1

Plan de l’Evangile selon St Matthieu (P. Claude Tassin)

1° section : Prologue à la mission de Jésus (1,1 – 4,16)

1 – L’enfance de Jésus (1,1 – 2,23)

2 – Jean le Baptiste et Jésus (3,1 – 4,16)

2° section : Jésus inaugure le Royaume des Cieux (4,17 – 8,17)

1 – L’activité de Jésus (4,18-25)

2 – Le Sermon sur la montagne (5,1 – 7,27)

3 – Retour à l’activité de Jésus (7,28 – 8,17)

 

3° section : Jésus missionnaire du Royaume (8,18 – 12,21)

1 – L’activité missionnaire de Jésus (8,18 – 10,5a)

2 – Le discours sur la mission (10,5b-42)

3 – Accueil contrasté de la mission de Jésus (11,1 – 12,21)

4° section : « Quel est celui-ci » (12,22 – 16,20)

1 – Jésus aux prises avec les Pharisiens et les scribes (12,22-50)

2 – Le discours en paraboles (13,1-52)

3 – Vers la confession de foi de Pierre (13,53 – 16,20)

5° section : Vers Jérusalem, enseignement sur l’Eglise (16,21 – 20,34)

1 – L’annonce de la croix (16,21 – 17,27)

2 – Le discours sur l’Eglise (18,1-35)

3 – Du pouvoir au service (19,1 – 20,34)

6° section : A Jérusalem, le jugement royal du Fils de l’homme (21,1 – 25,46)

Prologue : l’arrivée à Jérusalem (21,1-22)

1 – Dans le Temple, affrontements de Jésus (21,23 – 23,29)

2 – Hors du Temple, le discours sur la fin (24,1 – 25,46)

 

7° section : De Jérusalem à la Galilée, la Pâque du Fils de l’homme (26,1 – 28,20)

1 – La Passion (26,1 – 27,56)

2 – Du tombeau à la gloire (27,57 – 28,20)

_____________________




Introduction à l’Evangile selon St Matthieu (Père Jean Radermakers)

À vrai dire, nous connaissons peu le Matthieu historique. La tradition chrétienne l’a très tôt identifié avec l’apôtre Lévi dont son évangile raconte la vocation, comme ceux de Marc (2,13-14) et de Luc (5,27-28), mais lui seul l’appelle Matthieu (9,9) et en souligne la profession (10,3) : publicain, ou percepteur de l’impôt romain sur la population juive. Marc le dit «fils d’Alphée» (Mc 2,14) et rapporte qu’il reçoit Jésus chez lui. S’agirait-il d’un membre de la tribu sacerdotale de Lévi ?

La personne

D’après le récit évangélique, sa patrie semble être Capharnaüm. Bien qu’il soit peu habituel de porter deux noms sémitiques, on parle de Lévi- Matthieu comme on le fait de Simon-Pierre. Le surnom de Matthieu, qui signifie «don de Dieu» — Théodore en grec et Dieudonné en français — pourrait lui avoir été attribué par Jésus. En tout cas, les listes d’apôtres du Nouveau Testament (Mt 10,3 ; Mc 3,18 ; Lc 6,15 ; Ac 1,13) le mentionnent.

Un témoignage de Papias, évêque d’Hiérapolis en Asie Mineure vers 110 ou 120, affirme que Matthieu a «groupé en ordre» et en langue araméenne — à moins qu’il ne faille traduire «selon un mode hébraïque» — les «sentences» (logia) ou paroles du Seigneur. Ce Papias, cité au IIIe siècle par l’historien chrétien Eusèbe de Césarée, entendait ainsi authentifier l’évangile grec de Matthieu connu à son époque. L’inscription «selon Matthieu», qui figure en tête des manuscrits de cet évangile, garantit l’ancienneté de cette tradition.

On n’en sait guère davantage. Divers auteurs de l’Église donnent à son sujet des indications peu contrôlables : il aurait en 42 quitté la Palestine pour évangéliser l’Éthiopie selon certains, les Parthes, la Perse, le Pont- Euxin selon d’autres, quand ce n’est pas la Macédoine ou même l’Irlande. On se rapprocherait sans doute de la vérité en situant en Syrie méridionale le champ de son évangélisation.

Le mode de sa mort et sa date sont aussi sujets à caution : décès naturel ou mort violente ? Les Églises grecques et latines honorent son

martyre à la cour éthiopienne. Ses reliques auraient été transférées à Paestum, puis au Xe siècle dans la crypte de la cathédrale de Salerne. Sa fête se célèbre le 16 novembre dans l’Église grecque, le 21 septembre chez les Latins. Son tombeau fut très tôt visité par de nombreux pèlerins qui l’invoquaient comme patron des changeurs et des douaniers. Des légendes s’ajoutèrent à son histoire, et dans les pays germaniques, des coutumes particulières : ainsi, le jour de sa fête, les fiancées jetaient à l’eau couronnes et gâteaux pour lui confier le bonheur de leur foyer.

Les sculpteurs, verriers et peintres ont représenté des scènes de sa vie, comme sa vocation et le repas chez Lévi. En 1729, Jean-Sébastien Bach composa sa grandiose Passion selon saint Matthieu, où les chœurs communautaires se joignent au récit évangélique. Le film de Pier-Paolo Pasolini campe un Jésus prophète-tribun fascinant ses disciples et subjuguant les foules, enseignant un évangile radical, accompagné par la musique de Bach et des chants populaires modernes.

L’évangéliste

Son évangile nous parle de ce qu’il fut comme porte-parole du message de Jésus. La composition de son ouvrage est éloquente sur ce point. Il est le seul à présenter une succession de discours de Jésus, suivis de gestes concrets ou de démarches qui traduisent au concret ses enseignements. En bon juif, il reprend un schéma courant dans la Bible, où Dieu dit ce qu’il va faire avant de faire ce qu’il a dit ; ce schéma a donné dans les communautés chrétiennes la structure de la célébration eucharistique : la Parole et le Pain.

Lorsque Jésus enfant ne peut encore parler (chap. 1-2), Matthieu convoque les prophètes qui ont annoncé le Messie et en donnent les titres majeurs : Emmanuel, Chef-pasteur, Fils de Dieu et Peuple d’Israël, Nazaréen. Ensuite, nous voyons Jésus, précédé par le Baptiste, entrer dans sa vie publique (chap. 3-4), pour «accomplir toute justice» (3,15).

D’emblée, Jésus apparaît alors au milieu de ses disciples comme celui qui enseigne sa communauté, qu’il va fonder et organiser. C’est d’abord le sermon sur la montagne (chap. 5-7), où, comme en un nouveau Sinaï, Jésus énonce les principes de base du Royaume des Cieux, une vraie charte du bonheur pour les hommes : béatitudes promises à ceux qui entrent avec Jésus dans l’accomplissement de la Torah ; piliers de l’observance juive que sont le jeûne, la prière et l’aumône ; pratique vivante où les actes vérifient les paroles. Après ce discours inaugural, Jésus lui-même va réaliser ce qu’il a proclamé par dix gestes de guérison comme Serviteur, Médecin et Époux (chap. 8-9).

L’étape suivante est marquée par un discours missionnaire (chap. 10) par lequel Jésus envoie ses apôtres pour prêcher la paix et guérir, en se conformant à l’agir de leur maître. On s’attend à les voir démarrer la mission, mais c’est Jésus qui part (chap. 11-12), recueillant lui-même le refus et la persécution, faisant ainsi percevoir aux siens la nécessité d’un discernement constant et d’une disponibilité toujours ouverte.

Qu’est-ce que le Royaume des cieux ? Jésus l’explique dans un discours en paraboles (chap. 13) : mystère de croissance comparable à la semence, au levain, au grain de moutarde ; mystère qui demande de tout lâcher pour trouver le trésor, la perle rare, le filet rempli. Interpellation intime : Comprenne qui a des oreilles ! À partir de là, Jésus va patiemment construire sa communauté (chap. 14-17) qu’il appelle église en la confiant à Pierre : lieu de rassemblement autour de l’Eucharistie et découverte de la liberté des enfants de Dieu dans la transfiguration du Fils bien-aimé.

Le moment est venu de fonder au concret la communauté des disciples. Le discours communautaire (chap. 18) en établit les fondements. Découvrir d’abord l’enfant, le pauvre, qui en est le centre vital ; respecter le petit, c’est percevoir en lui la présence vivante de Jésus, d’où la dignité absolue de chaque personne à sauvegarder, à ne pas perdre. Ensuite pardonner inlassablement, car le frère est don de Dieu. Nous ne pouvons faire obstacle au pardon et l’empêcher d’atteindre, à travers nous, le frère fautif. Établir pareille communauté n’est pourtant pas à taille humaine (chap. 19-22) ; les disciples s’aperçoivent vite de l’impossibilité de la tâche : l’amour mutuel, la pauvreté, le détachement des biens ne sont pas à notre portée. La foi est requise, qui est attachement indéfectible au Maître. Une réponse ferme et un engagement inconditionnel sont demandés au disciple.

Mais — contrepartie des Béatitudes —, l’agir de l’homme n’est pas ce qu’il devrait être (chap. 23). Jésus démasque et conteste l’hypocrisie des pharisiens d’autrefois comme de leurs imitateurs d’aujourd’hui. Le Royaume est un don à recevoir. La mission de Jésus aurait-elle échoué à cause de la défection des hommes ? Au contraire, prenant résolument la route de Jérusalem avec ses disciples, il leur adresse le discours sur la venue du Fils de l’homme dans l’Église et dans le monde (chap. 24- 25). Le vrai temple où Dieu est rencontré, c’est sa personne, qui va relever les ruines des sociétés humaines et enfanter le Royaume. La condition est de risquer sa vie pour Celui qui la donne, se porter à la rencontre de l’Époux, engager les talents confiés par le Maître, reconnaître le Roi présent dans le petit, le pauvre, le malade, l’emprisonné. Utopie ? Ou bien réalité à construire dans une fidélité allant jusqu’à la mort (chap. 2627) ? Mourir pour les siens, c’est mourir en chacun des siens : Corps livré, sang versé. La communauté est à ce prix, car la croix est chemin de grâce. L’avènement du Fils de l’homme se déroule dans le présent de l’histoire par la résurrection du Vivant. La vigilance devient le climat de discernement de la vie quotidienne. Partant dans le monde entier, le disciple aura à assumer ses responsabilités et «plonger les hommes dans l’intimité du Père, du Fils et de l’Esprit saint» (28,19).

Le fils d’Israël

L’évangile de Matthieu représente le témoignage d’une communauté judéo-chrétienne vivante établie dès la fin du Ier siècle en Galilée du Nord et en Syrie méridionale. Il s’achève par la proclamation de la mission universelle qui réalise la promesse faite à Abraham : «En toi se béniront toutes les nations de la terre» (Gn 12,3). Désormais la puissance agissante du Ressuscité est disponible à tous et s’étend à tous les moments de l’histoire humaine.

Effectivement, Matthieu est l’évangéliste de la communauté. Les cinq discours de Jésus, écho des cinq livres de la Torah, constituent l’enseignement du Ressuscité à son Église envoyée par le monde. Matthieu présente Jésus comme le Messie attendu par Israël et annoncé par les Écritures. Sa venue en son peuple est l’événement à partir duquel tous les faits historiques prennent leur sens ultime. La «justice surabondante» (5,20) qu’il requiert de ses disciples radicalise les prescriptions de la Torah et instaure au sein de la communauté les rapports fraternels recommandés par le Lévitique : «Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Lv 19,18). La commune relation au Père crée la communion fraternelle et son authenticité se mesure aux actes. Le service pastoral dans l’Église est confié à chacun des membres. Tous y sont appelés : pécheurs pardonnés, ils sont gardiens de la miséricorde divine par une attention à chacun dont tous sont responsables.

Ainsi l’Église poursuit la vocation d’Israël dont elle manifeste la visée universelle. Elle témoigne que la promesse se trouve accomplie en Jésus, présence du Royaume, à charge de l’annoncer à l’humanité. L’Israël historique, bien que fermé encore à cet accomplissement, garde sa fonction de veilleur. Il rappelle à l’Église qu’elle ne peut s’installer ici- bas et qu’elle doit se garder de l’idolâtrie toujours prête à resurgir. L’évangile de Matthieu invite son lecteur à reconnaître Israël comme son frère aîné et à vivre en Christ la communion à tous ses frères humains. Tel est son message.

