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24ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 15, 1-32)

« Mon fils que voilà était mort,

et il est revenu à la vie. »

 

L’évangile de ce jour, un peu long, nous parle de trois paraboles.

A quelle occasion Jésus donne-t-il ces trois paraboles ?

Les pharisiens et les scribes jasaient au sujet de Jésus parce que les publicains et les pécheurs venaient à lui pour l’écouter, et même parfois l’invitaient à manger, ce que Jésus acceptait volontiers (comme avec les pharisiens d’ailleurs). Ou du moins ceux que les pharisiens disaient qu’ils étaient pécheurs : « Pourquoi s’occupe-t-il des pécheurs ?! Ils ne valent rient ! Dieu ne peut que les rejeter ! Ils sont définitivement perdus ! ». …

Oui ! Cela, c’était au temps de Jésus ; les bien-pensants ( ?! ) ne savaient pas que Dieu est amour ( Euh ? « Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour … » Ps 102,8.  Ils ont dû oublier).

Mais maintenant, avec Jésus, tout le monde le sait ! …

Oui ! On le sait …

Mais est-ce qu’on a véritablement changé d’attitude vis-à-vis de certains qu’on qualifie de pécheurs ?

Lors de la dernière session des Assises, il y a peu, que n’a-t-on pas dit envers ceux qui étaient accusés de meurtre, de viols, de violences familiales ?

J’ai entendu les mêmes réactions que celles des pharisiens à l’époque de Jésus !

Maintenant on le sait ? Intellectuellement, peut-être, mais pratiquement … ??

Alors Jésus s’exprime, pour nous aussi, concrètement.

Les deux premières paraboles montrent des personnes qui cherchent ce qu’elles ont perdu … et quand elles le retrouvent, tout à leur joie, elles invitent leurs voisins et font la fête, car « Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé [ce] que j’avais perdue ! », et Jésus conclut : « Il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit. »

La troisième parabole est bien connue. Avant, on l’appelait ’’le fils prodigue’’, maintenant, de plus en plus, on l’appelle ’’Le père et ses deux fils’’, ce qui est mieux car les trois personnes sont importantes :

– le plus jeune fils, qui trouve l’atmosphère familiale trop ringarde, qui s’ennuie chez lui (comme bon nombre d’adolescents qui s’ennuient à la messe …), il en a assez de son père, alors il décide de prendre la liberté, non sans oublier de prendre en passant son ’’héritage’’. Quand il n’a plus d’argent, il essaie de se débrouiller, mais ça lui pèse trop ; alors il prépare un discours bidon pour revenir chez son père.

– l’ainé, lui, reste chez lui. Il travaille pour son père, jusque tard le soir. Il n’a pas l’air non plus très heureux … et quand son frère revient et qu’il entend la fête, il fait une crise de jalousie : « Pourquoi pour lui, et pas pour moi ? »

– le père, qui continue de s’occuper de sa maison, mais qui attend toujours le retour de son fils … et quand il le voit, il oublie tout ce que celui-ci lui a fait subir pour l’accueillir avec joie : « Mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie. ». Et qui sort de sa maison pour aller voir l’ainé qui ne veut pas rentrer. Il veut que tout le monde soit avec lui, dans la joie des retrouvailles …

La question pour nous est de savoir à quel personnage on ressemble le plus ?

Le cadet avec son désir de liberté, qui fait ce qu’il veut ? … (comme les pécheurs)

L’ainé avec sa jalousie, et sa certitude de tout bien faire pour son père …, d’être irréprochable … ? (comme les pharisiens)

C’est à chacun de voir … Sans doute aux deux, selon les moments …

Le père … ? Celui qui veut le bien de tous, qui se réjouit du retour de son fils ?

Peut-être aussi, parfois, mais épisodiquement … du moins je pense …

Mais nous ne sommes pas Dieu, nous n’arrivons pas à toujours aimer, à aimer tout le monde, sans arrière-pensées … Nous n’arrivons pas toujours à faire la différence entre la faute, le péché … et la personne qui a fait la faute … et souvent on mélange les deux … et on condamne le pécheur et pas seulement la faute … parce que nous sommes des humains, et donc nous aussi pécheurs … et en réagissant ainsi, on se condamne aussi …

Mais nous savons une chose que Jésus nous enseigne, nous qui nous considérons souvent comme des bien-pensants, des bien-faisants : si jamais nous tombons (ou plutôt quand nous tombons …), nous sommes sûr que Dieu ne nous laissera pas tomber, qu’il viendra nous chercher dans le plus profond de notre être, jusqu’à ce que nous retournions vers lui … et que ce sera la fête dans le ciel !! avec nous !

« Qui donc est Dieu pour nous aimer ainsi ?!! »

Dieu notre Père,

Tu aimes tellement tous tes enfants,

quels qu’ils soient,

que tu veux qu’ils soient toujours près de toi.

Et quand l’un s’égare, tu pars à sa recherche.

Quand tu le trouves,

c’est la joie pour tous ceux qui t’entourent.

Je sais donc que, si je m’éloigne de toi,

tu feras tout pour me ramener à toi.

Et cela m’arrive si souvent de m’éloigner de toi …

 

Francis Cousin

 

  

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Prière dim ordinaire C 24°




24ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Le fils prodigue

Lc 15, 1-32

Parmi les trois paraboles admirables qui nous montrent jusqu’où peut aller l’amour de Dieu, attardons-nous, si vous le voulez bien, sur la dernière: « Un homme avait deux fils ». Elle semble tellement d’actualité cette histoire : il n’arrive pas de semaines où l’on ne me raconte des conflits entre des jeunes et leurs parents, où un jeune homme s’en va en claquant la porte, ou cet autre reste à la maison, mais en feignant d’ignorer ses parents qu’ils considèrent comme déphasés, ringards, dépassés, de ces familles qu’il faudrait plutôt appeler « Pension de famille » tant ceux qui vivent sous le même toit s’ignorent, vivent chacun de leur côté, juxtaposés, mais bien peu unis, encore moins, aimants. Combien de pères ou de mères n’arrivent plus à établir des relations d’amour avec des enfants, pourtant très différents de tempérament, un amour mal accueilli, mal compris.

