1

Les ancêtres des douze tribus du peuple d’Israël

ancetre-sisrael

 Télécharger le document en .PDF




La composition littéraire du Pentateuque : l’hypothèse des sources

Tout d’abord, l’expression « le pentateuque » désigne les cinq premiers livres de la bible (grec πέντε (α) – cinq – τευχη – « instruments », d’où étuis pour rouleaux de papyrus, et finalement « livres »).

            Dès que l’on ouvre le livre de la Genèse, des problèmes se posent:

                      j Double récit de la création de l’homme: Gn 1-2,4a et Gn 2,4b-7 (création de l’h…) + 2,18-24 (complète avec celle de la femme.)

                         j Gn 4,26: Adam a eu un fils: Seth et l’humanité commence à invoquer le nom de Yahvé. Mais en 5,1, on reprend brusquement l’histoire d’Adam à zéro, la naissance de Seth revient en 5,3, le nom de Yahvé disparaît jusqu’en 5,29.

                        j Gn 7,7: le déluge commence et Noé entre dans l’arche avec ses fils et les animaux, mais le récit s’arrête au v.10 pour faire place à un autre récit, où est mentionné à nouveau le début du déluge et le texte continue par l’entrée de Noé et de ses fils dans l’arche (v.13) comme si rien n’avait été dit… Remarquons aussi cette contradiction, qui provient de cette superposition de deux récits différents: Noé doit faire entrer dans l’arche tantôt un couple d’animaux de chaque espèce (sans distinction entre espèces pures et espèces impures, Gn 6,19), tantôt un couple d’animaux impurs et sept couples d’animaux purs (Gn 7,2) : ces deux façons de compter sont incompatibles…

                        j Gn20: ce chapitre commence par: « Abraham partit de là… » alors que les versets précédents ne parlent même pas d’Abraham…

                        j Dieu est parfois appelé Yahvé, parfois Elohim: ainsi le 1° récit de la création parle d’Elohim, et le second de Yahvé-Elohim, puis de Yahvé seulement… d’où l’habitude de distinguer des textes yahvistes et des textes élohistes.

                        j La montagne du désert où Dieu se révèle tout en étant identifiée au Sinaïe (Ex 3,12), est appelée « Horeb » dans le Dt et en Ex 3,1; 17,6; 33,6, et Sinaï dans bien d’autres passages…

                        j Ex 2,18: le beau-père de Moïse s’appelle Réuel et… Jethro en 3,1; 18,1…

                        j Enfin,toute une série de textes emploie un vocabulaire très spécifique en rapport avec les rites de la liturgie juive, d’où le nom de textes sacerdotaux donné à cette série, caractérisé par un style précis et sec.

                        j Le Deutéronome a aussi son vocabulaire particulier: « faire ce qui est bien aux yeux de Yahvé », « garder les commandements »… Certains y ont vu la trace d’une rédaction indépendante des autres textes et l’ont appelé D.

                        j Enfin, Moïse était considéré comme étant l’auteur unique des cinq livres, mais comment a-t-il pu être inspiré au point de décrire sa propre mort (Dt 34,5-12)? A.B. Karlstadt (1486-1541) fut le 1° à démontrer que cela est impossible.

            Résumons-nous: quatre familles de textes ont été différenciées:

                        1) Yahviste (de « Yahvé ») ou Jahviste, d’où le sigle J qu’on lui donne.

                        2) Elohiste (de « Elohim »): E.

                        3) Famille d’origine « sacerdotale » : P comme « prêtres ».

                        4) Famille « deutéronomiste », principale responsable de la rédaction du Dt: sigle D.

            Telle est l’hypothèse documentaire rendue fameuse par les travaux de Julius Wellhausen (1876-78) : 4 récits (ou documents) continus, rédigés à des époques différentes par des milieux différents ont été par la suite juxtaposés, imbriqués:

                                                                       

                                                                                  ß                  —                                     

                                                                       

                                               ——————

Deux autres modèles furent développés pour expliquer la naissance du Pentateuque:

                        A – L’hypothèse des fragments: des récits épars, des textes isolés ont été rassemblés pour former un seul récit (défendue aujourd’hui par R. Rendtorff, 1977, et C. Houtman, 1980).

                        B – L’hypothèse des compléments: un texte de base aurait été augmenté par des ajouts successifs (S. Tengström, 1976 et H.C. Schmitt, 1980).

            Reprenons donc la première hypothèse « documentaire », la plus suivie (cf notes BJ ; Henri Cazelles, Introduction critique à l’AT, Paris 1973) avec J. Wellhausen:

Epoque monarchique

vers 950 av. JC

J1,2,3 E1,2,3

(J et E auraient connu 3 rédactions successives)

vers 750 av. JC

JERéforme religieuse de Josias,

roi de Juda.

vers 620 av. JC

D         vers 550 av. JC

JED                    Q (P) + Textes législatifs         vers 500 av. JC

JEDQ (P)

 La composition littéraire du Pentateuque




Le regard parfois imparfait de l’Ancien Testament sur les réactions de Dieu face au mal

Un jour, « en passant, Jésus vit un homme aveugle de naissance. Ses disciples lui demandèrent : « Rabbi (Maître), qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? » Jésus répondit : « Ni lui, ni ses parents » » (Jean 9,1-3)

Beaucoup pensaient donc qu’il existe un lien direct entre péché et maladie. Cette conception s’enracine dans les temps les plus anciens. Déjà, les peuples voisins d’Israël, croyaient en ce que l’on appelle souvent « Le Principe de Rétribution selon les actes ». Cette croyance était totalement païenne, au sens où les dieux n’intervenaient pas. Elle est très certainement née de l’expérience, mais la vision du monde qu’elle transmet est non seulement simpliste, mais encore erronée. Selon cette conception, lorsque quelqu’un commet le mal, il déclenche une puissance malfaisante qui, tôt ou tard, retombera sur lui et sur son entourage.

et de ce fait libère une puissance malfaisante

k                                                                             l

qui déclenche toutes sortes

commet le mal                                               de conséquences mauvaises

sur lui et sur son entourage

j                 m

Un homme

Israël va accueillir cette croyance et l’intégrer dans sa foi encore toute jeune. Lors de la sortie d’Egypte, racontée dans le Livre de l’Exode, ils ont vu le Seigneur à l’œuvre avec une grande Puissance, et ils en ont déduit que cette Puissance ne pouvait qu’être celle du Dieu Créateur, ce Dieu Tout Puissant qui a fait surgir l’univers du néant. Et ils se faisaient une idée si grande de cette Toute Puissance de Dieu qu’ils pensaient que rien ne pouvait lui échapper, pas même le mal (Amos 3,6 ; Lamentations 3,38)… Ces conséquences mauvaises qui, soi disant, retombent sur le pécheur ne pouvaient donc venir que de Dieu. « Le Principe de Rétribution selon les actes » a donc conduit Israël à s’imaginer que Dieu était un Juge qui, du haut du ciel, récompensait les justes et punissait ceux qui font le mal :

       1Rois 8,32 (cf Ezéchiel 7,3 et 22,31) : « Toi, écoute au ciel et agis ; juge entre tes serviteurs : déclare coupable le méchant en faisant retomber sa conduite sur sa tête,

et justifie l’innocent en lui rendant selon sa justice ».

 

L’ensemble peut se représenter par le schéma suivant :

                                             Dieu, du haut du ciel, voit et juge…

k                                                                                … et châtie.

                                          et de ce fait libère une puissance malfaisante                  l

(conception païenne)

toutes sortes de conséquences

commet le mal                                               mauvaises frappent le pécheur

et son entourage

j              m

Un homme

Disons le tout de suite : même appliquée à Dieu, cette conception est fausse.

Déjà, dans l’Ancien Testament, beaucoup réagirent en trouvant injuste que Dieu fasse retomber sur la tête des enfants la conduite de leurs parents (Exode 20,5 ; 2Samuel 24,10-17). Aussi, certains prophètes commencèrent à annoncer que seuls ceux qui ont commis une faute recevront le châtiment qui lui correspond (Jérémie 31,29-30 ; Ezéchiel 18,1-3 et 18,20). C’était déjà mieux, mais les croyances ont la vie dure : la question des disciples de Jésus cinq siècles plus tard le prouve ! Le Christ balaiera d’une phrase une telle conception de Dieu. Non, Dieu n’est pas un juge qui punit et nous fait du mal parce que nous-mêmes avons mal agi. Certes, il fait la vérité, mais cette vérité est inséparable chez Lui de son Amour et de son infinie Miséricorde. Lorsque Dieu veut nous faire prendre conscience de notre péché, il nous révèle toujours en même temps son amour (Isaïe 1,2-4 ; 1,15-18). Petit à petit, il nous montre ce qui ne va pas dans notre vie pour que nous puissions aller à lui sans peur et lui offrir toutes nos misères. Voilà ce qu’Il attend. Et il enlèvera bien vite tout ce qui nous empêche d’être pleinement en relation avec lui et avec nos frères (Psaume 103(102),11-12), il nous purifiera et il nous rétablira par le don de son Esprit ((Ezéchiel 36,25-28) dans cette communion avec Lui que nous n’aurions jamais dû quitter !

Quoiqu’il en soit, une telle conception de Dieu a conduit les auteurs de l’Ancien Testament à nous le décrire souvent de façon contradictoire : « Il blesse, puis il panse la plaie ; il meurtrit, puis il guérit de sa main » (Job 5,18) ; « C’est moi qui fais mourir et qui fait vivre ; quand j’ai frappé, c’est moi qui guéris » (Deutéronome 32,39). Et nous lisons peut-être le pire dans ce même livre du Deutéronome : « Autant Yahvé avait pris plaisir à vous rendre heureux et à vous multiplier, autant il prendra plaisir à vous perdre et à vous détruire » (28,63). Non ! Dieu n’est pas ainsi ! Il n’est qu’Amour et Bonté (1Jean 4,8 ; 4,16 ; Tite 3,4-7), un Amour pleinement manifesté en Jésus-Christ (1Jean 3,16 ; Jean 15,13 ; 15,9 ; Actes 10,37-38 ; Romains 8,35-39). Jamais Il ne juge au sens de condamner (Jean 3,16-17 ; 8,11). Son seul désir est que nous connaissions le plus possible la Vie en plénitude (Jean 10,10), le vrai Bonheur (Deutéronome 5,27-33 ; 6,18 ; 6,24), la vraie Paix (Jean 14,27) et la vraie Joie qui est communion à sa Joie (Jean 15,11)…

D. Jacques Fournier

Intreprétation du mal AT

 




Les grandes dates de l’Histoire d’Israël

1850 Av JC: Abraham, originaire d’Ur en basse Mésopotamie

                                             |

Joseph, son père Jacob et ses frères en Egypte

                                             |

1250 av JC: sous le Pharaon Ramsès II, l’Exode avec Moïse.

