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5ième Dimanche de Carême – par Francis COUSIN (Jn 8, 1-11)

« La femme adultère … et les autres. »

 

Quand on parle de ce passage d’évangile, on a l’habitude de parler de la femme et du bon tour que Jésus a joué aux scribes et aux pharisiens …

Mais on en reste au bon tour : Jésus les a eus !

Et si on s’intéressait un peu à ces gens-là ?

Pourquoi ces gens-là amènent-ils « une femme qu’on avait surprise en situation d’adultère. » ?

« Oui, elle a fait ceci …, c’est pas bien ! … »

Saint Jean nous dit que « Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve » …

Sans doute … mais aussi …

Peut-être y a-t-il aussi cette volonté de se montrer supérieurs aux autres, une certaine arrogance …

Comme une sorte de ladi-lafé … pas seulement en paroles … mais en acte : on amène la femme à Jésus !

Est-ce que je ne suis pas souvent comme ces gens-là de l’époque de Jésus ?

Est-ce que je n’ai pas trop souvent tendance à raconter ceci ou cela sur telle personne … mais sans que celle-ci soit là … ce qui n’est pas le cas dans le passage de l’Évangile … et c’est peut-être encore pire …

On parle … chacun ajoute son grain de sel … « Vous savez, madame unetelle a fait ça ! » … « Et monsieur untel, l’autre jour … »

On parle … on parle …

Dans quel but ?

Informer les gens de ce qui se passe dans le quartier … ?

Ou plutôt salir les gens … ?

Avec souvent un sous-entendu … « Mais moi, je ne suis pas comme cela ! Je ne fais pas de telles choses ! »

Est-ce bien vrai ?

Reprenons ce que nous dit le livret de chemin de croix de notre diocèse, page 25 :

« Combien de fois nous faisons des ’’commérages’’ sur l’une ou l’autre de nos relations, que ce soit dans le travail, la famille … ou dans notre paroisse ou dans notre mouvement.

Nous n’avons pas la volonté de faire mal … mais ça sort … et ça fait mal à la personne concernée quand elle l’apprend. Nous l’avons déshabillée et crucifiée.

La langue peut être meurtrière ! On voit des exemples sur les réseaux dits sociaux ces derniers temps …

Si nous voulons marcher ensemble, attention à nos paroles ! Pas de médisance ni de calomnies. »

Le pape François nous parle souvent de ces commérages … et ce depuis son élection … mais cela n’a pas l’air de changer grand-chose à nos comportements …

Pourquoi ?

« Le grand bavard c’est le diable, qui dit toujours de mauvaises choses sur les autres, car il est le menteur qui cherche à désunir l’Église, à éloigner les frères et à ne pas faire communauté. S’il vous plaît, frères et sœurs, faisons un effort pour ne pas médire. Les commérages sont un fléau pire que le COVID. » (Pape François, 6 septembre 2020)

Quels sont les remèdes qu’il propose ?

– « Pour qu’il y ait la paix dans une communauté, dans une famille, dans un pays, dans le monde, nous devons commencer par être avec le Seigneur. Et là où se trouve le Seigneur, il n’y a pas d’envie, il n’y a pas de criminalité, il n’y a pas de jalousies. Il y a la fraternité. Demandons cela au Seigneur : ne jamais tuer notre prochain avec notre langue et être avec le Seigneur comme nous tous serons au ciel ». (Pape François, 2 septembre 2013)

– « Deux remèdes : En premier lieu, lorsque la tentation de critiquer l’autre est imminente, « prie pour lui ». Ensuite, « mords-toi la langue … et bien fort ». (Pape François, 3 mars 2019)

Et n’oublions pas la Parole de Jésus : « Je vous le dis : toute parole creuse que prononceront les hommes, ils devront en rendre compte au jour du Jugement. D’après tes paroles, en effet, tu seras reconnu juste ; d’après tes paroles tu seras condamné..» (Mt 12,36-37)

            Comptons sur la miséricorde de Dieu, en n’oubliant pas ce que Jésus dit à la femme adultère : « Va, et ne pèche plus ! ».

Et on peut dire : « Va, et ne médit plus ! ».

