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28ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 1-14)- Homélie du Père Louis DATTIN

Invités aux noces

Mt 22, 1-14

L’Évangile est un grand livre d’images : quand on voit le succès des retransmissions télévisées des mariages princiers d’aujourd’hui, que ce soit à Londres ou à Monaco, l’image employée par Jésus n’a pas tellement vieillie : un roi qui célébrait les noces de son fils.

Essayons d’en retenir l’essentiel : lisons cette parabole en transparence. Jésus, là encore, veut nous parler du Royaume des cieux et nous pensons tout de suite à ce que le prêtre nous rappelle au moment de la communion : « Heureux les invités au repas du Seigneur ».

La réalité, c’est que Dieu rêve d’une fête éternelle pour l’humanité. C’est la plus belle histoire du monde, c’est la plus belle histoire d’amour. Il était une fois un Dieu heureux, tellement heureux qu’il voulut faire partager son bonheur. Ce Dieu là vit d’amour : « 3 personnes » qui s’aiment, qui se donnent les uns aux autres, une joie infinie, dans une totale transparence, dans un partage absolu, un bonheur sans mélange, durable, éternel.

Quand on éprouve tant de bonheur, comment ne pas avoir envie de partager encore plus ce bonheur ? Alors, Dieu décide de créer l’humanité pour l’introduire dans sa famille, dans sa vie, dans son amour et ce fut l’incarnation du Fils.

« Le Royaume des cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils ».

Oui, Dieu marie son Fils : Jésus est amoureux de l’humanité, il nous aime passionnément. Cette image des noces court comme un fil d’or tout au long de la Bible : Osée, Isaïe, Ezéchiel proclament cette union de Dieu avec les hommes : le Cantique des Cantiques, les évangélistes, l’Apocalypse, …

Oui, Dieu, d’un bout à l’autre de la révélation, nous déclare son amour et ses relations avec les hommes ne sont qu’alliance et épousailles.

Entre nous, qu’est-ce-qui changerait dans ma religion ? Beaucoup, sans doute, si j’arrivais à la considérer comme une belle histoire d’amour ?

Cette parabole nous révèle tout d’abord que Dieu invite, que Dieu appelle et que l’homme est libre de répondre  ̏oui  ̋ou  ̏non ̋.

 

« Heureux les invités au repas du Seigneur » : la messe n’est pas une bonne petite dinette entre copains. C’est Dieu qui invite tel jour, telle heure : le prince héritier célébrera ses noces. Vous êtes cordialement invités au festin qui suivra, sans engagement avec les hommes,  » Répondre SVP « .

 

 

L’événement est de taille ! Pourtant, ici, la parabole devient tragique, comme tant de paraboles de la fin de la vie de Jésus : on va se heurter à la liberté de l’homme.

« Mon repas est prêt. Venez, venez à mon repas d’amour ».

« Mais les invités n’en tiennent aucun compte. Ils n’ont pas le temps ! »

La description de l’inconscience de ces invités est d’une brûlante actualité.

« Comment voulez-vous que j’aille au repas de Jésus ? Je n’ai que mes dimanches pour faire du foot ou du tennis », dit l’un.

« Quand j’ai dansé toute la nuit du samedi au dimanche, comment voulez-vous que je participe au repas de Jésus ? ».

« Moi, mon père, je vais à la messe le mardi au Chaudron, le dimanche, c’est le jour où nous allons à la plage ».

Comment se fait-il qu’il nous arrive ainsi de préférer nos petites affaires à l’invitation de Dieu ?

« Eux, sans en tenir compte, s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce ».

On essaie si naturellement de placer les moments de rencontre avec Dieu, dans les temps morts, dans les heures ou les jours où l’on n’a rien à faire, après le travail, les occupations quotidiennes, les loisirs même. Et, très vite, il ne reste plus de temps libre. On commence par avoir mauvaise conscience et puis on trouve des excuses :  » travailler, c’est prier « .

Petit à petit, on ne prie plus : « Mon père, je n’ai plus le temps de prier ». Jésus-Christ dérange : « J’avais mes petits projets et voici qu’il m’invite ». Mais le repas de noces ne peut rester en souffrance et Dieu continue d’inviter.

« Ces serviteurs s’en allèrent par les chemins et rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent : mauvais et bons ».

L’appel de Dieu est universel : il s’adresse à tous, à chacun de nous et surtout aux pécheurs. Il faut que la salle de noces soit remplie. L’entrée est gratuite : tous peuvent y accéder.

Mais Dieu nous respecte trop pour nous y forcer : il faut s’engager positivement. Il ne veut pas faire de nous des mendiants, des assistés. Nous devons être responsables pour une part, de notre participation à la vie éternelle. Le Salut n’est pas automatique. Il faut correspondre librement à l’invitation de Dieu.

Allons-nous répondre à l’invitation ? C’est une histoire d’amour. Nous avons parfois une conception élitiste de l’Église : le sentiment qu’elle devrait éliminer de son sein tous ceux qui ne mènent pas une vie évangélique !… Mais ne serais-je pas alors le premier à devoir en sortir ?

C’est vrai que l’Église, n’étant pas une secte, accueille plutôt largement et que cela ne satisfait pas ceux qui voudraient qu’elle donne une image sans bavure.

Serait-ce bon d’ailleurs que l’Église veuille donner une telle image ?

Ne serait-ce pas la route ouverte à l’hypocrisie, comme pour les pharisiens ?

Il est vrai que la fin de la parabole parle d’un tri qui doit se faire. Mais attention ! Pas tout de suite ! Mais « à la fin des temps  » « lorsque le roi viendra pour regarder les convives ».

C’est également ce que disaient les paraboles de l’ivraie et du bon grain : « Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges surviendront et sépareront les mauvais d’avec les justes ». Qui veut entrer au festin doit porter le vêtement de noces !

L’entrée au festin du Royaume ne dépend pas de la race, de l’appartenance à un peuple mais de la conversion, du changement de vie, des œuvres bonnes, …

En recevant le vêtement blanc du Baptême : nous avons été invités à « garder intacte la dignité des fils de Dieu « .

Le vêtement du peuple nouveau, le vêtement de noce :

  • C’est le Christ que nous avons revêtu,

  • C’est notre dignité de chrétiens,

  • C’est la grâce de Dieu,

  • C’est une invitation à mener une vie à la hauteur de ce que nous avons reçu.

Dieu ne conçoit pas l’Église de son Fils comme une communauté parfaite tout de suite, mais comme une collectivité extrêmement mélangée où se rencontrent toutes les races et toutes les conditions sociales.

Tous les hommes sont invités, blancs ou noirs, riches ou pauvres, israéliens, palestiniens, bien portants autant que les malades, et même les mauvais autant que les bons : c’est un festin universel ! Et le Seigneur est là qui attend et qui veille.

D’où vient alors que certains risquent d’être rejetés ? Ils n’ont pas le « vêtement de noce » : ils ont cru qu’il suffisait d’être appelés, mais ils n’ont pas répondu à l’offre de Dieu, ils n’ont pas revêtu le « manteau de la grâce ».

Les « noces de l’agneau » sont un pur chant de fête. Une seule exigence : « Oui, Seigneur, tu m’invites ; j’arrive tout de suite… » AMEN




27ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21, 33-43) – Homélie du D. Alexandre ROGALA

Pauvres grands-prêtres et anciens du peuple ! Après avoir suggéré que malgré leurs fonctions, ils ne faisaient pas la volonté de Dieu dans le texte d’évangile de dimanche dernier, dans celui d’aujourd’hui, Jésus les accuse d’être des meurtriers !

Or, nous qui avons l’habitude de venir à la messe, et d’entendre la proclamation de textes d’évangile accompagnés d’une explication ou d’une réflexion, nous savons bien qu’en général, lorsque Jésus s’adresse à un personnage pour lui faire un reproche, c’est aussi à nous qu’il s’adresse.
Est-ce que cela signifie que Jésus nous accuse d’être des meurtriers ?! Ne tirons pas de conclusions trop vite, et regardons de plus près les textes que nous propose la liturgie ce dimanche.

