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Plan de l’Evangile selon St Matthieu (Bible de Jérusalem)

Dans son Introduction au Nouveau Testament, la Bible de Jérusalem propose comme plan de l’Evangile selon St Matthieu :

« On peut caractériser son Evangile comme un drame en sept actes sur la venue du Royaume des Cieux :

1 – Ch. 1 – 2 : Les préparations de la venue du Royaume dans la personne du Messie enfant.

 

2 – Ch. 3 – 7 : Promulgation par Jésus du programme propre au Royaume, devant les disciples et la foule, dans le Discours sur la Montagne.

3 – Ch. 8 – 10: Prédication du Royaume par des missionnaires ; les miracles de Jésus annoncent les signes qui accréditeront leur parole. Le Discours de mission prononcé par Jésus leur donne des consignes.

4 – Ch. 11,1 – 13,52: les obstacles que rencontrera le Royaume de la part des hommes, selon l’économie humble et cachée, voulue de Dieu, qu’illustre le Discours des Paraboles.

5 – Ch. 13,53 – 18,35: les débuts du Royaume dans un groupe de disciples, avec Pierre pour Chef, prémices de l’Eglise dont les règles de vie sont esquissées par le Discours communautaire.

6 – Ch. 19 – 25: la crise qui prépare l’avènement définitif du Royaume, suscitée par l’opposition croissante des chefs juifs et annoncée par le Discours eschatologique.

7 – Ch. 26 – 28: l’avènement du Royaume, dans la souffrance et le triomphe, par la Passion et la Résurrection de Jésus.

A l’occasion de la première apparition de l’expression « Royaume des Cieux » dans la bouche de Jésus, la Bible de Jérusalem donne en note :

« La Royauté de Dieu sur le peuple, élu, et par lui sur le monde, est au centre de la prédication de Jésus, comme elle l’était de l’idéal théocratique de l’Ancien Testament. Elle comporte un Royaume de “ saints ” dont Dieu sera vraiment le Roi parce que son règne sera reconnu d’eux dans la connaissance et l’amour. Compromise par la révolte du péché, cette Royauté doit être rétablie par une intervention souveraine de Dieu et de son Messie (Dn 2,28). C’est cette intervention que Jésus, après Jean Baptiste (Mt 3,2), annonce comme imminente (Mt 4,17.23 ; Lc 4,43), et qu’il réalise, non par un triomphe guerrier et nationaliste comme l’attendaient les foules (Mc 11,10 ; Lc19,11 ; Ac 1,6), mais d’une façon toute spirituelle (Mc 1,34 ; Jn 18,36), comme “ Fils de l’homme ” (Mt 8,20) et “ Serviteur ” (Mt 8,17 ; 20,28 ; 26,28) par son œuvre de rédemption qui arrache les hommes au règne adverse de Satan (Mt 4,8 ; 8,29 ; 12,25-26). Avant sa réalisation eschatologique définitive, où les élus vivront près du Père dans la joie du festin céleste (Mt 8,11 ; 13,43 ; 46,29) le Royaume apparaît avec des débuts humbles (Mt 13,31-33), mystérieux (Mt 13,11) et contredits (Mt 13,24-30) comme une réalité déjà commencée (Mt 12,28 ; Lc 17,20-21) et qui se développe lentement sur la terre (Mc 4,26-29) par l’Eglise (Mt 16,18). Instauré avec puissance comme Règne du Christ par le jugement de Dieu sur Jérusalem (Mt 16,28 ; Lc 21,31) et prêché dans l’univers, par la mission apostolique (Mt 10,7 ; 24,14 ; Ac 1,3), il sera définitivement établi et remis au Père (1 Co 15,24) par le retour glorieux du Christ (Mt 16,27 ; 25,31), lors du Jugement dernier (Mt 13,37-43.47-50 ; 25,31-46). En attendant, il se présente comme une pure grâce (Mt 20,1-16 ; 22,9-10 ; Lc 12,32), acceptée par les humbles (Mt 5,3 ; 18,3-4 ; 19,14.23-24) et les renoncés (Mt 13,44-46 ; 19,12 ; Mc 9,47 ; Lc 9,62 ; 18,29s), rejetée par les superbes et les égoïstes (Mt 21,31-32.43 ; 22,2-8 ; 23,13). On n’y entre qu’avec la robe nuptiale (Mt 22,11-13) de la vie nouvelle (Jn 3,3.5) ; il y a des exclus (Mt 8,12 ; 1 Co 6,9-10 ; Ga 5, 21). Il faut veiller pour être prêt quand il viendra à l’improviste (Mt 25,1-13). »




Plan de l’Evangile selon St Matthieu (P. Claude Tassin)

1° section : Prologue à la mission de Jésus (1,1 – 4,16)