Père Jean Radermakers, IET Bruxelles

Ce texte est extrait du « Sources Vives » n° 134 : Lire l’évangile selon saint Matthieu




Les enjeux du « Dimanche de la Parole de Dieu » (Fr Manuel Rivéro)


Le pape François vient d’instituer « le Dimanche de la Parole de Dieu[1] » qui aura lieu le 3e dimanche du Temps ordinaire, en 2020, ce sera le 26 janvier. Il a choisi la mémoire liturgique de saint Jérôme (350-419), traducteur et commentateur de la Bible, pour mettre en lumière la Parole de Dieu révélée aux hommes : « Ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ », enseignait-il.

Origine surnaturelle des Saintes Écritures

Jean Guitton (1999)[2], philosophe, membre de l’Académie française, invité par le saint pape Paul VI au concile Vatican II, me disait lors d’un entretien à Paris sur le père Lagrange : « Nos contemporains ne croient pas en la dimension surnaturelle de la Bible ; c’est pourquoi il convient de mettre sur les autels le père Marie-Joseph Lagrange, le fondateur de l’École biblique de Jérusalem, pour relier la foi et la science. » Disciple du père Lagrange à Jérusalem, Jean Guitton vénérait la figure de ce maître en exégèse.

Le cardinal Carlo Maria Martini (2012), exégète et grand apôtre de la lectio divina, souhaitait aussi la béatification du père Lagrange, dont « la prière était feu », de manière à relier le renouveau de l’exégèse catholique au XIXe siècle avec la sainteté[3].

Le pape cite l’Évangile de saint Luc[4] pour montrer que les disciples ont eu besoin de Jésus pour leur ouvrir l’esprit à l’intelligence des Écritures. Jésus qui avait ouvert les oreilles des sourds et les yeux des aveugles ouvre l’esprit fermé des disciples afin qu’ils reçoivent la lumière de la Révélation divine transmise par les Saintes Écritures. Il s’agit d’un miracle encore plus grand que les guérisons physiques. La présence de Jésus ressuscité ne suffit pas. Les disciples déconcertés et apeurés après le Vendredi saint ont besoin de recevoir le sens des événements par la catéchèse de Jésus qui a accompli les prophéties de l’Ancien Testament dans sa mort et dans sa résurrection : « en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem[5] ».

Jésus, exégète du Père

Jésus, l’exégète du Père, est venu expliquer le mystère de Dieu. Le Prologue de l’Évangile selon saint Jean utilise le mot grec[6] qui a donné en français « exégèse » pour manifester l’œuvre du Fils de Dieu qui par sa prédication « fait voir » et comprendre l’amour du Père que personne n’a jamais vu. Les explications de Jésus s’avèrent indispensables pour enraciner la Parole de Dieu dans les cœurs, autrement le diable parviendrait à arracher cette semence de vie divine restée à la superficie[7].

Sorti vivant du tombeau, Jésus rappelle aux disciples le sens de la croix et de la Passion. La croix devient la clé qui déverrouille les mystères fermés de l’existence humaine frappée par la souffrance, l’injustice, le mal et le malin. Le récit des disciples d’Emmaüs converge vers cette phrase de Jésus : « Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire ? [8] ». Pour entrer dans la gloire de la résurrection il n’y a qu’un seul chemin, le chemin de la croix. Saint Jean de la Croix (1591), le grand mystique espagnol, faisait remarquer que nombreux sont ceux qui veulent arriver dans la gloire de Dieu en évitant les souffrances. Un proverbe canadien dit le même message d’une autre manière : « Tous veulent aller au paradis mais personne ne veut mourir. »

Messie crucifié

L’originalité de la foi chrétienne se trouve précisément dans la présence de Jésus au cœur des épreuves et de la mort. Folie et scandale de la croix, s’exclamait saint Paul devant des auditoires sceptiques voire révoltés à l’idée d’un Dieu qui souffrirait. Quand Jésus parle du besoin de la croix, il s’agit de la logique de l’amour. Saint Augustin prêchait : « Donnez-moi quelqu’un qui aime et il comprendra ce que je dis. » L’amour rend humble et petit. Ceux qui aiment sont prêts à souffrir et même à donner leur vie pour la personne aimée : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis[9] », enseigne Jésus. Par amour, le Très-Haut est devenu le très-bas, le tout-puissant s’est abaissé jusqu’à la faiblesse et la fragilité, Dieu grand s’est présenté comme un petit bébé à Bethléem. C’est dans l’abaissement et l’humilité que Dieu se révèle amour et qu’il nous apprend à aimer. Les grands saints ont aimé prier au pied de la croix pour y découvrir l’art d’aimer de Dieu.

Des sages humanistes proposent parfois aux chercheurs de Dieu de choisir la religion qui les rend meilleurs. À la lumière de l’Évangile de Jésus, non-violent qui aime jusqu’à la mort, le chrétien pourrait affirmer : « Choisis la religion où Dieu soit Amour et qu’Il te donne la grâce d’aimer sans domination ». Quel homme a-t-il osé dire « venez à moi, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour vos âmes ? [10] ». Dieu ne se trouve pas dans la recherche du sentiment de puissance. Dieu est Amour tel que le décrit saint Paul : « L’amour ne cherche pas son intérêt, ne s’irrite pas, ne tient pas compte du mal (…), il excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout. L’amour ne passe jamais[11] ».

Il arrive que des croyants d’autres religions que le christianisme disent aux chrétiens : « votre religion et la mienne, c’est la même chose. Il n’y a qu’un seul Dieu ». C’est vrai qu’il n’y a qu’un seul Dieu mais la manière d’aimer de Dieu n’est pas la même selon les religions. Aux antipodes de toute domination, Jésus révèle l’amour de son Père. D’après les différentes visions de Dieu il y aura diverses manières d’aimer.

La souffrance, la peur de souffrir et la mort font peur. Tout homme essaie d’y échapper. Combat naturel qui correspond à la volonté de Dieu. Dieu ne veut pas la mort des hommes. Dieu n’a pas voulu la mort. Celle-ci est entrée dans le monde par la jalousie du diable[12].

Paul Claudel (1955), poète catholique, réagissait aux questions sur le mal en disant : « Jésus n’est pas venu expliquer le mal mais l’habiter et le vaincre ». Jésus est mort pour vaincre la mort. Son sacrifice a agi comme une arme fatale contre les pouvoirs de la mort. La puissance de l’Amour de Jésus s’est manifestée dans sa résurrection.

Présence de Jésus dans la souffrance et l’insécurité

Le contraire de la foi n’est pas à proprement parler l’athéisme mais la solitude. Chacun a peur de la solitude, de l’échec, de la prison et de la mort. La spécificité de la foi chrétienne apparaît dans la présence aimante de Jésus dans la maladie, l’injustice, l’échec et la mort. Tout au long de l’histoire de l’Église, les chrétiens ont témoigné de cette communion au Christ dans la persécution et la douleur. La foi chrétienne ne consiste pas à penser que Dieu existe. Par la foi, le chrétien contemple Jésus vivant et il s’unit à ses souffrances dans l’espérance de partager sa gloire. Nous comprenons alors le grand nombre de témoignages de baptisés, qui nous partagent leur expérience heureuse de communion avec Dieu dans des circonstances où tout ferait penser au vide et à l’absurde. Des malades témoignent des grâces reçues dans la maladie. Des personnes détenues injustement témoignent des grâces vécues dans le froid des cellules de prison. Le père Pedro Arrupe (1991), ancien Général de la Compagnie de Jésus, se souvenait des journées passées injustement dans une prison japonaise, cœur à cœur avec Jésus, en le contemplant dans sa Passion, à Gethsémani, dans sa garde à vue dans la maison du grand-prêtre, flagellé, abandonné, insulté, couronné d’épines, crucifié. Le père Arrupe considérait ces jours de tristesse humaine comme de grands moments de sa vie mystique : « Il n’y avait rien dans ma cellule de prison ; j’étais seul avec le Christ[13] ». Là où le mal avait abondé, la grâce avait surabondé.

La Parole de Dieu engendre la foi. Le chrétien découvre alors son identité de fils de Dieu et de frère de Jésus. La Parole de Dieu révèle le mystère de la Trinité et elle révèle aussi l’homme à lui-même : « Le mystère de l’homme ne s’éclaire qu’à la lumière de Jésus » (Concile Vatican II. Gaudium et spes n° 22). Le christianisme ne fait pas partie des religions du livre même s’il vénère les Saintes Écritures. Le Verbe fait chair est vivant. Le texte de la Bible devient vivant par l’Esprit de Jésus ressuscité. Sans la grâce intérieure de l’Esprit Saint répandue dans le cœur des croyants, les enseignements des textes bibliques n’apporteraient pas la connaissance ni la vie de Dieu[14].

La Parole de Dieu établit « un dialogue constant de Dieu avec son peuple[15] ». Le mot « dialogue » comprend le mot « logos » qui dans le grec de l’Évangile selon saint Jean désigne le Verbe de Dieu : intelligence divine et Parole. Dans l’Ancien Testament, le mot hébreu « davar » qui signifie « parole » représente un événement. La Parole de Dieu ne saurait pas être réduite à un simple souffle mais elle est créatrice et marque l’histoire.

Ce n’est pas sans raison, que les chrétiens cherchent le dialogue avec les religions et les cultures. Dieu est dialogue dans l’altérité et l’unité. Le Père engendre le Fils et le Fils fait le Père. Sans Fils il n’y a pas de Père. Le Père s’entretient avec son Fils et le Fils rend grâces au Père dans la communion de l’Esprit Saint. Ce dialogue de Dieu « ad intra », dans le mystère de la sainte Trinité, se trouve à la source du dynamisme des dialogues religieux et philosophiques « ad extra » dans l’histoire de l’humanité.

Le Verbe et les mots

Seul Dieu parle bien de Dieu. Jésus, le Verbe fait chair, emprunte nos mots humains les plus justes pour manifester le mystère de Dieu. Le théologien espagnol, Cabodevilla, aimait à dire que « la Parole de Dieu s’est faite chair dans des mots[16] ». L’Incarnation du Fils de Dieu ne se réduit pas à la chair humaine de Jésus, à l’Enfant de la crèche, elle comprend la culture et la langue d’Israël. Les mots humains n’expriment pas toute la richesse des pensées et des sentiments mais ils demeurent la médiation indispensable pour la communication. Dieu est Esprit. Les mots de nos langues et les expériences humaines restent bien en-deçà de la grandeur de Dieu. Pourtant, les mots de la Bible et leur renvoi à la terre et aux travaux des hommes peuvent éveiller l’intelligence à la compréhension de Dieu. C’est ce que fait Jésus dans l’Évangile en parlant des vignes, des mariages, des bergers, des trésors … Dans les Saintes Écritures, les mots sont cent pour cent de Dieu et cent pour cent des hommes. Le pape François rappelle l’enseignement du Concile Vatican II dans la Constitution « Dei Verbum[17] » sur le principe de l’incarnation.

« Cœurs brûlants »

« Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Écritures ? [18] ». La Parole de Dieu fait grandir dans l’amour de Dieu. Il ne sert à rien de se plaindre de l’égoïsme des gens. La conversion passe par un long chemin où la Parole de Dieu joue un rôle fondamental. Les disciples d’Emmaüs marchaient tristes et découragés, le visage sombre. La catéchèse de Jésus, à partir de la Loi, des Prophètes et des Psaumes, a rempli leurs cœurs de la joie pascale.

Aujourd’hui, les catéchistes accomplissent aussi une mission extraordinaire source d’allégresse. J’aime à dire que catéchiste est le plus beau métier du monde. Métier, ministère, service, qui peut illuminer la route des adultes et des enfants à jamais. En tant qu’aumônier de prison, je récolte les fruits de la catéchèse. Souvent les personnes détenues ne se sont pas confessées depuis leur première communion mais les enseignements de la catéchèse gardés dans « le disque dur » de la mémoire remontent lors des événements douloureux.

