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12ième dimanche du Temps Ordinaire (Mt 10, 26-33) – Homélie du Père Louis DATTIN

N’ayez pas peur

Mt 10, 26-33

            Nous avons toujours tendance à penser que l’évangélisation aujourd’hui serait plus difficile qu’à d’autres époques. Il est vrai que notre monde sécularisé et matérialisé n’écoute guère la voix de Dieu. Mais Jésus, en son temps, a dû éprouver vivement cette même difficulté.

Rappelez-vous, sa prédication de la Parole de Dieu fut bien modeste, à la façon d’un message voilé, murmuré dans l’ombre, au creux de l’oreille. Jésus en a parfaitement conscience, mais il a l’audace de croire que son message de l’Évangile fera le tour de la terre, qu’il sera dévoilé au grand jour, « proclamé sur tous les toits » malgré tous les obstacles. Que l’évangélisation soit un acte de courage et d’audace contre toutes les apparences contraires, cela ressort du refrain de cet Evangile :

« Ne craignez pas ! » et pourtant « Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups ! ». Il ne s’agit donc pas de rester dans nos pantoufles sous prétexte de prudence, de présenter l’Évangile comme un petit traité de psychologie ou « d’équilibre mental » ou d’une boîte de « capsules de bon sens ». Jésus sait qu’il est dangereux de parler de Dieu et les chrétiens doivent dominer cette crainte. Un chrétien doit avoir en horreur ce qui est fade et insipide : toute sa vie, ses paroles doivent avoir la saveur du sel, la chaleur du feu et même un certain goût de violence. Le Royaume des cieux souffre violence « ce sont les violents qui s’en emparent ». Il faut au chrétien cette folie qui s’appelle la « foi en Jésus-Christ ».

Aujourd’hui, l’homme moderne est impressionné par la montée des sciences, les progrès technologiques, comme si tout cela rendait la foi vieillotte, dépassée, inutile. On ne sait plus ce qui est vrai et beaucoup sont tentés de se taire, de ne plus proclamer sur les toits l’Évangile ou plus subtilement de l’édulcorer et de n’en retenir que ce qui va dans le sens du monde.

Sachons tout d’abord que, même les plus intrépides porte-paroles de Dieu ont connu la peur : peur de ne pas être suivis, peur d’être incompris, peur du ridicule, peur de la solitude, peur de la persécution, peur de la mort. Audace, hardiesse, courage, initiative, goût du risque sont des vertus nécessaires pour qui veut suivre Jésus.

« Ne craignez pas, n’ayez pas peur », nous dit Jésus.

Mais lui, Jésus, a-t-il eu peur ? Oui ou non ? Non, parce qu’il a osé s’affronter aux autorités religieuses de son temps, ce qui n’était pas rien, pour leur montrer que c’était l’amour et la miséricorde qui l’animaient et éclairaient sa mission.

Il guérit, exprès le jour du sabbat, montrant ainsi que l’amour d’une personne qui souffre passe avant les règlements religieux les plus sacrés.

Il attaque les pharisiens sur leur ritualisme, leur disant qu’aux yeux de Dieu, c’est la pureté du cœur et des sentiments qui ont la priorité.

Il va au-devant des lépreux, ose les toucher et qui plus est, les réintégrer dans la société. Il fréquente les gens les plus pauvres, les plus méprisés, va manger avec eux, allant jusqu’à dire qu’il n’était pas venu pour les justes, mais pour les pécheurs comme un médecin qui n’est pas fait pour les bien-portants, mais pour les malades.

Il dénonce ouvertement l’hypocrisie des scribes qui font des règlements pour les autres et qui, eux-mêmes en prennent à leur aise. Bref, il se met à dos les responsables de son temps.

Mais il n’a pas peur et devant ses juges, il affirme clairement sa divinité. « Es-tu le Messie, le fils de Dieu? » Et sa réponse va le condamner à mort : Jésus n’a pas eu peur d’être fidèle à sa mission.

Mais par ailleurs, Jésus n’est pas un homme insensible et stoïque devant les souffrances qu’il rencontre. Rappelez-vous Gethsémani : on le verra accablé de tristesse, de peur et d’angoisse. Oui, comme nous tous, Jésus a eu peur de la souffrance et de la mort. Et nous ? Il est bien normal aussi que nous ayons peur de la souffrance et de la mort, même si nous croyons en Dieu et même si nous savons qu’il ne nous abandonnera pas.

Mais quand il est question de l’essentiel, de notre mission de chrétiens, Jésus nous dit clairement : « N’ayez pas peur d’être fidèles jusqu’au bout », « On vous contredira, on dira toute sorte de mal contre vous à cause de moi, gardez confiance, n’ayez pas peur ».

Traduisons tout cela pour nous-mêmes :

 N’ayez pas peur de vous montrer fidèles à l’Esprit de Jésus et à vos convictions religieuses.

 N’ayez pas peur des imprévus et des incertitudes de l’avenir ; la vie, c’est une grande aventure et vous n’en êtes pas, vous les chrétiens, de simples figurants mais des acteurs…

 N’ayez pas peur des petites ou grandes tempêtes qui peuvent survenir, gardez confiance « Je suis avec vous » pour vous aider à faire face.

 N’ayez pas peur de prendre position ouvertement pour défendre une cause juste.

 N’ayez pas peur de prendre du temps pour soulager celui qui souffre ou pour accueillir celui qui n’a plus rien.

 Ne vous laissez pas paralyser par la peur.

Sur quoi donc s’appuie Jésus pour avoir tant de courage ?

« Ne craignez pas ceux qui tuent le corps mais ne peuvent tuer l’âme ». La puissance de l’homme est bien limitée : elle ne peut atteindre en nous que la vie terrestre : le corps. Aucune puissance humaine n’est capable de détruire ce qui fait notre valeur véritable, l’espérance de la vie éternelle, l’âme. C’est ce courage-là qui fait rester en Algérie les trappistes de Tibhirine et les coptes d’Egypte et c’est sans peur et le cœur en paix que les neuf trappistes priaient dans leur couvent de Médéa : ils savaient ce qui les attendait, mais ils avaient mis leur confiance en Dieu.

