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Rencontre autour de l’Evangile (Jn 12, 20-33)– 5ième Dimanche de Carême

 

 « Si le grain de blé tombé en terre meurt,

il porte beaucoup de fruit »

5ième carême 2

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons  (Jn 12, 20-33)

Jésus est à Jérusalem pour sa troisième fête de Pâque. L’heure de sa Passion et de sa Mort approche. Dans le texte de ce dimanche, il donne le sens de sa mort. Il donne aussi un indice sur le genre de mort qui l’attend.

Le sens des mots

Les Grecs… à Jérusalem pour adorer Dieu : Qui sont ces Grecs qui adorent Dieu à Jérusalem ?

Durant la Pâque : Qu’est-ce que les juifs célébraient dans cette grande fête ?

Voir Jésus : Quelles sont les différentes manières de voir quelqu’un ?

L’heure est venue pour le Fils de l’homme : Qui est le « Fils de l’homme » et qu’est-ce que « l’heure » dont parle Jésus ?

La petite parabole du grain de blé : Qui est ce grain de blé ? Quel sens Jésus donne à sa mort ?

Je suis bouleversé : Comment comprendre cette parole de Jésus ?

Père glorifie ton nom : Qu’est-ce qui va glorifier le nom du Père ?

Du ciel vint une voix : Se rappeler ce qui s’est passé au baptême de Jésus et à la Transfiguration.

Voici maintenant que ce monde est jugé : Que veut dire Jésus ? Par qui est-il jugé ?

Le prince de ce monde va être jeté dehors : De qui Jésus parle-t-il ?

Quand j’aurai été élevé de terre : Que veut dire Jésus ?

J’attirerai à moi tous les hommes : Que nous révèle Jésus dans cette  parole ?

Pour l’animateur

Les grecs dont il est question sont des sympathisants de la religion juive. Ils sont à Jérusalem pour la fête de Pâque.  La Pâque juive était la plus grande fête juive célébrée pour commémorer la libération du peuple hébreu, l’Exode.

Voir Jésus, pour saint Jean, c’est plus que le regarder avec ses yeux. C’est pénétrer, percevoir quelque chose de la personne de Jésus. La vue directe et sensible de Jésus est à la base de la démarche de foi. La démarche des Grecs est religieuse.

 La réponse de Jésus peut déconcerter. En fait, Jésus va au fond du désir des Grecs : en entrant dans sa Passion, Jésus va vivre son Heure, l’Heure qui va éclairer toute la vie de Jésus et permettra de voir qui il est vraiment : le Sauveur de tous les hommes.  L’Heure de Jésus c’est à la fois la mort et la glorification. Jésus choisit d’accomplir le dessein de Dieu, de son Père : c’est pour cela qu’il est arrivé à cette heure.

La petite parabole du grain de blé donne le sens de la mort de Jésus : le grain de blé enseveli et resurgi, c’est Jésus. La mort de Jésus c’est l’acte suprême de son amour pour son Père et pour les hommes.

La voix du ciel, comme au baptême et à la transfiguration de Jésus, c’est le Père qui manifeste ainsi qu’il approuve l’acte d’offrande d’amour de son Fils.

Le prince de ce monde, (Satan, l’adversaire), est jeté dehors, c’est à dire vaincu, tandis que Jésus est élevé de terre. Pour saint Jean, c’est quand Jésus est  élevé sur la croix qu’il est exalté et glorifié par le Père. La croix exerce une attraction universelle pour le salut de tous les hommes. Venir à Jésus, pour saint Jean, c’est croire.

TA PAROLE DANS NOS COEURS

Seigneur Jésus, te voici arrivé à ton Heure, l’Heure pour laquelle ton Père t’a donné aux hommes, l’Heure de ta Mort et de ta Glorification pour le salut de tous les hommes. Tu es, toi-même, ce grain de blé qui est tombé en notre terre pour porter beaucoup de fruit : faire de tous les hommes des  enfants bien-aimés pour ton Père. Nous te rendons grâce pour ton amour qui est allé jusqu’au bout.

TA PAROLE DANS NOTRE VIE

Comme Philippe et André pour les Grecs, pourrions-nous être aujourd’hui des intermédiaires permettant aux incroyants de rencontrer Jésus ? Sommes-nous attentifs à ceux qui désirent connaître et rencontrer Jésus ?

C’est la vie donnée de Jésus (grain qui meurt) qui a porté beaucoup de fruit : le salut de tous les hommes. Le grain de blé enseveli et resurgi, c’est Jésus, c’est aussi chacun de nous, «enseveli en sa mort par le baptême » (Rm 6,4) fils et fille du père : Est-ce que notre vie est donnée par amour pour nos frères ?

 

ENSEMBLE PRIONS 

Prier avec le chant  : Le grain de blé (carnet paroissial p.194 ; lire si on ne peut pas le chanter)

Ou

« Quand je serai élevé de terre, j’attirerai tout à moi »

Magnificat

Notre Père.

 

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5ième Dimanche de Carême – par le Diacre Jacques FOURNIER (Jean 12, 20-33)

 « J’attirerai tous les hommes à moi » 

(Jean 12, 20-33)

En ce temps-là, il y avait quelques Grecs parmi ceux qui étaient montés à Jérusalem pour adorer Dieu pendant la fête de la Pâque.
Ils abordèrent Philippe, qui était de Bethsaïde en Galilée, et lui firent cette demande : « Nous voudrions voir Jésus. »
Philippe va le dire à André, et tous deux vont le dire à Jésus.
Alors Jésus leur déclare : « L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié.
Amen, amen, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.
Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle.
Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où moi je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu’un me sert, mon Père l’honorera. »
Maintenant mon âme est bouleversée. Que vais-je dire ? “Père, sauve-moi de cette heure” ? – Mais non ! C’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci !
Père, glorifie ton nom ! » Alors, du ciel vint une voix qui disait : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore. »
En l’entendant, la foule qui se tenait là disait que c’était un coup de tonnerre. D’autres disaient : « C’est un ange qui lui a parlé. »
Mais Jésus leur répondit : « Ce n’est pas pour moi qu’il y a eu cette voix, mais pour vous.
Maintenant a lieu le jugement de ce monde ; maintenant le prince de ce monde va être jeté dehors ;
et moi, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. »
Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir.