Dans trois des quatre textes que nous avons entendus il est question d’une vigne, et d’un jugement du Seigneur: dans la première lecture (Is 5, 1-7), dans le Psaume (79), et dans l’évangile (Mt 21, 33-43). Ces textes raisonnent les uns avec les autres.
Par conséquent, il me semble que si nous voulons entendre ce que Jésus veut nous dire aujourd’hui, il est nécessaire de se pencher d’abord sur le texte dont il s’est inspiré pour composer la parabole dite « des vignerons homicides ». Ce texte n’est autre que le « chant de la vigne » d’Isaïe que nous avons entendu en première lecture.

La fin du texte nous donne une information précieuse pour comprendre la parabole de Jésus. Isaïe écrit: « La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël. Le plant qu’il chérissait, ce sont les hommes de Juda. » (v. 7).
L’image de la vigne appliquée au peuple se rencontre assez fréquemment dans la Bible. Il est possible que ce soit parce que la vigne est un symbole de l’amour comme le suggère le début de notre texte: « Je veux chanter pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne » (v. 1). Ce verset fait d’ailleurs écho à plusieurs passages du Cantique des cantiques dans lesquels il est aussi question de bien-aimé(e) et de vigne. Par exemple:

« Ne regardez pas à ma peau noire : c’est le soleil qui m’a brunie. Les fils de ma mère se sont fâchés contre moi : ils m’ont mise à garder les vignes. Ma vigne, la mienne, je ne l’ai pas gardée…Mon bien-aimé, pour moi, est un rameau de cypre parmi les vignes d’Enn-Guèdi. ». (Ct 1, 6; 14)

Ensuite, le chant de la vigne d’Isaïe nous enseigne que l’amour du Seigneur pour son peuple se vérifie dans ses actions:

« Il en retourna la terre, en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. » (v. 2).

Le Seigneur prend soin de sa vigne ; Il prend soin de son peuple
Mais alors que Dieu avait tout fait pour que sa vigne produise de beaux raisins, c’est à dire des fruits de justice, la vigne bien-aimée en a donné de mauvais. C’est la raison pour laquelle, Dieu a permis que la vigne soit piétinée par des peuples voisins.

Le psaume 79 que nous avons chanté en réponse à la première lecture fait mémoire de ces événements. Dans un premier temps, Dieu prend soin de sa vigne: « La vigne que tu as prise à l’Égypte, tu la replantes en chassant des nations » (v. 9). Dieu libère son peuple de l’esclavage en Egypte et le conduit jusque’en Terre Promise. Mais dans un deuxième temps, Dieu permet que la vigne soit dévastée: « Pourquoi as-tu percé sa clôture ? Tous les passants y grappillent en chemin ; le sanglier des forêts la ravage et les bêtes des champs la broutent » (v. 13-14).

L’évangile d’aujourd’hui est la suite du débat entre Jésus et les autorités religieuses que nous avons commencé la semaine dernière avec la parabole des « deux fils ». Les grands-prêtres et les anciens du peuple connaissent bien l’Écriture. C’est pourquoi, Jésus leur dit une parabole qui s’inspire du chant de la vigne d’Isaïe qu’ils connaissent bien.

Dans la première lecture nous avons appris que la vigne est une image d’Israel. Si la vigne est une image d’Israel, et que le propriétaire de la vigne est le Seigneur, qui sont les vignerons ? La réponse est évidente ! Les vignerons ne peuvent être que les autorités religieuses d’Israël, c’est à dire les grands prêtres et les anciens avec qui Jésus est en train de discuter.

La parabole de Jésus met l’accent sur le comportement coupable des vignerons. Derrière le sort que ces derniers réservent aux serviteurs que le propriétaire envoie auprès d’eux, nous pouvons reconnaitre le sort qu’Israël a parfois réservé aux prophètes. Prenons par épisode parlant, dans le Deuxième Livre des Chroniques, dans lequel un prophète du nom de Zacharie est tué après un commandement du roi:

« Pour ramener les habitants de Juda à lui, Dieu envoya chez eux des prophètes. Ceux-ci transmirent le message, mais personne ne les écouta. Dieu revêtit de son esprit Zacharie, le fils du prêtre Joad. Zacharie se présenta devant le peuple et lui dit : « Ainsi parle Dieu : Pourquoi transgressez-vous les commandements du Seigneur ? Cela fera votre malheur : puisque vous avez abandonné le Seigneur, le Seigneur vous abandonne. » Ils s’ameutèrent alors contre lui et, par commandement du roi, le lapidèrent sur le parvis de la Maison du Seigneur » (2 Ch 24, 19-21).

Les vignerons traitent de la même façon les trois serviteurs. Malgré cela, le propriétaire de la vigne, Dieu, ne se décide toujours pas à intervenir de façon punitive. Au contraire, il montre sa patience et sa miséricorde en leur envoyant son fils avec l’espoir qu’ils le respectent.

« Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux : ‘Voici l’héritier : venez ! tuons-le, nous aurons son héritage !’ » Le plan des vignerons est irrationnel ! Le propriétaire de la vigne est certes miséricordieux et patient, mais donnerait-il sa vigne en héritage à des vignerons qui ont maltraité et tué trois de ses serviteurs et son fils ? En racontant ce raisonnement absurde, Jésus veut faire comprendre aux grands-prêtres et aux anciens du peuple qui ont le projet de le faire mourir, que leur plan est voué à l’échec ! Et l’ironie de cette situation, c’est que c’est les grand prêtres et les anciens eux-mêmes qui donnent leur propre condamnation:

« Eh bien ! quand le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons ? » On lui répond : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il louera la vigne à d’autres vignerons, qui lui en remettront le produit en temps voulu. » (v. 41)

Maintenant que nous comprenons mieux la parabole, laissons nous interroger par elle. Finalement, Jésus nous traite t-il de meurtriers ? Je ne pense pas. Cependant, le Maître veut nous donner deux avertissements. Celui que nous allons recevoir dépend du personnage de la parabole auquel nous nous identifions. Puisque le propriétaire de la vigne, c’est Dieu, et que son fils, c’est le Christ, il ne reste que deux personnages auxquels nous pouvons nous identifier: les vignerons et les serviteurs.

Il me semble que l’image des vignerons interroge particulièrement ceux qui exercent dans l’Église un ministère ordonné, ainsi que ceux qui ont des responsabilités dans la communauté chrétienne. Dans la parabole, si les vignerons battent, et tuent les serviteurs du propriétaire, c’est parce qu’ils ne veulent pas remettre à celui-ci le produit de la vigne. Les vignerons veulent garder les fruits pour eux.
Et moi, pour qui est-ce que je travaille ? Pour le Seigneur ? Ou pour ma propre gloire ? Peut-être que mes intentions ne sont pas pures. Et que je cherche à être bien vu des autres ? Voilà la première mise en garde que Jésus adresse à ceux qui exercent des responsabilités dans l’Église.

Si tout le monde ne peut pas s’identifier aux vignerons, l’image des serviteurs qui sont battus et tués dans la parabole parle à tout chrétien.
En 2017, j’ai fait un temps de volontariat au Vietnam. Et l’un des frères de la communauté avec laquelle je vivais, m’a dit qu’au Vietnam, la religion d’un individu est écrite sur sa carte d’identité, et souvent, quand il est écrit qu’une personne est chrétienne, cela peut lui porter préjudice. Être chrétien est parfois un critère de discrimination. Pour un chrétien, il peut être plus difficile de trouver un emploi ou d’intégrer une université par exemple. En apprenant cela, j’ai été choqué, et j’ai ressenti un fort sentiment d’injustice dans mon cœur. Mais en fait, je n’aurais pas dû être surpris. Qui de nous n’a jamais été méprisé, ou tourné en dérision à cause de sa foi chrétienne ?
Les serviteurs de la parabole nous rappellent que si le disciple du Christ est comme son maître, il doit s’attendre à être maltraité. Jésus nous avertit que vouloir le suivre signifie accepter de porter la croix à sa suite .

