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22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 14,1.7-14)

« Discours moralisateur …

ou indications pour un chemin de Vie ?»

 

Les trois textes de ce jour vont dans le même sens : vivre dans l’humilité, à la suite de Jésus.

La première lecture, tirée du livre de Ben Sira, est un texte très court que nous devrions tous apprendre par cœur tellement il est clair concernant l’humilité : « Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur. Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser … L’idéal du sage, c’est une oreille qui écoute. », mais pas n’importe qui ou n’importe quoi, mais la Parole du Seigneur, celle de Jésus.

Dans la deuxième lecture, le thème de l’humilité est moins évident, mais il reste réel : dans l’ancien testament, la manifestation de Dieu se faisait de manière éclatante, dans « une réalité palpable, embrasée par le feu … pas d’obscurité, de ténèbres ni d’ouragan, pas de son de trompettes » mais, dans le nouveau testament, « vous êtes venus vers Jésus » vers sa Parole et son exemple.

Jésus, dont saint Paul dit qu’il « s’est abaissé… jusqu’à mourir et mourir sur une croix. C’est pourquoi, Dieu l’a élevé au-dessus de tout. » (Phil 2,8-9). Mais cela avait commencé par sa naissance : Jésus, par la volonté de son Père et la puissance de l’Esprit Saint s’est abaissé à devenir un homme, il est né dans des conditions, sinon très ordinaires, du moins rustiques et humble, et il a vécu simplement avec tous ceux qu’il a rencontrés … et la veille de sa mort, il a pris le tablier pour laver les pieds de ses disciples.

Jésus, l’humilité la plus totale.

Et c’est lui que nous devons écouter.

Malheureusement, on ne peut pas dire que la manière de vivre de Jésus soit la plus écoutée dans notre monde !

L’humilité est bien souvent considérée comme une faiblesse … alors que les ambitieux, ceux qui veulent réussir à tout prix, y compris en écrasant les autres, ceux qui veulent toujours être mis en avant dans tous les domaines sont souvent montrés comme des exemples … et cela dès le plus jeune âge ! Il n’y a qu’à entendre les discours des parents sur les ’’prouesses’’ de leurs enfants comme « Mon fils sait déjà marcher à huit mois » ou « A trois ans, mon enfant sait déjà nager et faire du vélo » … ou d’autres ’’demandes’’ comme « Tu dois être le meilleur de ta classe » etc …

Ces habitudes mondaines ont été critiqués par Jésus lors du repas organisé chez un chef de pharisiens un jour de sabbat … où il était attendu des invités pour ses possibles remarques. En voyant les invités chercher à prendre les premières places, celles qui sont les plus proches de l’hôte, Jésus leur proposa deux paraboles : l’une pour les invités, l’autre pour l’hôte … mais dont les conclusions s’appliquent à tous …

« Quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : ’’Mon ami, avance plus haut’’, et ce sera pour toi un honneur » Mais l’essentiel est dans la conclusion : « Quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »

            Et pour l’hôte : « Si tu donnes un repas, n’invite pas tes amis, tes frères, tes parents, de riches voisins, car ils te rendraient ton invitation et se serait un don en retour ; au contraire, … invites des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles, car ils ne peuvent rien te donner en retour : Cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

            L’humilité des invités et de l’hôte n’ont qu’un seul but : permettre d’être choisi par Jésus, et l’entendre nous dire « Venez à ma droite, vous les bénis de mon Père … car ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25, 33-34.40).

            Conseils pour la Vie éternelle.

Seigneur Jésus,

il est parfois difficile d’aller à l’encontre

de ce que le monde nous montre comme naturel,

mais le seul moyen d’obtenir la Vie éternelle,

c’est l’humilité

comme toi tu l’as vécue.

 

                                                                                   Francis Cousin

Francis Cousin

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22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN (St Luc 12,13-21)

Commentaires du dimanche 28 Août 2022 

 

Siracide 3,17–18, 20, 28–29 ; Hébreux 12,18–24 ; Luc 14,1, 7–14

Jésus est invité à un repas chez un des chefs des Pharisiens. Il remarque que bon nombre d’invités choisissent les premières places, les places d’honneur, le plus près possible du notable de la maison. Ce qu’il dit semble être un conseil d’ordre social, en quelque sorte comment bien se comporter en société. Il leur disait : « 8 Lorsque quelqu’un t’invite à un repas de noces, ne va pas t’étendre sur le premier divan, de peur qu’un plus digne que toi n’ait été invité par ton hôte, 9 et que celui qui vous a invités, toi et lui, ne vienne te dire :  Cède-lui la place.  Et alors tu devrais, plein de confusion, aller occuper la dernière place. 10 Au contraire, lorsque tu es invité, va te mettre à la dernière place, de façon qu’à son arrivée celui qui t’a invité te dise :  Mon ami, monte plus haut.  Alors il y aura pour toi de l’honneur devant tous les autres convives ». « Les marques d’honneur qui ont du prix sont celles qu’un autre nous donne, et non celles qu’on s’attribue à soi-même ! » (Hugues Cousin). Cette préoccupation de la hiérarchie sociale des invités, leur place dans la société, n’a en réalité servi qu’à nous amener à une préoccupation plus spirituelle : « quiconque s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé ». Jésus met l’accent sur la vertu d’humilité, opposé au péché d’orgueil.

Jésus dit à Sœur Faustine (§1562): « là où règne l’orgueil, je n’y suis pas ». A Mariam Baouardy, la sainte palestinienne, canonisée le 17 mai 2015 à Rome par le Pape François, qui avait beaucoup de difficultés apprendre à lire parce que l’Esprit du Mal l’en empêchait, le Seigneur lui dit : « « Ma fille, tu aurais trop d’orgueil, si tu apprenais trop vite à lire : cette science ne t’est pas nécessaire. Trois choses te suffisent :1) regarde-moi et pense à moi; 2) sois, en tout, la dernière de toutes; 3) obéis aveuglément ». Peu importe notre rang social, chacun de nous est appelé à rester dans l’humilité. Ne pas être hautain, condescendant, méprisant, fier, arrogant, ne pas se croire supérieur aux autres, tout cela fait partie de l’attitude de quelqu’un qui reste dans l’humilité. Dans le verset 11, « quiconque s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé », un détail permet de dire que celui qui élève ou celui qui abaisse, c’est Dieu. En effet, dans les textes bibliques, lorsque les verbes d’un verset sont au passif (conjugaison au passé composé) comme dans l’expression « quiconque s’élève sera abaissé et celui qui s’abaisse sera élevé », cela signifie que c’est Dieu qui agit. C’est Lui qui élève ou qui abaisse. Ainsi, dire que « quiconque s’élève sera abaissé », c’est dire que c’est Dieu qui l’abaissera et « celui qui s’abaisse sera élevé », c’est dire, plus clairement, que c’est Dieu qui l’élèvera. Mieux encore, ce texte sur l’invitation au repas nous amène à voir plus loin : Dieu nous invite réellement au repas, c’est le cas à chaque fois qu’il y a une messe, et de même pour le banquet final et éternel au Royaume de Dieu. Jn 14,2-3 : 2 Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures…je vais vous préparer une place. 3 Et quand je serai allé et que je vous aurai préparé une place, à nouveau je viendrai et je vous prendrai près de moi, afin que, là où je suis, vous aussi, vous soyez ». Les derniers seront les premiers : seront mis à l’honneur les invités qui sont restés dans l’humilité, des gens pauvres,  simples, respectueux, droits, naturels, spontanés, non calculateur, sans prétention, discrets, humbles, honnêtes etc…plus simplement, on va dire que Dieu invite toute l’humanité à son banquet, mais il met en honneur surtout les gens qui ont la foi et qui aiment Dieu et son prochain. Sœur Faustine nous dit (§54) : « Humilité, humilité et toujours humilité car nous ne pouvons rien de nous-mêmes. Tout n’est que grâce de Dieu ». Et si tout est grâce, tout ce que nous faisons de bien, de bon, vient de Dieu. Sœur Faustine §56 : « tout ce qu’il y a de bon en (notre) âme est uniquement dû à Sa Sainte Grâce ».

