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24ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Le fils prodigue

Lc 15, 1-32

Parmi les trois paraboles admirables qui nous montrent jusqu’où peut aller l’amour de Dieu, attardons-nous, si vous le voulez bien, sur la dernière: « Un homme avait deux fils ». Elle semble tellement d’actualité cette histoire : il n’arrive pas de semaines où l’on ne me raconte des conflits entre des jeunes et leurs parents, où un jeune homme s’en va en claquant la porte, ou cet autre reste à la maison, mais en feignant d’ignorer ses parents qu’ils considèrent comme déphasés, ringards, dépassés, de ces familles qu’il faudrait plutôt appeler « Pension de famille » tant ceux qui vivent sous le même toit s’ignorent, vivent chacun de leur côté, juxtaposés, mais bien peu unis, encore moins, aimants. Combien de pères ou de mères n’arrivent plus à établir des relations d’amour avec des enfants, pourtant très différents de tempérament, un amour mal accueilli, mal compris.

Et derrière cette histoire, nous nous souvenons de la 1ère lecture, l’histoire de l’alliance du Sinaï : Dieu, respectueux de la liberté humaine qui n’arrive plus, lui aussi, à établir des liens d’amour avec son peuple choisi. Si bien que la mission du Christ sera de partir à la recherche des brebis égarées et d’essayer de nouer des relations nouvelles : une nouvelle alliance entre Dieu et ses fils, tous les hommes.

Jésus, aujourd’hui, veut provoquer notre réflexion et nous amener à nous demander si nous ne ressemblons pas à l’un de ces deux fils, dans notre attitude envers Dieu.

 

Voyons d’abord le plus jeune : celui que l’on appelle le « Prodigue ». Il a  l’esprit  aventureux, portant  en  lui, une « fureur de vivre ». Il  est  comme  certains  des  jeunes d’aujourd’hui, « Il veut tout et tout de suite ». Ses illusions vont d’ailleurs tomber très vite au contact de l’égoïsme des autres… Il va découvrir très vite le désert de l’amour. Laissons-nous attendrir par ces retrouvailles et l’accueil chaleureux de son père.

« Lorsqu’on a été père une fois, on ne peut plus cesser d’être Père ». Rien ne compte. Tout est oublié, effacé, aboli : c’est la fête de l’amour et l’amour n’a pas de prix. Et par là, nous comprenons mieux l’appel pressant de Jésus à tous ceux qui ont pris vis-à-vis de Dieu beaucoup de distance : toute la gamme des négligents, des insouciants, des mal-croyants, ceux que nous appelons aujourd’hui « les non-pratiquants » et encore de tous ces marginaux, ces exclus, ces révoltés, un peu dans le genre du malfaiteur qui se trouvait crucifié à côté de Jésus. Lui aussi se tourne vers le Christ, peut-être en souvenir de cette parabole de miséricorde ?

Et nous, qui sommes ici, rassemblés dans cette église, qu’en est-il de nos relations avec Dieu ? Lorsque nous disons « Notre Père », voulons-nous chanter tout l’amour qui est dans le cœur de Dieu ? Voulons-nous exprimer toute la confiance qui est dans le nôtre ? Cette histoire du fils fugueur nous invite encore à l’espérance : oui, des êtres chers semblent éloignés de Dieu, ils cherchent ailleurs un autre chemin de bonheur. Ne les jugeons pas. Croyons solidement que le Père des cieux reste toujours prêt à les accueillir au jour de leur retour car Dieu est riche en miséricorde.

Passons au fils aîné : il nous apparaît, au premier abord, comme un fils exemplaire : fidèle à la loi, plein de soumission et d’obéissance,  mais il a si peu d’affection, si peu de confiance qu’il n’a jamais osé demander un chevreau à son père, pour faire une boum avec les jeunes de son âge… la fête de quoi ?

Il n’y a peut-être jamais pensé : peu d’amour dans le cœur, peu d’esprit de fête.  Avez-vous assez de fêtes en famille ? Si oui, c’est bon signe, c’est qu’il y a de l’amour entre vous.

Le retour inattendu de son frère va éclairer tout cela ! « C’est un comble, c’est un scandale ! », se dit-il. N’est-ce pas approuver, encourager la rébellion, le gaspillage ? Cette fête est insensée, ridicule et de fait, elle le serait, si justement, elle n’était le signe d’un amour fou et sans mesure, celui de Dieu.

Judas, aussi, trouvera ridicule le geste de la pécheresse qui va verser sur les pieds de Jésus, un parfum de grand prix, répandu sans retenue, avec exubérance. A quoi donc serviraient les richesses matérielles sinon justement à exprimer des gestes d’amour : c’est le sens même du cadeau, et de la fête !

Au travers de cette histoire, Jésus s’adresse aux pratiquants et leur dit : « Attention, votre amour du Père doit s’exprimer certes par un culte rendu à Dieu, mais aussi soyez des pratiquants de l’amour fraternel :

. fidélité à votre prière

. fidélité à votre messe, très bien

. fidélité à votre conscience et à l’éducation que vous avez reçue.

Oui, mais ouvrez les yeux autour de vous, soyez compréhensifs et pleins d’attention à l’égard de ceux qui se sont éloignés du Père et soyez avec eux, comme des frères, de vrais frères, de toutes façons, issus d’un même Père, prêts à se pardonner les uns les autres.

A notre tour de réfléchir sur nos comportements de baptisés.

La vie chrétienne, c’est la découverte de plus en plus complète, à l’école de Jésus, de l’amour infini du Père des cieux.

 « Il fallait bien faire la fête et se réjouir, car ton frère que voici était mort et il est revenu à la vie… il était perdu et il est retrouvé ».

Ce retour des fils vers le père qui les accueille avec joie et dans la fête, essayons, nous aussi, de le vivre avec sincérité, ce retour vers le Père, et cet amour de nos frères.

Nous aussi, essayons d’aimer et de pardonner de la même façon que Dieu puisqu’il nous pardonne à chaque fois que nous faisons retour vers lui.  AMEN

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24ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 15, 1-32)

« Il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent,

plus que pour quatre-vingt-dix-neuf  justes

qui n’ont pas besoin de repentance. »

« Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour … » (Ps 102,8)

Tous les textes de ce jour ne font que parler de la miséricorde de Dieu, que ce soit vis-à-vis du peuple hébreu qui se prosterne devant un veau d’or, ou vis-à-vis de saint Paul quand il voulait arrêter les disciples de Jésus, et bien sûr dans les trois paraboles que nous propose l’évangile de ce jour.

Trois paraboles qui nous parlent d’un homme, un berger qui part à la recherche d’une brebis perdue sur les cent de son troupeau, d’une femme qui cherche partout sa drachme perdue, d’un père qui retrouve son fils cadet qui s’était égaré sur les chemins de la vie après avoir dépensé tout son héritage. C’est-à-dire que c’est toute l’humanité qui est ici rassemblée : homme, femme, père, fils … ce qui montre bien que tout le monde, de tous âges, est concerné par la miséricorde de Dieu, quel que soit la situation dans laquelle il se trouve.