Et derrière cette histoire, nous nous souvenons de la 1ère lecture, l’histoire de l’alliance du Sinaï : Dieu, respectueux de la liberté humaine qui n’arrive plus, lui aussi, à établir des liens d’amour avec son peuple choisi. Si bien que la mission du Christ sera de partir à la recherche des brebis égarées et d’essayer de nouer des relations nouvelles : une nouvelle alliance entre Dieu et ses fils, tous les hommes.

Jésus, aujourd’hui, veut provoquer notre réflexion et nous amener à nous demander si nous ne ressemblons pas à l’un de ces deux fils, dans notre attitude envers Dieu.

 

Voyons d’abord le plus jeune : celui que l’on appelle le « Prodigue ». Il a  l’esprit  aventureux, portant  en  lui, une « fureur de vivre ». Il  est  comme  certains  des  jeunes d’aujourd’hui, « Il veut tout et tout de suite ». Ses illusions vont d’ailleurs tomber très vite au contact de l’égoïsme des autres… Il va découvrir très vite le désert de l’amour. Laissons-nous attendrir par ces retrouvailles et l’accueil chaleureux de son père.

« Lorsqu’on a été père une fois, on ne peut plus cesser d’être Père ». Rien ne compte. Tout est oublié, effacé, aboli : c’est la fête de l’amour et l’amour n’a pas de prix. Et par là, nous comprenons mieux l’appel pressant de Jésus à tous ceux qui ont pris vis-à-vis de Dieu beaucoup de distance : toute la gamme des négligents, des insouciants, des mal-croyants, ceux que nous appelons aujourd’hui « les non-pratiquants » et encore de tous ces marginaux, ces exclus, ces révoltés, un peu dans le genre du malfaiteur qui se trouvait crucifié à côté de Jésus. Lui aussi se tourne vers le Christ, peut-être en souvenir de cette parabole de miséricorde ?

Et nous, qui sommes ici, rassemblés dans cette église, qu’en est-il de nos relations avec Dieu ? Lorsque nous disons « Notre Père », voulons-nous chanter tout l’amour qui est dans le cœur de Dieu ? Voulons-nous exprimer toute la confiance qui est dans le nôtre ? Cette histoire du fils fugueur nous invite encore à l’espérance : oui, des êtres chers semblent éloignés de Dieu, ils cherchent ailleurs un autre chemin de bonheur. Ne les jugeons pas. Croyons solidement que le Père des cieux reste toujours prêt à les accueillir au jour de leur retour car Dieu est riche en miséricorde.

Passons au fils aîné : il nous apparaît, au premier abord, comme un fils exemplaire : fidèle à la loi, plein de soumission et d’obéissance,  mais il a si peu d’affection, si peu de confiance qu’il n’a jamais osé demander un chevreau à son père, pour faire une boum avec les jeunes de son âge… la fête de quoi ?

Il n’y a peut-être jamais pensé : peu d’amour dans le cœur, peu d’esprit de fête.  Avez-vous assez de fêtes en famille ? Si oui, c’est bon signe, c’est qu’il y a de l’amour entre vous.

Le retour inattendu de son frère va éclairer tout cela ! « C’est un comble, c’est un scandale ! », se dit-il. N’est-ce pas approuver, encourager la rébellion, le gaspillage ? Cette fête est insensée, ridicule et de fait, elle le serait, si justement, elle n’était le signe d’un amour fou et sans mesure, celui de Dieu.

Judas, aussi, trouvera ridicule le geste de la pécheresse qui va verser sur les pieds de Jésus, un parfum de grand prix, répandu sans retenue, avec exubérance. A quoi donc serviraient les richesses matérielles sinon justement à exprimer des gestes d’amour : c’est le sens même du cadeau, et de la fête !

Au travers de cette histoire, Jésus s’adresse aux pratiquants et leur dit : « Attention, votre amour du Père doit s’exprimer certes par un culte rendu à Dieu, mais aussi soyez des pratiquants de l’amour fraternel :

. fidélité à votre prière

. fidélité à votre messe, très bien

. fidélité à votre conscience et à l’éducation que vous avez reçue.

Oui, mais ouvrez les yeux autour de vous, soyez compréhensifs et pleins d’attention à l’égard de ceux qui se sont éloignés du Père et soyez avec eux, comme des frères, de vrais frères, de toutes façons, issus d’un même Père, prêts à se pardonner les uns les autres.

A notre tour de réfléchir sur nos comportements de baptisés.

La vie chrétienne, c’est la découverte de plus en plus complète, à l’école de Jésus, de l’amour infini du Père des cieux.

 « Il fallait bien faire la fête et se réjouir, car ton frère que voici était mort et il est revenu à la vie… il était perdu et il est retrouvé ».

Ce retour des fils vers le père qui les accueille avec joie et dans la fête, essayons, nous aussi, de le vivre avec sincérité, ce retour vers le Père, et cet amour de nos frères.

Nous aussi, essayons d’aimer et de pardonner de la même façon que Dieu puisqu’il nous pardonne à chaque fois que nous faisons retour vers lui.  AMEN

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Intérêt général ou bien commun ? Les mots sont importants… (Fr Manuel Rivéro – OP)

Ces deux expressions apparaissent parfois comme synonymes dans les articles sur la vie économique et politique. Sont-ils vraiment équivalents ? Quelles en sont les différences ?

