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Retraite préparatoire à la fête de la Sainte Trinité (3) : « L’Esprit Saint procède du Père et du Fils… Il est Seigneur, et il donne la vie. »

Nous avons vu précédemment que depuis toujours et pour toujours, le Père et le Fils sont en face à face, le Père, dans l’Amour, se donnant en tout ce qu’Il Est au Fils, l’engendrant ainsi en Fils ; le Fils, dans l’Amour, se recevant en tout ce qu’Il Est du Père, dans l’action de grâce.

« Dieu » en effet « Est Amour » (1Jn4,8.16), et le propre de l’Amour, en Dieu, est de se donner, totalement, pour la seule Plénitude de l’autre. C’est ainsi que St Jean écrit : « Le Père aime le Fils et il a tout donné en sa main » (Jn 3,35). En grec, le temps employé pour le verbe « donner » pourrait aussi être traduit par un présent : « Le Père aime le Fils et il donne tout en sa main » (Jn 3,35). Autrement dit, c’est parce que « le Père aime le Fils », un présent qui a ici valeur d’éternité, « qu’il lui donne tout », tout ce qu’il Est, tout ce qu’il a. « Tout ce qu’a le Père est à moi » (Jn 16,15)…

« « Aimer », pour Dieu, c’est donc « donner » ce qu’Il Est en Lui-même, sa Plénitude spirituelle d’Être et de Vie, et cela gratuitement, par amour. Et rien, absolument rien ne peut empêcher Dieu d’Être ce qu’Il est, Amour, Pur Amour, toujours donné, gratuitement, pour le seul bien de tous… Et puisque nous avons tous été « créés à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28), Jésus nous invitera à agir « comme » lui, une attitude qui n’est possible, pour nous pécheurs, qu’avec le secours de sa grâce : « Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs, afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 44-45). Autrement dit, le Père « Amour » aime d’un Amour Pur aussi bien « les méchants et les bons », « les justes et les injustes » : à tous, il donne gratuitement, par Amour, en surabondance, ce qu’Il Est en Lui-même, et Il Est Esprit (Jn 4,24), et Il est Lumière (1Jn 1,5). « Il fait donc lever son soleil » sur tous en donnant à tous la Lumière de son Esprit, et « il fait tomber la pluie » sur tous en donnant l’Eau Vive de son Esprit (cf. Jn 4,10-14 ; 7,37-39). Pour « les justes » et « les bons », c’est-à-dire les pécheurs repentants ouverts en vérité à la surabondance de cet Amour, qui prendra alors pour eux le visage d’une incroyable Miséricorde, cet Esprit sera Lumière, Vie, Paix, Joie, Douceur, Tendresse dans une purification et une sanctification toujours en œuvre ici-bas… Pour « les méchants » et « les injustes », c’est-à-dire les pécheurs qui n’ont pas encore pris conscience de leurs misères, aveuglés par leur orgueil et la convoitise des biens de ce monde, le Don de la Lumière de l’Esprit, de l’Eau Vive de l’Esprit sera douce invitation à ouvrir la porte de leur cœur (Ap 3,20), à faire la vérité dans leur vie, pour passer enfin des ténèbres à la Lumière, d’une privation de Plénitude à un avant goût de cette Plénitude, dès maintenant, dans la foi, en leurs cœurs… Ils commenceront alors à pressentir dès ici-bas « où » se cache le vrai Bonheur… « C’est si bon cette Présence de Dieu ! C’est là, tout au fond, dans le Ciel de mon âme, que j’aime le trouver puisqu’Il ne me quitte jamais…  J’ai trouvé le ciel sur la terre puisque le ciel c’est Dieu et Dieu est dans mon âme » (Elisabeth de la Trinité)…

« Né du Père avant tous les siècles », le Fils est donc « engendré » par le Père (Crédo), qui accomplit à son égard un acte d’amour éternel, totalement gratuit : il se donne à Lui en tout ce qu’Il Est, l’engendrant ainsi en « Dieu né de Dieu »… « Dieu Est Amour » ? Le Père Est Amour ? En se donnant au Fils, il va lui donner à lui aussi d’Être Amour, totalement, pleinement, tout comme Lui, et cela en ‘Amour né de l’Amour’…

Mais si le propre de l’Amour en Dieu est de se donner, le Fils lui aussi, « engendré » par le Père, Amour né de l’Amour avant tous les siècles, va pouvoir se donner comme Dieu seul se donne, de tout son Être… Ainsi, en tant que le Fils se reçoit du Père en tout ce qu’il est, cette capacité à se donner sera encore pour lui un Don du Père. Nous le pressentons en Jn 17,2, lorsqu’il prie son Père juste avant sa Passion et lui dit : « Père, glorifie ton Fils afin que ton Fils te glorifie, et que selon le pouvoir que tu lui as donné sur toute chair, il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés ». Jésus est donc bien conscient que « donner la vie » est un « pouvoir », une capacité, qu’il a reçue du Père…

Répétons-nous : depuis toujours et pour toujours, le Père est Amour et il se donne entièrement, en tout son Être, au Fils, lui donnant d’être Amour lui aussi, tout comme le Père. Le Fils, Amour, est donc lui aussi Don total de lui‑même, entièrement, tout comme le Père… Et c’est ainsi que, de toute éternité, du Don du Père et du Fils « procède » l’Esprit Saint, la Troisième Personne de la Trinité. Autrement dit, lui aussi se reçoit en tout ce qu’Il Est du Don total et éternel du Père et du Fils…

Il importe maintenant de faire une précision au niveau du vocabulaire que nous employons. « Dieu Est Esprit » (Jn 4,24) dit Jésus à la Samaritaine. Le mot « Esprit », employé ici sous la forme d’un nom commun, suffit donc à décrire tout ce que Dieu Est en Lui-même, l’infinie richesse de sa Plénitude spirituelle, qui est aussi, nous l’avons vu, « Amour », et cela en tous ses aspects. Ainsi, lorsque St Jean écrit « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5), la Lumière dont nous parlons est une réalité spirituelle de l’ordre de l’Amour… Tout en Dieu « Est Amour »…

Nous disons aussi souvent que « Dieu est Saint » (cf. Lv 19,2), et là aussi l’adjectif « Saint » suffit à caractériser tout ce que Dieu est en lui-même… Et cela d’autant plus qu’il vient d’un verbe, « qadash », qui, en hébreu, a comme sens premier : « couper, séparer, mettre à part ». Dieu est donc « Saint » en tant qu’il est le seul à être ce qu’il est. A ce titre, il est à part, incomparable. « A qui me comparerez-vous dont je sois l’égal, dit le Saint  (Is 40,25) ? » Réponse : à personne… Il est le seul à être ce qu’il est, Dieu unique…

Le nom commun « Esprit » et l’adjectif « Saint » peuvent donc être employés, ensemble ou séparément, pour évoquer ce que Dieu est en Lui-même, sa Plénitude d’Être et de Vie… Ainsi, le Père est Esprit, le Père est Saint, le Père est Esprit Saint. Le Fils est Esprit, le Fils est Saint, le Fils est Esprit Saint.

Mais lorsque nous évoquons la Troisième Personne de la Trinité, nous allons reprendre ces deux mêmes mots « Esprit » et « Saint » mais cette fois d’une manière différente et donc avec un sens différent : « Esprit Saint » ou « Saint Esprit » devient alors un nom propre pour évoquer « Quelqu’un » d’unique, cette Personne divine qui n’est ni le Père, ni le Fils, mais qui, tout comme le Père et le Fils, est la seule à être « qui » elle est… Le Père, le Fils et l’Esprit Saint sont alors trois Personnes divines qui existent de toute éternité, en face à face les unes avec les autres, bien distinctes l’une de l’autre, leur différence étant à la base de leurs relations éternelles… Et dans le Mystère de ces relations, le Fils, en face à face avec le Père, se reçoit du Père en tout ce qu’il Est, et cela de toute éternité, gratuitement, par amour… Et l’Esprit Saint, en face à face avec le Père et le Fils, se reçoit lui aussi du Père et du Fils en tout ce qu’il Est, et cela de toute éternité, gratuitement, par amour. Alors, si « Dieu est Esprit », et si « Dieu est Saint », l’Esprit Saint, Troisième Personne de la Trinité, est donc lui aussi « Esprit » et lui aussi « Saint » en tout son Être…

Il s’agit donc simplement, lorsque nous employons l’expression « Esprit Saint », de bien faire attention à ce que nous évoquons :

  • Soit « l’Esprit Saint » nom propre, qui renvoie à une Personne divine, la seule à être « qui » elle est. A ce titre, en tant que Personne, elle ne peut qu’être en face à face avec le Père, et en face à face avec le Fils.

  • « Esprit Saint », nom commun et adjectif, qui renvoient tous les deux à ce que Dieu Est en lui-même… Alors, ces deux mots peuvent s’appliquer à chacune des trois Personnes divines, soit séparément, soit tous les deux ensemble, et cela pour évoquer ce qu’elles sont toutes les trois en elles‑mêmes, ce par quoi elles vivent et s’expriment. Cette Plénitude spirituelle est ainsi tout à la fois « dans le Père », « dans le Fils » en tant que le Fils la reçoit du Père de toute éternité, et « dans l’Esprit Saint », en tant que l’Esprit Saint la reçoit du Père et du Fils de toute éternité. C’est dans ce cadre que Jésus peut évoquer le fait sa Plénitude d’Être et de Vie est aussi celle du Père, elle est aussi « dans le Père », alors même que le Père et le Fils sont toujours en face à face. Il dira alors en St Jean : « Je suis dans le Père et le Père est en moi » (Jn 14,10-11), ce qui équivaut à dire : tout ce qu’Est le Fils, le Père l’Est lui aussi, alors même que le Père n’est pas le Fils et que le Fils n’est pas le Père…

Et maintenant, puisque « Dieu est Amour », la troisième Personne de la Trinité est elle aussi « Amour », et donc Don d’elle-même, puisque le propre de l’Amour en Dieu est de se donner en tout ce qu’il Est… L’Esprit Saint « Seigneur » est donc lui aussi Don de ce qu’il Est en lui-même, tout comme le Père et le Fils. Puisque « Dieu est Esprit » (Jn 4,24), l’Esprit Saint « Seigneur » donne cet Esprit, gratuitement, par amour. Et comme nous pouvons dire aussi « Dieu est Esprit Saint », l’Esprit Saint « Seigneur » ne cessera de donner l’Esprit Saint, Plénitude d’Être et de Vie, car « l’Esprit est vie » (Rm 8,10 ; cf. Ga 5,25)… Tout cela, nous pouvons le formuler avec notre Crédo : « Je crois en l’Esprit Saint qui est Seigneur et qui donne la vie », en donnant cet Esprit qui est vie. Toute l’œuvre de l’Esprit Saint, troisième Personne de la Trinité, « Amour », consiste donc à nous donner « l’Esprit Saint », Plénitude d’Être et de Vie, qui est appelée à s’unir à notre esprit pour nous donner d’avoir part nous aussi, à la Plénitude même de Dieu.

Nous avons vu précédemment que le Père fait tout par le Fils, par Celui à qui il se donne de toute éternité l’engendrant ainsi en Fils. Nous pouvons maintenant compléter et dire que le Père fait tout par le Fils et par l’Esprit Saint, qui « procède du Père (et du Fils) » de toute éternité. Le Fils et l’Esprit Saint sont ainsi comme « les deux mains du Père », selon l’image de St Irénée (Deuxième Evêque de Lyon, entre 177 et 202, date de sa mort). Le Père se donne ainsi à nous par ces deux Personnes divines à qui il se donne de toute éternité, car en se donnant à elles, il leur donne à leur tour de pouvoir se donner… Le Père nous donne ainsi la vie par son Fils, « le Pain de vie » (Jn 6,35) et par « l’Esprit Saint qui est Seigneur et qui donne la vie » (Crédo). En effet, nous dit Jésus, « c’est mon Père qui vous le donne, le pain qui vient du ciel, le vrai ; car le pain de Dieu, c’est le pain qui descend du ciel et donne la vie au monde… Je suis venu en effet pour qu’on ait la vie, et qu’on l’ait en surabondance » (Jn 6,32-33 ; 10,10). Ainsi, « comme le Père qui est vivant m’a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi » (Jn 6,57). Nous recevons donc la vie de Dieu, la vie du Père, par le Fils. Et cette vie nous est transmise, nous dit encore Jésus, non pas par sa chair et son sang, mais par « l’Esprit qui vivifie », c’est-à-dire par le Don de l’Esprit Saint « Seigneur », Troisième Personne de la Trinité, qui en se donnant lui-même, en nous donnant ce qu’Il Est en lui-même, nous donne sa Plénitude d’Être et de Vie, « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63). C’est ce que Jésus affirme après avoir insisté de manière incroyable sur l’accueil par la foi et dans la foi de « sa chair donnée pour la vie du monde » (Jn 6,51), et de « son sang versé pour la multitude en rémission des péchés » (Mt 26,28) : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui » (Jn 6,53-56). Et après une telle insistance, devant la réaction de certains, « mais comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? », « elle est dure cette parole ! Qui peut l’entendre ? » (Jn 6,52.60), Jésus leur dit : « C’est l’Esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien » (Jn 6,63)…

Nous le constatons donc avec cet exemple de l’Eucharistie : si le Père fait tout pour nous par le Fils et par l’Esprit Saint, c’est-à-dire s’il se donne à nous par le Fils et par l’Esprit Saint à qui il se donne de toute éternité, le Fils lui aussi fait tout pour nous par l’Esprit Saint, à qui il se donne lui aussi de toute éternité, lui donnant de pouvoir se donner. Le Fils se donne alors à nous par le Don que l’Esprit Saint « Seigneur » ne cesse de faire de Lui-même… « En vérité, en vérité je vous le dis », déclare Jésus, « celui qui croit » en sa Parole « a la vie éternelle » (Jn 6,47) par « l’Esprit Saint qui est Seigneur et qui donne la vie » (Crédo)…

« Heureux alors ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20,29), car cette Plénitude d’Être et de Vie est bonheur profond pour quiconque accepte de la recevoir dans la vérité de sa misère reconnue et offerte au « Père des Miséricordes » (2Co 1,3), à Jésus « Sauveur du monde » (Jn 4,42), à l’Esprit Saint « Consolateur » (Jn 14,16.26 ; 15,26 ; 16,7), au Dieu Unique, Amour, Don pur et gratuit de Lui-même pour le seul bien de tous…

                                                                                                              D. Jacques Fournier

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Retraite préparatoire à la fête de la Sainte Trinité (2) : « Le Père fait tout par le Fils ; le Fils est le Serviteur du Père. »

De toute éternité, le Père et le Fils sont en face à face, le Père, dans l’Amour, se donnant en tout ce qu’Il Est au Fils, l’engendrant ainsi en Fils ; le Fils, dans l’Amour, se recevant en tout ce qu’Il Est du Père, dans l’action de grâce. Et puisque « Dieu est Esprit » (Jn 4,24), et que « Dieu est Saint » (Lv 19,2), « Jésus tressaille de joie sous l’action de l’Esprit Saint », « le Don de Dieu », « et il dit : « Je te bénis, Père, Seigneur du Ciel et de la terre » (Lc 10,21 ; Jn 4,10)… Chacun possède donc une seule et même Plénitude d’Être et de Vie, le Père la donnant au Fils, gratuitement, par amour, le Fils la recevant du Père, gratuitement, dans l’amour. Le Père et le Fils, en face à face, sont ainsi unis l’un à l’autre dans la communion d’un même « Amour » (1Jn 4,8.16), d’un même « Esprit » (Jn 4,24), d’une même « Lumière » (1Jn 1,5), d’une même Vie (Jn 5,26). Et cet Amour, en Dieu, fait l’union des volontés. Le Fils n’a ainsi qu’un seul désir : accomplir le plus parfaitement possible la volonté du Père. Et le Père, de son côté, fait tout par et pour son Fils : « Le Seigneur fait tout pour moi. Seigneur, éternel est ton amour, n’arrête pas l’œuvre de tes mains » (Ps 138(137),8).

Ainsi lorsque nous disons dans notre Crédo « Je crois en un seul Dieu, le Père Tout‑Puissant, Créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible », St Jean précise en parlant du Fils, « le Verbe fait chair » (Jn 1,14) : « Tout fut par lui et sans lui rien ne fut » (Jn 1,3). La Lettre aux Hébreux commence quant à elle par ces lignes : « À bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé, a parlé à nos pères par les prophètes ; mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses et par qui il a créé les mondes » (Hb 1,2). La Lettre aux Colossiens nous dit de son côté de ce Fils qui a assumé notre condition humaine, « devenant ainsi semblable aux hommes » (Ph 2,7) : « Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né, avant toute créature : en lui, tout fut créé, dans le ciel et sur la terre. Les êtres visibles et invisibles (la formulation de notre Crédo), Puissances, Principautés, Souverainetés, Dominations, tout est créé par lui et pour lui. Il est avant toute chose, et tout subsiste en lui » (Co 1,15-17).

Si le Père a créé tous les hommes, gratuitement, par amour et par le Fils, ce même Père veut sauver tous les hommes gratuitement, par amour et par ce même Fils : « Dieu notre Sauveur, veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité. En effet, il n’y a qu’un seul Dieu ; il n’y a aussi qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous » (1Tm 2,3-6). St Jean écrit de son côté : « Dieu », le Père, « a tant aimé le monde », c’est‑à‑dire tous les hommes, sans absolument aucune exception, « qu’il a donné son Fils Unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas mais ait la vie éternelle. Car Dieu », le Père, « n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde », au sens de condamner, « mais pour que le monde soit sauvé par son entremise » (Jn 3,16-17). St Jean appelle ainsi Jésus « le Sauveur du monde », et lui, de son côté, n’a qu’un seul désir : accomplir la volonté du Père, et donc tout faire pour que tous les hommes soient effectivement sauvés : « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé et de mener son œuvre », la création qu’il a lancée dans l’aventure de la vie et au cœur de laquelle il ne cesse d’agir pour son salut, « à bonne fin… Tout ce que me donne le Père », et le Père a donné au Fils le monde à sauver, « viendra à moi, et celui qui vient à moi, je ne le jetterai pas dehors ; car je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé. Or c’est la volonté de celui qui m’a envoyé que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour » (Jn 4,34 ; 6,37-39).