 Et dans les trois paraboles, cela se terminent toujours par un appel à la joie : la joie de Dieu, mais aussi la joie de tous ceux qui l’entourent, les anges, les saints … et aussi celle de tous les chrétiens qui doivent (qui devraient … ? !) se réjouir de la bonté de Dieu dans toutes les situations …

Reste le fils ainé qui n’accepte pas les réactions de son père, son indulgence, sa miséricorde vis-à-vis de son frère. Il est un peu comme les pharisiens et les scribes qui critiquaient Jésus qui parlait et mangeait avec ceux que eux considéraient comme des impurs, dans leur fidélité à la stricte lettre de la loi de Moïse. C’est d’ailleurs pour eux que Jésus raconta ces paraboles … en leur montrant que même pour eux, le père de famille se déplace, sort de sa maison pour tenter de les amener au pardon des fautes des autres … et à participer à la joie de Dieu …

C’est l’un des points essentiels de cet évangile.

Nous sommes tous concernés par cet aspect-là, de la rigidité vis-à-vis de la faute des autres. À tous, il nous arrive aussi de faire comme les pharisiens et de critiquer ceux qui ont fauté, en confondant la faute et la personne … Untel a fauté, donc il est mauvais ! « Hein, monsieur-là (ou madame-là …), après ça que l’a fait, il ose venir la messe … et en plus il communie ! » … Mais nul ne sait si, comme le fils cadet, celui qu’on appelle « le prodigue », il ne s’est pas remis en cause et s’est retourné vers le Père pour lui dire : « Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi », et a fait la démarche auprès d’un prêtre pour demander le pardon de sa faute …

Tous nous sommes pécheurs, et tous, nous pouvons bénéficier de la miséricorde de Dieu … mais encore faut-il faire la démarche pour demander le pardon de ses péchés …

Tous les jours, nous récitons la prière que Jésus nous a enseigné, le ’’Notre Père’’, et donc tous les jours nous disons : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. » …

Mais est-ce que nous croyons vraiment à ce que nous disons ? …

Il est des moments où il est difficile de dire cette phrase, surtout quand on a parfois, comme ont dit, la ’’rancune tenace’’, et qu’on n’a pas du tout envie de pardonner une chose qu’on nous a faite …

Mais si nous ne pardonnons pas, cela voudrait-il dire que Dieu ne nous pardonnera pas ?

Non ! Cela n’est pas dans la nature de Dieu !

Dieu est tout amour, pardon et miséricorde …

Cela veut dire que, même si cela nous coûte, c’est nous qui devons pardonner !

« Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux ».

Alors la joie pourra revenir dans notre cœur !

Seigneur Jésus,

 apprends-nous

à ne pas mépriser les pécheurs,

mais à les regarder

comme toi tu les vois.

Donne-nous d’être auprès d’eux

des témoins de ta miséricorde pour tous.

 Francis Cousin

 

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23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 14, 25-33)

« Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère …          

  et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. »

Voilà encore une phrase qui nous semble bien difficile à admettre, voire à comprendre, dans le discours de Jésus, surtout si on se souvient d’une des dix paroles de Dieu données à Moïse sur le mont Sinaï : « Tu honoreras ton père et ta mère. ».

Mais on peut très bien honorer son père et sa mère sans pour autant les « préférer » à qui que ce soit. On comprend facilement qu’une personne mariée préfère son époux(se) à ses parents, ou ses enfants à ses parents …

Mais Jésus … ou Dieu, puisque la Parole de Jésus est celle du Père … ?

Bien souvent, Jésus, ou Dieu, est considéré comme quelqu’un ’’à part’’, qui n’entre pas dans notre vie familiale ou sociale. On le prie le dimanche quand on va à la messe (quand on y va …), un peu en semaine, surtout quand on a un problème …

Pas tout le monde, bien sûr … mail il faut reconnaître que c’est le fait de la plupart des gens qui ont été baptisés … alors, le préférer à tous ceux qui nous sont les plus proches, on en est malheureusement bien loin !

Reprenons les mots de la traduction liturgique : « préférer » : littéralement signifie « porter en avant, ou porter en premier, à la première place … »

Préférer Jésus signifie donc qu’on met Jésus à la première place … et cela n’a aucune influence sur l’amour qu’on peut avoir pour les autres personnes …

Beaucoup ont mis Jésus ou Dieu à la première place dans leur vie …

À commencer par Marie …

Certains diront : « Oui, mais elle, c’est particulier … Elle était prédestinée par Dieu ! ».

Sans doute … mais elle ne le savait pas !

Et pour qu’une jeune fille de quinze ans réponde à l’ange Gabriel : « Je suis la servante du Seigneur », c’est parce qu’elle avait toujours préféré Dieu, mis Dieu à la première place !

Une autre est Jeanne d’Arc, patronne secondaire de la France (après Marie), qui avait pris comme devise : « Messire Dieu, premier servi ». Et après Dieu, il y avait le Royaume de France … et cela l’a menée au bucher sur la place de Rouen …

Et on pourrait dire tous les saints et saintes qui ont mis Dieu à la première place.

Alors pour nous : quelle est la place que l’on donne à Jésus, à Dieu ?

Pour cela, réfléchissons comme l’homme qui doit bâtir une maison dans le premier exemple de Jésus, non pas pour bâtir une maison, mais pour bâtir notre vie : avec quoi je vais bâtir ma vie ? et quel est le but de ma vie ?

Avec d’abord cette question préalable : qu’est-ce que je « préfère » : réussir dans la vie, ou réussir ma vie ?

Et ensuite : De quelle vie je parle ?

De ma vie sur la terre ? Qui est une vie « finie », avec un terme : la mort.

Ou de la vie éternelle ? Celle qui nous a été promise par Dieu … et par Jésus … et dont la résurrection de Jésus nous a ouvert le passage …

« Nul ne va vers le Père sans passer par moi ! » a dit Jésus …

Si je choisis la vie éternelle, il n’y a qu’une solution : mettre Jésus à la première place … comme lui-même le demande.

Et donc « préférer Jésus, et le suivre ».

Et porter sa croix (ou ses croix) …

Seigneur Jésus,

tu sais combien il est difficile pour nous

de te mettre toujours à la première place.

Nous avons tellement de choses

qui nous semblent prioritaires,

surtout avec nos proches,

que bien souvent tu passes après.

Aide-nous à te mettre toujours en premier,

pour être des témoins de ta présence parmi nous.