L’homélie

Le pape François met en valeur l’homélie qui nourrit la foi des chrétiens, « elle possède un caractère presque sacramentel[19] ». L’homélie n’est pas une conférence ni un cours. Dans l’homélie, le prêtre actualise l’Évangile. « Aujourd’hui s’accomplit cette parole », s’était exclamé Jésus en refermant le rouleau du prophète Isaïe dans la petite synagogue de Nazareth. Dans les anciennes basiliques chrétiennes, l’existence de deux ambons, l’un pour l’Ancien Testament et l’autre pour le Nouveau Testament, mettait en évidence la différence et la relation entre eux pour les unir dans le mystère du Christ[20]. Le pape François commente l’accomplissement de l’Ancien Testament par le Christ : « L’Ancien Testament n’est jamais vieux une fois qu’on le fait entrer dans le Nouveau, car tout est transformé par l’unique Esprit qui l’inspire[21] ».

Le pape évoque « le caractère performatif de la Parole de Dieu[22] », c’est-à-dire qu’elle réalise ce qu’elle dit. Dans la liturgie de la Parole, l’Esprit Saint agit. D’où le symbole de la colombe dans les chaires de nos églises. L’Esprit Saint descend sur l’assemblée pendant la liturgie de la Parole de Dieu en prière pour faire grandir la foi et l’amour. Cette épiclèse fait des fidèles réunis en « un seul corps et un seul esprit dans le Christ » (Canon eucharistique n° III).

Victoria, ma sœur aînée, professeur des écoles pendant toute sa vie, appréciait particulièrement les homélies d’un prêtre de Bilbao qui commençait par une question et qui finissait par une question. Dieu s’adresse à l’intelligence. L’homélie cherche à éveiller l’intelligence. Dans l’Évangile, Marie se pose des questions : « comment[23] », « pourquoi ». L’homélie éclaire les interrogations de l’homme l’orientant vers des choix d’amour à faire dans la liberté. Chesterton (1936), écrivain catholique anglais, disait avec humour : « Quand on rentre dans une église on est prié d’enlever le chapeau mais pas la tête ! ».

La sonorisation et l’articulation

Pour que l’homélie porte ses fruits, il s’avère indispensable de miser sur une bonne sonorisation. L’un des premiers investissements à prévoir dans une paroisse concerne la sonorisation. Trop souvent, les fidèles se plaignent de ne pas entendre ou de ne pas comprendre les lectures ou l’homélie à cause des défauts dans le système de sonorisation. Pour les nouvelles générations habituées à la perfection technique des médias, une sonorisation défectueuse discrédite la valeur sacrée de la Parole de Dieu.

Il convient aussi de former les laïcs à l’utilisation des micros. J’aime à dire sous forme de boutade que « les micros sont comme les personnes, il faut leur parler et non pas les frapper. Si on les frappe, on les abîme ». Pourtant je continue de voir les habitués des paroisses taper sur les micros.

La lecture de la Parole de Dieu suppose aussi une préparation soignée. L’expérience prouve que les formations à la respiration, à l’articulation et à la lecture publique portent des fruits merveilleux et assez rapides. Les comédiens étudient cet art dont les églises ont bien besoin. Il serait bon d’organiser des sessions de formation avec des professionnels du théâtre, par exemple.

La Vierge Marie et la Parole de Dieu

Marie, la mère de Jésus, est louée dans l’Évangile à cause de sa foi en l’accomplissement de la Parole de Dieu en elle (cf. Lc 1, 45). Pour le pape François, cette béatitude de la foi précède les autres béatitudes sur la pauvreté, l’humilité, les artisans de paix …

Saint Ambroise de Milan (397) partageait son expérience et celle d’une multitude de croyants quand il affirmait que dans la lecture priante de la Parole de Dieu l’homme se promène avec Dieu dans le paradis[24]. Lire les Saintes Écritures équivaut à écouter Dieu qui parle au cœur. Dialogue d’amour qui fait grandir la foi. Le bonheur de Marie a été précisément d’écouter et de prier la Loi, les Psaumes et les Prophètes. La foi ne consiste pas à penser que Dieu existe. Le diable le pense aussi. La foi jaillit de l’âme en réponse à la révélation de l’amour de Dieu dans les Saintes Écritures et dans la prédication. La grandeur de Marie se trouve dans sa foi. Le pape François de citer saint Augustin qui met en lumière Marie comme disciple de Jésus qui écoute et met en pratique la Parole de Dieu.

Modèle de foi, Marie n’a pas tout compris. Saint Luc commente le recouvrement de Jésus au Temple de Jérusalem, quand il a expliqué à Marie et à Joseph qu’ « il devait être dans la maison de son Père » (cf. Lc 2, 49), en soulignant que ni Marie ni Joseph « ne comprirent cette parole ». La foi illumine la route des hommes mais elle comporte aussi un côté obscur qui fait penser à « la nuit de la foi » chantée par saint Jean de la Croix. Le père Marie-Joseph Lagrange a consacré son existence à la traduction et au commentaire de la Bible en reconnaissant aussi que « la Parole de Dieu pouvait être obscure ». Sans cette limite dans la connaissance de Dieu, la foi ne serait plus la foi mais la claire vision.

Saint Luc, l’évangéliste, montre Marie « qui garde fidèlement dans son cœur » (cf. Lc 2, 51) les événements et les paroles de son fils Jésus.

La prière plutôt qu’une action apparaît comme un état dans la vie de Jésus et des apôtres. À l’image de l’amour qui unit ceux qui aiment même s’ils n’y pensent pas, celui et celle qui prie vit en communion avec Dieu. Marie vivait en état de prière par sa foi. Saint Luc fait appel à deux mots importants de la vie spirituelle de Marie, mère et disciple de son Fils Jésus : « garder » et « fidèlement ».

Une mère porte son enfant dans son sein pendant neuf mois. Cette relation unit la mère et le fils d’une manière unique et définitive. Les généticiens disent que chaque enfant laisse dans le corps de sa mère quelques cellules. La mère qui a donné son corps à l’enfant garde quelque chose du corps de celui-ci en elle. Marie garde fidèlement les événements de la vie de Jésus dans son esprit. « Fidèlement » vient de « foi ». Il s’agit de la même étymologie. Toute l’existence de Marie ressemble à un pèlerinage de foi.

Le pape émérite Benoît XVI dans son Exhortation post-synodale « Verbum Domini » sur la Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l’Église « exhorte les chercheurs à approfondir le plus possible le rapport entre la mariologie et la théologie de la Parole[25] ». Marie, « Mère du Verbe de Dieu » et « Mère de la foi » apparaît comme un modèle d’écoute de la Parole de Dieu. À l’Annonciation, Marie écoute avec son cœur l’annonce de l’ange Gabriel. Le livre du Deutéronome présente l’écoute de la Parole de Dieu comme le premier des commandements et le fondement de l’amour de Dieu à vivre par le Peuple de Dieu : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir » (cf. Dt 6, 4).

Un proverbe africain dit « que la femme est fécondée par l’oreille ». Manière de relier l’écoute, l’amour et le don de la vie.

En Marie, femme juive, première chrétienne, l’Ancien Testament passe dans le Nouveau Testament pour s’accomplir en Jésus, née d’une femme (cf. Ga 4, 4) : « Marie est aussi le symbole de l’ouverture à Dieu et aux autres ; de l’écoute active qui intériorise, qui assimile et où la Parole divine devient la matrice de la vie[26] ». La Parole de Dieu devient matrice d’une nouvelle manière de penser, de prier, de parler et d’agir.

Marie et la Trinité

La Vierge Marie, temple de la sainte Trinité, rayonne de la lumière de Dieu. Fille du Père, source de la vie, Marie n’est pas une déesse mais une créature aimée et sauvée par Dieu. Mère du Verbe fait chair, Image du Père, Marie manifeste au monde l’infinie richesse de la connaissance de Dieu révélée par Jésus.

Dans son commentaire au Credo, saint Thomas d’Aquin (1274) montre comment le Verbe s’est manifesté dans le mystère de l’Incarnation : « Rien n’est plus semblable au Fils de Dieu que le verbe que notre intelligence conçoit sans le proférer par les lèvres. Or, nul ne connaît le verbe tant qu’il demeure dans l’intelligence de l’homme si ce n’est celui qui le conçoit ; mais dès que notre langue le fait entendre, il est connu de nos auditeurs. Ainsi le Verbe de Dieu, aussi longtemps qu’il demeurait dans l’intelligence du Père, était connu seulement de son Père ; mais une fois revêtu d’une chair, comme le verbe de l’homme se revêt du son de sa voix, il s’est alors manifesté au dehors pour la première fois et s’est fait connaître. Selon cette parole de Baruch (3, 38) : « Ainsi il est apparu sur la terre et il a conversé avec les hommes. » Voici le deuxième exemple. Nous connaissons par l’ouïe le verbe proféré par la voix, et cependant nous ne voyons pas et nous ne le touchons pas ; mais si ce verbe nous l’écrivons sur un papier, alors nous pouvons le toucher et le voir. Ainsi le Verbe de Dieu s’est fait lui aussi, et visible et tangible, lorsqu’il s’inscrivit en quelque sorte dans notre chair. Et de même que le papier sur lequel est inscrite la parole du roi, nous l’appelons la parole du roi, de même l’homme auquel est uni le Verbe de Dieu dans une seule personne, nous le nommons le Fils de Dieu[27] ». Ici l’Incarnation du Verbe est comparée au papier. La Vierge Marie a été cette page blanche sur laquelle Dieu a écrit l’histoire du Salut. La page blanche évoque la disponibilité de Marie et l’absence de péché en elle. Par Marie, Dieu s’est rendu visible à nos yeux. La Vie de Dieu s’est manifestée en Jésus[28]. Qui voit Jésus voit le Père. De même qu’un récit fait voir l’histoire racontée comme si elle se déroulait devant nos yeux. Par l’Esprit Saint, la Parole de Dieu rend visible le visage du Christ dans la lumière de la foi : « Jésus-Christ est le visage humain de Dieu et le visage divin de l’homme[29] ».

Loin d’être une mère possessive, Marie conduit toujours à Jésus comme elle l’a fait lors des noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira » (cf. Jn 2, 5). Épouse de l’Esprit Saint, don de Dieu qui fait grandir l’Église, Marie contribue par son intercession à la croissance de la foi et du Corps du Christ, l’Église.

La maternité divine de Marie ne s’arrête pas à Noël. Elle se déploie jusqu’au Calvaire où Jésus la donne comme mère spirituelle à Jean, le disciple bien-aimé qui représente l’Église, et à la Pentecôte où l’Esprit Saint descendra sur les apôtres en prière au Cénacle et sur une multitude de croyants rassemblés à Jérusalem.

Sur le Calvaire, une épée a transpercé l’âme de Marie (cf. Lc 2, 35). Les icônes de la Mère de Dieu placent une étoile sur son front et sur ses épaules, symboles de la virginité avant, pendant et après l’accouchement. En revanche, sur le Calvaire, Marie a connu la déchirure de l’âme. La foi et la maternité spirituelle de Marie ne sont pas allés sans souffrance.

L’annonce de la Parole de Dieu pour que les âmes naissent à la vie de Dieu passe par la déchirure de l’accouchement. Sœur Inés de Jesús O.P., (1993) moniale dominicaine du monastère de Caleruega (Burgos, Espagne), a écrit que « les accouchements des âmes provoquent des déchirures » (Journal spirituel inédit, 28 août 1973). La maternité spirituelle, qui favorise la nouvelle naissance des âmes à la vie de Dieu, passe par les souffrances de l’accouchement de la nouvelle création comme l’enseigne saint Paul[30].

Glorifiée en son corps et en son âme la Vierge Marie, la Mère de Dieu, continue d’œuvrer aux côtés de son Fils pour la croissance du Christ total, la Tête, Jésus, et les membres, les baptisés et ceux qui croient en lui. Bossuet définissait l’Église comme le Christ répandu et communiqué.

Mère du Verbe fait chair en elle, Marie grandit dans sa mission de faire connaître et aimer son Fils qu’elle a accueilli et donné au monde. D’où son rôle dans l’évangélisation. De très nombreuses congrégations religieuses missionnaires ont choisi le patronage de la Vierge Marie, la Mère de la Parole de Dieu. Sur environ 400 congrégations féminines de vie apostolique 130 portent un nom marial[31]. Personne n’a aimé autant le Verbe fait chair que Marie. Nul n’a accueilli avec autant de foi et d’amour la Parole de Dieu que Marie.