Pour illustrer cette confiance absolue, Jésus raconte deux petites paraboles inoubliables : « Ne vend-t-on pas deux moineaux pour un sou ? », « Or pas un seul ne tombe à terre sans que votre Père ne veuille ». Quant à vous, même vos cheveux sont comptés ! (Personnellement, je ne donne pas de travail à Dieu pour ce calcul). Comme elles semblent naïves ces deux paraboles des deux moineaux et des cheveux ! Pourtant, plus que tous les discours abstraits, ces images nous crient que Dieu nous aime et prends soin de nous, que rien n’échappe à l’amour vigilant de notre Père.

Alors que pourrions-nous craindre puisqu’il dispose de notre destin total et ultime ? Quel est l’horizon de notre agir dans notre vie quotidienne : le corps seul ou le corps et l’âme ?

Mais, après nous avoir dit que nous n’avons pas à avoir peur, Jésus reprend : « Craignez plutôt ceux qui peuvent tuer l’âme ».

Formule étonnante ! Que signifie, dîtes-moi, tuer l’âme ? Est-il possible de tuer l’âme ? L’âme ne serait-elle pas immortelle ?

Jésus s’explique immédiatement :

« Celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi, je le

renierai devant mon Père qui est aux cieux ».

Voilà donc, seulement ce que nous avons à craindre : la seule chose à redouter, c’est de perdre la foi, d’apostasier. Ce qui tue l’âme, c’est de renier Jésus. Ce qui perd l’Eglise, ce ne sont pas les persécuteurs, mais les lâcheurs. Ce que nous devrions craindre le plus, c’est la déperdition de la foi dans nos âmes.

Quand on pense aux campagnes télévisées pour sauver des espèces animales en déperdition par suite d’une marée noire, pour les « tang » ou pour les phoques, on peut se demander ce que nous devrions faire pour que l’homme lui-même ne soit pas avili, détruit de l’intérieur, en perdant tout sens pour sa vie. « Périr dans la géhenne » voilà ce que Jésus redoute le plus pour l’humanité.

Pour finir, frères et sœurs, rappelons-nous que notre vie de chrétiens ne peut pas être « neutre ». Elle est plutôt un choix rigoureux « ou bien… ou bien… » : ou bien nous nous prononçons « pour » Jésus, ou bien nous nous prononçons « contre » lui.

Enjeu formidable : voilà où se situe le sérieux de notre vie ! « Ne craignez pas la mort du corps, craignez la mort de l’âme! » AMEN




11ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Matthieu 9, 36-10, 8)

       « La moisson est abondante,

mais les ouvriers sont peu nombreux. »

 

C’est une phrase que l’on entend encore souvent en ces temps-ci …

Dans l’Église, bien sûr … pour qu’il y ait davantage de vocations de prêtres, de moines, de religieuses … mais aussi de catéchistes … de personnes qui s’engagent comme responsables de mouvements de prière, de jeunes, de nettoyage des églises, d’aide aux autres (Secours Catholique, Conférence Saint Vincent de Paul, …) ou autres groupes de réflexion …

Mais pas seulement dans l’Église … Aussi dans beaucoup d’associations non catholiques … avec des besoins immenses …

Combien de gens vivent … sans vraiment vivre … !

Des gens abattus, fatigués, n’ayant pas vraiment de but dans la vie …

Alors on en voit qui se tournent vers les psychologues, ce qui peut être très utile, et souvent bénéfique pour eux … mais aussi vers des ’’coaches’’ en tous genres, vers des cartomanciennes, des ’’voyants’’, l’astrologie … pour essayer de trouver un sens à leur vie …

À leur vie terrestre … car pour beaucoup d’entre eux, il n’y a rien après la mort physique … même chez des personnes baptisées ! …

Et pourtant, l’Évangile est proclamé depuis presque deux mille ans …

Voyant la foule qui l’entourait aussi perdue, Jésus réagit en envoyant ses douze apôtres pour qu’ils proclament partout que « le royaume des Cieux est tout proche. ».

Avant de partir, Jésus « leur donna le pouvoir d’expulser les esprits impurs et de guérir toute maladie et toute infirmité. ».

Mais il leur donne d’autres conseils : « Ne prenez pas le chemin qui mène vers les nations païennes et n’entrez dans aucune ville des Samaritains. Allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël. »

À ce moment-là, Jésus n’a pas encore rencontré la femme Syro-Phénicienne, la Samaritaine ou le possédé de Gérasa … il ne sait pas encore combien certains dans les nations païennes sont aussi en recherche du vrai Dieu.

Il termine son envoi en disant : « Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. »

Le don donné aux apôtres est comme tout don : gratuit !

Et ce n’est pas parce qu’il est donné qu’on en devient propriétaire, tout au moins pour les dons de Dieu. On n’en fait pas ce que l’on veut, et il faut toujours se relier à celui qui a fait le don, c’est-à-dire à Dieu. (Pour les dons matériels entre humains, il n’en est pas de même : comme dit le proverbe : « Donner, c’est donner ; reprendre, c’est voler ! »). On en a un exemple juste après la transfiguration où les apôtres qui n’étaient pas avec Jésus n’ont pas pu guérir l’enfant épileptique. À son arrivée, Jésus le guérit et explique à ses apôtres, à part : « Cette espèce-là, rien ne peut la faire sortir, sauf la prière. » (Mc 9,29), le lien entre les apôtres et Dieu.

Ainsi, par la prière, c’est Dieu qui agit en nous, mais nous, tout seul, nous ne pouvons rien.

On verra par la suite, qu’avec la Pentecôte, avec la présence de l’Esprit en nous, et avec la force qu’il nous donne, nous serons capables de faire de grandes choses qui nous semblaient impossibles de faire de nous-même, grâce justement à la présence de l’Esprit en nous, même si nous n’en sommes pas conscients sur le champ.

Il en fut de même pour les apôtres qui, au départ, n’étaient envoyés que pour « proclamer que le royaume des Cieux est tout proche. », et qui, après la Pentecôte proclamerons le kérygme de la foi chrétienne : la mort et la résurrection de Jésus, Fils de Dieu.