À la fin du texte d’évangile, Jésus dit que le royaume de Dieu sera donné à une nation qui lui fera produire ses fruits, c’est à dire une nation qui accomplira la volonté du Père Céleste (cf. Mt 7, 15ss.).

Comment faire pour porter les fruits du Royaume de Dieu ?

Dans la deuxième lecture, saint Paul nous donne la recette:

« En toute circonstance, priez et suppliez, tout en rendant grâce, pour faire connaître à Dieu vos demandes. Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir, gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus. » (Ph 4, 6b-7).

La paix de Dieu nous a déjà été donné. Pour porter les fruits du Royaume de Dieu, des fruits « dignes d’être aimés et honorés » (v. 8), nous devons demeurer dans la paix de Dieu. Pour y demeurer, il n’y a qu’un seul moyen: la prière, c’est à dire entretenir une relation d’amour avec Dieu.

Tournons-nous donc vers le Seigneur, et demandons Lui la grâce de Lui être fidèle en lui redisant les paroles du Psaume de tout notre cœur:

« Jamais plus nous n’irons loin de toi: fais-nous vivre et invoquer ton nom ! Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ; que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés » (Ps 79, 19-20).

                                                        Diacre Alexandre ROGALA (M.E.P.)




27ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21, 33-43) – par Francis COUSIN

« La vigne du Seigneur de l’univers,

c’est la maison d’Israël. »

Ou plutôt, on devrait dire « c’était », puisque depuis que Jésus est venu sur terre, « la vigne du Seigneur », c’est l’Église.

Troisième dimanche d’affilée où Jésus parle de vigne, en fait trois paraboles qui se suivent dans une même rencontre avec les grands prêtres et les anciens du peuple, le lundi qui précède la Pâque et la mort de Jésus sur la croix … et qui préfigure justement celle-ci.

On ne peut réparer ce passage de l’Évangile de celui du prophète Isaïe de la première lecture, que tous connaissaient, aussi bien Jésus que ses contradicteurs du jour.

Dans les deux cas, l’ami d’Isaïe ou le maître du domaine de Jésus représente Dieu, qui aime sa vigne et qui en prend grand soin : la terre est retournée, bêchée, épierrée, entourée d’une clôture, avec un pressoir et une tour de garde … pour éviter que des intrus ne viennent y prendre des raisins …

Dans le texte d’Isaïe, malgré un « plant de qualité », la vigne ne donna que de mauvais raisins … Déception de son ami, du propriétaire de la vigne qui, dégouté, se propose d’enlever la clôture et de laisser la vigne à l’abandon …

« Le plant qu’il chérissait, ce sont les hommes de Juda. Il en attendait le droit, et voici le crime ; il en attendait la justice, et voici les cris. » (Is 5,7).

Dans l’évangile, après avoir bichonné sa vigne, et louée celle-ci à des vignerons, le maître pars en voyage. Il fait totalement confiance à ses vignerons … L’amour de Dieu est total, il ne fait pas de commentaires : il faut faire-ci, il faut faire-ça. Pour lui, le bon-droit et la justice sont évidents …

Les choses se gâtent quand vient le temps du paiement de la location. Les vignerons refusent de payer : le maître est loin … ils font ce qu’ils veulent … en fait, ils se sont appropriés la vigne … et les serviteurs en font les frais : galets … coups … meurtres. Pareil avec d’autres plus nombreux …

Ces serviteurs, ce sont les prophètes, envoyés par Dieu auprès du peuple d’Israël, comme Isaïe qui se plaignait que le droit et la justice se soient pas respectés.

Alors le maître « leur envoya son fils, en se disant : “Ils respecteront mon fils. »

Et c’est là où tout s’éclaire pour les auditeurs : le fils dont parle Jésus, c’est lui-même, et les grands prêtres et les anciens l’ont bien compris puisqu’ils l’avaient accusé de blasphème en se prenant pour Dieu.

Mais les vignerons tuèrent le fils … comme Jésus, quatre jours plus tard, par l’intermédiaire des Romains …

Et comme Jésus leur demande quelle sera la réaction du maître de la vigne, ils répondent crânement : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il louera la vigne à d’autres vignerons, qui lui en remettront le produit en temps voulu. »

Dieu ne les a pas tués, bien sûr, mais il a confié sa vigne à d’autres vignerons : « Ceux qui écoutent sa Parole et la mettent en pratique. » (cf Lc 11,28), ceux qui sont sa nouvelle famille : les baptisés de son Église.

Il serait trop facile de ne penser que cette parabole ne concerne que les grands prêtres et les anciens.

Ces paraboles nous concernent tous, en tout temps et en tout lieu …

Et cela nous invite à nous poser questions, à nous qui sommes baptisés :

Est-ce que nous écoutons toujours les paroles de Jésus, toutes, et pas seulement celles qui nous intéressent, qui sont faciles à suivre ?

Est-ce que nous les mettons toujours en pratique ? (Cf Jc 2,17-18)

Est-ce que nous « prions et supplions, tout en rendant grâce, pour faire connaître à Dieu nos demandes. » ? (cf 2° lecture)

Est-ce que « tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d’être aimé et honoré, tout ce qui s’appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela », est-ce que nous les prenons en compte dans nos décisions ? (cf 2° lecture)

Dieu de l’univers reviens !

Du haut des cieux, regarde et vois :

visite cette vigne, protège-la,

celle qu’a plantée ta main puissante,

Jamais plus nous n’irons loin de toi :

fais-nous vivre et invoquer ton nom !

Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ;

que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés.

                                                                                              Psaume 79

 

Francis Cousin

 

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Prière dim ord A 27°

 




27ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21, 33-43) – Homélie du Père Louis DATTIN

 Les vignerons homicides

Mt 21, 33-43

Il y a des paroles de Jésus, dans l’Evangile, que l’on préfèrerait ne pas entendre : elles sont trop rudes. Que faire alors ?

  • nous boucher les oreilles pour ne pas les entendre,

  • attendre que cela se passe,

  • se persuader qu’elles ont été dites pour les autres, mais pas pour nous !

  • protester

« Seigneur, c’est dur à accepter », disent les pharisiens après le discours sur le pain de vie. « Qui peut continuer à t’écouter ? ».

On peut aussi édulcorer, mettre du sucre et enlever le sel. Après tout, Jésus n’a pas adopté ce ton-là avec moi, avec nous ! Allons un peu plus loin dans le texte de l’Evangile : « Les chefs des prêtres et les pharisiens comprirent que Jésus parlait d’eux ».

Il n’y a pas à s’y tromper, c’est bien à eux, et à nous qu’il s’adresse aussi. Dans son désir de toucher des cœurs fermés, blindés à l’Evangile, Jésus hausse le ton et tonne pour se faire entendre coûte que coûte.

« Mais il n’y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre ».

Ces chefs des prêtres, ces gens bien-pensants qui s’estimaient les préférés de Dieu, Jésus, sans doute, avait d’abord compté sur eux, sur leur appui, pour se faire reconnaître auprès du peuple. Il avait pensé qu’ils seraient les auxiliaires de sa mission, ils étaient tellement religieux : seulement voilà c’était des observateurs d’une loi et non les amoureux d’une personne. Ils n’aimaient pas Dieu, ils se contentaient, vaille que vaille, de lui obéir.
Ils ont une mentalité de salariés, d’employés à une vigne qu’ils n’aiment pas, qui est seulement celle du propriétaire, mais qu’ils n’ont pas adoptée. Ces vignerons sont des employés à la petite semaine, ils n’aiment pas la vigne. Ils n’aiment que les fruits qu’elle va produire et qu’ils comptent bien commercialiser à leur profit : combien de chrétiens n’aiment l’Eglise du Christ que dans la mesure où ils vont en profiter, faisant d’elle une exploitation, ne regardant que les fruits à récolter et non le travail à y faire, et non l’amour à déployer pour qu’elle soit plus belle et parce que c’est « la vigne du Seigneur « .

Mentalité du « donnant-donnant », mentalité d’un employé qui s’intéresse beaucoup plus à son salaire de fin de mois qu’à la réussite de l’entreprise dans laquelle il travaille, ne considérant Dieu que comme un patron tout puissant, dont on va profiter au maximum.