Dans la vie d’un chrétien, il y a un va-et-vient entre la prière et l’approfondissement de la Parole de Dieu. Plus la Parole de Dieu est écoutée et priée et plus le fidèle a soif de chercher la richesse des sens de l’Écriture. Trésor inépuisable, source d’eau vive jamais tarie, comme le dit saint Ephrem cité par le pape François au début de cette lettre apostolique « Aperuit illis ».

Le père Marie-Joseph Lagrange (1938), avait inauguré l’École biblique de Jérusalem avec une grande vision du sens et du futur de l’interprétation de la Parole de Dieu : « Dieu a donné dans la Bible un champ infini de progrès dans la vérité ».

Le but de ce nouveau « dimanche de la Parole de Dieu » est de faire aimer davantage la révélation divine et de la mettre en pratique. En effet, la liturgie porte la Parole de Dieu à l’instar d’un écrin qui contient un bijou.

Le fondamentalisme représente un péché contre l’intelligence. La vérité évangélique ne ressemble pas à une statue en béton. La Vérité est Chemin et Vie en la personne de Jésus[32]. La Parole de Dieu ne cesse de grandir dans le cœur des chercheurs de Vérité qui l’écoutent et la lisent. La Parole de Dieu fait toutes choses nouvelles[33]. Elle éveille le désir et l’amour. C’est pourquoi la Bible s’achève avec l’Apocalypse en priant : « Maranatha ! Viens Seigneur Jésus » (Ap. 22, 20).

 

Saint-Denis (La Réunion. France), le 10 octobre 2019.

Fr. Manuel Rivero O.P.,

président de l’Association des amis du père Lagrange O.P., fondateur de l’École biblique de Jérusalem.

[1] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis » du lundi 30 septembre 2019 en forme de « Motu proprio »,

[2] Voir aussi Jean Guitton, Portrait du père Lagrange. Celui qui a réconcilié la science et la foi. Paris, Éditions Robert Laffont, 1992.

[3] Il Cardinale Carlo Maria Martini, S. J.

Gerusalemme, 22 luglio 2007

Molto reverendo e caro padre Manuel Rivero o. p. ,

Le sono molto grato per la sua lettera dell’11 maggio 2007, consegnatami dal nuovo Padre Priore del convento di santo Stefano di Gerusalemme.

Mi dà grande gioia la notizia che la causa di beatificazione del padre Marie Joseph Lagrange, fondatore della Ecole Biblique di Gerusalemme, è già assai avanti. Personalmente non ho conosciuto il padre Lagrange, ma ricordo l’impressione grande che ricevetti dalla lettura del suoi primi articoli sulla Revue Biblique, lettura che feci all’inizio dei miei studi biblici. Anche in seguito ho tratto molto profitto dai suoi commenti ai vangeli, e, pur non conoscendo i particolari, ho ammirato la sua grande obbedienza nel vivere il suo carisma di esegeta in piena disponibilità a fare quanto gli veniva chiesto.

Ho sempre guardato con gratitudine a questa figura di studioso e di figlio devoto della Chiesa, e sono lieto di sapere che egli era anche un uomo fervente, un uomo la cui preghiera era fuoco.

Ritengo che il padre Lagrange sia come l’iniziatore di tutta la rinascita cattolica degli studi biblici. Il pensare che all’inizio ci sia stato un santo ci conforta nel vivere questi studi con l’attitudine di San Girolamo e degli altri esegeti santi, che hanno cercato nella scrittura il volto di Dio.

Sarò molto lieto nel sapere ulteriori notizie sullo sviluppo della causa e prego fin da ora perché essa serva a far conoscere questo uomo straordinario, questo figlio obbediente della Chiesa, questo umile servitore del Vangelo.

Suo in X.o

Carlo Maria Card. Martini

(La Revue du Rosaire, n° 193, septembre 2007)

[4] [4] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis », n°1. Cf. Évangile selon saint Luc 24, 45.

[5] Cf. Évangile selon saint Luc 24, 48.

[6] Évangile selon saint Jean 1, 18.

[7] Cf. Évangile selon saint Matthieu 13, 19.

[8] Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 24, 26.

[9] Évangile selon saint Jean 15,13.

[10] Évangile selon saint Matthieu 11,28-30.

[11] Épître de saint Paul aux Corinthiens, 13, 5-8.

[12] Cf. Sagesse 2, 24.

[13] Pedro Miguel LAMET, Arrupe, una explosión en la Iglesia, Madrid, ediciones Temas de hoy, 1990. P.158.

[14] Cf. Enzo Bianchi, « Prier la Parole », in Précis de théologie pratique. Deuxième édition augmentée, Bruxelles, Lumen vitae, 2007, p. 379.

[15] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis », n° 2.

[16] J.M. Cabodevilla, Palabras son amores. Límites y horizontes del dialogo humano, Madrid, BAC, 1980, p. 251.

[17] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis », n° 9.

[18] Évangile selon saint Luc 24, 32.

[19] Pape François, « Aperuit illis », n°5. Citation aussi d’Evangelii Gaudium, n° 142.

[20] Commission biblique pontificale. Inspiration et vérité de l’Écriture sainte, Paris, Bayard, Fleurus-Mame. Cerf, 2014, p. 250.

[21] Pape François « Aperuit illis », n° 12.

[22] Pape François, « Aperuit illis », n° 2.

[23] Évangile selon saint Luc 1, 34 : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? », à l’Annonciation ; « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? » (Lc 2, 48), lors du recouvrement de Jésus au Temple de Jérusalem.

[24] Saint Ambroise de Milan, Epistula 49,3 : PL 16, 1204. Cité dans « La Parole du Seigneur. Verbum Domini ». Exhortation apostolique post-synodale du pape Benoît XVI, Paris, 2010, n° 87.

[25] Benoît XVI, Exhortation post-synodale « Verbum Domini », n° 27.

[26] Benoît XVI, Exhortation post-synodale « Verbum Domini », n° 27.

[27] Saint Thomas d’Aquin, Le Credo, Paris, Nouvelles Éditions Latines, 1969, n° 45.

[28] CF. Première épître de saint Jean 1, 2 : « La Vie s’est manifestée ».

[29] Jean-Paul II. Ecclesia in America, n° 67.

[30] Saint Paul. Épître aux Romains 8, 28.

[31] Brigitte Waché, « Marie et les missions dans les congrégations féminines. Essai de typologie. 147. In Marie, première missionnaire. 64e session de la Société française d’études mariales. Paris, Médiaspaul, 2007.

[32] Cf. Évangile selon saint Jean 14, 6.

[33] Cf. Apocalypse 21, 5.




Regards historiques sur la crucifixion de Jésus de Nazareth

         Selon l’affirmation de Rudolf Bultmann, célèbre théologien, exégète et historien allemand du XXe siècle, ce que l’on pourrait estimer de sûr quant à l’existence de Jésus de Nazareth tiendrait en à peine une page. Si, depuis cette conclusion, les recherches ont permis de faire avancer notre connaissance et nos certitudes, il est du devoir de l’historien d’admettre que peu de faits sont saisissables en dehors du prisme de la foi. Devenir spécialiste des origines du christianisme – et notamment de l’historicité de Jésus – est un pari audacieux que l’on ose par passion et conviction. S’il est un point sur lequel nous pouvons être en accord avec Bultmann et qui concilie Histoire et croyance, c’est que la crucifixion de Jésus de Nazareth est à la foi le pilier de l’identité chrétienne mais également l’événement historique le plus assuré concernant la réalité physique de son existence.

         Dans l’optique de la conférence exceptionnelle qui se tiendra le 1er septembre prochain à la Maison Diocésaine de Saint-Denis relative au Suaire de Turin, il a paru important de présenter quelques rappels historiques majeurs sur les circonstances ayant entouré le procès, la condamnation et l’exécution de Jésus de Nazareth. Il n’est pas du ressort de l’historien de traiter de la Résurrection dont la réalité si évidente pour la foi du chrétien ne peut être envisagée sous l’angle de la recherche pragmatique. Il s’agit avant tout de proposer aux participants de cette conférence des clés de compréhension permettant de saisir ce qui y sera abordé.

Un procès en deux temps

           Lorsque Jésus est arrêté au Jardin de Gethsémani, il s’agit de l’initiative des Saducéens (les prêtres du Temple de Jérusalem) dont l’origine se trouve probablement dans ce que l’on appelle communément l’ « Attentat du Temple », à savoir l’expulsion des marchands et changeurs ayant provoqué sans doute une grave crise dans l’économie du sanctuaire. Le rôle de Judas l’Iscariote est difficile à cerner et pourrait faire l’objet d’une analyse à part entière ; il n’est donc pas utile de l’aborder ici. Tout le monde sera d’accord pour reconnaitre la première phase de procès si bien décrite par Jn notamment, celle de la comparution devant Anne et Caïphe. Nous tenons ici le cœur même de cette procédure : Jésus est appréhendé sur décision du Sanhédrin pour un motif ayant trait au judaïsme de son époque. Il ne faut pas oublier que si l’autorité romaine détient seule à cette époque le droit de vie ou de mort, les prêtres ont tout à fait possibilité de statuer sur des motifs religieux en tant qu’assemblée souveraine en ce domaine. Il n’y a rien donc rien d’anormal. Le Talmud présente d’ailleurs ce procès sous l’angle d’une démarche purement doctrinale. La difficulté pour les Saducéens sera de traduire cette condamnation quasi-unanime des autorités sacerdotales en langage juridique familier au Préfet (Ponce Pilate) devant lui-même être en accord avec les impératifs de la Loi de Rome (Mos Maiorum). Celui-ci est le seul habilité à prononcer une condamnation à la peine capitale mais ne peut le faire arbitrairement, au vu du contrôle strict exercé par le pouvoir impérial sur la droiture de ses représentants. Il est important de souligner ici que l’objectif des prêtres est d’obtenir une condamnation à la crucifixion (ce sur qui nous reviendrons plus bas), châtiment très employé par les Romains bien qu’ils ne l’aient pas inventé. Deux options s’offrent alors : soit le Préfet reconnaît l’accusé coupable en vertu de la Loi romaine, soit il accepte d’accorder aux autorités du Temple le droit d’exécution de manière exceptionnelle afin d’éviter tout trouble en cette période agitée de Pâque juive (Pessah). Commence alors la seconde phase du procès, celle se déroulant devant Pilate. Avec un peu d’honnêteté intellectuelle, tout lecteur du Nouveau Testament constatera que le Préfet n’a aucun motif de prononcer une condamnation à la croix concernant Jésus. Historiquement, cela se vérifie aisément car il n’est pas passible de cette mort honnie des citoyens romains dans les textes de la Loi. Pilate ne reconnaît pas en lui un séditieux avéré (seul motif qui aurait pu s’appliquer). A Rome, la crucifixion est le châtiment des esclaves et des grands criminels ; elle n’est pas décidée à la légère et est totalement exclue dans le cadre de la condamnation d’un citoyen romain (Cicéron en sera l’un des meilleurs démonstrateurs en tant qu’avocat). Sous la pression des prêtres, Pilate finira par opter pour la seconde solution : livrer l’accusé en autorisant les gardes du Temple à procéder à l’exécution. Mais pourquoi avoir réclamé à grands cris la croix alors que la peine qui aurait du être appliquée (toujours selon le Talmud) est la lapidation ?