    

 

            Des Grecs, et donc des païens, désirent voir Jésus… Or, « nul ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire » (Jn 6,44) disait-il, et « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils Unique pour que le monde soit sauvé par lui » (Jn 3,16-17), le monde entier, tous les hommes, Juifs et païens…

            Jésus voit s’accomplir, dans cette démarche des Grecs, ce projet universel de salut pour lequel il a été envoyé… « L’Heure est venue pour le Fils de l’Homme d’être glorifié »… Très bientôt, « il souffrira beaucoup, il sera rejeté par les Anciens, les Grands Prêtres et les scribes, il sera tué et après trois jours, il ressuscitera » (Lc 8,31). A Gethsémani, cette perspective le plongera dans « la tristesse et l’angoisse ». « Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ! Cependant, non pas comme je veux mais comme tu veux » (Mt 26,36-46). St Jean ne nous rapporte pas cet épisode, mais nous avons ici un écho de ce combat intérieur que le Christ a du affronter : « Maintenant je suis bouleversé. Que puis-je dire ? Père, délivre-moi de cette heure ? Mais non ! C’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! Père, glorifie ton nom ! » Et le Père répondra à cette supplication : « Alors, du ciel, vint une voix qui disait : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore ». Et sur la Croix, c’est Lui qui donnera à son Fils de pouvoir se donner jusqu’au bout, « jusqu’à l’extrême de l’amour » (Jn 13,1), pour le salut du monde… Et il le glorifiera encore par sa résurrection en lui donnant « la gloire qu’il avait auprès de lui avant que fût le monde » (Jn 17,5)…

            Tombé en terre, le grain de blé mourra. Mais il ne demeurera pas seul. Il portera beaucoup de fruit : cette « foule immense, que nul ne peut dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue. Debout devant le trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, des palmes à la main, ils crient d’une voix puissante : « Le salut est donné par notre Dieu, lui qui siège sur le trône, et par l’Agneau »… Ils viennent de la grande épreuve » de cette vie sur la terre. « Ils ont lavé la robe de leur cœur et leur vie et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau. C’est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, le servant jour et nuit dans son Temple » (Ap 7,9-17).

            « Dieu veut » en effet « que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4-6). C’est pourquoi, ressuscité, le Christ continue-t-il aujourd’hui encore d’accomplir la promesse qu’il nous fait ici : « Une fois élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes »… DJF




5ième Dimanche de Carême (Jn 12, 20-33)- Homélie du Père Louis DATTIN

Le grain tombé en terre

Jn 12, 20-33

« Voici venir des jours où je conclurai une alliance nouvelle avec mon peuple. Ce ne sera pas une alliance comme celle que j’ai conclue avec leurs pères, le jour où je les ai pris par la main pour les faire sortir d’Egypte : cette alliance-là, ils l’ont rompue. Voici quelle sera l’alliance que je vais conclure avec eux : je mettrai ma loi au plus profond de leur cœur. Je serai leur Dieu, ils seront mon peuple. Je leur pardonnerai leurs fautes. Je ne me rappellerai plus de leurs péchés”».

Ce que nous promet Jérémie dans cette nouvelle alliance, ce n’est pas un changement des clauses de l’alliance, changement du texte de l’alliance. C’est bien plus important : un changement du cœur de l’homme lui-même, un renouvellement de l’homme ; un cœur humain qui sera profondément accordé aux appels de Dieu sur lui.

« Je lui parlerai au cœur », c’est l’ambition de tout amoureux avec celui ou celle dont il veut partager la vie. C’est le cœur de l’autre qui doit être atteint. C’est jusque dans son cœur que ces paroles doivent pénétrer pour y résonner et atteindre la plénitude de leur portée.

 Tant que le cœur n’est pas atteint, il n’y a pas d’amour partagé : une alliance qui ne sera plus gravée sur des tables de pierre, mais qui sera gravée dans le cœur de chacun, non plus une alliance cosmique signifiée par l’arc-en-ciel, pas même une alliance suscitée par la main d’Abraham allant sacrifier son fils. Notre Père veut aller plus loin ; par son Fils, par Jésus-Christ, victime offerte, il désire nous faire entrer dans une connaissance intime de Dieu, faite d’une communion quotidienne à son amour et à sa volonté.

« Voici venir des jours ». Oui, ils arrivent ces jours, ils s’approchent ces heures où Jésus, par sa Passion et sa Croix, va opérer le renouvellement d’une alliance nouvelle et éternelle qui fera de notre relation avec Dieu non plus un contrat légaliste, pas même un pacte entre 2 partenaires, ni un accord entre deux amis, mais bien plus ! Un don de soi à l’autre, don irréversible : alliance définitive, don toujours offert, alliance toujours nouvelle.

Pâques 2024, sera-ce pour moi, une alliance ? Une alliance nouvelle, une alliance éternelle ? Est-ce-que je prépare, en ce moment, ce renouvellement de mon être dont a parlé le prophète Jérémie tout à l’heure, travail de Carême, effort préliminaire à toute résurrection personnelle ?

Est-ce-que, peu à peu, j’essaie d’accorder mon âme aux désirs de Dieu sur moi, tout comme on accorde, par essais successifs, un piano ou une guitare pour qu’ils puissent sonner juste à la mélodie de Dieu, m’accorder aux notes graves et déchirantes de la Passion et de la souffrance, m’accorder aux notes légères, allègres ou triomphantes de la Résurrection, m’accorder aux notes joyeuses de l’alléluia et de l’annonce de notre salut définitif ?

A cette approche des événements décisifs d’une alliance renouvelée entre Dieu et chacun d’entre nous, le Christ me tend la main, il désire me prendre par la main pour m’emmener avec lui : allons-nous nous laisser faire ? Allons-nous le suivre dans cette Passion, dans cette Résurrection qui sera la mienne aussi et qui sera le renouvellement de mon Baptême que je proclamerai dans la nuit du samedi au dimanche de Pâques ? Allons-nous le laisser tout seul poursuivre sa route vers la maison de Caïphe, dans le palais de Pilate, sur la montée du Calvaire ?

Serons-nous, là, avec Marie, avec Jean, au pied de la Croix, le Vendredi Saint ?

Serons-nous avec les Saintes femmes, le matin du dimanche de Pâques, pour écouter l’ange nous dire : « Vous cherchez Jésus de Nazareth, le crucifié ? Il est ressuscité ! Il n’est pas ici ! », ou bien partirons-nous sur la pointe des pieds, après Gethsémani, comme ces apôtres qui dormaient pendant l’agonie de Jésus et que l’on n’a plus revus jusqu’à le Résurrection, ou bien dirons-nous comme Pierre : « Non, cet homme, je ne le connais pas » ?

Le coq ne chantera pas trois fois ! Mais nous l’aurions renié une fois de plus ! La Passion du Christ, elle est toujours actuelle, sa Résurrection aussi, heureusement !

