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3ième Dimanche de Carême – Homélie du Père Rodolphe EMARD (Jn 4, 5-42)

 

Textes bibliques : Ex 17, 3-7 ; Jn 4, 5-42

Frères et sœurs, en ce troisième dimanche de Carême, la liturgie de la Parole nous donne deux textes qui évoquent le thème de l’eau.

L’eau est l’un des quatre éléments qui composent le monde, avec la terre, l’air et le feu. L’eau est indispensable pour la suivie de l’être humain, des animaux et de toute la création. L’eau : un élément important et qui est très symbolique pour les chrétiens.

Revenons aux deux textes dans lesquels la thématique de l’eau apparaît. Quels enseignements pouvons-nous en tirer pour aujourd’hui ?

  • 1ère lecture : Livre de l’Exode

Lorsque le peuple Hébreux a été libéré par Dieu de l’esclavage en Égypte, il a dû traverser le désert pour rejoindre la terre promise. Les Hébreux ont été confrontés à toutes sortes d’épreuves : la faim, l’insécurité et dans notre récit, la soif.

Ce récit nous permet deux souligner deux points :

  • Dieu nous assiste dans chacune de nos difficultés. Dieu n’abandonne personne ! Ce temps de Carême nous invite vraiment à entrer dans cette confiance.

  • Cependant, nous devons le reconnaître, comme les Hébreux, nous pouvons avoir des manques de foi : « Le Seigneur est-il au milieu de nous, oui ou non ? »

Nos doutes ne portent pas forcément sur l’existence de Dieu mais davantage sur sa présence dans nos vies. La plainte des Hébreux est bien la nôtre parfois.

Nous devons nous rappeler que la foi est avant tout un don de Dieu. On n’acquiert pas la foi par ses propres efforts. Ce n’est pas un mérite… Néanmoins, Dieu compte sur nos efforts pour que cette foi soit vive. Quels moyens nous donnons-nous pour faire grandir ce don de la foi que nous avons reçu de Dieu ?

Si la foi est un don de Dieu, il faut aussi demander au Seigneur de la faire grandir en nous : « Seigneur, augmente en nous la foi ! » Efforts et prières sont de mise pour que grandisse le don de la foi que Dieu nous a fait. Ne perdons pas ces deux axes durant notre Carême.

  • Évangile de Jean

Dans l’Évangile, Jésus se révèle comme « l’eau vive », celui qui peut vraiment étancher notre soif. Jésus est le vrai « don de Dieu », une source d’eau d’où jaillit la Vie éternelle : « l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle. »

Aujourd’hui, l’homme a tendance à se désaltérer par le matériel qui le satisfait pour un temps… la soif n’est jamais étanchée… Certes, l’homme a besoin d’un minimum de confort matériel pour le bien être de son corps mais son âme a besoin aussi d’être désaltérée. Comment ? En venant puiser dans la Parole de Dieu et dans les sacrements.

Nous avons besoin de cette source spirituelle qui ne s’épuisera jamais. Personne n’est exclue de cette source ! Le Christ ne rejette personne !

  • Eau : symbole du Baptême

Comme je l’écrivais plus haut, la symbolique de l’eau est forte pour les chrétiens. L’eau est symbole de vie et de purification. Par le Baptême, nous avons été plongés dans les eaux du Salut. Nous avons été plongés dans la mort et la Résurrection du Christ.

 

 

Que le Seigneur renouvelle en nous la grâce de notre Baptême durant notre marche vers Pâques. Sachons nous donner les moyens pour que le Seigneur puisse agir en nous.

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Seigneur Jésus, toi l’eau vive, viens étancher notre soif. Montre-nous le chemin à suivre…

Rodolphe Emard




Rencontrer Jésus en prison – La vocation des aumôniers de prison – Fr. Manuel RIVERO O.P. (aumônier de la prison de Domenjod/ La Réunion)

Pour être avec Jésus

Pourquoi Jésus a-t-il appelé les apôtres ? Saint Marc l’évangéliste précise que Jésus appela ceux qu’il voulait « pour qu’ils soient avec lui et pour les envoyer prêcher » (Mc 3,14). C’est Jésus lui-même qui prend l’initiative d’appeler ses disciples pour un partage de vie dans la proximité et l’amitié. Le primat est accordé à la relation personnelle avec Jésus au sein de la communauté apostolique, l’Église plutôt qu’au « faire ». Il s’agit d’être avec Jésus. Dieu veut être avec les hommes. C’est bien le sens du nom « Emmanuel » : « Dieu avec nous ». Il serait erroné d’imaginer la mission de l’aumônier de prison comme une activité dévoreuse des énergies spirituelles au risque d’épuiser la personne dans les services à rendre. L’appel à devenir aumônier de prison représente une grâce d’intimité avec le Christ Jésus dans la prière, le partage en équipe, la rencontre avec la personne détenue qui est aussi rencontre avec Jésus (cf. Mt 25,45), identification à Jésus prêcheur de la Bonne Nouvelle …

Une nouvelle manière de vivre le baptême

Dans le baptême, le chrétien devient disciple-missionnaire de Jésus par la sagesse et la force de l’Esprit Saint. Devenir aumônier de prison signifie une nouvelle manière de vivre le baptême en disciple-missionnaire de la miséricorde divine. Disciple, car il va apprendre l’Évangile dans la communion à Jésus qui a passé une nuit en garde à vue dans la maison du grand-prêtre Caïphe (cf. Mt 26,57) avant d’être présenté, le lendemain matin, au magistrat Pilate.

Une prière attribuée à saint François d’Assise enseigne que « c’est en donnant que l’on reçoit ». Cela s’avère vrai dans l’apostolat de l’aumônier de prison. Saint Vincent de Paul, considéré comme le premier et grand aumônier de prison, avait déjà compris, en son temps, que le bon aumônier de prison devient meilleur au contact des prisonniers. Il reçoit Jésus en même temps qu’il le sert et l’annonce comme aumônier. Sacrement de Jésus pour les prisonniers, ceux-ci le sont aussi pour lui.

Certaines personnes qui demandent à rejoindre l’équipe de la pastorale d’une aumônerie de prison pensent à ce qu’ils vont donner aux prisonniers en souffrance. Dans leurs premiers pas à la prison, ils risquent de parler beaucoup et de faire la morale aux condamnés par la justice. Un jour, un jeune homme en souffrance avait dit à l’aumônier : « Si tu viens me parler de Jésus tu peux entrer, si tu viens me faire la morale tu peux partir ». L’expérience apprend à changer d’attitude pour mettre en valeur l’écoute, et remercier Dieu pour les transformations spirituelles dont ils bénéficient en allant à la rencontre de ceux qui ont souvent perdu l’estime de soi, de leurs familles et de la société. Dans la pauvreté et la déchéance des cellules de prison peut rayonner la lumière du Ressuscité. Les murs épais des centres pénitentiaires n’empêchent pas Jésus de se rendre présent dans les couloirs, les salles et les cellules. Jésus manifeste surtout sa présence en la personne détenue qui ouvre son cœur par la foi à Dieu plus grand que ses fautes, ses péchés et ses remords : « Si notre cœur venait à nous condamner, Dieu est plus grand que notre cœur et il connaît tout » (1 Jn 3,20).

L’origine de la vocation

Les aumôniers de prison ne se donnent pas à eux-mêmes la mission d’annoncer Jésus en prison. Il s’agit d’une vocation surnaturelle qui passe par des médiations : celle de l’Église qui appelle et envoie, et celle davantage effacée des prisonniers eux-mêmes.