Le châtiment et l’exécution de Jésus : retour sur un événement obscur

           Selon Deutéronome 21, 23, celui qui est pendu sur le bois (comprenons crucifié) est maudit. Cela implique dans le judaïsme du Ier siècle un effacement total de la mémoire du condamné devenu impur aux yeux de l’Eternel. En ce qui concerne Jésus, on aperçoit alors aisément l’utilité d’une telle exécution : l’enseignement dispensé par le maître deviendra caduc. La portée symbolique est d’une importance considérable. Certains ont rétorqué pendant longtemps que la croix était un supplice totalement romain dans ces contrées (Flavius Josèphe racontera son utilisation intensive par le général et futur Empereur Titus lors du siège de Jérusalem en 70 ; on peut également citer les nombreuses mises en croix épisodiques de Zélotes par les soldats ou, bien avant, les 2000 crucifiés par ordre du légat Varus à la mort d’Hérode le Grand). En réalité, il a été clairement démontré que la croix était utilisée par les autorités judéennes (notamment par Emile Puech, professeur à l’Ecole Biblique et Archéologique Française de Jérusalem). En définitive, Pilate n’est responsable que de deux faits : la flagellation (prescrite pour corriger un trublion) et la crucifixion des brigands relevant bel-et-bien de l’autorité impériale cette fois. C’est ce qui expliquera la présence de soldats romains au pied de la croix lorsque Jésus expire. Le Suaire de Turin montre effectivement l’image d’un homme indubitablement crucifié à la manière antique ; s’il s’agit de Jésus de Nazareth, nous sommes probablement en présence d’un témoignage unique de crucifixion judéenne. On peut néanmoins remarquer sur le corps de l’homme les nombreuses marques de flagellation. Extrêmement rigoureux et codifié, ce supplice pouvait effectivement coûter la vie à celui qui y était soumis. Les bourreaux utilisaient un flagrum, fouet à plusieurs lanières de cuir terminées par des éclats de plomb ou d’ossements destinés à déchirer les chairs du malheureux. La perte de sang devait être importante, ce qui explique l’état de faiblesse de Jésus lors du sinistre parcours vers le Golgotha. Pilate ayant concédé aux autorités sacerdotales la permission de mettre à mort l’accusé, Jésus sera placé dans le cortège expédiant deux autres « larrons » à la mort. Il porte alors le patibulum, c’est-à-dire la poutre transversale du gibet et non la croix dans son intégralité (nous le savons par les dires de nombreux auteurs antiques). Sur ce qui se passe au lieu de l’exécution, les évangiles sont extrêmement peu clairs. C’est en 1968 que des archéologues retrouveront auprès de Jérusalem les ossements d’un homme crucifié et établiront le déroulement probable de la mise à mort. Au début du siècle dernier, un médecin bien connu – le Dr Barbet – avait déjà abouti à de solides conclusions, confirmées par la découverte des ossements mais aussi le Suaire. Jésus a certainement été cloué sur le patibulum par les poignets (voire entre les os de l’avant bras) et ensuite hissé sur la poutre verticale (appelée stipes et plantée en permanence sur le lieu des supplices). La section du nerf médian au poignet entraine chez le condamné la rétraction incontrôlable du pouce au cœur de la paume ; ceci explique certainement le fait que l’homme du Suaire ne possède que quatre doigts visibles à chaque main… Ceci n’est qu’un exemple des multiples détails révélés par l’analyse minutieuse de la relique. Les pieds sont ensuite eux-mêmes cloués (le crucifié retrouvé en 1968 avait été fixé par les talons, le clou étant encore fixé dans son calcaneum). Le mort se produit ensuite par lente asphyxie, le crucifié devant se hisser pour respirer et donc s’appuyer sur ses blessures. L’agonie est estimée à une dizaine d’heures en moyenne avant que l’effort intense ne provoque une tétanie complète du corps et une incapacité à reprendre son souffle. Les évangiles relatent une période de six heures avant que Jésus meure ; Mc évoque d’ailleurs un épisode unique, celui de Pilate s’étonnant d’une mort aussi rapide. De nombreuses théories ont été évoquées, toutes défendables : arrêt cardiaque, rupture d’anévrisme, accélération de la mort par le fait d’avoir bu la boisson vinaigrée, apoplexie… On remarque que l’homme du Suaire, de même que Jésus, n’a pas subi le crurifragium ou brisement des jambes bien connu par les sources antiques, destiné à abréger les souffrances en provoquant une asphyxie quasi-instantanée. En revanche, une plaie rappelant une lance plate (lancea) est bien visible au côté gauche. Selon Jn, il en coula du sang et de l’eau ; effectivement, porté dans la région de la plèvre et du péricarde, il a été constaté que la blessure transperce une zone contenant un important œdème très certainement accentué par les efforts fournis par le supplicié. Restent les coulées de sang au front rappelant sans équivoque les épines de la couronne de dérision, détail totalement propre à l’exécution de Jésus. On pourrait également évoquer les ecchymoses, tuméfactions et traumatismes divers. Constatation ultime : l’homme n’a pas été laissé à la merci des oiseaux de proie ou des chacals, sort hélas ordinaire des cadavres abandonnés sur les croix. Deux pièces de monnaie ont été posées sur ses yeux lors de sa probable mise au tombeau, conformément à l’usage du Ier siècle. On est bien entendu tentés de reconnaître ici l’intervention de Joseph d’Arimathie ayant évité au maître de connaître le sort des condamnés anonymes. On peut également y voir l’impératif de la Pâque nécessitant un retrait rapide des corps en vertu de la Loi de Moïse. L’homme a été mis au sépulcre à la manière attestée dans les coutumes judéennes de l’époque. Mais nous entrons à présent dans un mystère qui n’est plus du ressort de l’historien et vit pleinement dans le cœur du croyant : celui du troisième jour.

         Abordé ici de manière succincte – voire lapidaire, l’épisode de la mort de Jésus est aux yeux de l’historien un événement de première importance. Il faut souligner qu’il est le seul datable avec précision (même si cela ne demeure pas sans polémiques). La présentation ici réalisée n’a qu’un objectif : donner au croyant des éléments de réponse et de compréhension, que ce soit pour la conférence qui se tiendra prochainement mais aussi pour sa réflexion de tous les jours. Le Suaire de Turin est un témoignage unique et presque insaisissable du lien existant entre la foi et l’étude des faits. Les deux ne sont pas contradictoires. L’Histoire n’a pas pour vocation de détruire la foi. L’Histoire nourrit la foi. Elle a consolidé la mienne…

Yannick Leroy




« Servir à la suite du Christ Serviteur »

Au début de cette année l’Equipe du Sedifop s’est retrouvée pour un temps de retraite et d’échange pour repartir et repartir encore, dans la foi, à la Suite du Christ Serviteur. Voici le document qui fut donné en cette occasion. Il suffit de cliquer sur le titre ci après pour y accéder…

« Servir à la suite du Christ Serviteur » (2018)




Le Christ accomplit la Loi

Après une rapide introduction à la Bible, nous verrons l’Alliance conclue avec Abraham, puis celle conclue avec Moïse au sommet du Mont Sinaï. C’est là que Dieu lui donnera ces « Dix Paroles » qui constitueront le coeur de la Loi. Nous étudierons alors tout particulièrement quatre d’entre elles, et nous verrons ensuite, avec St Matthieu, comment le commandement de l’amour, enseigné par le Christ, accomplit en fait tous les autres commandements…

Pour des raisons pratiques, ce parcours vous est présenté en format PDF. Chaque fois que le texte hébreu, pour l’Ancien Testament (AT), est cité, il est aussitôt accompagné d’une traduction littérale. Ses nuances sont parfois capitales pour l’interprétation du texte biblique. En effet, lorsque, par exemple, l’une des Dix Paroles déclare à propos des idoles, « tu ne les serviras pas », le temps employé en hébreu suggère comme nuance : « Tu ne te laisseras pas asservir par elles »… Ainsi, « servir une idole », quelqu’elle soit, devient synonyme d’en « devenir l’esclave », et cela, Dieu ne le supporte pas, Lui qui nous a tous créés pour que nous soyons pleinement libres… L’amour en effet ne peut pleinement se vivre que dans l’acquiescement des libertés…

Bonne lecture à vous, et surtout, belle rencontre, de coeur, avec le Christ, dans la foi… car tel est bien le seul but que poursuit finalement toute étude biblique…

                                                                                                                      D. Jacques Fournier

Pour accéder au document, cliquer sur le titre suivant :

Le Christ accomplit la Loi 2017




Une Femme couronnée d’étoiles (Ap 12)

Un signe grandiose apparut au ciel : une Femme ! Le soleil l’enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête ; (2) elle est enceinte et crie dans les douleurs et le travail de l’enfantement. (3) Puis un second signe apparut au ciel : un énorme Dragon rouge-feu, à sept têtes et dix cornes, chaque tête surmontée d’un diadème. (4) Sa queue balaie le tiers des étoiles du ciel et les précipite sur la terre. En arrêt devant la Femme en travail, le Dragon s’apprête à dévorer son enfant aussitôt né. (5) Or la Femme mit au monde un enfant mâle, celui qui doit mener toutes les nations avec un sceptre de fer ; (6) et son enfant fut enlevé jusqu’auprès de Dieu et de son trône, tandis que la Femme s’enfuyait au désert, où Dieu lui a ménagé un refuge pour qu’elle y soit nourrie mille deux cent soixante jours. 

(7)       Alors, il y eut une bataille dans le ciel : Michel et ses Anges combattirent le Dragon. Et le Dragon riposta, avec ses Anges, (8) mais ils eurent le dessous et furent chassés du ciel. (9) On le jeta donc, l’énorme Dragon, l’antique Serpent, le Diable ou le Satan, comme on l’appelle, le séducteur du monde entier, on le jeta sur la terre et ses Anges furent jetés avec lui. (10) Et j’entendis une voix clamer dans le ciel :  Désormais, la victoire, la puissance et la royauté sont acquises à notre Dieu, et la domination à son Christ, puisqu’on a jeté bas l’accusateur de nos frères, celui qui les accusait jour et nuit devant notre Dieu. (11) Mais eux l’ont vaincu par le sang de l’Agneau et par la parole dont ils ont témoigné, car ils ont méprisé leur vie jusqu’à mourir. (12) Soyez donc dans la joie, vous, les cieux et leurs habitants. Malheur à vous, la terre et la mer, car le Diable est descendu chez vous, frémissant de colère et sachant que ses jours sont comptés. 

(13)    Se voyant rejeté sur la terre, le Dragon se lança à la poursuite de la Femme, la mère de l’Enfant mâle. (14) Mais elle reçut les deux ailes du grand aigle pour voler au désert jusqu’au refuge où, loin du Serpent, elle doit être nourrie un temps et des temps et la moitié d’un temps. (15) Le Serpent vomit alors de sa gueule comme un fleuve d’eau derrière la Femme pour l’entraîner dans ses flots. (16) Mais la terre vint au secours de la Femme : ouvrant la bouche, elle engloutit le fleuve vomi par la gueule du Dragon.

(17) Alors, furieux contre la Femme, le Dragon s’en alla guerroyer contre le reste de ses enfants, ceux qui gardent les commandements de Dieu et possèdent le témoignage de Jésus. »

Marie - Musée de Sens 2

Marie, Musée de Sens

            Ce texte est très bien construit, en inclusion, c’est-à-dire avec des éléments qui se répondent en symétrie autour d’un cœur (voir en fin de document). L’auteur donne ainsi la place centrale à ce qui lui semble le plus important. Et que souligne-t-il ici ?     

 La victoire finale de Dieu sur le mal, sur Satan (de l’hébreu « accusateur »), triomphe de l’Amour sur la haine (Ep 2,14-18), de la Miséricorde sur le péché… Tous ceux et celles qui ont accepté de se laisser laver par le sang de l’Agneau pour vivre ensuite en conformité avec la grâce reçue sont les heureux bénéficiaires de ce salut donné par Dieu, et ils sont dans la joie… « Soyez donc dans la joie, cieux, et vous qui les habitez »…

Marie, cachot de Bernadette

Marie, ancien cachot où Ste Bernadette habita avec sa famille…

             « Un signe grandiose apparaît donc au ciel »… « Une Femme, le soleil l’enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête ». Dans le contexte du Nouveau Testament et de la foi au Christ mort et ressuscité pour notre salut, les « douze étoiles » renvoient aux Douze Apôtres, ces colonnes que le Christ a choisies pour construire, avec eux et par eux, son Eglise (cf. Mc 3,13-15 ; Lc 6,12-16 ; Mt 16,18-19 ; Ga 2,7-8 ; Ep 2,19-22). Bien sûr, le choix de Douze Apôtres est un clin d’œil aux Douze tribus d’Israël : avec eux, le Christ accomplit tout ce qui était en préparation avec l’Ancienne Alliance en permettant à la vocation d’Israël d’atteindre son but : que « soient bénies toutes les familles de la terre » (Gn 12,1‑3). Désormais l’Eglise Peuple de Dieu n’a plus de frontières : elle contient en son sein aussi bien des Juifs que des païens. Et elle est ouverte à tous les peuples de la terre, car sa vocation est d’annoncer le salut au monde entier (Mt 28,18-20) pour que l’humanité soit rassemblée dans le Christ, c’est-à-dire dans l’unité de cet Esprit que nous recevons par notre foi au Christ (Ep 1,3-10 ; 4,1-6 ; Jn 11,51-52 ; 17,20-23)… Cette Femme couronnée d’étoiles représente donc tout d’abord l’Eglise, selon une habitude fréquente dans l’Ancien Testament d’évoquer le Peuple de Dieu par une figure féminine. Souvenons-nous par exemple de la jeune femme d’Ezéchiel (Ez 16), de « la Fille de Sion » (So 3,14 ; Za 2,14 ; 9,9 ; Is 1,8 ; 10,32 ; 52,2 ; 62,11…), de l’épouse infidèle du prophète Osée, de « la mère Jérusalem » dans le prophète Baruch (Ba 4,5 – 5,9)…

 « Le soleil l’enveloppe » car elle a accueilli la Lumière du « Père de la Gloire » (Ep 1,17), « le Père des Miséricordes » (2Co 1,3 ; 1P 1,3 ; 2,10), qui, avec son Fils et par son Fils « Lumière du monde » (Jn 8,12) est venu déchirer nos ténèbres (Mc 1,9‑11)… « Tous ont péché et sont privés de la Gloire de Dieu » (Rm 3,23) ?  