Si nous sommes sincères, si nous sommes, non seulement de bonne foi, mais avec une foi qui soit bonne, c’est-à-dire assez solide pour  accompagner le Christ n’importe où, nous dirons avec le psaume d’aujourd’hui :

« Donne-nous, Seigneur, un cœur nouveau », car il en faut du cœur et du courage pour te suivre là où tu souffres pour nous,

« Donne-nous, Seigneur, un « Esprit nouveau » » car cet Esprit-là, celui de ton Fils, il faut que, moi aussi, je le remette entre les mains du Père. Sommes-nous capable d’entendre le Christ présenter avec un grand cri et des supplications, à son Père qui pouvait le sauver de la mort, sa prière de détresse ? « Père, que ce ne soit pas ma volonté qui soit faite mais la tienne »

Nul, désormais, ne peut se dire solitaire ou abandonné dans sa peine. Jésus est toujours près de lui, compagnon de douleur qui lui apporte secours et miséricorde. Découvrir Jésus souffrant à côté de moi, c’est découvrir que mes propres souffrances, que mes épreuves personnelles ont, elles aussi, un sens et une valeur rédemptrice capable de sauver le monde.

Oh ! Si pendant ces jours saints, ceux qui sont dans l’épreuve pouvaient réaliser qu’ils sont en train de sauver le monde avec Jésus-Christ ! Qu’en offrant leurs douleurs et les unissant avec celles du Calvaire et de la Croix, ils jouent dans le monde un rôle bien plus important que n’importe quel chef d’état !

Ce n’est pas Pilate qui a changé le monde, ce n’est pas Hérode qui l’a sauvé, c’est Jésus, et Jésus en Croix ! « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul, il est stérile et inutile, mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruits, il devient fécond ».

Ces jours qui vont venir, seront-ils témoins des semailles de Dieu en nos cœurs ? Verront-ils se lever une moisson spirituelle parce que nous avons accepté de faire mourir en nous toutes nos forces d’égoïsme pour faire épanouir au soleil de Dieu toutes nos forces d’oubli de nous-mêmes et de générosité ?

Si oui, Jérémie pourra redire encore de la part de Dieu :

« Voici venir des jours où je conclurai une alliance nouvelle ». AMEN




4ième Dimanche de Carême (Jn 3, 14-21) par D. Alexandre ROGALA (M.E.P.)

« C’est bien par grâce que vous êtes sauvés »

(Ep 2, 5)

Lorsque je rencontre les parents qui souhaitent inscrire leur enfant au catéchisme ou à l’aumônerie, l’une des raisons qui motivent la demande des parents est que leur enfant apprenne les valeurs chrétiennes et qu’il apprenne à bien se comporter en toute situation.

De même, lorsque je discute avec de jeunes chrétiens, ils me demandent souvent si telle ou telle chose est un péché ; ou encore, s’il est permis ou défendu de faire ceci ou cela.

Depuis notre enfance, on nous a tellement rabâché que pour être un véritable chrétien, ce qui est le plus important c’est l’agir, que ce qui nous différencie des protestants, c’est que pour nous les catholiques, les bonnes œuvres participent à notre salut.

Mais à trop insister sur les « œuvres », nous réduisons d’une part, le christianisme à être un ensemble de pratiques permettant d’être en règle avec Dieu, et d’autre part, nous oublions l’essentiel : le salut est un don totalement gratuit que Dieu nous offre. Ce salut qui nous est donné sans condition est une bonne nouvelle pour nous car nous ne sommes pas meilleurs que les chefs des prêtres et du peuple dont parle la première lecture qui multipliaient les infidélités.

Celle-ci est la fin du Second Livre des Chroniques (2 Ch 36, 14-23) dont le schéma est la dégradation de la fidélité du peuple et de ses souverains qui aboutit à l’Exil à Babylone : « finalement, il n’y eut plus de remède à la fureur grandissante du Seigneur contre son peuple. Les Babyloniens brûlèrent la Maison de Dieu, détruisirent le rempart de Jérusalem, incendièrent tous ses palais, et réduisirent à rien tous leurs objets précieux. Nabucodonosor déporta à Babylone ceux qui avaient échappé au massacre ; ils devinrent les esclaves du roi et de ses fils jusqu’au temps de la domination des Perses » (2 Ch 36, 16-20).

Le psaume 136 que nous avons chanté en réponse à la première lecture, nous laisse imaginer à quel point l’Exil a dû être difficile pour le peuple hébreu : « Au bord des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, nous souvenant de Sion… »

Voilà quel genre de grand malheur nous aurions mérité si nous étions encore sous le « régime de la Loi » et que le salut dépendait de nos œuvres. Heureusement, en Christ nous ne sommes plus sous le « régime de la Loi », mais sous le « régime de la grâce » (cf. Rm 6, 14)

C’est ce que nous rappelle l’auteur de la Lettre aux Éphésiens qui souligne que l’initiative vient de Dieu, et non pas de nos mérites : « C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, et par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Cela ne vient pas des actes : personne ne peut en tirer orgueil » (Ep 2, 89).

Cependant, si nous ne pouvons pas en tirer fierté, cela ne signifie pas que nous sommes dispensés d’accomplir de bonnes œuvres. Dieu les « a préparées d’avance
pour que nous les pratiquions » (Ep 2, 10). Autrement dit, nous ne sommes pas sauvés par la réalisation de bonnes œuvres, mais nous sommes sauvés pour la réalisation des bonnes œuvres.

Dans le texte d’évangile de ce dimanche (Jn 3, 14-21) Jésus nous enseigne la même chose, à savoir que nous sommes sauvés « par grâce au moyen de la foi ».

Jésus commence par faire référence à l’épisode du serpent d’airain pour parler de la Croix et de son exaltation auprès du Père. Il est utile que nous nous y penchions un moment. Jésus dit à Nicodème : « De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle » (3, 14).

Rappelons-nous qu’alors qu’ils étaient dans le désert, les hébreux avaient récriminé contre le Seigneur et contre Moïse, et Dieu avait permis que des serpents à la morsure brulante s’en prennent au Peuple. Quelques temps après, le peuple a reconnu son péché, Dieu a donné à Moïse la consigne suivante :

« Fais-toi un serpent brûlant, et dresse-le au sommet d’un mât : tous ceux qui auront été mordus, qu’ils le regardent, alors ils vivront ! » Moïse fit un serpent de bronze et le dressa au sommet du mât. Quand un homme était mordu par un serpent, et qu’il regardait vers le serpent de bronze, il restait en vie ! » (Nb 21, 8-9)

Il est surprenant que Dieu ait demandé à Moïse de fabriquer un serpent qui était justement la cause du mal en raison de leurs morsures venimeuses.

Le livre de la Sagesse qui a été écrit au tournant de l’ère chrétienne relira cet épisode du serpent d’airain ainsi :

« Quand s’abattit sur les tiens la fureur terrible de bêtes venimeuses, lorsqu’ils périssaient sous la morsure de serpents tortueux, ta colère ne persista pas jusqu’à la fin. C’est en guise d’avertissement qu’ils avaient été alarmés pour un peu de temps, mais ils possédaient un signe de salut, qui leur rappelait le commandement de ta Loi » (Sg 16, 5-6).