En tant que le seul de désir de Jésus est l’accomplissement de la volonté du Père, nous pouvons donc l’appeler « le Serviteur » du Père. Et c’est bien ainsi que St Luc nous le présente plusieurs fois dans son Livre des Actes des Apôtres : « Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob a glorifié son Serviteur Jésus que vous, vous avez livré… Vous avez fait mourir le Prince de la vie, mais Dieu l’a ressuscité des morts ; nous en sommes témoins… Et c’est pour vous d’abord que Dieu a ressuscité son Serviteur et il l’a envoyé vous bénir », le Père nous bénit donc par son Fils, « du moment que chacun de vous se détourne de ses perversités » (Ac 3,11-26 ; cf. Ac 4,27.30). Le Fils est donc tout entier au Service du Père, dans l’accomplissement de sa volonté. Mais dans cette communion d’Être et de Vie qui unit le Père et le Fils, une communion qui est de l’ordre de l’Amour, tout ce que veut le Père dans l’Amour, pour notre seul bien, le Fils le veut lui aussi de tout son Être, dans ce même Amour et toujours pour notre seul bien. Et le Père apparaît alors comme étant lui aussi le Serviteur du Fils dans l’accomplissement de leur volonté commune, pour notre seul bien… C’est ainsi que le Père est tout entier au service du Fils pour que les hommes viennent à lui, croient en lui et puissent donc ainsi être sauvés par lui, l’unique « Sauveur du monde », « l’unique Médiateur entre Dieu et les hommes » (1Tm 2,3-6).

Le Père va ainsi se mettre au service du Fils en attirant tous les hommes à lui. Nous l’avons vu, « tout ce que me donne le Père viendra à moi ». En effet, « nul ne peut venir à moi », dit Jésus, « si cela ne lui est donné par le Père ». Oui, « nul ne peut venir à moi », dit-il encore, « si le Père qui m’a envoyé ne l’attire » (Jn 6,37.65.44). Et « venir à » Jésus en St Jean est synonyme de « croire en lui », comme nous le montre ce parallèle en Jn 6,35 : « Je Suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. » Le Père attire ainsi tous les hommes au Fils et il fait tout pour leur donner de croire en lui… C’est ainsi, notamment, qu’il lui rend témoignage, par une voix qui jaillit du ciel : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, j’ai mis tout mon amour » (Mc 1,11)Et si, disait Jésus, « ma parole n’est pas de moi, mais du Père qui m’a envoyé » (Jn 14,24), de telle sorte que « ce que je dis, tel que le Père me l’a dit, je le dis » (Jn 12,50), le Père de son côté déclare, lors de la Transfiguration de Jésus : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; écoutez‑le » (Mc 9,7)Et lorsque Jésus demande :« Père, glorifie-ton nom », aussitôt, « du ciel vint une voix : « Je l’ai glorifié et de nouveau je le glorifierai » (Jn 12,28). Ainsi, « le Père qui m’a envoyé », dit Jésus, « lui, me rend témoignage » (Jn 5,37). Et il le fait encore par « les guérisons, signes et prodiges qu’il opère par son saint serviteur Jésus » (cf. Ac 4,30). Oui, dit St Pierre, « Jésus, le Nazôréen, est bien cet homme que Dieu a accrédité auprès de vous par les miracles, signes et prodiges qu’il a opérés par lui au milieu de vous » (Ac 2,22). Et Jésus en était bien conscient : « Les œuvres que le Père m’a donné à mener à bonne fin, ces œuvres mêmes que je fais, me rendent témoignage que le Père m’envoie » (Jn 5,36).

Le Père a donc tout créé par le Fils, et il veut tout sauver par le Fils. Dans sa mission, il agit pour lui, il est entièrement à son service, pour aider les hommes à venir à Jésus, à croire qu’il est vraiment « le Sauveur du monde », ce qui leur permettra de recevoir le pardon de toutes leurs fautes, offert en surabondance par leur Dieu et Père qui, avec son Fils, ne cherche et ne poursuit que leur bien. C’est donc bien encore avec et par son Fils que le Père travaille à se réconcilier à lui tous les hommes. Car ce n’est que dans cette relation en cœur à cœur avec leur Père qu’ils trouveront, en tant qu’ils la recevront gratuitement, par amour, cette Plénitude d’Être et de Vie que le Père veut leur communiquer à eux aussi, car c’est pour qu’ils en soient comblés qu’il les a tous créés. Et ce Don sera le même que celui qu’il offre à son Fils de toute éternité, l’engendrant ainsi en Fils « vrai Dieu né du vrai Dieu »… Il aura donc au cœur de tous ceux et celles qui accepteront de le recevoir les mêmes effets que pour le Fils : l’engendrement à la Plénitude même de la Vie de Dieu, « à l’image du Fils » (Rm 8,29). En effet, « Dieu », le Père, « s’est plu à faire habiter en lui toute la Plénitude et par lui à réconcilier tous les êtres pour lui, aussi bien sur la terre que dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix ». Oui, « en lui habite corporellement toute la Plénitude de la Divinité, et vous vous trouvez, en lui, associés à sa Plénitude » (Col 1,19-20 ; 2,9-10) ! Et dans sa seconde Lettre aux Corinthiens, St Paul écrit : « Dieu », le Père, « nous a réconciliés avec lui par le Christ et il nous a confié le ministère de la réconciliation. Car c’était Dieu qui dans le Christ se réconciliait le monde, ne tenant plus compte des fautes des hommes et mettant en nous la parole de la réconciliation. Nous sommes donc en ambassade pour le Christ ; c’est comme si Dieu exhortait par nous. Nous vous en supplions au nom du Christ : laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2Co 5,18-20) en accueillant la Vérité de son Amour. Et dans cette même Vérité où nous sommes déjà enveloppés par sa Tendresse, nous sommes invités à reconnaître en vérité notre péché, nos misères, et à tout lui offrir. « Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils » (Lc 15,21). Alors, « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29) les fera vite disparaître par « l’Eau Pure qui purifie » (Ez 36,24-28), « l’Eau Vive qui vivifie », « l’Eau Vive de l’Esprit Saint », « le Don de Dieu » (Jn 4,10-14 ; 6,63 ; 7,37-39). Ainsi, « celui qui fait la vérité vient à la lumière » (Jn 3,21), et « si nous marchons dans la lumière, comme Dieu est lui-même dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres et le sang de Jésus, son Fils, nous purifie de tout péché » (1Jn 1,7-9). Et par la médiation de son sang versé, de sa chair offerte, c’est toujours le Don de l’Esprit qui accomplit son œuvre en nous. En effet, si le sang de Jésus est bien « le sang de l’Alliance versé pour la multitude en rémission des péchés » (Mt 26,28), la réalité qui accomplit cette œuvre en nous, c’est bien l’Esprit qui purifie, « l’Esprit qui vivifie » : « La chair ne sert de rien, c’est l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63).

Alors, si nous acceptons de nous présenter devant lui tels que nous sommes en vérité, pécheurs, remplis de misères et de faiblesses de toutes sorte, « lui, fidèle et juste, pardonnera nos péchés et nous purifiera de toute iniquité ». « Si notre cœur venait à nous condamner, devant lui nous apaiserons notre cœur, car Dieu est plus grand que notre cœur et il connaît tout » (1Jn 3,19-20)… Et ce Dieu « Miséricorde Toute Puissante » (Lc 1,49-50), ce « Père des Miséricordes » (2Co 1,3), Lui qui a créé l’infini de l’univers visible qui nous entoure, Lui qui est aussi infini en Amour, agira envers nous selon l’infini de son Amour et nous ne pourrons que constater, en expérimentant son pardon, que « là où le péché à abondé, la grâce a surabondé » (Rm 5,20)…

« Il ne s’agit donc pas de l’homme qui veut ou qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde » (Rm 9,16). Ainsi, grâce au salut du monde « accompli » (Jn 19,30) par Jésus, le Fils, le projet créateur du Père pourra lui aussi pleinement s’accomplir : « Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ ! Il nous a bénis et comblés des bénédictions de l’Esprit, au ciel, dans le Christ. Il nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour. Il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ. Ainsi l’a voulu sa bonté, à la louange de gloire de sa grâce, la grâce qu’il nous donne dans le Fils bien-aimé. En lui, par son sang, nous avons la rédemption, le pardon de nos fautes. C’est la richesse de la grâce que Dieu a fait déborder jusqu’à nous en toute sagesse et intelligence »… Ainsi, « après avoir écouté la parole de vérité, l’Évangile de votre salut, et après y avoir cru, vous avez reçu la marque de l’Esprit Saint. Et l’Esprit promis par Dieu est une première avance sur notre héritage, en vue de la rédemption que nous obtiendrons, à la louange de sa gloire… Le Christ a en effet aimé l’Eglise », et à travers elle, l’humanité tout entière. « Il s’est livré pour elle afin de la rendre sainte en la purifiant par le bain de l’eau baptismale, accompagné d’une parole ; il voulait se la présenter à lui-même, cette Église », cette humanité, « resplendissante, sans tache, ni ride, ni rien de tel ; il la voulait sainte et immaculée » (Ep 1,3‑14 ; 5,25-27). Et « tout ce que veut le Seigneur, il le fait au ciel et sur la terre, dans les mers et jusqu’au fond des abîmes » (Ps 135(134),6). Telle est la volonté du Père accomplie par le Fils et qui commence à se réaliser très concrètement dans nos cœurs et dans nos vies par le Don gratuit de l’Amour, le Don de l’Esprit Saint… « Heureux » alors, dès maintenant, dans la foi, « ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20,29)…

                                                                                                              D. Jacques Fournier

 

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Retraite préparatoire à la fête de la Sainte Trinité (1) : « Le Père et le Fils, en face à face, unis l’un à l’autre dans la communion d’un même Esprit. »

« Si Dieu était votre Père », dit Jésus à ses adversaires, « vous m’aimeriez, car c’est de Dieu que je suis sorti et que je viens ; je ne viens pas de moi-même ; mais lui m’a envoyé » (Jn 8,42), « et celui qui m’a envoyé est avec moi ; il ne m’a pas laissé seul, parce que je fais toujours ce qui lui plaît » (Jn 8,29). « Celui qui ma envoyé », le Père, « est avec moi », dit Jésus, et cela « toujours », car Jésus « fait toujours ce qui lui plaît ». Accueillir le Fils, « le Verbe fait chair » (Jn 1,14), celui que les hommes pouvaient voir avec leurs yeux de chair, « c’est donc au même moment accueillir le Père », « toujours » avec le Fils, mais invisible à nos yeux de chair, car « Dieu est Esprit », dit Jésus à la Samaritaine (Jn 4,24).

Nicodème avait reconnu que Jésus n’était pas seul : « Rabbi, nous le savons, tu viens de la part de Dieu comme un Maître : personne ne peut faire les signes que tu fais, si Dieu n’est pas avec lui » (Jn 3,2). C’était Dieu le Père, en effet, qui, avec lui et par lui, accomplissait des miracles, signes et prodiges pour aider les foules à croire en son Fils : « Jésus le Nazôréen, cet homme que Dieu a accrédité auprès de vous par les miracles, prodiges et signes qu’il a opérés par lui au milieu de vous », dit St Pierre à la foule (Ac 2,22). Et Jésus lui-même disait : « Les œuvres que le Père m’a donné à mener à bonne fin, ces œuvres mêmes que je fais me rendent témoignage que le Père m’a envoyé » (Jn 5,35). En effet, « le Père demeurant en moi fait ses œuvres » (Jn 14,10), car « le Fils ne peut rien faire de lui-même qu’il ne le voie faire au Père ; ce que fait le Père, le Fils le fait pareillement car le Père aime le Fils et lui montre tout ce qu’il fait » (Jn 5,19‑20).

Le Fils est donc tout d’abord entièrement « tourné vers le sein du Père » (Jn 1,18). Dans la foi, en « Verbe fait chair », vrai Dieu (Jn 1,1 ; 20,28) mais aussi vrai homme, « Fils de l’homme » (Mc 9,31), il le regarde, il le voit, il l’écoute. En serviteur du Père, il fait ce qu’il voit faire au Père, il dit ce qu’il a vu auprès du Père, et aussi ce que le Père lui dit : « Je dis ce que j’ai vu chez mon Père » (Jn 8,38), « je dis ce que le Père m’a enseigné » (Jn 8,28).

Le compagnonnage de Jésus avec son Père est donc au cœur de son Mystère. Jésus est tout entier tourné vers le Père, il ne cesse de le regarder, de l’écouter, il est tout entier à son service, ne cherchant qu’une seule chose : accomplir sa volonté, dans une obéissance parfaite… « Et Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,3-6)…

Mais ce Mystère d’un « être avec… », « d’un être auprès de… », « d’un être tourné vers » un Autre que Lui-même, Jésus en parle aussi avec d’autres expressions qui peuvent sembler incompatibles avec les premières. En effet, Jésus le Fils, « l’Unique Engendré » (Jn 1,18), est le seul à être « qui » il est. Le Fils n’est pas le Père, et le Père n’est pas le Fils. A ce titre, le Père et le Fils, en tant que Personnes divines uniques, sont toujours en face à face. De ce point de vue, le Père n’est pas dans le Fils, et le Fils n’est pas dans le Père : le Père, lui qui est le seul à être le Père, est face à face avec un autre que Lui-même, le Fils, qui, de son côté, est lui aussi le seul à être le Fils. Et pourtant, Jésus nous dit : « Le Père », ce Père que je ne suis pas, ce Père qui est un autre que moi-même, « est en moi et moi, je suis dans le Père ». C’est ce qu’il affirme par deux fois à Philippe après lui avoir déclaré : « Nul ne vient au Père que par moi. Si vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père ; dès à présent vous le connaissez et vous l’avez vu. Philippe lui dit : « Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit. » Jésus lui dit : Voilà si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ? Qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : Montre-nous le Père ! ? Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même : mais le Père demeurant en moi fait ses œuvres. Croyez-m’en ! je suis dans le Père et le Père est en moi. Croyez du moins à cause des œuvres mêmes » (Jn 14,6-11).

Le Père n’est pas le Fils, le Fils n’est pas le Père ; à ce titre, ils sont toujours en face à face… Et pourtant, « le Père est dans le Fils, et le Fils est dans le Père », nous dit Jésus plusieurs fois. Comment donc harmoniser ce qui semble si contradictoire ? Nous touchons ici aux conséquences éternelles de l’engendrement éternel du Père par le Fils, « dès avant la fondation du monde » (Jn 17,24), « avant tous les siècles » (Crédo), et donc avant que le temps n’existe… « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même… Ainsi, je vis par le Père » (Jn 5,26 ; 6,57), nous dit Jésus. Et pourquoi ? « Car le Père aime le Fils et il a tout donné en sa main » (Jn 3,35), tout, tout ce qu’il est, tout ce qu’il a : « Tout ce qu’a le Père est à moi » (Jn 16,15 ; 17,10). Le Père est Dieu ? Le Père aime le Fils, et de toute éternité, il se donne à lui, lui donnant ainsi gratuitement, par amour, d’être « Dieu né de Dieu, vrai Dieu né du vrai Dieu » (Crédo). « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) ? Le Père aime le Fils, se donne totalement à lui, en tout ce qu’Il Est, lui donnant ainsi, gratuitement, par amour, d’être « Lumière née de la Lumière » (Crédo). Qui voit la Lumière du Fils voit donc la Lumière du Père, car il s’agit dans les deux cas de la même réalité spirituelle. C’est ainsi que Jésus peut dire : « Qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14,9), alors même que le Père n’est pas le Fils et que le Fils n’est pas le Père… « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16) ? « Tu es mon Fils Bien Aimé », lui dit le Père, « en toi j’ai mis tout mon amour » (Mc 1,11), tout ce que Je Suis. Ainsi, par ce Don total que le Père ne cesse de faire au Fils, tout ce qu’Est le Père, le Fils l’Est aussi en tant qu’il le reçoit du Père. Jésus peut alors dire : tout ce qui Est « en moi », tout ce qui me constitue, ma Plénitude d’Être et de Vie, tout cela Est aussi « en toi », Père, puisque le Fils reçoit tout du Père en « Unique Engendré » (Jn 1,18), « engendré non pas créé, né du Père avant tous les siècles » (Crédo). A ce titre, même si le Père n’est pas le Fils, et si le Fils n’est pas le Père, tout ce qui Est dans le Père Est dans le Fils, en tant que le Père le donne au Fils de toute éternité. Et tout ce qui Est dans le Fils Est dans le Père, en tant que le Fils le reçoit du Père de toute éternité… En considérant donc cette Plénitude d’Être et de Vie qui le constitue tout entier, le Fils peut donc dire qu’il Est dans le Père et que le Père Est en Lui, alors même qu’ils sont toujours en face à face…