« Dieu, on dit que tu es bon, alors nous, on va en profiter ; ta bonté, elle est à notre service, on va te mettre à notre service. Je fais une neuvaine. Je fais un vœu, une promesse. J’ai récité telle prière qui me donne des indulgences. J’ai dit 3 fois  » Gloire au Père « , 10 fois un  » Je vous salue Marie « . Maintenant, j’attends ta réponse. C’est toi qui es en dette. Tu es mon client. Tu dois payer ».

Mais, surprise ! C’est le Seigneur, au temps de la vendange, qui envoie les vendangeurs pour récolter les fruits de la vigne, de cette vigne que nous avons soignée. Alors, là, ça ne marche plus !

Les Juifs ont rejeté Jésus, refusé son message et la vigne est passée à un autre, à une autre : l’Eglise.

« Le Royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui, lui, fera produire son fruit ». Il est exact :

  • que le propriétaire du Domaine, c’est Dieu ;

  • que “ la vigne bien aimée ” dans le beau chant d’Isaïe, c’est le peuple d’Israël, son peuple élu, objet de tous ses soins, vigne aimée du Père : « Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n’ai fait ? »

Ces raisins, ce sont les fruits du maître et nous nous imaginons que nous en sommes les maîtres = tentation perpétuelle de nous accaparer l’œuvre de Dieu : le monde, l’univers, alors qu’il nous est simplement confié pour le faire valoir, le faire prospérer. Non, Dieu n’est pas neutre, débonnaire, permissif. Il aime l’homme au point de lui demander des comptes : il le traite en vrai responsable.

Il y a « un jour de la vendange  » : ce jour où Dieu me demande à l’instant décisif, ce que j’ai fait de tout ce qu’il m’a confié !

Il y a un temps pour la récolte = pas avant : les fruits ne sont pas mûrs, pas après : les fruits sont pourris.

Il y a le temps, et il arrivera pour nous où le Seigneur me demandera, à moi aussi : « Alors, qu’as-tu à me présenter », « Où est la récolte que j’ai espéré de toi ? Où sont les grappes de ton travail ? Les fruits de ton amour ? Je t’ai établi responsable de mon domaine, de mon Eglise : qu’as-tu fait ? »

Les vignerons se saisirent des envoyés, frappèrent l’un, tuèrent l’autre, lapidèrent le troisième. Nous refusons Dieu, c’est un ‟ gêneur ” lorsqu’il vient demander ses fruits : fruits de justice, d’amour, de paix. Nous voulons gérer notre vie, notre vigne pour notre compte personnel : j’accepte mal les exigences divines, les appels divins, « Oh, Dieu n’en demande pas tant ! ».

Eh si ! Et sans doute, plus ! Mais Dieu n’est pas rebuté par nos refus et de nouveau, il envoie d’autres serviteurs, plus nombreux que les premiers. Ils furent traités de la même façon tous ces prophètes qui viennent déranger la société matérialiste avec leurs utopies et leurs idées subversives qui viennent déranger nos plans économiques.

Ils ont tué Gandhi, tué Isaïe, tué le père Popieluszko, tué Jérémie, tué Mgr Romero, tué Martin Luther King, tué Hervé Gourdel, tué Jeanne d’Arc, tué six jésuites en Equateur.

« Il est bon qu’un seul meurt pour tous les autres », « On va faire un exemple : ça les calmera ».

Finalement, il leur envoya son Fils en disant : « Ils respecteront mon Fils », et c’est là, à ce moment de la parabole, qu’elle cesse d’être une parabole, mais l’histoire vraie de Dieu avec les hommes car la suite de l’histoire est historique : histoire vraie. Oui Dieu a été jusque -là : il envoie son propre Fils à des gens qui ont déjà tué de nombreux serviteurs. Dieu ose le risque de l’amour total. Il joue le quitte ou double radical. Il risque son propre Fils, le fruit de sa tendresse trinitaire.

« Dieu nous a aimés jusqu’à nous donner son propre Fils ».

Voyant le fils, les vignerons se dirent :

« Voici l’héritier, allons-y ! Tuons-le ! Nous aurons l’héritage ! ».

 

Notons au passage que le péché des vignerons n’est pas de ne pas avoir fait produire de fruits à la vigne, mais de vouloir s’approprier ces fruits qui ne leur appartiennent pas : c’est cela le péché de l’athéisme, gérer la terre au profit exclusif de l’homme, sans tenir compte qu’elle est propriété et don de Dieu.

L’homme n’accepte plus Dieu comme son bonheur définitif, son bien absolu, le sens de sa vie. Il cherche  » en lui-même  » le bonheur, ce sens, son bien absolu.  » Mort de Dieu  » qui devient inévitablement la mort de l’homme coupé de ses racines, sans Dieu. C’est la mort qui gagne toujours.

Sartre le reconnaîtra : « Sans Dieu, la vie n’a aucun sens et la mort aura le dernier mot ! »

Cette question du refus de Dieu n’est pas seulement celle des Juifs mettant Jésus en croix : c’est aussi de ma vie qu’il s’agit. C’est ma vie qui répond ou qui refuse.

Il n’est pas équivalent d’écouter l’Evangile ou de le mettre en pratique ou de vivre comme si Dieu n’existait pas !

Il s’agit de vivre selon l’amour absolu ou selon le non-amour.

Il s’agit de rendre les fruits à Dieu ou de les garder pour soi !

La vigne de Dieu, c’est la vaste église, c’est notre île, notre quartier. C’est aussi notre famille et finalement, c’est le fond du cœur de chacun d’entre nous. AMEN




27ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21, 33-43) – par le Diacre Jacques FOURNIER

« La parabole des vignerons homicides »…

(Mt 21, 33-43)

  En ce temps-là,  Jésus disait aux grands prêtres et aux anciens du peuple : « Écoutez une autre parabole : Un homme était propriétaire d’un domaine ; il planta une vigne, l’entoura d’une clôture, y creusa un pressoir et bâtit une tour de garde. Puis il loua cette vigne à des vignerons, et partit en voyage.
Quand arriva le temps des fruits, il envoya ses serviteurs auprès des vignerons pour se faire remettre le produit de sa vigne.
Mais les vignerons se saisirent des serviteurs, frappèrent l’un, tuèrent l’autre, lapidèrent le troisième.
De nouveau, le propriétaire envoya d’autres serviteurs plus nombreux que les premiers ; mais on les traita de la même façon.
Finalement, il leur envoya son fils, en se disant : “Ils respecteront mon fils.”
Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux : “Voici l’héritier : venez ! tuons-le, nous aurons son héritage !”
Ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent.
Eh bien ! quand le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons ? »
On lui répond : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il louera la vigne à d’autres vignerons, qui lui en remettront le produit en temps voulu. »
Jésus leur dit : « N’avez-vous jamais lu dans les Écritures : ‘La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux !’
Aussi, je vous le dis : Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à une nation qui lui fera produire ses fruits. »

       

                      

Avec cette parabole, Jésus fait allusion au prophète Isaïe (Is 5), qui avait évoqué le Peuple d’Israël avec l’image d’une vigne. Mais en Isaïe c’est Dieu qui en est le propriétaire, alors que Jésus parle ici « d’un homme », allusion discrète à son Mystère. Il est en effet ce Fils « né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu » qui, « pour nous et notre salut a pris chair de la Vierge Marie et s’est fait homme ». Vrai Dieu et vrai homme, « par qui tout a été fait » (Jn 1,3), Israël et l’humanité tout entière…

Il introduit ensuite dans la parabole une nouvelle image, qui n’apparaît pas en Isaïe : celle des « vignerons ». Leur rôle est de travailler la vigne, d’en prendre soin, pour lui permettre de donner le meilleur d’elle-même. Ils n’oublieront pas qu’ils n’en sont pas les propriétaires, mais des serviteurs appelés,  au moment de la récolte, à donner à qui de droit les fruits qu’elle aura portés. Qui représentent-ils ? « Les Grands Prêtres et les Pharisiens comprirent bien qu’il les visait ». Hélas, eux et leurs prédécesseurs ont voulu garder pour eux et pour eux seuls le produit de la vigne, prenant ainsi la place du propriétaire… Ils n’ont plus voulu servir, obéir, donner, mais être servis, commander et tout garder pour eux… Péché de l’homme, vieux comme le monde…