Il est intéressant de constater que l’auteur du Livre de la Sagesse appelle le serpent d’airain qu’a fabriqué Moïse : « signe de salut »

Revenons au texte d’évangile. Après s’être comparé au serpent d’airain, et avoir affirmé que la volonté de Dieu le Père est de sauver tous les hommes, Jésus parle quand même d’un jugement :

« Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu » (3, 18).

Nous constatons que le jugement porte sur l’incrédulité. À la lumière de la comparaison que fait Jésus de sa Croix et du serpent d’airain, nous pourrions dire que l’incrédule est jugé pour avoir refusé le « signe de salut » qu’est le Crucifié-Ressuscité.

Réécoutons maintenant ce que dit Jésus sur les œuvres : « Celui qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu » (3, 20-21). 

Remarquons d’abord que les personnes sont distinctes de leurs œuvres, que celles-ci soient bonnes ou qu’elles soient mauvaises. En ce qui concerne celui qui commet le mal, le texte ne nous dit pas que s’il vient à la lumière il sera dénoncé et pointé du doigt. Le texte nous dit que le méchant « ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ». Ce sont les œuvres qui sont visées, et non pas le pécheur. De même, les bonnes œuvres, puisqu’elles ont été accomplies « en union avec Dieu » ne peuvent pas devenir des motifs de mérite ou de fierté. Elles ne sont pas les œuvres de la personne qui les fait, mais elles sont en réalité, les « œuvres de Dieu » lui-même.

La semaine dernière les lectures nous ont mise en garde contre la quête de signes miraculeux. Cette semaine, les textes bibliques nous avertissent du danger de la quête aux bonnes œuvres. Peut-être que nous ne comprenons pas. Après tout, la réalisation de bonnes œuvres, n’est-elle pas positive ? En fait, ce ne sont pas les bonnes œuvres en tant que telles qui sont visées. Au contraire, celles-ci sont la conséquence logique du salut qui nous est offert. Ce dont notre Seigneur nous met en garde ce matin, c’est de croire que par les bonnes œuvres nous pourrions d’une certaine manière « mériter » notre salut. En plus d’être faux, penser que l’on mérite d’être sauvé parce que nous agissons bien est un péché d’orgueil.

Cher frères et sœurs, ayons l’humilité de reconnaître qu’en ce qui concerne notre salut, nous n’avons aucun mérite personnel, et qu’accomplir des bonnes actions n’est que la moindre des choses que nous pouvons faire pour manifester à Dieu notre reconnaissance.  Donc, pour la suite de ce temps de carême, poursuivons nos efforts, mais faisons-le avec humilité comme des « serviteurs inutiles qui n’ont fait que leur devoir » (Cf. Lc 17, 10).

 

 

 




« Un bébé sauvé de la mort » – Fr Manuel RIVERO O.P. (6/04/24)

« Quelle est la grande nation dont Dieu soit aussi proche de nous chaque fois que nous l’invoquons ? », se demandait Moïse, ce grand prophète, libérateur de l’esclavage, que la fille de Pharaon avait sauvé de la mort alors qu’il venait de naître.

Dieu écoute les cris des hommes, des femmes et des enfants en détresse. Dieu a entendu les gémissements des esclaves en Égypte. C’est pourquoi Dieu a choisi Moïse comme leader de la libération.

Moïse a été choisi à cause de la souffrance du Peuple de Dieu opprimé en Égypte. Son appel et sa vocation prophétique trouvent leur origine dans l’oppression des faibles par les forts et non pas dans ses qualités personnelles. Pour se rendre proche des hommes humiliés et courbés sous le poids des fardeaux, Dieu envoie Moïse au puissant Pharaon.

Dans le Nouveau Testament, Dieu se rend encore plus proche des hommes aux prises avec le mal et le malin. Pour  libérer l’homme, le Fils de Dieu devient homme en prenant chair dans le sein de la Vierge Marie par la puissance de l’Esprit Saint.

« Dieu plus intime à moi que moi-même », s’exclamait saint Augustin. Baptisés dans la mort et la résurrection de Jésus, les chrétiens sont habités par Dieu lui-même. Ils deviennent les temples de la sainte Trinité et les tabernacles du Dieu Très-Haut.

« Reconnais, ó chrétien, ta dignité. Tu participes à la nature divine », enseigne saint Léon le Grand (+461), pape.

Il y a vingt siècles, dans l’empire romain, les pères de famille avaient droit de vie et de mort sur l’enfant. Le christianisme a apporté un grand progrès dans la reconnaissance de la dignité de l’enfant et de son droit à la vie.

Le préambule de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 déclare : « La force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres[1] ». La Suisse, façonnée par les Églises catholique et protestante, fait apparaître dans son droit constitutionnel la manière évangélique de faire de la politique qui consiste à partir du plus vulnérable des citoyens et non des projets idéologiques ou des entreprises multinationales.

Il n’y a pas de politique chrétienne mais il y a une manière chrétienne de faire de la politique. Le chrétien se rend proche des personnes en danger et en souffrance comme Dieu se rend proche des malades, des victimes des injustices et des pauvres.

L’enfant figure comme le pauvre par excellence à tel point sa vie dépend du bon vouloir des adultes.

Dieu aime les enfants. Jésus bénissait les enfants en leur imposant les mains afin qu’ils reçoivent l’Esprit de force et de sainteté. Dieu non seulement défend la vie des enfants mais il choisit ce qui est méprisé par les puissants pour manifester sa gloire.

C’est ainsi que Dieu choisit Moïse, « sauvé des eaux », qui avait échappé à la loi de mort décrétée par Pharaon, pour manifester son amour envers Israël.

Lors de mon séjour en Haïti de 2008 à 2011, j’ai été marqué par la découverte d’un bébé dans une décharge de la capitale, Port-au-Prince. Une religieuse haïtienne des Sœurs de saint Joseph de Cluny serrait ce bébé dans ses bras. L’une des jambes du bébé était recouverte de bandages. Abandonné dans les poubelles, un cochon laissé en liberté avait commencé à dévorer le bébé. Des passants l’ont sauvé de la mort. Lors de son baptême, il reçut le prénom de Moïse.

Nous connaissons le joueur de football, Cristiano Ronaldo, plusieurs fois ballon d’or. La presse a fait part de son enfance dans la pauvreté. Quand sa mère l’attendait, certaines personnes l’avaient conseillé d’enlever l’enfant car elle était pauvre. Chrétienne, elle garda l’enfant. Plus tard, en grandissant, Cristiano Ronaldo dira à sa mère : « Maman, tu es pauvre mais je te rendrai riche ! ».