Tout d’abord, les mots ne sont pas les mêmes. Les mots donnent à penser, à interpréter et à agir. Les politiques invoquent l’intérêt général dans leurs projets et décisions. Apparemment « intérêt général » et « bien commun » pourraient recouvrir le même sens puisqu’il s’agit de dépasser l’intérêt individuel par rapport à l’intérêt du groupe social. C’est l’État qui décide de  l’intérêt général et qui le fixe dans des lois. Des groupes de pression, expressions de puissances financières et idéologiques, parviennent parfois à obtenir ce label d’intérêt général à travers de minorités agissantes et à l’imposer à l’ensemble de citoyens.  Les droits de la personne ne sont plus alors respectés et le concept « intérêt général » devient un masque pour cacher des intérêts privés. 

Par ailleurs, le mot « intérêt » renvoie au libéralisme économique et à la maximisation des profits. Bernard Mandeville avait écrit en 1714 son fameux livre « La fable des abeilles » où il défendait la thèse que « l’égoïsme et le vice de chacun contribue à la prospérité et au bonheur de tous » par le développement des dépenses qui favoriserait la production et par conséquent l’emploi … Maintenant les modèles mathématiques de microéconomie visent à maximiser les profits de l’ « homo economicus ». Un professeur d’économie, partisan du libéralisme, disait un jour non sans humour que « le socialisme est le dogme de l’Immaculée Conception appliqué à l’économie », c’est-à-dire tout le monde est bon sans idée du mal. « L’homme n’est ni ange ni bête et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête », écrivait Blaise Pascal dans ses Pensées.

Dans la réalité, les choses s’avèrent beaucoup plus compliquées. La spéculation à outrance entraîne des crises financières qui déstabilisent les nations et les entreprises et qui provoquent chômage et misère dans les familles. On attribue à Jean Jaurès cette image du capitalisme : « Le renard libre dans le poulailler libre ». Évidemment cette comparaison qui cherche à choquer et à faire réagir ne correspond pas exactement à la situation sociale exact des individus libres mais elle met en exergue la différence de pouvoir entre le riche et le pauvre et à la très relative liberté des faibles.

En tout homme, il y a le penchant  vers le bien et vers le mal. L’économie et la politique relèvent d’une anthropologie. Si la solution aux problèmes économiques et politiques était simple tout le monde l’aurait su depuis longtemps. Le philosophe et sociologue contemporain, Jürgen Habermas, fait remarquer que ni le capitalisme ni le collectivisme ne sont parvenus à dépasser les rapports de domination qui ont causé des millions de morts dans les révolutions pour la justice au long de l’histoire. Le dépassement de cette volonté de domination exige un travail, personnel et collectif, jamais achevé.

Qu’en dit l’Église ? La doctrine sociale de l’Église ne propose pas un modèle économique ou politique ni une troisième voie entre capitalisme et collectivisme mais des principes d’action à partir de la dignité sacrée de toute personne humaine et de la destination universelle des biens. « Développement de tout l’homme et tous les hommes », selon l’expression du saint pape Paul VI. La propriété privée ne figure pas dans le Credo de la messe et le marché ne fait pas partie non plus des « dogmes » ni des « divinités ». « La terre est à tous », enseignent les papes dans leurs encycliques sociales. Le propriétaire de la terre est Dieu lui-même. C’est pourquoi l’Église ne parle pas d’ « intérêt général » mais du « bien commun ». Saint Thomas d’Aquin (+1274), le grand Docteur de l’Église,  enseigne qu’une loi ne mérite ce nom que si elle conduit au bien, autrement il s’agirait d’une perversion de la loi et l’homme devrait en conscience s’y opposer.

La doctrine sociale de l’Église dénonce aussi bien les erreurs du libéralisme que ceux du marxisme matérialiste. Que propose-t-elle ? L’Église plaide pour un personnalisme qui situe la personne humaine au cœur de l’économie et de la politique non pas de manière individualiste mais en communauté. La personne n’est jamais un moyen mais un but. À la suite du philosophe chrétien, Emmanuel Mounier, le saint pape Jean-Paul II enseigne le primat de la personne sur le capital. La fonction du capital est de servir le travail selon son encyclique « Le travail humain ». L’homme représente le sommet et la fin de la création.

Le Concile Vatican II donne la définition suivante du bien commun : « Cet ensemble de conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres, d’atteindre leur perfection d’une façon plus totale et plus aisée » (Gaudium et spes, n°26). Les deux mots « bien » et « commun » sont importants. Cette définition met en lumière le sens de la vie humaine et la vocation à la perfection dans la liberté et la créativité non pas de manière individualiste mais en communauté da façon solidaire. Le principe de subsidiarité défend et soutient l’autonomie de la personne. Chacun doit pouvoir exercer ses capacités selon ses responsabilités sans être court-circuité par des supérieurs hiérarchiques sauf en cas de faute ou de défaillance. La définition du bien commun accorde un rôle important à la société civile et à la démocratie participative.

Le mot « commun » rappelle le vivre ensemble, le partage, la solidarité. Nous retrouvons la même étymologie dans les mots « commune », « communication », « communion ».

Il y a quelques années, dans un échange avec des professeurs d’économie, les uns libéraux et les autres marxistes, tous sûrs d’eux-mêmes, j’avais été surpris de leurs sourires  condescendants ou narquois à l’égard de la doctrine sociale de l’Église qu’ils estimaient naïve. Les dernières crises sociales et économiques ont montré la gravité du problème. Il n’y a pas de quoi rire. La classe politique aussi bien de droite que de gauche  a été remise en cause voire rejetée. Chaque citoyen veut participer aux décisions politiques et au partage des biens. La définition du bien commun par la doctrine sociale de l’Église va dans le sens de la participation de chacun au service de tous et en particulier des plus faibles.