Nous n’avons donc réellement aucun mérite sinon celui de dire, comme Marie, « oui » au Seigneur. Mais un « oui » en continu, en permanence. La participation à la vie divine, déjà ici, sur terre, n’est pas une conquête de l’homme, mais un don de Dieu, un cadeau de Dieu dont il faut accepter et reconnaître ainsi l’importance de Dieu dans notre vie. Et Sœur Faustine nous conseille : « que la simplicité et l’humilité soient les signes caractéristiques de votre âme ! Marchez dans la vie comme un enfant, toujours confiant, toujours plein de simplicité et d’humilité, content de tout, toujours heureux ! Là où les autres âmes s’effrayent, passez tranquillement par la simplicité et l’humilité ». Rappelons que Dieu lui-même s’est abaissé en venant en son Fils parmi les hommes (Ph 2,6-8) : « 6 Lui étant dans la forme de Dieu n’a pas usé de son droit d’être traité comme un dieu 7 mais il s’est dépouillé prenant la forme d’esclave. Devenant semblable aux hommes et reconnu à son aspect comme un homme 8 il s’est abaissé devenant obéissant jusqu’à la mort à la mort sur une croix ». Jésus veut que nous soyons à sa ressemblance afin que nous partagions sa divinité. Dans le 1er texte d’aujourd’hui, Siracide 3,17-18 : « 17 Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur 18 « Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser pour trouver grâce devant le Seigneur, 20 car grande est la puissance du Seigneur, mais il est honoré par les humbles ».

– La deuxième partie de l’Evangile nous parle du choix des invités. Qui faut-il inviter au repas? Les invitations au repas, dans la Bible, ne manquent pas. Le roi Salamon recevait avec faste la reine de Saba, elle-même très riche. Le père du Fils prodigue a fait une grande fête au retour de son fils, parmi eux étaient présents des membres de la famille, des serviteurs, des amis et le frère ainé regrette qu’il n’ait jamais eu l’occasion d’avoir un chevreau pour fêter avec ses amis. Pourtant Jésus nous dit : Jésus nous dit : « Lorsque tu donnes un déjeuner ou un dîner, ne convie ni tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins, de peur qu’eux aussi ne t’invitent à leur tour et qu’on ne te rende la pareille ». Ce n’est pas que c’est interdit d’inviter la famille et les amis à un repas, c’est surtout qu’il ne faut pas inviter les gens dans un esprit d’avoir un retour, dans un intérêt quelconque, car il y a effectivement des gens qui invitent des personnes influentes en pensant que ces personnes pourront leur faire bénéficier de nouveaux avantages, pour avoir une aide financière, un poste de travail, pour accéder à grade supérieur, pour avoir des conseils financiers, juridiques ou autres. Ce serait un repas calculé, réfléchi, donné dans un intérêt quelconque. Ce n’est pas gratuit. Et du coup, ils n’inviteraient que des gens d’un certain niveau, une catégorie sociale qui pourrait leur rendre service en retour. Jésus ne veut pas de cela, c’est pourquoi il dit de ne pas inviter des gens qui ont les moyens de leur « renvoyer l’ascenseur » comme dit le proverbe. Et il précise les priorités à donner : « 13 …lorsque tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles; 14 heureux seras-tu alors de ce qu’ils n’ont pas de quoi te le rendre!  Car cela te sera rendu lors de la résurrection des justes ». « Les pauvres, les estropiés, les boiteux, les aveugles » désignent en réalité tous ceux qui ont, eux-mêmes, besoin d’aide et qui, à l’époque, ne pouvaient jamais s’en sortir parce qu’ils étaient mis au ban de la société, exclus de la société. Les inviter à un repas c’est faire signe de charité, signe d’amour, de générosité, de solidarité, de fraternité, c’est aimer son prochain. Celui qui les invite n’a aucun intérêt pour lui-même, il a juste la joie de partager sans aucun regret. Une joie qui fait la joie de Dieu. « Les riches ont, ici-bas, d’impérieux devoirs à l’égard des pauvres » (VTB – P.32) et en les secourant, c’est Jésus que nous secourons et nous dit l’Evangile « cela te sera rendu lors de la résurrection ». Rappelons qu’aucun de nos actes n’est perdu et Dieu s’en souviendra. Tous les saints ont fait des actes de générosité sans même penser à la récompense divine. Sœur Faustine (§55) : « les grâces de Dieu se déversent seulement sur les âmes humbles ». « Le fait que ce Dieu saint et tout-puissant se penche sur les détresses des hommes dont ils sont souvent les seules responsables, qu’Il voit la misère du pauvre et du malheureux, qu’il entende sa plainte, qu’il s’abaisse et descende jusqu’à lui pour le rejoindre dans sa détresse, qu’Il s’en occupe inlassablement malgré son infidélité et lui pardonne – bien qu’il ait mérité une juste punition – et qu’Il lui donne une nouvelle chance, tout cela dépasse l’entendement humain » (Cardinal Walter Kasper – La Miséricorde – P.51). Mais Dieu est ainsi fait : il aime, pardonne et offre une nouvelle chance, une vie nouvelle. A travers l’Evangile d’aujourd’hui, Dieu nous parle de la gratuité du salut. Tout ce que Dieu fait pour nous est gratuit par amour pour nous. Ep 2,8-9 : « 8 Car c’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu; 9 il ne vient pas des œuvres, car nul ne doit pouvoir se glorifier ». Tous nous sommes invités au festin du Royaume de Dieu. Le royaume de Dieu commence sur terre, et il n’y aucune raison d’avoir peur d’être son invité : invité à venir à la messe, invité à se former, invité à secourir les plus pauvres, invité à prier, à chanter, à lire la Bible, à écouter la parole de Dieu, à dire le chapelet ou le Rosaire etc…. Et cela nous amène au 2ème texte du jour qui nous parle de l’ancienne alliance (avant J.C.) et de la nouvelle alliance (avec J.C). Dans la première partie, v.18 à 21, Moïse se disait « effrayé et tout tremblant » après avoir vu tout ce qui se passait sur la montagne. Dans cette ancienne alliance, l’approche de Dieu se faisait dans une théophanie terrifiante (v.18) : « feu ardent, obscurité, ténèbres, ouragan, trompette et clameur de paroles ». Et «Quiconque touchait la montagne, même si c’est un animal, sera lapidé » (Ex 19,12-13). Pour un simple mortel, il paraissait alors difficile de s’approcher de Dieu dans ces conditions. Pourtant, ils n’échapperont pas à un éventuel châtiment : la lapidation. – Dans la Nouvelle Alliance, versets 22 à 24, deuxième partie du texte, Jésus nous parle des Cieux (2è lecture – v.22-24) : « vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de la cité du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste, et de myriades d’anges, réunion de fête, 23 et de l’assemblée des premiers-nés qui sont inscrits dans les cieux, d’un Dieu Juge universel, et des esprits des justes qui ont été rendus parfaits ». Le verset 25, qui fait suite au 2ème texte d’aujourd’hui nous met en garde après cette comparaison entre Ancienne et Nouvelle Alliance: si dans l’Ancienne Alliance, il était difficile de s’approcher de Dieu à cause des manifestations théophaniques, ce qui pouvait avoir pour conséquence de décourager les gens à s’approcher de Dieu et à l’écouter, et qui n’ont pas, malgré tout, échappé à un châtiment, à plus forte raison, si nous nous détournons de Celui qui parle des Cieux avec tant d’amour, nous n’échapperons pas à un châtiment encore plus sévère (He 12,25). Ici, nous sommes invités dans une ville bâtie par Dieu, appelé Royaume de Dieu, avec les anges, et où tous les chrétiens seront assemblés autour du Christ dans une réunion de fête éternelle. Tout cela nous est proposé gratuit, offert, tout simplement parce que nous nous sommes rapprochés…de Jésus médiateur et d’un sang purificateur (celui de Jésus mort et ressuscité). Les grands de ce monde terrestre, les tout-puissants, ceux qui veulent dominer et gouverner le monde avec leurs armes nucléaires, ceux qui font la loi avec leur richesse, seront abaissés, et ils le sont déjà…en s’éloignant du Christ, et à l’inverse, ceux qui se sont rapprochés du Christ, pauvre parmi les pauvres, Dieu humilié, frappé, abattu comme un agneau, seront élevés jusqu’à être divinisés, sanctifiés dans son Royaume pour le louer éternellement. Jn 17,24: … Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi… ». Que Marie nous accompagne jusqu’au Royaume de Dieu.




22ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 14,1a.7-14)

«  Dieu élève les humbles »

(Lc 14,1a.7-14)

Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient.
Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit :
« Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi.
Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : “Cède-lui ta place” ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place.
Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : “Mon ami, avance plus haut”, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi.
En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »
Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour.
Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ;
heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

        

 

         Invité à un repas chez un Pharisien, Jésus remarque que certains « choisissaient les premières places », les places d’honneur, soit pour se mettre en avant, soit dans la certitude qu’ils étaient, eux, des invités de marque… Tel est bien « le levain des Pharisiens » (Mc 8,15) : l’orgueil qui pousse à se croire au dessus des autres. « Mon Dieu », disait un Pharisien dans le Temple de Jérusalem, « je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes : voleurs, injustes, adultères… Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne » (Lc 18,11-12). Il se vante lui-même de ses bonnes œuvres, et il les accomplit non pas par amour, mais uniquement pour se mettre en avant. La conséquence immédiate d’une telle attitude ne peut qu’être le mépris pour tous ceux et celles qui vivent et agissent différemment. « Cette foule qui ne connaît pas la Loi, ce sont des maudits ! » (Jn 7,48-49). Hélas, c’est justement par un tel jugement si complaisant à leur égard et si dur envers les autres, qu’ils s’excluent eux­­-mêmes du Royaume des Cieux…

            Un autre jour, Jésus fut invité à manger, non pas comme ici chez un Pharisien, mais chez Matthieu, le collecteur d’impôts, le collaborateur avec l’occupant Romain, le pécheur (Lc 5,29-32). Les Pharisiens récriminèrent aussitôt contre lui et ils disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? ». Eux, les purs, les justes, restaient bien sûr dehors pour ne pas se souiller au contact de ces « maudits »… Mais Jésus, qui avait entendu, leur dit de l’intérieur : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Allez apprendre ce que signifie : « C’est la miséricorde que je désire, et non les sacrifices » qui, accomplis par orgueil, ne font que nourrir l’orgueil…

            Tout homme est pécheur, blessé, spirituellement malade, de beaucoup ou de peu (Lc 7,36-50). Telle est la vérité : « Il n’en est pas de juste, pas un seul… Tous ont péché et sont privés de la Gloire de Dieu » (Rm 3,9-26 ; 7,1-25). Ne pas le reconnaître, c’est refuser de faire la vérité, c’est être encore dans l’illusion de son orgueil… Avec un tel état d’esprit, l’irruption dans la vérité de Dieu, au dernier jour de la mort, ne pourra qu’être vécu comme un abaissement, une humiliation, alors que Dieu, répétons-nous, ne cherche, de son côté, que le bien de tous : « Dieu veut que tous les hommes », ses enfants, « soient sauvés » (1Tm 2,3-6 ; Jn 3,16-17)… Par contre, celui qui accepte de faire cette démarche de vérité sur lui-même en reconnaissant dès maintenant ses faiblesses, ses misères, s’ouvre aussitôt au même moment à Celui qui, en tout son être, est « la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), Vérité d’un Amour infini, d’une Miséricorde toute Puissante qui n’a qu’un seul désir : élever tous les hommes au ciel pour les faire asseoir à sa droite, aux places d’honneur (Lc 22,28-30), là où le plus petit est le plus grand dans le Royaume des Cieux (Mt 11,11)…

                                                    DJF




22ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

L’humilité et Le service

Lc 14, 1-7.14

Loïc, un jeune de 18 ans, était breton. Il aimait la mer, le vent, le grand large. A chaque week-end, il partait se promener dans les rochers sur la côte et le soir, il revenait radieux, soulé du bruit des vagues, halé par le soleil qui lui fouettait le visage. Son rêve : il voulait devenir (et pourquoi pas ?) « gardien de phare ». Son père, pharmacien, un petit bonhomme, bedonnant et satisfait, circulait derrière son comptoir entre ses pots de tisanes, les pâtes dentifrices et les couches culottes.

« Rien à faire ! Il sera pharmacien », « Vous êtes bien d’accord mon père, il faut qu’il réussisse dans la vie ».

Le dialogue était rompu depuis longtemps entre le père et le fils. L’avenir : un sujet que l’on n’abordait plus ! C’était une chose classée : il sera pharmacien, si possible de 1ère classe et je voyais mon Loïc devenir rêveur, distrait, « à côté de ses pompes » comme disaient ses camarades.

 Je le fis venir et lui conseillai d’écrire une lettre à son père, de bien lui expliquer ce qu’il désirait faire, ses raisons, ses désirs ; que s’il le voulait absolument, il ferait d’abord des études de pharmacie.

Huit jours après, le père, qui, de son côté avait dû aussi réfléchir et se dire que la vie de son fils n’était pas la sienne, lui envoyait un mot : oh pas grand ! Mais magnifique ! C’était écrit : « Mon fils, fais ce que tu désires : il vaut mieux réussir sa vie que de réussir dans la vie ».

C’est exactement ce que le Seigneur veut nous faire comprendre aujourd’hui. Voulez-vous réussir dans la vie ou réussir votre vie ? Réussir dans la vie :

–  parvenir à tout prix aux premières places dans la société ou dans la profession,

–  passer avant les autres par tous les moyens,

– gagner le plus d’argent possible, à force d’intrigues, de passe-droits et de combines, la course à la présidence, la course « au perchoir »,

–  l’attrait des honneurs et de la fortune,

– être un homme considéré, distingué ; même les enfants sont intoxiqués : « C’est moi le chef ! C’est moi le plus fort ! C’est moi la plus belle ! » « Mon papa à moi, c’est lui qui a la plus belle voiture ! »

Heureux ceux qui s’imposent, ceux qui sont durs en affaires. Mentalités d’aujourd’hui, mentalités de toujours.

C’était déjà vrai au temps du Christ : invité à un repas, il voit les gens se bousculer pour parvenir aux premières places, pour se faire valoir aux yeux des autres.

« Ne va pas te mettre à la 1ère place », « Les premiers seront les derniers ». Que veut- il nous dire ?

A ses yeux, ce qui compte, ce qui fait la valeur d’un homme, ce n’est pas la place qu’il occupe ni les honneurs, les décorations, les titres, la fortune, le rang social, la belle voiture ou la belle case. Ce n’est pas de faire partie des « gens bien ».