La vocation de Moïse éclaire la vocation des aumôniers de prison. Dieu appelle Moïse après avoir entendu les cris de son Peuple esclave en Égypte (cf. Ex 3, 7). Dieu connaît les angoisses des opprimés. C’est pourquoi il appelle Moïse pour le rendre libérateur : « Maintenant va, je t’envoie auprès de Pharaon, fais sortir d’Égypte mon peuple, les Israélites » (Ex 3,10). La vocation de Moïse trouve son origine dans la souffrance, les gémissements et les larmes des esclaves désespérés et sans défense.

La vocation de l’aumônier de prison trouve son origine dans le malheur des prisonniers. En réponse aux cris silencieux des personnes détenues Dieu appelle des aumôniers et il les envoie en mission avec le soutien de sa grâce : « Moïse dit à Dieu : ‘Qui suis-je pour aller trouver Pharaon et faire sortir d’Égypte les Israélites ?’ Dieu dit : ‘Je serai avec toi’. » (Ex 3,12).

L’appel crée une nouvelle relation alors que Moïse manifeste sa faiblesse et son indignité. Ce sont l’appel et l’envoi qui ont fait la force de Moïse et qui font encore aujourd’hui la force des aumôniers de prison.

Nous avons à remercier les prisonniers qui nous ont donné notre vocation.

C’est le Christ qui convertit

L’aumônier ne convertit personne. C’est le Christ qui convertit et qui agit dans les sacrements comme le manifeste la prière eucharistique III : « C’est pourquoi nous te supplions, Seigneur, de consacrer toi-même les offrandes que nous apportons ». C’est le Christ qui touche les cœurs, les purifie et les illumine. C’est Jésus qui baptise et qui pardonne.

L’Esprit Saint qui a engendré Jésus dans le sein de Marie continue de répandre sa grâce dans le sein de l’Eglise, Corps du Christ, Mère dans les sacrements qui font renaître les hommes à la vie nouvelle d’enfants de Dieu.

La célébration des sacrements figure dans la pastorale comme l’un des grands événements heureux et fondateurs. Quelle joie que de célébrer le baptême, la confirmation et l’eucharistie pour des personnes détenues qui ont souvent découvert le Christ en prison. La lumière du Ressuscité resplendit alors sur les visages des convertis, « re-nés ».

Il arrive que cette conversion ait lieu grâce aux témoignages de foi, de prière et de charité des autres détenus condamnés parfois pour des crimes graves. L’Église n’a pas besoin de prosélytisme. Les conversions fleurissent par la grâce et l’exemple qui attire et donne envie.

L’Église plaide pour la laïcité respectueuse des droits humains. C’est au nom du droit à pratiquer sa religion que le culte religieux est organisé par les lois de la République française, afin de le rendre possible, à la prison comme à l’hôpital, auprès des personnes empêchées de se déplacer dans les paroisses.

Condamnés et témoins de Jésus

Dans la prison, ce sont les détenus eux-mêmes qui font connaître et aimer Jésus par leur exemple et leur joie. Nombreux sont les codétenus de soutien qui veillent sur les arrivants ou les prisonniers malades avec désintéressement, et aussi comme une manière de vivre le commandement de l’amour fraternel enseigné par Jésus: « À ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13,35).

Lors du séisme en Haïti le 12 janvier 2010, j’avais travaillé avec d’autres prêtres et laïcs auprès des sinistrés, en nous inspirant de l’approche « Blessés-guérisseurs ». Ce sont les blessés qui peuvent témoigner de la guérison possible, à l’image de Marie-Madeleine possédée jadis par sept démons (cf. Lc 8,2) ou de l’apôtre Pierre qui avait lâchement renié le Christ dans sa Passion (cf. Jn 21,15s).

Lors des rencontres avec les personnes détenues, je commence en leur demandant comment elles vont. Ensuite, je leur demande de me parler de leur expérience de Dieu en prison : ressentez-vous l’aide de Dieu dans le malheur ? Ressentez-vous sa présence dans votre cellule et dans votre cœur ? Ces questions libèrent souvent la parole et elles font dépasser la pudeur pour aboutir à des partages magnifiques sur la recherche de Dieu et sur sa miséricorde.

Le spirituel est charnel

L’écrivain Charles Péguy a donné cette formule ramassée de la foi chrétienne : « Le spirituel est lui-même charnel ». Nous reconnaissons la grandeur d’une vie spirituelle non pas tant aux propos fervents qu’aux gestes de charité et de miséricorde. La foi dans l’Incarnation comporte un humanisme intégral et le salut de « tout l’homme et de tous les hommes », selon l’expression du saint pape Paul VI.

Les aumôniers ne s’occupent pas uniquement de l’âme à sauver mais aussi des besoins matériels en accord avec les lois pénitentiaires.

En dialogue avec tout homme

Le Prologue de saint Jean révèle que « le Verbe était la vraie lumière qui, en venant dans le monde, illumine tout homme » (Jn 1,9). Les aumôniers catholiques répondent uniquement aux demandes formulées par les personnes détenues. Avec les membres de l’Administration pénitentiaire et tous les intervenants dans la prison, ils forment, de fait, une communauté de vie au service de tous les détenus dans le but ultime de la réinsertion. Ils rencontrent spontanément des personnes de toute idéologie ou religion. Des partages informels et des célébrations communes avec les aumôniers des autres cultes montrent la foi catholique en l’action aimante de Jésus envers tout homme.

 

PRIERE

Seigneur prends mes peurs

et transforme-les en confiance.

Prends ma souffrance

et transforme-la en croissance.

     Prends mon silence

     et transforme-le en prière.

     Prends mes crises

     et transforme-les en maturité.

          Prends mes larmes

          et transforme-les en prière.

          Prends mon découragement

          et transforme-le en foi.

               Prends ma solitude

               et transforme-la en contemplation.

               Prends mon amertume

               et transforme-la en paix.

          Prends mon péché

          et transforme-le en pardon.

          Prends mon attente

          et transforme-la en espérance.

     Prends mon regret

     et transforme-le en amour.

     Seigneur prends ma mort

     et transformez-la en Résurrection.

Amen.

Fr. Manuel RIVERO O.P. (aumônier de la prison de Domenjod/ La Réunion)




3ième Dimanche de Carême – par Francis COUSIN (Jn 4, 5-42)

« J’ai soif ! » 

Jésus est fatigué, il marche depuis le matin, et il est presque midi … Il a besoin de repos … et il a soif.

Il s’assieds sur la margelle d’un puits, le puits de Jacob, en territoire samaritain … et il attend que quelqu’un lui propose à boire …

Mais il est midi … et ce n’est plus l’heure de venir au puits … il est trop tard pour venir puiser de l’eau dans le puits pour le repas … et puis le soleil est trop fort …

Jésus a soif …

Il ne joue pas les super héros …

Il est comme nous … après une longue marche sous le soleil … épuisé et assoiffé …

Il a besoin d’aide …

Arrive quelqu’un, malgré l’heure … C’est une femme, seule … une femme du village voisin … Or, il n’était pas correct de parler à une femme seule … et en plus à une samaritaine, des personnes qui s’étaient détournés de la foi juive …

Jésus, le Fils de Dieu, la supplie quand même : « Donne-moi à boire. »

Réaction indignée de la femme : « Comment ! Toi, un Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? ».

C’est vrai, il a soif … mais quand même, … il ne respecte même pas les conventions !

« D’où il sort, celui-là ? »

« Il est né de la Vierge Marie, … vrai Dieu né du vrai Dieu … »

Alors Jésus lui répond : « Si tu savais le don de Dieu »

Rien que cela aurait dû mettre en alerte la samaritaine …

Et nous, Est-ce que cela nous met en alerte ? Est-ce qu’on se pose la question : C’est quoi le don de Dieu ?

De l’eau ? … C’est vrai que dans la première lecture, Dieu donne de l’eau à son peuple sorti de l’esclavage des Égyptiens, par l’intermédiaire de Moïse frappant le rocher de l’Horeb … Mais est-ce vraiment cela ?