Fr. Manuel Rivero O.P.

Cathédrale de Saint-Denis de La Réunion

 

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Fr Manuel Rivero; « Intérêt général ou bien commun, les mots sont importants »…

 




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 14, 25-33)

« Celui qui ne porte pas sa croix

pour marcher à ma suite

ne peut pas être mon disciple. »

 

Et pour expliciter cette phrase, Jésus donne deux exemples :

– Avant de construire une tour, dont le but était de pouvoir veiller sur les biens des agriculteurs, notamment la vigne, il faut s’assurer qu’on ait les moyens de payer les travaux. La tour est un gage pour la réussite de l’entreprise du vigneron.

– Un chef d’armée doit s’assurer qu’il puisse avoir une chance de remporter la bataille, sinon il doit négocier pour limiter les dégâts.

Pour suivre Dieu, Jésus, il faut s’assurer qu’on puisse le suivre jusqu’au bout, et pour cela le mettre en premier.

Cela veut dire notamment, comme le dit l’évangile, mettre en arrière toutes les personnes que l’on connaît, surtout sa famille : « son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même sa propre vie. ». Ce qui ne veut pas dire qu’on n’ait plus de relations avec eux, qu’on se néglige soi-même, ce qui n’aurait pas de sens parce qu’ils sont aussi notre prochain, parce qu’on a conclu, pour certains, un ‘contrat’ avec eux, un sacrement : le mariage célébré devant Dieu pour le conjoint, le baptême où l’on s’engage à éduquer les enfants dans la foi chrétienne … mais Dieu passe avant.

Le Christ ne peut pas nous demander de ne pas aimer ceux qui nous sont les plus proches … mais il ne veut pas que nos préoccupations vis-à-vis d’eux envahissent toute notre vie.

Cela peut nous paraître difficile … C’est une partie de nos croix …

Comme pour beaucoup de choses, on ne peut pas le faire seul, avec nos propres forces. Mais si on se tourne vers Dieu, il nous donnera la possibilité de vivre ainsi.

Renoncer à soi-même, porter sa croix, c’est une condition pour suivre Jésus. Et il le dit bien : « Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple. ».

Mais ce n’est pas une condition préalable pour commencer à suivre Jésus. Cela peut venir peu à peu, au fur et à mesure que l’on marche avec le Christ, sur la route où il nous convie.

Dieu n’est pas pressé, il nous laisse le temps : « À tes yeux, mille ans sont comme hier, c’est un jour qui s’en va » (Psaume 89), et le psalmiste ajoute : « Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : que nos cœurs pénètrent la sagesse. », et la première lecture dit encore « Qui aurait connu ta volonté, si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? »

Alors, ouvrons nos cœurs au souffle de l’Esprit Saint, lisons la Parole de Dieu, prions Dieu de nous éclairer, de nous donner la sagesse … et un jour, qu’on ne peut définir à l’avance, dans un mois, dans un an, dans dix ans … nous pourrons vraiment suivre Jésus sur le chemin de notre vie qui deviendra le chemin de sa vie, le chemin de la Vie.

Nous ne sommes pas meilleurs que les apôtres qui ont pris du temps pour comprendre l’enseignement de Jésus ; au pied de la croix, il n’y avait que Jean parmi eux … Il faudra la résurrection et la Pentecôte pour qu’ils soient ‘libérés’, pour qu’ils mettent Jésus au premier rang dans leur vie et qu’ils se donnent totalement à l’annonce de la Parole de Jésus.

Mais cela ne veut pas dire qu’on a le temps … pour se mettre en route …

Au contraire, c’est en marchant au côté de Jésus qu’on apprend peu à peu la sagesse et que l’on se laisse transformer par l’Esprit Saint. Il n’y donc pas de temps à perdre.

Seigneur Jésus,

tu sais combien il est difficile pour nous

de te mettre toujours à la première place.

Nous avons tellement de choses

qui nous semblent prioritaires,

surtout avec nos proches,

que bien souvent tu passes après.

Aide-nous à te mettre toujours en premier,

pour être des témoins de ta présence parmi nous.

 

Francis Cousin

 

  

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Prière dim ordinaire C 23°




Rencontre autour de l’Évangile – 23ième Dimanche du Temps Ordinaire

« Renoncer à tout pour le Christ ! »

(Lc 14, 25-33)

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons  (Lc 14, 25-33)

Jésus vient de donner un certain nombre de conseils à ses disciples : qu’ils soient humbles (Lc 14,7-11) et attentifs aux blessés de la vie (14,12-14)… Qu’ils ne laissent ni les biens matériels ni les plaisirs les détourner de l’essentiel : l’invitation que Dieu adresse à tous les hommes à partager son festin (14,15-24). Et l’appel de Jésus se fait ici encore plus radical !

Et soulignons les mots importants 

  • Notre traduction liturgique a tout de suite bien interprété le verbe employé ici par St Luc, « miséô, haïr », en le traduisant par « préférer». Quand Dieu nous dit : « Honore ton père et ta mère » (Ex 20,12), et que Jésus se bat pour qu’il en soit vraiment ainsi (cf. Mc 7,8-13 ; Mt 19,16-22), il ne peut être question maintenant de les haïr ! De même pour mettre en pratique le cœur de la vie chrétienne, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Mc 12,31), il est impensable de se haïr soi‑même. Alors, que peut vouloir dire ce « préférer » ? Essayer de donner des exemples concrets.

  • Jésus aimait la vie… On le voit souvent invité par les uns et par les autres, accomplissant son premier signe en St Jean en offrant à une noce plus de 800 litres de « bon vin » (Jn 2,1-12), mangeant et buvant à tel point que certains le traitaient de « glouton et d’ivrogne » (Lc 7,34). Que peut donc vouloir dire ici « préférer» Jésus « même à sa propre vie » ?