 

Francis Cousin

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23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 14, 25-33)

Porter sa croix à la suite du Christ

(Lc 14,25-33)…

En ce temps-là, de grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit :
« Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple.
Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple.
Quel est celui d’entre vous qui, voulant bâtir une tour, ne commence par s’asseoir pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi aller jusqu’au bout ?
Car, si jamais il pose les fondations et n’est pas capable d’achever, tous ceux qui le verront vont se moquer de lui
“Voilà un homme qui a commencé à bâtir et n’a pas été capable d’achever !”
Et quel est le roi qui, partant en guerre contre un autre roi, ne commence par s’asseoir pour voir s’il peut, avec dix mille hommes, affronter l’autre qui marche contre lui avec vingt mille ?
S’il ne le peut pas, il envoie, pendant que l’autre est encore loin, une délégation pour demander les conditions de paix.
Ainsi donc, celui d’entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. »

        

 

« Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple. »

            Notre traduction liturgique a tout de suite bien interprété le verbe employé ici par St Luc, « miséô, haïr », en le traduisant par « préférer ». Quand Dieu nous dit : « Honore ton père et ta mère » (Ex 20,12), et que Jésus se bat pour qu’il en soit vraiment ainsi (cf. Mc 7,8-13 ; Mt 19,16-22), il ne peut être question de les haïr ! De même pour mettre en pratique le cœur de la vie chrétienne, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mc 12,31), il est impensable de « haïr » sa propre vie.

            « Préférer » suppose l’existence de deux réalités entre lesquelles nous avons à choisir. Suivre le Christ, entrer avec Lui dans le Royaume de l’Amour, du Service, du Don de soi, suppose que l’on mette l’Amour de Dieu et toutes les exigences qui en découlent à la première place… Et comme nous sommes tous pécheurs, si nos proches les plus proches nous invitent à adopter une attitude contraire à celle de l’Evangile, il nous faudra choisir… A qui obéirons-nous ? Et nous savons bien que si nous montrons notre désaccord, nous pouvons être rejetés par ceux-là même que nous aimons le plus, ce qui sera, humainement parlant, une grande souffrance… Jésus en était bien conscient lorsqu’il disait, en pensant à ces cas précis : « Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre : je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. Oui, je suis venu séparer l’homme de son père, la fille de sa mère, la belle-fille de sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa propre maison » (Mt 10,34-36 ; Lc 12,51-53).

            Et puisque nous sommes tous pécheurs, des désirs égoïstes de toutes sortes, contraires bien sûr à l’Esprit de l’Evangile, peuvent naître en nos cœurs… Et le Christ nous invite ici sans ménagements à y renoncer, ce qui est toujours difficile pour notre être blessé… « Celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même », à son égoïsme, à son orgueil, à son amour propre, « qu’il prenne sa croix chaque jour et qu’il me suive » (Lc 9,23).

            Et par les deux paraboles qui suivent, Jésus nous invite à regarder bien en face toutes ces difficultés et les forces qui sont à notre disposition. Sur qui allons-nous compter pour mener un tel combat. Sur nous-mêmes ? Nous n’irons pas bien loin… Mais si nous nous appuyons, par la prière du cœur, sur le Christ et sur sa grâce (Mt 11,28-30), nous pouvons espérer, qu’envers et contre tout, ce vœu s’accomplira : « Seigneur, que ma faiblesse à ton service tienne bon » (Guillaume de St Thierry)…                                                                                                                                                                                                 DJF




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

 Un don de soi généreux, mais réfléchi

Luc 14, 25-33

Cet évangile, mes frères, peut nous sembler contradictoire.

Au début, le Seigneur nous invite à une aventure radicale, à un risque total. « Il faut tout quitter », « préférer le Christ » à sa mère, à sa femme, à ses enfants, à  sa propre vie, prendre sa croix, marcher à sa suite… C’est un coup de clairon avant l’attaque, un ordre du jour, une proclamation martiale.

Et puis, dans la seconde partie, il semble que ce soit le contraire. « Attention ! Avant de vous lancer, réfléchissez, asseyez-vous, prenez du temps, calculez le pour et le contre ».

Ne  vous  lancez  pas  dans  une  aventure  sans  en  avoir, auparavant, calculé les conséquences.

Ne vous engagez pas sans en avoir mesuré toutes les suites.

Ne prenez pas de risques sans avoir prévu toutes les difficultés qui peuvent survenir.

Jésus nous demande, à la fois, et dans le même temps, de « tout sacrifier » en un geste absolu et fou, et pourtant, de nous asseoir pour évaluer nos chances de réussites.

En fait, il n’y  a  pas  contradiction  entre  ces  2  attitudes : au contraire, elles se complètent. Une aventure n’est réussie que si, au préalable, elle a été mûrement réfléchie. Un Lindbergh avant de survoler l’Atlantique, un d’Aboville traversant l’Atlantique à la rame, un  spéléologue ou un alpiniste,… tous vous diront que l’entreprise ne réussira que si, bien sûr, on a une certaine force de caractère, mais, aussi et surtout, parce que cette aventure a été longuement et minutieusement préparée.

Il en est de même dans  « l’aventure de la foi » qui nous met à la suite du Seigneur Jésus : car la foi, c’est vrai, est une aventure, une folle aventure. Quand on a vécu toute une semaine dans le terre à terre quotidien et souvent banal, quand on a réalisé combien la vie humaine est limitée et fragile, on éprouve le besoin d’un grand souffle. Actuellement surtout, à cause de la rationalisation de la vie, à cause de la froideur de la technique, un grand désir (surtout chez les jeunes), d’autre chose, d’ailleurs, se fait jour.

Or, précisément, Jésus nous propose ce dépassement, cette grande respiration, cette grande aventure.

Il s’agit de préférer Dieu à tout le reste.

Il s’agit d’abandonner tout pour suivre Jésus. Mais attention ! Ne faisons pas de contre-sens : il est impensable que Jésus nous demande de ne pas aimer les nôtres : nos parents, notre conjoint, nos enfants ! Tout l’Evangile nous dit d’aimer, mais Jésus choisit justement nos affections les plus fortes pour nous dire d’aimer « encore plus« .

Il s’agit bien, d’une sorte de « saut mystique », d’une folle aventure. Jésus est un absolu, un infini qui doit dépasser toutes nos attaches humaines. Jésus est l’amour prioritaire.

Cependant, le Seigneur ne veut pas que notre foi, pour généreuse qu’elle soit, soit irréfléchie, un enthousiasme passager, une décision sans discernement. Il nous demande « de nous asseoir pour calculer si l’aventure est raisonnable ». Notre foi doit venir en même temps, d’un élan du cœur et d’un calcul de la raison, les deux à la fois, pas l’un sans l’autre !

 

Il ne veut pas d’engouement superficiel, d’engagement aveugle.

Il n’essaie même pas de séduire, d’attirer par surprise.

Il parle à la foule : « de prendre sa croix pour le suivre ». On ne peut pas dire que ce soit de la propagande facile ou de la démagogie.

Il ne camoufle pas les difficultés futures. La foi au Christ nous demande, en même temps, beaucoup de générosité et toute notre intelligence. Voilà, sans doute, pourquoi il y a si peu de vrais chrétiens : parce que beaucoup sont enthousiastes, mais ne réfléchissent pas assez, et que beaucoup d’autres réfléchissent, mais ne sont pas assez généreux.