En ce temps de Carême, l’Église du Christ exhorte les fidèles à se rendre proches de Dieu et proches des personnes en difficulté, par la prière, la solidarité et les demandes de pardon.

L’occasion nous est donné d’implorer le pardon du Seigneur pour nous et pour ceux qui nous ont blessé physiquement, moralement ou spirituellement. Nous avons aussi à demander pardon à ceux que nous avons offensé par action ou par omission. Que les pères irresponsables qui ont abandonné leurs enfants et la mère de leurs enfants fassent une demande de réconciliation. Que les mères qui ont mis fin à la vie de leurs enfants prient pour eux. Que les enfants qui ont survécu de justesse à la mort rendent grâce à Dieu et remercient leur mère et les avocats de leur survie. Que la richesse et la grâce du pardon descende de Dieu vers l’humanité, des parents vers leurs enfants et que la miséricorde remonte des enfants vers Dieu et vers leurs parents.

Seul le pardon libère.

Bon Carême ! Que Dieu fasse du neuf dans nos vies !

                                                                                  Fr Manuel RIVERO (O.P.)

[1] Cf. https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19995395/index.html




4ième Dimanche de Carême (Jn 3, 14-21) – par Francis COUSIN

« La lumière est venue dans le monde. »

 

Une des grandes questions que beaucoup de personnes se posent est : « Qui-a-il après la mort ?, le néant … ou une autre forme de vie … ? ».

Les statistiques à ce sujet ne sont pas très fiables, mais vont toutes dans le même sens : une diminution de ceux qui croient en une vie éternelle, et une augmentation nette de ceux qui croient qu’il n’y a rien ou qui croient à la réincarnation, et un tiers qui doute …

Pour nous, les chrétiens, il ne devrait pas y avoir de doute … et l’évangile de ce jour nous le dit bien : « Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »

Et dans deux phrases successives, Jésus parle de la vie éternelle : « De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. »

C’est le but même de l’incarnation : que tout le monde qui croit soit sauvé !

Et cela est nouveau par rapport au serpent de bronze.

« Nous avons péché, en récriminant contre le Seigneur et contre toi. Intercède auprès du Seigneur pour qu’il éloigne de nous les serpents. » Moïse intercéda pour le peuple, et le Seigneur dit à Moïse : « Fais-toi un serpent brûlant, et dresse-le au sommet d’un mât : tous ceux qui auront été mordus, qu’ils le regardent, alors ils vivront ! » (Nb 21,77-8).

Ainsi, les hébreux qui regardaient le serpent de bronze pouvaient continuer à vivre et à poursuivre leur chemin vers la Terre Promise … et c’est tout…

Cela ne leur garantissaient absolument pas une place dans le Royaume des cieux.

Il en est de même pour nous … Rien n’est acquis.

Et ce n’est pas parce que Jésus a été élevé sur la croix que nous entrerons dans le Royaume des cieux. C’est une condition nécessaire … mais non suffisante …

 C’est dit dans l’évangile : « Celui qui croit en lui échappe au Jugement … ; celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. »

C’est ce que Jean nous révèle de la rencontre entre Nicodème et Jésus …

Alors, une autre question se pose : quel est celui qui croit … et celui qui ne croit pas … ?

Quelle différence entre eux ? …

Jésus nous dit : « le Jugement, le voici : la lumière est venue dans le monde, et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. (…)  Celui qui fait le mal déteste la lumière (…): il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. ».

Or, Jésus est la lumière du monde (Jn 8, 12). Il faut donc croire en Jésus … mais en vérité.

« Ce n’est pas en me disant : “Seigneur, Seigneur !” qu’on entrera dans le royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux. ». (Mt 7,21).

Et la volonté de Dieu, c’est que nous fassions sont les œuvres de miséricorde, comme Dieu est miséricordieux avec nous : « Dieu est riche en miséricorde ; à cause du grand amour dont il nous a aimés …  il nous a donné la vie avec le Christ : c’est bien par grâce que vous êtes sauvés, … et par le moyen de la foi … Cela ne vient pas des actes : personne ne peut en tirer orgueil …  C’est Dieu qui nous a faits, il nous a créés dans le Christ Jésus, en vue de la réalisation d’œuvres bonnes qu’il a préparées d’avance pour que nous les pratiquions. » (deuxième lecture).

Que faire alors ?

Une seule chose : croire en Jésus ; Accepter l’amour de Jésus et de Dieu …

Et croire en Jésus crucifié, … et porter son regard vers Jésus crucifié, mort pour nos péchés… et accepter les propositions qu’il ne manquera pas de nous faire connaitre par quelque intermédiaire …

 

Seigneur Jésus,

ce qu’il y a après la mort  

est une question importante pour beaucoup,

et parfois lancinante pour certains,

qu’ils croient en toi ou non.

Permet que nous répondions à tes appels,

même si nous n’en voyons

pas toujours l’utilité,

mais pour que ta volonté soit faite.

                                                                        

 Francis Cousin

  

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4ième Dimanche de Carême (Jn 3, 14-21) – Homélie du Père Louis DATTIN

Le salut par la Croix

Jn 3, 14-21

 

Promenez-vous, un peu partout, que ce soit dans l’île ou même dans le quartier, partout vous rencontrerez des calvaires à la sortie des églises, croix du jubilé à la croisée des chemins, à la sortie d’un champ. Elles nous sont tellement familières, ces croix, que nous en avons oublié leur signification : c’est pourtant l’insigne du chrétien !

Le 1er geste du Baptême est de tracer une croix sur le front de l’enfant, et le jeune chrétien, aussi bien que l’adulte, portera autour de son cou, une chaine dans laquelle est glissée une croix. Pour beaucoup, cela fait joli. C’est un ornement, un bijou, une décoration.

On la voit aussi, cette croix, dressée sur les tombes de nos défunts au cimetière et même là, nous ne faisons pas toujours la liaison entre notre vie, notre mort et ce que cette croix signifie : la croix au-dessus du lit dans la chambre, la croix dans la salle de séjour.

Ce crucifix que l’on offre à la première communion ou à la profession de foi, que nous dit-il, à nous, chrétiens ? N’oublions pas qu’au début, pour les premiers chrétiens, c’était une image terrible, une image scandaleuse : celle d’un pendu, un cadavre cloué à 2 morceaux de bois. C’était une image tellement repoussante, que ce n’est pas tout de suite (même dans l’histoire des chrétiens), que la croix a été reproduite.

On a d’abord dessiné, comme symbole du Christ, un jeune homme ramenant sur ses épaules une brebis (le bon pasteur), puis le poisson qui, en grec, s’appelait ICTUS : premières lettres de la formule « Jésus-Christ Fils de Dieu Sauveur ».