Le talent de St Jean est tel qu’il n’a besoin que de quelques mots pour exprimer ce Mystère de Communion du Père et du Fils, bien distincts l’un de l’autre, mais dans l’unité d’un même Esprit (cf Ep 4,3) : « Moi et le Père, nous sommes un » (Jn 10,30). En français, nous avons deux genres : le masculin et le féminin. En grec, il en existe trois : le masculin, le féminin et le neutre. Le masculin renvoie à des personnes de sexe masculin, avec énormément d’exceptions… Le féminin renvoie à des personnes de sexe féminin, avec énormément d’exceptions… Le neutre renvoie au domaine des choses, des réalités non personnifiées, avec énormément d’exceptions… Et en Jn 10,30, pour écrire « un », St Jean n’a pas utilisé le masculin, ce qui aurait voulu dire que le Père et le Fils n’auraient en fait été qu’une seule et même Personne, mais un neutre qui renvoie donc à une réalité non personnifiée, ici, ce que sont le Père et le Fils de toute éternité : « Amour » (1Jn 4,8.16), « Esprit » (Jn 4,24), « Lumière » (1Jn 1,5). Le Père et le Fils sont « un » en tant qu’ils sont unis l’un à l’autre dans la Communion d’un même Esprit, d’une même Lumière, d’un même Amour, en un mot d’une même Plénitude divine d’Être et de Vie, le Père la donnant au Fils de toute éternité, le Fils la recevant du Père de toute éternité…

Ainsi, le Père et le Fils sont bien l’un en face de l’autre, l’un auprès de l’autre, l’un avec l’autre, bien distincts l’un de l’autre, et pourtant, ils sont unis au niveau de leur Être même dans la communion d’une même Plénitude spirituelle (« Dieu est Esprit » (Jn 4,24), le Père la donnant au Fils, gratuitement, par Amour, l’engendrant ainsi en Fils, le Fils la recevant gratuitement du Père, dans l’Amour. La relation qui existe ainsi entre les deux est vitale, existentielle, le Fils n’étant rien sans le Père…

Alors, si, à un instant du temps, le Fils a assumé notre nature humaine, « corps, âme et esprit » (1Th 5,23), son esprit d’homme était pleinement uni à sa Plénitude spirituelle éternelle, mais cette réalité, invisible par nature à nos yeux de chair, ne se laisse percevoir qu’au regard du cœur, au regard de la foi… Et bien sûr, là où est le Fils, là est le Père, avec lui, auprès de lui, uni à lui dans la communion d’un même Esprit… Ainsi, « celui qui m’accueille, ce n’est pas moi qu’il accueille mais celui qui m’a envoyé »…

D. Jacques Fournier

 

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« Recevez l’Esprit Saint du Père des Miséricordes »…

« Soyez miséricordieux comme le Père est miséricordieux »

Dieu Père (Giovanni Battista Cima) 2

Que Dieu soit Père et qu’il soit Miséricordieux, le prophète Jérémie l’affirmait dès le 6° siècle avant JC :

« Reviens rebelle Israël, oracle du Seigneur, car JE SUIS miséricordieux.

Reconnais seulement ta faute (il la connaît donc déjà parfaitement

                                                                             et Israël va l’apprendre de sa bouche…) :

tu t’es révoltée contre le Seigneur ton Dieu,

et tu n’as pas écoutée ma voix.

Et moi qui m’étais dit : comment te placerais-je au rand des fils ?

          Je te donnerai une terre de délices, l’héritage le plus précieux d’entre les nations.

          Je me disais : « Vous m’appellerez « Mon Père »,

          et vous ne vous séparerez pas de moi. »

          Mais non… Ils m’ont abandonné, ils ont encensé d’autres dieux,

          Ils se sont prosternés devant l’œuvre de leurs mains…

          Et maintenant, vois ta terre en solitude, tes villes incendiées…

          N’as tu pas provoqué cela pour avoir abandonné le Seigneur ton Dieu,

          alors qu’il te guidait sur ta route ?

          Comprend et vois comme il est mauvais et amer

               d’abandonner le Seigneur ton Dieu.

          Ai-je été un désert pour Israël, ou une terre ténébreuse ?

          Pourquoi mon Peuple dit-il : « Nous vagabondons, nous n’irons plus à toi ? »

          Une vierge oublie-t-elle sa parure, une fiancée sa ceinture ?

          Mais mon peuple m’a oublié depuis des jours sans nombre…

          Ah ! Comme tu t’es tracée un bon chemin pour quêter l’amour ! » (Jr 2-3)

Dieu-Amour

     Et Jésus ne fera que nous rappeler que « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16), Amour Créateur, Amour Pur, Amour qui ne fait que poursuivre le bien de l’être aimé, Amour qui se réjouit de sa joie, Amour qui s’attriste de ses peines…

     Et c’est bien ainsi dont les prophètes Jérémie et Sophonie parlaient déjà de l’Amour :

« Je vais les rassembler de tous les pays où » ils se sont égarés par suite de leurs fautes.

« Je les ramènerai en ce lieu et les ferai habiter en sécurité.

Ils seront mon peuple, et moi, je serai leur Dieu.

Je leur donnerai un seul cœur, un seul chemin, afin qu’ils me craignent chaque jour, pour leur bonheur et celui de leurs fils après eux.

Je conclurai avec eux une alliance éternelle :

je ne cesserai pas de les suivre pour les rendre heureux

et je mettrai ma crainte en leur cœur pour qu’ils ne s’écartent pas de moi.

J’aurai de la joie à les rendre heureux ;

en vérité, je les planterai dans ce pays, de tout mon cœur et de toute mon âme. »

          Oui, ainsi parle le Seigneur : « De même que » leurs fautes ont fait venir sur eux

          « tout ce grand malheur,

          de même, je fais venir sur eux tout le bonheur dont je parle » (Jr 32,37-42).

« Pousse des cris de joie, fille de Sion ! Éclate en ovations, Israël !

Réjouis-toi, de tout ton cœur bondis de joie, fille de Jérusalem !

Le Seigneur a levé les sentences qui pesaient sur toi, il a écarté tes ennemis.

Le roi d’Israël, le Seigneur, est en toi. Tu n’as plus à craindre le malheur.

Ce jour-là, on dira à Jérusalem : « Ne crains pas, Sion ! Ne laisse pas tes mains défaillir !

Le Seigneur ton Dieu est en toi, c’est lui, le héros qui apporte le salut.

Il aura en toi sa joie et son allégresse, il te renouvellera par son amour ;

il exultera pour toi et se réjouira, comme aux jours de fête. »

J’ai écarté de toi le malheur, pour que tu ne subisses plus l’humiliation.

Me voici à l’œuvre contre tous tes oppresseurs.

En ce temps-là je sauverai la brebis boiteuse, je rassemblerai celles qui sont égarées…

          En ce temps-là je vous ramènerai, en ce temps-là je vous rassemblerai…

          je ramènerai vos captifs, et vous le verrez, – dit le Seigneur » (So 3,14-20).

BonPasteur

          D’un côté, Dieu est donc « Père » de tous les hommes, « lui qui les a tous créés à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28), pour qu’ils vivent en relation avec Lui, comblés par Lui. En effet, ce « Père » est « Amour » : il ne cesse de désirer, de vouloir, de poursuivre le bien de tous ces hommes, ses enfants, qu’il a créés par Amour pour qu’ils connaissent le Bonheur en accueillant, en leur cœur, la Plénitude de ses Bienfaits…

     Mais les hommes se sont détournés de lui, et du même coup, ils se sont privés du Don de Dieu. « Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu » (Rm 3,23). « Souffrance et angoisse pour toute âme humaine qui commet le mal » (Rm 2,9). « Souffrance, angoisse » et « tristesse », comme pour ce jeune homme riche qui ne répond pas à l’appel que lui avait lancé Jésus, « Suis-moi ! », car il avait de grands biens. Alors, « il repartit, tout triste » (Lc 18,18-23)…

     Mais rien n’empêche Dieu d’Être, de son côté, ce qu’Il Est depuis toujours et pour toujours : « Dieu est Amour » et il veut, encore plus, le bien de l’homme pécheur qui souffre et qui est triste par suite de ses fautes : « Quand nous sommes infidèles, Dieu, Lui, reste à jamais fidèle, car il ne peut se renier Lui-même » (2Tm 2,13), écrit St Paul, et Il Est Amour, Il n’Est qu’Amour et donc recherche inlassable du bien de l’autre…

     Telle est ce que nous appelons « la Miséricorde de Dieu » : la découverte, infiniment heureuse, du fait que nous sommes aimés au cœur même de notre misère et de notre indignité par « Quelqu’un » qui, de son côté, ne poursuit, ne désire, ne travaille qu’à notre Bien le plus profond.

Esprit Saint

     Nous avons tous été créés pour être « comblés » par le Don de Dieu, le Don gratuit de l’Amour, un Don qui Est Plénitude de Vie, de Paix, de Joie ? C’est ce que Jésus, le Fils éternel du Père, vient nous proposer au Nom de son Père, et cela gratuitement, par amour, pour notre seul bien : « Si tu savais le Don de Dieu » dit-il à cette femme samaritaine qui vivait maritalement avec un homme, et c’était, déjà, son sixième ! Et pour nous aider à l’accueillir, il ca commencer par nous proposer d’effacer tout notre passé d’infidélités par son pardon offert en surabondance, sans regarder à la dépense, son seul but étant notre bonheur. Alors si quelque chose nous inquiète, quoique ce soit, aussi énorme cela puisse-t-il être, Jésus nous invite à l’offrir à ce Dieu immense, infini, Lui qui a créé l’infini de l’Univers qui nous entoure, Lui qui est Amour, tout aussi infini… Et nous serons pardonnés, nos fautes disparaîtront, il n’y aura plus rien, car Jésus est « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29), tous les péchés, de tous les hommes, de tous les temps, et cela, il l’a fait une fois pour toutes en s’offrant en sacrifice sur le bois de la Croix pour chacun d’entre nous, pour nous tous. Infini de l’Amour qui rendra possible, si nous y consentons, l’accomplissement total de la volonté de Dieu : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité. En effet, il n’y a qu’un seul Dieu ; il n’y a aussi qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous » (1Tm 2,3-6). Alors, « j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main. Et ils s’écriaient d’une voix forte : « Le salut appartient à notre
fouleDieu qui siège sur le Trône et à l’Agneau ! »Tous les anges se tenaient debout autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants ; se jetant devant le Trône, face contre terre, ils se prosternèrent devant Dieu. Et ils disaient : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! » L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? » Je lui répondis : « Mon seigneur, toi, tu le sais. » Il me dit : « Ceux-là viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau. C’est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, et le servent, jour et nuit, dans son sanctuaire. Celui qui siège sur le Trône établira sa demeure chez eux. Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif, ni le soleil ni la chaleur ne les accablera, puisque l’Agneau qui se tient au milieu du Trône sera leur pasteur pour les conduire aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux
» (Ap 7,9-17).

Coeur de Jésus- Paray le Monial     Jésus, le Fils, est donc « l’Agneau » qui se propose d’être « le Pasteur » de tous les hommes « pour les conduire aux sources des eaux de la vie ». Et quelles sont-elles ? Ce sont les Sources de l’Amour qui ne cesse de se donner gratuitement, de se proposer gratuitement, de s’offrir gratuitement à toutes ses créatures, pour leur seul bien, leur seul bonheur, leur seule joie. Le Pape François dit ainsi : « L’amour de Dieu est gratuit. Il ne nous demande rien en échange ; il demande seulement de l’accueillir » (Juin 2015). Ecoutons ce que Jésus dit à la Samaritaine : « Si tu savais le Don de Dieu, et qui est celui qui te dit : « Donne-moi à boire », c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’Eau vive » (Jn 4,10). Et quelle est-elle cette « Eau Vive ». St Jean lui-même nous donne la clé de cette image au chapitre sept de son Evangile, lorsque Jésus, debout, cria : « « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l’Écriture : De son cœur couleront des fleuves d’eau vive. » En disant cela, il parlait de l’Esprit Saint qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en lui » (Jn 7,37-39). Et de fait, Ressuscité, il dira à ses disciples : « Recevez l’Esprit Saint » (Jn 20,22).

     Tel est le Don de Dieu par excellence, le Don de l’Amour, offert gratuitement à notre foi, un Don qui est appelé à devenir en nous la Source de notre vrai bonheur, de notre vraie vie, de notre Plénitude, inégalée, incomparable, car elle est celle de Dieu Lui-même : « Quiconque boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif. L’eau que je lui donnerai deviendra en lui source d’eau jaillissant en vie éternelle » (Jn 4,13-14).

  Jésus Sr Faustine   Cette vie n’est rien de moins que celle que Jésus reçoit du Père de toute éternité. « Si tu savais le Don de Dieu », dit-il à la Samaritaine. Il le connaît bien, Lui, car c’est par ce Don que le Père l’engendre en Fils de toute éternité. « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même. Je vis par le Père » (Jn 5,26 ; 6,57), et cela, depuis toujours et pour toujours, en « Fils né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu, vrai Dieu né du vrai Dieu, engendré non pas créé » (Crédo), « engendré » par ce Don du Père, le Don de « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63 ; 2Co 3,6), cet « Esprit qui est vie » (Ga 5,25), « Eau Vive »… Alors si nous acceptons de recevoir à notre tour ce Don par lequel le Père engendre son Fils, nous serons nous aussi engendrés à cette même Plénitude, et notre vocation de créatures « appelées à reproduire l’image du Fils » (Rm 8,29) s’accomplira…

     « Quand vous priez, dites : Père » (Lc 11,2). Avec moi, tournez-vous vers le Père (Jn 1,18) pour recevoir avec moi le Don du Père, et avec Lui, la Plénitude de ma vie, de ma paix, de ma joie… « De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi… Amen, amen, je vous le dis : il a la vie éternelle, celui qui croit… Je vous laisse la paix, c’est ma paix que je vous donne… Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite… Recevez l’Esprit Saint » (Jn 6,57.47 ; 14,27 ; 15,11 ; 20,22)…

                                                                                                                             D. Jacques Fournier




L’EXISTENCE PASCALE DU CHRETIEN

bapteme enfant« Ignorer-vous que, baptisés dans le Christ, c’est dans sa mort que tous nous avons été baptisés ?

Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle. Car si c’est un même être avec le Christ que nous sommes devenus par une mort semblable à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection semblable ; comprenons-le, notre vieil homme a été crucifié avec lui, pour que fût détruit ce corps de péché. Car celui qui est mort est quitte du péché. Mais si nous sommes morts avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui, sachant que le Christ, une fois ressuscité des morts, ne meurt plus, que la mort n’exerce plus de pouvoir sur lui. Sa mort est une mort au péché, une fois pour toutes ; mais sa vie est une vie en Dieu. Et vous de même : regardez-vous comme morts au péché et vivants pour Dieu dans le Christ Jésus » (Rm 6, 3-11)

Le baptême nous incorpore au Christ et nous associe à sa Pâque, c’est-à-dire à sa mort et à sa résurrection. Et tout d’abord à sa mort. Que veut dire « être baptisé dans la mort du Seigneur » ?

L’expression est étonnante.

croix_tripleLa mort, celle de Jésus comme la nôtre, est un phénomène physique qui ne dure que l’espace de quelques secondes. Pourtant nous savons que la mort de Jésus sur la croix ne fut que l’achèvement d’une existence déjà marquée de cette mort et à l’avance acceptée comme la suprême expression d’une constante manière de mourir à tout ce qui, dans sa vie, eût contrarié la volonté du Père.

« Ma nourriture, disait-il, est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé » (Jn 4, 34) et, à la veille de sa Passion : « Non ce que je veux, mais ce que tu veux, Père » (Mc 14, 36). Il y a donc en lui, comme en chacun de nous, la mort que l’on subit comme le terme de la vie, et la mort que l’on choisit de vivre en pleine existence. Etre incorporé par le baptême à la mort du Christ, c’est donc apprendre à mourir de cette double mort.

LA MORT TOUJOURS PRESENTE

Envisageons d’abord la mort que l’on subit, la nôtre et celle des autres. Ma propre mort, bien avant d’être l’instant du dernier soupir, est une part essentielle et une donnée de mon aventure terrestre. Elle m’est déjà présente par la mort des autres en tant qu’elle me signifie la mienne et m’avertit qu’elle peut me surprendre à tout moment.

personne en méditationMais surtout elle me rejoint par la multitude des ses signes anticipés : la maladie et le vieillissement me préviennent que son œuvre est commencée et que déjà j’en porte les traces. Si je demeurais insensible à ces signes biologiques, d’autres ne manqueraient pas de m’agresser jour après jour, en particulier la contrariété et la contradiction des choses, je dirais même l’absurdité des choses. Il y a, en effet, une constante rupture entre, d’une part, le projet de vie et de plénitude que je porte en moi et, d’autre part, la réalité de ce qui m’arrive : je veux la joie et le bonheur, et je récolte la tristesse et parfois le désespoir ; je mûris et je prépare longuement un projet dans le domaine affectif ou professionnel, et je récolte l’échec. A mesure que je m’efforce de former en moi l’homme libre que je veux être, je me surprends asservi par toutes sortes d’esclavages issus de ma nature comme aussi de mon environnement social. Ici, nous rejoignons le niveau le plus profond : celui de la vie morale ; à cet égard, écoutons encore l’apôtre Paul : « Ce que je veux, je ne le fais pas ; mais ce que je hais, je le fais…  Vouloir le bien est, certes, à ma portée, mais non l’accomplir, car le bien que je veux, je ne le fais pas, mais le mal que je ne veux pas, je le commets ». Et l’Apôtre conclut : « Si je fais ce que je ne veux pas, c’est à cause du péché qui habite en moi » (Rm 7, 15-20) et qui est en moi l’expression de la mort.