Ce qui fait la valeur d’un homme aux yeux de Dieu, c’est d’abord son « ouverture », c’est sa qualité « d’amour », sa qualité de « service », celle dont il fait preuve à l’égard des autres.
Dans le Royaume, les vrais « gens bien », ceux qui seront les premiers : ce seront les doux, les artisans  de réconciliation  et  de paix, ceux qui ont faim et soif d’une justice meilleure pour tous, et même ceux qu’on critique, qu’on insulte ou qu’on persécute à cause de leurs engagements chrétiens qui viennent gêner les égoïstes, les arrivistes, les sales petites magouilles faites de combines, de pourboires, de piston, de dessous de table et de pots de vin. Peut-être que certains n’auraient pas réussi dans la vie, mais ils auront réussi leur vie parce qu’elle était conforme à leur idéal, à leur conscience, à leur droiture et ils découvriront le vrai bonheur : celui qui est, non pas à côté d’eux mais en eux.

Jésus nous suggère de modifier radicalement notre mentalité. Notez bien qu’il ne reproche à personne de vouloir arriver aux premières places dans la société, dans l’entreprise ou dans la fonction publique, si l’on est doué pour cela mais il nous dit :

« Si tu veux être le premier : que ce soit pour mieux servir, pour mieux aimer, pour mieux mettre tes talents et tes capacités au service d’un monde plus juste et plus humain, pour construire peu à peu un monde  qui soit un avant-goût du Royaume de Dieu. Alors, apprends à te  mettre au service des autres, humblement, gratuitement ». C’est d’ailleurs ce que Jésus lui-même a fait : il était Dieu, il était le premier. Il s’est fait homme, homme ordinaire se mettant au service des pauvres, des publicains, des pécheurs, des malades, les guérissant, les relevant, leur redonnant confiance et c’est parmi eux, qu’il a choisi ses amis. Ça n’a pas plu, c’était même gênant de voir ce type qui aurait pu faire une carrière, s’occuper de ceux dont on ne s’occupe pas.

Aussi Jésus fut-il condamné à mort, crucifié entre deux malfaiteurs, mis à la dernière place et « Dieu l’a élevé dans la gloire au-dessus de tout et lui a donné la première place, en lui conférant le titre de « Seigneur ». Et St-Paul ajoute : « Comportez-vous de même, vous aussi ».

Réussir dans la vie ou réussir sa vie… ? Telle est l’option,

le choix que nous avons toujours à refaire. Tout dépend du sens que je donne à ma vie… La réussir aux yeux des hommes ? Ou la réussir aux yeux de Dieu ?

. Où sont mes valeurs ?

. A quoi est-ce-que j’accorde de l’importance ?

. Au prestige ou au service ?

. A la carrière, fut-ce en marchant sur les autres ?

. Ou à l’ouverture de mon cœur fut-ce en gênant ma promotion ?

. A être admiré, respecté, honoré ? Ou être le serviteur anonyme qui préfère soulager sans être vu, donner discrètement ?

. A regarder sans cesse ceux qui sont au-dessus de moi, pour me hisser à leur niveau et devenir leur égal ? Ou à prêter attention à tous ceux qui sont au-dessous et qui me regardent, attendant de moi, un geste, un peu d’amour, d’attention ?

Réussir ma vie ou réussir dans la vie : il n’y a guère de compromis possible si l’on compare la mentalité d’un « monde mondain » et du « monde chrétien »: il faut choisir et de plus en plus… car nous assistons à une dérive qui va accentuer encore la parole du Christ : « Vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde ». Ne nous enfermons pas dans notre petit monde habituel. Ne vous enfermez pas dans vos relations sociales toujours les mêmes. On se retrouve toujours entre gens du même niveau social, culturel, professionnel, entre gens du même bord.

« Qui se ressemble s’assemble », dit le proverbe.

Ça ne veut pas dire qu’il faut casser notre réseau relationnel, mais  essayons de l’élargir, avoir l’occasion de briser nos cercles étroits dans lesquels nous nous enfermons. Pourquoi ?

1) pour faire comme le Christ qui ne s’est pas enfermé dans un petit cercle social. Il fréquentait tout le monde ! Pauvres et riches, grands et petits, justes et pécheurs. Il nous invite à faire comme lui. Pourquoi ?

2) parce que nous sommes tous frères et que pour un chrétien, il ne peut y avoir d’étranger. Et qu’en pratique, un proverbe nous dit qu’il faut faire effort pour nous rapprocher les uns des autres :

– « Quand je l’ai aperçu de loin, j’ai cru que c’était une bête.

– Quand il est devenu plus proche,

  j’ai vu que c’était un homme.

– Quand je me suis approché encore,

  j’ai vu que c’était mon frère ».            AMEN




21ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Père Rodolphe EMARD

Homélie du dimanche 21 août 2022

Lectures : Is 66, 18-21 ; Ps 116 ; He 12, 5-7. 11-13 ; Lc 13, 22-30

Les textes de ce 21ème dimanche du Temps ordinaire donnent de réfléchir sur la question du nombre des sauvés : Combien seront sauvés ?

Le prophète Isaïe et le Psaume évoquent un salut largement offert à tous alors que l’Évangile semble nous dire le contraire. Jésus parle en effet d’une porte étroite. Que pouvons-nous en dire ?

Dans la première lecture, Isaïe évoque un salut universel : « Ainsi parle le Seigneur : (…) moi, je viens rassembler toutes les nations, de toute langue. Elles viendront et verront ma gloire ». Isaïe invite à reconnaître la place des nations non-juives dans le projet de salut de Dieu. Nous avons sans doute l’un des textes les plus universels parmi les prophètes de l’Ancien Testament.

Le Psaume prolonge la première lecture. Le psalmiste invite tous les peuples à louer le Seigneur, à reconnaître son amour et sa fidélité envers tous.

Comment comprendre alors l’enseignement de Jésus qui pourrait sembler contradictoire ? Il y aurait-il « que peu de gens qui soient sauvés ? » comme le suggère ce passant que Jésus rencontre ? Ce serait ainsi donner raison aux Témoins de Jéhovah qui estiment le nombre de sauvés à 144 000. Un « maigre » chiffre pour toutes les générations passées, présentent et futures… La population mondiale actuelle approche le seuil de 8 milliards d’habitants… 144 000 places restent un chiffre très limité !

Penser ainsi serait faire du Salut une compétition, un concours qu’atteindraient uniquement les premiers de la classe. Jésus ne remet pas en cause l’universalité du Salut. Dans le projet de Dieu, il n’est pas question de triage. Un Salut réservé à quelques-uns serait-il un vrai Salut ?

Le Salut de Dieu est avant tout un don à accueillir. Personne ne pourrait se prévaloir une place au Royaume par ses propres forces. Sans le Christ, nous ne pourrons rien faire mais sans notre engagement, le Christ ne pourra rien faire non plus. Dieu, dans son amour infini pour l’humanité, veut que tous les hommes soient sauvés mais il ne peut pas les contraindre à être sauvés s’ils ne le veulent pas. L’amour infini de Dieu ne saurait obliger l’homme qu’il a créé libre.

C’est en ce sens que la porte est étroite. La porte c’est le Christ lui-même, le seul chemin qui mène au Père. Elle n’est fermée à personne mais elle est bien étroite. Jésus nous rappelle par-là les exigences de l’Évangile auxquelles nous devons répondre. Nous ne pourrons pas entrer dans le Royaume de Dieu remplis de nous-même, chargés de nos richesses matérielles d’ici-bas.

