Introduction à l’Evangile selon St Marc.
L’Auteur
St Marc était d’origine juive ; « l’Evangile de Marc » ne cite pas son nom, mais au moment de l’arrestation de Jésus, en 14,51, on lit :
Mc 14,51 (Jésus est arrêté, tous prennent la fuite) : « Un jeune homme le suivait, n’ayant pour tout vêtement qu’un drap, et on le saisit; (52) mais lui, lâchant le drap, s’enfuit tout nu ».
Et la note de la Bible de Jérusalem précise que « beaucoup de commentateurs ont vu dans ce jeune homme l’évangéliste lui-même ». En effet, ce détail si simple, si pittoresque, si humain n’apparaît que dans l’Evangile de Marc… Et on comprend sans peine qu’il ne l’ait pas oublié !
De leur côté, les Actes des Apôtres, écrits par St Luc, parlent d’un certain Jean, surnommé Marc (12,12.25 ; 15,37) ; parfois un seul de ces noms apparaît, Jean (13,5.13) ou Marc (15,39). Nous sommes certainement face à la même personne, d’origine juive. Sa mère s’appelait Marie, comme la Mère de Jésus, et elle habitait Jérusalem. Sa maison accueillait la première communauté chrétienne pour la prière et c’est là que Pierre se rendra après sa délivrance miraculeuse de prison (Ac 12,12).
Marc aurait ensuite été un temps compagnon de St Paul, puis de St Pierre qu’il connaissait bien. La première Lettre de Pierre se termine d’ailleurs par :
1P 5,13 : « La communauté des élus qui est à Babylone (Rome) vous salue, ainsi que Marc, mon fils. »
Papias, Evêque d’Hiérapolis (dans l’actuelle Turquie) a écrit vers 110 ap JC : « Marc était devenu l’interprète de Pierre ; il a écrit avec exactitude… tout ce dont il se souvenait de ce qui avait été dit ou fait par le Seigneur. Car il n’avait pas entendu ou accompagné le Seigneur ; mais, plus tard, comme je l’ai dit, il a accompagné Pierre. Celui-ci donnait ses enseignements selon les besoins… (et Marc) n’a eu en effet qu’un seul dessein, celui de ne rien laisser de côté de ce qu’il avait entendu et ne tromper en rien dans ce qu’il rapportait ».
Souvenons-nous de deux éléments importants :
1) Marc fut l’interprète de Pierre ; il suivit Pierre et mémorisa ses instructions.
2) Marc fut fidèle en écrivant ; sa fidélité est celle de Pierre lui-même.
Marc est le premier à avoir écrit un Evangile (vers 60-70)… Lorsque Matthieu et Luc s’y mettront eux aussi quelques années plus tard (vers 70-80), ils auront l’Evangile de Marc sous les yeux, et ils y puiseront abondamment. Or, lire Marc, c’est écouter Pierre… Et l’on s’aperçoit que cette Parole de Jésus s’est accomplie jusques dans les textes fondateurs que l’Eglise ne cessera de scruter jusqu’à la fin des temps : « Eh bien ! moi je te dis : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église » (Mt 16,18)…
Marc aurait donc écrit son Evangile à Rome pour des chrétiens d’origine non juive qui ne connaissaient pas la Palestine. Marc est ainsi soucieux d’expliquer les coutumes juives (Mc 7,1-5 ; 14,12 ; 15,42-43), il traduit les mots d’origine juive (3,17 ; 5,41 ; 7,11 ; 7,34 ; 10,46 ; 14,36 ; 15,34)… Il va aussi expliquer que les deux piécettes données par une pauvre veuve en offrande au Temple de Jérusalem correspondent à un quart d’as, la monnaie romaine (Mc 12,42)…
Enfin, Marc aurait écrit son Evangile vers les années 65-70 ap JC. Il utilise la langue grecque qui était, depuis Alexandre le Grand (330 av JC), la langue officielle de tout le Bassin méditerranéen.
II – Le premier verset de l’Evangile: le plan suivi par St Marc
Le premier verset de l’Evangile est spécialement important : « Commencement de l’Evangile de Jésus Christ Fils de Dieu« .
En quelque mot, tout est dit. Nous reprendrons ces éléments plus tard, mais donnons-en tout de suite les grandes lignes :
Commencement… Tout d’abord, Marc emploie le même mot que le tout début du Livre de la Genèse : nous sommes ici à un nouveau commencement, une nouvelle création qui va accomplir la première…
Evangile vient du grec εὐαγγελίον qui à son tour a été composé à partir de deux mots : l’adverbe εὐ qui signifie « bien » et le verbe ἀγγέλω, « porter un message, une nouvelle ; annoncer, faire savoir ». D’où, « annoncer une Bonne Nouvelle ».
Dans le monde profane de l’époque, une Bonne Nouvelle est d’abord ce qui rend heureux : une victoire militaire, la paix, un tyran renversé, un nouveau roi, son mariage, la naissance d’un descendant…
« Annoncer une Bonne Nouvelle » est employé notamment dans le Livre du prophète Isaïe, et beaucoup pensent que Jésus Lui-même aurait puisé dans tous ces textes, qu’il connaissait par cœur, cette notion de « Bonne Nouvelle ». La synagogue de Nazareth possédait en effet un rouleau du prophète Isaïe (les livres étaient rares et chers à l’époque), lu et relu à chaque sabbat (cf. Lc 4,16-22). Or les synagogues avaient aussi des « écoles synagogales » où les enfants du village apprenaient à lire et à écrire… Ce que Jésus a fait avec notamment le rouleau du Livre d’Isaïe… On comprend dès lors qu’Isaïe soit le prophète qu’il cite le plus souvent…
Is 40,9 : « Monte sur une haute montagne, « annonciatrice de bonne nouvelle » à Sion ; élève et force la voix, « annonciatrice de bonne nouvelle » à Jérusalem ; élève la voix, ne crains pas, dis aux villes de Juda : « Voici votre Dieu ! » »
Is 52,7 : « Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds du messager qui annonce la paix, « messager de bonne nouvelle » qui annonce le salut, qui dit à Sion : « Ton Dieu règne. » »
Or la première parole de Jésus dans l’Evangile de Marc est justement :
Mc 1,15 (TOB) : « Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s’est approché : convertissez-vous et croyez à l’Evangile (la Bonne Nouvelle) ».