Or, c’est déjà à cette mort-là que le Christ nous invite à mourir à longueur de vie. Et, par le baptême reçu dans la foi et revécu dans la liberté, il nous communique sa puissance de ressuscité pour mourir de la sorte avec lui : « Ne crains point, car ma puissance se déploie dans la faiblesse », confiait-il à Paul. « Nous le savons, déclare celui-ci : notre vieil homme a été crucifié avec le Christ pour que fût détruit le corps de péché et qu’ainsi nous ne soyons plus esclaves du péché » (Rm 6, 6)homme en prière

Mais si l’on peut, avec la force de la miséricorde et avec la puissance de l’Esprit, mourir au péché, on se demande comment on pourrait échapper au vieillissement, par exemple ; car les avancées biologiques de la mort paraissent irréversibles. Et pourtant, ainsi que nous le dirons plus loin, la jeunesse de l’esprit et du cœur peut opérer une croissance spirituelle capable d’aller à contre-courant de la sclérose des membres et de toutes les « puissances de diminution » : « Même si notre homme extérieur se détruit, écrit encore Paul, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour » (2 Co 4, 16).

Il y a aussi la mort des autres, je veux dire leur disparition ou leur déchéance qui, à cause du lien qui nous unit à eux, nous atteint à cette profondeur de nous-mêmes qu’on appelle le « cœur ». S’il y a une façon de souffrir de leur mort, il y a également une manière de mourir, avec le Christ, au désespoir qu’elle engendre. Nous savons ce que peut contenir à la fois d’atrocité crucifiante, mais aussi de sursaut spirituel, la mort d’un enfant.

MOURIR AU VIEL HOMME

Voilà qui nous amène d’emblée à envisager cette autre forme de la mort : celle que nous choisissons librement de vivre, si j’ose dire : mourir avec Jésus Christ à tout ce qui n’est pas de Dieu, à tout ce qui, parce que source de division et de désagrégation ; s’oppose à l’amour qui est en Dieu. C’est cela mourir au vieil homme en vue de revêtir une créature nouvelle qui tend à rejoindre la stature même du Christ.

prendre sa croixEcoutons ce que saint Paul écrivait aux gens de Corinthe : « Nous portons partout et toujours en notre corps les souffrances de mort de Jésus, pour que la vie de Jésus soit elle aussi, manifestée dans notre corps. Quoique vivants, en effets, nous sommes continuellement livrés à la mort à cause de Jésus, pour que la vie de Jésus soit elle aussi manifestée dans notre chair mortelle » (2 Co 4, 10-11). Ce que le Christ en Matthieu, dit en termes très simples : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renonce, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive » (Mt 16, 24) ou encore : « Qui aura trouvé sa vie la perdra, et qui aura perdu sa vie à cause de moi, la trouvera » (Mt 10, 39). Commentant ce propos, saint Jean de la Croix écrit ceci : « Oh ! Qui pourrait faire comprendre jusqu’à quel degré notre Seigneur veut que ce renoncement parvienne ! Il faut certainement qu’il soit comme une mort, un anéantissement volontaire par rapport à tout ce qui est du temps, de la nature et de l’esprit : et là est la source de tous les biens, comme Notre Seigneur le déclare par ces paroles » (Montée au Carmel, chap 6). En vérité, cela ne revient-il pas d’abord à mourir aux multiples idoles qui encombrent nos vies aux dépens du seul vrai Dieu, je veux dire à toutes ces réalités éphémères et périssables auxquelles nous serions tentés de subordonner nos existences tout entières : l’argent, le pouvoir, l’idéologie politique, les affaires, le métier… Rappelons-nous cette parole tombée naguère du Sinaï : « Tu n’auras point d’autres dieux devant ma face ! »

homme en prièreMourir à tout cela n’a, bien sûr, de sens que par rapport à l’unique commandement de l’amour. Et celui-ci est le seul critère de la validité d’une telle mort : l’amour de Dieu pour son peuple, dont le baptême nous fait être les relais. C’est bien cela le sacrifice : « sacrum facere », l’acte par lequel j’élève ma vie à l’ordre du sacré, l’initiative par laquelle je me prive en vue de partager et ainsi me soumettre à Celui qui est « l’Eternel jaillissement hors de Lui-même ». L’Amour qui partage consent à cette manière de mort qui s’appelle « renoncement ».

Si nous avons été baptisés dans la mort du Christ, « c’est afin que, comme le Christ est ressuscité d’entre les morts, nous menions semblablement, nous aussi, une vie nouvelle »… et dès à présent.

PAQUE : L’AVENTURE DE NOTRE VIE

chemin_eclaireVoilà bien le « passage » – ce qui traduit le mot de « Pâque » – : passer d’une vie à l’autre. Sans doute, s’agit-il, au bout du compte, de passer, par mode de mutation radicale, de l’existence larvaire et brumeuse qui est notre condition présente, à la vie pleine et lumineuse du Christ ressuscité dans la gloire du Père, et cela par le franchissement de la mort charnelle. Mais cette vie de plénitude ne peut être que l’épanouissement final d’une existence elle-même déjà pascale. Notre Pâque définitive ne saurait être qu’à la mesure de son anticipation dans la durée terrestre. Pâque est l’aventure de notre vie, comme elle fut l’aventure du peuple hébreu, marchant à coups de sursauts et de renouvellements, depuis les rives de l’esclavage jusqu’aux rivages de la liberté, au travers des eaux de la mer Rouge qui marquèrent le départ et les eaux du Jourdain qui consacrèrent l’arrivée.

Baptisés pour passer un jour de la mort à la Vie du ressuscité, nous le sommes donc aussi pour passer, dès aujourd’hui et indéfiniment, du vieil homme à l’homme nouveau, de l’esclave du péché à l’homme libéré, j’oserais dire : de l’état de mort à l’état de vie par le moyen de la mort consentie. C’est dire que le baptême nous engage et nous entraîne dans ce mouvement ou ce rythme de dépassement et de renaissance ininterrompue, fait de mort et de vie, et de vie nouvelle surgissant sans cesse de la mort au vieil être, dans le Christ victorieux de toute mort. Il est donc vrai de dire que, si notre vie de baptisé est, ainsi que nous l’avons dit, une manière de mort quotidiennement, elle est aussi déjà une existence de salut, de salut anticipé : elle l’est par la puissance du Christ qui nous habite par l’Esprit et à qui tout est possible, même l’apparemment impossible ; elle l’est par la transformation que cette force opère au cœur de notre liberté : la résurrection de Jésus ne transparaît-elle déjà au travers de cette capacité de jeunesse et de renouvellement dont témoignent la disponibilité, l’accueil, le partage, l’ouverture, l’intelligence des situations ? Une telle jeunesse conquise dépasse la jeunesse de l’âge, pour atteindre son sommet aux approches de la mort, c’est-à-dire au seuil de l’éternelle jeunesse. Mais cette conquête est évidemment au prix d’une mort constante du vieil homme, de cet homme immobile et replié dans le « chacun pour soi », dans le péché. C’est cela : mourir et renaître en Jésus Christ.

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AU SOIR DE LA GRANDE MUTATION

Alors, au soir de la grande mutation, au jour de la mort charnelle, encore présente dans le monde quoique vaincue, « la vie ne sera pas détruite, mais transformée », ainsi que le proclame la préface de la messe des funérailles. Disons que cette vie, vécue selon le rythme pascal ou baptismal de mort et de résurrection, trouvera sa plénitude par mode de transfiguration. Et c’est bien là le sens de cet autre propos de Paul aux Romains : « Nous savons que jusqu’à maintenant la création tout entière gémit dans les douleurs de l’enfantement… Mais elle attend avec impatience la révélation des fils de Dieu… car elle doit être libérée de l’esclavage de la corruption pour connaître la glorieuse liberté des enfants de Dieu… Certes si nous possédons déjà les prémices de l’Esprit, ce n’est encore qu’une espérance que nous sommes sauvés. Et nous attendons avec constance de voir ce que nous espérons » (Rm 8, 18-25). Voir ce que nous espérons ? Paul précise aux Corinthiens : « Nous ne voyons à présent que dans un miroir, en énigme ; mais alors ce sera le face à face. A présent je connais d’une manière partielle : mais alors je connaitrai comme je suis connu » (1 Cor 13, 12). Pourtant, si la foi et l’espérance ne sont que des vertus passagères propres à notre régime actuel et, par conséquent, appelées à disparaître devant la pleine possession de leur objet, la charité, elle, demeure, car « elle ne passera jamais » : l’amour qui jaillit de Dieu, l’amour qui, avec Jésus Christ, s’oublie et se donne, constitue dès à présent en nous cette part éternelle qui déjà nous éternise.

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« Car si nous sommes devenus un même être avec le Christ par une mort semblable à la sienne, nous le serons aussi par une semblable résurrection ». Tel est donc l’ultime « passage » d’une existence pascale. Et ensuite ? Après, je ne sais plus. Nul ne peut savoir. Il me semble pourtant qu’un signe de cette béatitude nous est parfois accordé, afin de nous en donner le goût et l’impatience. Et ce signe, c’est la Joie !

DES SIGNES AVANT-COUREURS

Qui d’entre nous, sans être un mystique, n’a un jour éprouvé dans son existence une joie immense, une sorte de transport de joie, un instant de bonheur débordant jusqu’à nous faire passagèrement perdre le sentiment de la pesanteur et même le sens de l’espace et du temps ? Ce fut un peu comme une fenêtre ouverte sur l’éternité bienheureuse, mais qui bien vite, hélas ! s’est refermée. L’occasion en fut, peut-être, la naissance d’un amour ou d’un enfant ou d’une vocation, ou simplement la soudaine et lumineuse intuition d’une certaine coïncidence entre le projet de plénitude que nous portons enfoui au fond de nous et son reflet dans la réalité. Cette expérience éblouissante pour signifier et déjà anticiper le destin définitif de l’homme sauvé, les apôtres l’ont un jour éprouvéé au sommet du Thabor en présence de Jésus transfiguré. Cette vision n’aurait-elle pas été pour Pierre, Jacques et Jean le début d’une existence nouvelle toute entière tendue vers la réalisation définitive et globale de ce qu’ils ont entendu, touché, vu, contemplé et surtout vécu du Christ mort et vivant, afin qu’à notre tour nous entrions, à la suite, dans ce dynamisme de la Pâque. C’est à peu près en ces termes que saint Jean, le témoin par excellence, commence sa première épître. Et il en achève l’avant-propos par ces mots : « Ceci, nous vous l’écrivons pour que notre joie et la vôtre soient complètes. »

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Pierre BOCKEL

Archiprêtre de la cathédrale de Strasbourg

 

 

 

 

 




La Passion et la Croix du Christ, Révélation de l’Amour infini de Dieu pour tous les hommes (D. Jacques Fournier)

« Cela peut paraître curieux », écrit Théophile Penndu dans son livre « Jésus Sauveur », « de proposer comme guide, à ceux qui veulent parvenir au bonheur, un homme qui a été rejeté, qui est mort comme un criminel sur une croix. Mais grâce à leur foi en la résurrection, les chrétiens affirment que Jésus nous sauve, que sa vie n’est pas un échec et qu’elle aboutit à une vie de bonheur sans fin également promise à ceux qui accepteront de vivre comme lui ».

Alors deux discours doivent sans cesse être présents à notre esprit, car avec le Christ, ils ne font qu’un… Jésus, en effet, parlera de « béatitude » tout en évoquant des situations de souffrance…

Joie en Christ

Lc 6,20-22 : « Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous.

21 – Heureux, vous qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés.

Heureux, vous qui pleurez maintenant, car vous rirez.

22 – Heureux êtes-vous, quand les hommes vous haïront,

quand ils vous frapperont d’exclusion et qu’ils insulteront

et proscriront votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme.

23 – Réjouissez-vous ce jour-là et tressaillez d’allégresse,

car voici que votre récompense sera grande dans le ciel.

C’est de cette manière, en effet, que leurs pères traitaient les prophètes. »

… et il invitera ses disciples à prendre leur croix à sa suite pour trouver avec elle la joie du salut…

Christ Ressuscité - Lisieux

Christ Ressuscité – Basilique de Lisieux

Lc 9,23-24 : Jésus « disait à tous : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix chaque jour, et qu’il me suive. Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi, celui-là la sauvera ».

Lc 14,27 : « Quiconque ne porte pas sa croix et ne vient pas derrière moi

ne peut être mon disciple. »

Jn 15,11 : « Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit complète »…

Autant de situations paradoxales dont le point de convergence est à chercher dans la dynamique de Dieu Lui-même : celle de l’Amour… Et Jésus en fut le plus parfait exemple…

Therese

« Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même » (Ste Thérèse de Lisieux)…

Se donner, toujours et partout, pour le bien de l’autre, quelle que soit son attitude à notre égard… « Il est passé partout en faisant le bien » (Ac 10,36-43). Et c’est bien pour notre bonheur que Jésus nous a ainsi parlé, qu’il a vécu avec nous, agi pour nous, nous donnant ainsi l’exemple de l’amour jusqu’à la fin…

« Jésus n’est ni utopiste ni un doux rêveur. Il est l’incarnation d’un Dieu qui est Amour. Il est crédible car il a aimé jusqu’au bout, il a vaincu la haine. Aucune loi, même celle relative au Sabbat, n’a pu l’empêcher de sauver ceux qui en avaient besoin…

La liturgie chrétienne peut ainsi nous parler de « la passion qui nous sauve » car au cours de sa passion, au milieu des pires souffrances, Jésus s’est montré plus fort que toutes les méchancetés ou injustices. Aucune force hostile n’a pu avoir raison de son amour qui va Dieu-Amourjusqu’à pardonner à ses bourreaux ». « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). « C’est là surtout que nous pouvons vérifier qu’il est sauveur. Grâce à lui, nous savons que nous sommes aimés même si nous ne le méritons pas. Même si nous le renions, son amour à lui restera fidèle et nous permettra de nous relever. Sa manière de vivre est le chemin du salut pour tous les hommes de tous les temps. Ceux qui depuis vingt siècles se sont efforcés de marcher sur ses traces ont pu expérimenter, parfois à travers doutes et inquiétudes, qu’ils s’en trouvaient grandis et qu’ils contribuaient à rendre le monde plus humain ».

En effet, « être sauvé, c’est devenir humain en développant toutes ses potentialités, en refusant de s’enfermer sur soi-même pour s’ouvrir aux autres, en cherchant à progresser toujours davantage. Jésus est justement celui qui a su faire confiance et aimer assez les autres pour qu’ils puissent vivre debout. Au lieu de juger et d’enfermer les gens dans leur passé ou dans leur situation sociale ou religieuse, il a su voir en eux le positif, les possibilités de progrès. Les choix de vie de Jésus visent à libérer l’homme.

On est sauvé quand on se sait aimé. Jésus est habité par une force d’amour : la Présence de Dieu qu’il appelait « mon Père » ou plus familièrement « Abba » (Papa). Il a aimé jusqu’à en mourir. Il a accompli jusqu’au bout la mission de salut qui était la sienne. Croire en quelqu’un, c’est lui faire confiance sans arrière-pensée. Lui déclarer : « Je crois en toi », c’est lui dire : « Je suis sûr que je peux m’appuyer sur toi et que tu ne m’abandonneras jamais. » » C’est ce que Jésus, l’Agneau sans tâche, a vécu, dans la foi, avec son Père. C’est ce que nous sommes tous invités à vivre, nous pécheurs, marqués par la fragilité d’une volonté si souvent vacillante. Mais l’Amour Miséricordieux du Christ ne nous fera jamais défaut, toujours offert pour le meilleur de l’instant présent de notre vie…

Christ Rédempteur-Rio-de-JaneiroAinsi, « Jésus a indiqué la source du salut : l’amour gratuit et universel de Dieu. Il est des gens qui pensent que si le salut est un don de Dieu, l’homme n’a plus rien à faire. Le Dieu de Jésus n’est pas aliénant, au contraire ! Il est une force de transformation, de libération ; s’ouvrir à son action, c’est entrer dans un mouvement de salut. Le Dieu de Jésus n’est ni le supplément, ni encore moins le concurrent de l’homme. Il propose le salut en offrant son amour, mais pour porter des fruits de salut, cet amour doit être accueilli et mis en œuvre. Etre sauvé, c’est, comme Jésus, vivre avec et de ce Dieu source de toute vie et de tout amour »…

« Père, glorifie ton Fils afin que ton Fils te glorifie » (Jn 17,1)… Père, fortifie ton Fils afin que ton Fils puisse être jusqu’au bout, jusqu’à l’extrême du don de soi (Jn 13,1), le témoin de cet Amour gratuit et inconditionnel de Dieu pour tous les hommes, quels qu’ils soient, quoi qu’ils fassent, puissent-ils tuer sur une Croix le Fils, l’Unique Engendré…

saint-espritAnimé lui aussi par cette Force d’Amour qu’est l’Esprit Saint, Pierre pourra, après la Pentecôte, y puiser le courage d’être à son tour le témoin de cet Amour devant ceux-là mêmes qui ont contribué à faire mourir Jésus… Avec bienveillance, il commencera par les appeler « frères », et puis, il reprendra à son compte une des dernières paroles du Christ sur la Croix. Il avait dit en effet : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font »… Et Pierre dira de son côté : « Frères, je sais que c’est par ignorance que vous avez agi ainsi »… Puis, il leur annoncera la Bonne Nouvelle de cet Amour de Miséricorde qui, envers et contre tout, ne désire et ne cherche que notre bien… Ils l’ont tué ? Le Père l’a ressuscité, et il l’a envoyé les bénir et leur offrir le pardon de toutes leurs fautes ! Mais pour le recevoir, ils devront bien sûr se détourner de tout mal… Alors, de ce pardon reçu, pourra renaître une humanité nouvelle où régnera non pas la haine, mais l’Amour, non pas la méchanceté, mais la Bonté… Car tous, par ce pardon, recevront d’avoir part à un Unique Amour, une Unique Bonté, un Unique Esprit qui leur donnera enfin, petit à petit, de s’aimer les uns les autres comme le Christ Lui-même nous a aimés (Jn 15,12)…

Ac 3,17-26 : «Cependant, frères,

je sais que c’est par ignorance que vous avez agi, ainsi d’ailleurs que vos chefs.