Être dans la gloire de Dieu, c’est être rempli de toute la vie de Dieu, de tout son amour. L’amour : voilà l’unique clé qui nous permettra de prendre la porte étroite ! Vivre l’amour c’est combattre l’injustice : « Éloignez-vous de moi, vous qui commettez l’injustice ».

L’appel de Jésus est sans équivoque : personne n’est privée du Royaume mais à tous de le désirer vraiment. Une remise en cause de soi est pour cela nécessaire. La deuxième lecture tirée de la lettre aux Hébreux nous invite à nous laisser corriger par Dieu. La correction de Dieu n’est pas arbitraire ou tortionnaire. L’auteur de la lettre aux Hébreux nous dit : « Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ».

La correction de Dieu ne punit pas mais elle fait grandir. La correction de Dieu est remplie de miséricorde. C’est en se laissant corrigé par Dieu, en vivant de son pardon, que nous saurons alors corriger nos frères avec douceur et bienveillance. Corriger sans jugement ni condamnation mais dans le souci d’aider, de relever ceux qui sont éprouvés.

Frères et sœurs, en ce début de rentrée scolaire, que la liturgie de la Parole de ce dimanche nous aide à mieux prendre au sérieux la question de notre propre salut. Que nous puissions nous désencombrer, nous dépouiller de ce qui est inutile pour saisir ce qui est utile pour être sauvé.

Je vous souhaite à tous une belle rentrée sous le regard du Christ. Je termine avec les versets du Psaume :

« Louez le Seigneur, tous les peuples ;
fêtez-le, tous les pays ! Son amour envers nous s’est montré le plus fort ;
éternelle est la fidélité du Seigneur ! »
Amen.




21ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

La porte étroite

Lc 13,22-30

            «  Seigneur, n’y aura- t- il que peu de gens à être sauvés ? » Jésus leur dit alors : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite car je vous le dis, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas ».

Si un jour, frères, vous allez à Bethléem, dans la basilique construite sur la grotte où Jésus est né, vous aurez une surprise : c’est une basilique sans façade, pas de portail ; seulement à l’entrée, un grand mur, et dans le bas, à gauche, une petite porte, toute petite, seul accès possible dans ce lieu où Dieu s’est dépouillé de tout pour devenir « petit enfant des hommes ». Certes, il y a des explications matérielles et historiques à l’exiguïté et l’étroitesse de cette porte : il était plus facile de contrôler qui entrait ; au temps des invasions, et Dieu sait s’il y en eut, la basilique était plus facile à défendre, mais les chrétiens, en voyant cette porte, se sont toujours rappelés la « Porte étroite » de l’Evangile d’aujourd’hui.

Les cavaliers du Moyen-Age étaient obligés de descendre de leur  monture et même d’enlever tout leur équipement pour pouvoir passer. Le touriste américain avec tous ses appareils de photos sur le ventre était obligé d’en faire autant.

Nous croyons naïvement que de grandes portes sont largement ouvertes pour accueillir tous les hommes dans le Royaume. Nous faisons entrer volontiers dans le paradis toutes les foules « de bonne foi ».

Aujourd’hui, Jésus déçoit notre optimisme. « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ». Il y aura une foule massée devant cette petite porte, un jour fermée, car un jour elle sera fermée, alors cette foule se mettra à taper sur cette porte, à crier : « Seigneur, ouvre-moi ». Il y a erreur : nous t’avons bien connu, nous sommes des baptisés, nous avons mangé et bu en ta présence : la messe ; tu nous as enseigné sur nos places : les homélies. Rien à faire, pas d’erreur possible ; la réponse arrive, toujours la même : « Je ne sais pas d’où vous êtes. Eloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal ».

Et de l’autre côté du mur, nous entendons les cris de joie de toute une foule de gens venus d’orient, du nord et du midi, ceux dont nous étions persuadés qu’ils étaient loin de Dieu : quelle surprise ! Quelle erreur !

En face d’un tel récit qui a de quoi nous faire peur, nous serions tentés de poser, nous aussi, cette question : « Seigneur, n’y aura- t-il que peu de gens à être sauvés ? », et Jésus refuse de répondre ou plutôt, il répond à côté, il renvoie le questionneur à lui-même :

« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ».

 Autrement dit, au lieu de nous demander s’il y aura beaucoup d’élus, nous devons nous efforcer, nous, d’être un de ces élus. Une certaine époque, pas si lointaine, celle du jansénisme, ne faisait entrer que quelques privilégiés dans ce Royaume, tandis que la tendance inverse prévaut aujourd’hui : on y enfourne tout le monde comme si la réponse était du côté de Dieu… ! Au lieu de s’interroger, de façon toute théorique sur le nombre des élus, nous ferions mieux de nous demander : « Et moi, qu’est-ce-que je fais pour en être ? »

La réponse est non pas du côté de Dieu, mais du côté de l’homme. Ce n’est pas « le Seigneur, va-t-il ouvrir ou non, le Royaume à peu ou à beaucoup de gens ? », mais bien plutôt : « les hommes vont- ils, oui ou non, passer  la porte étroite  pour entrer  dans  la maison du Père ? »

Au lieu de nous interroger sur le petit ou le grand nombre des élus, nous devons plutôt nous efforcer d’en faire partie !

Quelle est cette porte étroite ? C’est celle même que Jésus va franchir : il est en effet sur la route de Jérusalem et monte vers sa passion. La porte étroite, c’est la mort à soi-même, la lutte, l’effort, l’épreuve à surmonter, le scandale d’un échec, le Vendredi Saint. Et lorsque le Christ sera entré dans la salle du Royaume, il restera pour tous les croyants à suivre le même itinéraire : accepter réellement la passion pour marcher vers la Résurrection. Voilà la porte étroite, voilà par où nous devons passer : exigences austères, conditions sévères, trajet pas facile.

Dieu n’est pas plus démagogue avec nous qu’il ne l’a été avec son Fils : « Celui qui veut me suivre et qui ne prend pas sa croix, n’est pas digne de moi ». Notre salut ne se trouve nullement assuré d’avance et ce n’est pas Dieu qui est dur, mais l’homme qui résiste à sa bonté.

« Efforcez-vous », nous dit-il aujourd’hui. C’est pour nous l’acceptation « pratique » du Christ dans notre vie à nous, une fidélité rigoureuse à son message, une foi qui se traduit dans le concret, traçant une route sûre, mais dure qui nous mène au salut.

Nous ne pouvons pas évacuer le mystère de la Croix et de la mort du Christ dans son existence. Dans la nôtre non plus, notre religion n’est pas celle de la facilité : il ne suffit pas pour nous d’avoir côtoyé Jésus ou d’avoir entendu sa prédication pour qu’il ouvre la porte de sa maison à ceux qui frapperont.

Il faut, dès maintenant, mettre son enseignement en pratique, y conformer sa vie, sous peine de s’entendre répondre : « Je ne sais pas d’où vous êtes ».

Ce refus dramatique du peuple de la promesse, du peuple élu, qui a renié le message de Dieu, qui a refusé l’Evangile du temps de Luc, alors que  les  païens, en  grand  nombre, entraient  dans l’Eglise, était  déjà  la confirmation des paroles de Jésus : ils ont mangé  et bu en sa présence, ils ont  écouté  son  enseignement sur les places,… ces foules qui entouraient Jésus, qui s’entendent dire :

« Je ne sais pas d’où vous êtes, éloignez-vous de moi ».

Mais ces paroles ne s’adressent pas qu’à eux, elles s’adressent à tous les temps, elles s’adressent aussi au nôtre : c’est curieux, quand Jésus parle, on a toujours l’impression que c’est « pour les autres ».