Seigneur Jésus,

Tous les parents font de gros efforts

pour que leurs enfants apprennent à parler.

Et c’est la joie lors de leurs premiers mots !

Mais peut-être serait-il plus important

de leur apprendre ‘comment parler’ !

leur apprendre le respect dû aux autres,

« car ce que dit la bouche,

c’est ce qui déborde du cœur. » (Mt 12,34)

                                                                                    Francis Cousin

 

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le lien suivant : Image dim Carême C 5°




5ième Dimanche de Carême – par le Diacre Jacques FOURNIER (Jn 8, 1-11)

« Je ne te condamne pas » (Jn 8,1-11)

En ce temps-là, Jésus s’en alla au mont des Oliviers.
Dès l’aurore, il retourna au Temple. Comme tout le peuple venait à lui, il s’assit et se mit à enseigner.
Les scribes et les pharisiens lui amènent une femme qu’on avait surprise en situation d’adultère. Ils la mettent au milieu,
et disent à Jésus : « Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère.
Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, que dis-tu ? »
Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre.
Comme on persistait à l’interroger, il se redressa et leur dit : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Il se baissa de nouveau et il écrivait sur la terre.
Eux, après avoir entendu cela, s’en allaient un par un, en commençant par les plus âgés. Jésus resta seul avec la femme toujours là au milieu.
Il se redressa et lui demanda : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? »
Elle répondit : « Personne, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »

 

            « Tu ne commettras pas d’adultère » (Ex 20,14 ; Dt 5,18). La Loi est formelle, d’autant plus que nous avons ici une des Dix Paroles données par Dieu à Moïse. A partir d’elles, les hommes avaient développé une justice très dure : « L’homme qui commet l’adultère avec la femme de son prochain devra mourir, lui et sa complice » (Lv 20,10). Ici, une « femme a été prise en flagrant délit d’adultère. » Mais qui dit « flagrant délit » dit deux personnes pour le commettre. Où donc est l’homme ? La Loi le concerne lui aussi… Une injustice se laisse pressentir…

            Les Pharisiens veulent mettre Jésus à l’épreuve. S’il invite à obéir à la Loi, il perdra sa réputation d’extraordinaire bonté, et avec elle son crédit auprès du Peuple. S’il conteste la Loi, ils pourront l’accuser auprès du Grand Prêtre, le condamner et le faire périr…

            Comment « le juge » Jésus va-t-il donc réagir ? Surprise : il se baisse et se met à tracer des traits sur le sol. Il semble se retirer de la scène, laissant face à face les Pharisiens et la femme adultère… St Ambroise, St Augustin et St Jérôme ont proposé d’interpréter ce geste à la lumière de Jérémie 17,13 : « Espoir d’Israël, Seigneur, tous ceux qui t’abandonnent seront honteux, ceux qui se détournent de toi seront inscrits dans la terre, car ils ont abandonné la source d’eaux vives, le Seigneur ». D’après eux, Jésus écrirait sur le sol le nom de ces Pharisiens. Formidable renversement : les accusateurs deviennent les accusés… En effet, par la dureté de leur cœur, ils manifestent qu’ils ont abandonné le Père des Miséricordes. Ils se croient justes ? Ils sont en fait dans les plus épaisses ténèbres…

            Et Jésus va les aider à en prendre conscience. Il se lève, prononce une seule phrase, solennellement appuyée par ce brusque retour dans le débat, puis il se retire de nouveau en se baissant… « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter la pierre ». Accusateurs et juges de la femme adultère, ils en viennent à devenir leurs propres accusateurs, et cette fois, ils se montrent des juges cléments à leur égard, bien obligés ensuite de faire de même pour cette femme… Mais elle seule recevra la Parole de libération : «  Je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus ». Ne te fais plus de mal, ni à toi, ni à ton prochain…                                       DJF




5ième Dimanche de Carême – Homélie du Père Louis DATTIN

 La  femme  adultère

 Jn 8, 1-11

Elle est là, cette femme, prostrée aux pieds de Jésus, silencieuse, en péril de mort : elle sait ce qui l’attend, selon la loi de Moïse, elle doit être lapidée, tuée à coups de cailloux, de galets.