Non. C’est une conséquence du don premier de Dieu …

Alors, quelle est le don premier, quelle est la cause première de l’action de Dieu, et donc de Jésus ?

L’amour de Dieu pour sa création, et spécialement pour les humains … tous les humains … « Dieu fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. » (Mt 5,45). La lumière et la pluie (l’eau), tout ce qu’il faut pour faire pousser les plantes …

L’amour de Dieu est pour tous, y compris les Samaritains … et les Samaritaines, même celles qui ont une vie pas très orthodoxe, comme celle qui est devant Jésus …

La preuve, quand le groupe des disciples fut refusé dans un village samaritain, à Jacques et Jean qui demandaient d’envoyer le feu du ciel sur le village, « Jésus, se retournant, les réprimanda. » (Lc 9,54).

L’amour de Dieu est pour tous, y compris les Russes et les Ukrainiens, et tous les mercenaires utilisés dans cette guerre … et dans les autres guerres ou systèmes de pression …

Et cela on a du mal à l’accepter, même si on ne le dit pas … On préférerait qu’il prenne parti pour l’un ou pour l’autre … comme nous le faisons …

Mais Dieu est au-dessus de tout cela. Ses pensées ne sont pas les nôtres. Il ne fait pas de préférence. Il laisse à chacun le temps de la conversion … à nous aussi, car nous ne sommes pas parfaits …

L’amour de Dieu est toujours premier …

Et Jésus lui-même ira jusqu’au bout de cet amour en donnant sa vie pour nous sauver, pour nous permettre de parvenir à la Vie Éternelle, auprès de son Père.

Et juste avant de mourir, il s’écria : « J’ai soif. » …

Comme ce jour-là devant la samaritaine …

Seigneur Jésus,

tu as connu la faim,

la fatigue et la soif…

tout comme nous, pauvres humains.

Tu as toujours réussi à les supporter

parce que tu avais en toi

la certitude de l’amour de ton Père

envers toi …

et envers nous !

Mais nous, il nous arrive de douter.

Fortifie notre foi !

 

Francis Cousin    

   

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Image dim Carême A 3°




3ième Dimanche de Carême – Homélie du Père Louis DATTIN

La Samaritaine

Jn 4, 5-42

Ces jours-ci, il a fait chaud, très chaud et souvent il nous est arrivé d’avoir soif : la soif, ce besoin et ce manque de ‘’quelque chose’’, qui, nous le sentons bien, est vital pour notre organisme.  Vous savez qu’on peut faire la grève de la faim pendant plusieurs jours, mais on continue à boire car la grève de la soif, elle, serait très vite insupportable et dangereuse.

Boire = besoin vital, la soif est le signe physique de ce besoin. Elle nous dit : « Attention, il faut te désaltérer, ton organisme est en manque, tu en as besoin ».  Les biologistes nous le disent : un corps humain est d’abord composé de plus de 80% d’eau allié à des matières minérales, à des cellules vivantes qui ne se renouvellent que dans un liquide. L’eau, c’est la vie : pas de vie sans eau.

Pourquoi les déserts ? Parce qu’à ces endroits-là, il n’y a pas d’eau. Par contre, si au milieu de ce désert, vous apercevez une oasis, vous conclurez tout de suite : « Tiens, il y a un point d’eau, il y a des palmiers, l’homme peut y vivre ».

Mais l’homme intérieur, l’homme spirituel, a aussi d’autres soifs : des désirs, des rêves, des projets, des ambitions. Même s’il est comblé matériellement, il aura toujours soif d’autre chose comme cette Samaritaine qui demande au Christ : « Seigneur, donne-moi à boire », alors que c’est elle qui a le récipient et qu’elle se trouve au bord du puits.

« Si tu savais qui je suis, dit Jésus, c’est toi qui me donnerai à boire » et c’est ce qu’elle fait.

Parce qu’il n’a pas qu’un corps, mais aussi une âme, un esprit, un cœur, l’homme a d’autres soifs, bien plus impérieuses encore que la soif physique. On a trouvé, auprès des vêtements d’un homme qui s’était noyé volontairement, ce papier : « Je me noie avec de l’eau ordinaire, faute d’avoir pu trouver ce qui aurait désaltéré ma soif intérieure. Les hommes n’ont pas pu me fournir cette eau d’amour qui aurait pu désaltérer mon cœur ».

Sur la table de nuit de Marylin Monroe, à côté des cachets qu’elle avait absorbés pour s’en aller, il y avait un petit papier griffonné : « Tout le monde m’admire, chacun me désire mais personne ne m’aime ».

Oui, il nous faut une autre eau, une eau qui puisse satisfaire nos autres soifs. Comment l’appeler cette eau ? Le Christ lui a donné un nom. Il la nomme :  » l’eau vive « , c’est-à-dire l’eau qui fait vivre, l’eau qui donne la vie, toute la vie, qui comble totalement celui qui la boit, à tel point que le Christ, parlant de cette eau-là, déclare :

« Celui qui boira de cette eau n’aura plus jamais soif ».

 Alors, nous aussi, nous disons avec la femme de Samarie :

 « Seigneur, donne-la nous, tout de suite, cette eau-là !  »

Cette eau-là, elle a jailli en nous, le jour de notre Baptême. Dieu a versé en nous son Esprit Saint, son Esprit d’amour pour qu’il devienne, en chacun d’entre nous, une source de vie éternelle et de conversion. Cette eau-là, cette eau vive, elle est capable de désaltérer toutes nos soifs d’amour, tous nos désirs de connaissance, tous nos rêves les plus ambitieux et les plus fous, capable de désaltérer et de calmer toutes nos frustrations, toutes nos envies d’aimer et d’être aimé, tout ce qui nous laisse insatisfaits.

Parfois, nous oublions que cette eau vive est à notre portée.  A tous ces frustrés que nous rencontrons, à tous ces insatisfaits de la société de consommation, à tous ceux qui ont soif d’ailleurs et d’au-delà et d’autre chose, nous leur disons :

« Fais comme la Samaritaine, rencontre le Christ : il est l’eau vive. Avec lui, tu seras comblé définitivement ». Oui, comblé définitivement.

L’homme, tant qu’il n’a pas rencontré le Christ (regardez autour de vous), est un perpétuel insatisfait. Plus il se paganise, plus il a soif d’autre chose ; plus il s’éloigne de la source, plus il dit qu’il a soif. C’est normal ; il est créé à l’image de Dieu, il lui faut donc les mêmes besoins que Dieu : un Dieu de vérité, un Dieu de liberté, un Dieu de justice, un Dieu d’amour.

Il a soif de ce bonheur-là : il lui faut, à tout prix, en trouver la source et il va la chercher dans les biens matériels, le confort, la consommation. Il ne tombera là que sur une citerne crevassée et sans eau.

Il va donc chercher ailleurs, dans le domaine intellectuel : des théories, des idéologies, des philosophies. Là encore, c’est la steppe et le sable malgré tous les mirages.  Il aura beau consulter Marx, Freud, Nietzsche, Sartre, quelle sécheresse ! Que de désespoir !

On a dit que Sartre avait provoqué plus de suicides qu’il n’avait apporté de gouttes d’eau aux gorges desséchées ; philosophie du désespoir et du soupçon qui réduit l’homme à une caricature de lui-même et qui jette dans le sable toute l’eau vive de sa vocation, en niant son avenir divin, sa familiarité avec Dieu. On lui indique un puits, il se penche au-dessus de la margelle et n’y trouve que quelques cailloux.