  • Vient ensuite à nouveau une expression très forte : « porter sa croix » ; mais, en lisant bien le texte, cela se fera comment, dans quelles circonstances ? Or, quand Dieu nous adresse un appel, il nous donne toujours la grâce qui nous permet de répondre à cet appel. St Paul dit ainsi : « Dieu nous a appelés d’un saint appel, non en considération de nos œuvres, mais conformément à son propre dessein et à sa grâce qu’il nous a donnée » (2Tm 1,9).

            Suivre Jésus, mettre en pratique sa Parole, lui rester fidèle, est loin d’être toujours facile dans les multiples circonstances de nos vies. Si une difficulté se présente, Dieu donne sa grâce pour nous aider à la traverser. Mais une difficulté reste une difficulté : quand elle se présente, nous avons le choix entre deux attitudes, lesquelles ? Et Jésus ici nous invite à laquelle ? 

  • Jésus invite ensuite par des images (« bâtir une tour », « partir en guerre ») à bien regarder ces difficultés en face. Contre quel danger nous met-il en garde ? Mais souvenons-nous de la phrase précédente : « prendre sa croix pour marcher derrière moi». Qui a ici l’initiative première de la démarche, nous ou Jésus ? Et Jésus peut-il nous demander ce qu’il nous sait être incapables d’accomplir par nous‑mêmes ?

Conclusion : en tout ce que nous désirons entreprendre pour lui, quelle devrait être notre première attitude ?

Pour l’animateur 

  • Les exemples concrets dépendront de la vie et de la situation de chacun, et ils sont tous les bienvenus… Le Père appelle tout homme à « venir à Jésus » son Fils Unique envoyé dans le monde pour notre salut à tous (Jn 3,16-18). Et puisque toute démarche vis-à-vis de Dieu n’est possible que par un Don qui vient de Lui, « venir à Jésus » est un Don du Père : « Nul ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire » (Jn 6,44), « si cela ne lui est donné par le Père » (Jn 6,65). Et tout Don de Celui qui est Amour (Jn 4,8.16) ne peut qu’être de l’ordre de l’amour… Et maintenant, qu’allons-nous choisir si Dieu nous appelle, d’une manière ou d’une autre, à quitter nos proches ? Et pourtant, l’amour que nous leur portons est bien légitime, il n’est pas à renier ! Mais il sera vécu autrement, avec le sacrifice, de notre côté, de cette proximité qui nous est chère…

            Nous sommes tous pécheurs… Il se peut aussi que ces proches que nous aimons nous invitent à agir d’une manière contraire à notre foi. Qu’allons-nous choisir ? Leur obéir, et tout ira bien avec eux, mais c’est notre amour pour Dieu qui sera blessé… Ou les contrarier, au risque de se voir rejeter ? Mais si l’amour qui unit deux personnes est authentique, il ne peut être à sens unique. Et un amour sincère ne peut que se construire sur la vérité. Le choc de la contrariété passé, l’amour vrai saura, avec le temps, reconnaître où est la vérité et la justice, et surmonter l’épreuve…

            Nous sommes tous pécheurs… Ces difficultés peuvent se rencontrer aussi bien dans notre famille, que dans notre communauté paroissiale ou religieuse… Jésus est le premier à en être conscient lorsqu’il demande à Pierre : « M’aimes-tu plus que ceux-ci ? » (Jn 21,15). Et les premiers à les entourer à ce moment-là étaient « Thomas, Nathanaël, les fils de Zébédée », Jacques et Jean (Mc 1,19), et « deux autres disciples » (Jn 21,2). Avec Pierre, ils étaient sept en tout, un chiffre symbole de plénitude qui renvoie à l’ensemble de l’Eglise primitive…

  • Nous sommes tous pécheurs… Des désirs égoïstes où nous nous recherchons nous-mêmes, d’une manière ou d’une autre, ne cessent de frapper à la porte de nos cœurs. Qu’allons-nous choisir ? Leur obéir et nous laisser entrainer sur un chemin contraire à celui de l’amour, amour pour Dieu, amour pour celles et ceux qui nous entourent, amour qui nous invite à nous donner ? Et dans des circonstances que nul ne choisit pour lui-même, ce choix de la foi peut aller jusqu’au don total de soi, la mort pour le Christ, le martyre…

  • Choisir implique toujours un renoncement à ce que nous laissons de côté. Renoncer à une fausse harmonie humaine, à notre égoïsme, là est la vraie Croix. Et c’est tous les jours, d’une manière ou d’une autre, que nous sommes invités à la prendre… Nous n’y arrivons pas à chaque fois… L’important est de repartir sans cesse… La Miséricorde infinie qui nous entoure nous presse de nous relever et de nous relever encore… Et de pardon en pardon, c’est Elle qui nous donnera d’atteindre le but : une Vie éternelle et Bienheureuse dans la Maison du Père !

  • Humainement parlant, prendre sa Croix est difficile… Laissés à nos seules forces, l’aventure est même impossible. « Pour les hommes c’est impossible, mais pour Dieu tout est possible» (Mt 19,26). Et Jésus connaît nos failles, nos limites et nos faiblesses… Si nous arrivons à tout lui offrir, ce qui est « semé dans la faiblesse», ressuscitera dans sa force (1Co 15,43) car « ce qui est impossible pour les hommes est possible pour Dieu » (Lc 18,27). Et plus nous nous appuierons sur lui, plus notre Croix sera « légère » et « facile à porter » : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger » (Mt 11,28-30).