Or, pour être chrétien, pour vivre vraiment l’aventure de la foi, telle que nous la propose le Christ, il faut avoir assez de cœur pour suivre Jésus et de réflexion pour justifier les raisons qui nous le font suivre.

Beaucoup de sectes et même de religions orientales, de groupes de prières exigent de leurs fidèles la démission d’une partie de leur raisonnement au profit d’un délire collectif, une sorte de perte de la raison dans le grand inconscient : pas le christianisme.

L’islam également se présente comme une résignation au « Mektoub », une soumission. « C’est écrit : Il n’y a pas à chercher à comprendre,… » : pas le christianisme.

La foi chrétienne, au contraire, admet et prend en compte toutes les questions, toutes les recherches, toutes les remises en cause. La foi doit être éclairée, fondée, basée sur du solide. Elle ne sera jamais celle du « charbonnier » surtout à notre époque, si critique, si rationnelle. Elle reste une « aventure », mais « calculée » pour ainsi dire. Les plus grandes intelligences se sont penchées sur les mystères de la foi pour essayer de leur trouver une sorte de justification rationnelle, et c’est bien ainsi.

Nous voilà donc invités, aujourd’hui, à miser, en même temps, sur le « mystique » et sur le « réalisme », sur le risque de la foi et sur l’intelligence de la foi. Le mystère de Dieu n’est pas un mur auquel on se heurte, mais un océan qu’on n’a jamais fini d’explorer.

Un couple de français m’a fait comprendre cela un jour. La jeune fille était étonnée parce que son fiancé se posait des questions de ce genre : «  Pourquoi t’ai-je aimée, toi et pas une autre ? » Au fond, elle craignait que toutes ces questions, toutes ces raisons n’en viennent à détruire leur amour… elle ne croyait qu’à « l’amour hasard » : « coup de foudre », l’amour « enfant de bohême », irraisonné, irrationnel. Mais le fiancé lui répondit : « Tu vois, il est naturel que j’essaie de te connaître davantage. Notre amour est absolu, infini, mais parce que j’ai envie d’aller loin, très loin avec toi, il faut que je commence par découvrir « pourquoi je t’aime » ».

Ainsi en est-il de la foi : c’est une découverte aventureuse d’un être infini. Notre recherche de Dieu doit grandir : elle ne s’épuisera jamais.

En ce début d’année scolaire nouvelle, après les vacances, après le temps d’arrêt de l’hiver, sommes-nous décidés à « prendre du temps », à « participer à des groupes de réflexion », à « cultiver notre foi », à « lire des revues », à « étudier l’Evangile » pour devenir plus solides dans notre foi et par conséquent à nous engager davantage au service du Seigneur, pour aller avec lui, jusqu’au bout de la construction de l’Eglise où il travaille avec nous ?

Jésus nous réinvite à engager le combat de toutes nos forces pour la victoire du bien sur le mal, pour la victoire de l’amour, en marchant à sa suite avec courage.  AMEN




22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 14,1.7-14)

« Discours moralisateur …

ou indications pour un chemin de Vie ?»

 

Les trois textes de ce jour vont dans le même sens : vivre dans l’humilité, à la suite de Jésus.

La première lecture, tirée du livre de Ben Sira, est un texte très court que nous devrions tous apprendre par cœur tellement il est clair concernant l’humilité : « Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur. Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser … L’idéal du sage, c’est une oreille qui écoute. », mais pas n’importe qui ou n’importe quoi, mais la Parole du Seigneur, celle de Jésus.

Dans la deuxième lecture, le thème de l’humilité est moins évident, mais il reste réel : dans l’ancien testament, la manifestation de Dieu se faisait de manière éclatante, dans « une réalité palpable, embrasée par le feu … pas d’obscurité, de ténèbres ni d’ouragan, pas de son de trompettes » mais, dans le nouveau testament, « vous êtes venus vers Jésus » vers sa Parole et son exemple.

Jésus, dont saint Paul dit qu’il « s’est abaissé… jusqu’à mourir et mourir sur une croix. C’est pourquoi, Dieu l’a élevé au-dessus de tout. » (Phil 2,8-9). Mais cela avait commencé par sa naissance : Jésus, par la volonté de son Père et la puissance de l’Esprit Saint s’est abaissé à devenir un homme, il est né dans des conditions, sinon très ordinaires, du moins rustiques et humble, et il a vécu simplement avec tous ceux qu’il a rencontrés … et la veille de sa mort, il a pris le tablier pour laver les pieds de ses disciples.

Jésus, l’humilité la plus totale.

Et c’est lui que nous devons écouter.

Malheureusement, on ne peut pas dire que la manière de vivre de Jésus soit la plus écoutée dans notre monde !

L’humilité est bien souvent considérée comme une faiblesse … alors que les ambitieux, ceux qui veulent réussir à tout prix, y compris en écrasant les autres, ceux qui veulent toujours être mis en avant dans tous les domaines sont souvent montrés comme des exemples … et cela dès le plus jeune âge ! Il n’y a qu’à entendre les discours des parents sur les ’’prouesses’’ de leurs enfants comme « Mon fils sait déjà marcher à huit mois » ou « A trois ans, mon enfant sait déjà nager et faire du vélo » … ou d’autres ’’demandes’’ comme « Tu dois être le meilleur de ta classe » etc …

Ces habitudes mondaines ont été critiqués par Jésus lors du repas organisé chez un chef de pharisiens un jour de sabbat … où il était attendu des invités pour ses possibles remarques. En voyant les invités chercher à prendre les premières places, celles qui sont les plus proches de l’hôte, Jésus leur proposa deux paraboles : l’une pour les invités, l’autre pour l’hôte … mais dont les conclusions s’appliquent à tous …

« Quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : ’’Mon ami, avance plus haut’’, et ce sera pour toi un honneur » Mais l’essentiel est dans la conclusion : « Quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »

            Et pour l’hôte : « Si tu donnes un repas, n’invite pas tes amis, tes frères, tes parents, de riches voisins, car ils te rendraient ton invitation et se serait un don en retour ; au contraire, … invites des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles, car ils ne peuvent rien te donner en retour : Cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

            L’humilité des invités et de l’hôte n’ont qu’un seul but : permettre d’être choisi par Jésus, et l’entendre nous dire « Venez à ma droite, vous les bénis de mon Père … car ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25, 33-34.40).

            Conseils pour la Vie éternelle.

Seigneur Jésus,

il est parfois difficile d’aller à l’encontre

de ce que le monde nous montre comme naturel,

mais le seul moyen d’obtenir la Vie éternelle,

c’est l’humilité

comme toi tu l’as vécue.