Seigneur Jésus,

on voit bien dans ce texte

l’évolution de ta compréhension

de la mission qui t’a été confiée :

Passer des brebis perdues

de la maison d’Israël

à l’ensemble du monde

avec l’envoi de l’Esprit Saint.

 

Francis Cousin    

    

 

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Prière dim ord A 11°




11ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 9,36 -10,8) – Diacre Jacques Fournier

       En ce temps-là, voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger. Il dit alors à ses disciples : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. » Alors Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir d’expulser les esprits impurs et de guérir toute maladie et toute infirmité. Voici les noms des douze Apôtres : le premier, Simon, nommé Pierre ; André son frère ; Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère ; Philippe et Barthélemy ; Thomas et Matthieu le publicain ; Jacques, fils d’Alphée, et Thaddée ; Simon le Zélote et Judas l’Iscariote, celui-là même qui le livra. Ces douze, Jésus les envoya en mission avec les instructions suivantes : « Ne prenez pas le chemin qui mène vers les nations païennes et n’entrez dans aucune ville des Samaritains. Allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël. Sur votre route, proclamez que le royaume des Cieux est tout proche. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons. Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. »

Avec le Christ, se mettre au service de la Vie (Mt 9,36-10,8)…

Juste avant notre Evangile, nous lisons : « Jésus parcourait toutes les villes et les villages, proclamant la Bonne Nouvelle du Royaume et guérissant toute maladie et toute langueur ». Ici, en « voyant les foules » qui venaient encore à Lui, il fut, littéralement, « bouleversé jusqu’au plus profond de Lui-même » parce qu’elles étaient « fatiguées et abattues comme des brebis sans berger ». Pourtant, il sait bien qu’il est ce « Médecin » que Dieu a envoyé pour sauver les pécheurs que nous sommes tous. Sa Présence accueillie sera alors synonyme de consolation dans nos souffrances, de réconfort, d’encouragement et de force qui se proposera de régner au cœur de toutes nos fatigues, de toutes nos faiblesses… « Venez à moi vous tous qui peinez et ployez sous le poids du fardeau et vous trouverez le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car mon joug est facile à porter et mon fardeau léger ». En effet, avec le Christ, par Amour, notre fardeau sera le sien, « Lui qui a pris nos infirmités et s’est chargé de nos maladies ». Alors, sa Joie ne sera jamais totalement absente de nos pleurs…

Mais la tâche est immense… Combien de bouches faudrait-il pour que cette Bonne Nouvelle soit proclamée à tous ! « La moisson est abondante, et les ouvriers peu nombreux. Priez donc le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson ». Et cette prière commence aussitôt à être exaucée : l’Eglise apparaît avec les Apôtres, ces douze colonnes sur lesquelles se construira tout l’édifice. Et cette Eglise reçoit exactement la même Mission que le Christ. Ici, en l’envoyant seulement « aux brebis perdues de la Maison d’Israël », il la prépare à cette Mission universelle où, Ressuscité, il continuera de partir, avec elle et par elle, à la rencontre de toutes les foules « fatiguées et abattues ». Avec l’aide et l’assistance de l’Esprit Saint, l’Eglise aura juste à se faire, du mieux qu’elle peut, la Servante de cette Parole du Christ Sauveur qu’elle a elle-même reçue… Et il dépend de chacun d’entre nous que cette aventure devienne la nôtre, pour la Vie, la Paix et la Joie de beaucoup… D. Jacques Fournier




Audience Générale du Mercredi 7 juin 2023

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 7 juin 2023


Catéchèse – La passion pour l’évangélisation : le zèle apostolique du croyant – 16. Les témoins : Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, patronne des missions

Chers frères et sœurs, bienvenus, bonjour !

Nous voici devant les reliques de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, patronne universelle des missions. Il est beau que cela se produise durant le moment de notre réflexion sur la passion pour l’évangélisation, sur le zèle apostolique. Aujourd’hui, donc, laissons-nous aider par le témoignage de Sainte Thérèse. Elle est née il y a 150 ans et, à l’occasion de cet anniversaire, j’ai l’intention de lui dédier une Lettre Apostolique.

Elle est la patronne des missions, bien qu’elle ne soit jamais partie en mission : comment explique-t-on cela ? Elle était carmélite et sa vie fut marquée par la petitesse et la faiblesse : elle se définissait elle-même comme « un petit grain de sable ». De santé fragile, elle mourut à l’âge de 24 ans seulement. Mais si son corps était infirme, son cœur était vibrant, était missionnaire. Dans son « diaire », elle raconte qu’être missionnaire était son désir et qu’elle voulait l’être non seulement pour quelques années, mais pour le reste de sa vie, voire jusqu’à la fin du monde. Thérèse fut la « sœur spirituelle » de plusieurs missionnaires : depuis le monastère, elle les accompagnait par ses lettres, ses prières et en offrant pour eux des sacrifices continuels. Sans en avoir l’air, elle intercédait pour les missions, cachée comme un moteur qui donne au véhicule la force pour avancer. Cependant, elle fut souvent incomprise par ses sœurs moniales : elle reçut d’elles « plus d’épines que de roses », mais elle accepta tout avec amour, avec patience, offrant, en même temps que sa maladie, les jugements et les incompréhensions. Et elle le fit avec joie, et elle le fit pour les besoins de l’Église, afin que, comme elle disait, se répandent « des roses sur tous », en particulier sur les plus éloignés.