Mais il fallait se rendre à l’évidence, le signe le plus parlant, le plus évocateur pour nous faire voir jusqu’où l’amour de Dieu pouvait aller, c’était encore l’objet de son supplice : cette croix par laquelle Jésus nous avait sauvés.

Lorsqu’à notre tour nous faisons le signe de la croix sur nous-mêmes, c’est avec bien de légèreté que nous faisons ce geste routinier qui trace sur nous le signe de notre salut.  Et pourtant, la Croix, c’est à elle que nous devons tout. C’est grâce à elle que nous pouvons encore espérer. Elle n’est pas simplement un insigne, mais le signe de notre sauvetage. Dans la Croix est contenu tout le secret de Dieu, tout son amour, toute sa volonté d’arracher l’homme au péché, fut-ce au prix de son sang, au prix de sa vie. Beaucoup, parmi les Juifs ne pouvaient s’empêcher de rapprocher l’image de Jésus, « élevé » en Croix, à une autre image : celle du serpent de bronze, élevé lui aussi sur un bout de bois.

Vous vous rappelez l’histoire : pendant la traversée du désert, le peuple hébreu, à cause de ses fautes, fut attaqué par des serpents venimeux, des serpents à la morsure brûlante et il en mourut un grand nombre. Alors, sur l’ordre du Seigneur, Moïse fit un « caducée » (ce signe que les médecins affichent encore sur le pare-brise de leur voiture : un serpent de bronze élevé autour d’un bâton), « celui qui était mordu et qui tournait les yeux vers « le signe élevé« , était sauvé, non pas à cause de l’objet regardé, mais par toi, Seigneur ».

Jésus, lui aussi, sera élevé de terre, cloué sur le bois, cloué à la Croix : quelqu’un qui le regardera, en vrai croyant, qui jettera son regard vers lui avec foi, celui-là, aussi, sera sauvé, sauvé de son péché : morsure mortelle que Dieu seul a pouvoir de guérir ; encore faut-il regarder vers lui.

« Dieu, nous dit St-Jean, a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, non pas pour « juger » le monde, mais pour que, par lui, le monde, le monde entier, soit sauvé ». « Dieu nous a tant aimé » qu’il a donné le plus cher de lui-même, ce qu’il avait de plus unique, donner Jésus jusqu’à le laisser détruire, jusqu’à la mort ! Mieux qu’Abraham !

N’oublions pas que St-Jean, était le seul apôtre à être au pied de la croix et que cette scène-là, ce soir-là, Jean n’a jamais pu l’oublier.

Nous sommes, nous, trop habitués à la Croix, à ce signe, et nous oublions, à la fois, sa cruauté et toute la portée d’amour qu’il signifie : « Pour moi, dit Jésus, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes ».

Il nous faut donc, à notre tour, lever les yeux vers celui qui est élevé entre ciel et terre et prier… cette grande Croix de bois sur laquelle saigne un corps d’homme torturé, c’est un sommet de douleur et de mort, mais c’est aussi le sommet de l’amour du Fils pour son Père, sommet de l’amour du grand frère universel qui veut sauver tous ses frères pécheurs.

Il faut, physiquement, regarder cette image de tous nos yeux grands ouverts mais il faut aussi fermer les yeux pour « voir » ce qui n’est pas visible et dont la Croix est le signe : l’amour extrême qui brûle au cœur du Christ. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Mais cet amour du Christ, qui le dévore est le signe d’un autre amour extrême : celui du Père. « Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique ».

On raconte qu’un jour, en Espagne, un grand pécheur était allé se mettre à genoux devant un prêtre pour le pardon de ses fautes. Effaré par l’énormité de ses péchés, le prêtre ne voulut pas lui donner l’absolution. Une deuxième fois, le pénitent revient : même refus. Une troisième fois, le pécheur se met à genoux ; le prêtre, indécis, regarde vers le crucifix et voilà que le Christ se met à lui dire : « On voit bien que ce n’est pas toi qui as souffert sur la Croix et avec quel amour j’ai donné ma vie pour cet homme. Immédiatement, sauve-le, pardonne-lui en mon nom ! »

Frères, ne nous habituons pas au péché, mais aussi ne nous habituons pas à la Croix. S’habituer au péché, c’est prendre parti de sa maladie et l’accepter jusqu’à la mort : c’est grave, mais s’habituer à la Croix, c’est ne plus voir, ne plus comprendre que, quel que soit notre état, Jésus mort sur la Croix et ressuscité, est capable de nous sortir de n’importe quelle situation périlleuse, de toute maladie mortelle. De nos jours, beaucoup sont tentés par une sorte de pessimisme : « Le monde est pourri, il n’y a rien à faire : violences, terrorisme, prises d’otages, bassesses de toutes sortes, exploitation de l’homme par l’homme, intoxication de l’opinion publique, mensonges publicitaires ou idéologiques ».

Dieu aussi voit tout cela ! Mais lui, il aime ce monde, quand même, il ne se résigne pas ! Il veut le sauver, ce monde parfois si moche, parfois si pourri, Dieu l’aime ! Pour lui, il n’est pas absurde parce qu’il y a la Croix qui le sauve, parce qu’il y a Jésus-Christ dessus qui donne sa vie pour lui, au lieu de continuer à gémir.

Tournons notre regard vers celui qui a été « élevé » de terre.

Regardons la croix. Ayons le même regard d’amour que Dieu lui-même. Avec lui, donnons notre vie, à notre tour, pour nos frères.  AMEN




4ième dimanche de Carême (Jn 3, 14-21) par le Diacre Jacques FOURNIER

Une Miséricorde infinie (Jn 3,14-21) !

En ce temps-là, Jésus disait à Nicodème : « De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle.
Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle.
Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.
Celui qui croit en lui échappe au Jugement ; celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Et le Jugement, le voici : la lumière est venue dans le monde, et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises.
Celui qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. »

           Au désert, le Peuple d’Israël avait murmuré contre Moïse et donc contre Dieu. Les conséquences de leur désobéissance avaient été évoquées avec l’image de la brûlure occasionnée par la morsure d’un serpent venimeux, une morsure qui, en l’absence de remède, conduit à la mort. Mais Dieu avait dit à Moïse : « Façonne-toi un Brûlant, et fixe-le sur une perche. Quiconque aura été mordu et le regardera restera en vie. Moïse façonna donc un serpent de bronze », un alliage de cuivre et d’étain qui, par son éclat et sa couleur dorée, évoque le feu de la brûlure occasionnée par la morsure (Nb 21,4-9)… Comme Adam et Eve autrefois, trompés par le serpent (Gn 3), les Israélites ont donc désobéi à Dieu et expérimenté en eux-mêmes cette « brûlure » du mal qui conduit à la mort… S’ils obéissent maintenant à l’invitation que Dieu leur lance, s’ils regardent ce Brûlant fixé sur le bois, ils seront guéris, ils vivront… Ce petit geste manifestera leur obéissance de cœur à Dieu, une obéissance qui leur permettra de triompher, grâce à Dieu, de toutes les conséquences mortelles de leurs désobéissances passées…