18 – Dieu, lui, a ainsi accompli ce qu’il avait annoncé d’avance

par la bouche de tous les prophètes, que son Christ souffrirait.

19 – Repentez-vous donc et convertissez-vous, afin que vos péchés soient effacés,

20 – et qu’ainsi le Seigneur fasse venir le temps du répit.

Il enverra alors le Christ qui vous a été destiné, Jésus…

25 – Vous êtes, vous, les fils des prophètes et de l’alliance

que Dieu a conclue avec nos pères quand il a dit à Abraham :

Et en ta postérité seront bénies toutes les familles de la terre.

26 – C’est pour vous d’abord que Dieu a ressuscité son Serviteur

et l’a envoyé vous bénir,

du moment que chacun de vous se détourne de ses perversités. »

                                                                                         D. Jacques Fournier

 

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La Passion et la Croix du Christ, Révélation de l’Amour infini de Dieu pour tous les hommes

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Vivre du Dieu « Source de Vie »…

« Dieu est Esprit » nous dit St Jean (Jn 4,24) et il a créé l’homme « esprit » pour lui donner de pouvoir participer à ce qu’Il Est Lui-même. Notre « esprit » peut ainsi être comparé à une « capacité spirituelle » que Dieu désire « remplir » de ce qu’Il Est Lui‑même : son Esprit qui est Vie…

Le prophète Jérémie présente ainsi deux fois « Dieu » comme étant « une Source d’Eau Vive » :

Jr 2,13 : « Mon peuple a commis deux crimes :

Ils m’ont abandonné, moi la source d’eau vive,

pour se creuser des citernes,

citernes lézardées qui ne tiennent pas l’eau. »

Source 3

Jr 17,13 : « Espoir d’Israël, Yahvé,

tous ceux qui t’abandonnent seront honteux,

ceux qui se détournent de toi seront inscrits dans la terre,

car ils ont abandonné la source d’eaux vives, Yahvé. »

Le Psaume 36 présente également Dieu comme une Source :

Ps 36,10 : « En toi (Seigneur) est la source de vie,

par ta lumière nous voyons la lumière. »

St Jean reprendra l’image de l’Eau Vive en expliquant qu’elle représente l’Esprit de Dieu, et donc ce que Dieu Est en Lui-même :

Jésus Miséricordieux

 Jn 7,37-39 : « Le dernier jour de la fête, le grand jour,                                                     Jésus, debout, s’écria :

Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive,                                                      

              celui qui croit en moi !  

selon le mot de l’Écriture :                                                                                        

             De son sein couleront des fleuves d’eau vive.

Il parlait de l’Esprit                                                                                          

             que devaient recevoir ceux qui avaient cru en lui »…

Et puisque Dieu nous a tous créés pour être remplis de l’Eau Vive de son Esprit, tous les hommes ont un désir spirituel, une faim spirituelle, une soif spirituelle… Comme image, nous pouvons prendre notre corps qui a été créé pour vivre de ce qu’il reçoit : nourriture et boisson… Pour cela il dispose d’un « estomac » qui est « capacité corporelle » destinée à être remplie de ce pour quoi elle a été faite… Et lorsque notre « estomac » est vide, tout le corps réclame de la nourriture : nous avons faim, nous ne pouvons plus vivre pleinement, nous expérimentons une souffrance, un mal-être général… Par contre, quand il est plein, nous ressentons une impression de bien-être. Il en est de même de notre dimension spirituelle… Lorsque notre esprit ou notre cœur est vide des réalités spirituelles pour lesquelles il a été créé, nous expérimentons un manque, une faim, une soif de plénitude, le désir d’un bonheur profond qui n’est pas au rendez-vous, un mal-être difficile à exprimer, une tristesse générale mêlée de souffrance et d’angoisse… Et pourtant, Dieu n’a qu’un seul désir : le remplir, car il nous a tous créés pour cela…

C’est pourquoi le psalmiste exprime ce désir avec l’image de « la soif de Dieu », car il est une révélation indirecte de ce pour quoi nous avons tous été créés : pour être remplis de l’Esprit de Dieu, cette « Eau Vive » qui est Plénitude de Vie, de Paix et donc Bonheur profond, la seule qui peut combler notre soif profonde…

Cerf altéré - St Clément RomePs 42,2-3 :

« Comme un cerf altéré cherche l’eau vive,

        ainsi mon âme te cherche, toi, mon Dieu.

Mon âme a soif de Dieu, le Dieu vivant.

Quand pourrai-je m’avancer,

          paraître face à Dieu ? »

Or, comme le disait le prophète Jérémie, en abandonnant Dieu « Source d’Eau Vive », l’homme se prive par lui-même de la Plénitude de cette Eau Vive, la Plénitude de la Vie éternelle… Mais comme nous avons tous été créés pour être comblés, pour être heureux, l’homme va se lancer dans une quête éperdue de bonheur… Et il le cherchera dans une recherche effrénée des plaisirs de la vie, du pouvoir, de l’argent, des réalités matérielles… Mais s’il est sincère avec lui-même, il ne pourra que constater que le vrai bonheur n’est toujours pas au rendez-vous… Alors, faut-il « avoir » plus ? Il essaiera, sans résultats… Peut-être faut-il être plus haut placé dans la société ? Il essaiera, sans résultats… Toutes ces quêtes sont comme des citernes qu’il prend beaucoup de peine à creuser en espérant qu’un jour elles seront pleines d’eau, et donc de vie, de promesses de vie, de rassasiement, de bonheur… Mais comme l’écrit Jérémie, elles sont fissurées dès le départ … Elles ne peuvent retenir l’eau et offrir le vrai bonheur, la vraie vie… L’espérance de plénitude ne peut qu’être déçue… Pire, le fait qu’elles soient à sec est synonyme de mort…

Le Père va donc envoyer le Fils dans le monde pour donner aux hommes de pouvoir retrouver avec Lui le chemin qui conduit à Dieu et donc à l’Eau Vive de l’Esprit qui ne cesse de jaillir de Lui pour combler ses créatures… « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi », disait St Augustin. Le Christ est ainsi venu offrir aux hommes, gratuitement, par amour, cette Plénitude d’Esprit et donc de Vie pour laquelle nous avons tous été créés…

Jésus et la SamaritaineDans l’Evangile selon St Jean, au chapitre 4, Jésus est présenté comme étant assis près d’un puits… Cette image visible est la révélation invisible de ce qu’Il Est de toute éternité : le Fils qui est tourné vers le Père « Source d’Eau Vive ». Voilà ce qu’il reçoit de Lui depuis toujours et pour toujours : l’Eau Vive de l’Esprit. Or, si Dieu est Esprit (Jn 4,24), ce mot « Esprit » suffit à lui seul pour évoquer le mystère de la nature divine, c’est-à-dire ce que Dieu Est en Lui-même. St Jean dira également « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) et deux fois « Dieu est Amour » (1Jn 1,4,8.16). Ces trois mots expriment donc des aspects d’une seule et unique réalité : cette nature divine que le Père donne au Fils de toute éternité. Et nous confessons du Fils dans notre Crédo : « Il est Dieu né de Dieu, Lumière né de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu. Engendré non pas créé, de même nature que le Père »…

Ainsi, Jésus assis près du puits est une image du Fils toujours près du Père, tourné de cœur vers le Père (Jn 1,18), recevant du Père la Vie que le Père a en lui-même (Jn 5,26). Et il va dire « J’ai soif » à une femme samaritaine… En effet, il est « fatigué par la marche » et « c’était environ la sixième heure, c’est-à-dire midi ». La Samaritaine va s’étonner que Jésus lui adresse la Parole car la Loi interdisait à un homme d’aborder une femme seule, et les Juifs n’entretenaient pas de relations avec les Samaritains, leurs ennemis « héréditaires »… Mais Jésus fait tomber toutes ces barrières car il a, lui, le désir de partager avec elle ce Don de la Plénitude de l’Esprit qu’il ne cesse de recevoir de son Père et qui comble son cœur… Alors, il va lui mettre « l’eau à la bouche » et lui parler de cette Eau Vive en espérant que viendra le moment où elle aussi lui dira « J’ai soif » de recevoir cette Vie dont tu me parles…

Jn 4,10 : Jésus lui dit :

A – Si tu savais le don de Dieu                         Le Don de Dieu est évoqué

                   B – et qui est celui qui te dit :        Jésus demande à la femme

                                    C – Donne-moi à boire,                                      Donne-moi à boire

                   B’ – c’est toi qui l’aurais prié          La femme aurait demandé à Jésus

A’ – et il t’aurait donné de l’eau vive.                Le Don de Dieu est précisé : l’Eau Vive

Le texte est très bien construit : Jésus dit à la Samaritaine « Donne-moi à boire » pour qu’un jour la Samaritaine lui dise « Donne-moi à boire »… Jésus lui révèle ainsi le Don qu’il est venu offrir à tous les hommes : l’Eau Vive de l’Esprit, la seule réalité capable de remplir nos cœurs et donc de nous offrir la vraie Vie, le vrai Bonheur… Voilà pourquoi il nous invite à le demander en St Luc avec une incroyable insistance :

Lc 11,9-13 : « Et moi, je vous dis :

A – demandez et l’on vous donnera ;

         B – cherchez et vous trouverez ;

                  C – frappez et l’on vous ouvrira.

 A’ – Car quiconque demande reçoit ;

           B’ – qui cherche trouve ;

                   C’ – et à qui frappe on ouvrira.

Exemple I – Quel est d’entre vous le père auquel son fils demandera un poisson,

                             et qui, à la place du poisson, lui remettra un serpent ?

Exemple II – Ou encore s’il demande un œuf, lui remettra-t-il un scorpion ?

Conclusion : A – Si donc vous, qui êtes mauvais,

                                  B – vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

                        A’ – combien plus le Père du ciel       (qui est infiniment bon)

                                    B’ – donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »

Demander, librement, manifestera alors notre désir de recevoir… Et nous ne pourrons qu’être exaucés car la Source n’a pas attendu notre demande pour couler : elle coule de toute éternité… Le Psalmiste exprime également ce Mystère de l’Amour de Dieu avec l’image du Soleil… Dieu est un Soleil, il ne cesse de briller, il ne cesse de donner la Lumière et il est Lumière… Autrement dit, il ne cesse de donner ce qu’il est en Lui‑même… Dieu est Esprit ? Il est Source, et ne cesse de donner l’Eau Vive de l’Esprit… Se tourner de tout cœur vers Lui, c’est déjà recevoir, gratuitement, par amour… Nous retrouvons cette phrase de Ste Thérèse de Lisieux, à appliquer littéralement à Dieu qui est Amour, et tout spécialement au Père : « Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même ». Dieu est Esprit ? Il donne l’Esprit… Dieu est Lumière, Soleil ? Il donne la Lumière…

Dieu Soleil

Ps 84,12 : « Le Seigneur Dieu est un Soleil…

                             Il donne la grâce,

                                    il donne la gloire »…

Alors, si nous répondons à l’appel de Dieu, « repentez-vous, tournez-vous vers moi et vous serez sauvés, tous les lointains de la terre » (Is 45,22), en tournant notre cœur vers la Source d’Eau Vive, nous serons intérieurement comme un jardin tout irrigué :

jardin arroséIs 58,11 : « Le Seigneur sans cesse te conduira,

il te rassasiera dans les lieux arides,

il donnera la vigueur à tes os,

et tu seras comme un jardin arrosé,

comme une source jaillissante 

                       dont les eaux ne tarissent pas.»

                                                                                   

C’est ce que dit Jésus à la Samaritaine :

Jn 4,13-14 : « Jésus lui dit :

Quiconque boit de cette eau aura soif à nouveau ;

mais qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ;

l’eau que je lui donnerai deviendra en lui source d’eau jaillissant en vie éternelle. »

Herbe-arrosée-300x183Et comme « un homme ne peut rien recevoir si cela ne lui a été donné du ciel » (Jn 3,27), celui qui a, c’est qu’il a reçu… S’il a reçu, c’est qu’il est tourné vers Dieu et ouvert à Dieu. Et comme Dieu est Source, il recevra et recevra encore : « C’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu’on versera dans votre sein » (Lc 6,38)…

Et le Christ va mourir sur la croix pour que nous puissions recevoir cette Eau Vive de l’Esprit. Là encore, le corporel est signe visible du spirituel. Un soldat romain va transpercer son cœur d’où s’écouleront sur la terre toute « l’eau et le sang » qui le remplissaient (Jn 19,33-35). Or dans la Bible, les deux sont symbole de vie. Ainsi, le cœur « spirituel » est désormais ouvert à tous les hommes et de lui s’écoule pour eux la Plénitude de l’Eau Vive de l’Esprit qui le remplit et qu’il reçoit de son Père de toute éternité… Avec Lui et par Lui, une Source a jailli en ce monde pour combler notre soif intérieure…

Waterfall

Joël 4,18 :

« Une source jaillira de la maison de Yahvé

et arrosera le ravin des Acacias »…

Deux images de l’Ancien Testament sont accomplies. Celle du Rocher :

Ex 17,1-7 : Toute la communauté des Israélites partit du désert de Sîn, sur l’ordre de Yahvé,

            et ils campèrent à Rephidim. Or il n’y avait pas d’eau à boire pour le peuple.

( 2)             Celui-ci s’en prit à Moïse; ils dirent : Donne-nous de l’eau, que nous buvions !

            Moïse leur dit : Pourquoi vous en prenez-vous à moi ?

            Pourquoi mettez-vous Yahvé à l’épreuve ?

( 3)             Le peuple y souffrit de la soif, le peuple murmura contre Moïse et dit :

            Pourquoi nous as-tu fait monter d’Égypte ?

            Est-ce pour me faire mourir de soif, moi, mes enfants et mes bêtes ?

( 4)             Moïse cria vers Yahvé en disant : Que ferai-je pour ce peuple ?

            Encore un peu et ils me lapideront.

( 5) Yahvé dit à Moïse : Passe en tête du peuple et prends avec toi quelques anciens d’Israël ;

            prends en main ton bâton, celui dont tu as frappé le Fleuve, et va.

( 6)             Voici que je vais me tenir devant toi, là sur le rocher (en Horeb),

            tu frapperas le rocher, l’eau en sortira et le peuple boira.

            C’est ce que fit Moïse, aux yeux des anciens d’Israël.

( 7)             Il donna à ce lieu le nom de Massa et Meriba,

            parce que les Israélites cherchèrent querelle

            et parce qu’ils mirent Yahvé à l’épreuve en disant :

            Yahvé est-il au milieu de nous, ou non ?

Ce texte sera très souvent repris par la suite (Nb 20,1-13 ; Is 48,21 ; Ps 78,15-16 ; 105,41 ; 114,8 ; Sg 11,4). Et l’image du rocher renvoie dans la Bible au Mystère de Dieu (Ps 18,3 ; 18,32 ; 18,47 ; 19,15 ; 28,1 ; 31,4…).

St Paul dira que ce rocher dans le Livre de l’Exode, c’était le Christ…

Jésus Miséricordieux1Co 10,1-4 : « Je ne veux pas que vous l’ignoriez, frères :

nos pères ont tous été sous la nuée,                                                                                          

tous ont passé à travers la mer,

tous ont été baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer,

tous ont mangé le même aliment spirituel

et tous ont bu le même breuvage spirituel

ils buvaient en effet à un rocher spirituel                                                                                               

qui les accompagnait, et ce rocher c’était le Christ. »

Avec le Christ et par le Christ, vrai homme et vrai Dieu, c’est Dieu Lui-même qui a été frappé et l’Eau Vive de sa Vie s’écoule en Plénitude sur les hommes pécheurs qui l’ont frappé pour les guérir petit à petit de leur méchanceté et leur donner enfin d’aimer…

La deuxième image est celle du Temple.

            Ez 47, 1-12 : « Il me ramena à l’entrée du Temple,

            et voici que de l’eau sortait de dessous le seuil du Temple, vers l’orient,

            car le Temple était tourné vers l’orient.

            L’eau descendait de dessous le côté droit du Temple, au sud de l’autel.

(2)             Il me fit sortir par le porche septentrional et me fit faire le tour extérieur,

            jusqu’au porche extérieur qui regarde l’orient,

            et voici que l’eau coulait du côté droit.

(3)             L’homme s’éloigna vers l’orient, avec le cordeau qu’il avait en main,

            et mesura mille coudées;

            alors il me fit traverser le cours d’eau :

                        j’avais de l’eau jusqu’aux chevilles.

(4)             Il en mesura encore mille et me fit traverser le cours d’eau

                        j’avais de l’eau jusqu’aux genoux.            

            Il en mesura encore mille et me fit traverser le cours d’eau :

                        j’avais de l’eau jusqu’aux reins.

(5)             Il en mesura encore mille,

                        et c’était un torrent que je ne pus traverser,

                        car l’eau avait grossi pour devenir une eau profonde, un fleuve infranchissable.

Fleuve abondant

(6)             Alors il me dit : As-tu vu, fils d’homme?  

            Il me conduisit puis me ramena au bord du torrent.

(7)             Et lorsque je revins, voici qu’au bord du torrent

            il y avait une quantité d’arbres de chaque côté.

(8)             Il me dit : Cette eau s’en va vers le district oriental, elle descend dans la Araba

et se dirige vers la mer ; elle se déverse dans la mer en sorte que ses eaux deviennent saines.

(9)             Partout où passera le torrent, tout être vivant qui y fourmille vivra.