Mais maintenant, je me demande, nous pouvons nous demander, d’où lui viennent ce zèle, cette force missionnaire et cette joie d’intercéder ? Deux épisodes survenus avant l’entrée de Thérèse au monastère nous aident à le comprendre. Le premier concerne le jour qui changea sa vie – un jour lui a changé la vie -, Noël 1886, où Dieu opère un miracle dans son cœur. Thérèse aura bientôt 14 ans. En tant que benjamine, elle est choyée par tout le monde à la maison mais non pas mal éduquée. Au retour de la messe de minuit, son père, très fatigué, n’a pas envie d’assister à l’ouverture des cadeaux de sa fille et dit : « Dieu merci, c’est la dernière année ! », parce qu’à l’âge de 15 ans, on ne le faisait déjà plus. Thérèse, de nature très sensible et prompte aux larmes, en fut blessée, monta dans sa chambre et pleura. Mais elle réprima rapidement ses larmes, redescendit et, pleine de joie, ce fut elle qui réjouit ainsi son père. Que s’est-il donc passé ? Cette nuit-là, alors que Jésus s’était fait faible par amour, elle était devenue forte dans son âme – un vrai miracle :  en quelques instants, elle était sortie de la prison de son égoïsme et de son apitoiement sur elle-même et elle commença à sentir que « la charité entrait dans son cœur- c’est ce qu’elle dit-, avec le besoin de s’oublier elle-même » (cf. Manuscrit A, 133-134). Dès lors, elle oriente son zèle vers les autres, pour qu’ils trouvent Dieu, et au lieu de chercher des consolations pour elle-même, elle se donne pour tâche de « consoler Jésus, [de] le faire aimer des âmes », car – note Thérèse – « Jésus est malade d’amour et […] la maladie de l’amour ne peut être guérie que par l’amour » (Lettre à Marie Guérin, juillet 1890). Voilà donc son objectif quotidien : « faire aimer Jésus » (Lettre à Céline, 15 octobre 1889), intercéder pour que les autres puissent l’aimer. Elle écrit : « Je voudrais sauver les âmes et m’oublier pour elles : je voudrais les sauver même après ma mort » (Lettre à l’abbé Roullan, 19 mars 1897). Plusieurs fois, elle dira : « Je passerai mon ciel à faire du bien sur la terre ». C’est le premier épisode qui a changé sa vie à l’âge de 14 ans.

Et son zèle était surtout dirigé vers les pécheurs, vers les « éloignés ». C’est ce que révèle le second épisode. C’est intéressant : Thérèse apprend l’existence d’un criminel condamné à mort pour des crimes horribles, il se nommait Enrico Pranzini – elle écrit le nom : reconnu coupable du meurtre brutal de trois personnes, il est destiné à la guillotine, mais ne veut pas recevoir les réconforts de la foi. Thérèse le prend à cœur et fait tout ce qu’elle peut : elle prie de toutes les manières pour sa conversion, afin que celui qu’elle appelle avec une compassion fraternelle « le pauvre Pranzini » ait un petit signe de repentir et fasse place à la miséricorde de Dieu, en qui Thérèse voue une confiance aveugle. L’exécution a lieu. Le lendemain, Teresa lit dans le journal que Pranzini, juste avant de poser sa tête sur l’échafaud, « soudain, saisi d’une inspiration subite, se retourne, saisit un Crucifix que le prêtre lui présentait et baise trois fois les plaies saintes » de Jésus. La sainte commente : « Alors son âme alla recevoir la sentence miséricordieuse de Celui qui a déclaré qu’au Ciel il y a plus de joie pour un seul pécheur qui fait pénitence que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de pénitence ! » (Manuscrit A, 135).

Frères et sœurs, voilà la force de l’intercession mue par la charité, voilà le moteur de la mission. Les missionnaires, en effet, dont Thérèse est la patronne, ne sont pas seulement ceux qui parcourent de longues distances, apprennent de nouvelles langues, font de bonnes œuvres et sont doués pour l’annonce ; non, missionnaire l’est aussi celui qui vit, là où il se trouve, comme instrument de l’amour de Dieu ; c’est celui qui fait tout pour que, par son témoignage, sa prière, son intercession, Jésus soit manifesté. Et c’est le zèle apostolique qui, rappelons-le toujours, ne procède jamais par prosélytisme – jamais ! – ou par contrainte– jamais ! -, mais par attraction : la foi nait par attraction, on ne devient pas chrétien parce qu’on y est forcé par quelqu’un, non, mais parce qu’on est touché par l’amour. Avant tant de moyens, de méthodes et de structures, qui parfois détournent de l’essentiel, l’Église a surtout besoin de cœurs comme celui de Thérèse, de cœurs qui attirent à l’amour et rapprochent de Dieu. Et demandons à la sainte – nous avons les reliques ici – demandons à la sainte la grâce de surmonter notre égoïsme et demandons la passion d’intercéder, d’intercéder pour que cet attrait soit plus grand chez les gens et pour que Jésus soit connu et aimé.

* * *

Je salue cordialement les pèlerins de langue française en particulier les délégations des Diocèses Séez et de Bayeux-Lisieux conduites par leurs évêques respectifs, qui accompagnent les reliques de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus à l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance et du 100ème anniversaire de sa béatification. Demandons à notre Sainte la grâce d’aimer Jésus comme elle l’a aimé, de Lui offrir nos épreuves et nos peines comme elle l’a fait, pour qu’Il soit connu et aimé de tous.

Demain, à 13h00, l’Action catholique internationale propose  aux croyants des diverses confessions et religions de se recueillir en prière, en consacrant « Une minute pour la paix ». Accueillons cette invitation, en priant pour la fin des guerres dans le monde et en particulier pour la chère Ukraine martyrisée.




Dimanche du Corps et du Sang du Christ – par Francis COUSIN (Jn 6, 51-58)

         « Le pain de Vie. »

 

« Moi, je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. »

Jésus venait de parler de la manne, cette nourriture qui avait permis aux Hébreux de vivre pendant quarante ans dans le désert lors de la sorite d’Égypte. Nourriture céleste, car venue du ciel, don de Dieu, … mais cette nourriture avait une finalité terrestre : rester en vie dans le désert …

Il l’avait déjà dit auparavant, ce qui avait entrainé une controverse avec ceux qui l’écoutaient : Comment peut-il dire qu’il est descendu du ciel alors qu’on connait ses parents : « c’est Jésus, le fils de Joseph, de Nazareth ! »

Il faut dire que le discours de Jésus est énigmatique pour eux : il ne parle pas au même niveau de ceux qui l’écoutent …

Nous, nous avons la chance de connaître, par les évangiles, les circonstances de la naissance de Jésus, … et aussi ce qui va se passer par la suite, le soir du jeudi saint … où Jésus va partager le pain et le vin avec ses disciples en disant : « Prenez et mangez-en tous : ceci est mon corps livré pour vous … Prenez et buvez-en tous : ceci est mon sang versé pour vous … en rémission des péchés … »

Et Jésus continue : « Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. »

Impensable dans notre vie humaine ! On le sait bien, notre vie terrestre a une fin … « Il faudra bien mourir un jour … » comme le dit la chanson …

Mais Jésus parle de la Vie Éternelle … mais ne le dit pas !