1 – L’enfance de Jésus (1,1 – 2,23)

2 – Jean le Baptiste et Jésus (3,1 – 4,16)

2° section : Jésus inaugure le Royaume des Cieux (4,17 – 8,17)

1 – L’activité de Jésus (4,18-25)

2 – Le Sermon sur la montagne (5,1 – 7,27)

3 – Retour à l’activité de Jésus (7,28 – 8,17)

 

3° section : Jésus missionnaire du Royaume (8,18 – 12,21)

1 – L’activité missionnaire de Jésus (8,18 – 10,5a)

2 – Le discours sur la mission (10,5b-42)

3 – Accueil contrasté de la mission de Jésus (11,1 – 12,21)

4° section : « Quel est celui-ci » (12,22 – 16,20)

1 – Jésus aux prises avec les Pharisiens et les scribes (12,22-50)

2 – Le discours en paraboles (13,1-52)

3 – Vers la confession de foi de Pierre (13,53 – 16,20)

5° section : Vers Jérusalem, enseignement sur l’Eglise (16,21 – 20,34)

1 – L’annonce de la croix (16,21 – 17,27)

2 – Le discours sur l’Eglise (18,1-35)

3 – Du pouvoir au service (19,1 – 20,34)

6° section : A Jérusalem, le jugement royal du Fils de l’homme (21,1 – 25,46)

Prologue : l’arrivée à Jérusalem (21,1-22)

1 – Dans le Temple, affrontements de Jésus (21,23 – 23,29)

2 – Hors du Temple, le discours sur la fin (24,1 – 25,46)

 

7° section : De Jérusalem à la Galilée, la Pâque du Fils de l’homme (26,1 – 28,20)

1 – La Passion (26,1 – 27,56)

2 – Du tombeau à la gloire (27,57 – 28,20)

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Introduction à l’Evangile selon St Matthieu (Père Jean Radermakers)

À vrai dire, nous connaissons peu le Matthieu historique. La tradition chrétienne l’a très tôt identifié avec l’apôtre Lévi dont son évangile raconte la vocation, comme ceux de Marc (2,13-14) et de Luc (5,27-28), mais lui seul l’appelle Matthieu (9,9) et en souligne la profession (10,3) : publicain, ou percepteur de l’impôt romain sur la population juive. Marc le dit «fils d’Alphée» (Mc 2,14) et rapporte qu’il reçoit Jésus chez lui. S’agirait-il d’un membre de la tribu sacerdotale de Lévi ?

La personne

D’après le récit évangélique, sa patrie semble être Capharnaüm. Bien qu’il soit peu habituel de porter deux noms sémitiques, on parle de Lévi- Matthieu comme on le fait de Simon-Pierre. Le surnom de Matthieu, qui signifie «don de Dieu» — Théodore en grec et Dieudonné en français — pourrait lui avoir été attribué par Jésus. En tout cas, les listes d’apôtres du Nouveau Testament (Mt 10,3 ; Mc 3,18 ; Lc 6,15 ; Ac 1,13) le mentionnent.

Un témoignage de Papias, évêque d’Hiérapolis en Asie Mineure vers 110 ou 120, affirme que Matthieu a «groupé en ordre» et en langue araméenne — à moins qu’il ne faille traduire «selon un mode hébraïque» — les «sentences» (logia) ou paroles du Seigneur. Ce Papias, cité au IIIe siècle par l’historien chrétien Eusèbe de Césarée, entendait ainsi authentifier l’évangile grec de Matthieu connu à son époque. L’inscription «selon Matthieu», qui figure en tête des manuscrits de cet évangile, garantit l’ancienneté de cette tradition.

On n’en sait guère davantage. Divers auteurs de l’Église donnent à son sujet des indications peu contrôlables : il aurait en 42 quitté la Palestine pour évangéliser l’Éthiopie selon certains, les Parthes, la Perse, le Pont- Euxin selon d’autres, quand ce n’est pas la Macédoine ou même l’Irlande. On se rapprocherait sans doute de la vérité en situant en Syrie méridionale le champ de son évangélisation.

Le mode de sa mort et sa date sont aussi sujets à caution : décès naturel ou mort violente ? Les Églises grecques et latines honorent son

martyre à la cour éthiopienne. Ses reliques auraient été transférées à Paestum, puis au Xe siècle dans la crypte de la cathédrale de Salerne. Sa fête se célèbre le 16 novembre dans l’Église grecque, le 21 septembre chez les Latins. Son tombeau fut très tôt visité par de nombreux pèlerins qui l’invoquaient comme patron des changeurs et des douaniers. Des légendes s’ajoutèrent à son histoire, et dans les pays germaniques, des coutumes particulières : ainsi, le jour de sa fête, les fiancées jetaient à l’eau couronnes et gâteaux pour lui confier le bonheur de leur foyer.