 

                                                                                   Francis Cousin

Francis Cousin

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22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN (St Luc 12,13-21)

Commentaires du dimanche 28 Août 2022 

 

Siracide 3,17–18, 20, 28–29 ; Hébreux 12,18–24 ; Luc 14,1, 7–14

Jésus est invité à un repas chez un des chefs des Pharisiens. Il remarque que bon nombre d’invités choisissent les premières places, les places d’honneur, le plus près possible du notable de la maison. Ce qu’il dit semble être un conseil d’ordre social, en quelque sorte comment bien se comporter en société. Il leur disait : « 8 Lorsque quelqu’un t’invite à un repas de noces, ne va pas t’étendre sur le premier divan, de peur qu’un plus digne que toi n’ait été invité par ton hôte, 9 et que celui qui vous a invités, toi et lui, ne vienne te dire :  Cède-lui la place.  Et alors tu devrais, plein de confusion, aller occuper la dernière place. 10 Au contraire, lorsque tu es invité, va te mettre à la dernière place, de façon qu’à son arrivée celui qui t’a invité te dise :  Mon ami, monte plus haut.  Alors il y aura pour toi de l’honneur devant tous les autres convives ». « Les marques d’honneur qui ont du prix sont celles qu’un autre nous donne, et non celles qu’on s’attribue à soi-même ! » (Hugues Cousin). Cette préoccupation de la hiérarchie sociale des invités, leur place dans la société, n’a en réalité servi qu’à nous amener à une préoccupation plus spirituelle : « quiconque s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé ». Jésus met l’accent sur la vertu d’humilité, opposé au péché d’orgueil.

Jésus dit à Sœur Faustine (§1562): « là où règne l’orgueil, je n’y suis pas ». A Mariam Baouardy, la sainte palestinienne, canonisée le 17 mai 2015 à Rome par le Pape François, qui avait beaucoup de difficultés apprendre à lire parce que l’Esprit du Mal l’en empêchait, le Seigneur lui dit : « « Ma fille, tu aurais trop d’orgueil, si tu apprenais trop vite à lire : cette science ne t’est pas nécessaire. Trois choses te suffisent :1) regarde-moi et pense à moi; 2) sois, en tout, la dernière de toutes; 3) obéis aveuglément ». Peu importe notre rang social, chacun de nous est appelé à rester dans l’humilité. Ne pas être hautain, condescendant, méprisant, fier, arrogant, ne pas se croire supérieur aux autres, tout cela fait partie de l’attitude de quelqu’un qui reste dans l’humilité. Dans le verset 11, « quiconque s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé », un détail permet de dire que celui qui élève ou celui qui abaisse, c’est Dieu. En effet, dans les textes bibliques, lorsque les verbes d’un verset sont au passif (conjugaison au passé composé) comme dans l’expression « quiconque s’élève sera abaissé et celui qui s’abaisse sera élevé », cela signifie que c’est Dieu qui agit. C’est Lui qui élève ou qui abaisse. Ainsi, dire que « quiconque s’élève sera abaissé », c’est dire que c’est Dieu qui l’abaissera et « celui qui s’abaisse sera élevé », c’est dire, plus clairement, que c’est Dieu qui l’élèvera. Mieux encore, ce texte sur l’invitation au repas nous amène à voir plus loin : Dieu nous invite réellement au repas, c’est le cas à chaque fois qu’il y a une messe, et de même pour le banquet final et éternel au Royaume de Dieu. Jn 14,2-3 : 2 Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures…je vais vous préparer une place. 3 Et quand je serai allé et que je vous aurai préparé une place, à nouveau je viendrai et je vous prendrai près de moi, afin que, là où je suis, vous aussi, vous soyez ». Les derniers seront les premiers : seront mis à l’honneur les invités qui sont restés dans l’humilité, des gens pauvres,  simples, respectueux, droits, naturels, spontanés, non calculateur, sans prétention, discrets, humbles, honnêtes etc…plus simplement, on va dire que Dieu invite toute l’humanité à son banquet, mais il met en honneur surtout les gens qui ont la foi et qui aiment Dieu et son prochain. Sœur Faustine nous dit (§54) : « Humilité, humilité et toujours humilité car nous ne pouvons rien de nous-mêmes. Tout n’est que grâce de Dieu ». Et si tout est grâce, tout ce que nous faisons de bien, de bon, vient de Dieu. Sœur Faustine §56 : « tout ce qu’il y a de bon en (notre) âme est uniquement dû à Sa Sainte Grâce ».

Nous n’avons donc réellement aucun mérite sinon celui de dire, comme Marie, « oui » au Seigneur. Mais un « oui » en continu, en permanence. La participation à la vie divine, déjà ici, sur terre, n’est pas une conquête de l’homme, mais un don de Dieu, un cadeau de Dieu dont il faut accepter et reconnaître ainsi l’importance de Dieu dans notre vie. Et Sœur Faustine nous conseille : « que la simplicité et l’humilité soient les signes caractéristiques de votre âme ! Marchez dans la vie comme un enfant, toujours confiant, toujours plein de simplicité et d’humilité, content de tout, toujours heureux ! Là où les autres âmes s’effrayent, passez tranquillement par la simplicité et l’humilité ». Rappelons que Dieu lui-même s’est abaissé en venant en son Fils parmi les hommes (Ph 2,6-8) : « 6 Lui étant dans la forme de Dieu n’a pas usé de son droit d’être traité comme un dieu 7 mais il s’est dépouillé prenant la forme d’esclave. Devenant semblable aux hommes et reconnu à son aspect comme un homme 8 il s’est abaissé devenant obéissant jusqu’à la mort à la mort sur une croix ». Jésus veut que nous soyons à sa ressemblance afin que nous partagions sa divinité. Dans le 1er texte d’aujourd’hui, Siracide 3,17-18 : « 17 Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur 18 « Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser pour trouver grâce devant le Seigneur, 20 car grande est la puissance du Seigneur, mais il est honoré par les humbles ».