La Loi donnée au sommet du Mont Sinaï

                                             |

1200 av JC: Josué pénètre en Palestine (Terre de Canaan)

                                             |

1200 à 1025: les Juges

Confédération des douze tribus d’Israël, chacune étant dirigée par un « Juge ».

A partir de 1040 av JC, le prophète Samuel.

                                             |

1030-1010 av JC, Saül, premier roi d’Israël, consacré par Samuel.

                                            |

1010-970 av JC: le roi David. Il fait de Jérusalem la capitale de son grand Royaume.

                                            |

970-931 av JC: Salomon, fils de David,

grand constructeur (Temple de Jérusalem) et administrateur.

                                            |

931: mort de Salomon, assemblée de Sichem; Israël se divise en deux royaumes:

                     ___________|_____________________

                     |                                                                |

Royaume d’Israël (Nord)                           Royaume de Juda (Sud)

                     |                                                                |

931-910 av JC: Jéroboam I                                             931-913 av JC: Roboam, fils de Salomon.

                     |                                                                |

………………….                                           ………………….

                     |                                                                |

885-874 av JC: Omri, fonde la capitale Samarie.  ………………

                     |                                                                |

874-853 av JC: Achab; le prophète Elie.           ………………….

                     |                                                                |

853-852 av JC: Ochozias                                   ………………….

                     |                                                                |

852-841 av JC: Joram; le prophète Elisée       ………………….

                     |                                                                |

………………….                                            …………………

                     |                                                                |

783-743 av JC: Jéroboam II ;

les prophètes Amos puis Osée                         ………………….

                     |                                                                |

………………….                       781-740 av JC: Ozias; 740: vocation d’Isaïe.

                     |                                                                |

………………….                    740-736 av JC: Yotam. Débuts de Michée.

                     |                                                                |

………………….                 736-716 av JC: Achaz; prophétie d’Isaïe sur « l’Emmanuel ».

                     |                                                                |

732-724 av JC: Osée,

dernier roi du Royaume du Nord                      ………………….

 

721 av JC: prise de Samarie par l’Assyrien Sargon II.   

Fin du Royaume du Nord. Déportation massive en Assyrie.

(Suite des grandes dates de l’Histoire d’Israël)  Royaume de Juda (Sud)

                                                                                    |

716-687 av JC: Ezéchias

En 701 av JC Sennachérib lui prend 46 villes et impose un tribut.

                                                                                    |

………………….

                                                                                    |

640-609 av JC: le roi Josias

Vers 630, le prophète Sophonie

627: vocation du prophète Jérémie

622: Réforme religieuse sur la base d’un texte de Loi découvert dans le Temple de Jérusalem.

                                                                                    |

………………….

                                                                                    |

598-597 av JC: Joïaqim règne trois mois.

Nabuchodonosor, roi de Babylone assiège et prend Jérusalem.

Première déportation à Babylone (10.000 personnes).

                                                                                    |

597-587 av JC: Sédécias.

Le prophète Ezéchiel prédit la ruine de Jérusalem.

Vers 589, révolte de Sédécias malgré les avis de Jérémie.

                                                 587 av JC: Nabuchodonosor prend Jérusalem.

                                                   Destruction du Temple. Seconde déportation.

                                                              Fin du Royaume de Juda.

Jérémie est entraîné en Egypte.

Ministère d’Ezéchiel auprès des déportés.

Vers 550 av JC: Is 40-55 (le livre de la consolation).

 

Le 29 Octobre 539, le roi perse Cyrus entre en triomphateur à Babylone.

538 av JC: édit de Cyrus; retour des exilés à Jérusalem.

            515: Dédicace du second Temple de Jérusalem. Reprise de la vie religieuse.

445 av JC: Néhémie relève les murailles de Jérusalem.

 

336 av JC: Alexandre le Grand, roi de Macédoine, bat les Perses à Issos en 333.

332 av JC: Alexandre le Grand occupe la Palestine.

Déportation en Egypte dans sa nouvelle ville d’Alexandrie.

Diffusion de la culture grecque dans tout le bassin méditerranéen.

323 av JC: décès à 33 ans d’Alexandre aux confins de l’Inde.

Ses généraux se partagent l’empire:   les Séleucides en Syrie Babylonie,

les Lagides en Egypte.

La Judée est soumise aux Lagides jusques vers 200 av JC.

Vers 250 av JC, commencement de la traduction des Ecritures juives

                                               en grec, à Alexandrie (la Septante).

             200-142 av JC: la Judée est soumise aux Séleucides. Révolte maccabéenne (167-142).

63 av JC: prise de Jérusalem par Pompée;

                                   la palestine devient province romaine.

 40-4 av JC: Hérode le Grand, roi des Juifs.

Vers l’an 5 av JC, naissance de Jésus…

 

Les grandes dates -Histoire d’Israël PDF pour éventuelle impression




Pour lire un texte d’Evangile…

Se munir si possible d’une Bible complète avec notes : Bible de Jérusalem ou TOB.

    1- Commencer toujours par un temps de prière

La Parole de Dieu est un texte qui ressemble à tous les autres textes, et pourtant, il est différent. Nos journaux nous transmettent des informations ; les romans nous entraînent dans une histoire et nous font rêver… Ici, il ne s’agit pas d’un homme qui s’adresse à d’autres hommes par l’intermédiaire de l’écriture, mais de Dieu qui, par sa Parole, vient à notre rencontre: « Dans les Saints Livres, le Père qui est aux cieux vient avec tendresse au devant de ses fils et entre en conversation avec eux » (Concile Vatican II, Dei Verbum &21).

            « Je me tiens à la porte et je frappe : si tu m’ouvres ton cœur, je ferai chez toi ma demeure« ... Dieu parle au cœur : pour l’écouter, il nous faut d’abord nous recueillir par un moment de silence où nous allons laisser de côté (temporairement) tous nos soucis. Et tout de suite, nous allons nous confier à l’Esprit Saint : c’est Lui le maître intérieur. Qu’il fasse régner dans nos cœurs son silence et sa paix pour nous permettre ensuite de mieux accueillir, toujours avec son aide, la Parole de Dieu. Nous vivrons toute cette aventure avec Lui et grâce à Lui : qu’il nous garde fidèles !

Pour prier, nous pouvons commencer par lire un texte où il est fait mention de l’Esprit Saint, en demandant que cette Parole s’accomplisse pour nous, en cet instant que nous consacrons à Dieu (Exemples : Luc 11,9-13 ; Jean 14,15-20 ; 14,23-26 ; 16,12‑15 ; Ephésiens 3,14-21). On peut ensuite prier un « Notre Père » et un « Je vous salue Marie ».

2- Bien lire et relire le texte choisi.

Prendre son temps, dans la gratuité. Bien faire attention au texte lui-même. Le lire et le relire, tout simplement.

Puis noter ce qui a pu nous sembler le plus important, le plus beau, le point à garder et à conserver précieusement comme lumière pour ma vie.

Dès cette première étape, il est important de ne jamais se décourager : un jour, tel texte peut être feu dans nos cœurs. Tel autre jour, tout peut nous sembler lourd et pesant, aride et bien peu engageant. En cet instant précis, Dieu nous attend : qu’allons-nous faire ? Abandonner la lecture, ou persévérer avec Lui, creuser et creuser encore jusqu’à ce que l’eau jaillisse ? Lire la Parole de Dieu est déjà le lieu où cette Parole de Jésus nous est adressée : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive« . Mais n’oublions pas aussi que ce que nous lisons est « Bonne Nouvelle » : « Heureux vos yeux parce qu’ils voient, et vos oreilles parce ce qu’elles entendent », disait Jésus à ses disciples; « Amen, je vous le dis: beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu » (Mc 8,34 ; Mt 13,16-17).

3 – Pour continuer à creuser…

Après ce premier contact, essentiel, voici quelques points pour nous aider à poursuivre notre travail « d’attention » :

  1. a) Le contexte : Repérer, dans une Bible complète, où se situe notre texte (Les têtes de paragraphe, rédigées par nos traducteurs, et les notes sont ici très précieuses). Faire attention à ce qui précède. Essayer de bien repérer sa place dans la dynamique générale de l’œuvre où il se trouve.

Cette démarche est très importante pour une bonne interprétation. Noter toutes les informations recueillies.

  1. b) Mettre en lumière le mouvement interne du texte :

j Repérer les personnages, les indications de temps, de lieu…

j Faire attention aux répétitions, et éventuellement à la place de ces mots dans notre passage. Parfois, tout tourne autour d’un centre qu’il s’agit de repérer, car tel est alors le cœur du texte.

j Observer les différents acteurs : qui sont-ils ? Que font–ils ? Que disent-ils ?

j Qu’est-ce qui change entre le début et la fin? Quelle est la signification de ces changements ? Que nous révèlent ces changements sur les personnes concernées, sur celui qui les opère ? Essayer de repérer quel est l’enjeu…

  1. c) Les citations ou les allusions à l’Ancien Testament (AT) :

 j Elles sont écrites en caractères gras ou en italiques pour nous aider à les repérer. Les Bibles complètes indiquent leurs références en marge ou dans les notes (Parfois, l’auteur fait seulement allusion à l’AT sans le citer : les références sont aussi indiquées en marge).

j Retrouver dans l’AT lui-même les textes cités ; repérer les paragraphes d’où ils sont extraits. Les lire. Essayer de retrouver le contexte dans lequel ce texte a été écrit, puis observer les personnages : qui sont-ils, que disent-ils, que font‑ils ? Noter toutes ces informations, puis se reporter à l’Evangile où notre citation est peut-être appliquée à d’autres personnages. Noter ces glissements. Que nous apprennent les informations recueillies dans l’AT sur l’identité et la mission de nos personnages du NT ?