La Bonne Nouvelle est donc la proximité du Règne de Dieu : Dieu est là, tout proche, et il désire régner dans ton cœur et dans ta vie pour ton bonheur. Vas-tu l’accueillir ?
En Isaïe, Dieu allait venir en personne pour délivrer son peuple de la main des Assyriens qui les avaient déportés dans leur pays. Jésus Christ est Celui qui est venu nous délivrer du péché qui nous opprime et nous rend esclave, pour nous ramener dans le Royaume de Dieu, c’est à dire nous permettre de retrouver une vie vécue en communion avec Dieu, « dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu » (Rm 8,21), la paix du cœur (Jn 14,27), la joie (Jn 15,11).
Jésus : Ce nom signifie « le Seigneur Sauve »… Toute sa vie, toute sa mission est résumée ici… Avec Lui et par Lui, Dieu nous sauve, et nous délivre du mal, des ténèbres, du Mauvais…
Christ est le mot grec, Χριστός qui correspond à Messie en hébreu ; il vient du verbe Χρίω qui veut dire « oindre ». Les nouveaux rois étaient « oints » par un prophète : il versait un peu d’huile parfumée sur leur tête, symbole de l’Esprit Saint que Dieu donnait au roi pour gouverner son Peuple en son Nom… Plus tard, quand la royauté disparaîtra, ce sera le Grand Prêtre, devenu chef du peuple, qui recevra l’onction. Le rite sera ensuite étendu à tous les prêtres… Enfin, les prophètes étaient appelés eux aussi « les oints du Seigneur » (cf Is 61,1), même s’ils n’étaient pas oints officiellement avec de l’huile ; mais c’était une façon de rappeler que Dieu les avait consacrés à son service et que l’Esprit de Dieu reposait sur eux.
« Christ » intervient sept fois en St Marc (1,1 ; 8,29 ; 9,41 ; 12,35 ; 13,21 ; 14,61 ; 15,32), un chiffre qui, dans la Bible, est habituellement symbole de Plénitude… Dès le cinquième mot de l’Evangile, le lecteur sait donc que Jésus est le Christ, et la première apparition de ce titre a valeur de programme pour l’Evangile tout entier : Marc a pour but de nous conduire à la foi en Jésus, le Christ. Puis, « Christ » disparaît pendant près de 8 chapitres, pour intervenir de nouveau dans la bouche même de Pierre, première confession de foi du « premier » apôtre… Pierre, le premier, semble être arrivé au but : reconnaître que Jésus est le Christ (8,29), mais cette reconnaissance est encore imparfaite, et tout le reste de l’Evangile sera une explicitation et une purification pour bien comprendre comment Jésus est le Christ.
La première partie de l’Evangile de Marc, après l’introduction (1,1-13), va donc de 1,14 à 8,30, une partie jalonnée de questions sur Jésus (1,27; 2,7… 4,41…) qui trouveront un début de réponse avec cette profession de foi de Pierre.
Fils de Dieu. En Israël, le roi était appelé « fils de Dieu », mais il ne l’était pas au sens fort. C’était un homme comme tout le monde, mais Dieu s’était rendu particulièrement proche de lui pour l’aider à bien accomplir la mission particulière à laquelle il l’appelait.
Ici, pour St Marc, Jésus est « Fils de Dieu » au sens fort, et tout l’Evangile sera un cheminement vers la découverte de ce mystère. Au moment du baptême et au moment de la Transfiguration (1,11 et 9,7), une voix viendra du ciel et dira : « Tu es mon Fils Bien-Aimé » ou « Celui-çi est mon Fils bien-Aimé ». Jésus aussi se présentera indirectement comme le Fils Bien Aimé envoyé par le propriétaire de la vigne dans la Parabole des vignerons homicides (Mc 12,6). Et pendant sa Passion, devant le Grand Prêtre, pour la première et seule fois dans tout l’Evangile, il dira publiquement et clairement qu’Il est Fils de Dieu : « Es-tu le Christ, le Fils du Béni?« … « Je le suis » (Mc 14,62). Et en disant, dans le grec des Evangiles, « Egô eimi », il va implicitement bien plus loin puisqu’il reprend le Nom divin autrefois révélé à Moïse dans l’épisode du Buisson ardent (Ex 3,14). Le Mystère de la divinité du Fils apparaît avec encore plus de splendeur lorsqu’il est méprisé, abaissé, insulté, bafoué… Car « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16), Amour Infini, totalement pur et gratuit, un Mystère qui se révèle avec d’autant plus de force lorsqu’il se trouve face à nos ténèbres, nos misères, nos refus, notre violence, notre cruauté… « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent » (Lc 6,27-35). Dieu est le premier à mettre en pratique ce qu’il nous demande… Alors « vous serez les fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5,45). Tout homme n’a-t-il pas été créé « à l’image et ressemblance de Dieu » (Gn 1,26). Telle est donc la direction vers laquelle Jésus nous entraine, la « nouvelle création » qu’il veut mettre en œuvre, le nouveau commencement qu’il ne cesse de nous proposer chaque jour… « Pour les hommes », laissés à leurs seules forces d’homme, « c’est impossible, mais pas pour Dieu, car tout est possible à Dieu » (Mt 19,26). « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1,8).