Alors cette soif, avec quoi va-t-il l’étancher ? Pas avec des choses, pas avec des idées, peut-être avec l’amour ? Oui, mais avec quel amour ? Celui qu’on nous présente à la radio, à la télé, dans certaines revues ou dans certains films ? Amour d’épiderme : amour de rencontre ? Ou de location ? Amour d’instinct ? Amour de basse-cour ou de cour ? Ou bien celui que nous présente le Christ : un amour de cœur, amour d’oubli de soi, de service de l’autre, amour de fidélité, amour d’éternité ? Celui-là seul est porteur d’eau vive qui pourra combler intérieurement celui qui se donne : « Celui qui boira de cette eau-là, celle que je lui donnerai, n’aura plus jamais soif ».

            Soif de vérité : en face de toutes les questions essentielles que se pose l’homme, on ne lui répond que par des slogans, des mensonges, de la pub, de la désinformation et de la propagande.  Qui peut se vanter aujourd’hui de penser par lui-même ? D’être indépendant des idées toutes faites qu’on veut lui faire avaler ?

Soif de liberté : nous sommes paralysés par nos habitudes, esclaves de nos routines et de nos facilités, enchaînés par nos lâchetés, sous le carcan du péché.  Qui brisera nos chaînes ? Qui nous fera avancer librement vers la vraie source ? Sinon le seul vrai libérateur qui offre l’eau vive et non de la boue.

Soif de justice : dans le monde dur et sans pitié que le nôtre, dans lequel le fort écrase le faible…  Parce que nous sommes fils de Dieu, nous avons soif d’une égalité, d’une fraternité et d’une liberté dont nous pouvons lire les mots sur les façades de nos mairies mais bien peu dans le cœur des hommes !

Comme la Samaritaine, murmurons au Seigneur :

« Donne-nous cette eau vive ». Alors, elle s’engouffrera en nous comme un barrage qui se brise pour nous faire vivre de la vie même de Dieu : l’eau vive.  AMEN




3ième Dimanche de Carême – par le Diacre Jacques FOURNIER (Jn 4, 5-42).

Le Don de l’Eau Vive de l’Esprit

 

En ce temps-là, Jésus arriva à une ville de Samarie, appelée Sykar, près du terrain que Jacob avait donné à son fils Joseph.
Là se trouvait le puits de Jacob. Jésus, fatigué par la route, s’était donc assis près de la source. C’était la sixième heure, environ midi.
Arrive une femme de Samarie, qui venait puiser de l’eau. Jésus lui dit : « Donne-moi à boire. »
– En effet, ses disciples étaient partis à la ville pour acheter des provisions.
La Samaritaine lui dit : « Comment ! Toi, un Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? » – En effet, les Juifs ne fréquentent pas les Samaritains.
Jésus lui répondit : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : “Donne-moi à boire”, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. »
Elle lui dit : « Seigneur, tu n’as rien pour puiser, et le puits est profond. D’où as-tu donc cette eau vive ?
Serais-tu plus grand que notre père Jacob qui nous a donné ce puits, et qui en a bu lui-même, avec ses fils et ses bêtes ? »
Jésus lui répondit : « Quiconque boit de cette eau aura de nouveau soif ;
mais celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ; et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle. »
La femme lui dit : « Seigneur, donne-moi de cette eau, que je n’aie plus soif, et que je n’aie plus à venir ici pour puiser. »
Jésus lui dit : « Va, appelle ton mari, et reviens. »
La femme répliqua : « Je n’ai pas de mari. » Jésus reprit : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari :
des maris, tu en as eu cinq, et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari ; là, tu dis vrai. »
La femme lui dit : « Seigneur, je vois que tu es un prophète !…
Eh bien ! Nos pères ont adoré sur la montagne qui est là, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem. »
Jésus lui dit : « Femme, crois-moi : l’heure vient où vous n’irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père.
Vous, vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs.
Mais l’heure vient – et c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père.
Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer. »
La femme lui dit : « Je sais qu’il vient, le Messie, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, c’est lui qui nous fera connaître toutes choses. »
Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. »
À ce moment-là, ses disciples arrivèrent ; ils étaient surpris de le voir parler avec une femme. Pourtant, aucun ne lui dit : « Que cherches-tu ? » ou bien : « Pourquoi parles-tu avec elle ? »
La femme, laissant là sa cruche, revint à la ville et dit aux gens :
« Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? »
Ils sortirent de la ville, et ils se dirigeaient vers lui.
Entre-temps, les disciples l’appelaient : « Rabbi, viens manger. »
Mais il répondit : « Pour moi, j’ai de quoi manger : c’est une nourriture que vous ne connaissez pas. »
Les disciples se disaient entre eux : « Quelqu’un lui aurait-il apporté à manger ? »
Jésus leur dit : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre.
Ne dites-vous pas : “Encore quatre mois et ce sera la moisson” ? Et moi, je vous dis : Levez les yeux et regardez les champs déjà dorés pour la moisson. Dès maintenant,
le moissonneur reçoit son salaire : il récolte du fruit pour la vie éternelle, si bien que le semeur se réjouit en même temps que le moissonneur.
Il est bien vrai, le dicton : “L’un sème, l’autre moissonne.”
Je vous ai envoyés moissonner ce qui ne vous a coûté aucun effort ; d’autres ont fait l’effort, et vous en avez bénéficié. »
Beaucoup de Samaritains de cette ville crurent en Jésus, à cause de la parole de la femme qui rendait ce témoignage : « Il m’a dit tout ce que j’ai fait. »
Lorsqu’ils arrivèrent auprès de lui, ils l’invitèrent à demeurer chez eux. Il y demeura deux jours.
Ils furent encore beaucoup plus nombreux à croire à cause de sa parole à lui,
et ils disaient à la femme : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons : nous-mêmes, nous l’avons entendu, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde. »

            Jésus est sur les routes pour annoncer la Bonne Nouvelle du Royaume des Cieux, même aux frères ennemis d’Israël, les Samaritains. Il fait chaud et il a marché toute la matinée. A midi, alors que le soleil est au plus haut, il a soif et s’arrête au bord d’un puits. Mais ce dernier est profond et il n’y a rien sur place pour y puiser de l’eau…

            Arrive une femme Samaritaine avec sa corde et son seau… Il est interdit à un Juif de parler à un Samaritain ? Tout comme à un homme d’engager la conversation avec une femme seule ? Qu’importe… Le seul souci de Jésus est son bien, son bonheur, la Plénitude de sa vie. « J’ai soif », lui dit-il pour créer le contact… Et nulle part le texte ne dira par la suite qu’il boira…

            « Si tu savais le Don de Dieu », commence-t-il par lui dire, pour lui « mettre l’eau à la bouche », pour éveiller en elle le désir de découvrir, de recevoir ce Don de Dieu… Si tu savais aussi « qui est celui qui te dit « Donne-moi à boire » »… Elle a en effet sous ses yeux « le Verbe fait chair », « le Fils unique » et éternel du Père (Jn 1,14), Celui que le Père engendre en Fils de toute éternité par le Don de l’Esprit Saint… Il le connaît donc, Lui, le Fils, le Don de Dieu, car c’est grâce à lui et par lui qu’Il Est ce qu’Il Est. Et toute sa mission  consiste à proposer aux pécheurs que nous sommes, à nous dont le cœur ressemble à un désert aride et desséché, ce Don gratuit de l’Amour : l’Eau Vive de l’Esprit Saint (Jn 7,37-39), cet Esprit qui est Vie, « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63). Et si le Père engendre le Fils de toute éternité par ce Don de l’Esprit, ce même Don aura en nous, si nous consentons à l’accueillir, les mêmes effets… Nous serons alors tous « fils à l’image du Fils » (Rm 8,29), des créatures resplendissantes de Lumière et de Gloire pour avoir accepté de recevoir le Don de « l’Esprit de Dieu, l’Esprit de Gloire » (1P 4,14).