« C’est la Loi qui l’a dit » ; «  On n’a qu’à appliquer la Loi  ».

Mais si les ennemis de Jésus l’ont amenée devant le Christ, ce n’est pas pour la sauver, c’est pour le perdre, lui, Jésus. On va faire, c’est le cas de le dire, « d’une pierre deux coups » : on tue cette femme, bien sûr, et, en même temps, Jésus. Car s’il dit qu’il faut la laisser libre, il enfreint la loi de Moïse et il devient lui-même pécheur selon la loi ; et s’il dit qu’il faut la condamner, il est en contradiction avec sa doctrine de miséricorde et de pardon, il est disqualifié.

« Alors, toi, Jésus, qu’en dis-tu ? » Jésus ne dit rien, il se baisse et du doigt, il dessine sur le sol.  Rappelez-vous le grand silence de Jésus au cours de son propre procès. Refus de Jésus de prendre parti au niveau des analyses humaines, il se place à un autre niveau. N’est-ce-pas une dérobade, une démission ? Nous allons voir que non : Jésus a autre chose à dire, et nous-mêmes, quand nous sommes devant une situation concrète de péché : adultère, avortement, corruption, vols, calomnies, chantage, méchancetés, vengeance: que faisons-nous ? Comment réagissons-nous ?

Attention, frères et sœurs, nous sommes, le plus souvent, juges et parti : qui d’entre nous peut juger ?

Ou bien, ce péché, nous aussi, nous l’avons déjà commis et pour nous justifier, nous aurons tendance à l’excuser, à le minimiser : « Les autres le font, je l’ai fait. Alors, soyons indulgents. Tournons la page ».

Ou bien, à  cause  de  notre  éducation, du  contexte  social, notre  retenue   de   gens   civilisés,  nous  ne  l’avons  pas  commis   et volontiers, parce que nous ne nous sentons pas complices, nous condamnons en se protégeant de son propre mal secret en condamnant : « Ce n’est pas moi, c’est lui qui a commencé ! » et peut-être d’autant plus fort que l’on a été soi-même fort tenté et retenu par un fil, sur la pente du péché.

Ce que Jésus veut nous apprendre aujourd’hui, c’est que nous sommes tous solidaires du péché. Il n’y a pas, comme dans les films américains, d’un côté les méchants que l’on reconnaît rien qu’à leur tête, et de l’autre les bons qui eux ont l’air sympathiques. La réalité, elle, est plus compliquée. Il faut si peu de choses pour qu’un pécheur devienne un saint et qu’un saint, lui aussi, devienne un pécheur.

Rappelez-vous, Judas, le traître, était un apôtre de Jésus ; le malfaiteur pardonné, le bon larron, était un brigand ! A un certain niveau de profondeur, et c’est à ce niveau que se situe Jésus quand il garde le silence. Les pécheurs et les saints ne sont pas loin les uns des autres : la distance d’une « pelure d’oignon », disait un maitre spirituel.  Et quand Jésus voit cette femme poussée devant lui, par ses accusateurs, il voit bien sûr, non pas seulement ce qu’elle a fait, mais aussi son cœur et il voit également l’indignation des défenseurs de la Loi de Moïse.

Il voit aussi leurs cœurs : ces cœurs pleins de haine à l’égard de cette femme, mais surtout à cause de Jésus qu’ils veulent compromettre  pour  le  supprimer.

 Jésus voit en même temps le péché et le pécheur, mais il ne veut pas et il ne peut pas faire l’amalgame entre les deux. Le péché, oui, il est là, c’est vrai, avec toute sa laideur et il ne faut pas le nier ! Il existe, il est virulent, il est une atteinte terrible à l’amour de Dieu.

 

En péchant, nous prenons parti contre lui. Imaginez, dans l’Evangile de dimanche dernier, l’enfant prodigue, la douleur du Père lorsqu’il partage ses biens et qu’il voit partir son fils au loin. Nous ne serons jamais assez sévères contre le péché : il dégrade l’homme, il blesse Dieu. Il fait du mal à l’un et à l’autre. Mais, le pécheur, lui, c’est d’abord une victime du péché. Il est la première victime du péché ! Comment lui en vouloir, à lui, qui s’est laissé prendre dans le filet ?