L’Ancien Testament annonce le Christ : sa lecture est essentielle pour mieux comprendre Celui qui accomplit toutes ces Ecritures…

  1. d) Signification et enjeux

j Essayer de bien définir « le message central » de notre texte.

j Ces lignes ont été écrites par des croyants qui désiraient nous partager leur foi, nous faire grandir dans notre foi, nous introduire dans le mystère du Christ.

– Tout d’abord, ce passage d’Evangile, a-t-il été vraiment pour moi « une Bonne Nouvelle » ?

– Que m’a-t-il appris sur Dieu et sur le Christ ?

– M’a-t-il aidé vis à vis de ma relation à Dieu et au Christ ? M’a-t-il permis de mieux appréhender l’amour que Dieu porte sur le monde? De mieux pressentir toutes les grâces qu’Il désire nous donner?

– « Jésus Christ est le même hier et aujourd’hui comme il le sera à jamais » (Hb 13,8). Ce texte a-t-il contribué à rendre ma foi plus vivante, à mettre davantage le Christ ressuscité au cœur de ma vie, à espérer toujours plus en Lui ? M’a-t-il invité à changer pour mieux accueillir cette Présence bienveillante et toujours offerte ? Prier davantage? Consacrer plus de temps à Dieu ? Ne pas manquer l’Eucharistie du Dimanche ? S’ouvrir plus souvent à la guérison intérieure offerte dans le sacrement de réconciliation ?

– M’a-t-il interpellé aussi sur la qualité de ma relation avec ma famille, mes proches, les voisins de mon quartier, mes frères croyants, ma communauté paroissiale ? M’a-t-il aidé à mieux vivre le commandement de l’amour, à mieux m’engager dans l’Eglise pour annoncer la Bonne Nouvelle du Christ ?

Jacques Fournier




Allocution de Jean Paul II sur l’interprétation de la Bible dans l’Eglise 23 Avril 1993

Elle fut prononcée à l’occasion du centenaire de l’encyclique Providentissimus Deus (PD) et du cinquantenaire de Divino afflante Spiritu (DAS).

Rappels :

– En 1902 Léon XIII crée la commission biblique.

– En 1909 Pie X fonde l’Institut Biblique.

– En 1920 Benoît XV célèbre le 1500° anniversaire de la mort de St Jérôme par une encyclique sur l’interprétation de la Bible.

– Importance de Dei Verbum (DV) lors du Concile Vatican II.

PD a voulu protéger l’interprétation catholique de la Bible contre les attaques de la science rationaliste, à une époque marquée par de virulentes polémiques contre la foi de l’Église. Au lieu de jeter l’anathème sur l’utilisation des sciences dans l’interprétation de la Bible, l’encyclique invite instamment les exégètes catholiques à acquérir une véritable compétence scientifique de façon à surpasser leurs adversaires sur leur propre terrain

« Le premier moyen de défense se trouve dans l’étude des langues anciennes de l’Orient ainsi que dans l’exercice de la critique scientifique ».

DAS a réagi face aux attaques qui s’opposent à l’utilisation de la science par les exégètes et qui veulent imposer une interprétation non scientifique, dite « spirituelle », des Saintes Ecritures. Elle a constaté la fécondité des directives données par PD:

« Grâce à une meilleure connaissance des langues bibliques et de tout ce qui concerne l’Orient,… un bon nombre des questions soulevées au temps de Léon XIII contre l’authenticité, l’antiquité, l’intégrité et la valeur historique des Saints Livres… se trouvent aujourd’hui débrouillées et résolues. »

(5) D’autre part, Pie XII

– a souligné la portée « théologique » du sens littéral, méthodiquement défini

– et a affirmé que le sens spirituel, pour pouvoir être reconnu comme sens d’un texte biblique, doit présenter des garanties d’authenticité: on doit pouvoir montrer qu’il s’agit d’un sens « voulu par Dieu Lui-même ». La détermination du sens spirituel appartient donc, elle aussi, au domaine de la science exégétique.

Ainsi DAS et PD refusent la rupture entre l’humain et le divin, entre la recherche scientifique et le regard de foi, entre le sens littéral et le sens spirituel, demeurant ainsi pleinement en harmonie avec le mystère de l’Incarnation.

(6) « De même que la Parole substantielle de Dieu s’est faite semblable aux hommes en tous points, excepté le péché, ainsi les Paroles de Dieu, exprimées en des langues humaines, se sont faites semblables au langage humain en tous points, excepté l’erreur » (DAS 559; cf Dei Verb.13).

Les écrits inspirés de la Première Alliance tout comme ceux de la Nouvelle constituent un moyen vérifiable de communication et de communion entre le Peuple croyant et Dieu, Père, Fils et Saint Esprit. Ce moyen ne peut assurément pas être séparé du fleuve de vie spirituelle qui jaillit du coeur de Jésus crucifié et qui se propage grâce aux sacrements de l’Eglise. Il a néanmoins sa consistance propre, celle précisément d’un texte écrit qui fait foi.

(7) Ainsi, les exégètes catholiques doivent rester en pleine harmonie avec le mystère de l’Incarnation. L’Eglise prend au sérieux son réalisme et c’est pour cette raison qu’elle attache une grande importance à l’étude historico-critique.

(8) DAS a particulièrement recommandé l’étude des genres littéraires, mue par le souci de comprendre le sens des textes avec toute l’exactitude et la précision possible, dans leur contexte culturel historique. Certains chrétiens pensent que Dieu étant l’Etre absolu, chacune de ses paroles a une valeur absolue, indépendamment de tous les conditionnements du langage humain. Il n’y a donc pas lieu selon eux d’étudier ces conditionnements pour opérer des distinctions qui relativiseraient la portée de ces paroles.

Mais Dieu, créateur de l’étonnante variété des êtres, loin d’écraser toutes leurs différences et leurs nuances, les respecte et les valorise. Lorsqu’il s’exprime dans un langage humain, il ne donne pas à chaque expression une valeur uniforme, mais il en utilise les nuances possibles avec une souplesse extrême et il en accepte également les limitations. C’est ce qui rend la tâche des exégètes si complexe, si nécessaire et si passionnante! Aucun des aspects humains du langage ne peut être négligé.

Cependant cette étude ne suffit pas. Loin de s’en tenir aux aspects humains du texte biblique, il faut aussi et surtout aider le peuple chrétien à percevoir plus nettement dans ces textes la parole de Dieu, de façon à mieux l’accueillir, pour vivre pleinement en communion avec Dieu. A cette fin, il est évidemment nécessaire que l’exégète lui-même perçoive dans les textes la parole divine et cela ne lui est possible que si son travail intellectuel est soutenu par un élan de vie spirituelle.

Faute de ce soutien, la recherche exégétique perd de vue sa finalité principale en se confinant dans des tâches secondaires; elle peut alors faire oublier que la Parole de Dieu invite chacun à sortir de lui-même pour vivre dans la foi et la charité.

« Les Livres saints ne peuvent être assimilés aux écrits ordinaires, mais, puisqu’ils ont été dictés par l’Esprit Saint lui-même et ont un contenu d’extrême gravité, mystérieux et difficile sous bien des aspects, nous avons toujours besoin, pour les comprendre et les expliquer, de la venue de ce même Esprit Saint, c’est à dire de sa lumière et de sa grâce, qu’il faut assurément demander dans une humble prière et conserver par une vie sanctifiée » (DAS 89).

Oui, pour arriver à une interprétation pleinement valable des paroles inspirées par l’Esprit Saint, il faut être soi-même guidé par l’Esprit Saint et, pour cela, il faut prier, prier beaucoup, demander dans la prière la lumière intérieure de l’Esprit et accueillir docilement cette lumière, demander l’amour, qui seul rend capable de comprendre le langage de Dieu, qui « est amour » (1 Jn 4, 8.16). Durant le travail même d’interprétation, il faut se maintenir le plus possible en présence de Dieu.

(10) La docilité à l’Esprit Saint produit et renforce une autre disposition, nécessaire pour la juste orientation de l’exégèse: la fidélité à l’Eglise. Ces textes n’ont pas, en effet, été donnés aux chercheurs individuels, « pour la satisfaction de leur curiosité ou pour leur fournir des sujets d’étude et de recherche » (DAS 566), mais à la communauté des croyants, à l’Eglise du Christ, pour nourrir la foi et guider la vie de charité. Le respect de cette finalité conditionne la validité de l’interprétation.

« Tout ce qui concerne la manière d’interpréter l’Ecriture est finalement soumis au jugement de l’Eglise, qui exerce le ministère et le mandat divinement reçus de garder la Parole de Dieu et de l’interpréter » (DV 12); il n’en reste pas moins vrai qu’il « appartient aux exégètes de s’efforcer … de pénétrer et d’exposer plus profondément le sens de la Sainte Ecriture, afin que, par leurs études en quelque sorte préparatoires, mûrisse le jugement de l’Eglise » (PD; DV 12).

(11) Les exégètes auront à coeur de rester proches de la prédication de la Parole de Dieu, pour éviter de se perdre dans les méandres d’une recherche scientifique abstraite, qui les éloignerait du vrai sens des Ecritures, un sens inséparable de leur finalité qui est de mettre les croyants en relation personnelle avec Dieu.

(13) Le document actuel, L’interprétation de la Bible dans l’Eglise, frappe par:

– son ouverture d’esprit: en commençant par la base historico-critique, dégagée de présupposés philosophiques ou autres contraires à la vérité de notre foi, elle met à profit toutes les méthodes actuelles, en cherchant dans chacune « la semence du Verbe ».

– son équilibre et sa modération; diachronie et synchronie se complètent de façon indispensable.

L’exégèse catholique s’efforce de mettre en lumières et les aspects humains de la révélation biblique et ses aspects divins, unis dans la divine « condescendance » (DV 13).

– Enfin, la Parole biblique agissante s’adresse universellement dans le temps et dans l’espace à toute l’humanité. Si la tâche première de l’exégèse est d’atteindre le sens authentique du texte sacré ou même ses différents sens, il faut ensuite qu’elle communique ce sens au destinataire de l’Ecriture Sainte qui est, si possible, toute personne humaine.