   Marie, Eglise Notre Dame de la Salette

Notre Dame de la Salette

« Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande Lumière, sur les habitants du pays de l’ombre, une Lumière a resplendi… Un enfant nous est né, un Fils nous est donné » (Is 9,1-6)… Il est « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29) en lui offrant le pardon de Dieu. Grâce à lui, nous pouvons retrouver tout ce dont nous étions privés par suite de nos fautes : « Je leur ai donné la Gloire que tu m’as donnée » (Jn 17,22)… Alors, si « jadis, vous étiez ténèbres, maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur » (Ep 5,8) pour avoir accueilli « la lumière de la Vie » (Jn 8,12) grâce au Don de « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63). Le projet de ce Dieu « drapé de lumière comme d’un manteau », (Ps 104(103),2) s’est accompli : il a revêtu son épouse « de vêtements de salut, il l’a drapée dans un manteau de justice » ; alors « les nations verront sa justice et tous les rois sa Gloire », car désormais, « le soleil l’enveloppe ». « Dans la main de son Dieu, elle est une couronne de splendeur » (Is 59,10-62,5 ; 60,1-7), car elle reçoit le Don de ce Dieu « Soleil » qui « donne la grâce, qui donne la Gloire » (Ps 84(83),12).

Marie Grand Ilet la Réunion

Marie, devant l’Eglise de Grand Ilet, cirque de Salazie, Ile de la Réunion

            « La lune est sous ses pieds »… L’astre de la nuit est sous ses pieds, en signe de victoire sur le monde des ténèbres (cf. Jn 6,16-21). En effet, avec le Christ, « la Lumière a brillé dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas saisie » (Jn 1,5). Et cela s’accomplit dès maintenant, car dès aujourd’hui, dans la foi, « les ténèbres s’en vont et la véritable lumière brille déjà » (1Jn 2,8). Mais, nous le verrons par la suite, tout ceci se réalise au cœur d’un combat quotidien où il s’agit de recevoir et de recevoir encore par la prière cette Lumière de l’Esprit qui, seule, peut venir à bout de toutes « les Principautés, les Puissances, les Régisseurs de ce monde de ténèbres » (Ep 6,10-20 ; 1Th 5,4-10)… « La nuit est avancée. Le jour est arrivé. Laissons là les œuvres de ténèbres et revêtons les armes de lumière » (Rm 13,12)… Alors, « réveille-toi, ô toi qui dors, relève-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera » (Ep 5,14), le soleil t’enveloppera…

Marie Forêt de Bélouve la Réunion

Grotte de Notre Dame de Lourdes, forêt de Bélouve, Île de la Réunion

            « Elle est enceinte »… L’Eglise est « enceinte »… En effet, rappelle St Jacques, « le Père de toutes les lumières a voulu nous enfanter par une parole de vérité pour que nous soyons comme les prémices de ses créatures » (Jac 1,17-18). Cette Parole de Vérité nous a été transmise par Jésus, le Fils unique et éternel de Dieu (Jn 12,49-50 ; 8,26 ; 17,8), « la Parole faite chair »(Jn 1,14). Et « à tous ceux qui l’ont accueilli, il a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, eux qui ne furent engendrés ni du sang, ni d’un vouloir de chair, ni d’un vouloir d’homme, mais de Dieu » (Jn 1,12-13). Par notre « oui » de foi à la Parole, et donc au Christ Ressuscité, nous sommes invités petit à petit à naître et à renaître « d’en haut », de « l’Esprit » (Jn 3,1-8) pour devenir « une créature nouvelle » (2Co 5,17) dans le Christ. Tout commence bien sûr au jour de notre baptême (Tt 3,4-7), mais nous avons à nourrir ensuite cette créature nouvelle par les sacrements, la prière et la lecture de la Parole de Dieu. En effet, l’Esprit Saint se joint toujours à la Parole car « celui que Dieu a envoyé prononce les Paroles de Dieu, et avec elles, il donne l’Esprit sans mesure » (Jn 3,34). Accueillir la Parole, c’est donc accueillir l’Esprit Saint qui se joint à elle et lui rend témoignage (Jn 15,26) en communiquant à celui ou celle qui la lit cette Vie nouvelle qu’elle ne cesse d’évoquer. Dieu rend ainsi témoignage à son Fils par l’action de l’Esprit qui donne la Vie à quiconque accueille avec foi la Parole du Fils (1Jn 5,5-12 ; Ga 5,25). « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle » (Jn 6,47).

Marie Basilique du Rosaire Lourdes

Marie Reine, mosaïque de la Basilique du Rosaire, Lourdes

Dieu le Père, avec son Fils et par son Fils, est donc venu nous enfanter à sa vie par sa Parole qui se propose à notre liberté, et l’action souveraine de l’Esprit Saint. Et maintenant, la Mission du Fils se poursuit avec l’Eglise qui est son « Corps » (1Co 12,12-13.27). Lui, il en est comme « la Tête » (Ep 1,22-23) et il lui a demandé d’aller dans le monde entier pour transmettre ce qu’elle avait elle-même reçu. Il lui a alors promis d’être avec elle tous les jours, jusqu’à la fin du monde, et d’agir avec elle par la Puissance de son Esprit pour que sa Parole puisse être accueillie (Mt 28,18-20 ; Mc 16,20 ; 1Co 2,1-5 ; Rm 15,15-19). qui a reçu la charge de transmettre la Parole de Dieu au monde (Mt 28,18-20). L’Esprit qui se joignait à la Parole du Christ pour lui rendre témoignage et communiquer ainsi par elle la vie éternelle (Jn 6,63) se joint donc toujours à la même Parole proclamée aujourd’hui par l’Eglise pour accomplir la même œuvre : communiquer la vie (2Co 3,4-6), enfanter un monde nouveau… C’est ainsi que l’Eglise est « Mère »… « Mes petits enfants », écrit St Paul dans sa Lettre aux Galates, « vous que j’enfante à nouveau dans la douleur jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous » (Ga 4,19)… En effet, nous sommes tous appelés à devenir des fils et des filles de Dieu à « l’image et ressemblance » de Jésus, le Fils Unique et éternel, qui reçoit sa vie du Père de toute éternité : « Il est Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu » (Crédo). « Comme le Père a la vie en lui‑même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui‑même » (Jn 5,26). Et un peu plus loin, Jésus dit : « Je vis par le Père » (Jn 6,57). Nous sommes donc tous invités à recevoir par notre foi au Fils ce que le Fils reçoit de son Père de toute éternité : « De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me reçoit vivra par moi » (Jn 6,57). Alors, sauvés par le Fils, les croyants reçoivent du Fils de « pouvoir devenir », petit à petit, de grâce en grâce, de miséricorde en miséricorde, des fils comme le Fils, « à l’image du Fils » : « Nous savons qu’avec ceux qui l’aiment, Dieu collabore en tout pour leur bien, avec ceux qu’il a appelés selon son dessein. Car ceux que d’avance il a discernés, il les a aussi prédestinés à reproduire l’image de son Fils, afin qu’il soit l’aîné d’une multitude de frères ; et ceux qu’il a prédestinés, il les a aussi appelés; ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés; ceux qu’il a justifiés, il les a aussi glorifiés » (Rm 8,29‑30 ; 2Co 3,17-18). Alors, « le soleil enveloppe » la communauté de ceux et celles qui, par la Parole du Fils, ont accueilli « la lumière de la Vie » (Jn 8,12)…

Marie Chapelle de Bélouve Réunion

Marie, chapelle de la forêt de Bélouve, île de la Réunion

            Ainsi l’Eglise, par les sacrements et « le lait non frelaté de la Parole » (1P 2,2), enfante-t-elle des fils, vivants de la vie du Fils et appelés à être au ciel « Lumière » et « Gloire » comme le Fils… Et tout ceci se réalise très concrètement par le « oui » de notre foi à « la Parole de Vérité, la Bonne Nouvelle de notre salut ». Par ce « oui » renouvelé chaque jour, à tout instant, dans une prière qui devrait être continuelle (Ep 6,18), le chrétien accueille la grâce de l’Esprit reçu au jour de son baptême : « C’est en lui que vous aussi, après avoir entendu la Parole de vérité, l’Évangile de votre salut, et y avoir cru, vous avez été marqués d’un sceau par l’Esprit de la Promesse, cet Esprit Saint qui constitue les arrhes de notre héritage, et prépare la rédemption du Peuple que Dieu s’est acquis, pour la louange de sa gloire » (Ep 1,13-14). En effet, « le Christ a tant aimé l’Église qu’il s’est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d’eau qu’une parole accompagne (le baptême) ; car il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante » (« enveloppée de soleil »), « sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et immaculée » (Ep 5,25-27).

Marie fleurs Réunion

Ainsi, l’Eglise est notre Mère à tous car l’Esprit Saint, jour après jour, vient sur elle. La Puissance du Très Haut la prend sous son ombre ; c’est pourquoi les êtres saints car sanctifiés qui naissent d’elle sont appelés fils de Dieu (cf. Lc 1,35 ; 1Th 5,23-24)…

            Et nous constatons à quel point il est impossible de parler de l’Eglise sans parler de Marie, de penser à l’Eglise sans penser à Marie… En effet, si l’Eglise grâce à l’action de l’Esprit Saint est la Mère des fils et des filles de Dieu, Marie, grâce à l’action du même Esprit Saint est la Mère du Fils Unique et éternel de Dieu. Et dans l’ordre chronologique, c’est elle qui vient en premier.  « Comblée de Grâce » (Lc 1,28) pour accomplir sa vocation unique, « l’Immaculée Conception », la « Bénie entre toutes les femmes » (Lc 1,42) a mis au monde ce Fils qui allait appeler toute l’humanité à devenir comme lui, des fils et des filles de Dieu… Et comblée à son tour de grâce (Ep 1,6), sanctifiée par l’eau du baptême, appelée elle aussi à être « sainte et immaculée dans l’Amour », « bénie par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ »(Ep 1,3-10), l’Eglise recevra elle aussi la vocation de devenir la Mère d’une humanité nouvelle de fils et de fille de Dieu… Nous voyons bien que si « la Femme couronnée d’étoiles » du Livre de l’Apocalypse évoque le Mystère de l’Eglise, il est impossible de ne pas penser en même temps à Marie…

P1000709

Marie, Basilique de Vézelay

            Marie enfantant le Fils par l’Esprit est en effet l’image parfaite de l’Eglise enfantant des fils et des filles de Dieu par le même Esprit. Et Marie collabore toujours activement à cette Mission de l’Eglise, qui est tout en même temps celle de son Fils, car elle a reçu de lui, au pied de la Croix, la vocation d’être la Mère de tous les fils et les filles de Dieu… « Près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Clopas, et Marie de Magdala. Jésus donc voyant sa mère et, se tenant près d’elle, le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Dès cette heure-là, le disciple l’accueillit chez lui » (Jn 19,25-27). Et St Jean, dans son Evangile, prend bien soin de ne pas nommer « le disciple bien-aimé », car il représente tous les disciples de Jésus, et donc l’Eglise tout entière… Marie, Mère du Fils par l’Esprit, est ainsi la Mère de tous ceux et celles qui, par leur foi au Fils et l’action du même Esprit, deviennent à leur tour des fils et des filles de Dieu à « l’image du Fils » unique et éternel de Dieu (Rm 8,29)… Le Père Paul Boiteau, ancien curé de Cilaos et supérieur du Petit Séminaire, écrivait ainsi : « Nous sommes les collaborateurs de la Très Sainte Vierge Marie pour la formation de Jésus Christ dans les âmes »…

Marie Lourdes

 « La Femme mit donc au monde un enfant mâle, celui qui doit mener toutes les nations avec un sceptre de fer[1] ; et son enfant fut enlevé jusqu’auprès de Dieu et de son trône » (Ap 12,5). Au regard des deux interprétations complémentaires que nous venons de voir, « la Femme – Eglise », « la Femme – Marie », ce verset peut se comprendre de deux façons. Si nous pensons à Marie, et donc à son Fils Jésus, le texte nous renvoie au jour de son Ascension (Lc 24,50‑53 ; Ph 2,6-11 ; Ep 1,17-23 ; Ac 7,55–56 ; Rm 8,34).