Ne risquons-nous pas, à notre tour, de nous endormir dans une fausse assurance ? A notre époque où la facilité et le « relaxe », le « cool » et le « zen » sont si souvent vantés, où la publicité nous engage à avoir des muscles en trois semaines, apprendre l’anglais en deux mois, perdre des kilos ou maigrir en mangeant autant qu’avant, où ordinateurs et robots peuvent paraît-il, tout faire à notre place , il est bon que le Seigneur, dans cet Evangile, nous rappelle l’effort indispensable pour franchir la porte étroite.

Remarquons que, même aujourd’hui, rien ne se fait de valable, dans aucun domaine, sans travail, sans effort, sans sacrifice. Il n’y a qu’au loto, où c’est facile, pas cher ? Et rapportant gros ; mais, là aussi, il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus !

Comment voulez-vous qu’il en soit autrement, alors qu’il s’agit de la plus grande affaire de notre vie : celle de notre salut, de notre vie éternelle ? L’Evangile, c’est vrai, est exigeant, et c’est à cause de cela qu’il y a de moins en moins de chrétiens. La porte pour eux est trop étroite  lorsqu’ils voient clair ou bien elle leur paraît très large lorsqu’ils voient mal. Mais ces exigences sont celles de l’amour.

Or, il n’y a pas d’amour, sans oubli de soi, sans don de soi, sans dépouillement de soi, sans pauvreté, sans miséricorde. Etre chrétien, c’est aimer comme le Christ a aimé : jusqu’au don de soi, jusqu’à la Croix : la passion qui mène à la résurrection.

Voilà la porte étroite qu’il s’agit de franchir.

Il s’agit, pour nous chrétiens, d’y mettre le prix, comme Jésus. Il s’agit de le suivre. Or « il s’est anéanti pour moi, il a pris la dernière place ».

Oui ! « Il y a des derniers qui seront premiers et des premiers qui seront derniers ».  AMEN




21ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Luc 13,22-30)

« Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? »

C’est la question qui a été posé à Jésus, sur le chemin qui l’amenait à Jérusalem … et donc à sa mort.

C’est une question qui préoccupent … ou du moins devrait préoccuper beaucoup de gens … même s’ils ne le disent pas comme cela …

On dit plutôt : « Qu’y a-t-il après la mort ? » ou bien : « La mort est-elle la fin de notre vie, sans rien après ? »

« N’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? »

Avec peut-être cette autre question, sous-entendue, « Sont-ils nombreux ceux qui seront condamnés, qui iront à leur perte ? En enfer ? ».

Cela, c’est une question qu’on ne formule pas … On a trop peur de la réponse …

Alors on préfère dire, comme dans la chanson : « On ira tous au Paradis … »

Parce que, finalement, c’est une troisième question qui nous intéresse vraiment : « Est-ce que, moi, j’irai au Paradis ? »

Jésus ne répond pas directement, comme on dit, il semble botter en touche … « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas. »

Parce qu’à côté de cette porte étroite, il y a un chemin très large, ou plutôt des chemins, bien larges, sans obstacles, sans pentes rudes, qui se présentent à nous, … et que bien souvent nous préférons emprunter : « Il est large, le chemin qui conduit à la perdition ; et ils sont nombreux, ceux qui s’y engagent. » (Mt 7,13) … mais sans s’en rendre compte … ou trop tard …

On est souvent bien intentionnés, on s’engage dans l’Église ou des associations, on fait beaucoup de choses … comme Marthe de Béthanie … à qui Jésus déclare : « Marie a choisi la meilleure part, elle ne le lui sera pas enlevée. » (Lc 10,42) : écouter Jésus, et mettre en pratique ce qu’elle entend …

Pour trouver la porte étroite, il faut d’abord écouter Jésus, car c’est lui qui a dit : « Je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé » (Jn 10,9).

Il faut donc que notre écoute ne soit pas une écoute distraite, comme c’est souvent le cas, mais une vraie écoute, avec deux éléments importants que l’on doit avoir dans notre cœur : se reconnaître faible et pécheur, et compter sur la miséricorde de Dieu.

Il est sûr que ce ne sont pas des qualificatifs qui soient très reconnus dans notre monde actuel … Je dirai même que c’est plutôt l’inverse : on néglige les faibles et on met en avant les forts, quant à se reconnaître pécheurs … ça le fait pas !

Jésus dit plus loin : « Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers. ».

Et le premier qui est passé par la porte étroite, tout le monde le connaît : c’est le bon larron …

Il était à côté de Jésus, au Golgotha, et se reconnaît pécheur : « Pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. » et il ajoute « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » (Lc 23,41-42). Il se reconnaît pécheur, et il croit.

Mais on pourrait presque dire aussi que c’est Jésus qui vient vers lui et qui lui permet de dire cela.

La porte est étroite, mais elle est aussi basse. Comme celle de l’église de la Nativité à Bethléem. Pour pouvoir entrer dans l’église, il faut se baisser … (Heureusement, il y a aussi deux grandes portes pour accueillir la foule …)

Pourquoi basse ? parce que : « Si vous ne changez pas pour devenir comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. » (Mt 18,3). C’est l’apprentissage de l’humilité.

Pour trouver le chemin de la porte étroite, une seule solution : se rapprocher de Jésus, de son enseignement, approfondir de sens de ses paroles, lui qui est tout amour … et retenir ce que disait saint Paul : « J’aurais beau parler toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante. » (1 Co 13,1), Être un bruit … alors que Jésus nous demande d’être un dispensateur d’amour.

« L’humilité, le dépouillement, l’esprit d’enfance, ce sont les conditions d’accès au Paradis. Manifestement, si nous voulons avoir quelque chance d’y entrer, il va falloir un peu dégraisser le mammouth… » (Père Guillaume de Menthière)

Seigneur Jésus,

la porte étroite, il faut la chercher,

et il est difficile de la trouver.

Heureusement pour nous,

tu nous dis ‘Efforcer-vous d’y entrer’

parce que seul, on ne peut la trouver,

et il faut que tu sois à nos côtés

pour qu’on la trouve.

Merci Seigneur.

 

Francis Cousin

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21ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (St Luc 13, 22-30)

« Efforcez-vous

d’entrer par la porte étroite »

(Lc 13,22-30)

En ce temps-là, tandis qu’il faisait route vers Jérusalem, Jésus traversait villes et villages en enseignant.
Quelqu’un lui demanda : « Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » Jésus leur dit :
« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas.
Lorsque le maître de maison se sera levé pour fermer la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : “Seigneur, ouvre-nous”, il vous répondra : “Je ne sais pas d’où vous êtes.”
Alors vous vous mettrez à dire : “Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.”
Il vous répondra : “Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice.”
Là, il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob, et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous-mêmes, vous serez jetés dehors.
Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu.
Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers. »

        

 

            « Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? », demande-t-on à Jésus ? Du côté de Dieu, la réponse est claire : « Dieu, notre Sauveur, veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité. En effet, il n’y a qu’un seul Dieu, il n’y a qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous » (1Tm 2,3‑6). Comme le chante la Vierge Marie, l’infini de la Miséricorde de Dieu est Toute Puissante (Lc 1,49-50). « On pourrait croire que c’est parce que je n’ai pas péché que j’ai une confiance si grande dans le bon Dieu. Dites bien, ma Mère, que si j’avais commis tous les crimes possibles, j’aurais toujours la même confiance, je sens que toute cette multitude d’offenses serait comme une goutte d’eau jetée dans un brasier ardent » (Ste Thérèse de Lisieux).