Un processus constant d’actualisation s’efforcera aussi de retraduire la pensée biblique dans le langage contemporain.

Tous les moyens possibles doivent être utilisés pour que la portée universelle du message biblique soit largement reconnue et que son efficacité salvifique puisse se manifester partout.




Les trois sens de l’Ecriture inspirée D’après « L’interprétation de la Bible dans l’Eglise », Commission Biblique Pontificale (Rome 1993).

Quelques notes préliminaires :

S Pour être fidèle à l’intentionnalité des textes bibliques il faut essayer de retrouver, au cœur de leur formulation, la réalité de foi qu’ils expriment et de relier cette réalité de foi à l’expérience croyante de notre monde.

S La connaissance juste du texte biblique n’est accessible qu’à celui qui a une affinité vécue avec ce dont parle le texte.

S La personne de Jésus Christ et les évènements de salut accomplis dans notre histoire constituent l’objet central de toute interprétation. Une authentique interprétation de l’Ecriture est donc d’abord accueil d’un sens donné dans des évènements et de façon suprême, dans la personne de Jésus Christ.

SSS L’herméneutique biblique (Du grec « expliquer » : l’herméneutique est la science qui définit les principes de la critique et de l’interprétation des textes), si elle est du ressort de l’herméneutique générale de tout texte littéraire et historique, est en même temps un cas unique de cette herméneutique. Ses caractéristiques spécifiques lui viennent de son objet. Les évènements de salut et leur accomplissement en la personne de Jésus Christ donnent sens à toute l’histoire humaine. Les interprétations historiques nouvelles ne pourront être que le dévoilement ou le déploiement de ces richesses de sens. Le récit biblique de ces évènements ne peut être pleinement compris par la seule raison. Des présupposés particuliers commandent son interprétation, tels la foi vécue en communauté ecclésiale et la lumière de l’Esprit. Avec la croissance de la vie dans l’Esprit grandit, chez le lecteur, la compréhension des réalités dont parle le texte biblique.

 

1 – Le sens littéral

Il est indispensable de chercher à définir le sens précis des textes tels qu’ils ont été produits par leurs auteurs, sens qu’on appelle « littéral », à ne pas confondre avec le sens « littéraliste » (ex. : dans le cas d’une image : « ayez la ceinture aux reins » veut dire « Ayez une attitude de disponibilité », et non pas « portez autour des reins une ceinture ».).

Ce sens littéral, fruit de l’inspiration, est aussi voulu par Dieu comme auteur principal de la Bible. On le discerne grâce à une analyse précise du texte, situé dans son contexte littéraire et historique.

Le sens littéral d’un texte est en général unique, mais un auteur humain peut se référer en même temps à plusieurs niveaux de réalité. D’autre part, même lorsqu’une expression humaine semble n’avoir qu’une seule signification, l’inspiration divine peut guider cette expression de telle sorte que l’on puisse la comprendre de deux façons différentes (ex.: Jn 11,50 exprime à la fois un calcul politique immoral et une révélation divine).

Il faut aussi être attentif à l’aspect dynamique de beaucoup de textes. Le sens des psaumes royaux par exemple ne doit pas être limité étroitement aux circonstances historiques de leur production. En parlant du roi, le psalmiste évoquait à la fois une institution réelle et une vision idéale de la royauté, conforme au dessein de Dieu ; le texte dépassait ainsi l’institution royale telle qu’elle s’était manifestée dans l’histoire. L’exégèse historico-critique ne doit donc pas s’arrêter exclusivement aux circonstances historiques d’un texte, mais elle doit aussi préciser la direction de pensée du texte.

Le sens littéral d’un texte est aussi, dès le début, ouvert à des développements ultérieurs qui se produisent grâce à des relectures en des contextes nouveaux. Mais il faut rejeter fermement toute interprétation qui ne s’accorderait pas avec le sens exprimé par l’auteur, interprétation « hétérogène » qui ouvrirait alors la porte à un subjectivisme incontrôlable (Attitude de celui qui ne tient compte que de ses sentiments, de ses opinions, de ses idées et qui refuse, méprise ou ignore le sens réel et objectif du texte).

 

                        2 – Le sens spirituel

 

« Hétérogène » ne doit pourtant pas être pris en un sens étroit contraire à toute possibilité d’accomplissement supérieur. L’évènement pascal, mort et résurrection de Jésus, a mis en place un contexte historique radicalement nouveau, qui éclaire de façon nouvelle les textes anciens et leur fait subir une mutation de sens.

Ex. : Hyperbole: Dieu affermira pour toujours le trône d’un fils de David (2 S 7,12-13; 1 Ch 17,11-14); « pour toujours » doit désormais être pris à la lettre, en un « sens spirituel », car « le Christ étant ressuscité des morts ne meurt plus » (Rm 6,9).

Le sens spirituel, compris selon la foi chrétienne, est le sens exprimé par les textes bibliques, lorsqu’on les lit sous l’influence de l’Esprit Saint dans le contexte du mystère pascal du Christ et de la vie nouvelle qui en résulte.

Ce contexte existe effectivement. Le NT y reconnaît l’accomplissement des Ecritures. Il est donc normal de relire les Ecritures à la lumière de ce nouveau contexte qui est celui de la vie dans l’Esprit.

Il n’y a pas nécessairement de distinction entre « sens littéral » et « sens spirituel ». Tel est le cas habituel dans le NT, lorsqu’un texte se rapporte directement au mystère pascal du Christ ou à la vie nouvelle qui en résulte. Il s’ensuit que c’est à propos de l’AT que l’on parle le plus souvent de « sens spirituel ». Mais déjà, dans l’AT, les textes ont en bien des cas comme sens littéral un sens religieux et spirituel. La foi chrétienne y reconnaît un rapport anticipé avec la vie nouvelle apportée par le Christ.

Lorsqu’il y a distinction entre « sens littéral » et « sens spirituel », le sens spirituel ne peut jamais être privé de rapports avec le sens littéral, autrement, sans rapport de continuité et de conformité, on ne pourrait parler d’accomplissement ; mais il faut aussi qu’il y ait passage à un niveau supérieur de réalité.

Trois niveaux de réalités sont mis en rapport : le texte biblique, le mystère pascal et les circonstances présentes de vie dans l’Esprit.

Persuadée que le mystère du Christ donne la clé d’interprétation de toutes les Ecritures, l’exégèse ancienne (notamment Origène) s’est efforcée de trouver un sens spirituel à ses moindres détails ; l’exégèse moderne ne peut accorder une vraie valeur d’interprétation à ce genre de tentatives.

                      3 – Le sens plénier

On définit le sens plénier comme un sens plus profond du texte, voulu par Dieu, mais non clairement exprimé par l’auteur humain. On en découvre l’existence dans un texte biblique, lorsqu’on étudie celui-ci à la lumière d’autres textes bibliques qui l’utilisent ou dans son rapport avec le développement interne de la révélation.

Il s’agit donc ou bien de la signification qu’un auteur biblique attribue à un texte biblique qui lui est antérieur, lorsqu’il le reprend dans un contexte qui lui confère un sens littéral nouveau, ou bien de la signification qu’une tradition doctrinale authentique ou une définition conciliaire donne à un texte de la Bible. Mais lorsque manquent de telles références, le recours à un prétendu « sens plénier » pourrait conduire à des interprétations subjectives dépourvues de toute validité.

En définitive, on pourrait considérer « le sens plénier » comme une autre façon de désigner le « sens spirituel » d’un texte biblique dans le cas où ce dernier est différent du sens littéral. L’Esprit Saint, auteur principal de la Bible, peut en effet guider l’auteur humain dans le choix de ses expressions de telle sorte que celles-ci expriment une vérité dont il ne perçoit pas, au moment où il écrit, toute la profondeur. Un nouveau contexte peut alors faire apparaître des possibilités nouvelles de sens, possibilités que le contexte primitif laissait dans l’obscurité.

Jacques Fournier

________________________

 




L’Inspiration divine de la Sainte Ecriture et son interprétation (Voir le Concile Vatican II, « Dei Verbum, chapitre 3)

Inspiration et vérité de la Sainte Ecriture

« Pour qu’un discours soit inspiré, il faut que l’auteur bénéficie en parlant ou en écrivant d’un concours immédiat de Dieu, qu’il agisse sous une impulsion de l’Esprit Saint…

La Parole de Dieu que les prophètes avaient entendue demeurait vivante en eux. Ils ne la conservaient pas seulement à la façon d’un souvenir. C’était dans leur âme une force qui les poussait à l’action » (Dictionnaire de la Bible Supplément : DBS, article « Inspiration »)…

Les prophètes commencent donc par recevoir la Parole de Dieu qui les introduit dans le mystère d’une relation avec Dieu qui est avant tout « Vie », mystère de communion. Puis, sous l’impulsion de Dieu, au cœur de ce mystère de communion où ils restent pleinement eux-mêmes, ils vont parler et leur parole sera … Parole de Dieu.

Une Parole à recevoir et qui devient vie… Avec le prophète Ezéchiel, Dieu nous le fait comprendre par un geste symbolique tout simple : il commence par l’appeler, puis il lui présente un Livre et il l’invite à le manger ! Pour Ezéchiel, la Parole de Dieu est donc tout d’abord une nourriture reçue de Dieu qui va, comme toute nourriture, alimenter sa vie. Mais il ne s’agit pas ici de n’importe quelle nourriture : elle vient directement de Dieu. Elle nourrira donc en lui « la Vie de Dieu ». Ezéchiel accueille donc cette Parole de Dieu avec foi ; grâce à elle, il va recevoir en son cœur la Vie de Dieu. Puis, vivant de cette Vie, il parlera et sa Parole, dans ce mystère de communion avec Dieu, sera cette « Parole de Dieu » qu’il portera à ses frères…

« Ez 3,1-4 (J’entendis la voix de quelqu’un qui me parlait ; cf Ez 1,28) : Il me dit :

«Fils d’homme, ce qui t’est présenté, mange-le;

mange ce volume et va parler à la maison d’Israël.»

(2)       J’ouvris la bouche et il me fit manger ce volume,

(3)       puis il me dit : «Fils d’homme, nourris-toi et rassasie-toi de ce volume que je te donne.»

Je le mangeai et, dans ma bouche, il fut doux comme du miel.