Aussi quand le propriétaire de la vigne envoie ses serviteurs, les prophètes, pour leur rappeler leur condition véritable, ils ne veulent rien entendre. Ils les « battent », les « tuent », les « lapident »… Puis Jésus modifie encore la parabole, second clin d’œil à son Mystère, en introduisant l’image du fils : le propriétaire décide d’envoyer « son fils en disant : « Ils respecteront mon fils » ». Nous atteignons ici le sommet du texte : la révélation brille avec une intensité toute particulière. Sera-t-elle accueillie ? Non, elle ne fera qu’endurcir encore plus le cœur de ces hommes : ils reconnaîtront bien le Fils, « Celui-ci est l’héritier », mais ils ne veulent pas se repentir : « « Venez, tuons-le et nous aurons son héritage » Et le saisissant, ils le jetèrent hors de la vigne », allusion à la mort de Jésus « hors des » remparts de Jérusalem, « et le tuèrent »…

Quelle folie ! Toute la mission du Fils Unique est en effet d’inviter tous les hommes à partager son héritage. Et quel est-il ? Rien de moins que cette Plénitude de vie divine qu’il reçoit de toute éternité du Père, ce Don par lequel le Père l’engendre « avant tous les siècles » en Fils « de même nature que le Père ». « Recevez l’Esprit Saint », dira le Christ Ressuscité à ses disciples (Jn 20,22), « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63), « l’Esprit qui est vie » (Ga 5,25). « Vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils », écrira St Paul, « et c’est en lui que nous crions « Abba ! », c’est-à-dire : Père ! Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire » (Rm 8,14-17)…

                                                                                                                      DJF




26ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21,28-32) – Homélie du Père Rodolphe EMARD

Les lectures de ce 26ème dimanche nous invitent une fois de plus à convertir nos faux jugements.

Dans la première lecture, le prophète Ézékiel s’adresse au peuple Juif qui a été déporté loin de sa terre natale. Beaucoup pensait que cet exil dans les territoires païens était à cause des fautes des générations passées. Le prophète met réagit contre cette mentalité : il rappelle et ramène chacun à ses responsabilités.

Nous pouvons tirer une leçon de cette lecture : nous avons-nous-aussi à changer nos mentalités ! N’alimentons pas ces tendances à rechercher des boucs émissaires à tous les problèmes que nous rencontrons. N’accusons pas trop vite les autres et encore moins Dieu : « La conduite du Seigneur n’est pas bonne. » Il peut nous arriver dans nos déboires de penser que Dieu n’agit pas bien envers nous, qu’il ne nous comprend pas ou qu’il est il est injuste avec nous.

Chacun est invité à reconnaître ses propres responsabilités dans les situations que nous vivons, sommes-nous certains que notre conduite est toujours bonne ? Comme le suggère la première lecture, nous pouvons nous demander en vérité si certains de nos comportements ne se détournent pas de la justice de Dieu ? Nous reprochons souvent aux autres leurs méchancetés mais qu’en est-il de chacun de nous personnellement ?

Dans la deuxième lecture, saint Paul nous invite à convertir nos dispositions intérieures. Il nous exhorte avant tout à rechercher l’unité entre nous tous. Il pointe deux attitudes qui nuisent à cette unité : les intrigants (c’est-à-dire les opportunistes, les arrivistes) et les vaniteux.

Paul pointe aussi deux attitudes qui construisent l’unité : la compassion (le réconfort mutuel) et l’humilité : « ayez assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes ». Il s’agit d’opter pour les mêmes « dispositions qui sont dans le Christ Jésus » : Le Christ s’est abaissé jusqu’à accepté par amour la mort sur la croix pour sauver ses frères.

Comment cet enseignement de Paul nous interpelle-t-il personnellement ce dimanche ? Quelles sont nos véritables dispositions intérieures ? Qu’en est-il de notre égo ? Le chemin de l’humilité passe par l’abaissement…

Dans l’Évangile, Jésus nous raconte la parabole de deux fils qui sont priés par leur père d’aller travailler à sa vigne. Le premier refusa mais après s’être repenti, il y alla. Le second donne son accord au Père, « oui, Seigneur ! » Mais il n’y alla pas.

Cette parabole nous invite à convertir les « OUI » et les « NON » que nous adressons à Dieu et aux autres. Sommes-nous toujours des personnes de parole ? Jésus nous invite à reconnaître nos propres manques dans nos paroles données et non respectées. Il nous invite aussi à être davantage indulgents et miséricordieux envers les manques des autres.

Ne classons pas trop vite les autres dans la case des « irrécupérables », leur « NON » pourrait devenir un jour un « OUI ». Il en est de même pour chacun de nous. Nous sommes parfois trop sûrs de nous, de nos points de vue. Il n’est jamais trop tard pour revenir à Dieu et il est toujours possible de nous convertir pour entreprendre des relations plus positives, davantage animées par la confiance avec les autres mais à condition de le montrer.

Par ailleurs, ne banalisons pas nos « oui… mais non », nos indécisions… C’est bien sur ce point que nous sommes invités à changer nos cœurs. Notre relation à Dieu, aux autres et à nous-même ne sera jamais au beau fixe si nous ne changeons pas nos comportements pour de vrais « OUI ».

Demandons au Seigneur que chacun puisse faire son examen de conscience sur les enseignements des lectures de ce dimanche. Les appels qui nous sont faits sont vue du Royaume de Dieu, de la Vie éternelle dans le Christ.

Ensemble, prions le Seigneur :

Seigneur Jésus, ouvre nos cœurs à ta Parole, apprends-nous l’humilité et l’obéissance. Apprends-nous à poser les justes « OUI » et les justes « NON » dans les évènements et les rencontres de nos vies. Toi notre Seigneur, « à la gloire de Dieu le Père ». Amen.




26ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21, 28-32) – par Francis COUSIN

« Paroles … paroles … paroles ! »

Nous arrivons dans la dernière semaine de la vie de Jésus. Il est entré dans Jérusalem, accueilli comme un roi par une grande foule, et il va dans le Temple d’où il chasse tous les marchands.

Le lendemain, il retourne dans le Temple et il enseigne quand il est interpellé par les grands prêtres et les anciens du peuple : « Par quelle autorité fais-tu cela, et qui t’a donné cette autorité ? ».

En bon juif, Jésus répondit par une autre question : « Le baptême de Jean, d’où venait-il ? du ciel ou des hommes ? ». Et ils ne surent que répondre. D’où sans doute la référence à Jean-Baptiste à la fin du passage de ce jour, et au fait que les prostituées et les publicains avaient cru en ses annonces.

Et Jésus leur propose alors une parabole : « Un homme avait deux fils. » … Cela commence de la même manière que la parabole du Fils prodigue (Lc 15,11,32), avec un peu le même sens, mais ici, Jésus met davantage l’accent sur les réponses des enfants que sur l’action du Père.

Cet homme dit à chacun de ses deux enfants : « Mon enfant, va travailler aujourd’hui à la vigne. ». Le premier lui dit « non », mais, « s’étant repenti, il y alla. ». Le second dit « oui », mais n’y alla pas.

« Lequel des deux a fait la volonté du père ? »

La réponse est tellement évidente que là, ils étaient obligés de répondre : « Le premier ».

Le premier, c’est-à-dire celui qui avait commencer par dire « non », mais qui ayant réfléchi, s’est rendu compte qu’il avait offensé son père en refusant sa demande, et ayant regretté sa parole va à la vigne sans même prévenir son père. Le changement d’attitude se fait en premier lieu dans son cœur, sans autre considération matérielle (comme la famine dans le cas du fils prodigue). Un changement qui va réjouir à la fois le cœur du fils et le cœur du père, c’est-à-dire de Dieu.