– La deuxième partie de l’Evangile nous parle du choix des invités. Qui faut-il inviter au repas? Les invitations au repas, dans la Bible, ne manquent pas. Le roi Salamon recevait avec faste la reine de Saba, elle-même très riche. Le père du Fils prodigue a fait une grande fête au retour de son fils, parmi eux étaient présents des membres de la famille, des serviteurs, des amis et le frère ainé regrette qu’il n’ait jamais eu l’occasion d’avoir un chevreau pour fêter avec ses amis. Pourtant Jésus nous dit : Jésus nous dit : « Lorsque tu donnes un déjeuner ou un dîner, ne convie ni tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins, de peur qu’eux aussi ne t’invitent à leur tour et qu’on ne te rende la pareille ». Ce n’est pas que c’est interdit d’inviter la famille et les amis à un repas, c’est surtout qu’il ne faut pas inviter les gens dans un esprit d’avoir un retour, dans un intérêt quelconque, car il y a effectivement des gens qui invitent des personnes influentes en pensant que ces personnes pourront leur faire bénéficier de nouveaux avantages, pour avoir une aide financière, un poste de travail, pour accéder à grade supérieur, pour avoir des conseils financiers, juridiques ou autres. Ce serait un repas calculé, réfléchi, donné dans un intérêt quelconque. Ce n’est pas gratuit. Et du coup, ils n’inviteraient que des gens d’un certain niveau, une catégorie sociale qui pourrait leur rendre service en retour. Jésus ne veut pas de cela, c’est pourquoi il dit de ne pas inviter des gens qui ont les moyens de leur « renvoyer l’ascenseur » comme dit le proverbe. Et il précise les priorités à donner : « 13 …lorsque tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles; 14 heureux seras-tu alors de ce qu’ils n’ont pas de quoi te le rendre!  Car cela te sera rendu lors de la résurrection des justes ». « Les pauvres, les estropiés, les boiteux, les aveugles » désignent en réalité tous ceux qui ont, eux-mêmes, besoin d’aide et qui, à l’époque, ne pouvaient jamais s’en sortir parce qu’ils étaient mis au ban de la société, exclus de la société. Les inviter à un repas c’est faire signe de charité, signe d’amour, de générosité, de solidarité, de fraternité, c’est aimer son prochain. Celui qui les invite n’a aucun intérêt pour lui-même, il a juste la joie de partager sans aucun regret. Une joie qui fait la joie de Dieu. « Les riches ont, ici-bas, d’impérieux devoirs à l’égard des pauvres » (VTB – P.32) et en les secourant, c’est Jésus que nous secourons et nous dit l’Evangile « cela te sera rendu lors de la résurrection ». Rappelons qu’aucun de nos actes n’est perdu et Dieu s’en souviendra. Tous les saints ont fait des actes de générosité sans même penser à la récompense divine. Sœur Faustine (§55) : « les grâces de Dieu se déversent seulement sur les âmes humbles ». « Le fait que ce Dieu saint et tout-puissant se penche sur les détresses des hommes dont ils sont souvent les seules responsables, qu’Il voit la misère du pauvre et du malheureux, qu’il entende sa plainte, qu’il s’abaisse et descende jusqu’à lui pour le rejoindre dans sa détresse, qu’Il s’en occupe inlassablement malgré son infidélité et lui pardonne – bien qu’il ait mérité une juste punition – et qu’Il lui donne une nouvelle chance, tout cela dépasse l’entendement humain » (Cardinal Walter Kasper – La Miséricorde – P.51). Mais Dieu est ainsi fait : il aime, pardonne et offre une nouvelle chance, une vie nouvelle. A travers l’Evangile d’aujourd’hui, Dieu nous parle de la gratuité du salut. Tout ce que Dieu fait pour nous est gratuit par amour pour nous. Ep 2,8-9 : « 8 Car c’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu; 9 il ne vient pas des œuvres, car nul ne doit pouvoir se glorifier ». Tous nous sommes invités au festin du Royaume de Dieu. Le royaume de Dieu commence sur terre, et il n’y aucune raison d’avoir peur d’être son invité : invité à venir à la messe, invité à se former, invité à secourir les plus pauvres, invité à prier, à chanter, à lire la Bible, à écouter la parole de Dieu, à dire le chapelet ou le Rosaire etc…. Et cela nous amène au 2ème texte du jour qui nous parle de l’ancienne alliance (avant J.C.) et de la nouvelle alliance (avec J.C). Dans la première partie, v.18 à 21, Moïse se disait « effrayé et tout tremblant » après avoir vu tout ce qui se passait sur la montagne. Dans cette ancienne alliance, l’approche de Dieu se faisait dans une théophanie terrifiante (v.18) : « feu ardent, obscurité, ténèbres, ouragan, trompette et clameur de paroles ». Et «Quiconque touchait la montagne, même si c’est un animal, sera lapidé » (Ex 19,12-13). Pour un simple mortel, il paraissait alors difficile de s’approcher de Dieu dans ces conditions. Pourtant, ils n’échapperont pas à un éventuel châtiment : la lapidation. – Dans la Nouvelle Alliance, versets 22 à 24, deuxième partie du texte, Jésus nous parle des Cieux (2è lecture – v.22-24) : « vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de la cité du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste, et de myriades d’anges, réunion de fête, 23 et de l’assemblée des premiers-nés qui sont inscrits dans les cieux, d’un Dieu Juge universel, et des esprits des justes qui ont été rendus parfaits ». Le verset 25, qui fait suite au 2ème texte d’aujourd’hui nous met en garde après cette comparaison entre Ancienne et Nouvelle Alliance: si dans l’Ancienne Alliance, il était difficile de s’approcher de Dieu à cause des manifestations théophaniques, ce qui pouvait avoir pour conséquence de décourager les gens à s’approcher de Dieu et à l’écouter, et qui n’ont pas, malgré tout, échappé à un châtiment, à plus forte raison, si nous nous détournons de Celui qui parle des Cieux avec tant d’amour, nous n’échapperons pas à un châtiment encore plus sévère (He 12,25). Ici, nous sommes invités dans une ville bâtie par Dieu, appelé Royaume de Dieu, avec les anges, et où tous les chrétiens seront assemblés autour du Christ dans une réunion de fête éternelle. Tout cela nous est proposé gratuit, offert, tout simplement parce que nous nous sommes rapprochés…de Jésus médiateur et d’un sang purificateur (celui de Jésus mort et ressuscité). Les grands de ce monde terrestre, les tout-puissants, ceux qui veulent dominer et gouverner le monde avec leurs armes nucléaires, ceux qui font la loi avec leur richesse, seront abaissés, et ils le sont déjà…en s’éloignant du Christ, et à l’inverse, ceux qui se sont rapprochés du Christ, pauvre parmi les pauvres, Dieu humilié, frappé, abattu comme un agneau, seront élevés jusqu’à être divinisés, sanctifiés dans son Royaume pour le louer éternellement. Jn 17,24: … Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi… ». Que Marie nous accompagne jusqu’au Royaume de Dieu.




22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 14,1a.7-14)

«  Dieu élève les humbles »

(Lc 14,1a.7-14)

Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient.
Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit :
« Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi.
Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : “Cède-lui ta place” ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place.
Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : “Mon ami, avance plus haut”, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi.
En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »
Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour.
Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ;
heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

        

 

         Invité à un repas chez un Pharisien, Jésus remarque que certains « choisissaient les premières places », les places d’honneur, soit pour se mettre en avant, soit dans la certitude qu’ils étaient, eux, des invités de marque… Tel est bien « le levain des Pharisiens » (Mc 8,15) : l’orgueil qui pousse à se croire au dessus des autres. « Mon Dieu », disait un Pharisien dans le Temple de Jérusalem, « je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes : voleurs, injustes, adultères… Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne » (Lc 18,11-12). Il se vante lui-même de ses bonnes œuvres, et il les accomplit non pas par amour, mais uniquement pour se mettre en avant. La conséquence immédiate d’une telle attitude ne peut qu’être le mépris pour tous ceux et celles qui vivent et agissent différemment. « Cette foule qui ne connaît pas la Loi, ce sont des maudits ! » (Jn 7,48-49). Hélas, c’est justement par un tel jugement si complaisant à leur égard et si dur envers les autres, qu’ils s’excluent eux­­-mêmes du Royaume des Cieux…