  • Avec ces deux images, « bâtir une tour, partir en guerre contre un autre roi », Jésus nous invite à bien réfléchir, à regarder les choses en face, à bien nous connaître pour éviter de nous lancer dans une aventure qui, manifestement, dépasse nos forces. La grâce ne supprime pas la nature ! Elle l’accomplit…

          – L’image de la tour est peut-être un clin d’œil à « la tour de Babel » (Gn 11,1-9), présomption, folie orgueilleuse des hommes qui se sont appuyés sur leurs propres forces, et cela pour atteindre le Ciel ! Telle était au début l’attitude de Pierre : « Si tous succombent à cause de toi, moi je ne succomberai jamais » (Mt 26,33). Et Pierre tombera. Mais il se relèvera grâce à la Miséricorde de Dieu, et en s’appuyant cette fois sur Lui, il mourra en martyre à Rome !

          – L’image de la guerre souligne le fait que suivre Jésus est un combat avant tout contre nous-mêmes, notre péché, et aussi face à celui des autres, et face au « Prince de ce monde » (Jn 12,31 ; 14,30 ; 16,11) qui ne pense qu’à « voler, égorger et faire périr » (Jn 10,10). Seule la prière, qui est accueil du Don de Dieu, l’Esprit Saint, nous permet de vaincre grâce à Lui toutes ces difficultés.

 

ENSEMBLE PRIONS 

« Tournez les yeux vers l’hôte intérieur, sans rien vouloir que cette Présence ; vivez de l’Esprit pour être celui qui donne son Nom à votre Père. Tournons les yeux vers l’hôte intérieur, car il habite nos silences et nos prières » (Claude Tassin).

 

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23ème Dimanche Temps Ordinaire

 

 




Sainteté et humilité (Thomas Merton)

Il n’y a pas de paix possible pour l’homme qui s’imagine qu’un talent, une grâce ou une vertu quelconques le séparent et le placent au-dessus des autres. Solitude ne signifie pas séparation. Dieu ne nous donne ni talents, ni grâces, ni vertus pour nous seuls. Nous sommes membres d’un même corps et tout ce qu’un membre reçoit doit bénéficier au corps tout entier. Ce n’est pas pour que mes pieds soient plus beaux que mon visage que je les lave.

Les saints sont heureux de leur sainteté, non parce qu’elle les sépare de nous et les place au-dessus de nous, mais au contraire parce qu’elle les rapproche de nous, et en un certain sens, les place au-dessous de nous. Leur sainteté leur est donnée pour qu’ils puissent nous aimer et nous servir – car les saints sont des médecins et des infirmières qui sont supérieurs aux malades par le fait qu’ils sont en bonne santé et savent comment les guérir, et qui cependant se font leurs serviteurs puisqu’ils consacrent cette santé et cette science à les guérir.

Les saints sont ce qu’ils sont, non parce que leur sainteté les rend admirables aux autres, mais parce qu’elle leur permet d’admirer tous les autres. Elle leur donne une lucidité compatissante qui les aide à discerner le bien chez les plus affreux criminels. Elle les délivre du fardeau de juger les autres, de les condamner, et leur apprend à faire apparaître le bien qui est en eux par la pitié, la miséricorde et le pardon. L’homme devient saint non parce qu’il se croit différents des pécheurs, mais parce qu’il comprend qu’il est semblable à eux, et qu’ils ont tous besoin de la miséricorde de Dieu !

C’est dans l’humilité que se trouve la vraie liberté. Tant que nous sommes obligés de défendre le moi imaginaire que nous croyons important, nous perdons la paix de l’âme. Dès que nous comparons cette apparence avec les apparences des autres, nous perdons toute joie, parce que nous avons affaire à des choses imaginaires et qu’il n’y a pas de joie dans ce qui n’existe pas.

Dès que nous commençons à nous prendre au sérieux et à nous imaginer que nos vertus ont de l’importance parce qu’elles sont nôtres, nous devenons prisonniers de notre vanité et nos meilleures actions nous aveuglent et nous trompent.

Alors, pour nous défendre, nous commencerons à voir des péchés et des fautes dans toutes les actions du prochain. Et plus nous attacherons une importance disproportionnée à nous-mêmes et à ce que nous faisons, plus nous aurons tendance à nous créer une fausse idée de nous-mêmes en condamnant les autres. Parfois les hommes vertueux sont malheureux et amers, parce qu’ils en sont arrivés, inconsciemment, à croire que leur bonheur dépend de leur supériorité sur les autres.

Lorsque l’humilité délivre l’homme de l’attachement qu’il porte à ce qu’il fait et à ce qu’on dit de lui, il découvre que la joie parfaite n’est possible que dans une abnégation complète. C’est seulement lorsque nous ne prêtons plus la moindre attention à nos actions, à notre réputation et à nos mérites, que nous sommes enfin entièrement libres de servir Dieu, et Lui seul.

 

Thomas Merton (Semences de contemplation – Editions Points 2010).




Le père Laval, le père Lataste et le pape François, apôtres des prisons (Fr Manuel Rivéro O.P.)

 Dans ses voyages apostoliques, le pape François se rend souvent dans les prisons pour rencontrer les personnes détenues. Il avoue humblement se poser cette question : « Chaque fois que je franchis le seuil d’une prison, pour une célébration ou pour une visite, je me demande toujours : ‘Pourquoi eux et pas moi ?’ ».

Au Mexique, le 17 février 2016, lors de sa visite à la prison de Ciudad Juarez, le pape avait offert un crucifix en cristal : « « Le Christ sur la Croix est la plus grande fragilité de l’humanité. Pourtant, avec cette fragilité, il nous sauve, il nous aide, nous fait avancer et nous ouvre les portes de l’espérance.» Il a aussi vu dans la prison le symptôme des problèmes sociaux. Les drames des personnes détenues renvoient aux failles des familles et du système éducatif, économique et social. Il serait trop facile et injuste de déclarer sans plus que les condamnés l’ont bien cherché et qu’ils n’ont qu’à payer les conséquences de leurs actes.