L’adultère de cette femme : jamais le Christ ne l’admettra, lui, le Dieu fidèle. Il est atteint de plein fouet par l’infidélité de cette fille de Dieu.

Mais la femme, elle-même, victime du péché, comment peut-elle être jugée par celui qui a dit : « Je ne suis pas venu pour juger mais pour sauver ? »

Que diriez-vous d’un médecin auquel un sidéen se présente et auquel, à la place d’une ordonnance pour essayer de le sauver, lui ferait seulement la morale et lui dirait que c’est bien fait  et qu’il n’a que ce qu’il a cherché et qu’il l’a bien voulu ?!

De grâce, frères, faisons toujours la différence entre le péché et le pécheur. Le péché est le mal, le pécheur n’est que la victime du péché.  De même que nous faisons bien la différence entre la maladie et le malade. Nous faisons tout pour éliminer le mal mais nous faisons tout aussi pour aider le malade à se sortir de sa maladie. Ne faisons pas d’amalgame.

Ne confondons pas le mal et le malade. De même, ne mettons pas dans le même sac : péché et pécheur. Le pécheur n’est que la victime du péché et nous ferons tout pour sortir le pécheur de son péché.               

Condamner, juger, cela veut dire : « Je ne peux plus rien pour toi. Il n’y a plus moyen que tu t’en sortes. C’est définitivement que tu es enlisé dans le mal ». Ne dit-on pas d’un malade pour lequel on ne peut plus rien « qu’il est condamné« . Un pécheur n’est jamais condamné par Dieu et il doit l’être encore moins par nous qui partageons son destin.

Faisons bien toujours la différence, frères et sœurs, dans nos jugements, entre le péché qui, lui est toujours condamnable et le pécheur, victime du péché qui, lui, peut être toujours sauvé.

La conversion est  toujours possible et cela jusqu’au bout !

Regardez le malfaiteur qui est à côté de Jésus sur la Croix.

Il entend dire, dans la bouche de Jésus : « Aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis ».

 Aussi, au bout d’un certain  temps, le temps de réfléchir un peu et  de se remettre  soi-même en cause, Jésus leur dit simplement :

« Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter sa pierre ». Jésus connait les reins et les cœurs de chacun : il sait, lui, qui nous sommes en vérité ; devant lui nous ne pouvons pas mettre de masque et de maquillage de sainteté. Ils ont bien senti cela, tous ceux qui avaient une pierre à la main, prêts à lancer…

Qui est juste ? Qui est saint ? Qui ? Lève le doigt qui peut dire qu’il n’a rien à voir avec le péché.

On entendit alors un bruit mat et sourd : les pierres tombent, les unes après les autres auprès des pieds de ceux qui les tenaient. Et Jean ajoute malicieusement : « Ils s’en allèrent les uns après les autres, en commençant par les plus âgés ! »

Les plus âgés, ceux qui ont le plus d’expérience de leur propre péché, de leur faiblesse, de leur fragilité : Dieu sait ce qu’il y a dans le cœur de l’homme ! Il nous reste à entendre, nous aussi :

« Femme, où sont-ils donc ? »

Plus que deux personnes sur le parvis du Temple : Jésus et la femme ! St-Augustin nous dit : « Face à face » ;  « la misère et la miséricorde ». Que se passe-t-il dans ce cas-là ?

La miséricorde fait disparaître la misère.

«  Personne ne t’a condamnée ? »

Elle répondit : « Personne, Seigneur ».

Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas.

Va et désormais ne pèche plus ».

A la célébration pénitentielle, à notre tour, Jésus nous dira la même chose : « Je ne te condamne pas, va et ne pèche plus ».  AMEN

 

 




4ième Dimanche de Carême – par Père Rodolphe EMARD

Lectures de référence : 2 Co 5, 17-21 ; Lc 15, 1-3. 11-32

Frères et sœurs, nous nous trouvons à la mi-carême. Ce quatrième dimanche est dit en latin « de Laetare » ou « de la joie ». Mais de quelle joie s’agit-il exactement ? L’actualité n’invite pas trop à nous réjouir avec notamment la guerre en Ukraine…

Les lectures de ce dimanche nous invitent à mettre notre joie dans l’espérance que nous portons dans le Christ ressuscité. Nous avons encore une moitié de carême à poursuivre pour arriver à Pâques, la célébration la plus importante pour nous les chrétiens.

