prendre du temps pour lui, de nous tourner vers Lui, d’écouter ce qu’il nous a dit par son Fils, et de le laisser agir en nous ? Nous ne pourrons alors que reconnaître, en la vivant, cette Plénitude de Vie et de Paix qu’il désire nous communiquer… Heureux serons-nous alors… Jésus est venu nous rejoindre pour cela : « Je suis venu pour qu’on ait la vie, et qu’on l’ait en surabondance » (Jn 10,10)… Et il est le Bon Pasteur qui cherche sa brebis perdue jusqu’à ce qu’il la retrouve (Lc 15,4-7). Combien de fois dans notre vie n’allons-nous pas être des « perdus », et à chaque fois… il nous retrouvera et nous donnera de vivre et de revivre sa vie, sa paix… en attendant ce jour tout à la fois désiré et redouté où, enfin, nous le verrons !

D’ailleurs, quelle notion intervient deux fois en Jn 5,26 ? A la lumière de cette insistance, lorsque le Christ va ensuite parler d’un « pouvoir » reçu de son Père, de quel « pouvoir » pourrait-on s’attendre (cf. Jn 17,1-2 ; 10,10 ; 5,40) ? Et pourtant, c’est la notion de « jugement » qui intervient en Jn 5,27 ! Conclusion : en mettant en parallèle la réponse précédente et cette notion de jugement, que veut donc dire pour Dieu « exercer le jugement » ? Retrouver la réponse avec Jn 3,14-18. Dieu juge-t-il donc au sens de « condamner » (cf. Jn 5,22 ; 5,45 ; 8,10-11 ; 1Jn 2,1-2 ; Rm 8,31-34) ? Quelle est son unique préoccupation (1Tm 2,3-6) ? Et de fait, si le thème du jugement apparaît aux versets 22, 24, 27, 29, 30, quel autre thème se croise continuellement avec lui (versets 21, 24, 25, 28-29) ? Retrouver ainsi une nouvelle fois ce que veut dire pour Dieu « exercer le jugement » (voir aussi Col 1,12-14 ; Jn 12,31-32). Ainsi, celui qui, jour après jour, accepte le Christ Sauveur dans son cœur et dans sa vie, reçoit « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,19), Celui qui a versé tout son sang sur la Croix pour que nous puissions être libérés du mal et de ses conséquences (1Jn 1,7 ; Ap 1,5 ; 7,13-17 ; 12,10-12 ; Hb 9,14) et vivre ainsi de sa vie (Jn 6,53-57), en communion de vie avec lui (1Jn 1,1-4)… Car le sang dans la Bible symbolise la vie… En nous donnant « son » sang (Lv 17,11 ; 17,14), Jésus nous donne « sa » vie, pour que nous vivions de « sa » vie… Et cette vie sera le fruit, en nous, de l’action de l’Esprit car « c’est l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63), c’est « l’Esprit qui est notre vie » (Ga 5,25)…

Quels sont donc « les morts » évoqués en Jn 5,25, des « morts » qui « entendent la voix du Fils de Dieu » et qui ne sont donc pas si morts que cela (cf. Lc 5,31-32 ; Rm 6,23) ? Souvenons-nous que nous avons rencontré ce thème de « la voix » en Jn 3,8 : « Le vent (ou l’Esprit, même mot en grec, pneûma) souffle où il veut, et tu entends sa voix, mais tu ne sais pas ni d’où il vient, ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit » (Jn 3,8). Cette « voix » est donc celle de l’Esprit… Entendre « la voix du Fils de Dieu », c’est entendre « la voix » silencieuse de l’Esprit qui se joint à sa Parole et touche les cœurs… En effet, souvenons-nous encore de Jn 3,34 : « Celui que Dieu a envoyé prononce les Paroles de Dieu car il donne l’Esprit sans mesure ». En donnant la Parole du Père, Jésus donne l’Esprit sans mesure. Accueillir la Parole de Jésus de tout cœur, c’est donc au même moment accueillir l’Esprit. Les disciples qui entendaient de leurs oreilles la voix de chair de Jésus, percevaient donc au même moment, au plus profond d’eux-mêmes, un « je ne sais quoi », comme dirait Ste Thérèse de Lisieux : la voix de l’Esprit qui « parlait » par sa simple Présence en eux. Avec lui, ils vivaient donc de la vie de Dieu, car « c’est l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63)… Et puisque « Dieu est Esprit » (Jn 4,24) et que « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5), avec lui encore, ils faisaient en même temps une expérience de Lumière, que l’on peut aussi traduire en terme de Joie (cf. 1Th 1,5-6). Jésus, conscient qu’ils accueillaient à travers sa Parole la réalité même de l’Esprit qu’il reçoit du Père de toute éternité, pouvait leur dire : « Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez et les oreilles qui entendent ce que vous entendez » (Mt 13,16‑17). Ils vivaient ce que lui aussi vivait… « A cette heure même, il tressaillit de joie sous l’action de l’Esprit Saint et il dit : Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits. Oui, Père, car tel a été ton bon plaisir » (Lc 10,21).Heureux étaient-ils parce qu’ils accueillaient avec sa Parole l’Esprit donné sans mesure, l’Esprit qui vivifie, l’Esprit qui est Lumière et Joie… Ils entendaient « la voix de l’Esprit ». C’est pourquoi Jésus parle ici, en Jn 5,25, de ces « morts », de ces pécheurs, qui vont accepter librement de l’accueillir, de l’écouter, de lui ouvrir leur cœur : ils vont « entendre la voix du Fils de Dieu » et donc avec lui « la voix » de l’Esprit… Alors, ils ne peuvent que vivre, car « l’Esprit vivifie » (Jn 6,63). D’où l’affirmation de Jésus : « et ceux qui l’auront entendue vivront »…