            « Si tu savais le Don de Dieu et qui est Celui qui te dit « Donne-moi à boire », c’est toi qui lui aurais demandé » poursuit-il, « et il t’aurait donné de l’eau vive »… Autrement dit, Jésus a dit à cette Samaritaine « Donne-moi à boire » en espérant qu’elle lui demandera à son tour « Donne-moi à boire »… Et il fait tout pour qu’elle lui adresse effectivement cette demande, en toute liberté. Alors, il pourra la combler. « Demandez, et vous recevrez… Car quiconque demande reçoit… Si vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent » (Lc 11,9-13), car telle est sa volonté : nous combler par son Esprit.     DJF




Rencontre autour de l’Évangile – 3ième Dimanche de Carême

« Si tu savais

le don de Dieu »

 

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons  (Jn 4, 5-42)

Nous sommes au chapitre 4 de l’Evangile selon saint Jean. De retour d’un pèlerinage à Jérusalem, Jésus passe par la Samarie pour rentrer en Galilée. C’est alors qu’il fit cette rencontre magnifique avec la Samaritaine.

 

 Et soulignons les mots importants

Samarie : Chaque fois qu’il est question de Samarie, de Samaritain, quelle est la position des juifs ?

Le puits de Jacob : Dans région faite de sécheresse et de désert, quel est le symbole du puits ? Connaissons-nous d’autres passages où le puits joue un rôle important ? (voir par ex. Gn 24, 11 ss ; Gn 29 ; Ex. 2, 15-22)

Jésus fatigué par la route, assis : Quelle est l’importance de ces mots ?

Une femme de Samarie : Savons-nous quelle était la mentalité de l’époque concernant la situation de la femme ?

« Donne-moi à boire ». Cette demande de Jésus déclenche tout.

« Si tu savais le DON de Dieu… et QUI est celui qui te demande à boire ».

« eau vive » : L’eau d’un puits est une eau saumâtre; Jésus parle d’une eau vive  dont il est lui-même la source :  quelle est cette eau vive ?

« source jaillissante pour la vie éternelle » nous savons quelle est cette eau vive qui jaillit en nous ?depuis quand ?

va chercher ton mari : Pourquoi cette demande imprévue de Jésus  à la femme ?

Adorer le Père.

Les vrais adorateurs  adoreront le Père  « en esprit et en vérité » : que veut dire Jésus ?

« Dieu est Esprit » : Pourquoi cette affirmation de Jésus est importante pour notre relation à Dieu ? Et les images, les temples, les églises… ?

Le Messie, celui qu’on appelle Christ

Je le suis moi qui te parle »

Pour l’animateur

– Le Royaume du Nord (capitale Samarie) tombe en 721 aux mains du roi de Babylone. Du mélange des habitants de Mésopotamie et des Israélites restés là, naîtra le peuple samaritain. Entre Juifs et Samaritains, les relations vont progressivement se détériorer. Les Samaritains vont construire leur propre temple sur le mont Garizim. C’est la séparation totale des deux peuples. Les juifs vont jusqu’à traiter les Samaritains de païens et d’impurs. A l’époque de Jésus, n’y a plus de rapport entre Juifs et Samaritains. Cela explique l’attitude de la femme.

– Jésus fatigué du chemin, assis, a soif et demande à boire. Un juif qui manifeste un manque (humanité et fragilité). Mais la demande n’est pas entendue par la femme. Et le refus de la femme va permettre à Jésus de rester assoiffé jusqu’à la fin et en même temps de prendre l’initiative de la rencontre : « si tu savais le don de Dieu …» et l’intérêt de la femme ne sera plus le puits, mais cet homme, ce juif fatigué, assoiffé, qui dans son manque se présente comme celui qui peut donner : et le don proposé n’a plus aucun rapport avec l’eau stagnante du puits : c’est une eau vive.

La Samaritaine, déstabilisée, change son regard sur Jésus. Elle l’appelle « Seigneur ». Elle a rencontré quelqu’un qui a rejoint ses aspirations les plus secrètes.

– Pourquoi Jésus lui demande-t-il d’aller chercher son mari ?

Le puits dans la Bible est le symbole des rencontres amoureuses. (Isaac et Rebecca, Jacob et Rachel, Moïse et Cippora). Cette femme est en face d’un homme pas comme les autres. Elle reconnaît progressivement en Jésus quelqu’un qui dépasse les cinq maris qu’elle a eu. Par sa parole Jésus lui a fait découvrir qu’elle existe autrement que par sa beauté éphémère et que sa dignité de femme est au-delà de sa puissance de séduction.

– En même temps Jésus, sans lui faire de morale, comme le faisaient les prophètes, révèle à cette femme que, par sa conduite, elle est en rupture avec la Loi. Jésus s’est révélé comme don de Dieu, celui par qui une loi nouvelle est proposée. Cette loi n’est pas extérieure à l’homme : elle dévoile sa vérité intérieure. La femme comprend si bien qu’elle en tire les conséquences :  « Je vois que tu es un prophète ».

– Le culte en Esprit et en vérité est celui que chaque croyant habité par l’Esprit rend au Père. C’est un culte intérieur parce qu’il est l’œuvre de l’Esprit : c’est l’adoration véritable que l’Esprit Saint qui est vérité suscite en nous.

Dieu n’est plus relié à une terre, ou un lieu, mais habite dans le cœur de tout homme ; en qui l’Esprit a fait sa demeure.

– « Je le suis » : c’est le titre même du Seigneur au Sinaï. (Ex.3,13-14). Le chemin intérieur que la femme a fait permet à Jésus de se révéler : il révèle qu’il est le Messie, à une femme, une samaritaine, comme il ne fera jamais ailleurs dans l’évangile de Jean. La femme peut abandonner sa cruche : dans sa soif de vivre et d’exister, elle a rencontré quelqu’un qui a mis en elle une source de vie.

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Jésus, nous te contemplons dans ton humanité avec ses limites : tu es fatigué, tu as soif, tu demandes à boire. Aide-nous à aimer notre condition humaine, puisque tu l’as épousée par solidarité et amour pour tous les hommes. Tu es resté libre dans ton cœur par rapport à tous les préjugés raciaux et religieux : c’est à une femme, une Samaritaine, qui en plus n’était pas des plus exemplaires, que tu as demandé à boire. Mieux que cela, tu as pris le chemin qui t’a conduit à son cœur pour qu’elle découvre en toi la Source d’Eau vive.

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

Jésus a trouvé la route qui l’a conduit au cœur de la samaritaine : quelles sont les attitudes qui lui ont permis de trouver cette route ?

Qu’est-ce que nous admirons le plus dans la manière de faire de Jésus ?

Jésus, fatigué, assis et assoiffé, tout Fils de Dieu qu’il est, demande à boire : que nous inspire pour notre vie cette démarche de Jésus ? Aujourd’hui, aurait-il quelque chose à me demander ?

Comme la Samaritaine, beaucoup de personnes de notre temps, et dans notre entourage, ont « faim et soif »,  elles sont en manque :  de quoi manquent-elles ? Que nous faudrait-il faire pour les rejoindre ?

Jésus est-il pour nous ce don de Dieu, cette eau vive qui étanche notre soif de Dieu ? Prenons-nous le temps de puiser à la source ? Comment ?

Comment adorer le Père « en esprit et en vérité » comme Jésus nous le demande ?

 

PRIONS

Heureux les croyants, chrétiens, juifs ou musulmans, en recherche de vraie communion avec le Dieu Unique.

Heureux ceux qui ne s’enferment pas dans l’Eglise comme dans un ghetto. Heureux ceux qui vont à la rencontre de ceux dont l’Eglise est loin : non‑croyants, croyants d’autres traditions religieuses, pauvres et étrangers, hommes et femmes d’autres cultures.

Heureux ceux qui cheminent avec les autres et se rappellent la lenteur de leur propre cheminement.