Enfin, en voyant comment Jésus venait de mourir, un centurion romain dira : « Vraiment, cet homme était Fils de Dieu » (Mc 15,39)…
Toute la deuxième partie de cet évangile, de 8,31 jusqu’à la fin du ch 15, est donc une révélation progressive du « comment Jésus sera effectivement le Christ, le Messie », et aussi que le mystère de sa Personne va bien au delà des apparences : Il est vraiment le Fils Unique de Dieu… et le centurion l’a perçu dans sa façon de souffrir et de mourir…
Les premiers mots de l’Evangile de Marc sont en fait une présentation de l’œuvre toute entière, centrée sur Jésus Christ Fils de Dieu… Elle a pour but de nous conduire à la foi en Jésus, et donc de faire de nous des disciples qui vont accueillir la Bonne Nouvelle du Salut pour ensuite devenir des missionnaires de l’Evangile par notre témoignage…
Dans la première partie, qui se déroule toute entière en Galilée, en découvrant les miracles de Jésus, en écoutant sa Parole, nous sommes conduits à reconnaître que Jésus est le Christ. Dans la seconde partie, nous suivons les disciples depuis Césarée de Philippe, à l’extrême nord de la Galilée jusqu’à Jérusalem, et avec eux nous comprenons que le Messie devait souffrir beaucoup, mourir et ressusciter. Le disciple de Jésus doit aussi prendre sa croix pour marcher à sa suite…
Enfin, la dynamique missionnaire se perçoit dans l’emploi du mot Evangile : trois fois au tout début, où Jésus nous révèle son contenu (1,1.14-15) ; puis en 8,35 et 9,29 où Jésus forme ses disciples : il faut prendre sa croix pour l’Evangile, et quitter maison, frères, sœurs, mère, père… Et puis, ces disciples annonceront à leur tour l’Evangile aux nations (13,10), au monde entier (14,9), à toute la création (16,15)…
D. Jacques Fournier
Plan de l’Evangile selon St Marc
Introduction : 1,1-15. Les personnages principaux sont présentés, les idées fondamentales mises en place ; le destin de Jésus est déjà symboliquement suggéré.
(Les versets 14-15 pourraient former une « section charnière » servant de fin à l’introduction et de début à la première partie.)
Première partie : 1,14-8,33. Jésus, à travers sa mission, révèle qu’il est le Christ, le Messie promis.
- a) 1,14-3,6 : Jésus cherche à manifester sa vraie mission devant les foules.
- b) 3,7-6,6a : Jésus fait des disciples pour étendre sa mission.
- c) 6,6b-8,33 : la reconnaissance de Jésus comme Messie est un sommet, mais le refus d’envisager pour lui la passion relance le mouvement.
(La confession de Pierre, avec la guérison qui précède, constitue comme une charnière, qui appartient à la fin de la première partie et au début de la seconde)
Deuxième partie : 8,22-15,47. Jésus, à travers sa passion et sa mort, révèle qu’il est le Fils de Dieu.
- a) 8,22-10,52 : annonces de la Passion.
- b) 11,1-13,37 : à Jérusalem.
- c) 14,1-15,47 : la passion.
Conclusion : 16,1-20
- a) 16,1-8 : le tombeau vide
- b) 16,9-20 : apparitions et envoi en mission…
Paul LAMARCHE, Evangile de Marc (Ed Gabalda, 1996)
Introduction à St Marc : texte en PDF
3e dimanche ordinaire B par P. Claude TASSIN (Spiritain)
Commentaires des Lectures du dimanche 25 janvier 2015
Jonas 3, 1-5.10 (Á l’appel du prophète, les païens se convertissent)
Dieu avait ordonné à Jonas d’annoncer à Ninive sa destruction. « Jonas », en hébreu, signifie *« pigeon » (ou « colombe »), avec la dose de naïveté que nous conférons en français à ce mot. Jonas a voulu fuir sa mission pour ne pas être « pigeonné ». En vrai prophète, il a compris d’avance qu’il perdrait la face, puisque Dieu n’exécuterait pas sa sentence : « Je savais bien que tu es un Dieu tendre et miséricordieux… renonçant au châtiment » (4, 2). Mais un prophète n’échappe pas au Seigneur. Un poisson l’a miraculeusement ramené au point de départ de sa mission.
Effectivement, Jonas prononce un oracle de condamnation : « Ninive sera détruite. » Effectivement, les Ninivites se sont convertis, et Dieu revient sur sa décision. Le lecteur de ce conte prophétique apprend ainsi qu’il n’y a plus de condamnation inconditionnelle : Dieu n’est pas tenu de donner raison à ses envoyés (comparer la plainte de Jérémie 20, 7-9). Il n’est tenu qu’à sa propre parole, qui est tendresse et miséricorde.
Jonas a prononcé « un kérygme », un slogan résumant le message dont Dieu charge ses envoyés. Tout kérygme invite à la conversion. Jésus prononce le kérygme du règne de Dieu : « convertissez-vous et croyez à l’Évangile. Il parlera du « signe de Jonas » (Luc 11, 29-30). Les Ninivites n’ont eu pour signe que la parole de Jonas ; de même, Jésus n’a à donner que sa parole qui nous invite à la conversion.
* Jonas, « le pigeon ». Dans l’histoire de Jonas, tous les païens sont sympathiques, les marins dans la tempête, qui s’excusent auprès du Seigneur de se débarrasser de leur passager néfaste, et les Ninivites, qui font même jeûner les animaux (3, 7). Seul Jonas reste grincheux de bout en bout. Avec un humour digne du récit biblique, les commentateurs juifs ont ajouté ce nouveau trait : en vrai prophète, Jonas savait que les Ninivites allaient se convertir au premier appel et que Dieu reviendrait sur sa menace pourtant catégorique. Ce qui faisait injure au peuple d’Israël qui, comme chacun le sait, a rarement répondu aux appels au repentir lancés par les prophètes. Or, un vrai prophète doit livrer sa vie pour son peuple. Voilà pourquoi, afin de ne pas faire honte à Israël, Jonas avait voulu fuir sa mission.
1 Corinthiens 7, 29-31 (Le monde passe : vivons ce temps pour le Seigneur)
Depuis 1 Corinthiens 7, 1, Paul répond à des questions concrètes qu’on lui a posées par courrier. Il s’agissait notamment de savoir si, dans l’attente de la venue glorieuse du Christ au terme de notre histoire, le célibat était préférable au mariage. Sans cacher son estime pour le célibat qu’il pratique, l’Apôtre invitait à une prudence qui considère le mariage comme la règle générale. à présent, il élargit les perspectives en suggérant l’attitude fondamentale qui doit gouverner la vie chrétienne, quel que soit le genre de vie adopté.