La vraie joie se trouve dans cette fête de Pâques. La Résurrection du Christ inaugure une vie nouvelle et éternelle à laquelle nous partageons depuis notre baptême. Saint Paul précise bien dans la deuxième lecture : « Frères, si quelqu’un est dans le Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né. » Cela grâce à la Pâques du Christ !

Cette bonne nouvelle de Pâques nous avons à l’accueillir et à la vivre dans nos vies. Si nous l’accueillons vraiment, elle peut nous apporter une vraie joie intérieure, une certaine sérénité pour traverser les difficultés que nous rencontrons.

Saint Paul précise encore que la Pâques du Christ nous a réconcilié avec Dieu, d’où son appel à la réconciliation : « Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui lance un appel : nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. »

Si nous souhaitons vivre de la grâce pascale, nous sommes contraints d’entrer dans une démarche de réconciliation avec Dieu. La Pâques du Christ nous révèle le vrai visage de Dieu : loin d’être un Dieu punisseur et vengeur, il est un Dieu qui pardonne : « il n’a pas tenu compte des fautes » nous dit encore l’apôtre.

La parabole de Jésus dans l’Évangile illustre parfaitement la miséricorde du Père. Le père est tellement « saisi de compassion » qu’il ne retient aucune faute à son fils cadet. Le père pardonne à son fils sans lui faire de reproche… En lui offrant un repas princier, le père le restaure dans sa dignité de fils : « car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. » Dieu ne veut par la mort ou la perte de l’un de ses enfants.

Cette parabole nous invite clairement à nous ouvrir à cette immense miséricorde du Père. Cela peut nous dérouter mais telle est la belle nouvelle de l’Évangile qui est source de joie pour ceux qui en font l’expérience.

C’est bien la grâce que nous demandons au Seigneur au cours de cette Eucharistie : que nous puissions nous laisser réconcilier avec Dieu et que nous puissions nous réjouir du pardon que Dieu accorde aux autres.

Nous devons l’avouer, comme le fils aîné, nous ne nous réjouissons pas toujours du pardon accordé aux autres, tant des situations peuvent nous révolter. Nous pouvons comme le fils aîné avoir nos arguments pour nous justifier, nous défendre ou prétendre des droits…

Il y a bien du fils cadet et du fils aîné en chacun de nous. Que le Seigneur nous donne sa force pour nous laisser réconcilier avec Dieu et nous réjouir du pardon accordé à notre prochain : « car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ! » Réjouissons-nous !




4ième Dimanche de Carême – par Claude WON FAH HIN

Commentaire d’Evangile du samedi 26/03/2022 et Dimanche 27/03/2022

Josué 5.9–12 ; 2 Corinthiens 5.17–21 ;