            Un autre jour, Jésus fut invité à manger, non pas comme ici chez un Pharisien, mais chez Matthieu, le collecteur d’impôts, le collaborateur avec l’occupant Romain, le pécheur (Lc 5,29-32). Les Pharisiens récriminèrent aussitôt contre lui et ils disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? ». Eux, les purs, les justes, restaient bien sûr dehors pour ne pas se souiller au contact de ces « maudits »… Mais Jésus, qui avait entendu, leur dit de l’intérieur : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Allez apprendre ce que signifie : « C’est la miséricorde que je désire, et non les sacrifices » qui, accomplis par orgueil, ne font que nourrir l’orgueil…

            Tout homme est pécheur, blessé, spirituellement malade, de beaucoup ou de peu (Lc 7,36-50). Telle est la vérité : « Il n’en est pas de juste, pas un seul… Tous ont péché et sont privés de la Gloire de Dieu » (Rm 3,9-26 ; 7,1-25). Ne pas le reconnaître, c’est refuser de faire la vérité, c’est être encore dans l’illusion de son orgueil… Avec un tel état d’esprit, l’irruption dans la vérité de Dieu, au dernier jour de la mort, ne pourra qu’être vécu comme un abaissement, une humiliation, alors que Dieu, répétons-nous, ne cherche, de son côté, que le bien de tous : « Dieu veut que tous les hommes », ses enfants, « soient sauvés » (1Tm 2,3-6 ; Jn 3,16-17)… Par contre, celui qui accepte de faire cette démarche de vérité sur lui-même en reconnaissant dès maintenant ses faiblesses, ses misères, s’ouvre aussitôt au même moment à Celui qui, en tout son être, est « la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), Vérité d’un Amour infini, d’une Miséricorde toute Puissante qui n’a qu’un seul désir : élever tous les hommes au ciel pour les faire asseoir à sa droite, aux places d’honneur (Lc 22,28-30), là où le plus petit est le plus grand dans le Royaume des Cieux (Mt 11,11)…

                                                    DJF




22ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

L’humilité et Le service

Lc 14, 1-7.14

Loïc, un jeune de 18 ans, était breton. Il aimait la mer, le vent, le grand large. A chaque week-end, il partait se promener dans les rochers sur la côte et le soir, il revenait radieux, soulé du bruit des vagues, halé par le soleil qui lui fouettait le visage. Son rêve : il voulait devenir (et pourquoi pas ?) « gardien de phare ». Son père, pharmacien, un petit bonhomme, bedonnant et satisfait, circulait derrière son comptoir entre ses pots de tisanes, les pâtes dentifrices et les couches culottes.

« Rien à faire ! Il sera pharmacien », « Vous êtes bien d’accord mon père, il faut qu’il réussisse dans la vie ».

Le dialogue était rompu depuis longtemps entre le père et le fils. L’avenir : un sujet que l’on n’abordait plus ! C’était une chose classée : il sera pharmacien, si possible de 1ère classe et je voyais mon Loïc devenir rêveur, distrait, « à côté de ses pompes » comme disaient ses camarades.

 Je le fis venir et lui conseillai d’écrire une lettre à son père, de bien lui expliquer ce qu’il désirait faire, ses raisons, ses désirs ; que s’il le voulait absolument, il ferait d’abord des études de pharmacie.

Huit jours après, le père, qui, de son côté avait dû aussi réfléchir et se dire que la vie de son fils n’était pas la sienne, lui envoyait un mot : oh pas grand ! Mais magnifique ! C’était écrit : « Mon fils, fais ce que tu désires : il vaut mieux réussir sa vie que de réussir dans la vie ».

C’est exactement ce que le Seigneur veut nous faire comprendre aujourd’hui. Voulez-vous réussir dans la vie ou réussir votre vie ? Réussir dans la vie :

–  parvenir à tout prix aux premières places dans la société ou dans la profession,

–  passer avant les autres par tous les moyens,

– gagner le plus d’argent possible, à force d’intrigues, de passe-droits et de combines, la course à la présidence, la course « au perchoir »,

–  l’attrait des honneurs et de la fortune,

– être un homme considéré, distingué ; même les enfants sont intoxiqués : « C’est moi le chef ! C’est moi le plus fort ! C’est moi la plus belle ! » « Mon papa à moi, c’est lui qui a la plus belle voiture ! »

Heureux ceux qui s’imposent, ceux qui sont durs en affaires. Mentalités d’aujourd’hui, mentalités de toujours.

C’était déjà vrai au temps du Christ : invité à un repas, il voit les gens se bousculer pour parvenir aux premières places, pour se faire valoir aux yeux des autres.

« Ne va pas te mettre à la 1ère place », « Les premiers seront les derniers ». Que veut- il nous dire ?

A ses yeux, ce qui compte, ce qui fait la valeur d’un homme, ce n’est pas la place qu’il occupe ni les honneurs, les décorations, les titres, la fortune, le rang social, la belle voiture ou la belle case. Ce n’est pas de faire partie des « gens bien ».

Ce qui fait la valeur d’un homme aux yeux de Dieu, c’est d’abord son « ouverture », c’est sa qualité « d’amour », sa qualité de « service », celle dont il fait preuve à l’égard des autres.
Dans le Royaume, les vrais « gens bien », ceux qui seront les premiers : ce seront les doux, les artisans  de réconciliation  et  de paix, ceux qui ont faim et soif d’une justice meilleure pour tous, et même ceux qu’on critique, qu’on insulte ou qu’on persécute à cause de leurs engagements chrétiens qui viennent gêner les égoïstes, les arrivistes, les sales petites magouilles faites de combines, de pourboires, de piston, de dessous de table et de pots de vin. Peut-être que certains n’auraient pas réussi dans la vie, mais ils auront réussi leur vie parce qu’elle était conforme à leur idéal, à leur conscience, à leur droiture et ils découvriront le vrai bonheur : celui qui est, non pas à côté d’eux mais en eux.

Jésus nous suggère de modifier radicalement notre mentalité. Notez bien qu’il ne reproche à personne de vouloir arriver aux premières places dans la société, dans l’entreprise ou dans la fonction publique, si l’on est doué pour cela mais il nous dit :

« Si tu veux être le premier : que ce soit pour mieux servir, pour mieux aimer, pour mieux mettre tes talents et tes capacités au service d’un monde plus juste et plus humain, pour construire peu à peu un monde  qui soit un avant-goût du Royaume de Dieu. Alors, apprends à te  mettre au service des autres, humblement, gratuitement ». C’est d’ailleurs ce que Jésus lui-même a fait : il était Dieu, il était le premier. Il s’est fait homme, homme ordinaire se mettant au service des pauvres, des publicains, des pécheurs, des malades, les guérissant, les relevant, leur redonnant confiance et c’est parmi eux, qu’il a choisi ses amis. Ça n’a pas plu, c’était même gênant de voir ce type qui aurait pu faire une carrière, s’occuper de ceux dont on ne s’occupe pas.

Aussi Jésus fut-il condamné à mort, crucifié entre deux malfaiteurs, mis à la dernière place et « Dieu l’a élevé dans la gloire au-dessus de tout et lui a donné la première place, en lui conférant le titre de « Seigneur ». Et St-Paul ajoute : « Comportez-vous de même, vous aussi ».