            Et Jésus se compare ici à ce Brûlant ! De fait, il sera fixé sur la Croix, et il prendra sur Lui toutes « nos souffrances et nos douleurs », « il s’accablera lui-même de nos fautes » (Is 52,13-53,12), il brûlera de nos brûlures et mourra de notre mort pour nous sauver et nous donner gratuitement, à nous, pécheurs, de pouvoir vivre de sa Vie ! En agissant ainsi, il manifestera à quel point Dieu est « Feu » lui aussi (cf. Gn 15 ; Ex 3 ; Dt 4,24), non pas un feu de brûlure qui conduit à la mort, mais un Feu d’Amour, de Douceur et de Force qui conduit à la Vie. « O Jésus ! Laisse-moi dans l’excès de ma reconnaissance, laisse-moi te dire que ton amour va jusqu’à la folie… Comment veux-tu devant cette Folie, que mon cœur ne s’élance pas vers toi ? Comment ma confiance aurait-elle des bornes ? » (Ste Thérèse de Lisieux).

            Ainsi, avec le Fils et par le Fils, Dieu tout entier s’est donné Lui-même pour notre salut… L’infini de sa Miséricorde se propose à notre misère, à nos péchés, qui, aussi grands puissent-ils être, ne surpasseront jamais cet infini de Pur Amour… Désormais la seule attitude qu’il désire de nous est ce « Oui ! » de confiance et d’abandon… Car « là où le péché a abondé », humainement, « la grâce a surabondé », divinement, infiniment (Rm 5,20)… Oserons-nous croire à l’infinie de cette Miséricorde, tout entière offerte pour que nous trouvions avec elle la Plénitude de la Vie, de la Paix et de la Joie ?          DJF




Audience Générale du Mercredi 28 Février 2024

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 28 février 2024


Catéchèse – Les vices et les vertus – 9. L’envie et la vaine gloire

Chers frères et sœurs, bonjour !

Aujourd’hui nous examinons deux vices capitaux que nous trouvons dans les grands inventaires que la tradition spirituelle nous a laissés : l’envie et la vaine gloire.

Commençons par l’envie. Si nous lisons les Saintes Écritures (cf. Gn 4), elle nous apparaît comme l’un des vices les plus anciens : la haine de Caïn envers Abel se déchaîne lorsqu’il se rend compte que les sacrifices de son frère plaisent à Dieu. Caïn était le fils aîné d’Adam et Eve, il avait pris la plus grande part de l’héritage de son père ; pourtant, il suffit qu’Abel, son jeune frère, réussisse un petit exploit pour que Caïn se mette en colère. La tête de l’envieux est toujours triste : son regard est baissé, il semble continuellement sonder le sol, mais en réalité il ne voit rien, car son esprit est enveloppé de pensées pleines de méchanceté. L’envie, si elle n’est pas maîtrisée, conduit à la haine de l’autre. Abel sera tué par Caïn, qui n’a pas supporté le bonheur de son frère.

L’envie est un mal qui n’a pas seulement été étudié en contexte chrétien : elle a attiré l’attention de philosophes et d’érudits de toutes cultures. À la base, il y a une relation de haine et d’amour : l’un veut le mal de l’autre, mais secrètement, il souhaite lui ressembler. L’autre est l’épiphanie de ce que nous voudrions être, et qu’en réalité nous ne sommes pas. Sa bonne fortune nous semble une injustice : nous aurions sûrement – pensons-nous – mérité bien davantage ses succès ou sa bonne fortune !

À la base de ce vice, il y a une fausse idée de Dieu : on n’accepte pas que Dieu ait ses propres « mathématiques », différentes des nôtres. Par exemple, dans la parabole de Jésus sur les ouvriers appelés par le maître à aller à la vigne à différents moments de la journée, ceux de la première heure croient avoir droit à un salaire plus élevé que ceux qui sont arrivés en dernier ; mais le maître leur donne à tous le même salaire, et dit : « N’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mes biens ? Ou alors es-tu envieux parce que moi je suis bon ? » (Mt 20,15). Nous voudrions imposer à Dieu notre logique égoïste, mais la logique de Dieu est l’amour. Les biens qu’il nous donne sont faits pour être partagés. C’est pourquoi saint Paul exhorte les chrétiens : « Soyez unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisez de respect les uns pour les autres » (Rm 12,10). Voilà le remède à l’envie !

Et nous arrivons au deuxième vice que nous examinons aujourd’hui : la vaine gloire. Elle va de pair avec le démon de l’envie et, ensemble, ces deux vices sont caractéristiques d’une personne qui aspire à être le centre du monde, libre d’exploiter tout et tout le monde, objet de toutes les louanges et de tous les amours. La vaine gloire est une estime de soi exagérée et sans fondement. Le vantard possède un « moi » encombrant : il n’a aucune empathie et ne se rend pas compte qu’il existe d’autres personnes que lui dans le monde. Ses relations sont toujours instrumentales, marquées par la prévarication de l’autre. Sa personne, ses réalisations, ses succès doivent être montrés à tous : c’est un perpétuel mendiant d’attention. Et si des fois ses qualités ne sont pas reconnues, il se met dans une colère féroce. Les autres sont injustes, ils ne comprennent pas, ils ne sont pas à la hauteur. Dans ses écrits, Évagre le Pontique décrit l’amère histoire de certains moines frappés par la vanité. Il arrive qu’après ses premiers succès dans la vie spirituelle, il se sente déjà arrivé et se précipite dans le monde pour en recevoir les louanges. Mais il ne réalise pas qu’il n’est qu’au début du voyage spirituel et qu’une tentation le guette, qui le fera bientôt tomber.

Pour guérir le vantard, les maîtres spirituels ne proposent pas beaucoup de remèdes. Car au fond, le mal de la vanité a son remède en lui-même : les louanges que l’orgueilleux espérait récolter du monde se retourneront bientôt contre lui. Et combien de personnes, trompées par une fausse image d’elles-mêmes, sont ensuite tombées dans des péchés dont elles auraient bientôt eu honte !

Le meilleur enseignement pour vaincre la vanité se trouve dans le témoignage de Saint Paul. L’apôtre s’est toujours heurté à un défaut qu’il n’a jamais pu surmonter. À trois reprises, il demanda au Seigneur de le délivrer de ce tourment, mais finalement Jésus lui répondit : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse ». Depuis ce jour, Paul a été libéré. Et sa conclusion devrait aussi devenir la nôtre : « C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure » (2 Co 12,9).