Luc 15.1.3-11–32

La parabole du fils prodigue met en lumière trois personnages : le Père, le fils prodigue et l’ainé. Habituellement, on appelle ce passage la « parabole du Fils prodigue », mais comme le pense le Père Michel Hubaut, un théologien franciscain, il serait sans doute plus judicieux de l’appeler la « parabole du Père Miséricordieux », les deux fils n’étant là que pour mettre en valeur la Miséricorde du Père et qui tous les deux représentent ceux qui entourent le Christ : les pécheurs et les pharisiens. Le Fils prodigue représente en quelque sorte les pécheurs, capables de se convertir et de demander pardon et le Fils ainé est à l’image des Pharisiens, obéissant à la loi mosaïque, appliquant à la lettre les commandements de Dieu, sans aucun discernement. Voici donc le Fils cadet qui, du vivant de son Père, lui demande sa part d’héritage. Il veut sa liberté, couper les liens qui l’unissent à son Père. Un autre a eu le même comportement vis-à-vis de Dieu. Alors qu’il était avec Dieu, le premier, le plus beau et le plus intelligent de tous les anges, Lucifer (qui veut dire « porteur de Lumière » ou « ange de lumière ») s’est révolté contre Dieu. Il est devenu par la suite celui que l’on appelle Satan qui signifie « adversaire ». S’éloigner de Dieu nous fera devenir opposant à Dieu, à cause du péché, c’est-à-dire la désobéissance aux commandements de Dieu . – Dieu le Père, tout comme son Fils Jésus, a toujours laissé la liberté à ceux qui le suivent. Tous les saints ont toujours eu la liberté de suivre le Christ ou non, alors même qu’ils avaient des visions, des rencontres visuelles avec Jésus ou avec Marie. Mais l’amour de Dieu a toujours été le plus fort en eux et jamais ils n’ont coupé les liens avec Jésus ou Marie. Le Fils prodigue ,lui, veut quitter le père et se faire réellement indépendant du père. Il coupe donc le lien qui l’unissait à son père. Ce n’est pas le fait de partir qui est grave, mais c’est « partir avec la volonté de couper les liens avec le père ». Personne ne peut réellement vivre s’il coupe le lien avec Dieu le Père, qui est Amour. Personne ne peut vivre sans amour.

« La racine du péché vient (justement) de cette revendication d’autonomie absolue… Le péché de l’homme est donc essentiellement une relation filiale rompue….Il va se détruire en voulant se suffire à lui-même. La suggestion du Malin, dans le livre de la Genèse, est claire : « Vous serez comme des dieux ! » (Michel Hubaut – P.306). L’homme qui se passe du père, de Dieu le Père, va à sa propre perte, se croyant lui-même comme un dieu. Il reçoit donc un tiers de la fortune du Père puisque l’ainé, selon Dt 21,17, en reçoit les deux tiers. Il quitte donc son père, son frère et s’en va dans un pays lointain. Si le père représente Dieu le Père, cela signifie que le fils cadet s’éloigne de Dieu mais aussi de son frère ainé qui est toujours à la suite du Père, et donc de l’Eglise qui est toujours dans l’obéissance à Dieu. Autrement dit, il va mener sa vie tout en s’éloignant de Dieu et de l’Eglise. Après avoir dilapidé tout son argent alors que se développe la famine dans toute la région, il commence à ressentir la faim. Il va donc chercher du travail qui consiste à garder les cochons. Le cochon, pour un juif, est un animal impur, qu’on sacrifie aux divinités païennes. « Le métier de porcher était donc considéré comme un métier impur, infâmant ». C’est déjà toucher le fond pour un Juif que d’être gardien de cochons. Et l’évangile nous dit (v.16) : « Il aurait bien voulu se remplir le ventre des caroubes que mangeaient les cochons, mais personne ne lui en donnait ». Le fils cadet connait alors la pire des situations : il vaut moins qu’un animal impur, et pourrait manger la même nourriture que les cochons. Même les hommes offrent la nourriture aux cochons mais pas à lui. Plus on s’éloigne de Dieu et de l’Eglise, plus on finit par faire toutes sortes de bêtises et se retrouver dans les pires situations : voleur, menteur, arnaqueur, criminel, drogue, on ne vit que pour l’argent, le pouvoir, la reconnaissance, le tout en marchant toujours sur les pieds des autres, tout ce qu’un cochon ne sait pas faire. Et voilà alors qu’il se met à réfléchir. V.17 : « Rentrant alors en lui-même, il se dit :  Combien de mercenaires de mon père ont du pain en surabondance, et moi je suis ici à périr de faim! 18 Je veux partir, aller vers mon père et lui dire : Père, j’ai péché contre le Ciel et envers toi; 19 je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes mercenaires ». Avouer qu’on a péché, vouloir retourner vers Dieu le Père et réparer sa faute est à la fois un acte de repentir et de conversion. Le fils prodigue commence à comprendre que son père nourrit tous ceux qui sont restés avec lui, son fils ainé et les ouvriers. Ceux qui restent avec Dieu n’ont rien à craindre même si parfois, ils ont eux aussi leurs souffrances, leurs faiblesses, car ils sont toujours des pécheurs comme nous le montre le fils ainé. Mais Dieu accepte que tous les pécheurs, sans exception, reviennent à Lui. Si le monde est impitoyable avec les faibles, Dieu relève les faibles. Rm 15,1 : « …c’est un devoir pour nous, les forts, de porter les faiblesses de ceux qui n’ont pas cette force et de ne point rechercher ce qui nous plaît ». Rm 1,27 : « …Dieu a choisi ce qui est faible dans le monde pour confondre ce qui est fort ».