            Mais le croyons-nous vraiment ? Ce Trésor du « Père des Miséricordes » (2Co 1,3), infini en son Amour, est offert dès maintenant à notre foi. Osons-nous croire qu’il en est réellement ainsi ? La Foi est la réponse de l’homme à Dieu qui se révèle, et cette réponse ne peut que l’engager tout entier dans une démarche de repentir sincère, qui sera offrande à Dieu, en toute vérité, de tout ce qui, dans sa vie, porte la trace du mal… Si nous consentons à cette démarche, en toute liberté, alors Dieu qui de son côté l’attend, l’espère, la désire de tout son être, enlèvera vite toute trace du mal pour nous donner en retour la Plénitude de sa Vie. « Le Christ est Sauveur, sa mission est de pardonner… Il n’y a qu’un mouvement au cœur du Christ : effacer le péché et emmener l’âme à Dieu » (Elisabeth de la Trinité).

            Alors, il s’agit de « lutter », jour après jour, avec sa Force même, appuyés sur sa Miséricorde toujours prête à nous venir en aide, pour dire « non » à tout ce qui, en nous, s’oppose à lui… Par nos propres forces, c’est impossible. « Voyez les petits enfants : ils ne cessent de casser, de déchirer, de tomber, tout en aimant beaucoup, beaucoup leurs parents. Quand je tombe ainsi, cela me fait voir encore plus mon néant et je me dis : Qu’est-ce que je ferais, qu’est-ce que je deviendrais, si je m’appuyais sur mes propres forces?!… Je comprends très bien que St Pierre soit tombé. Ce pauvre Saint Pierre, il s’appuyait sur lui-même au lieu de s’appuyer uniquement sur la force du bon Dieu » (Ste Thérèse de Lisieux, Carnet Jaune).

            Dans notre Evangile, certains frappent à la porte du ciel, mais elle ne s’ouvre pas… « Seigneur, nous avons mangé et bu devant toi, tu as enseigné sur nos places ». Mais de cœur, ils étaient toujours attachés au mal, refusant de se convertir. « Eloignez-vous de moi vous tous qui commettez l’injustice ». Mais ce langage est pédagogique. Ce n’est pas Dieu qui chasse qui que ce soit, Lui qui ne poursuit que le bien de tous les hommes qu’il aime. C’est l’homme qui, en commettant l’injustice, s’éloigne lui-même de Dieu. Alors, quel sera notre choix ? DJF




Assomption de la Vierge Marie – par Père Rodolphe EMARD

Homélie du lundi 15 août 2022

Frères et sœurs, nous célébrons aujourd’hui la Vierge Marie élevée au Ciel. Le peuple réunionnais a toujours voué un grand culte à Marie. Cela se vérifie dans le patrimoine religieux et l’organisation de l’Église à la Réunion. Près de 37% des églises, des chapelles et oratoires portent un vocable marial. Près de 32% des paroisses sont mises sous le patronage de Marie.

Si nous regardons notre secteur, le doyenné Saint-Denis Ouest, trois paroisses sont dédiées à Marie : Notre Dame de l’Assomption, Notre Dame de la Source et ici, Notre Dame de la Délivrance.

Marie est vénérée sous différents vocables. Sur l’île, nous avons notamment deux grands lieux de pèlerinages mariaux : La Vierge Noire à la Rivière des Pluies, Notre Dame de la Salette à Saint-Leu.

Rappelons-nous, tous ces vocables conduisent à un seul et principal vocable, celui de Marie, Mère de Dieu, Théotokos, cette affirmation du concile d’Éphèse en 431. C’est ainsi que nous vénérons Marie dans la prière eucharistique : « Permets qu’avec la Vierge Marie, la bienheureuse Mère de Dieu, (…), nous ayons part à la vie éternelle » (cf. prière eucharistique n°2).

Tout découle de la maternité divine de Marie. Sa conception immaculée, sa virginité perpétuelle, son Assomption, sa maternité sur l’Église sont des conséquences de sa maternité divine :

  • Marie, dans la gloire de sa virginité a enfanté le Sauveur du Monde, le Fils de Dieu. C’est la raison pour laquelle, elle a été conçue sans péché : « Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine selon laquelle la bienheureuse Vierge Marie fut dès le premier instant de sa Conception, par une grâce et un privilège spécial de Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute souillure de la faute originelle est révélée de Dieu, et que par conséquent elle doit être crue formellement et constamment par tous les fidèles »[1].

  • L’Assomption de la Vierge Marie que nous fêtons aujourd’hui, est la conséquence directe de la maternité divine de Marie : « Nous prononçons, déclarons, et définissons comme un dogme divinement révélé que l’Immaculée Mère de Dieu, la Vierge Marie, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire céleste »[2]. Celle qui a porté le Corps du Sauveur, la toute pure, ne pouvait pas connaître la corruption du tombeau, la dégradation corporelle.

  • Par la volonté de son Fils, Marie continue d’exercer sa maternité divine sur l’Église parce que l’Église est le Corps du Christ, le prolongement du Christ. La préface de la messe souligne : « Aujourd’hui, la Vierge Marie, la Mère de Dieu, est élevée au ciel. Elle est le commencement et l’image de ce que deviendra ton [l’] Église en sa plénitude, elle est signe d’espérance et source de réconfort pour [le] peuple encore en chemin ».

Nous aimons chercher du réconfort auprès de la Mère de Dieu. C’est bien, faisons-le ! Marie nous soutient, elle nous accompagne sur le chemin de son Fils. Il est bon de prier Marie mais de bien la prier !

Si nous revenons à l’Évangile, le cantique de Marie nous révèle qui elle est et ce que nous devons demander en premier lieu, avant nos multiples demandes :

  • Marie nous invite avant tout à rendre grâce au Seigneur : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur ! » L’Eucharistie que nous négligeons parfois ne signifie-t-il pas « rendre grâce » ?

  • Marie nous invite à prendre le chemin de l’humilité et du service : « Il s’est penché sur son humble servante ». La grandeur de Marie se situe incontestablement dans son humilité. Nous prions souvent pour nous-même mais qu’en est-il de la prière pour mon prochain ? Nous prions souvent Marie mais nos prières sont-elles humbles ?

  • Le Magnificat de Marie exprime une confiance totale de Marie dans la toute-puissance de Dieu : « Le Puissant fit pour moi des merveilles ». La confiance de Marie porte en un Dieu riche en miséricorde et en amour, qui « élève les humbles », qui « comble de biens les affamés », qui relève son peuple. Nos demandes à Marie sont-elles animées de la même confiance ?

La prière d’ouverture de la messe du jour nous invite en cette fête de l’Assomption de Marie à nous tendre « vers les réalités d’en haut » pour que « nous obtenions de partager » la « gloire du ciel », à laquelle participe Marie dans son âme et son corps. Cette réalité, nous sommes tous appelés à y participer : « J’attends la résurrection des morts » disons-nous dans le Symbole de Nicée-Constantinople. « Je crois à la résurrection de la chair, à la vie éternelle » disons-nous encore dans le Symbole des Apôtres. Le Christ ressuscité nous ressuscitera dans un corps glorieux, semblable au sien. Marie est l’image de l’Église à venir. Qu’elle tourne nos cœurs vers cette réalité.

Belle fête de l’Assomption !

« Pour ta gloire, on parle de toi, Marie : aujourd’hui tu es élevée bien au-dessus des anges, et tu partages le triomphe du Christ à jamais » (Antienne d’ouverture, messe de la veille au soir).

[1] Dogme de l’Immaculée Conception, par le pape Pie IX, le 08 décembre 1854. Constitution apostolique Ineffabilis Deus.