Réussir dans la vie ou réussir sa vie… ? Telle est l’option,

le choix que nous avons toujours à refaire. Tout dépend du sens que je donne à ma vie… La réussir aux yeux des hommes ? Ou la réussir aux yeux de Dieu ?

. Où sont mes valeurs ?

. A quoi est-ce-que j’accorde de l’importance ?

. Au prestige ou au service ?

. A la carrière, fut-ce en marchant sur les autres ?

. Ou à l’ouverture de mon cœur fut-ce en gênant ma promotion ?

. A être admiré, respecté, honoré ? Ou être le serviteur anonyme qui préfère soulager sans être vu, donner discrètement ?

. A regarder sans cesse ceux qui sont au-dessus de moi, pour me hisser à leur niveau et devenir leur égal ? Ou à prêter attention à tous ceux qui sont au-dessous et qui me regardent, attendant de moi, un geste, un peu d’amour, d’attention ?

Réussir ma vie ou réussir dans la vie : il n’y a guère de compromis possible si l’on compare la mentalité d’un « monde mondain » et du « monde chrétien »: il faut choisir et de plus en plus… car nous assistons à une dérive qui va accentuer encore la parole du Christ : « Vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde ». Ne nous enfermons pas dans notre petit monde habituel. Ne vous enfermez pas dans vos relations sociales toujours les mêmes. On se retrouve toujours entre gens du même niveau social, culturel, professionnel, entre gens du même bord.

« Qui se ressemble s’assemble », dit le proverbe.

Ça ne veut pas dire qu’il faut casser notre réseau relationnel, mais  essayons de l’élargir, avoir l’occasion de briser nos cercles étroits dans lesquels nous nous enfermons. Pourquoi ?

1) pour faire comme le Christ qui ne s’est pas enfermé dans un petit cercle social. Il fréquentait tout le monde ! Pauvres et riches, grands et petits, justes et pécheurs. Il nous invite à faire comme lui. Pourquoi ?

2) parce que nous sommes tous frères et que pour un chrétien, il ne peut y avoir d’étranger. Et qu’en pratique, un proverbe nous dit qu’il faut faire effort pour nous rapprocher les uns des autres :

– « Quand je l’ai aperçu de loin, j’ai cru que c’était une bête.

– Quand il est devenu plus proche,

  j’ai vu que c’était un homme.

– Quand je me suis approché encore,

  j’ai vu que c’était mon frère ».            AMEN




21ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Père Rodolphe EMARD

Homélie du dimanche 21 août 2022

Lectures : Is 66, 18-21 ; Ps 116 ; He 12, 5-7. 11-13 ; Lc 13, 22-30

Les textes de ce 21ème dimanche du Temps ordinaire donnent de réfléchir sur la question du nombre des sauvés : Combien seront sauvés ?

Le prophète Isaïe et le Psaume évoquent un salut largement offert à tous alors que l’Évangile semble nous dire le contraire. Jésus parle en effet d’une porte étroite. Que pouvons-nous en dire ?

Dans la première lecture, Isaïe évoque un salut universel : « Ainsi parle le Seigneur : (…) moi, je viens rassembler toutes les nations, de toute langue. Elles viendront et verront ma gloire ». Isaïe invite à reconnaître la place des nations non-juives dans le projet de salut de Dieu. Nous avons sans doute l’un des textes les plus universels parmi les prophètes de l’Ancien Testament.

Le Psaume prolonge la première lecture. Le psalmiste invite tous les peuples à louer le Seigneur, à reconnaître son amour et sa fidélité envers tous.

Comment comprendre alors l’enseignement de Jésus qui pourrait sembler contradictoire ? Il y aurait-il « que peu de gens qui soient sauvés ? » comme le suggère ce passant que Jésus rencontre ? Ce serait ainsi donner raison aux Témoins de Jéhovah qui estiment le nombre de sauvés à 144 000. Un « maigre » chiffre pour toutes les générations passées, présentent et futures… La population mondiale actuelle approche le seuil de 8 milliards d’habitants… 144 000 places restent un chiffre très limité !

Penser ainsi serait faire du Salut une compétition, un concours qu’atteindraient uniquement les premiers de la classe. Jésus ne remet pas en cause l’universalité du Salut. Dans le projet de Dieu, il n’est pas question de triage. Un Salut réservé à quelques-uns serait-il un vrai Salut ?

Le Salut de Dieu est avant tout un don à accueillir. Personne ne pourrait se prévaloir une place au Royaume par ses propres forces. Sans le Christ, nous ne pourrons rien faire mais sans notre engagement, le Christ ne pourra rien faire non plus. Dieu, dans son amour infini pour l’humanité, veut que tous les hommes soient sauvés mais il ne peut pas les contraindre à être sauvés s’ils ne le veulent pas. L’amour infini de Dieu ne saurait obliger l’homme qu’il a créé libre.

C’est en ce sens que la porte est étroite. La porte c’est le Christ lui-même, le seul chemin qui mène au Père. Elle n’est fermée à personne mais elle est bien étroite. Jésus nous rappelle par-là les exigences de l’Évangile auxquelles nous devons répondre. Nous ne pourrons pas entrer dans le Royaume de Dieu remplis de nous-même, chargés de nos richesses matérielles d’ici-bas.

Être dans la gloire de Dieu, c’est être rempli de toute la vie de Dieu, de tout son amour. L’amour : voilà l’unique clé qui nous permettra de prendre la porte étroite ! Vivre l’amour c’est combattre l’injustice : « Éloignez-vous de moi, vous qui commettez l’injustice ».

L’appel de Jésus est sans équivoque : personne n’est privée du Royaume mais à tous de le désirer vraiment. Une remise en cause de soi est pour cela nécessaire. La deuxième lecture tirée de la lettre aux Hébreux nous invite à nous laisser corriger par Dieu. La correction de Dieu n’est pas arbitraire ou tortionnaire. L’auteur de la lettre aux Hébreux nous dit : « Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ».

La correction de Dieu ne punit pas mais elle fait grandir. La correction de Dieu est remplie de miséricorde. C’est en se laissant corrigé par Dieu, en vivant de son pardon, que nous saurons alors corriger nos frères avec douceur et bienveillance. Corriger sans jugement ni condamnation mais dans le souci d’aider, de relever ceux qui sont éprouvés.

Frères et sœurs, en ce début de rentrée scolaire, que la liturgie de la Parole de ce dimanche nous aide à mieux prendre au sérieux la question de notre propre salut. Que nous puissions nous désencombrer, nous dépouiller de ce qui est inutile pour saisir ce qui est utile pour être sauvé.

Je vous souhaite à tous une belle rentrée sous le regard du Christ. Je termine avec les versets du Psaume :

« Louez le Seigneur, tous les peuples ;
fêtez-le, tous les pays ! Son amour envers nous s’est montré le plus fort ;
éternelle est la fidélité du Seigneur ! »
Amen.