Mais si nous pensons à « la Femme – Eglise », celui qui a dit « oui » au Christ par sa foi a été uni, au jour de son baptême, au Mystère de sa mort au péché et à celui de sa vie à Dieu. Dès lors, « considérez que vous êtes morts au péché et vivants à Dieu dans le Christ Jésus » (Rm 6,1-11). Dans la foi et l’attente de la résurrection de la chair au dernier Jour, le chrétien est donc déjà ressuscité en tant qu’il participe dès aujourd’hui à la victoire du Christ sur la mort par le don de l’Esprit Saint. Grâce à lui, il a été arraché aux ténèbres et placé dans un état de communion avec ce Dieu qui est Lumière (1Jn 1,5). A lui maintenant de rester fidèle, jour après jour, à cette grâce reçue, pour grandir dans la vie des enfants de Dieu…  « Vous remercierez le Père qui vous a mis en mesure de partager le sort des saints dans la lumière. Il nous a en effet arrachés à l’empire des ténèbres et transférés dans le Royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption, la rémission des péchés » (Col 1,12‑14). Oui,

[1] Et nous retrouvons avec ce « sceptre de fer » une citation du Ps 2 déjà employé lors du baptême de Jésus par Jean-Baptiste dans les eaux du Jourdain (cf. Lc 3,21-22). Mais Jésus, qui reçoit en cet instant « un baptême de repentir en vue de la rémission des péchés » (Lc 3,3) est descendu dans l’eau pour nous donner l’exemple, pour nous montrer le chemin à suivre (Jn 14,6) … En effet, il est « l’Agneau sans reproche et sans tâche » (1P 1,19), « le Saint, le Juste » (Ac 3,14), « il n’a jamais commis de faute » (1P 2,22 ; Jn 8,46). Il n’avait donc pas besoin de se repentir. Jean-Baptiste le savait bien (Mt 3,13-15). Mais Jésus dans les eaux du Jourdain nous représente tous, plongés dans les eaux du baptême pour que naisse de l’Esprit une création nouvelle de fils et de filles de Dieu vivants de la vie du Fils (2Co 5,17 ; Tt 3,4-7). Et d’ailleurs, ce Psaume 2 qui concerne avant tout le Fils est aussi appliqué aux disciples du Christ en Ap 2,26-28 : « Le vainqueur, celui qui restera fidèle à mon service jusqu’à la fin, je lui donnerai pouvoir sur les nations : c’est avec un sceptre de fer qu’il les mènera comme on fracasse des vases d’argile ! Ainsi moi-même j’ai reçu ce pouvoir de mon Père. Et je lui donnerai l’Étoile du matin ». Nous retrouvons, par cette citation commune appliquée au Christ et aux chrétiens, à quel point nous sommes tous appelés à devenir comme le Fils, à son image, vivants de sa vie, partageant son Mystère de communion avec le Père dans l’unité d’un même Esprit…

Marie Nevers Ste Bernadette
Marie Nevers Ste Bernadette

Marie; statue devant laquelle Ste Bernadette aimait prier à Nevers, dans le jardin de sa communauté.

« Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés! –, avec lui Il nous a ressuscités et fait asseoir aux cieux, dans le Christ Jésus » (Ep 2,4-6). « Du moment donc que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les choses d’en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu. Songez aux choses d’en haut, non à celles de la terre. Car vous êtes morts, et votre vie est désormais cachée avec le Christ en Dieu : quand le Christ sera manifesté, lui qui est votre vie, alors vous aussi vous serez manifestés avec lui pleins de gloire » (Col 3,1-4), « enveloppés de soleil »… Cette « vie cachée avec le Christ en Dieu » est communion dans l’unité d’un même Esprit (Ep 4,1-6) avec le Christ « Lumière du monde » (Jn 8,12), cette Lumière qui, seule, peut briller dans les ténèbres et remporter la victoire sur elle (Jn 1,4-5)… Avec elle « le Prince de ce monde est jeté dehors » (Jn 12,31), hors de nos cœurs. Et la prière du Christ s’accomplit : « Père, je ne te demande pas de les enlever du monde, mais de les garder du mauvais » (Jn 17,15)… Ainsi, le chrétien qui vit dans le monde, est-il déjà par sa foi « enlevé jusqu’auprès de Dieu et de son trône » (Ap 12,5) dans la mesure où il vit déjà, au plus profond de son être, un Mystère de Communion avec Dieu dans le silence, la paix et le repos de l’Esprit (Hb 4,3 ; Mt 11,28). Tel est « le Royaume des Cieux » qui est « arrivé jusqu’à nous » par le Don de « l’Esprit de Dieu » (Mt 12,28)…

Notre Dame de France Puy en VelayNotre Dame de France Le Puy en Velay

Marie, Notre Dame de France, Puy en Velay

Tel est « le désert » où nous sommes tous invités à trouver déjà « quelque chose » du vrai bonheur en vivant déjà de la vie de Dieu accueillie par la foi : et « la Femme s’enfuit au désert où Dieu lui a ménagé un refuge pour qu’elle y soit nourrie mille deux cent soixante jours » (Ap 12,6). Et la Bible de Jérusalem précise en note : le désert est le « refuge traditionnel des persécutés dans l’Ancien Testament (cf. Ex 2,15 ; 1R 19,3s ; 1M 2,29-30). L’Eglise doit fuir loin du monde et se nourrir de la vie divine (cf. Ex 16 ; 1R 17,4-6 ; 19,5-8 ; Mt 4,3-4 ; 14,13-21) ». Sa communion avec Dieu sera alors son refuge, sa forteresse, sa force (Ps 16(15),1 ; 18(17),3 ; 32(31),7 ; 46(45),2 ; 59(58),17 ; 64(63),11 ; 73(72),28 ; 90(89),1 ; 91(90),2 ; 94(93),22 ; 144(143),2). St Jean y revient un peu plus loin lorsqu’il écrit que « la Femme reçut les deux ailes du grand aigle[1] pour voler au désert jusqu’au refuge où, loin du Serpent, elle doit être nourrie un temps et des temps et la moitié d’un temps » (Ap 12,14). « Les deux ailes » nous font bien sûr penser à « l’Esprit Saint » (Mt 3,16 ; Mc 1,10 ; Lc 3,22 ; Jn 1,32) avec lequel et par lequel le Christ Ressuscité vient à nous et nous prend avec lui pour nous emmener dans la Maison du Père, ce Mystère de Communion qu’il vit avec son Père. « Que votre cœur cesse de se troubler ! Croyez en Dieu, croyez aussi en moi. Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures ; sinon, je vous l’aurais dit ; je vais vous préparer une place. Et quand je serai allé et que je vous aurai préparé une place, à nouveau je viendrai et je vous prendrai près de moi, afin que, là où je suis, vous aussi, vous soyez » (Jn 14,1‑3).

Marie Notre Dame de France Puy en Velay Marie Notre Dame de France Puy en Velay

Marie, Notre Dame de France, Puy en Velay

Et cela durera « un temps et des temps et la moitié d’un temps » (Ap 12,14), « mille deux cent soixante jours » (Ap 12,6), c’est-à-dire « trois ans et demi »… Cette moitié du chiffre sept, symbole de perfection, « est devenu depuis le Livre de Daniel (Dn 7,25) la durée type de toute persécution », de toute souffrance (cf. Lc 4,25 ; Jc 5,17). « Ici, il s’agit immédiatement de la persécution de Rome, la Bête d’Ap 13 ; 17,10-14 » (Note de la Bible de Jérusalem en Ap 11,2). Ainsi, même si cette période d’épreuve peut sembler longue pour celui qui la subit, tôt ou tard elle s’arrêtera, car Dieu qui est présent  à l’Histoire lutte contre toute injustice avec tous les hommes de bonne volonté…

L’adversaire est ici représenté avec l’image « d’un énorme Dragon rouge feu, à sept têtes et dix cornes, chaque tête surmontée d’un diadème. Sa queue balaie le tiers des étoiles du ciel et les précipite sur la terre. En arrêt devant la Femme en travail, le Dragon s’apprête à dévorer son enfant aussitôt né » (Ap 12,3-4). Ce Dragon est « l’antique Serpent, le Diable (diviseur, en grec) ou le Satan (accusateur, en hébreu), comme on l’appelle, le séducteur du monde entier » (Ap 12,9), « le Prince de ce monde » (Jn 12,31) qui contribue à attiser la haine chez ceux qui se tournent vers le mal…

[1] Allusion au Livre de l’Exode où Dieu délivra Israël des persécutions et des souffrances que leur infligeaient à l’époque les Egyptiens : « Vous avez vu vous-mêmes ce que j’ai fait aux Égyptiens, et comment je vous ai emportés sur des ailes d’aigles et amenés vers moi » (Ex 19,4-5 ; voir aussi Dt 32,11 ; Is 40,11 ; 46,4 ; 63,9). Et ce que Dieu fit autrefois avec les Egyptiens, il le refera bientôt avec les Romains…

Marie Notre Dame de la Salette

Marie, église de Notre Dame de la Salette

Avec le Christ, « il avait mis au cœur de Judas Iscariote le dessein de le livrer », et ce dernier avait accueilli ce mauvais désir et décidé de le mettre en pratique. Et lorsqu’il sortit pour livrer Jésus, « il faisait nuit », c’était l’heure des ténèbres (Jn 13,2.30)… Ainsi, le démon agit concrètement dans notre monde par tous ceux et celles qui disent « Oui ! » au mal, aux mauvaises pensées, aux convoitises de toutes sortes, à la haine, à la volonté de dominer etc… Dans le Livre de l’Apocalypse, il agit par les Romains qui persécutent les chrétiens… St Jean y fait allusion lorsqu’il décrit cet « énorme Dragon rouge feu » avec « sept têtes », un chiffre qui renvoie aux sept collines de Rome… Mais l’empire romain sera ensuite clairement désigné par l’image de la Bête au chapitre suivant…

            Le Diable s’attaque donc à « ceux qui gardent le commandement de Dieu (cf. Jn 15,12.17) et possèdent le témoignage de Jésus », l’Esprit Saint qui rend témoignage à Jésus en leur cœur (Jn 15,26) et leur donne la force nécessaire pour continuer à rendre témoignage à Jésus, envers et contre tout (Jn 15,27 avec Ac 1,8 ; 4,31). Mais toutes ces souffrances endurées pour l’Evangile sont autant d’occasions à vivre cet Evangile et à plonger au cœur de la Bonne Nouvelle… Et quelle est-elle ? Evoquons-là avec cette phrase de Paul Claudel : « Dieu n’est pas venu supprimer la souffrance ; il est venu la remplir de sa Présence », une Présence qui est Joie, Paix, Bonheur Profond, un Bonheur que nul « méchant » ne peut atteindre… « Heureux les affligés, ils seront consolés… Heureux êtes-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi. Soyez dans la joie et l’allégresse » (Mt 5,5.11-12).

Marie Eglise de Ste Praxède Rome

Marie, église Ste Praxède, Rome.