[2] Dogme de l’Assomption, par le pape Pie XII, 1er novembre 1950. Constitution dogmatique Munificentissimus Deus.




Assomption de la Vierge Marie, 15 août 2022 (DJF)

Le dogme de l’Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie fut proclamé par le Pape Pie XII en 1950 : « La Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs, victorieux du péché et de la mort ».

« L’Assomption de la Sainte Vierge est une participation singulière à la Résurrection de son Fils et une anticipation de la résurrection des autres chrétiens » (Catéchisme de l’Eglise Catholique).

Cette Assomption de Marie est la conséquence directe de son « Immaculée Conception » dont le dogme fut proclamé en 1854 par le Pape Pie IX : « La bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulière du Dieu Tout-Puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel. »

En effet, lorsque St Pierre annonce la Résurrection du Christ à ses compatriotes juifs, il déclare, en citant le Psaume 16 : « Dieu l’a ressuscité, le délivrant des affres de la mort. Aussi bien n’était-il pas possible qu’il fût retenu en son pouvoir ; car David dit à son sujet : (…) ma chair elle-même reposera dans l’espérance que tu n’abandonneras pas mon âme à la mort et ne laisseras pas ton Saint voir la corruption. Tu m’as fait connaître des chemins de vie, tu me rempliras de joie en ta présence » (Ac 2,24‑28).

« Tu ne laisseras pas l’Immaculée Conception voir la corruption », « tu ne laisseras pas ta Sainte voir la corruption »…

Marie fut ainsi sanctifiée des les premiers instant de son existence, elle qui fut conçue par Anne et Joachim, selon la tradition, une femme, un homme qui étaient pécheurs, comme tout le monde… Il s’agit donc d’un acte totalement gratuit de salut dont Marie a été l’heureuse bénéficiaire et c’est bien ainsi qu’elle le comprend quand elle chante, au tout début du Magnificat, sa joie en Dieu « son Sauveur » : « Mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit tressaille de joie en Dieu mon Sauveur »…

Ce salut, cet acte de Création et de Rédemption opéré dans le sein de sa mère, Anne, selon la tradition, Marie l’attribue à la Toute Puissance de la Miséricorde de Dieu car tel est bien le « visage » de Dieu qu’elle nous présente au cœur de ce même Magnificat : « Le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses. Saint est son nom, et sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent. »

Or, dans la Bible, Dieu est « saint » en tant qu’il est le seul à être ce qu’il est : « Je suis Dieu et non pas homme, au milieu de toi, je suis le Saint » (Os 11,9). « À qui me comparerez-vous, dont je sois l’égal, dit le Saint ? » (Is 40,25). A personne, car Dieu est le seul à être ce qu’il est, à tel point que lorsque Moïse lui demande son Nom, il répond : « Je suis… Je suis Celui qui est » (Ex 3,14). Et avec ce dernier verset, nous percevons que la notion de « Nom » dans la Bible renvoie elle aussi à ce qu’est la personne… Ainsi, lorsque Marie dit au sujet de Dieu « Saint est son Nom », elle renvoie, tout aussi bien par la notion de « sainteté » que par celle de « nom », à ce que Dieu Est en Lui-même. Et les deux précisions qui entourent cette expression dans le Magnificat, « le Tout Puissant fit pour moi de grandes choses… sa miséricorde s’étend d’âge en âge » nous permet de dire que pour Marie, « Dieu est Miséricorde Toute Puissante »

Nous sommes au cœur de notre foi, affirmée deux fois par St Jean : « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16). La Miséricorde est le visage de l’Amour face à notre misère

Et le P . François Varillon écrit : « En Dieu, il n’y pas d’autre puissance que la puissance de l’amour et Jésus nous dit (c’est lui qui nous révèle qui est Dieu) : « Il n’y pas de plus grand amour que de mourir pour ceux qu’on aime » (Jn15, 13). Il nous révèle la toute-puissance de l’amour en consentant à mourir pour nous… La mort du Christ nous révèle ce qu’est la toute-puissance de Dieu. Ce n’est pas une puissance d’écrasement, de domination, ce n’est pas une puissance arbitraire telle que nous dirions : qu’est ce qu’il mijote là-Haut, dans son éternité ? Non, il n’est qu’amour mais cet amour est tout-puissant… Qu’est ce qu’un amour qui est tout puissant ? C’est un amour qui va jusqu’au bout de l’amour. La toute-puissance de l’amour est la mort : aller jusqu’au bout de l’amour c’est mourir pour ceux qu’on aime. Et c’est aussi leur pardonner. » (Extrait de « Joie de croire, joie de vivre »).

St Paul déclare la même chose : « La preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous » (Rm 5,8), pour tous les hommes, tous, sans aucune exception… En effet, il écrit aussi : « Dieu notre Sauveur veut que tous les hommes soient sauvés… et le Christ Jésus s’est livré en rançon pour tous » (1Tm 2,3-6)…

Or, « tout ce que veut le Seigneur, il le fait au ciel et sur la terre, dans les mers et jusqu’au fond des abîmes » (Ps 135(134),6). C’est pourquoi St Paul écrit encore : « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ. C’est ainsi qu’Il nous a élus en lui, dès avant la fondation du monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans l’amour, déterminant d’avance que nous serions pour Lui des fils adoptifs par Jésus Christ. Tel fut le bon plaisir de sa volonté, à la louange de gloire de sa grâce, dont Il nous a gratifiés dans le Bien-aimé. En lui nous trouvons la rédemption, par son sang, la rémission des fautes, selon la richesse de sa grâce, qu’Il nous a prodiguée, en toute sagesse et intelligence…

Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés! -, avec lui Il nous a ressuscités et fait asseoir aux cieux, dans le Christ Jésus. Il a voulu par là démontrer dans les siècles à venir l’extraordinaire richesse de sa grâce, par sa bonté pour nous dans le Christ Jésus. Car c’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu; il ne vient pas des œuvres, car nul ne doit pouvoir se glorifier. Nous sommes en effet son ouvrage, créés dans le Christ Jésus en vue des bonnes œuvres que Dieu a préparées d’avance pour que nous les pratiquions…

Le Christ a aimé l’Église », et à travers elle, l’humanité tout entière : « il s’est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d’eau qu’une parole accompagne ; car il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante, sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et immaculée » (Ep 1,3-14 ; 2,4-10 ; 5,25-27), comme l’est la Vierge Marie, sauvée par la Toute Puissance de la Miséricorde de Dieu dès les premiers instants de sa conception… Et comme « tu ne peux laisser ta sainte voir la corruption », Marie fut élevée par Dieu dès après sa mort à la Plénitude de la Gloire par son Assomption…

Et ce chemin de Marie est appelé à être le nôtre à tous…

Imaginons une balance, en mettant d’un côté toute notre misère, toutes nos fautes, tous nos péchés, tous nos actes manqués, tout, absolument tout, et de l’autre côté la Puissance Infinie de la Miséricorde de Dieu à notre égard, à l’égard de tout homme… Qui gagnera ?

Tel est le fondement de l’espérance de notre salut… « Pour les hommes, c’est impossible. Mais pour Dieu », pour l’Amour Infini et Inconditionnel, pour l’Amour Tout Puissant, « tout est possible » (Lc 18,27)… Dans la Basilique du Rosaire, à Lourdes, il est écrit au dessus du si beau visage de la Vierge Marie, Reine du Ciel et de la terre : « Par Marie, à Jésus », pour que tous, par la Miséricorde Toute Puissante de Dieu, nous soyons un jour comme Marie, saints et immaculés dans l’Amour…

                                                                                                 D. Jacques Fournier