Cette demande du père à son fils, c’est en fait la demande que ne cesse de nous faire Dieu : « Allez, vous aussi, travailler à ma vigne. » (Évangile de dimanche dernier), dit autrement à la fin de l’évangile de Mattieu : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples. » (Mt,28-19).

C’est le troisième terme du synode : « Pour une Église synodale : communion, participation, mission » dont la première assemblée générale a lieu ce mois-ci à Rome.

Mais insister sur le fils qui réjouit son père ne doit pas nous aire oublier l’autre fils : celui qui dit « oui » mais ne fait pas.

En effet, s’il nous arrive de faire comme le premier, … il nous arrive aussi de faire comme le second, et bien plus souvent qu’on ne croit : Combien de fois nous arrive-t-il de dire : « Oui, pas de problème, je m’en occupe … » et puis on oublie, on pense à autre chose qui nous semble plus important, le temps passe … et finalement, on ne fait rien … non par volonté de ne pas faire, mais le résultat est le même …On n’a pas fait la volonté du Père …

Comme le dit l’adage : « Il ne faut jamais remettre au lendemain ce que l‘on peut faire le jour-même. ».

Nous sommes tous à la fois le premier fils et le second fils, selon les moments …

À la fin du passage, Jésus dit aux grands prêtres et aux anciens du peuple : « les publicains et les prostituées vous précèdent dans le royaume de Dieu. Car Jean le Baptiste est venu à vous sur le chemin de la justice, et vous n’avez pas cru à sa parole ; mais les publicains et les prostituées y ont cru. », leur reprochant de ne pas s’être repentis par la suite.

Deux professions, l’une masculine : les publicains, considérés comme des traitres à la nation juive, l’autre féminine : les prostituées, car contraire au septième commandement, … car leurs membres ont cru à la parole de Jean-Baptiste, et ils se sont repentis

« Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » (Mc 2,17).

« C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Luc 15,7).

Jésus a toujours eu une prédilection pour les pécheurs surtout ceux qui se convertissent, et il l’a toujours, tout comme Dieu son Père.

Il accueille Mathieu, publicain, parmi ses apôtres ; il se laisse parfumer les pieds par une prostituée chez Simon le pharisien, il pardonne à la femme adultère « Va, et ne pèche plus ! », et surtout, il mourra entouré de deux brigands, dont l’un, le bon larron, qu’on appelle Dismas, sera le premier à entrer dans le Paradis, non pas à la fin des temps, mais tout-de-suite : « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis » (Lc 23,43).

« Le message de la parabole est clair : ce ne sont pas les paroles qui comptent, mais c’est l’agir, les actes de conversion et de foi. Jésus – nous l’avons entendu – adresse ce message aux grands prêtres et aux anciens du peuple d’Israël, c’est-à-dire aux experts en religion dans son peuple. Eux, d’abord, disent « oui » à la volonté de Dieu. Mais leur religiosité devient routine, et Dieu ne les inquiète plus. Pour cela, ils ressentent le message de Jean-Baptiste et le message de Jésus comme quelque chose qui dérange. (…)

Traduite en langage de ce temps, l’affirmation pourrait correspondre plus ou moins à ceci : les agnostiques qui, au sujet de la question de Dieu, ne trouvent pas la paix ; les personnes qui souffrent à cause de leurs péchés et ont le désir d’un cœur pur, sont plus proches du Royaume de Dieu que ne le sont les fidèles « de routine » qui, dans l’Église, voient désormais seulement ce qui paraît, sans que leur cœur soit touché par la foi. » (Pape Benoit XVI, 25/9/2011)

Seigneur Jésus,

paroles entendues,

paroles écoutées,

paroles oubliées …

mais que ta Parole, Seigneur,

reste gravée dans nos cœurs,

même si elle nous dérange,

pour que nous puissions l’annoncer

en paroles et en actes

à tous nos frères.

 

Francis Cousin

 

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Prière dim ord A 26°

 




26ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

 “OUI ” ou “NON” ?

Mt 21, 28-32

Nous connaissons tous ces deux enfants aux caractères différents évoqués par la parabole de Jésus : s’ils ne sont pas dans notre famille, ils n’en sont pas loin. Chacun de nous peut mettre un nom sur ce gosse à la « tête de mule », mais au « cœur d’or », toujours prêt à se rebiffer tant il a peur que l’on attente à sa liberté, mais qui, sans rien dire, va faire ce qu’on lui a demandé. Il est bien connu aussi cet autre, toujours souriant, facile à vivre, répondant au quart de tour, «oui, papa », «tout de suite, maman », mais que l’on retrouve une heure après, toujours plongé dans sa lecture, sans avoir bougé le petit doigt. Nous-mêmes, nous, les adultes réfléchis et sérieux, nous ne parlons jamais à tort et à travers ? Est-ce-que nous faisons toujours ce que nous avons promis ? Nos paroles sont-elles toujours le commencement d’une action ? Ce que nous faisons est-il toujours en accord avec ce que nous avons dit ?

Il est si facile de parler, de promettre, de rêver, de projeter, de s’enthousiasmer. Il est curieux de constater que ces vaines promesses s’appellent souvent des  » belles paroles « . Les intentions sont belles, généreuses, pleines de dévouement – belles, trop belles, parce qu’elles ne sont suivies d’aucun effet – Et de ces paroles, avec les médias, nous en sommes saturés, rassasiés : paroles des représentants d’aspirateurs, paroles de charlatans à peser au kilo, paroles des hommes politiques avec leurs programmes célestes, paroles des faux prophètes, des philosophes, des pseudo-intellectuels, s’entassent et pourrissent dans nos paquets de journaux ou envolées aux quatre vents, repoussées par les paroles de ceux qui disent le contraire.

Paroles, paroles, paroles : c’est le titre d’une chanson fort connue, qui, elle aussi, sera oubliée à son tour.

Eh bien, dans notre vie chrétienne, malheureusement, c’est, hélas, aussi la même chose. Combien de fois avons-nous dit « oui, Seigneur » sans bouger, bien installés dans nos habitudes et nos routines… Combien de fois nous sommes-nous mis à l’abri de l’aventure évangélique, ne laissant au Père aucune chance de transformer notre cœur de pierre en un cœur de chair vis-à-vis sa grâce qui pourrait nous envahir, nous emporter dans un autre monde, celui de la vie divine ?

Nous nous sommes, au cours des années, tellement endurcis, que nous faisons semblant de ne plus être étonnés lorsque le Seigneur nous dit que les publicains et les prostituées nous précéderont au Royaume des cieux !

Et en fait, aucun d’entre nous, n’est prêt à parier un centime sur ces ‟filles des rues” ou sur ces « moins que rien » : pour nous, ils n’ont aucune chance d’être des signes de l’amour de Dieu ? Notre monde pourtant ne manque pas de pauvres, de petits, de prophètes : échos de la voix du Seigneur. Ce que veut dénoncer le Seigneur, dans cet Évangile d’aujourd’hui, ce ne sont pas les bêtises que nous aurons faites en croyant bien faire, non, le véritable scandale, c’est notre passivité, nos  » oui, Seigneur  » qui sont autant de provocations.

Nous serions déjà des saints, mes frères, de grands saints, si nous avions mis en pratique tout ce que nous avons promis au Seigneur « Seigneur, nous irons jusqu’au bout du monde avec toi ».

 

Nous sommes toujours sur la ligne de départ. Nous rêvons notre vie chrétienne, nous faisons des projets, nous prenons des résolutions, nous disons « marchons, marchons» sans risquer un pas en avant !

Et lorsque, par aventure, certains d’entre nous, prennent au sérieux l’Evangile et qu’ils se détachent de notre groupe immobile : l’abbé Pierre, sœur Emmanuelle, Jean Vanier, père Pedro ou mère Theresa, nous les taxons de témérité, d’utopiques, ou nous disons qu’ils ont de la chance d’avoir ce courage, mais que ce n’est pas pour nous ! Et nous restons sur le bord du trottoir à regarder passer ceux qui ont eu la folie de prendre l’Évangile pour le programme d’une vie réelle. Ils n’ont peut-être rien dit, mais ils ont fait !