* * *

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier une délégation du Conseil National de Monaco, ainsi que les paroisses et les jeunes venus de France.

En ce temps de Carême efforçons nous de ne pas nous mettre toujours au centre, mais cherchons plutôt à nous effacer pour laisser la place aux autres, les promouvoir et nous réjouir de leurs qualités et de leurs succès.

Que Dieu vous bénisse.





3ième Dimanche de Carême (Jn 2, 23-24) par D. Alexandre ROGALA (M.E.P.)

« Pendant qu’il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque, beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il accomplissait. Jésus, lui, ne se fiait pas à eux parce qu’il les connaissait tous » (Jn 2, 23-24)

Les lectures de ce dimanche nous interrogent sur notre rapport aux signes venant de Dieu. Même s’ils ont leur place dans la foi, nous devons reconnaitre que notre attachement aux signes est parfois désordonné.

Quand j’habitais à Lyon, j’avais une amie qui, à un moment de sa vie, s’était intéressé à la foi chrétienne. Elle est allée dans une Église, s’est assise sur un banc pendant un certain temps, et a demandé à Dieu un signe. Comme elle n’en a pas reçu, elle en a déduit que le Dieu des chrétiens n’existait pas.

Il m’est arrivé aussi de rencontrer des personnes qui, elles, avaient reçu un signe. Elles avaient fait une expérience spirituelle intense, et s’étaient mise en route à la suite du Christ en commençant un parcours de catéchuménat. Mais après leur baptême, au bout d’un certain temps, ces personnes aussi se sont éloignées de l’Église.

La foi qui ne repose que sur l’expérience du miraculeux est fragile, et les textes d’aujourd’hui nous le rappellent.

Le texte d’évangile de ce dimanche (Jn 2, 13-25) se passe dans le contexte de la fête de la Pâque qui, est une fête dans laquelle le peuple juif fait mémoire de la sortie d’Égypte. Ce n’est donc pas par hasard que la liturgie nous ait fait entendre le code de l’alliance du Livre de l’Exode, plus connu sous l’appellation « les dix commandements ».

La toute première Parole que Dieu donne au Peuple est un rappel que c’est Lui qui l’a fait sortir d’Égypte : « Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison d’esclavage » (Ex 2, 20).

Le premier commandement, celui qui est le plus important vise le péché d’idolâtrie, qui consiste à prendre ce qui n’est pas Dieu pour Dieu : « Tu n’auras pas d’autres dieux en face de moi. Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux, ou en bas sur la terre, ou dans les eaux par-dessous la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux, pour leur rendre un culte. Car moi, le Seigneur ton Dieu, je suis un Dieu jaloux » (Ex 20, 3-5)

Dans l’évangile, Jésus agit à la manière des prophètes qui posaient parfois des signes pour parler. Parmi les signes les plus célèbres, il y a ceux du prophète Jérémie : quand il a brisé une cruche pour signifier le jugement de Dieu sur le peuple (Jr 19), ou quand il s’est baladé dans Jérusalem en portant des liens et des jougs pour avertir le Peuple de l’Exil à Babylone (Jr 27).

En voyant Jésus chasser les marchands, les juifs qui assistent à la scène ne se trompent pas. Ils comprennent que Jésus accomplit un « signe prophétique », donc au lieu de l’arrêter, ils l’interrogent : « Quel signe peux-tu nous donner pour agir ainsi ? » (2, 18).

Mais dans un premier temps, Jésus ne répond pas à la demande de signe, et il répond par une énigme, qui en réalité, annonce le signe par excellence, c’est à dire la Résurrection. « Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. ». Les interlocuteurs de Jésus ne comprennent pas et pensent qu’il parle du Temple.

Peut-être que nous n’aurions pas compris non plus si l’évangéliste Jean qui écrit après la mort et la résurrection de Jésus, ne nous avait pas donné la solution, à savoir que Jésus parlait du sanctuaire de son corps. En fait, le « sanctuaire » n’est pas le « Temple ». Dans l’Ancien Testament grec, le mot « ναός » que nous traduisons par « sanctuaire » ,ne désigne que la partie dans laquelle se trouve le Saint et le Saint des Saints. Le  sanctuaire est donc le « lieu précis » du  Temple où Dieu est présent. Nous comprenons que Jésus se présente comme la véritable demeure de Dieu rendant le Temple et son sanctuaire caduc.

Revenons aux signes. Et si à la demande des juifs, Jésus avait réalisé un signe spectaculaire pour justifier l’expulsion des marchands, que ce serait-il passé ?

En fait, cela aurait tout au plus entrainé un engouement temporaire sur le moment comme nous le montre la fin du texte : « beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il accomplissait. Jésus, lui, ne se fiait pas à eux parce qu’il les connaissait tous » (Jn 2, 23-24). De fait, à la fin de l’évangile, ce sont ces mêmes autorités religieuses qui feront mettre Jésus à mort.

Les miracles ne peuvent pas transformer la nature humaine, c’est la raison pour laquelle Jésus ne se fie pas à l’engouement d’un instant. Jésus ne cherche jamais le merveilleux et le spectaculaire parce qu’une « foi » qui repose sur les miracles expose à l’idolâtrie ; celui-là même qui est visé en premier par le Code de l’alliance. Les disciples que recherche Jésus sont ceux dont la foi repose, non pas sur des miracles, mais sur un véritable engagement à sa suite, ce qui implique la fidélité à sa Parole et une véritable vie de disciple.

Cette quête de signes est aussi dénoncée par saint Paul dans le Deuxième Lecture quand il parle des juifs : « Alors que les Juifs réclament des signes miraculeux, et que les Grecs recherchent une sagesse, nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes. Mais pour ceux que Dieu appelle, qu’ils soient juifs ou grecs, ce Messie, ce Christ, est puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Co 1, 22-24).

En essayant de comprendre le monde « par le moyen de la sagesse », les grecs ont réduit Dieu à un « être » prenant place dans un système philosophique. Les Juifs quant à eux, au cours de leur histoire religieuse, ont pris l’habitude de demander des signes avant de faire confiance à Dieu. Le tort des Juifs comme des Grecs est d’avoir cru identifier Dieu et mettre la main sur Lui.

La solution que nous donne saint Paul pour que nous ne tombions pas dans le piège de la quête de signes venant du Ciel, est tout simplement de se souvenir de la Croix du Christ. Dieu s’est révélé de manière définitive là où personne ne l’attendait : sur une Croix.

Et si par hasard, nous ne sommes pas encore convaincus que la quête de signes miraculeux est un danger, souvenons-nous de l’épisode des « tentations de Jésus » au désert. Le premier personnage à demander à Jésus de réaliser des miracles, n’est autre que le Diable. Ne faisons pas comme lui, mais gardons les yeux fixés sur le Crucifié.