Heureux ceux qui se croyaient exclus et qui se sont sentis écoutés et accueillis.

Heureux ceux qui savent écouter la richesse inédite des autres.

Heureux ceux qui, en parlant des pauvres et des exclus quand ils sont lointains, ne restent pas sourds à leurs cris et à leurs paroles quand ils sont proches.

Heureux ceux qui ne fuient pas les conflits mais qui cherchent à les gérer en refusant toujours de tuer, mépriser, avilir ou humilier leurs adversaires.

Heureux ceux qui acceptent d’aimer même ceux qui refusent de les aimer.

Heureux les humbles. Ils aimeront comme Dieu.

Heureux ceux qui espèrent toujours : ils trouveront la route qui conduit au cœur des autres et de Dieu.

 

 

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2ième Dimanche de Carême – par Francis COUSIN (Mat 17, 1-9)

  « Il est bon que nous soyons ici ! » 

Nous avons tous connus des moments où nous nous trouvions dans un bonheur extrême, dans des situations diverses et différentes, où l’amour ou la satisfaction sont toujours présents, que ce soit une rencontre amoureuse, la naissance d’un enfant, ou une promotion professionnelle inattendue, ou … et on aurait aimé que ce moment dure longtemps …

Et cela se voit sur notre visage, où le bonheur transparait …

Malheureusement, cela ne dure pas tellement longtemps … parce qu’il faut revenir à la réalité humaine … et reprendre la vie de tous les jours !

C’est un peu ce qui est arrivé aux trois apôtres, Pierre, Jacques et Jean, montés avec Jésus sur « une haute montagne », assimilée le plus souvent avec le mont Thabor …

Avec quand même une grosse différence, c’est que là, dans l’évangile, ce ne sont pas les apôtres qui sont « transfigurés », mais le Seigneur Jésus, qui se montre tel qu’il est dans sa réalité.

Et cette vision de Jésus transfiguré, éblouissant de lumière, accompagné de Moïse et d’Elie, représentant la Loi et les Prophètes, eux qui avaient rencontré Dieu sur le mont Sinaï et le mont Horeb, permet de faire le lien entre Jésus et ce qu’il y avait avant, ce qu’on appelle l’ancien testament : Les paroles de Dieu transmises à Moïse sont à écouter au même titre que celles de Jésus, qui vient pour accomplir la Loi, et les enseignements ou les reproches faits par Jésus aux « croyants », pharisiens ou docteurs de la loi, ou aux publicains, sont à prendre pour nous au même titre que ceux faits par les prophètes en leur temps.

Devant un tel spectacle, ils tombent comme en extase … et voudraient que cela dure toujours : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. ».

Mais aussitôt, une nuée lumineuse, comme pendant l’exode, survint, et une voix leur dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! ».

C’est Dieu qui parle ! Mais nul ne peut voir Dieu sans mourir.

Alors ils se prosternent devant lui, « face contre terre et furent saisis d’une grande crainte. ».

Ils n’ont pas vu Dieu, seulement entendu …

Qu’importe : ils ont peur de mourir !

Une réaction qui peut nous paraître puérile, à notre époque, car nous savons combien Dieu est bon et aimant, mais pas à ce moment-là.

Pourtant, ce ne sont pas les apôtres qui ont voulu voir Dieu, … mais c’est lui-même qui s’est fait connaître, … lui qui s’est approché d’eux … dans son amour …

Alors Jésus s’approche d’eux … calmement, doucement, … et furtivement les touche, comme une mère qui prend soin de ses enfants apeurés : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! », dans le sens de « n’ayez pas peur ! ».

Il faut dire que la Transfiguration a lieu dans un moment difficile pour Jésus et les apôtres : Pierre venait de reconnaître en Jésus « le Christ, le Fils du Dieu vivant ! », Jésus avait fait la première annonce de sa passion, avait prévenu les apôtres qu’il leur faudrait prendre leur croix pour le suivre, et que malgré tout, ils se dirigeaient fermement vers Jérusalem …

Si pour les trois apôtres, cela leur a permis d’avoir une petite idée de la Vie Éternelle, il n’en était pas de même pour les autres. C’est pourquoi « Jésus leur donna cet ordre : ’’Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts’’. »

Pour tous, en effet, il leur faudrait chacun traverser leur Pâque, porter leur(s) croix, mourir pour enfin ressusciter … et pouvoir planter leur tente auprès de Jésus dans la vie éternelle …

Seigneur Jésus,

tout le monde aurait voulu

être présent avec toi sur le mont Thabor,

te voir dans la lumière du  ressuscité …

Mais il nous faudra,

comme pour les trois apôtres,

d’abord porter nos croix à ta suite

pour être admis auprès de toi

dans le bonheur de la vie éternelle.

 

Francis Cousin    

   

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Image dim Carême A 2°




Rencontre autour de l’Évangile – 2ième Dimanche de Carême

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé,

en qui j’ai mis tout mon amour ; écoutez-le »

 

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et comprenons les mots important (Mt 17, 1-9) 

Jésus pour la première fois a annoncé à ses disciples qu’il aura à subir l’épreuve de la Passion et de la Mort. Pierre n’arrivant pas à accepter qu’une telle chose puisse arriver à son Maître lui a fait des reproches et a tenté de le détourner du chemin qui doit le mener au bout de sa solidarité avec notre humanité pécheresse. Et Jésus repousse Pierre, car il reconnaît dans son intervention une nouvelle tentative de Satan pour l’empêcher de remplir sa mission.

Soulignons les mots importants       

Pierre, Jacques et Jean : A plusieurs reprises il est question de ces trois compagnons que Jésus prend avec lui. Cherchons ensemble.

Sur une haute montagne : Que signifie la montagne dans la Bible ?

Il fut transfiguré : Quelle pouvait être la tentation principale de Jésus, lui le Fils du Dieu Saint ?

Moïse et Elie : Rappelons-nous qui sont ces personnages bibliques. Pourquoi apparaissent-ils sur la montagne aux côtés de Jésus ?

Une nuée lumineuse : Dans la Bible, à quel événement important du peuple hébreu nous fait penser cette nuée ?

Mon Fils bien-aimé : ce chiffre revient plusieurs fois dans Bible : on peut chercher ensemble ?

En qui j’ai mis tout mon amour ? A quel autre moment Jésus a entendu cette parole du Père ?

Ecoutez-le: Quelle est l’importance de cette parole concernant la personne de Jésus ?

Frayeur: Pourquoi cette frayeur des compagnons de Jésus ?

Jésus s’approcha, les toucha…Relevez-vous et n’ayez pas peur : qu’est-ce que  ces attitudes nous révèlent  de Jésus ?

Jésus seul : Qu’est-ce que Matthieu veut souligner ?

 

Pour l’animateur 

 Le récit de la transfiguration est rempli d’allusions à l’Ancien Testament qui est la clé de lecture pour bien entrer dans la signification de cet événement important dans la vie terrestre de Jésus. Au chapitre 24,9 de l’Exode, nous voyons Moïse qui va sur la Montagne avec trois compagnons et qui bénéficie lui-même d’une transfiguration. Jésus est donc bien pour Mathieu le « nouveau Moïse » qui prend la tête du Peuple de Dieu et qui va lui donner sa Loi.

Jésus prend avec lui Pierre Jacques et Jean également au moment où il ressuscite la fille de Jaïre (Lc 8, 51) et à Gethsémani durant son agonie (Mt 26, 37).  Ce sont des témoins privilégiés à des moments très importants et significatifs de la mission de Jésus : le chemin de la résurrection et de la gloire passera pour Jésus par la Passion et la mort. Les trois disciples qui accompagneront le Maître en son épreuve ont par avance la vision de sa gloire.