Heureusement, frères et sœurs, il est toujours temps de quitter nos chemins de médiocrité, de descendre des échelles de nos valeurs terrestres, de quitter les chevaux de nos grands principes : « Tu parles, tu déclares, tu proclames, tu juges, tu rends des sentences sur les uns et sur les autres, tu réformes le monde au café du commerce avec les amis, tu es toujours en train de graisser l’axe du monde avec des gens intelligents comme toi ». Mais qu’est-ce-que tu fais pour ce monde ? Comment réagis-tu dans des situations immédiates dans lesquelles tu pourrais intervenir ? Seras-tu simplement spectateur et solitaire ou acteur et solidaire ?

Rappelez-vous l’Evangile de dimanche dernier, ‟les embauches à la vigne”. Peu importe l’heure à laquelle nous irons travailler à la vigne : à midi, à trois heures, à cinq heures = la seule chose qui compte c’est d’y aller, c’est de se faire embaucher par le Seigneur au service du Royaume de Dieu, au lieu de rester sur place à bavarder gentiment pendant que les autres travaillent à la vigne.

Le chrétien n’est pas celui qui se contente de dire « oui » au Seigneur, ni celui qui se complaît dans de belles paroles ou de belles promesses, ni celui qui a une  » foi cérébrale » en Dieu.

Le Juste, le Vrai, c’est celui qui ayant la foi, la met en pratique, c’est celui qui passe de la « foi  » aux « œuvres« , du « Dire » au « Faire« , de la « parole » à  » l’action » ; autrement dit : celui qui ‟ vit ce qu’il croit ” .

Tout cela suppose une conversion perpétuelle, une mise en question incessante, une dynamique permanente et donne sa chance à chacun quel qu’il soit et cela à n’importe quel moment, qui que nous soyons :

« Le juste pourra mourir dans la perversité, nous rappelle Ezéchiel, et le méchant en se détournant de sa méchanceté peut sauver sa vie ».

Il n’y a rien de joué d’avance « parce qu’il a ouvert les yeux pendant qu’il en était encore temps, parce qu’il s’est détourné de ses fautes, il ne mourra pas : il vivra ! »

Savoir saisir l’occasion de la grâce offerte par Dieu, pour changer, pour se lancer, pour aller suivre enfin l’Evangile : tout homme possède à tout moment la chance de refaire sa vie. La main de Dieu nous est toujours tendue ; à nous de la saisir. Souvent nous nous posons la question, que l’on posait déjà au Seigneur : « Qui donc sera sauvé au dernier jour ? »

Il nous est maintenant facile de répondre : « Tous ceux qui auront mis leur confiance dans le Christ, qui auront mis cette confiance en pratique et qui auront persévéré dans leur projet ».

Mais attention ! Le Salut n’est jamais acquis une fois pour toutes.

Nous pouvons dire  » non  » au Seigneur après lui avoir dit « oui « .

Nous pouvons lui dire  » oui  » après lui avoir dit  » non ».

L’essentiel, c’est de demeurer fidèles à votre foi et de vivre de cette foi pour être sauvé. La foi, sans les œuvres, sans la pratique, est une foi morte qui ne peut sauver personne. AMEN




26ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 21, 28-32)- par le Diacre Jacques FOURNIER

«Que votre Oui soit Oui »

(Mt 21, 28-32)

  En ce temps-là, Jésus disait aux grands prêtres et aux anciens du peuple :
« Quel est votre avis ? Un homme avait deux fils. Il vint trouver le premier et lui dit : “Mon enfant, va travailler aujourd’hui à la vigne.”
Celui-ci répondit : “Je ne veux pas.” Mais ensuite, s’étant repenti, il y alla.
Puis le père alla trouver le second et lui parla de la même manière. Celui-ci répondit : “Oui, Seigneur !” et il n’y alla pas.
Lequel des deux a fait la volonté du père ? » Ils lui répondent : « Le premier. » Jésus leur dit : « Amen, je vous le déclare : les publicains et les prostituées vous précèdent dans le royaume de Dieu.
Car Jean le Baptiste est venu à vous sur le chemin de la justice, et vous n’avez pas cru à sa parole ; mais les publicains et les prostituées y ont cru. Tandis que vous, après avoir vu cela, vous ne vous êtes même pas repentis plus tard pour croire à sa parole. »

       

                       « Un homme avait deux fils ». L’un agira bien, l’autre mal, mais les deux sont ses fils et cela, rien ni personne ne pourra le changer. Le Père s’adresse donc ici à tous les hommes, quels qu’ils soient, quoiqu’ils fassent, et tous sont ses enfants, « créés à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28).

            « Il vint trouver le premier et lui dit : « Mon enfant » », et l’on pourrait continuer avec le prophète Isaïe : « Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime » (Is 43,4). « Tu aimes en effet tout ce qui existe, tu n’as de répulsion envers aucune de tes œuvres ; si tu avais haï quoi que ce soit, tu ne l’aurais pas créé » (Sg 11,24).

            S’adressant à son enfant, dans l’amour, le Père va solliciter sa liberté, et il la respectera infiniment : « Mon enfant, va travailler aujourd’hui à la vigne. » Personne d’autre que son enfant ne répondra à sa place… « Je ne veux pas » dit-il… Le Père ne lui proposait pourtant qu’un chemin de vie, pour son seul bien… « Je te propose la vie ou la mort… Choisis donc la vie, pour que toi et ta postérité vous viviez ! » (Dt 30,19). Dieu, de son côté, ne veut que la vie pour son enfant, pour tous ses enfants, pour tout homme, et cela de tout son être ! Et il est infini ! La détermination et la force de son vouloir sont donc eux aussi infinis : rien ni personne ne le fera jamais changer d’avis ! Mais il ne peut contraindre qui que ce soit à recevoir son trésor (Mt 13,44), cette Plénitude qu’il veut donner à tous (Col 2,9-10 ; Ep 5,18 ; 1Th 4,8)… C’est à nous de lui dire librement : « Oui, je le veux ! » Dieu, de son côté, a déjà dit son « Je le veux ! », en nous créant… Et ce « Je le veux ! » est inaltérable, inébranlable : il ne peut qu’être éternel, comme Dieu lui-même… Mais il n’atteindra pleinement son but qu’au jour où nous lui donnerons enfin notre « Oui ! », de tout cœur… Ainsi, cet enfant qui avait commencé par dire « Je ne veux pas », « se repentit », et puisque, pour Dieu, la porte est toujours ouverte (Ap 21,25), et ses bras grands ouverts, « il y alla », enfin… Et c’est Dieu Lui-même qui, bouleversé d’amour et de compassion, va « courir se jeter à son cou et l’embrasser tendrement » (Lc 15,20).

            Mais nous ne le savons que trop bien : notre « Oui ! » est fragile, notre « Je veux ! » inconstant (Rm 7,14-25). Mais c’est justement ce tréfonds de notre être blessé, incapable de s’en sortir par lui-même, que Dieu attend et veut guérir, si nous acceptons de le lui offrir… Et ce que nous ne pouvons pas par nous-mêmes, Lui, il le peut et il le fera, il l’a promis, car il veut de tout son être notre salut, notre Plénitude, notre Bonheur éternel, avec Lui… DJF




25ième Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Alexandre ROGALA

« Allez à ma vigne, vous aussi,

et je vous donnerai ce qui est juste. »

Et qu’est-ce qui est juste ?

Il me semble que les textes proposés par la liturgie nous invitent à une conversion, c’est à dire à un changement de pensée. Ce dimanche nous sommes invités à dépasser notre conception humaine de la justice, qui est fondée sur le mérite. Les lectures que nous avons entendues nous font entrer dans la logique de la justice du Royaume des cieux, qui est une logique de gratuité et de miséricorde.