Les gens de la foule ne sont pas encore prêts à l’entendre, même si certains parmi eux pensaient à cette possibilité d’une vie éternelle après la mort …

« Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. »

Alors là, c’est le bouquet ! Une nouvelle controverse se met en place : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? ». Jésus serait-il adepte du cannibalisme ? Non, bien sûr ! Mais la pensée de Jésus n’est pas celle de ceux qui l’écoutent. Elle n’est pas à leur niveau …

Alors Jésus leur dit : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. »

Bien sûr, nous, nous pensons tout de suite à la cène du jeudi saint ! On a une clef d’interprétation … mais les gens qui écoutent Jésus ne peuvent pas comprendre à ce moment-là ce qu’il dit … Surprenant de la part de Jésus qui n’arrive pas à s’adapter à son auditoire …

À moins que ce ne soit une manière de présenter les choses qui ne soit dûe qu’au narrateur, à saint Jean, qui profite de la multiplication des pains qui venait d’être présentée pour relier la multiplication des pains pour la nourriture terrestre avec le don du corps et du sang de Jésus, offert pour la multitude comme nourriture pour accéder à la vie éternelle … d’autant que saint Jean est le seul des quatre évangiles canoniques à ne pas parler de l’institution eucharistique du jeudi saint, lui préférant le geste du lavement des pieds prônant l’humilité nécessaire pour être accueilli dans le Royaume des Cieux …

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. »

Une chose qui peut paraître surprenante dans cette phrase sont les différents temps des verbes : Dans la première partie de la phrase, ils sont tous au présent, alors qu’on aurait pu s’attendre à ce que le dernier soit au futur : prendre part à la communion (même si on communie rarement au sang du Christ) nous donnera ou nous permettra d’obtenir la vie éternelle, comme une condition préalable … Mettre le temps au présent signifie que la communion eucharistique, si elle est bien prise en connaissance de cause, avec amour et respect, nous fait participant dès maintenant à la vie éternelle … sauf chute ultérieure …

Cela veut dire qu’il ne faut pas participer à la communion à la légère …

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. »

Encore une phrase qui nous incite à ne pas faire n’importe comment en allant communier.

Si Jésus demeure en nous, il nous faut faire un peu de ménage en nous … comme quand on reçoit des invités … et ce n’est pas n’importe quel invité …

Et si nous, nous demeurons en Jésus, on ne peut pas se présenter n’importe comment, il nous faut mettre nos beaux atours … mais pas simplement, il faut aussi que l’intérieur soit beau, que notre âme soit, comme on disait avant, en état de grâce.

« De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. »

Un type de phrase que l’on retrouve souvent chez saint Jean : Ce que le Père est pour le Fils, le Fils l’est pour nous …

Comme un don gratuit fait par amour …

Même si nous ne sommes pas du tout du même niveau … mais c’est Dieu qui se met à notre niveau …

Merveille de l’amour infini de Dieu !

Seigneur Jésus,

c’est un immense cadeau

que tu nous fais :

te mettre à notre niveau !

même si on ne comprend pas toujours tout.

Merci Seigneur de nous donner

de l’importance que nous ne méritons pas !

 

Francis Cousin    

 

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Image dim St Sacrement




Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ, solennité (Jn 6, 51-58) – Homélie du Père Louis DATTIN

Autrefois la manne,

aujourd’hui son Corps

Jn 6, 51-58

 

Si l’on demandait à chaque chrétien pratiquant : « Pourquoi viens-tu à la messe le dimanche ? » nous aurions sans doute des réponses très variées.

 

 

L’un dira : « Pour retrouver mes frères chrétiens, pour faire communauté avec eux ».

Un autre : « Pour m’évader de mes soucis matériels et pour respirer un peu de spirituel car on n’est pas des bêtes, n’est-ce-pas ? »

Un autre : «  Pour écouter le Seigneur qui nous parle par la Bible et l’homélie. Il me semble que chaque semaine, le Seigneur a quelque chose à me dire ».

Un autre : « Pour communier, pour recevoir le Christ car j’en ai besoin pour reprendre courage. »

Un autre dira aussi : « Pour prier, la messe m’aide à prier ; sans la messe, je perdrais l’habitude de prier ».

Dans toutes ces réponses, nous retrouvons les divers bienfaits que nous apporte la messe.

La première lecture d’aujourd’hui nous a rappelé la longue marche, jadis, du peuple d’Israël dans le désert : manquant de tout, Israël avait pris conscience de sa faiblesse, de sa pauvreté. Il n’y en avait qu’un, qu’un seul, qui pouvait intervenir efficacement  et l’aider à s’en sortir : c’était Dieu, Dieu qui l’accompagnait au long de ces étapes terribles, Dieu qui soutenait son peuple dans sa marche vers un pays inconnu mais promis par lui.

Et nous ? Notre vie quotidienne ne ressemble-t-elle pas parfois à une espèce de traversée de désert ? Si l’on additionne nos fatigues, nos problèmes, nos responsabilités diverses, il est des soirées où nous sommes harassés et où nous broyons du noir : nous avons l’impression, à certains moments, d’être dans le tunnel et nous avons beau avancer, continuer à marcher, nous ne voyons pas le bout.  Et nous aussi, tout autant que le peuple hébreu, nous avons besoin de ce compagnon de route qui est là, pour nous accompagner, pour nous soutenir.

* La deuxième lecture nous rappelle que par la messe et la communion, nous formons ensemble : un corps, une seule famille, une même communauté avec tous nos frères chrétiens « Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain ».