Par contre, quels sont « les morts » qui interviennent ensuite en Jn 5,28 ? On peut lire Ez 37,1-14 en pensant au même thème… Bien noter qu’en Jn 5,28-29, tous les morts ressusciteront, tous, sans aucune exception, « ceux qui auront fait le bien » et « ceux qui auront fait le mal »… Or, celui qui a fait le bien, avant de l’accomplir, a dit « oui » au bien dans son cœur. Peut-être n’en était-il pas conscient, mais au même moment, il disait « oui ! » à Dieu et son « faire le bien » était déjà habité par la Présence de Celui qui est le Bien par excellence, et qui se plait « à faire le bien » pour les uns et pour les autres, par les uns et par les autres… « Dieu est Amour » (1Jn 4,8), il est le Bien, il est « la Vérité » (Jn 14,6). Ainsi, « celui qui fait la vérité » du bien et de l’amour, « vient à la lumière afin que soit manifesté que ses œuvres sont faites en Dieu » (Jn 3,21). Dieu le soutient dans le bien qu’il accomplit, il l’entoure, il l’encourage, mystérieusement il le guide, et ce bien fait « en Dieu » devient l’œuvre de Dieu lui-même…

« Ceux qui auront fait le mal » sortiront des tombeaux « pour une résurrection de jugement » (Jn 5,29). A la lumière de la notion de « jugement » rencontrée précédemment, que sera pour eux cette « résurrection de jugement » ? Quelle énorme espérance pouvons-nous donc avoir à leur égard ? Encore faudra-t-il, une fois de plus, qu’ils acceptent, librement, de se laisser aimer par « le Père des Miséricordes » (2Co 1,3)… L’Amour, en effet, peut se faire pressant, suppliant, dans son ardeur à vouloir le bien pour celui et celle qu’il aime… Mais il ne peut s’imposer, il ne peut « forcer » qui que ce soit… Le Seigneur nous aidera, il nous encouragera, il insistera pour que nous acceptions d’entrer dans sa Maison, mais il ne nous obligera jamais à le faire… D’où l’importance de lui dire « Oui ! » dès maintenant, en lui offrant tout, toutes nos misères, nos mauvaises volontés, nos manques d’amour… Et lui fera ce qu’il ne cesse de faire de toute éternité : face au mal, l’Amour prend le visage de la Miséricorde qui, inlassablement, enlève le péché du monde, pardonne, lave, purifie, sanctifie… « On pourrait croire que c’est parce que je n’ai pas péché que j’ai une confiance si grande dans le bon Dieu. Dites bien, ma Mère, que si j’avais commis tous les crimes possibles, j’aurais toujours la même confiance, je sens que toute cette multitude d’offenses serait comme une goutte d’eau jetée dans un brasier ardent » (Ste Thérèse de Lisieux).

Ps 103(102),1-18 : « Bénis le Seigneur, ô mon âme,

bénis son nom très saint, tout mon être !

Bénis le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits !

Car il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ;

il réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse ;

il comble de biens tes vieux jours : tu renouvelles, comme l’aigle, ta jeunesse.

Le Seigneur fait œuvre de justice, il défend le droit des opprimés.