La réinsertion rappelle le travail de prévention à faire. Don Bosco, le grand apôtre de la jeunesse, se rendant un jour dans une prison avait ressenti ce besoin de s’occuper des jeunes avant la prison.

Le pape François plaide aussi pour une « conversion culturelle urgente »[1] des mentalités de manière à veiller à la réinsertion et à la resocialisation des détenus sans rester prisonniers du passé.

Le codé pénal français précise le sens de la peine : la sanction et l’amendement, l’insertion ou la réinsertion[2]« Si l’on fait grâce au méchant, il n’apprend pas la justice »[3], enseigne la Bible. Les crimes et les délits doivent être punis. Les citoyens ont droit à la sécurité. Mais n’oublions pas le but de la réinsertion. L’opinion publique veut punir mais ce n’est pas le seul but de la prison. 

Toute personne peut se trouver en prison.  Il suffit d’avoir trop bu à un repas d’anniversaire pour découvrir les risques de la conduite en état d’ébriété et le malheur de provoquer un accident. Un coup de colère peut aboutir au meurtre.

La Réunion peut être fière de ses valeurs culturelles et spirituelles. Chaque génération reçoit la mission de transmettre à la jeunesse le sens d’une appartenance heureuse afin de pouvoir dire : « Nous sommes un grand peuple ». La grandeur d’une civilisation se manifeste dans le soin qu’elle prend des faibles en veillant  à son inclusion et non à son exclusion. À ce propos, il est bon de rappeler le préambule de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999[4] : « La force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres ». Les détenus dans nos trois prisons réunionnaises font partie des personnes faibles. L’attitude et le comportement à leur égard parlent des qualités morales et spirituelles de La Réunion.

La prison joue un rôle de test dans l’évaluation des politiques. Les normes européennes pour la détention font partie du projet européen. La France, pays des droits de l’homme, a été blâmée il y a quelque temps par le Conseil de l’Europe à Strasbourg pour non-respect dans les prisons des conditions humaines dignes.

Le bienheureux père Laval (1803- 9 septembre 1864) se rendait quotidiennement à la prison de Port-Louis (Maurice) pour aider et soutenir spirituellement les détenus dans l’épreuve.

Quand le bienheureux père Lataste O.P. (5 septembre 1832-1869) avait été envoyé par ses supérieurs pour prêcher aux femmes de la prison de force de Cadillac, près de Bordeaux, dans le sud de la France, il s’y était rendu, le cœur serré, avec « la pensée que ce serait sans doute inutile. »

En voyant ces femmes plongées dans des conditions misérables dans une prison sordide, son premier mouvement avait été de reculer. Mais le père Lataste s’était repris pour dire : « Mes chères sœurs ».

Ces femmes au visage fermé s’ouvrirent à la grâce, rayonnantes, en découvrant l’amour de Jésus, à l’image des fleurs qui se relèvent fraîches  après la pluie.

Saint Paul décrit ce mouvement vers l’avenir : « Oubliant le chemin parcouru, je vais droit de l’avant, tendu de tout mon être, et je cours vers le but, en vue du prix que Dieu nous appelle à recevoir là-haut, dans le Christ Jésus »[5].

Le changement humain est possible. Dieu ouvre un chemin nouveau à ceux qui se tournent vers lui.

                                                                           Fr. Manuel Rivero O.P.

                                                               Aumônier de la prison de Domenjod

 

[1] Lettre du pape François au centre de détention Due Palazzi de Padoue, le 17 janvier 2017.

 

[2] Cf. Article 130-1, créé par LOI n°2014-896 du 15 août 2014 – art. 1.

 

[3] Is 26,10.

[4] Cf. https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19995395/index.html

[5] Épître de saint Paul aux Philippiens 3, 13-14.




Audience Générale du Mercredi 28 Août 2019

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 28 Août 2019


Frères et sœurs, en mentionnant le Portique de Salomon comme l’un des lieux de rendez-vous des croyants, saint Luc insiste sur les signes et les prodiges qui accompagnent la parole des Apôtres et sur leur attention particulière aux malades. Car, à leurs yeux comme aux yeux des chrétiens de tous les temps, les malades sont des frères en qui le Christ est présent d’une manière spécifique, pour se laisser chercher et trouver par nous. Parmi les Apôtres, émerge la personne de Pierre qui, au nom de la mission reçue du Ressuscité, exerce une primauté au sein de leur groupe. Mais si Pierre s’approche des civières et passe parmi les malades, c’est pour que soit manifesté, à travers ses paroles et sa présence physique, le Christ vivant et agissant. De fait, Pierre ne prétend pas agir en son nom propre : il est celui qui accomplit les œuvres du Maître. Ainsi, rempli de l’Esprit Saint, il permet à Dieu de manifester sa proximité et de faire en sorte que les blessures de ses enfants deviennent le lieu théologique de sa tendresse. Car toute sa personne, et même son ombre, irradie la vie du Ressuscité : les malades sont guéris et le monde rend gloire au Père, malgré la haine suscitée par son action de guérison. C’est pourquoi Pierre est la figure de l’Église qui sur la terre remet ses enfants debout et les oriente vers les biens du Ciel.

Je suis heureux de saluer les pèlerins venus de France, en particulier de Rennes, de Poissy, de Retiers et de L’Isle en Dodon, ainsi que d’autres pays francophones. Demandons à l’Esprit Saint, par l’intercession de Pierre, de nous rendre forts intérieurement pour être assurés de la présence aimante et consolatrice du Seigneur à nos côtés. Et que l’Esprit Saint nous aide à la manifester à tous, et d’une manière particulière aux malades. Que Dieu vous bénisse !