            Le poisson sera très abondant, car là où cette eau pénètre, elle assainit,

            et la vie se développe partout où va le torrent.

Réplique de la mosaïque de Madaba

Réplique de la mosaïque de Madaba (6° s) : le Jourdain (et ses poissons) se jette dans la Mer Morte, la Araba…

(10)             Sur le rivage, il y aura des pêcheurs.

            Depuis En-Gaddi jusqu’à En-Églayim des filets seront tendus.

  Les poissons seront de même espèce que les poissons de la Grande mer, et très nombreux.

(11)       Mais ses marais et ses lagunes ne seront pas assainis, ils seront abandonnés au sel.

(12)      Au bord du torrent, sur chacune de ses rives, croîtront toutes sortes d’arbres fruitiers

            dont le feuillage ne se flétrira pas et dont les fruits ne cesseront pas :

            ils produiront chaque mois des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire.

            Les fruits seront une nourriture et les feuilles un remède. »

oranger

Le Christ en se présentant comme le vrai « Sanctuaire de Dieu » (Jn 2,13-22), car « le Père est en lui » (Jn 14,11 ; 17,21), accomplira ce texte… Et de son côté ouvert sur la Croix, le côté droit (Ez 47,2) d’après le Linceul de Turin, coulera en surabondance l’Eau Vive de l’Esprit qui purifie et rend la vie aux cœurs blessés par la mort du péché. Ce même Esprit nourrit et donne de porter du fruit en tout temps, des fruits pour la vie des autres… Et même les feuilles deviennent des remèdes pour guérir les malades. Ainsi, grâce à l’Esprit, ceux et celles qui le reçoivent contribuent à la vie du monde en tout ce qu’ils sont et en tout ce qu’ils font… Telle est l’Eglise qui, en témoignant de ce qu’elle a reçu elle-même de la Miséricorde de Dieu, travaille à ce que le plus possible de pécheurs puissent eux aussi vivre ce qu’elle a vécu. «  Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d’entre les morts le troisième jour », dit le Ressuscité à ses disciples, « et qu’en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. De cela vous êtes témoins » (Lc 24,46-48), les heureux témoins…

                                                                                                                      D. Jacques Fournier

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« Les entrailles de Miséricorde de notre Dieu » (Conseil Diocésain de Pastorale).

Cette expression nous vient directement de St Luc quand il nous rapporte ce que Zacharie déclara au jour de la circoncision de son fils, Jean‑Baptiste.

I – Nous commencerons donc par relire ces lignes du « Cantique de Zacharie » que nous connaissons tous et nous verrons le sens de ce mot « entrailles ».

II – Puis, à partir de quelques textes de l’AT, nous redirons avec le Pape François le cœur de notre foi : « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16 ; NT !).

III – Nous verrons que cet Amour inconditionnel et éternel ne cesse de prendre le visage de la Miséricorde, pour nous, pécheurs…

IV – Et nous terminerons, en constatant à l’aide de quelques textes du NT, que non seulement Dieu ne cesse d’aimer ceux qui font le mal, mais qu’en plus, leur situation personnelle le bouleverse au plus profond de lui-même : en effet, celui qui fait le mal ne peut que se plonger lui-même dans la souffrance, et voir un seul de ses enfants souffrir, voilà ce qui bouleverse le cœur de Dieu… Dans le respect de notre liberté, il ne pourra alors que nous presser à cesser de faire ce mal qui nous détruit, pour nous inviter à apprendre, petit à petit, avec Lui et grâce à Lui, de Miséricorde en Miséricorde, à faire ce bien qui nous construit, et qui ne peut en fait qu’être l’expression d’un cœur comblé par ce « Dieu Amour », « qui se donne gratuitement » (Pape François). Le fruit de ce Don gratuit, pour celles et ceux qui accepteront de le recevoir, sera alors un cœur comblé, renouvelé, ‘recréé’, enfanté à une vie nouvelle par ce Dieu Père qui nous aime, infiniment, avec toute la tendresse d’une Mère…

  I – Commençons donc par relire ces lignes de ce Cantique que Zacharie adresse à son fils Jean-Baptiste :

« Et toi petit enfant, tu seras appelé prophète du Très‑Haut ; car tu marcheras devant le Seigneur pour lui préparer les voies, pour donner à son peuple la connaissance du salut, par le pardon de ses péchés, grâce aux entrailles de Miséricorde de notre Dieu (διὰ σπλάγχνα ἐλέους θεοῦ ἡμῶν) dans lesquelles nous a visités l’Astre d’en Haut, pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et l’ombre de la mort, pour redresser nos pas au chemin de la paix » » (Lc 1,76-79).

Le mot « entrailles » traduit le grec « σπλάγχνα », pluriel de « σπλάγχνon ». Le dictionnaire Grec – Français « Bailly » donne pour « σπλάγχνon » (BAILLY M.A., « σπλάγχνon« , Dictionnaire Grec-Français (Paris 1930) p. 1779) :

« les entrailles » : 

I – Au propre :

                      1 – Les viscères principaux – cœur, poumon, foie – de l’homme ou des animaux (Il s’agit donc, très, très concrètement… des tripes…).

                       2 – Le sein de la mère (Soulignons cette connotation maternelle, et le fait que ce « sein de la mère » est le lieu de l’enfantement, de la création).

II – Au figuré :

                        1 – Le cœur, l’âme, comme siège des affections.

                         2 – Entrailles, cœur, âme, terme de tendresse.

red rose

  Le P. Ceslas Spicq écrit à ce sujet : « Dès le Vè-IVè siècle av JC, les σπλάγχνα désignent les « intérieurs » d’une victime immolée, que les règlements cultuels mentionnent parmi le casuel des prêtres, si bien que le verbe correspondant signifiera « consommer les entrailles ». Il s’agit, bien entendu, des parties nobles, car le mot s’applique aussi à l’homme, où l’on compte sept viscères : « l’estomac, le cœur, le poumon, la rate, le foie et les deux reins » (Philon d’Alexandrie, 25 av JC – 50 ap JC). Mais le mot s’étend aux intestins, au ventre, sans aucune précision physiologique ». En Ac 1,18, Luc rapporte la mort de Judas : « Cet homme est tombé la tête la première et il a éclaté par le milieu, et toutes ses entrailles se sont répandues, καὶ ἐξεχύθη (de ἐξ-χέω, verser hors de…, répandre) πάντα τὰ σπλάγχνα αὐτοῦ. ».

« On localise les sentiments dans les entrailles – puisqu’elles sont ce qu’il y a de plus intime et caché (Pr 26,22 ; Ps 22,15) – et elles sont alors synonymes de ce que nous appelons aujourd’hui « le cœur ». Ainsi, « les entrailles du père sont bouleversées à chaque cri de son fils » (Si 30,7)… Dans la Bible, les entrailles (hébreu : rahamîm) sont le siège de la compassion (Gn 43,30 ; 1R 3,26). Le singulier réhém en effet, désigne l’utérus, le sein maternel » ; de sorte que les entrailles sont d’abord le siège de la pitié de la mère pour ses enfants (Is 49,15), et l’on dit qu’elles frémissent (Is 16,11), résonnent et font du bruit (Is 43,15), bouillonnent (Lam 1,20) ou sont en ébullition (Job 30,27).

 

Soulignons trois textes de l’Ancien Testament :

1 – Is 63,15-17 : « Regarde du ciel et vois, depuis ta demeure sainte et glorieuse.

Où sont ta jalousie et ta puissance ?

Le frémissement de tes entrailles et tes tendresses (rahamîmH) pour moi

se sont-ils contenus ?

(LXX : ποῦ ἐστιν τὸ πλῆθος τοῦ ἐλέους σου καὶ τῶν οἰκτιρμῶν σου

Où sont la plénitude de ta miséricorde et tes compassions)

Paris Surréalistes+annexesPourtant tu es notre Père… (Hqui aime d’un amour maternel)

Toi, Yahvé, tu es notre Père, notre rédempteur,

tel est ton nom depuis toujours. »

 

 2 – Jr 31,20 : « Je l’aime, oui je l’aime, oracle du Seigneur » (avec une nuance de tendresse maternelle).

3 – Ex 34,6 (TOB) :

Moise-buisson-ardent« Le Seigneur passa devant Moïse et proclama :

Le Seigneur, le Seigneur, Dieu miséricordieux (H) et bienveillant,

lent à la colère, plein de fidélité et de loyauté ».

LXX (34,6; la Septante, traduction grecque de l’AT (3° s ac JV ; Alexandrie):

Κύριος ὁ θεὸς οἰκτίρμων καὶ ἐλεήμων,

Seigneur Dieu compatissant (ou miséricordieux, les deux sens du Bailly) et

miséricordieux (ou compatissant, à nouveau les deux sens du Bailly).

μακρόθυμος καὶ πολυέλεος καὶ ἀληθινὸς.

           patient et « plein de miséricorde » et vrai (Bailly : véridique, sincère, vrai, réel).

Le Pape François fait allusion à ce dernier texte lorsqu’il écrit au tout début de la Bulle d’indiction de l’année Jubilaire de la Miséricorde (11 avril 2015) :

« Jésus Christ est le visage de la miséricorde du Père. Le mystère de la foi chrétienne est là tout entier. Devenue vivante et visible, elle atteint son sommet en Jésus de Nazareth. Le Père, « riche en miséricorde » (Ep 2, 4), après avoir révélé son nom à Moïse comme « Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité » (Ex 34, 6) n’a pas cessé de faire connaître sa nature divine de différentes manières et en de nombreux moments ».

 

II – Le cœur de notre foi : « Dieu est Amour »

 « Il n’a pas cessé de faire connaître sa nature divine », c’est-à-dire ce qu’Il Est en Lui-même de toute éternité. Et nous retrouvons ici le cœur de notre foi. Le Pape François écrit d’ailleurs un peu plus loin (& 8): « Le regard fixé sur Jésus et son visage miséricordieux, nous pouvons accueillir l’amour de la Sainte Trinité. La mission que Jésus a reçue du Père a été de révéler le mystère de l’amour divin dans sa plénitude. L’évangéliste Jean affirme pour la première et unique fois dans toute l’Ecriture : « Dieu est amour » (1 Jn 4,8.16). Cet amour est désormais rendu visible et tangible dans toute la vie de Jésus. Sa personne n’est rien d’autre qu’amour, un amour qui se donne gratuitement. Les relations avec les personnes qui s’approchent de Lui ont quelque chose d’unique et de singulier. Les signes qu’il accomplit, surtout envers les pécheurs, les pauvres, les exclus, les malades et les souffrants, sont marqués par la miséricorde. Tout en Lui parle de miséricorde. Rien en Lui ne manque de compassion. »

Dieu-Amour« Dieu est amour », « un amour qui se donne gratuitement » pour le seul bien de la personne aimée. En tout ce qu’Il Est, « Dieu est amour » depuis toujours et pour toujours. Il ne sait donc faire qu’une seule chose : « aimer ». Or, aimer quelqu’un, c’est vouloir son bien et tout mettre en œuvre pour l’atteindre. « La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous voir heureux, remplis de joie et de paix » (Pape François & 9). Voilà ce que Dieu veut pour tout homme sur cette terre, quel qu’il soit, car tous ont été créés par Lui « à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28), tous sont filles et fils d’un seul et même Père… « Nous sommes aussi de sa race », dit St Paul aux philosophes d’Athènes en citant l’un d’entre eux, Aratus, poète du 3° s av JC, originaire de Cilicie.

Jr 31,37-41 : « Je vais les rassembler (…), et je les ferai demeurer en sécurité… Je conclurai avec eux une alliance éternelle : je ne cesserai pas de les suivre pour leur faire du bien… Je trouverai ma joie à leur faire du bien,… de tout mon cœur et de toute mon âme. »

Et comment Dieu se propose-t-il de « nous faire du bien » ? En nous comblant de ses bienfaits. Et quels sont-ils ? Rien de moins que ce qu’Il Est en Lui-même… La volonté de Dieu sur toute l’humanité, sans aucune exception, est que nous partagions tous sa Plénitude de vie, de paix, et de joie… C’est ce que Jésus, vrai Dieu et vrai homme, ne cesse de nous dire : « De même le Père, qui est vivant, m’a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi… Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix… Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 6,57 ; 14,27 ; 15,11).

Esprit SaintEt Dieu ne peut pas nous donner plus que ce qu’Il Est en Lui-même… « Dieu Est Esprit » (Jn 4,24) ? « Recevez l’Esprit Saint » dit le Ressuscité à ses disciples (Jn 20,22), et « le fruit de l’Esprit est amour, joie, paix » (Ga 5,22).

« « Dieu est amour » (1 Jn 4,8.16), un amour qui se donne gratuitement », dit le Pape François. Et un peu plus loin, il ajoute : « Dans la miséricorde, nous avons la preuve de la façon dont Dieu nous aime. Il se donne tout entier, pour toujours, gratuitement, et sans rien demander en retour » (& 14). Ce que Dieu donne gratuitement, par amour, c’est en effet ce qu’Il Est tout entier, depuis toujours et pour toujours. Et « Dieu est Esprit » (Jn 4,24), et « Dieu est Saint » (Lv 11,44-45 ; 17,1 ; 19,2). Il s’agit donc du Don de l’Esprit Saint, le Don de ce qu’il Est en Lui-même. Et par ce Don de « l’Esprit qui sanctifie » (2Th 2,13), nous sommes tous appelés à devenir pleinement, selon notre condition de créature, ce que Dieu Est de toute éternité ! Il ne peut y avoir de vocation plus grande, plus belle… Et c’est ce que Dieu veut pour tout homme… Or, nous dit le Psalmiste : « Tout ce que veut le Seigneur, il le fait » (Ps 135(134),6 ; 115(114),3). Et comment le fait-il ? En donnant gratuitement, par amour, ce qu’il Est en Lui-même depuis toujours et pour toujours : le Don de l’Esprit Saint…

III – Pour nous, pécheurs, l’Amour prend le visage de la Miséricorde

Ez 36,24-27 : (Vous qui avez profané mon Nom et qui avez été dispersés par suite de vos fautes), « je vous rassemblerai, je vous ramènerai vers votre sol…

Je verserai sur vous une eau pure et vous serez purifiés ;

de toutes vos souillures et de toutes vos ordures je vous purifierai.

Et je vous donnerai un cœur nouveau,

je mettrai (En hébreu comme en grec : je donnerai…) en vous un esprit nouveau,

j’enlèverai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair.

Je mettrai (je donnerai) mon Esprit en vous

et je ferai que vous marchiez selon mes lois

et que vous observiez et pratiquiez mes coutumes. »

BaptemeLe Don de l’Amour, répété ici quatre fois, devient donc, pour le pécheur souillé, « une Eau Pure » qui le « purifie de toutes ses ordures »… Toutes, sans aucune exception, dès lors que l’on accepte de les présenter à Dieu, et de le laisser agir…

Et si le pécheur, privé du Don de l’Amour, et donc d’une Plénitude de Vie, fait l’expérience d’un état de mort intérieure, ce Don qui lui est toujours fait, envers et contre tout, sera pour lui « Eau Vive » « qui vivifie »… C’est ce qu’affirme Ezéchiel au chapitre suivant, en montrant Dieu agissant pour des morts enfermés dans leurs tombeaux, réduits à l’état de squelette, et donc, ne pouvant vraiment plus rien faire par eux-mêmes ! Tout ce qui arrivera pour eux ne pourra donc qu’être le fruit de l’initiative gratuite de l’Amour, et du Don tout aussi gratuit de l’Amour :

Ez 37,4-14 : « Ossements desséchés (et donc en manque d’eau), écoutez la parole du Seigneur.

Ainsi parle le Seigneur Dieu à ces ossements.

Voici que je vais faire entrer en vous l’Esprit et vous vivrez…

Ainsi parle le Seigneur Dieu. Voici que j’ouvre vos tombeaux ;

je vais vous faire remonter de vos tombeaux, mon peuple,

et je vous ramènerai sur votre sol.

resurrection2Vous saurez que je suis le Seigneur,  

lorsque j’ouvrirai vos tombeaux 

et que je vous ferai remonter de vos tombeaux, mon peuple.          

Je mettrai (Je donnerai) mon Esprit en vous et vous vivrez,        

et je vous installerai sur votre sol, et vous saurez que moi, le Seigneur,

j’ai parlé et je fais, oracle du Seigneur » (cf. (Ps 135(134),6 ; 115(114),3).

 

Cette gratuité, nous la retrouvons dans le discours de Jésus sur la Montagne, lorsqu’il disait aux foules rassemblées autour de lui :

Mt 5,43-45 : « Vous avez entendu qu’il a été dit :

Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi.

Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs,

afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux,

car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons,

et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. »

Fleurs...« Dieu est Esprit » (Jn 4,24) ? « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) ? « Le Seigneur fait donc lever son soleil sur les méchants et sur les bons » en donnant la Lumière de l’Esprit aux méchants comme aux bons… « Le Seigneur Dieu est un soleil, il est un bouclier ; le Seigneur donne la grâce », « l’Esprit de la grâce » (Hb 10,29), « il donne la gloire », « l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu » (1P 4,14) . « Jamais il ne refuse le bonheur à ceux qui vont sans reproche » (Ps 84(83),12), c’est-à-dire à ceux qui demeurent, de cœur, tournés vers Lui, dans la force comme dans la faiblesse… En effet, « heureux les pauvres de cœurs, car le Royaume des Cieux est à eux ». Pourquoi ? « Parce que votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume » (Lc 12,32). Et quelle réalité se cache derrière ce mot « Royaume » ? Un Mystère de Communion « dans l’unité d’un même Esprit » (Ep 4,3 ; 2Co 13,13), cet Esprit donné gratuitement à tous par l’Amour : « Le règne de Dieu », le Royaume des Cieux, « n’est pas affaire de nourriture ou de boisson, il est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint » (Rm 14,17).