(4)       Alors il me dit : «Fils d’homme, va-t’en vers la maison d’Israël

et tu leur porteras mes paroles ».

Notons combien le sens de ce texte se rapproche de l’idée développée en St Jean, au chapitre 6.

En Ezéchiel, ce « pain de Dieu » est la Parole de Dieu écrite sur un Livre qui vient du ciel pour qu’Ezéchiel le mange et vive de la Vie de Dieu. En St Jean, Jésus se présente lui-même comme « le pain de Dieu qui descend du ciel et donne la vie au monde » : « Je suis le pain vivant descendu du ciel. Qui mangera ce pain vivra à jamais » (Jn 6,33.51). Or, dans toute la première partie de ce discours de Jésus à Capharnaüm (Jn 6,35-47) , Jésus est justement « pain de vie » par sa Parole. Et pour recevoir ce pain, pour le manger et en vivre, il suffit de « croire » : « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle » (Jn 6,47). Nous sommes donc tous invités à « manger la Parole de Jésus », c’est à dire à l’écouter avec foi ; et si nous croyons vraiment à ce que Jésus nous dit, Dieu agira en nos cœurs, en nos vies, selon sa Parole… Par son Esprit, il nous donnera d’avoir part à sa Vie, et il nous établira ainsi, dès maintenant, dans la foi, dans ce mystère de communion auquel toute l’humanité est appelée… Ce don qui nous vient du Christ « doux et humble de cœur » (Mt 11,29) est lui aussi « doux et humble », tout simple… Il est avant tout « paix », une paix que Dieu veut voir régner dans nos cœurs, une paix qui fera de chacun de nous des artisans de paix : « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix », nous dit Jésus ; « je ne la donne pas comme le monde la donne » (c’est à dire bien souvent en parole seulement, sans réel effet dans nos vies ; Jésus, Lui, fait régner sa paix en nous et de fait, il ajoute juste après 🙂 – « que votre cœur ne se trouble pas » (Jn 14,27)… Qu’il demeure en paix, quoiqu’il arrive…

Pour revenir à nos prophètes, Jérémie parle de son côté d’un feu qui brûle en son cœur et qu’il ne peut contenir. Et c’est sous l’influence de ce feu brûlant en lui, qu’Il va parler. Le Nouveau Testament mettra clairement en parallèle l’Esprit Saint et le feu : « Jésus est venu baptiser dans l’Esprit Saint et le feu » (Mt 3,11), cet Esprit Saint qui allume dans le cœur des baptisés ce doux feu de l’amour qui nous purifiera petit à petit de tout ce qui n’est pas en harmonie avec Dieu…

Jr 20,7-9 : Tu m’as séduit, Yahvé, et je me suis laissé séduire;

tu m’as maîtrisé, tu as été le plus fort…

(9)      Je me disais : “Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son Nom”;

mais c’était en mon cœur comme un feu dévorant, enfermé dans mes os.

Je m’épuisais à le contenir, mais je n’ai pas pu.

(Et notons combien ce feu est en même temps expérience d’une Présence,

d’une communion avec son Dieu ; il ajoute en effet juste après 🙂

(11)     Le Seigneur est avec moi comme un héros puissant…

« Aux yeux des Israélites, les prophètes passaient donc pour être « les hommes de l’Esprit ». Ils sont pourtant peu nombreux à nous parler de leur expérience de l’Esprit. Michée le fait par exemple comme en passant…

Mi 3,8 : Moi, en revanche – grâce à l’Esprit du Seigneur -,

je suis rempli de force, d’équité, de courage…

Néanmoins les prophètes nous apprennent ça et là que le don de prophétie consiste en une effusion du Saint Esprit :

Is 42,1-4 : Voici mon serviteur que je soutiens,

mon élu en qui mon âme se complaît.

J’ai mis sur lui mon Esprit, il présentera aux nations le droit.

(2)       Il ne crie pas, il n’élève pas le ton, il ne fait pas entendre sa voix dans la rue;

(3)       il ne brise pas le roseau froissé, il n’éteint pas la mèche qui faiblit,

fidèlement, il présente le droit;

(4)       il ne faiblira ni ne cédera jusqu’à ce qu’il établisse le droit sur la terre,

et les îles attendent son enseignement.

Is 61,1-2 : L’Esprit du Seigneur Dieu est sur moi,

car le Seigneur m’a donné l’onction;

il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, panser les cœurs meurtris,

annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance,

(2)                  proclamer une année de grâce de la part du Seigneur…

Et Zacharie évoque de son côté l’attitude de ceux qui n’ont pas voulu ouvrir leur cœur à la Parole que Dieu leur avait envoyée par ses prophètes, par son Esprit…

Zac 7,9-12 : Ainsi parle le Seigneur:

Rendez une justice vraie et pratiquez bonté et compassion chacun envers son frère.

(10)     N’opprimez pas la veuve et l’orphelin, l’étranger et le pauvre,

et ne méditez pas en votre cœur du mal l’un envers l’autre.

(11)     Mais ils ne voulurent pas être attentifs :

ils me présentèrent une épaule rebelle;

ils endurcirent leurs oreilles pour ne pas entendre;

(12)     ils firent de leur cœur un diamant,

de peur d’écouter l’instruction et les paroles que le Seigneur avait envoyées

– par son Esprit – par le ministère des prophètes du passé.

St Paul évoque lui aussi cette action de l’Esprit qui, par sa Présence dans les cœurs, permet de prendre conscience de « ce que l’œil n’a pas vu » ; c’est ainsi que l’Esprit « révèle », qu’il « fait connaître les dons de grâces que Dieu a faits aux hommes », et il donne à St Paul et à ses compagnons « d’exprimer en termes spirituels ces réalités spirituelles » :

1Co 2,7-13 : Nous parlons d’une sagesse de Dieu, mystérieuse, demeurée cachée,

celle que, dès avant les siècles, Dieu a par avance destinée pour notre gloire,

(8)       celle qu’aucun des princes de ce monde n’a connue

– s’ils l’avaient connue, en effet, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de la Gloire –

(9)       mais, selon qu’il est écrit, nous annonçons ce que l’œil n’a pas vu,

ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme,

tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment.

(10)     Car c’est à nous que Dieu l’a révélé par l’Esprit;

l’Esprit en effet sonde tout, jusqu’aux profondeurs de Dieu.

(11)     Qui donc entre les hommes sait ce qui concerne l’homme,

sinon l’esprit de l’homme qui est en lui?

De même, nul ne connaît ce qui concerne Dieu, sinon l’Esprit de Dieu.

(12)     Or, nous n’avons pas reçu, nous, l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu,

pour connaître les dons gracieux que Dieu nous a faits.

(13)     Et nous en parlons non pas avec des discours enseignés par la sagesse humaine,

mais avec ceux qu’enseigne l’Esprit,

exprimant en termes spirituels des réalités spirituelles.

C’est ainsi que l’on peut parler « d’Ecriture inspirée » :

2Tim 3,14-17 : Pour toi (écrit St Paul à Timothée), tiens-toi à ce que tu as appris

et dont tu as acquis la certitude.

Tu sais de quels maîtres tu le tiens;

(15)     et c’est depuis ton plus jeune âge que tu connais les saintes Lettres.

Elles sont à même de te procurer la sagesse

qui conduit au salut par la foi dans le Christ Jésus.

(16)     Toute Écriture est inspirée de Dieu

et utile pour enseigner, réfuter, redresser, former à la justice :

(17)     ainsi l’homme de Dieu se trouve-t-il accompli, équipé pour toute œuvre bonne.

Et St Pierre écrit de son côté :

2P 1,19-21 : Nous avons la parole des prophètes qui est la solidité même,

sur laquelle vous avez raison de fixer votre regard

comme sur une lampe brillant dans un lieu obscur,

jusqu’à ce que luise le jour et que l’étoile du matin se lève dans vos cœurs.

Avant tout, sachez le bien :

aucune prophétie de l’Ecriture n’est affaire d’interprétation privée ;

en effet, ce n’est pas la volonté humaine qui a jamais produit une prophétie,

mais c’est portés par l’Esprit Saint que des hommes ont parlé de la part de Dieu ».

Un peu plus loin dans cette même Lettre, St Pierre évoque la figure de St Paul qui a « écrit selon la sagesse qui lui a été donnée » (2 P 3,15). La Lettre aux Ephésiens parlera de son côté d’un « Esprit de sagesse », une expression qui évoque la sagesse que donne l’Esprit Saint :

Ep 1,15-20 : Ayant appris votre foi dans le Seigneur Jésus

et votre charité à l’égard de tous les saints,

(16)     je ne cesse de rendre grâces à votre sujet et de faire mémoire de vous dans mes prières.

(17)     Daigne le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de la gloire,

vous donner un esprit de sagesse et de révélation,

qui vous le fasse vraiment connaître!

(18)     Puisse-t-il illuminer les yeux de votre cœur pour vous faire voir

quelle espérance vous ouvre son appel,

quels trésors de gloire renferme son héritage parmi les saints,

(19)                 et quelle extraordinaire grandeur sa puissance revêt pour nous, les croyants,

selon la vigueur de sa force,

(20)                                         qu’il a déployée en la personne du Christ,

le ressuscitant d’entre les morts

et le faisant siéger à sa droite, dans les cieux…

L’Esprit Saint qui vient du Père rejoint le cœur de ceux et celles qui l’accueillent avec foi. Par sa Présence, il « illumine les yeux du cœur » et communique ainsi cette « sagesse » qui vient de Dieu. Grâce à lui, il est alors possible de comprendre, dans la foi, « l’espérance que nous ouvre l’appel de Dieu », « les trésors de gloire qu ‘Il nous réserve », et « l’extraordinaire grandeur de sa puissance qu’il a déployée dans le Christ, le ressuscitant d’entre les morts.

Nous pressentons à travers ces lignes l’expérience de St Paul lui-même !

 

C’est pourquoi le Concile Vatican II (Dei Verbum chapitre III, & 11) peut dire en même temps que :

– Les Livres entiers, tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, ont Dieu pour auteur car ils ont été composés sous l’inspiration de l’Esprit Saint.