Les sculpteurs, verriers et peintres ont représenté des scènes de sa vie, comme sa vocation et le repas chez Lévi. En 1729, Jean-Sébastien Bach composa sa grandiose Passion selon saint Matthieu, où les chœurs communautaires se joignent au récit évangélique. Le film de Pier-Paolo Pasolini campe un Jésus prophète-tribun fascinant ses disciples et subjuguant les foules, enseignant un évangile radical, accompagné par la musique de Bach et des chants populaires modernes.

L’évangéliste

Son évangile nous parle de ce qu’il fut comme porte-parole du message de Jésus. La composition de son ouvrage est éloquente sur ce point. Il est le seul à présenter une succession de discours de Jésus, suivis de gestes concrets ou de démarches qui traduisent au concret ses enseignements. En bon juif, il reprend un schéma courant dans la Bible, où Dieu dit ce qu’il va faire avant de faire ce qu’il a dit ; ce schéma a donné dans les communautés chrétiennes la structure de la célébration eucharistique : la Parole et le Pain.

Lorsque Jésus enfant ne peut encore parler (chap. 1-2), Matthieu convoque les prophètes qui ont annoncé le Messie et en donnent les titres majeurs : Emmanuel, Chef-pasteur, Fils de Dieu et Peuple d’Israël, Nazaréen. Ensuite, nous voyons Jésus, précédé par le Baptiste, entrer dans sa vie publique (chap. 3-4), pour «accomplir toute justice» (3,15).

D’emblée, Jésus apparaît alors au milieu de ses disciples comme celui qui enseigne sa communauté, qu’il va fonder et organiser. C’est d’abord le sermon sur la montagne (chap. 5-7), où, comme en un nouveau Sinaï, Jésus énonce les principes de base du Royaume des Cieux, une vraie charte du bonheur pour les hommes : béatitudes promises à ceux qui entrent avec Jésus dans l’accomplissement de la Torah ; piliers de l’observance juive que sont le jeûne, la prière et l’aumône ; pratique vivante où les actes vérifient les paroles. Après ce discours inaugural, Jésus lui-même va réaliser ce qu’il a proclamé par dix gestes de guérison comme Serviteur, Médecin et Époux (chap. 8-9).

L’étape suivante est marquée par un discours missionnaire (chap. 10) par lequel Jésus envoie ses apôtres pour prêcher la paix et guérir, en se conformant à l’agir de leur maître. On s’attend à les voir démarrer la mission, mais c’est Jésus qui part (chap. 11-12), recueillant lui-même le refus et la persécution, faisant ainsi percevoir aux siens la nécessité d’un discernement constant et d’une disponibilité toujours ouverte.

Qu’est-ce que le Royaume des cieux ? Jésus l’explique dans un discours en paraboles (chap. 13) : mystère de croissance comparable à la semence, au levain, au grain de moutarde ; mystère qui demande de tout lâcher pour trouver le trésor, la perle rare, le filet rempli. Interpellation intime : Comprenne qui a des oreilles ! À partir de là, Jésus va patiemment construire sa communauté (chap. 14-17) qu’il appelle église en la confiant à Pierre : lieu de rassemblement autour de l’Eucharistie et découverte de la liberté des enfants de Dieu dans la transfiguration du Fils bien-aimé.

Le moment est venu de fonder au concret la communauté des disciples. Le discours communautaire (chap. 18) en établit les fondements. Découvrir d’abord l’enfant, le pauvre, qui en est le centre vital ; respecter le petit, c’est percevoir en lui la présence vivante de Jésus, d’où la dignité absolue de chaque personne à sauvegarder, à ne pas perdre. Ensuite pardonner inlassablement, car le frère est don de Dieu. Nous ne pouvons faire obstacle au pardon et l’empêcher d’atteindre, à travers nous, le frère fautif. Établir pareille communauté n’est pourtant pas à taille humaine (chap. 19-22) ; les disciples s’aperçoivent vite de l’impossibilité de la tâche : l’amour mutuel, la pauvreté, le détachement des biens ne sont pas à notre portée. La foi est requise, qui est attachement indéfectible au Maître. Une réponse ferme et un engagement inconditionnel sont demandés au disciple.