Césarée de PhilippeNous avons vu comment Dieu « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons ». Et lorsque Jésus ajoute « et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes », il redit la même chose avec, cette fois, non plus l’image de la lumière, mais celle de l’eau. En effet, Dieu est souvent évoqué dans la Bible avec l’image d’une source : « Ils m’ont abandonné, moi, la Source d’Eau vive », dit-il en Jérémie (Jr 2,13 ; 17,13). Dieu est ainsi « Source d’Eau Vive », Don de l’Eau Vive et Pure de son Esprit (Jn 7,37-39), une Eau Vive qui « tombe en pluie sur les justes » pour les vivifier, les combler, leur offrir la Plénitude même de Dieu, une Eau Pure qui « tombe en pluie sur les injustes » pour les inviter, en frappant à la porte fermée de leur cœur (Ap 3,20), à lui ouvrir, à se tourner vers Lui de tout cœur. Alors, cette Eau Pure les purifiera de toutes leurs ordures, et leur permettra d’accueillir à leur tour la Plénitude de la vie éternelle… Notons avec ces images que nul homme sur cette terre n’est « juste » au sens de « sans péché »… « Tous sont soumis au péché… Il n’est pas de juste, pas un seul… Il n’est donc pas question de l’homme qui veut ou qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde. » Ainsi, nous sommes tous « des vases de miséricorde que Dieu a d’avance préparés pour sa Gloire » en les appelant à se tourner vers Lui de tout cœur, tels qu’ils sont, avec toutes leurs blessures et leurs misères, pour se laisser remplir par le Don de Dieu, le Don de « l’Esprit de Gloire, l’Esprit de Dieu » (Rm 3,9-26 ; 9,16 ; 9,23 ; 1P 4,14).

Nous sommes tous, en effet, des pécheurs qui avons continuellement besoin d’être pardonnés, lavés, relevés, fortifiés, soutenus… « La miséricorde, c’est le chemin qui unit Dieu et l’homme, pour qu’il ouvre son cœur à l’espérance d’être aimé pour toujours malgré les limites de notre péché », écrit notre pape François (&2). Et souvenons-nous du jour de son élection, le 13 mars 2013. Le Cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, écrit ainsi dans la préface du Livre du Pape François, « Amour, Service et Humilité » : « Aussitôt connus les résultats du cinquième scrutin du Conclave que nous venons de vivre, le Cardinal Bergoglio avait à répondre aux deux questions rituelles qui marquent la fin du Conclave et la levée du secret : « Acceptes-tu ton élection ? » et « Quel nom choisis-tu ? ». A la première, il a répondu : « Je suis pécheur et j’en ai conscience, mais j’ai une grande confiance dans la Miséricorde de Dieu. Puisque vous m’avez élu ou, plutôt, puisque Dieu m’a choisi, j’accepte. » »

Logo année de la Miséricorde

Ainsi, « Dieu veut faire miséricorde à tous » (Rm 11,32), « il veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4), « et tout ce que veut le Seigneur il le fait » (Ps 115,3 ; 135,6). « Il le fait », très concrètement, en donnant la Plénitude de son Esprit à tout homme, pour son seul bien, gratuitement, par amour… Et c’est ainsi que le Dieu qui, éternellement, est Amour, prend pour nous, pécheurs, le visage de la Miséricorde, car au cœur de notre misère, nous sommes tous invités à faire l’expérience que Dieu, de son côté, n’a jamais cessé de nous aimer, et donc de se donner à nous, gratuitement, par amour…

 

IV – Ces entrailles de Miséricorde sont aussi « compassion » pour le pécheur.

En effet, si Dieu nous a tous créés pour être remplis par ses bienfaits, connaître la Plénitude de sa Vie, participer à sa Lumière et à sa Gloire, le péché qui est abandon de Dieu, fermeture à Dieu, repli sur soi, ne peut que nous priver de tous ces dons… « Tous ont péché et sont privés de la Gloire de Dieu » (Rm 3,23).

Or, être privé de ce pour quoi nous avons été faits ne peut qu’être synonyme de souffrance, de mal être, de pleurs, de tristesse… « Souffrance et angoisse à toute âme humaine qui s’adonne au mal » (Rm 2,9).

Et le cœur de Dieu est bouleversé de compassion lorsqu’il voit un homme, un de ses enfants, souffrir, et cela quelque soit l’origine de sa souffrance, qu’il en soit responsable ou pas…

Logo année de la Miséricorde - détailOs 11,7-8 : « Mon peuple est cramponné à son infidélité.

On les appelle en haut, pas un qui se relève !

Comment t’abandonnerais-je, Éphraïm, te livrerais-je, Israël ?

Mon cœur en moi est bouleversé, toutes mes entrailles frémissent ».

Et la Bible de Jérusalem écrit en note : « Le mot « bouleversé » est très fort ; précisément celui qui est employé à propos de la destruction des cités coupables, (Gn 19,25; Dt 29,22) », conséquence de leurs péchés… Osée laisse entendre que ces conséquences désastreuses sont « comme vécues d’avance dans le cœur de Dieu. Cf. le cri de David à la mort d’Absalom, son fils (2S 19, 1) », qui pourtant s’était réjoui à l’avance de la mort de son père en accueillant le piège qu’Ahitophel voulait lui tendre (2S 17,1-4).

prodigueNous l’avons vu avec Osée, si l’homme est responsable de ses souffrances par suite du mal qu’il commet, Dieu, dans son Amour, ne peut que le presser à abandonner ce qui, en fait, malgré les apparences peut-être contraires, le plonge dans le mal être et la souffrance… Son seul désir est alors de tout nous pardonner, car Dieu ne regarde pas la faute en elle même, mais les conséquences de cette faute dans le cœur et la vie de celui qui l’a commise. Et encore une fois, son seul désir est de voir sa créature comblée par sa propre Plénitude. Alors, le premier cadeau qu’il fera au pécheur, sera le pardon de toutes ses fautes, et cela dans une attitude de Joie ( Lc 15 ; Rm 12,8) qui sera au même moment consolation (2Co 1,3-7 avec notes BJ), réconfort, encouragement pour celui qui accepte de répondre ainsi à l’Amour… En Lc 15, « Dieu est toujours présenté comme rempli de joie, surtout quand il pardonne » écrit le Pape François, car il ne poursuit que le bien de tous les hommes qu’il aime (Lc 2,14), et il se réjouit de voir ce « bien » triompher dans leur cœur et dans leur vie. « Nous y trouvons le noyau de l’Evangile et de notre foi », poursuit le Pape François, « car la miséricorde y est présentée comme la force victorieuse de tout, qui remplit le cœur d’amour, et qui console en pardonnant ».

« Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu, parlez au cœur de Jérusalem et criez-lui que son service est accompli, que sa faute est expiée, qu’elle a reçu de la main du Seigneur deux fois le prix de toutes ses fautes » (Is 40,1), deux fois le prix de tout ce qu’elle aurait dû dépenser à l’époque pour acheter les animaux prescrits par la Loi et les offrir en sacrifices pour le pardon de ses péchés… Déjà, avec cette image d’Isaïe, nous avons la réalité de la surabondance de la Miséricorde de Dieu si bien exprimée par St Paul : « Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » (Rm 5,20). « En lui », le Christ, « nous trouvons la rédemption, par son sang, la rémission des fautes, selon la richesse de sa grâce, qu’Il nous a prodiguée, en toute sagesse et intelligence » (Ep 1,7)… « Je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait en surabondance » (Jn 10,10).

 

st jeanFace à toute souffrance, fut-elle provoquée par le mal, la seule attitude de Dieu est donc de consoler, réconforter, encourager, et inviter au repentir si cela est nécessaire… « J’entendis alors une voix clamer, du trône : Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure avec eux ; ils seront son peuple, et lui, Dieu‑avec-eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n’y en aura plus; de pleur, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé » (Ap 21,3-4 ; cf. 2Co 1,3-7).

 Et cette réaction de Dieu est très concrètement manifestée dans les Evangiles chaque fois que le Christ est en relation avec des personnes qui souffrent… Notre verbe correspondant à « σπλάγχνα », écrit le P. Ceslas Spicq, est ainsi employé « trois fois pour Dieu (Mt 18,27 ; Lc 1,78 ; 15,20), une fois pour le bon Samaritain, et neuf fois pour le Christ, et cela presque toujours pour rendre compte de son intervention miraculeuse… Il s’agit d’abord d’une émotion physique, d’une authentique compassion devant l’état misérable du prochain (Lc 10,33), littéralement d’un mouvement des entrailles, suscité par la vue (Lc 7,13 ; 10,33 ; 15,20). Traduire le passif ™splagcn…sqh : « il eut pitié » serait donc presque un contre-sens ; « il fut pris (ou saisi) de pitié » serait meilleur ; le sens exact est : « il ressentit une viscérale compassion »[2]. Le Pape François écrit : « La miséricorde de Dieu n’est pas une idée abstraite, mais une réalité concrète à travers laquelle Il révèle son amour comme celui d’un père et d’une mère qui se laissent émouvoir au plus profond d’eux mêmes par leur fils. Il est juste de parler d’un amour « viscéral ». Il vient du cœur comme un sentiment profond, naturel, fait de tendresse et de compassion, d’indulgence et de pardon » (& 6).

Regardons les textes où le Christ intervient. « Ce qui animait Jésus en toute circonstance n’était rien d’autre que la miséricorde avec laquelle il lisait dans le cœur de ses interlocuteurs et répondait à leurs besoins les plus profonds » (Pape François &8).

1 – Mc 1,40-45 (v. 41) : « Un lépreux vient auprès de lui ; il le supplie et, tombant à ses genoux, lui dit : « Si tu le veux, tu peux me purifier. » (41) Saisi de compassion, Jésus (Ἰησοῦς σπλαγχνισθείς) étendit la main, le toucha et lui dit : « Je le veux, sois purifié. » (42) À l’instant même, la lèpre le quitta et il fut purifié. (43) Avec fermeté, Jésus le renvoya aussitôt (44) en lui disant : « Attention, ne dis rien à personne, mais va te montrer au prêtre, et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi : cela sera pour les gens un témoignage. » (45) Une fois parti, cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle, de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville, mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. De partout cependant on venait à lui. »

Pape François embrasse un malade

2 – Mc 6,30-44 (v. 34) : « Les Apôtres se réunirent auprès de Jésus, et lui annoncèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné. (31) Il leur dit : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux, et l’on n’avait même pas le temps de manger. (32) Alors, ils partirent en barque pour un endroit désert, à l’écart. (33) Les gens les virent s’éloigner, et beaucoup comprirent leur intention. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux. (34) En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, καὶ ἐσπλαγχνίσθη ἐπ’ αὐτοῖς, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement. »

Jésus voit « qu’ils étaient comme des brebis sans berger ». Alors, « bouleversé jusqu’au plus profond de lui-même », il agit en Pasteur qui guide son troupeau par sa Parole, au son de sa voix, « et il se mit à les enseigner longuement ». Ce « longuement » souligne sa générosité. Il répond toujours à tous nos besoins en surabondance… « Mon Dieu comblera tous vos besoins, selon sa richesse, avec magnificence, dans le Christ Jésus » écrivait St Paul (Ph 4,19). C’est pourquoi, il invitait à se tourner vers lui « en tout besoin » : « N’entretenez aucun souci ; mais en tout besoin recourez à l’oraison et à la prière, pénétrées d’action de grâces, pour présenter vos requêtes à Dieu. Alors la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées, dans le Christ Jésus » (Ph 4,6-7).

Mais à parler longuement, l’heure avancera… La nuit tombe, et les endroits où l’on peut se ravitailler sont loin… Alors là aussi, les besoins de cette foule ne laisseront pas son cœur insensible, et ce sera la multiplication des pains…

En St Matthieu (Mt 14,14), dès qu’il descend de la barque, Jésus voit des infirmes et leur situation le bouleverse : il les guérira tous… « En débarquant, il vit une foule nombreuse et il fut saisi de compassion envers eux, Ἰησοῦς εἶδεν πολὺν ὄχλον, καὶ ἐσπλαγχνίσθη ἐπ’ αὐτοῖς ; et il guérit leurs infirmes, καὶ ἐθεράπευσεν τοὺς ἀρρώστους αὐτῶν ». « Face à la multitude qui le suivait », écrit le Pape François, « Jésus, voyant qu’ils étaient fatigués et épuisés, égarés et sans berger, éprouva au plus profond de son cœur, une grande compassion pour eux (cf. Mt 9,36 : ἐσπλαγχνίσθη περὶ αὐτῶν). En raison de cet amour de compassion, il guérit les malades qu’on lui présentait et il rassasia une grande foule avec peu de pains et de poissons (cf. Mt 15,37). »

3 – Mc 8,1-10 (v. 2 ; cf. Mt 15,32) : « En ces jours-là, comme il y avait de nouveau une grande foule, et que les gens n’avaient rien à manger, Jésus appelle à lui ses disciples et leur dit : (2) « J’ai de la compassion pour cette foule, Σπλαγχνίζομαι ἐπὶ τὸν ὄχλον, car depuis trois jours déjà ils restent auprès de moi, et n’ont rien à manger. (3) Si je les renvoie chez eux à jeun, ils vont défaillir en chemin, et certains d’entre eux sont venus de loin. » Et ce sera à nouveau une multiplication des pains…

Pape François bénit un infirme4 – Mc 9,22 :ici, c’est le père d’un enfant épileptique qui fait appel à la compassion de Jésus.  Il s’est d’abord adressé à ses disciples, mais ils n’ont rien pu pour lui… Alors, il vient voir directement Jésus et lui dit : « Si tu peux quelque chose, viens à notre secours, par compassion envers nous, σπλαγχνισθεὶς ἐφ’ ἡμᾶς » « Jésus lui déclara : « Pourquoi dire : “Si tu peux”… ? Tout est possible pour celui qui croit. » Aussitôt le père de l’enfant s’écria : « Je crois ! Viens au secours de mon manque de foi ! » » (Mc 9,23‑24).

5 – Mt 20,29-34 (v. 34) : « Tandis que Jésus avec ses disciples sortait de Jéricho, une foule nombreuse se mit à le suivre. (30) Et voilà que deux aveugles, assis au bord de la route, apprenant que Jésus passait, crièrent : « Prends pitié de nous, Seigneur, fils de David ! » (31)

La foule les rabroua pour les faire taire. Mais ils criaient encore plus fort : « Prends pitié de nous, Seigneur, fils de David ! » (32) Jésus s’arrêta et les appela : « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? » (33) Ils répondent : « Seigneur, que nos yeux s’ouvrent ! » (34) Saisi de compassion, Σπλαγχνισθεὶς δὲ ὁ Ἰησοῦς, Jésus leur toucha les yeux ; aussitôt ils retrouvèrent la vue, et ils le suivirent. »

6 – Lc 7,11-17 (v. 13) : « Par la suite, Jésus se rendit dans une ville appelée Naïm. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu’une grande foule. (12) Il arriva près de la porte de la ville au moment où l’on emportait un mort pour l’enterrer ; c’était un fils unique, et sa mère était veuve. Une foule importante de la ville accompagnait cette femme. (13) Voyant celle-ci, le Seigneur fut saisi de compassion pour elle et lui dit : « Ne pleure pas. » Καὶ ἰδὼν αὐτὴν ὁ κύριος ἐσπλαγχνίσθη ἐπ’ αὐτῇ, καὶ εἶπεν αὐτῇ, Μὴ κλαῖε. (14) Il s’approcha et toucha le cercueil ; les porteurs s’arrêtèrent, et Jésus dit : « Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. »

VATICAN CITY, VATICAN - MARCH 24: Pope Francis kisses 8-month-old Victoria Maria Marino from Sicily after delivering his blessing to the palms and to the faithful gathered in St. Peter's Square during Palm Sunday Mass on March 24, 2013 in Vatican City, Vatican. Pope Francis lead his first mass of Holy Week as pontiff by celebrating Palm Sunday in front of thousands of faithful and clergy. The pope's first holy week will also incorporate him washing the feet of prisoners in a youth detention centre in Rome next Thursday, 28th March. (Photo by Dan Kitwood/Getty Images)

(15) Alors le mort se redressa et se mit à parler. Et Jésus le rendit à sa mère. (16) La crainte s’empara de tous, et ils rendaient gloire à Dieu en disant : « Un grand prophète s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple. » »

(17) Et cette parole sur Jésus se répandit dans la Judée entière et dans toute la région. »

« Lorsqu’il rencontra la veuve de Naïm qui emmenait son fils unique au tombeau, il éprouva une profonde compassion pour la douleur immense de cette mère en pleurs, et il lui redonna son fils, le ressuscitant de la mort (cf. Lc 7, 15) » (Pape François &8).

Nous concluerons en deux points :

 

1 – « Après avoir libéré le possédé de Gerasa, il lui donna cette mission : « Annonce tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde » (Mc 5, 19). L’appel de Matthieu est lui aussi inscrit sur l’horizon de la miséricorde. Passant devant le comptoir des impôts, Jésus regarda Matthieu dans les yeux. C’était un regard riche de miséricorde qui pardonnait les péchés de cet homme, et surmontant les résistances des autres disciples, il le choisit, lui, le pécheur et le publicain, pour devenir l’un des Douze » (Pape François &8), ces Douze que Jésus avait choisi « pour être avec lui et pour les envoyer prêcher » la Bonne Nouvelle de l’Amour (Mc 3,13-19).