La Montagne n’est pas tellement ici un lieu géographique, mais un « lieu théologique », c’est à dire le lieu de la rencontre avec Dieu qui se révèle. Peut-être s’agit-il du Thabor, selon une tradition très ancienne ; peut-être aussi le mont Hermon, tout au nord de la Palestine. Dans ce récit, la Montagne est le lieu de la révélation du Fils de Dieu. C’est un nouveau « Sinaï ».

Transfiguré : Jésus est doté de l’éclat des personnages célestes. « Son visage brilla comme le soleil ». Matthieu rappelle la promesse faîte aux croyants :  « ils resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père » (Mt 13, 43).  Jésus est donc le premier et le guide de tous ces fils du Royaume.

La nuée lumineuse est le symbole biblique de la présence de Dieu : durant le passage de la Mer Rouge (Ex. 13, 21) elle symbolisait Yahvé qui marchait avec son peuple, sur la Montage du Sinaï (Ex19, 16) elle symbolise le Dieu de l’Alliance qui donne à Moïse le Décalogue et durant le séjour au désert, cette nuée remplissait la Tente de la Rencontre (Ex 40, 34) symbole de Dieu qui demeure au milieu de son Peuple.

La présence de Moïse et d’Elie qui symbolisent la Loi et les Prophètes montre bien que Jésus est le Nouveau Moïse qui accomplit toutes les Ecritures.

C’est donc lui que le Père demande « d’écouter ». Ecouter Jésus, c’est écouter le Dieu d’Israël son Père, selon le premier commandement du Décalogue (Dt 6,4). Voir aussi Dt 18, 15 :  « Yahvé ton Dieu suscitera  pour toi, du milieu de toi, parmi tes frères, un prophète comme moi que vous écouterez. » Cette promesse s’accomplit en Jésus.

La peur et la prostration, c’est la réaction de l’homme devant la manifestation divine : comme le prophète Daniel lors de la vision du Fils de l’homme (Daniel 10, 9-13).

Quand Jésus, l’ami délicat,  vient les relever et les rassurer, il est seul. Jésus suffit comme  docteur de la Loi parfaite et définitive. Les trois compagnons sont assurés que Jésus  est bien «le Christ, le Fils du Dieu vivant » selon la profession de foi de Pierre. (Mt 16,15)

 

TA PAROLE DANS NOS COEURS :     

Jésus, tu as voulu vivre notre vie humaine en tout sauf le péché. Aujourd’hui, tu nous révèles la plénitude de ta personnalité qui était masquée dans la mission du Serviteur doux et humble que tu es. Nous savons que tu accomplis toutes les Ecritures. Nous accueillons avec joie la parole de ton Père :  « Tu es mon Fils bien-aimé du Père, en lui j’ai mis tout mon amour. » Quand nous te regardons accueillir, guérir, pardonner…nous savons que c’est le Père qui aime et se révèle en tout ce que tu fais. Nous savons que t’accueillir, Toi, c’est accueillir le Père. T’écouter, Toi, c’est écouter le Père.

   

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

La Parole aujourd’hui dans notre vie

La Transfiguration de Jésus est une promesse pour tous ceux qui le suivent au milieu des épreuves :  Comment vivons-nous l’Espérance dans les épreuves de la vie ?

Quelle est notre foi en la résurrection, en la transformation totale de notre être ?

Le dynamisme de vie reçu à notre baptême fait de nous des fils et des filles bien-aimés du Père, tandis que le Pain de vie de l’Eucharistie est un gage de résurrection : y croyons-nous vraiment ?

Le Père nous demande d’écouter son Fils : quels sont tous les moyens ou les lieux qui sont à notre disposition pour cette écoute ?

En son Fils il a mis tout son amour et il nous a tout dit : ne sommes-nous pas tentés parfois d’aller chercher ailleurs d’autres révélations.

Voici ce que dit saint Jean de la Croix : « Celui qui voudrait interroger Dieu et lui demander une révélation, Dieu pourrait lui répondre : « Puisque je t’ai dit toutes choses dans ma Parole, qui est mon Fils, il ne me reste plus rien à te répondre et à te révéler. Fixe les yeux sur lui seul, car j’ai tout renfermé en lui : en lui j’ai tout dit et tout révélé »

 

Ensemble prions

Seigneur Jésus, tes disciples avaient cru te découvrir et te tenir une bonne fois. C’était sur le Thabor : « Dressons ici trois tentes ». Mais comme si rien ne s’était passé, tu es redescendu parmi les hommes.

Seigneur, nous te cherchons trop souvent dans le ciel, toi qui nous précèdes chez nos frères, toi qui te reconnais parmi les petits.

Seigneur qui illumines le visage de celui qui te rejoint, donne à chacun de nous d’être pour ses frères image de Dieu, visage du Père.

Mets en nous ton Esprit. Et nous qui te cherchons dans l’obscurité de la foi, nous serons, comme tu le fus au Thabor, transfigurés.

 

Chant : Ecoute la voix du Seigneur  p. 288 (carnet paroissial)

 

 

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2ième Dimanche de Carême – par le Diacre Jacques FOURNIER (Mt 17, 1-9).

Jésus transfiguré, révélation vivante

du Royaume des Cieux

 

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmena à l’écart, sur une haute montagne.
Il fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière.
Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui.
Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »
Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre, et voici que, de la nuée, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! »
Quand ils entendirent cela, les disciples tombèrent face contre terre et furent saisis d’une grande crainte.
Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! »
Levant les yeux, ils ne virent plus personne, sinon lui, Jésus, seul.
En descendant de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : « Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. »

 

             Jésus vient d’annoncer pour la première fois à ses disciples sa Passion, sa mort et sa résurrection désormais toute proches (Mt 16,21-23). Eux qui croyaient siéger un jour à droite et à gauche de son trône dans le palais royal de Jérusalem (Mc 10,37) ! Et pour ce qui est de la résurrection, ils n’y comprennent rien (Mc 9,32) ! De plus, Jésus les a invités à prendre eux aussi leur croix à sa suite ! Et il a ajouté juste après : « Il en est d’ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Fils de l’homme venant avec son Royaume » (Mt 16,24‑28). Jésus est donc bien Roi, avec un Royaume, mais quel est-il ?

            L’épisode de la Transfiguration répond à toutes ces questions. La Lumière qui semble jaillir de son visage et de ses vêtements est celle-là même qui resplendira dans les ténèbres du tombeau au jour de la Résurrection. Elle est la Lumière de l’Esprit qui, au sommet de cette « haute montagne », « a resplendi aussi dans le cœur des disciples pour faire briller la connaissance de la gloire de Dieu qui est sur la face du Christ » (2Co 4,6). « Par ta Lumière, nous voyons la Lumière » (Ps 36,10)…

« Dieu est Esprit » (Jn 4,24), « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5), et le Fils est « de même nature que le Père » en tant que « Lumière né de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu » (Crédo). De toute éternité, il est « engendré » par le Père, il reçoit du Père la Plénitude de la nature divine qui est « Esprit » et « Lumière ». Au moment de la Transfiguration, le Père comble également les disciples de ce même Esprit qui va alors « illuminer les yeux de leur cœur pour leur faire voir ces trésors de gloire » (Ep 1,17-21) qui sont dans le Fils mais aussi, en cet instant, en eux… Ils voient « le Fils de l’homme venant avec son Royaume », ils le voient, ils le vivent, car ils sont unis à Lui dans la communion d’un même Esprit… Et « le Royaume des Cieux est » justement « paix et joie dans l’Esprit Saint » (Rm 14,17).