L’Eucharistie, c’est vrai, est le sacrement de notre unité.  Lorsque l’assemblée que vous formez, revient de la communion, aussi divers que vous êtes les uns les autres, vous n’êtes plus qu’un, puisque le Christ est présent en chacun d’entre vous. Vous êtes tous, simplement, des cellules du corps du Christ liées ensemble par lui dans cet organisme vital qui s’appelle : l’Eglise.

Le pain, c’est ce qui symbolise le mieux notre nourriture de tous les jours et aussi notre vie. Ne dit-on pas : « Gagner son pain à la sueur de son front », et pour celui qui a beaucoup de travail : «  Il a du pain sur la planche ». Ou encore : « Gagner son pain »,  comme on dit « Gagner sa vie ».

Ce pain, cette hostie, représente donc notre vie de tous les jours, notre famille et notre travail. En fait, elle nous représente nous-mêmes.

Que va dire le prêtre à l’Offertoire ? « Tu es béni, Seigneur, toi qui nous donnes ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes. Nous te le présentons »: nous déposons sur la patène toute notre vie de toute la semaine avec ses échecs et ses joies, sa routine et ses surprises, ce qui a bien marché et ce qui a dérapé. Mais plus encore que ce que nous avons fait.  C’est nous-mêmes qui nous présentons au Seigneur.  C’est nous-mêmes que nous offrons au Seigneur tels que nous sommes, avec nos richesses et nos pauvretés, nos acquis et nos manques, avec le bilan d’une bonne ou mauvaise semaine.

.  Que  va  faire  le prêtre  à  la  Consécration ? Il  va  parler  au nom  du Christ. Il va dire : « Prenez et mangez, car ceci (ce pain que nous venons d’offrir, notre vie, notre activité), ceci est mon Corps livré pour vous », et nous chrétiens, nous croyons qu’à partir de ce moment-là, se réalise la présence réelle du Christ ressuscité sous l’apparence du pain consacré.

.  Qu’allons-nous faire à la Communion ? Nous venons justement, nous nourrir de cette présence divine de Jésus en recevant l’hostie.

Alors, pendant un moment, frères et sœurs, réfléchissons.

Jésus veut- il surtout se rendre présent ?  Pas seulement dans l’hostie bien sûr : l’hostie n’est qu’un moyen mais le plus  sûr moyen pour être présent, là, en nous, au cœur de nous-mêmes. Ce n’est pas l’hostie que le Seigneur veut transformer – elle n’est que le moyen que le Christ a choisi pour venir jusqu’à nous et pour transformer, pas l’hostie seulement – mais, nous, bien nous !

C’est surtout en nous-mêmes que Jésus veut habiter : « Celui qui mange de ce pain, je demeurerai en lui et mon Père aussi ». « Nous ferons en lui notre demeure ».

C’est nous-mêmes que Jésus veut transformer par la communion. C’est pourquoi il est si important qu’à l’Offertoire, ce soit nous-mêmes aussi qui soyons  représentés dans cette hostie.  De notre vie, il va en faire la sienne : il prend notre vie et il nous donne la sienne. C’est pourquoi dans la liturgie, on parle souvent de « cet admirable échange » : échange de nos pauvres vies contre la sienne qui vient en nous et qui va nous habiter pour nous diviniser.

C’est nous-mêmes que le Seigneur veut remplir de sa présence.

C’est nous-mêmes dont il veut faire de vrais enfants de Dieu, à l’image de ce qu’il est lui-même, notre frère, modèle et prototype de tout homme.

.  Ce que le Seigneur désire, c’est nous remplir de sa vie, ce qui suppose  auparavant  que  nous  nous  soyons  vidés  de  la  nôtre  pour  l’offrir à celui qui va nous la changer.  Si vous allez chez un teinturier ou dans un pressing pour faire disparaitre des taches à votre veston ou à votre robe, il faudra auparavant apporter le veston ou la robe à cet artisan : sinon, il ne peut rien faire.

Apportez votre vie, à la messe, pour que le Christ la sanctifie et vous la rende divinisée. Et si nous lui apportons une vie en creux, c’est-à-dire en besoin, en manque, en désir d’autre chose, en faim et en soif, alors le Seigneur nous comblera de sa vie à lui pour que, dans la semaine suivante, nous puissions vivre dans l’amour, dans le don de soi, de nous, aux autres, dans l’accueil, dans le pardon, dans la patience, dans le partage et cette ouverture à l’égard de tous, tout comme lui !

Le Christ, dans l’Eucharistie, n’a pas d’autre but que de nous combler de sa vie pour que nous devenions à notre tour d’autres Christ pour notre société actuelle.

Pendant sa vie terrestre, Jésus a fait la joie de son Père. Nous aussi, à notre tour, nous pouvons par notre vie, faire la joie du Christ et de son Père. Oui, la messe c’est une affaire d’amour !  AMEN




Le Saint Sacrement (Jn 6, 51-58) – par le Diacre Jacques FOURNIER

  Vivre par sa foi au Fils de la vie du Fils (Jn 6, 51-58)

En ce temps-là, Jésus disait à la foule : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. »
Les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? »
Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous.
Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour.
En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson.
Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui.
De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi.
Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »

 

       Dans la Bible, l’homme n’a pas un corps, il est corps. Il n’a pas une âme, il est âme. Il n’a pas un esprit, il est esprit. L’homme est ainsi tout à la fois corps, âme et esprit (1Th 5,23), et lorsque l’on parle de lui avec l’un de ces trois termes, c’est toute la personne humaine qui est évoquée…

            Autrement dit, lorsque Jésus déclare ici, « le pain que je donnerai, c’est ma chair donnée pour que le monde ait la vie », il nous révèle qu’il va se donner tout entier, en tout son Être, jusqu’à mourir sur une Croix dans d’atroces souffrances, pour que chacun d’entre nous puisse participer à sa vie, gratuitement, par amour… Et Jésus insiste : le verbe « donner », répété deux fois, était déjà intervenu peu avant : « Le vrai pain venu du ciel, c’est mon Père qui vous le donne. Le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde » (Jn 6,32-33)… Autrement dit, si Jésus se donne, c’est que le Père lui donne de se donner (Jn 17,1), et le fruit de son offrande sera le don de la vie éternelle proposé gratuitement, par amour, à tout homme de bonne volonté (Jn 17,2)…