Coeur de Jésus- Paray le MonialEn accueillant pour nous mêmes le pardon de toutes nos fautes donné en surabondance par Jésus, « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29), « l’Astre d’en haut qui nous a visités dans les entrailles de Miséricorde de notre Dieu » (Lc 1,76-79), en découvrant l’absolue gratuité de l’Amour qui comble d’autant plus, par amour, ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire les plus grands pécheurs (Lc 5,31-32), ceux qui, à leurs propres yeux et aux yeux des hommes, ne méritent surtout pas ce qu’ils ont reçu, nous sommes ensuite invités à travailler le plus possible avec le Christ pour que le plus grand nombre puisse aussi bénéficier gratuitement, par amour, de tous ces bienfaits… Car là se cache la vraie vie, la vraie joie, la vraie paix, un trésor devant lequel tout le reste ne peut que faire pâle figure… « Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l’homme qui l’a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète ce champ. (45) Ou encore : Le royaume des Cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines. (46) Ayant trouvé une perle de grande valeur, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète la perle » (Mt 13,44-46).

Les disciples de Jésus sont donc avant tout invités à être les heureux témoins de cette Miséricorde infinie qu’ils ont accueillie pour eux-mêmes… Apparaissant à ses disciples, le Christ ressuscité leur dit (Lc 24,46-48) : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, (47) et que la conversion serait proclamée en son nom, pour le pardon des péchés, à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. (48) À vous d’en être les témoins » (Lc 24,46-48). Témoins de la Résurrection, mais aussi témoins qu’une « conversion » sincère est aussitôt comblée par « le pardon des péchés » donné en surabondance… « Annonce tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde » (Mc 5, 19).

2 – Nous sommes tous invités à faire miséricorde à tous ceux et celles qui nous entourent, comme le Seigneur lui-même nous a faits miséricorde… Reprenons cet extrait de la Bulle d’Indiction du Pape François pour ce Jubilé extraordinaire de la Miséricorde que nous avons déjà cité peu après le début du second point, mais que nous allons reprendre en allant plus loin, jusqu’à nous, jusqu’à notre agir qui devrait être « à l’image et ressemblance » (Gn 1,26-27) de celui de Dieu :

FILE PHOTO 27DEC83 - Pope John Paul II meets with his would-be assasin, Turkish gunman Mehmet Ali Agca in his prison cell in December 1983. Italy granted Agca clemency June 13, the presidential palace said. Agca has still to serve part of a sentence in Turkey for killing a journalist in 1978. PH

« La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous voir heureux, remplis de joie et de paix. L’amour miséricordieux des chrétiens doit être sur la même longueur d’onde. Comme le Père aime, ainsi aiment les enfants. Comme il est miséricordieux, ainsi sommes-nous appelés à être miséricordieux les uns envers les autres » (& 9). « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6,36 ; Nouvelle Traduction Liturgique). « Montrez-vous compatissants, comme votre Père est compatissant » (Lc 6,36 ; BJ). « Soyez généreux comme votre Père est généreux » (Lc 6,36 ; TOB). Telle est l’invitation que Jésus nous lance avec ce seul texte du Nouveau Testament où la notion « d’entrailles » de miséricorde et de compassion est appliquée à un homme, un Samaritain :

Lc 10,25-37 (v. 33) : « Et voici qu’un docteur de la Loi se leva

et mit Jésus à l’épreuve en disant :

« Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? »

(26) Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? »

(27) L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. »

(28) Jésus lui dit : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu vivras. »

 

(29) Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? »

(30) Jésus reprit la parole : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à moitié mort. (31) Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté. (32) De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté.

(33) Mais un Samaritain, qui était en route, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de compassion, καὶ ἰδὼν ἐσπλαγχνίσθη. (34) Il s’approcha, et pansa ses blessures en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui. (35) Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : “Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai.”

(36) Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? »

(37) Le docteur de la Loi répondit : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même. »

Pape François et l'Esprit Saint

« En résumé, nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été fait miséricorde.  Le pardon des offenses devient l’expression la plus manifeste de l’amour miséricordieux, et pour nous chrétiens, c’est un impératif auquel nous ne pouvons pas nous soustraire. Bien souvent, il nous semble difficile de pardonner ! Cependant, le pardon est le moyen déposé dans nos mains fragiles pour atteindre la paix du cœur. Se défaire de la rancœur, de la colère, de la violence et de la vengeance, est la condition nécessaire pour vivre heureux. Accueillons donc la demande de l’apôtre : « Que le soleil ne se couche pas sur votre colère » (Ep 4, 26). Ecoutons surtout la parole de Jésus qui a établi la miséricorde comme idéal de vie, et comme critère de crédibilité de notre foi : « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7). C’est la béatitude qui doit susciter notre engagement tout particulier en cette Année Sainte » (Pape François &9).

                                                                                                                      D. Jacques Fournier

[2] SPICQ C., « σπλάγχνon« , Lexique théologique du Nouveau Testament (Paris 1991) p. 1409s.

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Comment Dieu communique-t-il ?

Le Père « communique » par son Fils éternel, Lui que nous appelons « le Verbe fait chair » (Jn 1,14) lorsque nous évoquons son Incarnation. Et c’est en tant que Fils qu’il est Parole éternelle du Père. En effet, le Père ne cesse de lui dire : « Tu es mon Fils bien aimé » (Mc 1,11 ; 9,7), autrement dit « je t’aime »… Mais « Dieu Est Amour » (1Jn 4,8.16) et c’est parce qu’Il Est Amour qu’il est éternellement Don gratuit de Lui-même, Don gratuit de ce qu’Il Est en Lui-même… Cette réalité est évoquée dans la Bible par l’image de la Source d’Eau Vive (Jr 2,13 ; 17,13 ; Ps 42-43…), du Soleil (Ps 84,12 (TOB) ; Mt 5,43), de la pluie (Is 55,10-11 ; Mt 5,43), etc… Autrement dit, le Père Amour ne cesse de donner au Fils, et cela de toute éternité, tout ce qu’Il Est en Lui-même, lui donnant ainsi d’Être ce que Lui, le Père, Il Est de toute éternité : « Le Père aime le Fils et il a tout donné (« et il donne tout » ; parfait grec) en sa main » (Jn 3,35). Le Fils est alors cet Unique Engendré (Jn 1,14.18), fruit éternel de l’amour du Père en acte… C’est à ce titre qu’il est tout entier « Parole de Dieu », Parole du Père, qui, en acte, ne cesse de lui dire « je t’aime » en se donnant tout entier à lui… Bien distinct du Père, le Fils est alors « né du Père avant tous les siècles, engendré non pas créé, de même nature que le Père, Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu » (Crédo).

Or toute la mission de Jésus consiste à nous révéler le projet de Dieu sur nous. Et nous avons tous été créés gratuitement, par amour, par le Don du Souffle de Dieu qui, en nous, est à l’origine de notre vie (Gn 2,4b-7), et cela « pour reproduire l’image du Fils » (Rm 8,29). Autrement dit, nous sommes tous appelés à recevoir nous aussi, gratuitement, par amour, ce Don que le Père ne cesse de faire au Fils, ce Don par lequel le Père l’engendre en Fils, ce Don qui est l’expression même de son « Je t’aime » éternel… Mais alors… si nous acceptons de le recevoir, gratuitement, et cela sans aucun mérite de notre part, ce serait plutôt le contraire (…), ce Don va lui aussi faire en nous ce qu’il fait dans le Fils de toute éternité : nous engendrer en fils, à l’image du Fils, en nous donnant de participer nous aussi, selon notre condition de créatures, à la Plénitude de cette nature divine qui est celle du Fils, en tant qu’il la reçoit lui aussi du Père depuis toujours et pour toujours… Voilà pourquoi le Fils est tout entier « Parole » pour nous, puisque nous sommes tous appelés, tel est le projet de Dieu, à être un jour, pleinement, ce qu’Il Est Lui-même ! Mais bien sûr en tant que personnes humaines créées, Lui étant une Personne divine non créée, engendrée par le Père depuis toujours et pour toujours, et c’est « par Lui que tout a été fait » (Jn 1,3), nous compris…

Mais ce verbe « communiquer » peut prendre pour Dieu un autre sens… Le Père « communique » avec nous par celui qui est tout entier « Parole » pour nous, et donc « chemin » à suivre en faisant comme Lui : nous tourner de tout cœur vers le Père (« Repentez-vous », première Parole de Jésus en St Marc, 1,15), pour demeurer dans l’Amour du Père, en acceptant d’en être nous aussi les heureux bénéficiaires, comblés par le Don de l’Amour qui accomplira en nous son œuvre : nous engendrer à la Plénitude de la vie divine, en fils à l’image du Fils. « Si vous gardez mes commandements », et « son commandement est vie éternelle », « vous demeurerez en mon amour, comme moi j’ai gardé les commandements de mon Père et je demeure en son amour » (Jn 15,10 ; 12,50). Et c’est là où le verbe « communiquer » a un double sens en Dieu : Dieu « communique », au sens de « donner », par notre foi au Fils qui se traduira alors par un « recevoir ». Mais cette œuvre est cette fois celle de l’Esprit Saint, qui procède du Père et du Fils, autrement dit qui se reçoit de toute éternité du Père et du Fils, comme le Fils se reçoit de toute éternité du Père… La traduction de la TOB pour Jn 16,12-15 est tout particulièrement belle à ce sujet : « Il me glorifiera », dit Jésus de l’Esprit Saint, « l’Esprit de vérité », « car il recevra de ce qui est à moi », et c’est bien ce qu’il fait depuis toujours et pour toujours, « et il vous le communiquera. Tout ce que possède mon Père est à moi », puisque le Père donne tout ce qu’il est, tout ce qu’il a au Fils, l’engendrant ainsi en Fils, « c’est pourquoi j’ai dit qu’il vous communiquera ce qu’il reçoit de moi », et cette fois, Jésus emploie bien un présent pour le verbe « recevoir », qui de fait est éternel : l’Esprit ne cesse de se recevoir (du Père) et du Fils en tant qu’il « procède du Père et du Fils » (Crédo)…

Autrement dit, par l’Esprit Saint qui est « Seigneur et qui donne la vie » (Crédo), « Dieu communique » en nous donnant d’avoir part à ce qu’Il Est en lui‑même… « Dieu est Amour », et donc Don de Lui-même… « Dieu est Esprit » (Jn 4,24) ? Il donne l’Esprit, un Esprit qui est Vie, un Esprit qui vivifie… Et c’est ainsi que nous disons : « Je crois en l’Esprit Saint qui est Seigneur et qui donne la vie ».

Voilà comment Dieu ne cesse de nous parler en silence en nous donnant l’Esprit qui est tout à la fois Vie, Paix, Joie douce et discrète… Et le Père n’a qu’une Parole à nous dire, une Parole qui correspond en fait à ce qu’il vit continuellement à notre égard : « Je vous aime ». C’est le résumé de tout ce que Jésus a à nous transmettre de la part du Père : « Le Père Lui-même vous aime » (Jn 16,27). Et il le fait en « témoin », puisque c’est ce qu’il « entend » du Père depuis toujours et pour toujours… Voilà pourquoi il nous dit : « Tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jn 15,15). « Père, les paroles que tu m’as données », « Tu es mon Fils bien-aimé », « je t’aime », « je les leur ai données », « le Père Lui-même vous aime » (Jn 17,8)…

Tout ceci se résume avec Jn 3,34 :

  • Dieu communique par une Parole audible, intelligible: « Celui que Dieu a envoyé prononce les Paroles de Dieu » (Jn 3,34 a)…
  • Dieu communique par le Don qu’il ne cesse de faire de Lui-même (« Dieu est Esprit » (Jn 4,24), il donne donc l’Esprit) : … « car il donne l’Esprit sans mesure» (Jn 3,34b), un « Esprit qui est vie » (Ga 5,25), un « Esprit qui vivifie » (Jn 6,63 ; 2Co 3,6).

A nous maintenant de nous convertir, de nous repentir, jour après jour, avec le secours et la grâce de Dieu, pour nous tourner de tout cœur vers le Père, comme le Fils l’est de toute éternité (Jn 1,18), et demeurer ainsi avec Lui dans cet Amour du Père qui n’est que Don de Lui-même, un Don par lequel il ne cesse d’engendrer à la vie, à sa Vie… Alors, nous recevrons nous aussi, avec le Fils, ce Don que le Fils reçoit du Père de toute éternité, un Don par lequel le Père l’engendre en Fils, un Don par lequel nous serons engendrés à notre tour en Fils à l’image du Fils… Alors notre vocation sera accomplie, et telle est la vocation de tout homme quel qu’il soit sur cette terre… « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté » (Lc 2,14 ; St Jérôme)… « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix aux hommes objets de sa complaisance » (Lc 2,14 BJ). « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et sur la terre paix pour ses bien-aimés » (Lc 2,14 TOB), car Dieu dans son Amour ne cesse de répandre en surabondance sur le monde tout ce qu’Il Est en Lui-même… « Dieu est Esprit » (Jn 4,24) ? Gratuitement, par amour, il ne cesse de donner l’Esprit, et « le fruit de l’Esprit est amour, joie, paix » (Ga 5,22)… Alors, « paix à tous les hommes de bonne volonté »…

                                                                                                                                            D. Jacques Fournier

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Tous appelés à être sauvés par Dieu de la Colère de Dieu…

« Dieu est Amour » écrit par deux fois St Jean (1Jn 4,8.16). « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 15,12), nous demande-t-il. « Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons et tomber la pluie sur les justes et les injustes » (Mt 5,43-45). « Ne te laisse pas vaincre par le mal, sois vainqueur du mal par le bien« , nous dit St Paul (Rm 12,21). Or l’Ancien Testament nous présente très souvent Dieu comme se mettant en colère face au mal, une colère qui l’amène à répondre au mal par le mal avec parfois beaucoup de violence… Un texte va même jusqu’à nous le montrer prenant du plaisir à détruire ! « Parce que tu n’auras pas obéi à la voix de Yahvé ton Dieu, autant Yahvé avait pris plaisir à vous rendre heureux et à vous multiplier, autant il prendra plaisir à vous perdre et à vous détruire » (Dt 28,63). Et le prophète Ezéchiel nous le montre « allant même jusqu’à leur donner des lois qui n’étaient pas bonnes et des coutumes dont ils ne pouvaient pas vivre, et je les souillai par leurs offrandes, en leur faisant sacrifier tout premier-né, pour les frapper d’horreur, afin qu’ils sachent que je suis Yahvé » (Ez 20,25-26). Nous sommes ici au comble de l’horreur… 

Comment les auteurs de l’Ancien Testament ont-ils pu s’imaginer que Dieu pouvait être ainsi ? Quelle était donc leur compréhension du monde ? Comment percevaient-ils le problème du mal et de ses conséquences, et surtout quels liens établissaient-ils entre le mal et Dieu ? Gerhard Von Rad, dans sa « Théologie de l’Ancien Testament », a enquêté sur les croyances anciennes du monde oriental, des croyances qui ont influencé la manière dont les auteurs de l’Ancien Testament se représentaient Dieu et sa manière de réagir face au mal… Mais d’étape en étape, leur cheminement s’est affiné… jusqu’à atteindre son sommet: « Dieu est Amour‘, et il n’Est qu’Amour…

Nous commencerons ici par regarder le thème de la Colère de Dieu dans le Livre de l’Exode, en soulignant à quel point Dieu y est perçu de manière « humaine », et en mettant en lumière quelques belles contradictions… Puis nous regarderons rapidement les colères humaines dans la Bible, pour ensuite faire une rapide synthèse des informations trouvées dans les textes parlant de la Colère de Dieu: ses destinataires, les agents de cette Colère, ses effets, les raisons qui la déclenchent… Puis nous verrons, avec Gerhard Von Rad, comment deux principes simples peuvent nous aider à rendre compte de tout cela… Enfin, nous regarderons, avec de magnifiques textes de l’Ancien Testament lui-même, quelles sont les attitudes et les réactions de Dieu face au mal, autant d’éléments que l’on retrouve, avec une pureté inégalée, dans la vie et les Paroles du Christ…

En regardant cette « Colère de Dieu » bien en face, en l’interprétant à la lumière des clés qui ont présidé à une telle vision de Dieu, nous ne pourrons que constater à quel point c’est bien un seul et même Dieu qui a guidé tout ce cheminement biblique. Certes, il a pris les hommes tels qu’ils étaient, et heureusement, il en fait toujours de même avec nous. Mais avec une infinie patience, de génération en génération, par ses prophètes et dans la prière, sa Lumière, présente dès les tout débuts, a, petit à petit, percé nos ténèbres, illuminé nos intelligences, jusqu’à se révéler, dans toute sa splendeur,avec le Christ, « le Verbe fait chair » (Jn 1,14), « la Lumière du monde » (Jn 8,12), révélation parfaite du Mystère éternel d’un « Dieu Amour« … « Moi et le Père nous sommes un » (Jn 10,30), dans l’unité d’un même Esprit (Ep 4,3), d’une même Lumière (Jn 12,46; 1Jn 1,5)… « Recevez l’Esprit Saint« … C’est en ce Don que nous espérons aujourd’hui pour qu’il nous guide, jour après jour, vers la vérité tout entière… « L’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom vous enseignera tout… Il vous introduira dans la vérité tout entière » (Jn 14,26; 16,13)… A nous maintenant de lui demander sa Présence et son soutien, le plus simplement possible, et de partir à l’aventure dans la recherche de la vérité, en étant, avec Lui, ouvert à tout…

Bonne lecture à vous… 

D. Jacques Fournier

Pour des raisons de commodités au niveau de la mise en page et aussi parfois, au niveau des citations bibliques en leur langue originale, traduites et expliquées, nous vous invitons à cliquer sur le titre ci-dessous: il vous donnera accès au document en PDF… 

Sauvés par Dieu de la Colère de Dieu-PDF