*Le temps est, littéralement, « cargué » (limité), comme la voile du navire rentrant au port. Le texte s’achève par la même idée : la forme de ce monde-ci s’effrite parce que la puissance du Christ ressuscité illumine déjà l’horizon de l’histoire. Cette catéchèse reviendra dans la 1ère lettre de Jean : « Le monde avec ses désirs est en train de disparaître. Mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure pour toujours » (1 Jean 2, 17).
Paul illustre le motif par des sentences finement ciselées : le mariage est un état transitoire (cf. Romains 7, 2-3 et Luc 20, 34-36). Les événements qui procurent du chagrin ou du bonheur doivent être relativisés, de même les opérations économiques. L’Apôtre ne prêche nullement une indifférence cynique. Il invite à la liberté et à un juste discernement quiconque comprend que la vie chrétienne est un court trajet vers la rencontre avec le Seigneur ressuscité.
* Le temps. « Le monde du temps n’est pas l’unique réalité dont nous soyons conscients. Une autre Réalité se laisse entrevoir, elle frémit et s’agite, elle nous ébranle, et cherche à nous éveiller, elle nous envahit enfin et, dans son amour, elle nous embrasse – avec toutes choses – en Elle-même. Et cette réalité est Dieu. Désormais, nous vivons à la fois sur deux plans, celui du temps et celui de l’Éternité. Ils forment un tout, et la frontière entre les deux varie » (T. Kelly).
Marc 1, 14-20 (Jésus invite les hommes à la conversion, et appelle ses premiers disciples)
Après le baptême et la tentation au désert (Marc 1, 12-13), Marc montre maintenant Jésus à pied d’œuvre. Deux scènes illustrent l’inauguration de sa mission : d’abord, la proclamation de son kérygme ; puis, en réponse à ce message, le départ des premiers disciples à sa suite.
Le kérygme de Jésus
Selon Matthieu, qui a sans doute raison, le Baptiste et Jésus proclamaient le même *kérygme : « Convertissez-vous, car le royaume des cieux est tout proche » (comparer Matthieu 3, 2 et 4, 17). Mais Marc sait que les deux prédicateurs n’ont pas la même conception du « règne de Dieu ». Aussi en réserve-t-il la proclamation à Jésus seul. Car, tandis que Jean envisage la venue du règne de Dieu comme un terrible jugement (Matthieu 32, 3-7), Jésus annonce la venue de ce Règne comme une heureuse nouvelle pour ceux qui veulent bien changer de vie. Alors que Jean exerçait son ministère aux frontières du désert, Jésus enracine sa mission en Galilée, au cœur de son peuple.
Matthieu et Marc s’accordent sur le fait que, littéralement, « le règne [ou Royaume] de Dieu [ou des Cieux] s’est fait proche », ou plus significativement encore : « .a fini son approche. » Marc précise : « Le temps est accompli », le temps que Dieu a fixé pour venir enfin régner sur l’humanité. C’est la frontière d’une nouvelle époque dont l’avènement est lié à l’accueil que lui fera l’homme par la foi et la conversion. Chaque fois que l’évangile retentit à nos oreilles et nous appelle à la conversion, nous sommes placés sur cette même frontière. L’évangéliste situe le commencement de la mission de Jésus « après l’arrestation de Jean », plus littéralement : « après que Jean eut été livré ». Derrière ce drame achevant la carrière du Baptiste se profile déjà le jour où « le Fils de l’homme sera livré aux mains des hommes » (Marc 9, 31). Car la Bonne Nouvelle de Dieu passera par la Passion de son messager et reportera la plénitude de ce règne divin dans l’ère de la résurrection, selon la parole même du Seigneur, la veille de sa mort : cf. Matthieu 26, 39 ; Marc 14, 25 ; Luc 22, 18.
L’appel des premiers disciples
Le départ des quatre premiers disciples à la suite de Jésus est une prompte réponse à sa proclamation du règne de Dieu. Le récit se subdivise en deux tableaux parallèles : l’appel de Simon et de son frère André, puis de Jacques et de son frère Jean. La seconde scène, plus simple, semble aussi la plus primitive. On y reconnaît le schéma de l’appel d’élisée par élie selon 1 Rois 19, 19-21. Puis, vu l’importance de Pierre dans l’église, la tradition a calqué sur ce modèle l’appel de Simon et d’André, en y intégrant l’écho d’un autre récit relatif à Pierre, celui de la pêche miraculeuse (cf. Luc 5, 10). Mais, à en croire Jean (évangile de dimanche dernier), la vocation de Pierre aurait eu en fait un autre cadre.
Ici, le premier appelé se nomme Simon. Il recevra le nom de Pierre lors de l’institution des Douze apôtres (cf. Marc 3, 13-19). L’expression « pêcheurs d’hommes » évoque le filet du pêcheur ou du chasseur. En Habacuc 1, 14-15 et Jérémie 16, 16, l’image illustre le jugement de Dieu capturant celui qui croyait lui échapper. Mais les évangiles interprètent Jérémie 16, 14-21 comme une prophétie du rassemblement des Juifs et de la conversion des païens. C’est donc une annonce de la mission chrétienne à venir. Mais, pour devenir apôtres, après la résurrection du Christ, missionnaires, les premiers appelés sont d’abord des disciples, des élèves. Comme tels, comme nous, « ils vont derrière Jésus », « ils suivent » celui qui incarne en sa personne le règne de Dieu.
* Le kérygme. Chez les Grecs, le kérygme (kèrugma) est le message de paix ou de guerre, proclamé (verbe grec kèrussô) par un héraut officiel (kèrux). Dans le Nouveau Testament, les théologiens parlent de « kérygme » lorsqu’ils rencontrent une formule brève, un slogan qui résume toute une prédication. Dans les évangiles, Jésus est le héraut de Dieu, le messager de l’avènement de son règne. Le kérygme des apôtres sera différent, se résumant souvent en ceci : Christ est mort pour nous ; Dieu l’a ressuscité. Bref, celui qui annonçait le règne de Dieu, c’est le Christ lui-même, objet lui-même du kérygme selon le message missionnaire (cf. 1 Co 15, 3-8 et Luc 24, 34), qui nous conduit vers la vie.