            St Paul écrivait de son côté aux chrétiens de Thessalonique : « Vous avez accueilli la Parole parmi bien des souffrances, avec la joie de l’Esprit Saint » (1Th 1,6). La promesse de Jésus s’accomplissait : « Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups ; montrez-vous donc prudents comme les serpents et candides comme les colombes. Méfiez-vous des hommes : ils vous livreront aux sanhédrins et vous flagelleront dans leurs synagogues ; vous serez traduits devant des gouverneurs et des rois, à cause de moi, pour rendre témoignage en face d’eux et des païens. Mais, lorsqu’on vous livrera, ne cherchez pas avec inquiétude comment parler ou que dire : ce que vous aurez à dire vous sera donné sur le moment, car ce n’est pas vous qui parlerez, mais l’Esprit de votre Père qui parlera en vous » (Mt 10,16-20). Et « le fruit de l’Esprit est charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi » (Ga 5,22-23). En effet, écrivait St Paul à Timothée, « ce n’est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un Esprit de force, d’amour et de maîtrise de soi. Ne rougis donc pas du témoignage à rendre à notre Seigneur, ni de moi son prisonnier, mais souffre plutôt avec moi pour l’Évangile, soutenu par la force de Dieu » (2Tm 1,7-8).

   Marie, basilique de Vézelay

Marie Vézelay

            Ainsi, Dieu promet la Présence toute particulière de son Esprit Saint au cœur des épreuves endurées pour l’Evangile (Mt 10,24-25 ; Jn 15,18-21 ; 1Th 2,2 ; cf. Ac 9,16 ; 1Co 4,9-13 ; 2Co 1,5 ; 4,8-12 ; 6,4-10 ; 11,23-33 ; Ph 3,10-11 ; Col 1,24). Et la Présence de cet Esprit est toujours synonyme de joie, de consolation, de paix et donc de bonheur… La voilà la Bonne Nouvelle, déjà présente au cœur de notre monde, avec toutes ses souffrances, ses détresses, ses épreuves, dans l’attente et l’espérance de la Jérusalem d’en haut où « il n’y aura plus de pleurs, plus de peines, plus de cris, car l’ancien monde s’en sera allé » (Ap 21,1-4 ; 7,13-17).

Au début de sa seconde Lettre aux Corinthiens, St Paul parle de cette Bonne Nouvelle, la Présence de Dieu par son Esprit au cœur de toutes nos souffrances : « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console dans toute notre tribulation, afin que, par la consolation que nous-mêmes recevons de Dieu, nous puissions consoler les autres en quelque tribulation que ce soit. De même en effet que les souffrances du Christ abondent pour nous, ainsi, par le Christ, abonde aussi notre consolation » (2Co 1,3-5). Et la Bible de Jérusalem écrit en note : « La consolation est annoncée par les prophètes comme caractéristique de l’ère messianique. Elle consiste essentiellement dans la fin de l’épreuve et dans le début d’une ère de paix et de joie. Mais, dans le Nouveau Testament, le monde nouveau est présent au sein du monde ancien et le chrétien uni au Christ est consolé au sein même de sa souffrance (2 Co 1,4-7 ; 7 4 ; cf. Col 1,24) ». Dans cette Lettre, « Paul insiste constamment sur la présence de réalités antagonistes, voire contradictoires, dans le Christ, l’apôtre et le chrétien : souffrance et consolation (2Co 1,3-7 ; 7,4), mort et vie (4,10-12 ; 6,9), pauvreté et richesse (6,10 ; 8,9), faiblesse et force (12,9‑10). C’est le mystère pascal, la présence du Christ ressuscité au milieu du monde ancien de péché et de mort ». Et telle est la Bonne Nouvelle…

      Marie, église de Citeaux

Marie Notre Dame de Citeaux

            Au milieu de toutes les difficultés de cette vie, le chrétien n’est donc pas seul. Le Père (Mt 6,6) et le Fils sont avec lui (Mt 28,20) par l’Esprit Saint (Jn 14,15-17 ; 16,7), artisan de toute Communion. La Paix, la Force, la Lumière et la Joie que le Fils reçoit de son Père par l’Esprit sont maintenant communiquées aux croyants par ce même Esprit… « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite… Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jn 15,10 ; 14,27) disait Jésus. Et rien ni personne ne peut empêcher l’Esprit d’être là, présent et agissant au cœur de celui ou celle qui le reçoit dans la prière… Avec lui et par lui, Dieu règne avec puissance et donne la victoire : « Désormais, la victoire, la puissance et la royauté sont acquises à notre Dieu » (Ap 12,10)… Avec lui et par lui, « la domination est acquise au Christ puisqu’on a jeté bas l’accusateur de nos frères, celui qui les accusait jour et nuit devant notre Dieu » (Ap 12,10)… « Satan », en effet, veut dire « accusateur »… Il est le Séducteur qui, si l’on consent à ses tentations, nous fait tomber, puis ensuite nous accuse, nous condamne, nous désespère… « Dieu, lui, ne juge personne » (Jn 5,22) et ne condamne jamais (Jn 8,11 ; 3,16-18). Il sait que celui qui tombe se fait mal et qu’il souffre… Aussi le regarde-t-il avec amour et compassion. Et il va même avec son Fils jusqu’à prendre sur lui sa souffrance pour le soutenir, le soulager, le délivrer (Mt 8,17 ; 11,28-30 ; Is 52,13-53,12). Son seul désir est de nous sauver, de nous relever, de nous pardonner, de nous délivrer pour que nous puissions retrouver avec lui la vie, la paix et la joie que nous avions perdues par suite de nos fautes… Si nous consentons à sa Miséricorde, nous serons dans la joie (Ap 12,12) et notre joie fera sa joie (So 3,14-20).

                                                                                                             D. Jacques Fournier




« Dieu n’est qu’Amour » (P. François Varillon)

St Jean l’affirme par deux fois : « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16)…

« Dieu n’est qu’Amour », écrit de son côté le P. François Varillon. « Tout est dans le « NE QUE ». Dieu est-il Tout-Puissant ? Non, Dieu n’est qu’Amour, ne venez pas me dire qu’il est Tout-Puissant. Dieu est-il, Infini ? Non, Dieu n’est qu’Amour, ne me parlez pas d’autre chose. Dieu est-il Sage ? Non. A toutes les questions que vous me poserez, je vous dirai : non et non, Dieu n’est qu’amour.

Dire que Dieu est Tout-Puissant, c’est poser comme toile de fond une puissance qui peut s’exercer par la domination, par la destruction. Il y a des êtres qui sont puissants pour détruire… Beaucoup de chrétiens posent la toute-puissance comme fond de tableau puis ajoutent, après coup : Dieu est Amour, Dieu nous aime. C’est faux ! La toute-puissance de Dieu est la toute puissance de l’amour, c’est l’amour qui est tout puissant !

On dit parfois : Dieu peut tout ! Non, Dieu ne peut pas tout, Dieu ne peut que ce que peut l’Amour. Car il n’est qu’Amour. Et toutes les fois que nous sortons de la sphère de l’amour nous nous trompons sur Dieu et nous sommes en train de fabriquer je ne sais quel Jupiter.

Dieu Père (Giovanni Battista Cima) 2

J’espère que vous saisissez la différence fondamentale qu’il y a entre un tout-puissant qui vous aimerait et un amour tout-puissant. Un amour tout-puissant, non seulement n’est pas capable de détruire quoi que ce soit mais il est capable d’aller jusqu’à la mort. J’aime un certain nombre de personnes, mais mon amour n’est pas tout-puissant, je sais très bien que je ne suis pas capable de tout donner pour ceux que j’aime, c’est-à-dire de mourir pour eux.

En Dieu, il n’y pas d’autre puissance que la puissance de l’amour et Jésus nous dit (c’est lui qui nous révèle qui est Dieu) : « Il n’y pas de plus grand amour que de mourir pour ceux qu’on aime » (Jn 15,13). Il nous révèle la toute-puissance de l’amour en consentant à mourir pour nous. Lorsque Jésus a été saisi par les soldats, ligoté, garrotté au Jardin des Oliviers, il nous dit lui-même qu’il aurait pu faire appel à des légions d’anges pour l’arracher aux mains des soldats. Il s’est bien gardé de le faire car il nous aurait alors révélé un faux Dieu, il nous aurait révélé un tout-puissant au lieu de nous révéler le vrai Dieu, celui qui va jusqu’à mourir pour ceux qu’il aime. La mort du Christ nous révèle ce qu’est la toute-puissance de Dieu. Ce n’est pas une puissance d’écrasement, de domination, ce n’est pas une puissance arbitraire telle que nous dirions : qu’est ce qu’il mijote là-Haut, dans son éternité ? Non, il n’est qu’amour mais cet amour est tout-puissant.

Je réintègre les attributs de Dieu (toute-puissance, sagesse, beauté…) mais ce sont les attributs de l’amour. D’où la formule que je vous propose : « L’amour n’est pas un attribut de Dieu parmi ses autres attributs mais les attributs de Dieu sont les attributs de l’amour. » L’Amour est : Tout-Puissant, Sage, Beau, Infini…

Qu’est ce qu’un amour qui est tout puissant ? C’est un amour qui va jusqu’au bout de l’amour. La toute-puissance de l’amour est la mort : aller jusqu’au bout de l’amour c’est mourir pour ceux qu’on aime. Et c’est aussi leur pardonner. S’il y en a parmi vous qui on l’expérience si douloureuse de la brouille à l’intérieur d’une famille ou d’un cercle d’amis, vous savez à quel point il est difficile de pardonner vraiment. Il faut que l’amour soit rudement puissant pour pardonner, ce qui s’appelle réellement pardonner. Il faut de la puissance d’aimer !

Qu’est ce qu’un amour qui est infini ? C’est un amour qui n’a pas de limites. Moi, je me heurte à des limites dans mon humain, dans mes amitiés humaines. L’Infini de Dieu n’est pas un infini dans l’espace, un océan sans fond et sans rivage, c’est un amour qui n’a pas de limites ! »

P. François Varillon

Extrait de « Joie de croire, joie de vivre » (Bayard Culture)

dieu-nest-quamour-francois-varillon : en cliquant sur le titre précédent, vous accédez au fichier PDF de cet article pour lecture ou éventuelle impression.




Prière à Marie de Saint Bernard de Clairvaux

Vierge marie et l'enfantÔ toi, qui que tu sois,

qui te sais vacillant sur les flots de ce monde

parmi les bourrasques et les tempêtes,

plutôt que faisant route sur la terre ferme,

ne détourne pas les yeux de l’éclat de cet astre

si tu ne veux pas te noyer durant les bourrasques.

 

Si surgissent en toi les vents des tentations,

si tu navigues parmi les écueils des épreuves

regarde l’étoile, appelle Marie.Marie, Basilique de Vézelay

Si tu es ballotté sur les vagues de l’insolence et de l’ambition,

du dénigrement ou de la jalousie,

regarde l’étoile, appelle Marie.

Si la colère, l’avarice ou les désirs de la chair

secouent l’esquif de ton âme,

regarde vers Marie.

 

Si, troublé par la démesure de tes crimes,

confus par l’infection de ta conscience,

terrifié par l’horreur du jugement,

tu commences à sombrer dans le gouffre de la tristesse, l’abîme du désespoir,

pense à Marie.

 

Dans les dangers, les angoisses, les incertitudes,

pense à Marie, appelle Marie.

Qu’elle ne s’éloigne pas de ton cœur.

Marie Grand Ilet la Réunion

Et pour être sûr d’obtenir le suffrage de ses prières,

ne néglige pas l’exemple de sa vie.

En la suivant, tu ne t’égares pas ;

en la priant tu ne désespères pas ;

elle te tient, tu ne t’écroules pas ;

elle te protège, tu ne crains pas ;

elle te guide, tu ne te lasses pas ;

elle te favorise, tu aboutis.

 

Ainsi par ta propre expérience tu sais à quel point se justifie la parole :

“Et le nom de la Vierge était Marie”.

 

 

 

 




L’Immaculée Conception de Marie et son Assomption

Nous vous proposons ici de voir quels sont les fondements bibliques du Dogme de l’Immaculée Conception : un mot, employé par St Luc lors de l’épisode de l’Annonciation où l’Ange nomme Marie la « Comblée-de-grâce ». Grammaire grecque en main, nous verrons jusqu’où ce terme nous emmène… Et nous conclurons par l’Assomption de Marie, conséquence directe et immédiate de son Immaculée Conception.

Pour des raisons pratiques, notamment vis-à-vis des caractères grecs employés, nous vous invitons à cliquer sur le titre ci-dessous pour accéder au document PDF :

L’Immaculée Conception de Marie et son Assomption