            Ce don de la vie ne sera rien de moins qu’une participation à ce que Dieu est en lui-même ! En effet, derrière le « Moi, je suis le pain vivant » de notre traduction liturgique se cache une expression toute particulière, « egô eimi », qui renvoie au Nom divin révélé à Moïse dans l’épisode du buisson ardent : « egô eimi o ôn » (Ex 3,14), soit littéralement « je suis l’étant », avec une insistance toute particulière sur la plénitude d’Être qui est celle de Dieu de toute éternité… Et cette plénitude est « vie », une vie que le Fils reçoit du Père depuis toujours et pour toujours en unique « engendré, né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu, de même nature que le Père », disons-nous dans notre Crédo. « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même » (Jn 5,26), de telle sorte, nous dit ici Jésus, que « je vis par le Père » (Jn 6,57).

            Or, cette plénitude d’Être qui est vie est aussi Esprit : « Dieu est Esprit » (Jn 4,24). Cet Esprit est donc vie, vie de Dieu, vie éternelle… Pour Dieu, donner la vie sera donc donner l’Esprit, donner son Esprit, et ainsi nous donner, à nous les hommes, d’avoir part à son Esprit et donc à sa vie. L’homme est esprit, avons-nous dit au tout début ? L’Esprit de Dieu s’unit à son esprit, et ce mystère d’union, d’amour, est aussi appelé mystère de communion que St Jean évoque ici avec le verbe « demeurer » : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui » (Jn 6,56). Un même Esprit est tout à la fois en Jésus et en celui qui l’accueille avec foi. Un même Esprit, une même vie…




Rencontre autour de l’Évangile (Jn 6, 51-58) – Le Saint Sacrement

« Je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel.

Qui mange de ce pain vivra pour toujours. »

 

 

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons (Jean 6, 51-58)

Ce passage d’évangile fait partie du grand discours de Jésus sur le Pain de Vie, au chapitre 6. Après la multiplication des pains, qui a enthousiasmé la foule, Jésus s’est retiré seul dans la montagne pour prier, car les gens voulaient « le prendre de force et faire de lui leur roi. » (Jn 6, 15). Puis Jésus revient à Capharnaüm, et la foule le rejoint. C’est là que Jésus essaie de leur révéler qui il est.

 

Soulignons les mots importants

Relire à la suite la première et la dernière phrase : quel est donc l’enseignement principal de Jésus ?

« Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel »

Si quelqu’un mange de ce pain : compter le nombre de fois que ce mot est prononcé. Qu’est-ce que Jésus veut nous faire comprendre ?

Le pain, c’est ma chair : le mot chair revient souvent

Manger la chair du Fils de l’homme 

Boire son sang : Comment réagissons-nous à ces paroles de Jésus ?

A partir de quel moment ces paroles, incompréhensibles durant la vie de Jésus, sont devenues, possibles et évidentes ?

Relevez les paroles de Jésus qui expriment les dons produits en nous quand nous mangeons le pain du ciel (la chair du Christ) ?

Pour l’animateur   

* Dire de quelqu’un : « c’est un être de chair et de sang », c’est affirmer qu’il est homme, avec toutes les faiblesses et les limites humaines. En disant que sa chair et son sang sont une nourriture qui donne la vie, le Christ se présente dans son humanité : c’est le Fils de Dieu devenu homme par son incarnation qui apporte la vie au monde. Jésus demande à ses auditeurs de faire un acte de foi : il faut se nourrir de son enseignement et boire ses paroles parce qu’elles sont celles du Fils qui apporte la vie du Père. C’est là tout ce que ses auditeurs juifs pouvaient comprendre. C’est seulement plus tard que Jean, témoin de l’institution de l’Eucharistie, a compris que Jésus parlait aussi de donner sa chair et son sang en nourriture. Ce discours annonçait l’eucharistie.

* Dans ce passage tout l’enseignement de Jésus sur la nécessité de « manger sa chair et de boire son sang » est encadré entre la première et la dernière phrase.

L’enjeu, c’est la vie éternelle, c’est-à-dire participé à la vie du Christ ressuscité dès maintenant, et après notre mort de façon définitive.

* Le mot manger qui revient 9 fois : et le mot grec employé signifie « croquer » : cela montre le réalisme de l’incarnation et de la communion eucharistique : en croquant le pain, c’est vraiment le Corps du Seigneur que « nous mangeons » : c’est à dire que son Corps transformé par l’Esprit-Saint dans la résurrection, devient pour nous la vraie nourriture pour notre vie de fils et de fille de Dieu. Il en est de même pour le vin de l’eucharistie.

* Ces paroles tellement « crues » de Jésus ne pouvaient pas être comprises avant l’institution de l’eucharistie, à la Cène : et c’est surtout après la résurrection que les apôtres ont compris cet enseignement de Jésus quand ils « rompaient le pain » en mémoire de lui.

Jésus nous donne les trois dons principaux qu’il nous fait lorsque nous mangeons son Corps dans la communion :

  • vie éternelle dès maintenant,

  • le gage de la résurrection de notre corps,

  • demeurer en permanence en lui,

  • vivre de sa vie et par lui vivre de la vie du Père.

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS :

Nous te rendons grâce, Dieu notre Père, pour ton Fils Jésus, le pain de vie qui apaise notre faim : c’est vraiment lui, personnellement, avec son corps d’homme ressuscité, que nous recevons quand nous mangeons le Pain de l’Eucharistie.

Tu es le pain vivant venu du ciel, Seigneur Jésus. Qui mange de ce pain vivra pour toujours. Nous le croyons. Tu as les paroles de la vie éternelle.

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

La Parole aujourd’hui dans notre vie

Quelle est notre foi en la présence réelle du Christ en personne dans l’eucharistie ?

Quand Jésus dit : « Je suis le pain de vie, descendu du ciel », il est nourriture pour notre foi, d’abord par sa Parole. Plus nous communion fréquemment, plus nous devons nourrir notre foi par la Parole. Est-ce que nous mangeons suffisamment de cette nourriture pour notre foi ?