3e dimanche ordinaire B par D. Jacques FOURNIER (25/01)
« Je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes » (Mc 1,14-20)
Après l’arrestation de Jean, Jésus partit pour la Galilée proclamer l’Évangile de Dieu ;
il disait : « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. »
Passant le long de la mer de Galilée, Jésus vit Simon et André, le frère de Simon, en train de jeter les filets dans la mer, car c’étaient des pêcheurs.
Il leur dit : « Venez à ma suite. Je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes. »
Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent.
Jésus avança un peu et il vit Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean, qui étaient dans la barque et réparaient les filets.
Aussitôt, Jésus les appela. Alors, laissant dans la barque leur père Zébédée avec ses ouvriers, ils partirent à sa suite.
Nous avons ici les premières paroles de Jésus dans ce qui fut le premier Evangile jamais écrit, celui qui servira de modèle à Matthieu et à Luc : « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile » (Mc 1,15).
« Les temps sont accomplis » : avec Jésus, Dieu est intervenu de manière décisive dans l’histoire de l’humanité. Avec lui et par lui, la Révélation de son Mystère a atteint son apogée : elle sera désormais distillée, à la Lumière de l’Esprit Saint, jusqu’à la fin des temps. « Dès lors qu’il nous a donné son Fils, qui est sa Parole, Dieu n’a pas d’autre parole à nous donner. Il nous a tout dit à la fois et d’un seul coup en cette seule Parole »… Alors, « si je t’ai déjà tout dit dans ma parole, qui est mon Fils, je n’ai maintenant plus rien à te révéler ou à te répondre qui soit plus que lui. Fixe ton regard uniquement sur lui ; c’est en lui que j’ai tout déposé, paroles et révélations ; en lui tu trouveras même plus que tu ne demandes et que tu ne désires » (St Jean de la Croix, La Montée du Carmel, ch 20 ; cf. Ep 3,20-21).
Et que nous dit Jésus ? « Le Règne de Dieu est tout proche ». Autrement dit, Dieu est tout proche. La Bible l’affirmait déjà depuis longtemps, notamment dans le Livre de la Genèse (Gn 9,8-17), où, pour la première fois, Dieu emploie le vocabulaire de l’Alliance pour évoquer ses relations avec les hommes. Et il déclare qu’il vit en « alliance éternelle » avec « toute chair ». Dieu est donc proche de tout homme depuis que l’homme existe… « Le Seigneur ton Dieu est au milieu de toi. Il a enlevé toutes tes fautes, il te renouvellera par son amour » (So 3,14-18 ; 7° s av JC). Jésus ne cessera de le répéter : « Mon enfant, tes péchés sont pardonnés » (Lc 5,20). Et toute son œuvre consistera à nous communiquer l’Esprit de Dieu, l’Esprit de Lumière et d’Amour qui, dans l’aujourd’hui de la foi, commencera à « faire toutes choses nouvelles » : « Recevez l’Esprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis » (Jn 20,22-23). Dès lors, il suffit de tout offrir à Dieu, de tout cœur, avec le réel désir de changer petit à petit de vie grâce à son soutien et à sa grâce, la grâce de l’Esprit Saint ! Voilà l’expérience de Miséricorde que vivront les disciples avec Jésus. En lui rendant témoignage, ils deviendront pécheurs d’hommes, pour que tous aient la vie ! « Le Christ Jésus » disait St Paul « est venu dans le monde pour sauver les pécheurs ; et moi, je suis le premier des pécheurs. Mais s’il m’a été fait miséricorde, c’est afin qu’en moi le premier, le Christ Jésus montre toute sa patience, pour donner un exemple à ceux qui devaient croire en lui, en vue de la vie éternelle »… DJF
Les ancêtres des douze tribus du peuple d’Israël
La composition littéraire du Pentateuque : l’hypothèse des sources
Tout d’abord, l’expression « le pentateuque » désigne les cinq premiers livres de la bible (grec πέντε (α) – cinq – τευχη – « instruments », d’où étuis pour rouleaux de papyrus, et finalement « livres »).
Dès que l’on ouvre le livre de la Genèse, des problèmes se posent:
j Double récit de la création de l’homme: Gn 1-2,4a et Gn 2,4b-7 (création de l’h…) + 2,18-24 (complète avec celle de la femme.)
j Gn 4,26: Adam a eu un fils: Seth et l’humanité commence à invoquer le nom de Yahvé. Mais en 5,1, on reprend brusquement l’histoire d’Adam à zéro, la naissance de Seth revient en 5,3, le nom de Yahvé disparaît jusqu’en 5,29.
j Gn 7,7: le déluge commence et Noé entre dans l’arche avec ses fils et les animaux, mais le récit s’arrête au v.10 pour faire place à un autre récit, où est mentionné à nouveau le début du déluge et le texte continue par l’entrée de Noé et de ses fils dans l’arche (v.13) comme si rien n’avait été dit… Remarquons aussi cette contradiction, qui provient de cette superposition de deux récits différents: Noé doit faire entrer dans l’arche tantôt un couple d’animaux de chaque espèce (sans distinction entre espèces pures et espèces impures, Gn 6,19), tantôt un couple d’animaux impurs et sept couples d’animaux purs (Gn 7,2) : ces deux façons de compter sont incompatibles…
j Gn20: ce chapitre commence par: « Abraham partit de là… » alors que les versets précédents ne parlent même pas d’Abraham…
j Dieu est parfois appelé Yahvé, parfois Elohim: ainsi le 1° récit de la création parle d’Elohim, et le second de Yahvé-Elohim, puis de Yahvé seulement… d’où l’habitude de distinguer des textes yahvistes et des textes élohistes.