La première lecture est un extrait du chapitre 55 du Livre du prophète Isaïe. L’auteur écrit vers la fin de l’exil à Babylone aux alentours de 550-540 avant J.C. À cette époque, Cyrus le roi de Perse monte en puissance, et le prophète devine que le peuple d’Israël exilé va bientôt pouvoir rentrer en Terre Promise, quand l’empire babylonien sera défait par les armées de Cyrus. De fait, Cyrus permettra aux israélites exilés de rentrer chez eux en 538 av. J.C.

Dans le texte que nous avons entendu, le prophète s’adresse aux fidèles qui se préparent à repeupler Jérusalem pour leur préciser les conditions de leur bonheur. Il les exhorte à se convertir, et à faire confiance à la miséricorde de Dieu:

« Que le méchant abandonne son chemin, et lhomme perfide, ses pensées ! Quil revienne vers le Seigneur qui lui montrera sa miséricorde, vers notre Dieu qui est riche en pardon. »

Le Seigneur pardonne toujours aux hommes gratuitement, sans aucun mérite de leur part, si ce n’est celui de Le chercher et de revenir à Lui. Cette gratuité totale est déconcertante. Elle peut même nous paraitre injuste. Isaïe en donne plus loin la raison :

« Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos pensées. »

Dans le texte d’évangile de ce dimanche, Jésus veut parler à ses disciples de la justice du Royaume des cieux qui est bien différente de la justice humaine, pour ne pas dire contraire à celle-ci. Pour cela, Jésus leur propose d’écouter une parabole. Il s’agit de la parabole que nous avons l’habitude de désigner comme « la parabole des ouvriers de la dernière heure ».

Comme à son habitude, Jésus prend une image de la vie quotidienne de son temps. Au Ier siècle, dans la viticulture, il était assez courant d’embaucher des ouvriers journaliers quand on avait besoin de main-d’œuvre, notamment lors des vendanges.

Dans notre parabole, un accord sur le montant du salaire n’est conclu qu’avec le premier groupe de travailleurs. Il s’agit d’un denier, ce qui correspond au salaire habituel pour une journée de travail. Un denier (une pièce d’argent) n’est pas un salaire élevé, mais il assure ce qui est nécessaire pour vivre. On pourrait dire qu’un denier est le SMIC de l’époque de Jésus. Le maitre de la maison promet aux deux groupes de travailleurs suivants, de leur donner « ce qui est juste ». Au dernier groupe, le propriétaire de la vigne ne promet rien.

Au moment du versement de salaire, l’intendant a pour consigne de payer les ouvriers en commençant par les derniers à qui rien n’avait été promis. Les premiers travailleurs se scandalisent quand ils constatent que les ouvriers arrivés en dernier à la vigne reçoivent exactement le même salaire qu’eux. Il est possible que nous trouvions nous-aussi, la situation décrite dans la parabole injuste. Ce sentiment d’injustice que nous ressentons indique que nous avons encore besoin de conversion pour entrer dans la logique du Royaume.

Le personnage du maître de la vigne évoque le Christ à la fin des temps au jour du jugement, car le versement du salaire a lieu « le soir venu » (v. 8). Et puisque, nous sommes dans une parabole sur le Royaume des cieux, il est vraisemblable que la vigne dans laquelle le maître envoie des ouvriers, représente le Royaume.

Le maître de la vigne aurait pu avoir la paix s’il avait commencé par payer les premiers ouvriers, qui seraient partis avec leur salaire, sans savoir que les derniers recevraient la même somme d’argent. Mais si le maitre choisit de commencer par les derniers, c’est précisément parce qu’il veut leur enseigner quelque chose.

Apprenons donc du maître de la vigne en même temps que les premiers ouvriers.

Le premier enseignement de la parabole porte sur la façon dont Dieu, exerce sa justice. Le fait que les quatre groupes de travailleurs reçoivent le même salaire, signifie que ce salaire d’un denier est « ce qui est juste ». Comme nous l’avons dit plus haut, à l’époque de Jésus, le salaire d’un denier assurait ce qui était nécessaire pour vivre ; un denier permettait de subvenir à ses besoins quotidiens.                                                                                            Nous comprenons que la justice du propriétaire de la vigne, c’est à dire la justice de Dieu, est que chacun obtienne ce dont il a besoin pour vivre. C’est pourquoi, ce qui détermine la façon dont Dieu exerce sa justice, ce n’est pas la quantité de travail, ce n’est pas le mérite. Ce qui détermine la façon dont Dieu exerce sa justice, c’est la miséricorde.

Deuxièmement, si au jour du jugement, tous ceux qui ont travaillé à l’avènement du Royaume recevront exactement le même salaire, il est inutile de chercher à détenir une position ou un statut privilégié au sein de la communauté chrétienne.

Enfin, la fin de la parabole semble nous interroger personnellement: «  ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ? » (v. 15). Ne m’arrive t-il pas de me comparer aux autres ? Ne m’arrive t-il pas de me scandaliser de la bonté que Dieu manifeste à quelqu’un pour qui j’ai peu d’estime ? Ne m’arrive t-il pas de me demander pourquoi mon supérieur hiérarchique a choisi de donner telle opportunité à quelqu’un d’autre que moi, alors que j’étais plus méritant ? Toutes les questions de ce type sont inutiles. Elles ne sont que des reflets de notre méchanceté.

L’autre jour, je discutais avec une jeune fille qui est salariée dans la maison mère d’une congrégation religieuse. Cette jeune fille me disait qu’elle aimait tellement son travail, qu’elle se donnait à fond, et faisait des heures supplémentaires même si celles-ci n’étaient pas payées. Cette jeune fille est en CDD, et son contrat de travail se terminera en décembre. Je connais une autre fille qui travaille dans le même service et qui elle, est en CDI. Cependant pour celle-ci, ce travail n’est qu’un boulot alimentaire. Elle ne l’aime pas spécialement. C’est pourquoi, au travail elle ne fait que le strict minimum. Il y aurait de quoi crier à l’injustice ! Comment se fait-il que quelqu’un qui n’est pas motivé et qui ne fait pas grand chose au travail, ait un meilleur contrat de travail que quelqu’un de plus motivé et de plus méritant !? Et pourtant, quand j’ai discuté avec la première jeune fille, celle qui en CDD, à aucun moment, elle ne s’est comparée avec l’autre salariée. À aucun moment, elle ne l’a critiqué. Cette jeune fille se réjouissait simplement de pouvoir faire un travail qui lui plaisait.

C’est un bel exemple d’attitude évangélique : elle ne se compare pas inutilement aux autres, mais elle vit dans l’action de grâce.

À l’exemple de cette jeune fille, ayons nous aussi une vie digne de l’évangile. Nous avons entendu l’exhortation de saint Paul dans la deuxième lecture: « Quant à vous, ayez un comportement digne de l’Évangile du Christ » (Ph 1, 27).

Quand il écrit aux Philippiens, saint Paul est en prison. L’Apôtre est seul et sent sa mort prochaine. De plus, certains missionnaires chrétiens dénigrent Paul, ce qui rend vraisemblablement sa captivité encore plus pénible.

Saint Paul est dans l’incertitude, et se prépare au pire. Toutefois, il sait que depuis le jour où il a reçu sa vocation d’apôtre, il a tout donné pour l’Évangile du Christ. Il ne craint donc pas la mort. S’il sort vivant de sa captivité, il reprendra sa mission d’évangélisation, et s’il meurt, il a la certitude qu’il sera récompensé.

L’attitude de saint Paul est différente de celle des premiers ouvriers de la parabole qui récriminent contre le maître quand ils voient que les derniers arrivés reçoivent le même salaire alors qu’il n’ont presque pas travaillé. L’Apôtre ne compare son travail apostolique à celui des autres missionnaires chrétiens qui par jalousie, le discréditent. Saint Paul est simplement heureux du salaire qu’il est certain de recevoir le jour de sa mort. Que celle-ci soit lointaine, ou proche, l’Apôtre sait qu’il est sauvé et qu’il sera éternellement avec le Christ.

Que le Seigneur nous accorde de réaliser la grâce que nous avons d’être sauvés alors que nous n’avons pas plus de mérite que les ouvriers de la dernière heure, et qu’ainsi nous puissions toujours lui rendre grâce. Amen !