Il révèle ses desseins à Moïse, aux enfants d’Israël ses hauts faits.

Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour ;

il n’est pas pour toujours en procès, ne maintient pas sans fin ses reproches ;

il n’agit pas envers nous selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses.

Comme le ciel domine la terre, fort est son amour pour qui le craint ;

aussi loin qu’est l’orient de l’occident, il met loin de nous nos péchés ;

comme la tendresse du père pour ses fils,

la tendresse du Seigneur pour qui le craint !

Il sait de quoi nous sommes pétris, il se souvient que nous sommes poussière.

L’homme ! ses jours sont comme l’herbe ; comme la fleur des champs, il fleurit :

dès que souffle le vent, il n’est plus, même la place où il était l’ignore.

Mais l’amour du Seigneur, sur ceux qui le craignent, est de toujours à toujours, *            et sa justice pour les enfants de leurs enfants,

pour ceux qui gardent son alliance et se souviennent d’accomplir ses volontés »…

Quelle notion prépondérante apparaît ensuite en Jn 5,31-40 ? On peut dire que le principe est énoncé en Jn 5,31-32. Apparaissent ensuite tous les acteurs qui mettront en œuvre cette notion : les indiquer. Et qui en est, à chaque fois, le bénéficiaire ? Nous le voyons, nous sommes ici en plein procès de Jésus accusé par les autorités religieuses d’Israël de « se faire égal à Dieu » (Jn 5,18). Or, d’après la Loi de Moïse, quel était le nombre de témoins nécessaires pour « convaincre un homme de quelque faute ou délit que ce soit » (cf. Dt 19,15) ? Ce chiffre n’est-il pas atteint ici, et même dépassé ?

D’après Jn 5,44, quelle attitude s’oppose à l’accueil du Christ ? Quelle en est la conséquence (cf. Jn 12,37-41 ; Mc 8,17-18) ? Leur cœur est-il donc ouvert ou fermé ? Et puisque Dieu est Amour et Source d’Amour et de Vie (1Jn 4,8.16 ; Jr 2,13 ; 17,13 ; Jn 7,37-39 avec Rm 5,5), qu’auraient-ils aussitôt en eux-mêmes si leur cœur lui était ouvert (cf. Jn 5,42 et Jn 5,40 en notant que « venir à » en St Jean équivaut à « croire » (cf. Jn 6,35)) ? Après avoir reconnu cette Présence vivifiante en eux de l’Esprit, que se passerait-il alors (cf. deuxième partie de 1Co 12,3 ; puis Jn 5,23 car Jn 10,30) ?

En effet, s’ils avaient en eux « l’amour de Dieu », c’est bien parce ce que « un homme ne peut rien recevoir si cela ne lui a été donné du ciel » (Jn 3,27). En effet, « Dieu est Amour  » (1Jn 4,8). Or, « aimer, c’est tout donner et se donner soi-même » (Ste Thérèse de Lisieux). Ainsi Dieu, de toute éternité, est Source de ce qu’Il est lui-même. Il ne cesse de tout donner, tout ce qu’Il Est… Il Est Lumière (1Jn 1,5) ? Il donne la Lumière… Il Est Amour ? Il donne l’Amour… Il Est Esprit (Jn 4,24) ? Il donne l’Esprit… Et son Esprit, bien sûr, est Amour et Lumière… Voilà pourquoi, en nous donnant l’Esprit, il nous donne aussi l’Amour, une force pour aimer : « L’Amour de Dieu a été versé dans nos cœurs par l’Esprit qui nous a été donné », dit St Paul (Rm 5,5). Mais avec l’Esprit, nous recevons aussi la Lumière… « N’éteignez pas l’Esprit », dira St Paul (1Th 5,19)… Alors, si les interlocuteurs de Jésus étaient vraiment ouverts à Dieu de tout cœur, comme ils le prétendent, ils auraient en eux sa lumière. Or, dit le Psalmiste, « par ta lumière, nous voyons la lumière » (Ps 36(35),10). Jésus est la « Lumière du monde » (Jn 8,12) ? Ils l’auraient aussitôt reconnu et aimé… Mais puisqu’ils refusent d’accueillir en eux cette Lumière de l’Amour en faisant la vérité dans leur vie, vérité de leur misère qui pourrait accueillir la Vérité de la Miséricorde de Dieu, ils n’accueillent pas Jésus (Jn 5,43). Pire, ils vont aller jusqu’à le haïr (Jn 15,18-27).