j La montagne du désert où Dieu se révèle tout en étant identifiée au Sinaïe (Ex 3,12), est appelée « Horeb » dans le Dt et en Ex 3,1; 17,6; 33,6, et Sinaï dans bien d’autres passages…
j Ex 2,18: le beau-père de Moïse s’appelle Réuel et… Jethro en 3,1; 18,1…
j Enfin,toute une série de textes emploie un vocabulaire très spécifique en rapport avec les rites de la liturgie juive, d’où le nom de textes sacerdotaux donné à cette série, caractérisé par un style précis et sec.
j Le Deutéronome a aussi son vocabulaire particulier: « faire ce qui est bien aux yeux de Yahvé », « garder les commandements »… Certains y ont vu la trace d’une rédaction indépendante des autres textes et l’ont appelé D.
j Enfin, Moïse était considéré comme étant l’auteur unique des cinq livres, mais comment a-t-il pu être inspiré au point de décrire sa propre mort (Dt 34,5-12)? A.B. Karlstadt (1486-1541) fut le 1° à démontrer que cela est impossible.
Résumons-nous: quatre familles de textes ont été différenciées:
1) Yahviste (de « Yahvé ») ou Jahviste, d’où le sigle J qu’on lui donne.
2) Elohiste (de « Elohim »): E.
3) Famille d’origine « sacerdotale » : P comme « prêtres ».
4) Famille « deutéronomiste », principale responsable de la rédaction du Dt: sigle D.
Telle est l’hypothèse documentaire rendue fameuse par les travaux de Julius Wellhausen (1876-78) : 4 récits (ou documents) continus, rédigés à des époques différentes par des milieux différents ont été par la suite juxtaposés, imbriqués:
ß — – –
——————
Deux autres modèles furent développés pour expliquer la naissance du Pentateuque:
A – L’hypothèse des fragments: des récits épars, des textes isolés ont été rassemblés pour former un seul récit (défendue aujourd’hui par R. Rendtorff, 1977, et C. Houtman, 1980).
B – L’hypothèse des compléments: un texte de base aurait été augmenté par des ajouts successifs (S. Tengström, 1976 et H.C. Schmitt, 1980).
Reprenons donc la première hypothèse « documentaire », la plus suivie (cf notes BJ ; Henri Cazelles, Introduction critique à l’AT, Paris 1973) avec J. Wellhausen:
Epoque monarchique |
vers 950 av. JC
J1,2,3 E1,2,3
(J et E auraient connu 3 rédactions successives)
vers 750 av. JC
JERéforme religieuse de Josias,
roi de Juda.
vers 620 av. JC
D vers 550 av. JC
JED Q (P) + Textes législatifs vers 500 av. JC
JEDQ (P)
La composition littéraire du Pentateuque
Le regard parfois imparfait de l’Ancien Testament sur les réactions de Dieu face au mal
Un jour, « en passant, Jésus vit un homme aveugle de naissance. Ses disciples lui demandèrent : « Rabbi (Maître), qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? » Jésus répondit : « Ni lui, ni ses parents » » (Jean 9,1-3)…
Beaucoup pensaient donc qu’il existe un lien direct entre péché et maladie. Cette conception s’enracine dans les temps les plus anciens. Déjà, les peuples voisins d’Israël, croyaient en ce que l’on appelle souvent « Le Principe de Rétribution selon les actes ». Cette croyance était totalement païenne, au sens où les dieux n’intervenaient pas. Elle est très certainement née de l’expérience, mais la vision du monde qu’elle transmet est non seulement simpliste, mais encore erronée. Selon cette conception, lorsque quelqu’un commet le mal, il déclenche une puissance malfaisante qui, tôt ou tard, retombera sur lui et sur son entourage.
et de ce fait libère une puissance malfaisante
k l
qui déclenche toutes sortes
commet le mal de conséquences mauvaises
sur lui et sur son entourage
j m
Un homme
Israël va accueillir cette croyance et l’intégrer dans sa foi encore toute jeune. Lors de la sortie d’Egypte, racontée dans le Livre de l’Exode, ils ont vu le Seigneur à l’œuvre avec une grande Puissance, et ils en ont déduit que cette Puissance ne pouvait qu’être celle du Dieu Créateur, ce Dieu Tout Puissant qui a fait surgir l’univers du néant. Et ils se faisaient une idée si grande de cette Toute Puissance de Dieu qu’ils pensaient que rien ne pouvait lui échapper, pas même le mal (Amos 3,6 ; Lamentations 3,38)… Ces conséquences mauvaises qui, soi disant, retombent sur le pécheur ne pouvaient donc venir que de Dieu. « Le Principe de Rétribution selon les actes » a donc conduit Israël à s’imaginer que Dieu était un Juge qui, du haut du ciel, récompensait les justes et punissait ceux qui font le mal :
1Rois 8,32 (cf Ezéchiel 7,3 et 22,31) : « Toi, écoute au ciel et agis ; juge entre tes serviteurs : déclare coupable le méchant en faisant retomber sa conduite sur sa tête,
et justifie l’innocent en lui rendant selon sa justice ».
L’ensemble peut se représenter par le schéma suivant :
Dieu, du haut du ciel, voit et juge…
k … et châtie.
et de ce fait libère une puissance malfaisante l
(conception païenne)
toutes sortes de conséquences
commet le mal mauvaises frappent le pécheur
et son entourage
j m
Un homme
Disons le tout de suite : même appliquée à Dieu, cette conception est fausse.