Mais — contrepartie des Béatitudes —, l’agir de l’homme n’est pas ce qu’il devrait être (chap. 23). Jésus démasque et conteste l’hypocrisie des pharisiens d’autrefois comme de leurs imitateurs d’aujourd’hui. Le Royaume est un don à recevoir. La mission de Jésus aurait-elle échoué à cause de la défection des hommes ? Au contraire, prenant résolument la route de Jérusalem avec ses disciples, il leur adresse le discours sur la venue du Fils de l’homme dans l’Église et dans le monde (chap. 24- 25). Le vrai temple où Dieu est rencontré, c’est sa personne, qui va relever les ruines des sociétés humaines et enfanter le Royaume. La condition est de risquer sa vie pour Celui qui la donne, se porter à la rencontre de l’Époux, engager les talents confiés par le Maître, reconnaître le Roi présent dans le petit, le pauvre, le malade, l’emprisonné. Utopie ? Ou bien réalité à construire dans une fidélité allant jusqu’à la mort (chap. 2627) ? Mourir pour les siens, c’est mourir en chacun des siens : Corps livré, sang versé. La communauté est à ce prix, car la croix est chemin de grâce. L’avènement du Fils de l’homme se déroule dans le présent de l’histoire par la résurrection du Vivant. La vigilance devient le climat de discernement de la vie quotidienne. Partant dans le monde entier, le disciple aura à assumer ses responsabilités et «plonger les hommes dans l’intimité du Père, du Fils et de l’Esprit saint» (28,19).

Le fils d’Israël

L’évangile de Matthieu représente le témoignage d’une communauté judéo-chrétienne vivante établie dès la fin du Ier siècle en Galilée du Nord et en Syrie méridionale. Il s’achève par la proclamation de la mission universelle qui réalise la promesse faite à Abraham : «En toi se béniront toutes les nations de la terre» (Gn 12,3). Désormais la puissance agissante du Ressuscité est disponible à tous et s’étend à tous les moments de l’histoire humaine.

Effectivement, Matthieu est l’évangéliste de la communauté. Les cinq discours de Jésus, écho des cinq livres de la Torah, constituent l’enseignement du Ressuscité à son Église envoyée par le monde. Matthieu présente Jésus comme le Messie attendu par Israël et annoncé par les Écritures. Sa venue en son peuple est l’événement à partir duquel tous les faits historiques prennent leur sens ultime. La «justice surabondante» (5,20) qu’il requiert de ses disciples radicalise les prescriptions de la Torah et instaure au sein de la communauté les rapports fraternels recommandés par le Lévitique : «Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Lv 19,18). La commune relation au Père crée la communion fraternelle et son authenticité se mesure aux actes. Le service pastoral dans l’Église est confié à chacun des membres. Tous y sont appelés : pécheurs pardonnés, ils sont gardiens de la miséricorde divine par une attention à chacun dont tous sont responsables.

Ainsi l’Église poursuit la vocation d’Israël dont elle manifeste la visée universelle. Elle témoigne que la promesse se trouve accomplie en Jésus, présence du Royaume, à charge de l’annoncer à l’humanité. L’Israël historique, bien que fermé encore à cet accomplissement, garde sa fonction de veilleur. Il rappelle à l’Église qu’elle ne peut s’installer ici- bas et qu’elle doit se garder de l’idolâtrie toujours prête à resurgir. L’évangile de Matthieu invite son lecteur à reconnaître Israël comme son frère aîné et à vivre en Christ la communion à tous ses frères humains. Tel est son message.

Père Jean Radermakers, IET Bruxelles

Ce texte est extrait du « Sources Vives » n° 134 : Lire l’évangile selon saint Matthieu




Le Christ accomplit la Loi

Après une rapide introduction à la Bible, nous verrons l’Alliance conclue avec Abraham, puis celle conclue avec Moïse au sommet du Mont Sinaï. C’est là que Dieu lui donnera ces « Dix Paroles » qui constitueront le coeur de la Loi. Nous étudierons alors tout particulièrement quatre d’entre elles, et nous verrons ensuite, avec St Matthieu, comment le commandement de l’amour, enseigné par le Christ, accomplit en fait tous les autres commandements…

Pour des raisons pratiques, ce parcours vous est présenté en format PDF. Chaque fois que le texte hébreu, pour l’Ancien Testament (AT), est cité, il est aussitôt accompagné d’une traduction littérale. Ses nuances sont parfois capitales pour l’interprétation du texte biblique. En effet, lorsque, par exemple, l’une des Dix Paroles déclare à propos des idoles, « tu ne les serviras pas », le temps employé en hébreu suggère comme nuance : « Tu ne te laisseras pas asservir par elles »… Ainsi, « servir une idole », quelqu’elle soit, devient synonyme d’en « devenir l’esclave », et cela, Dieu ne le supporte pas, Lui qui nous a tous créés pour que nous soyons pleinement libres… L’amour en effet ne peut pleinement se vivre que dans l’acquiescement des libertés…

Bonne lecture à vous, et surtout, belle rencontre, de coeur, avec le Christ, dans la foi… car tel est bien le seul but que poursuit finalement toute étude biblique…

                                                                                                                      D. Jacques Fournier

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Le Christ accomplit la Loi 2017