Quand nous communions, nous « mangeons » le Corps du Christ : quelle attitude cela exige de notre part ?

Et quand nous passons devant le tabernacle, quelle est notre attitude ?

Quelle place donnons-nous à l’adoration du Christ présent dans le Saint-Sacrement ?

 

Ensemble prions

Je crois en l’Eucharistie, le sacrement du Christ ressuscité,

source d’un monde nouveau,

nourriture pascale d’un peuple en marche vers son Royaume,

force des baptisés qui ne croient plus en la fatalité du mal.

Je crois en l’Eucharistie, sacrement de l’amour librement offert,

source de toute vie donnée,

nourriture d’un peuple qui apprend à aimer,

force des témoins de la puissance cachée de l’amour.

Je crois en l’Eucharistie,

sacrement de la réconciliation, source de la paix,

nourriture d’un peuple qui préfère le dialogue à la guerre,

force des témoins qui inventent les paraboles vivantes de pardon.

Je crois en l’Eucharistie, sacrement qui fait l’Église;

source d’une nouvelle communion,

nourriture d’un peuple sans frontières,

force des témoins de l’universalité du Christ Seigneur.

 

 Pour lire ou imprimer le document en PDF cliquer ici : LE SAINT SACREMENT

 

 

 

 

 

 

 

 




Solennité de la Sainte Trinité (Jn 3, 16-18) – par P. Rodolphe EMARD

Lectures : Ex 34, 4b-6.8-9 ; 2 Co 13, 11-13 ; Jn 3, 16-18

Dimanche dernier, avec la solennité de la Pentecôte, nous avons clôturé le temps pascal. Depuis lundi, nous sommes entrés à nouveau dans le temps dit ordinaire. Nous sommes le neuvième dimanche de ce temps ordinaire.

Ce temps ne doit pas être considéré comme un temps banal où rien de particulier ne se passerait. C’est le temps pour recueillir et faire fructifier les grâces que nous avons reçues durant le temps pascal, grâce au mystère pascal du Christ que nous avons célébré, sa mort et sa Résurrection.

N’oublions pas durant ce temps ordinaire que tous les dimanches nous célébrons la Pâques du Christ. C’est fête tous les dimanches pour nous chrétiens ! Et pour bien montrer que la fête continue chaque dimanche, l’Église nous donne de célébrer deux solennités, les deux dimanches après la Pentecôte : dimanche prochain, le Saint Sacrement, le Corps et le Sang du Christ et ce dimanche la Sainte Trinité.

La Sainte Trinité, cela peut nous paraître abstrait mais il n’en est rien. À chaque messe, nous célébrons la Trinité. Nous n’avons pas toujours conscience à quel point la Trinité est à l’œuvre :

  • Le Signe de croix que nous ne soignons pas toujours à sa convenance, au début et à la fin de la célébration : « Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. »

  • La salutation trinitaire du prêtre qui reprend celle de saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens : « La grâce de Jésus notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père et la communion de l’Esprit Saint soient toujours avec vous. »

  • Le « Gloire à Dieu » est une prière trinitaire : « Jésus Christ, avec le Saint-Esprit dans la gloire de Dieu le Père. »

  • La Trinité est attestée aussi dans la profession de foi en Dieu Père, en son Fils unique et en l’Esprit Saint.

  • La Trinité est à l’œuvre à chaque consécration : « [Père] Sanctifie ces offrandes en répandant sur elles ton Esprit ; qu’elles deviennent pour nous le corps et le sang de Jésus, le Christ, notre Seigneur » (Prière eucharistique n°2).

  • La prière eucharistique est trinitaire. Elle est conclue par la doxologie : « Par lui, avec lui et en lui, à toi, Dieu le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint-Esprit… »

  • La prière du « Notre Père » est également trinitaire. Elle s’adresse au Père. Elle est enseignée par le Fils et saint Paul nous rappelle bien que c’est l’Esprit Saint qui nous fait crier Abba! Père ! (Cf. Rm 8, 15 ; Gal 4, 6).

La Trinité est au cœur de notre vie chrétienne même si nous n’en n’avons pas toujours conscience. Toute la vie chrétienne est orientée vers la vie trinitaire qui nous est promise.

Quand nous évoquons la Trinité, nous évoquons l’existence d’un seul et unique Dieu, en trois personnes. Nous ne sommes pas polythéistes, nous ne croyons pas en trois dieux. Nous sommes monothéistes, nous confessons un seul Dieu, en trois personnes distinctes : le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il s’agit de la mathématique théologique : 1+1+1 = 1. Il s’agit d’un mystère !

Les lectures nous donnent de pouvoir qualifier qui est le Dieu trinitaire. La première lecture, tirée du livre de l’Exode, présente Dieu comme « LE SEIGNEUR, LE SEIGNEUR, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité » et qui pardonne nos fautes et nos péchés.

La Sainte Trinité n’est qu’amour ! l’Esprit Saint procède de la relation d’amour entre le Père et le Fils. L’Esprit est l’amour même du Père et du Fils. La Sainte Trinité est une communion d’amour.

Dans la deuxième lecture, saint Paul nous rappelle que Dieu est amour et paix et l’Évangile appuie que Dieu est amour et que l’amour seul : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. »

Que la Sainte Trinité nous donne de pouvoir mieux entrer dans son mystère. Je terminerai sur le signe de la croix évoqué précédemment. Ne le bâclons-pas ! Le signe de la croix est une prière, une signature que nous faisons sur nous et qui nous révèle le Dieu en qui nous croyons : un seul nom, celui du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Le signe de croix révèle notre identité de chrétien. Alors faisons sur nous le signe de la croix : « Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. » Amen.




« Dans un unique Esprit », Mgr Gilbert Aubry, Homélie du Lundi de Pentecôte (29 mai 2023)


Pour lire l’homélie de Mgr Aubry prononcée le lundi de Pentecôte au Chaudron, cliquer sur le lien suivant :

Homélie lundi de Pentecôte