Déjà, dans l’Ancien Testament, beaucoup réagirent en trouvant injuste que Dieu fasse retomber sur la tête des enfants la conduite de leurs parents (Exode 20,5 ; 2Samuel 24,10-17). Aussi, certains prophètes commencèrent à annoncer que seuls ceux qui ont commis une faute recevront le châtiment qui lui correspond (Jérémie 31,29-30 ; Ezéchiel 18,1-3 et 18,20). C’était déjà mieux, mais les croyances ont la vie dure : la question des disciples de Jésus cinq siècles plus tard le prouve ! Le Christ balaiera d’une phrase une telle conception de Dieu. Non, Dieu n’est pas un juge qui punit et nous fait du mal parce que nous-mêmes avons mal agi. Certes, il fait la vérité, mais cette vérité est inséparable chez Lui de son Amour et de son infinie Miséricorde. Lorsque Dieu veut nous faire prendre conscience de notre péché, il nous révèle toujours en même temps son amour (Isaïe 1,2-4 ; 1,15-18). Petit à petit, il nous montre ce qui ne va pas dans notre vie pour que nous puissions aller à lui sans peur et lui offrir toutes nos misères. Voilà ce qu’Il attend. Et il enlèvera bien vite tout ce qui nous empêche d’être pleinement en relation avec lui et avec nos frères (Psaume 103(102),11-12), il nous purifiera et il nous rétablira par le don de son Esprit ((Ezéchiel 36,25-28) dans cette communion avec Lui que nous n’aurions jamais dû quitter !
Quoiqu’il en soit, une telle conception de Dieu a conduit les auteurs de l’Ancien Testament à nous le décrire souvent de façon contradictoire : « Il blesse, puis il panse la plaie ; il meurtrit, puis il guérit de sa main » (Job 5,18) ; « C’est moi qui fais mourir et qui fait vivre ; quand j’ai frappé, c’est moi qui guéris » (Deutéronome 32,39). Et nous lisons peut-être le pire dans ce même livre du Deutéronome : « Autant Yahvé avait pris plaisir à vous rendre heureux et à vous multiplier, autant il prendra plaisir à vous perdre et à vous détruire » (28,63). Non ! Dieu n’est pas ainsi ! Il n’est qu’Amour et Bonté (1Jean 4,8 ; 4,16 ; Tite 3,4-7), un Amour pleinement manifesté en Jésus-Christ (1Jean 3,16 ; Jean 15,13 ; 15,9 ; Actes 10,37-38 ; Romains 8,35-39). Jamais Il ne juge au sens de condamner (Jean 3,16-17 ; 8,11). Son seul désir est que nous connaissions le plus possible la Vie en plénitude (Jean 10,10), le vrai Bonheur (Deutéronome 5,27-33 ; 6,18 ; 6,24), la vraie Paix (Jean 14,27) et la vraie Joie qui est communion à sa Joie (Jean 15,11)…
D. Jacques Fournier
Intreprétation du mal AT
Les grandes dates de l’Histoire d’Israël
1850 Av JC: Abraham, originaire d’Ur en basse Mésopotamie
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Joseph, son père Jacob et ses frères en Egypte
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1250 av JC: sous le Pharaon Ramsès II, l’Exode avec Moïse.
La Loi donnée au sommet du Mont Sinaï
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1200 av JC: Josué pénètre en Palestine (Terre de Canaan)
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1200 à 1025: les Juges
Confédération des douze tribus d’Israël, chacune étant dirigée par un « Juge ».
A partir de 1040 av JC, le prophète Samuel.
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1030-1010 av JC, Saül, premier roi d’Israël, consacré par Samuel.
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1010-970 av JC: le roi David. Il fait de Jérusalem la capitale de son grand Royaume.
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970-931 av JC: Salomon, fils de David,
grand constructeur (Temple de Jérusalem) et administrateur.
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931: mort de Salomon, assemblée de Sichem; Israël se divise en deux royaumes:
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Royaume d’Israël (Nord) Royaume de Juda (Sud)
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931-910 av JC: Jéroboam I 931-913 av JC: Roboam, fils de Salomon.
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…………………. ………………….
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885-874 av JC: Omri, fonde la capitale Samarie. ………………
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874-853 av JC: Achab; le prophète Elie. ………………….
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853-852 av JC: Ochozias ………………….
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852-841 av JC: Joram; le prophète Elisée ………………….
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…………………. …………………
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783-743 av JC: Jéroboam II ;
les prophètes Amos puis Osée ………………….
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…………………. 781-740 av JC: Ozias; 740: vocation d’Isaïe.
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…………………. 740-736 av JC: Yotam. Débuts de Michée.
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…………………. 736-716 av JC: Achaz; prophétie d’Isaïe sur « l’Emmanuel ».
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732-724 av JC: Osée,
dernier roi du Royaume du Nord ………………….
721 av JC: prise de Samarie par l’Assyrien Sargon II.
Fin du Royaume du Nord. Déportation massive en Assyrie.
(Suite des grandes dates de l’Histoire d’Israël) Royaume de Juda (Sud)
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716-687 av JC: Ezéchias
En 701 av JC Sennachérib lui prend 46 villes et impose un tribut.
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………………….
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640-609 av JC: le roi Josias
Vers 630, le prophète Sophonie
627: vocation du prophète Jérémie
622: Réforme religieuse sur la base d’un texte de Loi découvert dans le Temple de Jérusalem.
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………………….
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598-597 av JC: Joïaqim règne trois mois.
Nabuchodonosor, roi de Babylone assiège et prend Jérusalem.
Première déportation à Babylone (10.000 personnes).
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597-587 av JC: Sédécias.
Le prophète Ezéchiel prédit la ruine de Jérusalem.
Vers 589, révolte de Sédécias malgré les avis de Jérémie.
587 av JC: Nabuchodonosor prend Jérusalem.
Destruction du Temple. Seconde déportation.
Fin du Royaume de Juda.
Jérémie est entraîné en Egypte.
Ministère d’Ezéchiel auprès des déportés.
Vers 550 av JC: Is 40-55 (le livre de la consolation).
Le 29 Octobre 539, le roi perse Cyrus entre en triomphateur à Babylone.
538 av JC: édit de Cyrus; retour des exilés à Jérusalem.
515: Dédicace du second Temple de Jérusalem. Reprise de la vie religieuse.
445 av JC: Néhémie relève les murailles de Jérusalem.
336 av JC: Alexandre le Grand, roi de Macédoine, bat les Perses à Issos en 333.
332 av JC: Alexandre le Grand occupe la Palestine.