2 – Mais ces hommes choisis par Dieu pour la rédaction des Livres Saints sont restés pleinement eux-mêmes : Dieu « leur a laissé l’usage de leurs facultés et de toutes leurs ressources » ; il ne leur a pas « dicté » du ciel ce qu’ils avaient à écrire. Dans la lumière de l’Esprit Saint, « portés par l’Esprit Saint » (2 P 1,21), ils ont déployé tout leur savoir faire, toutes leurs capacités pour transmettre cette vérité qui les habitait, ce « feu qui brûlait en leur cœur » (Jérémie 20,7-9). Ils ont écrit « en auteurs véritables ». Mais l’Esprit de Dieu les guidait vers la vérité toute entière (Jn 16,13) de telle sorte qu’ils n’ont transmis que ce que Dieu voulait qu’ils transmettent.

 

Comment il faut interpréter la Sainte Ecriture

Souvenons-nous d’Ephésiens 1,15-20. Ce texte est une prière : l’apôtre désire que cet Esprit Saint que Dieu avait répandu avec abondance en son cœur soit également présent dans le cœur de ceux et celles qui le liraient. L’Esprit était à l’origine de ses paroles ; ce même Esprit donnera à ceux et celles qui le liront de comprendre vraiment le sens de ce qu’il leur écrivait.

Si l’Esprit Saint est à la source des Ecritures, nous avons donc besoin de ce même Esprit pour les lire . « L’Ecriture Sainte doit être lue et interprétée avec le même Esprit qui l’a fait écrire » (Concile Vatican II, Dei Verbum chapitre 3 & 12).

Voilà pourquoi Jean Paul II écrivait en Avril 1993 :

« Oui, pour arriver à une interprétation pleinement valable des paroles inspirées par l’Esprit Saint, il faut être soi-même guidé par l’Esprit Saint et, pour cela, il faut prier, prier beaucoup, demander dans la prière la lumière intérieure de l’Esprit et accueillir docilement cette lumière, demander l’amour, qui seul rend capable de comprendre le langage de Dieu, qui « est amour » (1 Jn 4, 8.16). Durant le travail même d’interprétation, il faut se maintenir le plus possible en présence de Dieu ».

Avant de lire la Parole de Dieu, nous sommes donc invités à demander à Dieu Notre Père son Esprit Saint dans la plus grande confiance, car tel est justement le don qu’Il veut nous communiquer :

Lc 11, 9-13 (Parole de Jésus à ses disciples) : «Et moi, je vous dis :

demandez et l’on vous donnera;

cherchez et vous trouverez;

frappez et l’on vous ouvrira.

(10)     Car quiconque demande reçoit;

qui cherche trouve;

et à qui frappe on ouvrira.

(11)     Quel est d’entre vous le père auquel son fils demandera un poisson,

et qui, à la place du poisson, lui remettra un serpent?

(12)     Ou encore s’il demande un œuf, lui remettra-t-il un scorpion?

(13)     Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui l’en prient!»

Notons bien que le Christ nous appelle ici des « mauvais ». Eh oui ! Nous sommes « mauvais », c’est à dire « pécheurs », avec un cœur trop souvent partagé. Mais c’est justement à ces « mauvais » que le Père donne son Esprit Saint lorsqu’ils le lui demandent ! Ce don est absolument gratuit : il s’enracine dans l’Amour Miséricordieux que Dieu ne cesse jamais de nous porter. Cette certitude nous invite à la plus grande confiance lorsque nous prions Notre Père de nous donner son Esprit. Nous vivrons ensuite notre lecture de la Parole de Dieu dans cette même confiance d’avoir été exaucé, quoiqu’il arrive, même si – semble-t-il – il ne s’est rien passé ! Mais sommes-nous sûrs qu’il ne s’est rien passé ? Car notre Dieu est un Dieu doux et humble qui travaille dans la discrétion, la douceur, la simplicité et la paix. Lire en silence la Parole de Dieu nous permettra justement de découvrir combien ce silence est habité par sa Présence…

Ensuite, lorsque nous lisons la Parole de Dieu, nous ne devons jamais oublier qu’elle n’a pas été « dictée » du ciel. Elle a été écrite par des hommes comme nous qui, « portés par l’Esprit Saint » (2 P 1,29), se sont comportés en « vrais auteurs », avec leur caractère, leur sensibilité… dans le contexte culturel, social… qui était le leur.

Il est donc très important de faire attention à la manière dont le texte à été écrit pour essayer de découvrir ce que l’auteur inspiré a voulu transmettre. Nous nous poserons alors deux questions :

– Quel genre littéraire a-t-il employé ? Sommes-nous face à un récit poétique, historique… ? Cette question est importante, car nous ne pouvons pas demander, par exemple, à un poème de nous transmettre des vérités d’ordre scientifique. La détermination du genre littéraire orientera donc notre lecture en nous invitant à creuser tel ou tel aspect, ou au contraire à renoncer à telle ou telle question…

– Quelles étaient « les façons de sentir, de dire ou de raconter qui étaient habituelles dans le milieu et à l’époque » de notre auteur (Dei Verbum, chapitre III & 12). Ainsi par exemple, les péripéties qui entourent la naissance de Moïse étaient habituellement reprises dès que l’on évoquait l’enfance d’un homme prestigieux. Le message à retirer d’un tel texte n’est donc pas de savoir si oui ou non Moïse a été déposé par sa mère sur le fleuve dans un panier enduit de bitume ; cet épisode n’a d’autre but que de nous dire que Moïse était un « grand homme » comparable aux plus grands de la terre[1]

De plus, nous n’oublierons pas que la Bible forme « une unité ». Certes, elle a été écrite sur une période de plus de mille ans, par quantités d’auteurs différents. Mais c’était toujours le même Esprit qui était à l’œuvre au long des siècles et dans tous ces cœurs. D’autre part, le but des textes bibliques est de nous révéler « qui » est Dieu, et donc aussi « qui » est l’homme « créé à l’image et ressemblance de Dieu ». Chaque texte devra donc être lu non pas isolément mais à la lumière de tous les autres. Nous tiendrons compte aussi de « la Tradition Vivante de l’Eglise », c’est à dire du fruit du travail et de la réflexion de tous ces chrétiens qui, bien avant nous, à la lumière du même Esprit Saint, ont lu et relu toutes ces Ecritures… Leur témoignage nous aide à avancer sur le chemin de l’Unique Vérité…

Enfin, le Concile Vatican II nous invite à rendre grâce à Dieu pour « son inexprimable bonté » qui a su s’adapter à notre langage pour qu’il nous soit donné d’entrer dans son mystère… Dieu nous a rejoint là où nous étions, et il nous a parlé un langage que nous pouvons comprendre ! Son seul but : que nous puissions atteindre, par la grâce de son Esprit Saint, cette Plénitude synonyme de bonheur pour laquelle nous avons été créés (cf Ep 5,18 ; 2,18 ; Jn 10,10 ; 17,24-26)…

[1] Lire Exode 2,1-9 ; puis le comparer à ce texte retrouvé sur une tablette d’argile en Babylonie. Il raconte l’histoire de Sargon Ier, dit l’ancien, fondateur de la puissante dynastie akkadienne, et qui vécut dans les années 2350 av. JC, donc plus de mille ans avant Moïse:

« Je suis Syarrukîn (c’est à dire roi légitime), roi fort, monarque d’Agadé. Ma mère était une prêtresse, mon père, je ne l’ai pas connu. Ma ville était Azupirannu, située sur la rive de l’Euphrate. Ma mère m’enfanta en cachette, elle me plaça dans un panier de jonc et elle en ferma la porte avec du bitume. Elle m’abandonna au Fleuve, et il ne me submergea point. Le Fleuve m’apporta à Akki, le puiseur d’eau. Akki me prit dans la bienveillance de son coeur. Akki, le puiseur d’eau, m’éleva comme son enfant. Akki, le puiseur d’eau, fit de moi un jardinier. Ishtar (une des plus puissantes déesses du panthéon mésopotamien) m’aima »…




L’Inspiration divine de la Sainte Ecriture et son interprétation

ParoleInspiration et vérité de la Sainte Ecriture

« Pour qu’un discours soit inspiré, il faut que l’auteur bénéficie en parlant ou en écrivant d’un concours immédiat de Dieu, qu’il agisse sous une impulsion de l’Esprit Saint…

La Parole de Dieu que les prophètes avaient entendue demeurait vivante en eux. Ils ne la conservaient pas seulement à la façon d’un souvenir. C’était dans leur âme une force qui les poussait à l’action » (Dictionnaire de la Bible Supplément : DBS, article « Inspiration »)…

Les prophètes commencent donc par recevoir la Parole de Dieu qui les introduit dans le mystère d’une relation avec Dieu qui est avant tout « Vie », mystère de communion. Puis, sous l’impulsion de Dieu, au cœur de ce mystère de communion où ils restent pleinement eux-mêmes, ils vont parler et leur parole sera … Parole de Dieu.

Une Parole à recevoir et qui devient vie… Avec le prophète Ezéchiel, Dieu nous le fait comprendre par un geste symbolique tout simple : il commence par l’appeler, puis il lui présente un Livre et il l’invite à le manger ! Pour Ezéchiel, la Parole de Dieu est donc tout d’abord une nourriture reçue de Dieu qui va, comme toute nourriture, alimenter sa vie. Mais il ne s’agit pas ici de n’importe quelle nourriture : elle vient directement de Dieu. Elle nourrira donc en lui « la Vie de Dieu ». Ezéchiel accueille donc cette Parole de Dieu avec foi ; grâce à elle, il va recevoir en son cœur la Vie de Dieu. Puis, vivant de cette Vie, il parlera et sa Parole, dans ce mystère de communion avec Dieu, sera cette « Parole de Dieu » qu’il portera à ses frères…

« Ez 3,1-4 (J’entendis la voix de quelqu’un qui me parlait ; cf Ez 1,28) : Il me dit :

«Fils d’homme, ce qui t’est présenté, mange-le;

mange ce volume et va parler à la maison d’Israël.»

(2) J’ouvris la bouche et il me fit manger ce volume,

(3) puis il me dit : «Fils d’homme, nourris-toi et rassasie-toi de ce volume que je te donne.»

Je le mangeai et, dans ma bouche, il fut doux comme du miel.