C’est pourquoi, comme le fils prodigue retourne à son père, il nous faut, nous pécheurs, faibles parmi les faibles, retourner à Dieu le Père, par le Fils, avec la grâce de l’Esprit Saint et l’aide de Marie. A la vue de son fils au loin, son fils loin de la vie, loin de l’amour, seul, perdu dans le monde, le père court se jeter à son cou pour l’embrasser. Même de loin, Dieu voit notre manière de vivre et c’est lui qui court vers nous pour nous donner la vie, la joie de vivre. Et si son père l’a vu au loin, c’est parce qu’il le cherchait tous les jours à le voir au loin, il l’attendait patiemment qu’il revienne. Dieu le Père pense sans cesse à chacun de nous et attend notre retour vers Lui, il sait que ce sont nos péchés qui nous ont éloignés de lui. Il est nécessaire à nous tous de nous repentir et de nous convertir, et cela se fait par la confession, le sacrement de réconciliation. N’ayons pas peur de nous confesser, le prêtre n’est pas là pour nous sanctionner, ni pour nous juger. Si cela peut nous rassurer, voici ce que nous dit le Pape François dans la « Joie de l’Evangile » (§44) : « … je rappelle que le confessionnal ne doit pas être une salle de torture mais le lieu de la miséricorde du Seigneur qui nous stimule à faire le bien qui est possible ». Alors n’hésitons pas à nous confesser, le cœur libre et confiant en la miséricorde de Dieu. – Le fils commence à s’excuser d’avoir quitté la famille, mais le père ne l’écoute pas, cela ne l’intéresse pas qu’il s’excuse ou qu’il ait fait des bêtises, il est tout simplement heureux de revoir son Fils. « C’est lui le père qui, le premier, court pour venir au-devant de l’homme pécheur. …Pas de longs discours moralisateurs, ni d’examens de conscience compliqués…Dieu sait que son fils a mal. Il sait quel amère expérience il vient de vivre ! Il sait que son fils a plus besoin de tendresse plutôt que de mots pour cicatriser ses blessures, pour retrouver le goût de la vie. Alors « il le couvrit de baisers ! ». Jésus, comme son Père, n’attend pas de savoir si les pécheurs qu’il côtoie manifestent une vraie conversion. Il s’invite chez eux !…son fils est revenu et il ordonne à ses serviteurs : « Vite, apportez la plus belle robe et l’en revêtez, mettez-lui un anneau au doigt et des chaussures aux pieds. 23 Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, 24 car mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie; il était perdu et il est retrouvé! ». Lc 15,10 :  « C’est ainsi…qu’il naît de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent ». L’anneau que lui offre le Père est signe d’autorité et les chaussures, signe de liberté par rapport aux esclaves. Le fils retrouve donc toute sa place au sein de la famille. Il est non seulement pardonné mais réhabilité, retrouvant ainsi toute sa dignité. L’accent est mis non pas sur la mauvaise conduite du fils prodigue, mais sur l’amour inconditionnel du Père, de Dieu le Père, pour ses enfants, sur sa joie de pardonner, sa joie de donner la vie. Notre Dieu est un Dieu de vie et il redonne la vie à ce fils pécheur et le réhabilite dans la famille divine : Dieu est Miséricordieux. Il est Amour et ne peut donner que de l’amour même à ses enfants les plus pécheurs de la terre. Toutes les rencontres avec le Père ou avec Jésus sont des moments de joie et de vie. C’est pourquoi la messe et les sacrements, les groupes religieux, les organisations chrétiennes qui sont des moments de rencontre avec Dieu doivent être des moments de joie et de vie. Préparez sérieusement votre participation aux messes et aux sacrements. – Le fils ainé, voyant la fête organisée en faveur du retour du fils cadet, se met en colère. Il refuse de participer à cette fête et va se plaindre auprès de son père : « Voilà tant d’années que je te sers, sans avoir jamais transgressé un seul de tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau, à moi, pour festoyer avec mes amis ». Et voilà le père qui sort à sa rencontre. Le père est sorti pour se jeter au cou de son fils cadet de retour à la maison, et le voilà encore qui sort à la rencontre de son fils ainé mécontent.