« Le fruit de l’Esprit est joie » (Ga 5,22). « Il est donc heureux que nous soyons ici », de cœur, expérimentant, en le vivant, cette unité d’Esprit avec Dieu… Et c’est toujours ce même Esprit qui, au moment de la Passion, donnera à Jésus la force de vaincre le mal par le bien (Rm 12,21), en répondant à la haine par l’Amour et le Don de soi pour ceux-là même qui le tuaient… « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). Et c’est ce même Esprit qui se proposera à la foi des disciples pour les soutenir aux jours où, eux aussi, devront porter leur croix à la suite de leur Maître (Mt 10,17-20)… Avec lui et grâce à lui, le temps de la croix sera aussi celui de la Lumière, de la Gloire et de la Joie…         DJF




2ième Dimanche de Carême – Homélie du Père Louis DATTIN

Transfiguration

 Mt 17, 1-9

En repensant à ce qu’était la religion de mon enfance, je pense aussi aux plus anciens parmi nous : que nous avait-on appris ? Que « vivre en chrétien », c’était essentiellement de ne pas faire de péché mortel pour pouvoir aller au ciel après la mort.   Notre vie sur la terre avait comme but essentiel de nous préparer à aller au ciel après la mort.

Pourquoi faisait-on baptiser les enfants ? Parce que, sans Baptême, ils ne pouvaient pas aller au ciel après la mort. Le Baptême était comme le ticket d’entrée pour le ciel. Si on allait à la messe tous les dimanches, c’était pour nous rappeler que nous ne sommes sur la terre que pour mériter le ciel après la mort. On nous disait même qu’il fallait pour cela se résigner aux souffrances de ce monde puisqu’elles seraient récompensées par le bonheur du ciel après la mort.

Et puis, peu à peu, on a pris conscience que la vie sur terre n’était pas simplement faite pour parvenir au ciel après la mort mais qu’elle avait déjà une grande valeur en elle-même et pour elle-même. Notre vie familiale, notre vie professionnelle, notre vie de loisirs : c’est à travers tout cela que nous nous construisons nous-mêmes et que nous contribuons à construire le monde, à le faire progresser, à le rendre plus beau, plus amical, plus heureux.

Que notre société progresse vers plus de justice et de solidarité entre nous, entre tous, n’est-ce-pas à cela que Dieu nous appelle ? De là, les engagements que les chrétiens ont pris dans la politique, le syndicalisme et les activités culturelles ou caritatives de toutes sortes : « Le Royaume de Dieu, il doit être déjà parmi vous ».

Mais alors, ne risque-t-on pas de tomber dans un excès opposé au premier ! Ne plus vivre que pour cette vie terrestre ?

Ce récit de la Transfiguration que nous venons d’entendre, alors que pendant ce Carême, nous essayons de monter vers Pâques, nous rappelle que si notre vie sur terre a une immense valeur, elle n’est pas pour autant le tout de la vie. Notre vie de maintenant ne trouvera jamais son épanouissement définitif sur la terre. Nous sommes faits pour une plénitude, pour un accomplissement que nous n’atteindrons jamais ici-bas.  Bien sûr, nous devons nous battre pour une vie meilleure pour tous, mais notre vie sur terre restera toujours fragile et limitée.

Cet Evangile d’aujourd’hui nous rappelle donc le grand dessein de l’amour de Dieu : c’est qu’au-delà de la vie terrestre, nous parvenions à une vie totalement transfigurée dans la plénitude de la vie de Dieu.  Il ne s’agit pas, comme le désirait St-Pierre, de s’installer : « Une tente pour Jésus, une pour Elie, une pour Moïse et une quatrième pour nous” », il s’agit d’avancer, il s’agit de partir comme Abraham, aller planter sa tente ailleurs.

Comme les trois apôtres de Jésus, nous partons, nous cheminons avec le Seigneur vers cette plénitude de gloire et d’amour.  Mais ce cheminement ne se fait qu’à travers les imprévus et les péripéties de notre vie.

Jésus va bientôt rencontrer l’opposition des autorités religieuses de son temps qui le condamneront à mort et nous-mêmes, nous affronterons les problèmes quotidiens avec des échecs peut-être et finalement la mort. Mais au-delà du Calvaire, il y aura Pâques ; la Résurrection de Jésus ! De même, au-delà de notre mort, il y aura la vie en plénitude avec Dieu, avec Jésus.

Il n’est pas étonnant que les disciples se sentent bien au moment de la Transfiguration, dans cette lumière, dans cette douceur, et tous les hommes sont tentés d’arrêter leur vie au moment où elle prend un visage glorieux comme c’est le cas, sur le mont Thabor, ce soir-là.  Mais les apôtres sont vite ramenés à la réalité parce que les haltes de la vie ne sont jamais permanentes et les gens qui s’assoient sur leur bonheur se trompent de paradis.

Plus qu’un spectacle, la Transfiguration de Jésus est un appel au monde à se transfigurer, à se laisser illuminer par le divin qui l’habite.  C’est ce que St-Paul exprimait : « Et nous tous, qui, le visage découvert, réfléchissons, comme un miroir, la gloire du Seigneur, nous sommes transfigurés en cette même image, toujours plus glorieuse ».

La vie du chrétien devrait refléter la beauté de l’œuvre de Dieu, la grandeur de la gloire de Dieu. Sommes-nous des miroirs de Dieu ?  Vous savez comment font les opérateurs de cinéma pour mettre de la lumière dans la scène qu’ils vont filmer : ils utilisent de grandes plaques de métal qui captent le soleil et font dévier cette lumière sur le visage des personnages.

Captons-nous assez de soleil de Dieu pour que nos visages soient assez lumineux, assez illuminés, pour qu’on puisse dire : « Ce n’est pas sa lumière à lui, c’est la lumière de Dieu, en lui, sur lui ».

Sommes-nous, aux yeux des autres, assez transfigurés pour que les autres, en nous voyant, puissent deviner au-delà de nous-mêmes, qu’il y en a un Autre qui nous illumine et dont la lumière est capable d’éclairer les autres ? Trop souvent, nous donnons une image d’une croix sans espérance, comme si la Passion était un idéal de vie et nous sommes rejetés à cause de notre passivité.

Un chrétien, et c’est d’ailleurs pour cela qu’il vit son carême, devient toujours vainqueur de la mort. Il est un ressuscité tout de suite parce qu’il est un baptisé c’est-à-dire un vainqueur de la mort.  La terre n’est pas une espèce de purgatoire attendant je ne sais quelle espérance dans un monde à venir.

Le chrétien est déjà un homme libéré et libérateur. Bien sûr, il y a toutes les difficultés de la vie, mais ces épreuves n’en font pas un vaincu qui crie au secours dans une perpétuelle prière plaintive.

Le chrétien vivant possède en lui la vie capable de vaincre toutes les morts, y compris celle de son égoïsme et de son orgueil.
Un chrétien, lui aussi, doit entendre la voix de Dieu proclamer : « Celui-ci est aussi mon Fils bien-aimé ». Le Fils bien-aimé du Père et cela doit transparaitre, étonner, irradier !

Notre vie chrétienne n’est pas pour plus tard, elle est pour maintenant et aussi pour demain.  La vie de Dieu devrait déjà nous transfigurer, nous illuminer, éclairer notre entourage. Nous devons être déjà les plus beaux des enfants des hommes, non pas par l’harmonie des traits de notre visage, mais par ceux de la beauté que donne la paix, la certitude d’être aimé superbement.

Notre présence aux autres devrait être si tonifiante qu’elle donne aux hommes qui nous côtoient le goût de dire comme St-Pierre : « Il fait bon chez vous. Nous voudrions y construire notre maison ». C’est cette espérance-là, une espérance pas pour demain, mais pour aujourd’hui, qui doit illuminer notre vie.

Il n’y a pas opposition entre notre vie quotidienne (notre travail, notre vie de famille et tous nos engagements) et la vie avec Dieu après la mort. Pas d’opposition, mais continuité et transfiguration éternelle de tout ce que nous aurons réalisé
ici-bas : rien ne sera perdu, tout sera transfiguré ! AMEN