(4) Alors il me dit : «Fils d’homme, va-t’en vers la maison d’Israël

et tu leur porteras mes paroles ».

Notons combien le sens de ce texte se rapproche de l’idée développée en St Jean, au chapitre 6.

En Ezéchiel, ce « pain de Dieu » est la Parole de Dieu écrite sur un Livre qui vient du ciel pour qu’Ezéchiel le mange et vive de la Vie de Dieu. En St Jean, Jésus se présente lui-même comme « le pain de Dieu qui descend du ciel et donne la vie au monde » : « Je suis le pain vivant descendu du ciel. Qui mangera ce pain vivra à jamais » (Jn 6,33.51). Or, dans toute la première partie de ce discours de Jésus à Capharnaüm (Jn 6,35-47) , Jésus est justement « pain de vie » par sa Parole. Et pour recevoir ce pain, pour le manger et en vivre, il suffit de « croire » : « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle » (Jn 6,47). Nous sommes donc tous invités à « manger la Parole de Jésus », c’est à dire à l’écouter avec foi ; et si nous croyons vraiment à ce que Jésus nous dit, Dieu agira en nos cœurs, en nos vies, selon sa Parole… Par son Esprit, il nous donnera d’avoir part à sa Vie, et il nous établira ainsi, dès maintenant, dans la foi, dans ce mystère de communion auquel toute l’humanité est appelée… Ce don qui nous vient du Christ « doux et humble de cœur » (Mt 11,29) est lui aussi « doux et humble », tout simple… Il est avant tout « paix », une paix que Dieu veut voir régner dans nos cœurs, une paix qui fera de chacun de nous des artisans de paix : « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix », nous dit Jésus ; « je ne la donne pas comme le monde la donne » (c’est à dire bien souvent en parole seulement, sans réel effet dans nos vies ; Jésus, Lui, fait régner sa paix en nous et de fait, il ajoute juste après : – « que votre cœur ne se trouble pas » (Jn 14,27)… Qu’il demeure en paix, quoiqu’il arrive…

Pour revenir à nos prophètes, Jérémie parle de son côté d’un feu qui brûle en son cœur et qu’il ne peut contenir. Et c’est sous l’influence de ce feu brûlant en lui, qu’Il va parler. Le Nouveau Testament mettra clairement en parallèle l’Esprit Saint et le feu : « Jésus est venu baptiser dans l’Esprit Saint et le feu » (Mt 3,11), cet Esprit Saint qui allume dans le cœur des baptisés ce doux feu de l’amour qui nous purifiera petit à petit de tout ce qui n’est pas en harmonie avec Dieu…

Jr 20,7-9 : Tu m’as séduit, Yahvé, et je me suis laissé séduire;

tu m’as maîtrisé, tu as été le plus fort…

(9) Je me disais : “Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son Nom”;

mais c’était en mon cœur comme un feu dévorant, enfermé dans mes os.

Je m’épuisais à le contenir, mais je n’ai pas pu.

(Et notons combien ce feu est en même temps expérience d’une Présence,

d’une communion avec son Dieu ; il ajoute en effet juste après :

(11) Le Seigneur est avec moi comme un héros puissant…

« Aux yeux des Israélites, les prophètes passaient donc pour être « les hommes de l’Esprit ». Ils sont pourtant peu nombreux à nous parler de leur expérience de l’Esprit. Michée le fait par exemple comme en passant…

Mi 3,8 : Moi, en revanche – grâce à l’Esprit du Seigneur -,

je suis rempli de force, d’équité, de courage…

Néanmoins les prophètes nous apprennent ça et là que le don de prophétie consiste en une effusion du Saint Esprit :

Is 42,1-4 : Voici mon serviteur que je soutiens,

mon élu en qui mon âme se complaît.

J’ai mis sur lui mon Esprit, il présentera aux nations le droit.

(2) Il ne crie pas, il n’élève pas le ton, il ne fait pas entendre sa voix dans la rue;

(3) il ne brise pas le roseau froissé, il n’éteint pas la mèche qui faiblit,

fidèlement, il présente le droit;

(4) il ne faiblira ni ne cédera jusqu’à ce qu’il établisse le droit sur la terre,

et les îles attendent son enseignement.

Is 61,1-2 : L’Esprit du Seigneur Dieu est sur moi,

car le Seigneur m’a donné l’onction;

il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, panser les cœurs meurtris,

annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance,

(2) proclamer une année de grâce de la part du Seigneur…

Et Zacharie évoque de son côté l’attitude de ceux qui n’ont pas voulu ouvrir leur cœur à la Parole que Dieu leur avait envoyée par ses prophètes, par son Esprit…

Zac 7,9-12 : Ainsi parle le Seigneur:

Rendez une justice vraie et pratiquez bonté et compassion chacun envers son frère.

(10) N’opprimez pas la veuve et l’orphelin, l’étranger et le pauvre,

et ne méditez pas en votre cœur du mal l’un envers l’autre.

(11) Mais ils ne voulurent pas être attentifs :

ils me présentèrent une épaule rebelle;

ils endurcirent leurs oreilles pour ne pas entendre;

(12) ils firent de leur cœur un diamant,

de peur d’écouter l’instruction et les paroles que le Seigneur avait envoyées

– par son Esprit – par le ministère des prophètes du passé.

St Paul évoque lui aussi cette action de l’Esprit qui, par sa Présence dans les cœurs, permet de prendre conscience de « ce que l’œil n’a pas vu » ; c’est ainsi que l’Esprit « révèle », qu’il « fait connaître les dons de grâces que Dieu a faits aux hommes », et il donne à St Paul et à ses compagnons « d’exprimer en termes spirituels ces réalités spirituelles » :

1Co 2,7-13 : Nous parlons d’une sagesse de Dieu, mystérieuse, demeurée cachée,

celle que, dès avant les siècles, Dieu a par avance destinée pour notre gloire,

(8) celle qu’aucun des princes de ce monde n’a connue

– s’ils l’avaient connue, en effet, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de la Gloire –

(9) mais, selon qu’il est écrit, nous annonçons ce que l’œil n’a pas vu,

ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme,

tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment.

(10) Car c’est à nous que Dieu l’a révélé par l’Esprit;

l’Esprit en effet sonde tout, jusqu’aux profondeurs de Dieu.

(11) Qui donc entre les hommes sait ce qui concerne l’homme,

sinon l’esprit de l’homme qui est en lui?

De même, nul ne connaît ce qui concerne Dieu, sinon l’Esprit de Dieu.

(12) Or, nous n’avons pas reçu, nous, l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu,

pour connaître les dons gracieux que Dieu nous a faits.

(13) Et nous en parlons non pas avec des discours enseignés par la sagesse humaine,

mais avec ceux qu’enseigne l’Esprit,

exprimant en termes spirituels des réalités spirituelles.

C’est ainsi que l’on peut parler « d’Ecriture inspirée » :

2Tim 3,14-17 : Pour toi (écrit St Paul à Timothée), tiens-toi à ce que tu as appris

et dont tu as acquis la certitude.

Tu sais de quels maîtres tu le tiens;

(15) et c’est depuis ton plus jeune âge que tu connais les saintes Lettres.

Elles sont à même de te procurer la sagesse qui conduit au salut par la foi dans le Christ Jésus.

(16) Toute Écriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, réfuter, redresser, former à la justice :

(17) ainsi l’homme de Dieu se trouve-t-il accompli, équipé pour toute œuvre bonne.

Et St Pierre écrit de son côté :

2P 1,19-21 : Nous avons la parole des prophètes qui est la solidité même, sur laquelle vous avez raison de fixer votre regard comme sur une lampe brillant dans un lieu obscur, jusqu’à ce que luise le jour et que l’étoile du matin se lève dans vos cœurs.

Avant tout, sachez le bien : aucune prophétie de l’Ecriture n’est affaire d’interprétation privée ; en effet, ce n’est pas la volonté humaine qui a jamais produit une prophétie, mais c’est portés par l’Esprit Saint que des hommes ont parlé de la part de Dieu ».

Un peu plus loin dans cette même Lettre, St Pierre évoque la figure de St Paul qui a « écrit selon la sagesse qui lui a été donnée » (2 P 3,15). La Lettre aux Ephésiens parlera de son côté d’un « Esprit de sagesse », une expression qui évoque la sagesse que donne l’Esprit Saint :

Ep 1,15-20 : Ayant appris votre foi dans le Seigneur Jésus et votre charité à l’égard de tous les saints,

(16) je ne cesse de rendre grâces à votre sujet et de faire mémoire de vous dans mes prières.

(17) Daigne le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de la gloire, vous donner un esprit de sagesse et de révélation,qui vous le fasse vraiment connaître!

(18) Puisse-t-il illuminer les yeux de votre cœur pour vous faire voir quelle espérance vous ouvre son appel, quels trésors de gloire renferme son héritage parmi les saints,

(19) et quelle extraordinaire grandeur sa puissance revêt pour nous, les croyants, selon la vigueur de sa force,

(20) qu’il a déployée en la personne du Christ, le ressuscitant d’entre les morts et le faisant siéger à sa droite, dans les cieux…

L’Esprit Saint qui vient du Père rejoint le cœur de ceux et celles qui l’accueillent avec foi. Par sa Présence, il « illumine les yeux du cœur » et communique ainsi cette « sagesse » qui vient de Dieu. Grâce à lui, il est alors possible de comprendre, dans la foi, « l’espérance que nous ouvre l’appel de Dieu », « les trésors de gloire qu ‘Il nous réserve », et « l’extraordinaire grandeur de sa puissance qu’il a déployée dans le Christ, le ressuscitant d’entre les morts.

Nous pressentons à travers ces lignes l’expérience de St Paul lui-même !

C’est pourquoi le Concile Vatican II (Dei Verbum chapitre III, & 11) peut dire en même temps que :

– Les Livres entiers, tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, ont Dieu

pour auteur car ils ont été composés sous l’inspiration de l’Esprit Saint.