Et dans la même foulée, s’ils croyaient vraiment en Moïse (Jn 5,46), puisque Moïse n’a fait que transmettre les Paroles qu’il avait reçues de Dieu, et notamment « les Dix Paroles » (Ex 20,1-17 ; Dt 5,6-22), c’est Dieu à travers lui qu’ils auraient accueilli… Et si tel avait été vraiment le cas, ils auraient reconnu que la Parole de Jésus jaillit de la même source : toutes les Paroles qu’il nous transmet viennent aussi du Père… Et puisque Jésus, « le Verbe fait chair » (Jn 1,14), est Dieu (Jn 1,1 ; 20,28), en accueillant Dieu par Moïse, ils auraient accueilli en même temps le Mystère du Fils éternel « unique engendré » (Jn 1,18)… Il n’est donc pas possible de dire que l’on croit en Moïse et au même moment qu’on ne croit pas en Jésus… Mystère de ce péché qui est résistance à Dieu, refus de Dieu… Jésus, « vrai Dieu né du vrai Dieu » va l’affronter dans toute son intensité et se laisser broyer par lui… Mais rien, absolument rien ne peut empêcher Dieu d’être ce qu’Il Est, et Il Est Amour… A la mort de son Fils, il répondra par l’Amour… L’Amour qui arrache à la mort le Fils Bien-Aimé et qui l’envoie bénir tous ceux qui l’ont tué !

« Vous êtes, vous, les fils des prophètes et de l’alliance que Dieu a conclue avec nos pères quand il a dit à Abraham : Et en ta postérité seront bénies toutes les familles de la terre. C’est pour vous d’abord que Dieu a ressuscité son Serviteur et l’a envoyé vous bénir, du moment que chacun de vous se détourne de ses perversités » (Ac 3,25-26).

Dieu ne sait en effet que bénir, c’est-à-dire vouloir et accomplir par ses dons le bien de tous les hommes qu’il aime… Tous, sans exception, et tout particulièrement ceux qui sont pris fans les filets du mal, de la violence et de la haine, un mal qui les prive de la Plénitude de Dieu et ne peut donc que les plonger dans la souffrance intérieure et la détresse (Rm 2,9). Voilà, justement, ce que Dieu n’acceptera jamais.

                                                                                                                             D. Jacques Fournier

[1] Catéchisme de l’Eglise Catholique & 405 ; 418 ; 1264 ; 1426 : « La nature humaine n’est pas totalement corrompue : elle est blessée dans ses propres forces naturelles, soumise à l’ignorance, à la souffrance et à l’empire de la mort, et inclinée au péché (cette inclination au mal est appelée  » concupiscence « ). Le Baptême, en donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et retourne l’homme vers Dieu, mais les conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent dans l’homme et l’appellent au combat spirituel ».« Laissée pour nos combats, la concupiscence n’est pas capable de nuire à ceux qui, n’y consentant pas, résistent avec courage par la grâce du Christ. Bien plus, « celui qui aura combattu selon les règles sera couronné » (2 Tm 2, 5). » « La vie nouvelle reçue dans l’initiation chrétienne n’a donc pas supprimé la fragilité et la faiblesse de la nature humaine, ni l’inclination au péché que la tradition appelle la concupiscence, qui demeure dans les baptisés pour qu’ils fassent leurs preuves dans le combat de la vie chrétienne aidés par la grâce du Christ. Ce combat est celui de la conversion en vue de la sainteté et de la vie éternelle à laquelle le Seigneur ne cesse de nous appeler ».

Correction de la fiche N°10

CV – 10 – Jn 5 correction




Rencontre « Accompagnement des malades » au Carmel des Avirons (Samedi 29 février)

Cette année, plus d’une vingtaine de personnes se sont inscrites dans le sud pour le parcours proposé par Noéline Fournier, « L’accompagnement des malades, avec Mère Teresa ». La première rencontre avait lieu samedi 29 février au Carmel des Avirons dans une salle repeinte à neuf et équipées de fenêtres et portes fenêtres elles aussi toutes neuves… Et lors de la pause, une participante a sorti un gâteau au chocolat… dont on ne dira pas plus en temps de carême !!!!!




Première journée Cycle Long à l’Etang Salé (Samedi 22 février)

Une cinquantaine de participants se sont retrouvés ce samedi 22 février à la Salle du Pèlerin, à l’Etang Salé, Paroisse St Dominique, avec le P. Joseph Lekundayo pour la première rencontre biblique de l’année 2020 consacrée au Mystère du Christ…