22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 14, 1.7-14)

 

« Quiconque s’élève sera abaissé,

et qui s’abaisse sera élevé. »

 

Ce que dit Jésus dans l’évangile de ce jour pourrait être interprété comme une leçon de vie, une manière de se bien comporter dans notre vie de tous les jours.

Mais on aurait tort de limiter son discours à cela. Jésus n’est pas un écrivain à sensation comme on en trouve tant aujourd’hui, genre « 1000 astuces pour réussir dans la vie », mais plutôt un orateur qui distille quelques fondements pour réussir sa vie :

– « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 15,12)

– « Pardonnez jusqu’à soixante-dix fois sept fois » (Mt 18,22)

– « Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur » (Mt 20,26) …

Ce qu’on pourrait résumer par : Amour, Justice, Humilité.

Parce qu’il faut bien situer quel est le but de notre vie, et agir en fonction de ce but.

Et pour nous chrétiens, le but de notre vie ne se limite pas à notre vie terrestre, mais bien à accéder au Royaume des cieux, dans la Vie Éternelle.

Et c’est encore de cela dont parle Jésus aujourd’hui.

Les grands saints n’avaient pas d’ambition personnelle, mais leur seule ambition était de vivre selon l’évangile, et d’attirer les autres personnes à vivre selon l’évangile. Ils se sont mis dans une situation d’humilité, se sont fait petits, laissant Dieu agir en eux.

Un exemple : François d’Assise, qui quitte la vie dorée que son père lui avait préparée pour devenir pauvre ; et il le fait de manière forte, rendant tout ce qu’il avait reçu de son père jusqu’à se dénuder pour aller se réfugier dans les bras de l’évêque d’Assise. Quitter le ’’monde’’ pour Dieu.

Et si on regarde les fondateurs d’ordre religieux, nombre d’entre eux ont été évincés de la direction de leur ordre par des ambitieux qui voulait se faire une place aux yeux du ’’monde’’ … mais maintenant, on ne parle plus d’eux (ou en termes négatifs), alors que les fondateurs ont souvent été reconnus comme saints ou bienheureux par l’Église. Je pense entre autres à saint Jean-Baptiste de la Salle, ou à sainte Jeanne Jugan qui à la fin de sa vie ne faisait plus que des activités de ménages, et qui côtoyait des novices qui la prenaient un peu de haut, ne sachant pas qu’elle était la vraie fondatrice des petites sœurs des pauvres …

« Quiconque s’élève sera abaissé, et qui s’abaisse sera élevé. »

Alors pour nous, faut-il toujours s’abaisser, se mettre parmi les derniers ? …

Certainement pas.

Si on se met dans les derniers dans l’espoir d’être élevé … on risque fort de terminer sa vie, terrestre et éternelle, dans les derniers.

Jésus nous invite à la modestie, à l’humilité, pas à ne rien faire.

Au contraire : il nous a procuré des dons, des talents, … et il attend qu’on les fasse fructifier, pour notre bien-être et surtout pour celui des autres et de Dieu.

Jésus n’est pas contre l’ambition des personnes, mais il veut que cette ambition ne soit pas concentrée sur soi-même, mais qu’elle soit pour le bien commun, au service de tous.

« En tant qu’artisan menuisier, [Jésus] savait bien que la clé de la réussite est le bon travail, fait avec honnêteté. Ce qu’on apprécie à la longue n’est pas le paraître, mais la manière d’être, non pas ce que quelqu’un aimerait bien être, mais ce qu’il est vraiment en tant qu’individu. » (Cardinal Christoph Schönborn)

Seigneur Jésus,

Tu aimes les gens ambitieux,

ceux qui sont prêts à se sacrifier

pour une cause …

à condition que ce ne soit pas

pour se mettre en avant,

mais que ce soit la cause

qui soit mise en avant,

dans le respect de la justice

et de la loi morale.

Fais que nous soyons ambitieux

pour ta plus grande gloire.

 

Francis Cousin

 

  

 Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le titre suivant;

Prière dim ordinaire C 22°




Audience Générale du Mercredi 21 Août 2019

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 21 Août 2019


Frères et sœurs, la communauté chrétienne naît de l’effusion de l’Esprit Saint et elle grandit grâce au partage entre les frères et sœurs du Christ. La vie eucharistique, la prière et la prédication des Apôtres font des croyants une multitude n’ayant « qu’un cœur et qu’une âme ». Leur lien avec le Christ instaure entre eux des relations d’un genre nouveau, qui s’expriment aussi dans le partage des biens matériels à l’exemple de Barnabé qui vendit son champ et en donna le revenu aux Apôtres. Etre membre du Corps du Christ rend les croyants responsables les uns des autres : les plus forts soutiennent les plus faibles de sorte que personne ne connaisse l’indigence. Eloigner la plaie de la pauvreté, est donc un engagement de l’Eglise depuis toujours. Au contraire, le refus de partager en vérité éteint le feu de la communion et conduit à la mort, selon le triste exemple d’Ananie et de sa femme qui, hypocrites dans leur générosité, ont manifesté une appartenance partielle et opportuniste à l’Eglise. Une vie établie sur la seule mise à profit des situations, au détriment des autres, conduit à la mort intérieure. Que l’Esprit de tendresse nous aide toujours à vivre la solidarité chrétienne !

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier un groupe de prêtres jubilaires du Séminaire Pontifical Français de Rome, accompagnés de Mgr Pierre Antoine Bozo et de Mgr Matthieu Rougé. La solidarité chrétienne, bien différente d’une simple assistance sociale, fait partie de la nature de l’Eglise. Que l’Esprit Saint nous aide à vivre en vérité la solidarité que demande l’Evangile. Que Dieu vous bénisse.