2 – Mais ces hommes choisis par Dieu pour la rédaction des Livres Saints sont restés pleinement eux-mêmes : Dieu « leur a laissé l’usage de leurs facultés et de toutes leurs ressources » ; il ne leur a pas « dicté » du ciel ce qu’ils avaient à écrire. Dans la lumière de l’Esprit Saint, « portés par l’Esprit Saint » (2 P 1,21), ils ont déployé tout leur savoir faire, toutes leurs capacités pour transmettre cette vérité qui les habitait, ce « feu qui brûlait en leur cœur » (Jérémie 20,7-9). Ils ont écrit « en auteurs véritables ». Mais l’Esprit de Dieu les guidait vers la vérité toute entière (Jn 16,13) de telle sorte qu’ils n’ont transmis que ce que Dieu voulait qu’ils transmettent.

 

Comment il faut interpréter la Sainte Ecriture

Souvenons-nous d’Ephésiens 1,15-20. Ce texte est une prière : l’apôtre désire que cet Esprit Saint que Dieu avait répandu avec abondance en son cœur soit également présent dans le cœur de ceux et celles qui le liraient. L’Esprit était à l’origine de ses paroles ; ce même Esprit donnera à ceux et celles qui le liront de comprendre vraiment le sens de ce qu’il leur écrivait.

Si l’Esprit Saint est à la source des Ecritures, nous avons donc besoin de ce même Esprit pour les lire . « L’Ecriture Sainte doit être lue et interprétée avec le même Esprit qui l’a fait écrire » (Concile Vatican II, Dei Verbum chapitre 3 & 12).

Voilà pourquoi Jean Paul II écrivait en Avril 1993 :

« Oui, pour arriver à une interprétation pleinement valable des paroles inspirées par l’Esprit Saint, il faut être soi-même guidé par l’Esprit Saint et, pour cela, il faut prier, prier beaucoup, demander dans la prière la lumière intérieure de l’Esprit et accueillir docilement cette lumière, demander l’amour, qui seul rend capable de comprendre le langage de Dieu, qui « est amour » (1 Jn 4, 8.16). Durant le travail même d’interprétation, il faut se maintenir le plus possible en présence de Dieu ».

Avant de lire la Parole de Dieu, nous sommes donc invités à demander à Dieu Notre Père son Esprit Saint dans la plus grande confiance, car tel est justement le don qu’Il veut nous communiquer :

Lc 11, 9-13 (Parole de Jésus à ses disciples) : «Et moi, je vous dis :

demandez et l’on vous donnera;

cherchez et vous trouverez;

frappez et l’on vous ouvrira.

(10) Car quiconque demande reçoit;

qui cherche trouve;

et à qui frappe on ouvrira.

(11) Quel est d’entre vous le père auquel son fils demandera un poisson,

et qui, à la place du poisson, lui remettra un serpent?

(12) Ou encore s’il demande un œuf, lui remettra-t-il un scorpion?

(13) Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui l’en prient!»

Notons bien que le Christ nous appelle ici des « mauvais ». Eh oui ! Nous sommes « mauvais », c’est à dire « pécheurs », avec un cœur trop souvent partagé. Mais c’est justement à ces « mauvais » que le Père donne son Esprit Saint lorsqu’ils le lui demandent ! Ce don est absolument gratuit : il s’enracine dans l’Amour Miséricordieux que Dieu ne cesse jamais de nous porter. Cette certitude nous invite à la plus grande confiance lorsque nous prions Notre Père de nous donner son Esprit. Nous vivrons ensuite notre lecture de la Parole de Dieu dans cette même confiance d’avoir été exaucé, quoiqu’il arrive, même si – semble-t-il – il ne s’est rien passé ! Mais sommes-nous sûrs qu’il ne s’est rien passé ? Car notre Dieu est un Dieu doux et humble qui travaille dans la discrétion, la douceur, la simplicité et la paix. Lire en silence la Parole de Dieu nous permettra justement de découvrir combien ce silence est habité par sa Présence…

Ensuite, lorsque nous lisons la Parole de Dieu, nous ne devons jamais oublier qu’elle n’a pas été « dictée » du ciel. Elle a été écrite par des hommes comme nous qui, « portés par l’Esprit Saint » (2 P 1,29), se sont comportés en « vrais auteurs », avec leur caractère, leur sensibilité… dans le contexte culturel, social… qui était le leur.

Il est donc très important de faire attention à la manière dont le texte à été écrit pour essayer de découvrir ce que l’auteur inspiré a voulu transmettre. Nous nous poserons alors deux questions :

– Quel genre littéraire a-t-il employé ? Sommes-nous face à un récit poétique, historique… ? Cette question est importante, car nous ne pouvons pas demander, par exemple, à un poème de nous transmettre des vérités d’ordre scientifique. La détermination du genre littéraire orientera donc notre lecture en nous invitant à creuser tel ou tel aspect, ou au contraire à renoncer à telle ou telle question…

2 – Quelles étaient « les façons de sentir, de dire ou de raconter qui étaient habituelles dans le milieu et à l’époque » de notre auteur (Dei Verbum, chapitre III & 12). Ainsi par exemple, les péripéties qui entourent la naissance de Moïse étaient habituellement reprises dès que l’on évoquait l’enfance d’un homme prestigieux. Le message à retirer d’un tel texte n’est donc pas de savoir si oui ou non Moïse a été déposé par sa mère sur le fleuve dans un panier enduit de bitume ; cet épisode n’a d’autre but que de nous dire que Moïse était un « grand homme » comparable aux plus grands de la terre[1]

De plus, nous n’oublierons pas que la Bible forme « une unité ». Certes, elle a été écrite sur une période de plus de mille ans, par quantités d’auteurs différents. Mais c’était toujours le même Esprit qui était à l’œuvre au long des siècles et dans tous ces cœurs. D’autre part, le but des textes bibliques est de nous révéler « qui » est Dieu, et donc aussi « qui » est l’homme « créé à l’image et ressemblance de Dieu ». Chaque texte devra donc être lu non pas isolément mais à la lumière de tous les autres. Nous tiendrons compte aussi de « la Tradition Vivante de l’Eglise », c’est à dire du fruit du travail et de la réflexion de tous ces chrétiens qui, bien avant nous, à la lumière du même Esprit Saint, ont lu et relu toutes ces Ecritures… Leur témoignage nous aide à avancer sur le chemin de l’Unique Vérité…

Enfin, le Concile Vatican II nous invite à rendre grâce à Dieu pour « son inexprimable bonté » qui a su s’adapter à notre langage pour qu’il nous soit donné d’entrer dans son mystère… Dieu nous a rejoint là où nous étions, et il nous a parlé un langage que nous pouvons comprendre ! Son seul but : que nous puissions atteindre, par la grâce de son Esprit Saint, cette Plénitude synonyme de bonheur pour laquelle nous avons été créés (cf Ep 5,18 ; 2,18 ; Jn 10,10 ; 17,24-26)…

D. Jacques Fournier

 

[1] Lire Exode 2,1-9 ; puis le comparer à ce texte retrouvé sur une tablette d’argile en Babylonie. Il raconte l’histoire de Sargon Ier, dit l’ancien, fondateur de la puissante dynastie akkadienne, et qui vécut dans les années 2350 av. JC, donc plus de mille ans avant Moïse:

« Je suis Syarrukîn (c’est à dire roi légitime), roi fort, monarque d’Agadé. Ma mère était une prêtresse, mon père, je ne l’ai pas connu. Ma ville était Azupirannu, située sur la rive de l’Euphrate. Ma mère m’enfanta en cachette, elle me plaça dans un panier de jonc et elle en ferma la porte avec du bitume. Elle m’abandonna au Fleuve, et il ne me submergea point. Le Fleuve m’apporta à Akki, le puiseur d’eau. Akki me prit dans la bienveillance de son coeur. Akki, le puiseur d’eau, m’éleva comme son enfant. Akki, le puiseur d’eau, fit de moi un jardinier. Ishtar (une des plus puissantes déesses du panthéon mésopotamien) m’aima »…

 

Inspiration et interprétation



Bibliographie pour une Introduction à la Bible.

1 – Une Bible complète, avec des introductions aux différents livres bibliques, et des notes de lecture (Attention aux éditions mineures ou de poche, pratiques mais sans notes).

  • « La Bible de Jérusalem » (BJ; Editions du Cerf). Certainement la meilleure en ce qui concerne les notes de lecture et les multiples références qu’elle propose pour aider la compréhension de tel texte biblique par d’autres textes bibliques

  • « La Traduction Oeucuménique de la Bible » (TOB ; Editions du Cerf et Société Biblique Française), réalisée par des spécialistes protestants et catholiques.

  • « La Bible des Peuples » (Hachette), une traduction et des notes volontairement simplifiées pour permettre le meilleur accès possible aux textes bibliques.

2 – Quelques outils :

  • Le « Vocabulaire de Théologie Biblique » (Cerf) : de nombreux articles sur des notions bibliques importantes, avec à chaque fois une partie consacrée à l’AT, une autre au NT. De nombreuses références sont données.

  • « La Bible », par André Paul (Collection Repères pratiques ; Nathan). Clair et très bien présenté avec 5 parties: Bible et Bibles ; Histoire ; AT ; NT ; Textes ; Interprétations.

  • « Pour lire la Bible », J.-P. Bagot; J.-Cl. Dubs.

  • « Pour lire l’Ancien Testament »; « Pour lire le NT », d’Etienne Charpentier (Cerf).

  • « Les Evangiles, textes et commentaires » (Bayard Compact) : quatre commentaires particulièrement clairs et accessibles réunis en un seul volume (L’Evangile de Matthieu, par Claude Tassin ; L’Evangile de Marc, par Jacques Hervieux ; L’Evangile de Luc, par Hugues Cousin ; L’Evangile de Jean, par Alain Marchadour).

  • A noter également la Collection « Tout Simplement » (Editions de l’Atelier) où chaque volume est consacré à un thème : « Saint Paul » par Paul Bony, « Jésus-Christ », par Y. Chabert et R. Philibert ; « L’Eglise » par H. Danet et C. Royon ; « La Messe » par R. Cabié ; « Le Peuple de la Bible », par G. Sindt ; « Les miracles » par C. Perrot…

  • Les « Cahiers Evangiles » (Editions du Cerf), 60-70 pages consacrées à un thème, un livre Biblique… Plus de 160 numéros sont déjà parus…

  • « Lectures bibliques, aux sources de la culture occidentale » d’Anne-Marie Pelletier (Cerf) : de très bonnes études de textes bibliques importants.

Jacques Fournier