Déportation en Egypte dans sa nouvelle ville d’Alexandrie.
Diffusion de la culture grecque dans tout le bassin méditerranéen.
323 av JC: décès à 33 ans d’Alexandre aux confins de l’Inde.
Ses généraux se partagent l’empire: les Séleucides en Syrie Babylonie,
les Lagides en Egypte.
La Judée est soumise aux Lagides jusques vers 200 av JC.
Vers 250 av JC, commencement de la traduction des Ecritures juives
en grec, à Alexandrie (la Septante).
200-142 av JC: la Judée est soumise aux Séleucides. Révolte maccabéenne (167-142).
63 av JC: prise de Jérusalem par Pompée;
la palestine devient province romaine.
40-4 av JC: Hérode le Grand, roi des Juifs.
Vers l’an 5 av JC, naissance de Jésus…
Les grandes dates -Histoire d’Israël PDF pour éventuelle impression
Pour lire un texte d’Evangile…
Se munir si possible d’une Bible complète avec notes : Bible de Jérusalem ou TOB.
1- Commencer toujours par un temps de prière
La Parole de Dieu est un texte qui ressemble à tous les autres textes, et pourtant, il est différent. Nos journaux nous transmettent des informations ; les romans nous entraînent dans une histoire et nous font rêver… Ici, il ne s’agit pas d’un homme qui s’adresse à d’autres hommes par l’intermédiaire de l’écriture, mais de Dieu qui, par sa Parole, vient à notre rencontre: « Dans les Saints Livres, le Père qui est aux cieux vient avec tendresse au devant de ses fils et entre en conversation avec eux » (Concile Vatican II, Dei Verbum &21).
« Je me tiens à la porte et je frappe : si tu m’ouvres ton cœur, je ferai chez toi ma demeure« ... Dieu parle au cœur : pour l’écouter, il nous faut d’abord nous recueillir par un moment de silence où nous allons laisser de côté (temporairement) tous nos soucis. Et tout de suite, nous allons nous confier à l’Esprit Saint : c’est Lui le maître intérieur. Qu’il fasse régner dans nos cœurs son silence et sa paix pour nous permettre ensuite de mieux accueillir, toujours avec son aide, la Parole de Dieu. Nous vivrons toute cette aventure avec Lui et grâce à Lui : qu’il nous garde fidèles !
Pour prier, nous pouvons commencer par lire un texte où il est fait mention de l’Esprit Saint, en demandant que cette Parole s’accomplisse pour nous, en cet instant que nous consacrons à Dieu (Exemples : Luc 11,9-13 ; Jean 14,15-20 ; 14,23-26 ; 16,12‑15 ; Ephésiens 3,14-21). On peut ensuite prier un « Notre Père » et un « Je vous salue Marie ».
2- Bien lire et relire le texte choisi.
Prendre son temps, dans la gratuité. Bien faire attention au texte lui-même. Le lire et le relire, tout simplement.
Puis noter ce qui a pu nous sembler le plus important, le plus beau, le point à garder et à conserver précieusement comme lumière pour ma vie.
Dès cette première étape, il est important de ne jamais se décourager : un jour, tel texte peut être feu dans nos cœurs. Tel autre jour, tout peut nous sembler lourd et pesant, aride et bien peu engageant. En cet instant précis, Dieu nous attend : qu’allons-nous faire ? Abandonner la lecture, ou persévérer avec Lui, creuser et creuser encore jusqu’à ce que l’eau jaillisse ? Lire la Parole de Dieu est déjà le lieu où cette Parole de Jésus nous est adressée : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive« . Mais n’oublions pas aussi que ce que nous lisons est « Bonne Nouvelle » : « Heureux vos yeux parce qu’ils voient, et vos oreilles parce ce qu’elles entendent », disait Jésus à ses disciples; « Amen, je vous le dis: beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu » (Mc 8,34 ; Mt 13,16-17).
3 – Pour continuer à creuser…
Après ce premier contact, essentiel, voici quelques points pour nous aider à poursuivre notre travail « d’attention » :
-
a) Le contexte : Repérer, dans une Bible complète, où se situe notre texte (Les têtes de paragraphe, rédigées par nos traducteurs, et les notes sont ici très précieuses). Faire attention à ce qui précède. Essayer de bien repérer sa place dans la dynamique générale de l’œuvre où il se trouve.
Cette démarche est très importante pour une bonne interprétation. Noter toutes les informations recueillies.
-
b) Mettre en lumière le mouvement interne du texte :
j Repérer les personnages, les indications de temps, de lieu…
j Faire attention aux répétitions, et éventuellement à la place de ces mots dans notre passage. Parfois, tout tourne autour d’un centre qu’il s’agit de repérer, car tel est alors le cœur du texte.
j Observer les différents acteurs : qui sont-ils ? Que font–ils ? Que disent-ils ?
j Qu’est-ce qui change entre le début et la fin? Quelle est la signification de ces changements ? Que nous révèlent ces changements sur les personnes concernées, sur celui qui les opère ? Essayer de repérer quel est l’enjeu…
-
c) Les citations ou les allusions à l’Ancien Testament (AT) :
j Elles sont écrites en caractères gras ou en italiques pour nous aider à les repérer. Les Bibles complètes indiquent leurs références en marge ou dans les notes (Parfois, l’auteur fait seulement allusion à l’AT sans le citer : les références sont aussi indiquées en marge).
j Retrouver dans l’AT lui-même les textes cités ; repérer les paragraphes d’où ils sont extraits. Les lire. Essayer de retrouver le contexte dans lequel ce texte a été écrit, puis observer les personnages : qui sont-ils, que disent-ils, que font‑ils ? Noter toutes ces informations, puis se reporter à l’Evangile où notre citation est peut-être appliquée à d’autres personnages. Noter ces glissements. Que nous apprennent les informations recueillies dans l’AT sur l’identité et la mission de nos personnages du NT ?
L’Ancien Testament annonce le Christ : sa lecture est essentielle pour mieux comprendre Celui qui accomplit toutes ces Ecritures…
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d) Signification et enjeux