Dieu le Père n’arrête pas de sortir pour aller à la rencontre de tous : ceux qui reviennent vers Lui et ceux qui sont encore en dehors de la fête et de la joie offertes par Lui.  Mais tous sont conviés à entrer dans le bonheur qu’il offre gratuitement. Les mots prononcés par le fils ainé – « servir, obéissance à tous les ordres ou à tous les commandements » – nous renvoient aux pharisiens et aux scribes qui obéissent à la lettre aux commandements de Dieu sans y mettre leur cœur, et souvent agissent à leurs profits, quitte à détourner la Loi. D’où ces conseils préventifs que le Christ leur donne : «Malheur à vous…qui délaissez la justice et l’amour de Dieu (Lc 11,42) ; Malheur à vous, les légistes, parce que vous chargez les gens de fardeaux impossibles à porter et vous-mêmes ne touchez pas à ces fardeaux d’un seul de vos doigts (Lc11,46) ». – Et le père répond à son fils ainé : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. 32 Mais il fallait bien festoyer et se réjouir, puisque ton frère que voilà était mort et il est revenu à la vie; il était perdu et il est retrouvé ». Le fils ainé ne se rend pas compte du privilège qu’il a d’être toujours avec le Père et ne devrait pas se plaindre : « Tout ce qui est à moi, lui dit le père, est à toi », autrement dit le fils qui reste avec Dieu est assuré d’avoir une part du Royaume de Dieu, puisqu’il est toujours avec le Père. Il est même bon de se détourner de choses de la terre pour se consacrer à Dieu tout en étant dans le monde sans être du monde, de ce monde qui ne pense qu’à « gagner » et « à gagner toujours plus bien égoïstement » sans jamais partager envers ceux qui sont dans le besoin ; à rechercher le pouvoir ou encore les honneurs. Le Pape François nous dit (« Amour – service – Humilité  » – P.83-84) : La 1ère tentation commence toujours par la tentation de la richesse, puis viennent la gloire, l’honneur, le pouvoir, et enfin l’orgueil…De là proviennent tous les péchés et vices. » Celui qui demeure en Dieu se contente de peu de choses, juste de quoi manger, boire, dormir. Dieu, à lui seul, vaut bien plus que n’importe quelle richesse. Si nous sommes des fils ainés, obéissants aux commandements de Dieu, essayons de méditer, avec Marie, ce que Dieu le Père nous dit : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi ».




4ième Dimanche de Carême – par Francis COUSIN (Lc 15,1-3.11-32)

« Le père et ses deux fils. »

 

Qu’on appelle aussi la parabole du Fils Prodigue.

On connaît bien l’histoire …

Mais qui est le fils prodigue ?

Ne cherchons pas loin … C’est chacun de nous ! …

À chacun, Dieu a donné une part ’’d’héritage’’ : notre liberté, notre intelligence, nos talents divers … et la foi … avec l’aide de nos parents et d’autres personnes …

Comme le fils cadet, nous pensons souvent que tout cela nous est dû … et nous voulons prendre notre indépendance … être le maître de ce que nous faisons …

Oh, bien sûr, on ne renie pas ses parents … ou tout au moins pas sur tout …

On ne renie pas non plus Dieu … mais on pense souvent qu’il n’intervient pas dans nos vies … parce qu’on pense qu’il est lointain …

Alors que c’est nous qui le mettons loin de nous …

Nous oublions Dieu … mais Dieu ne nous oublie pas … jamais … et il attend patiemment que nous revenions vers lui …

Et quand nous revenons vers lui, c’est la fête …

Oh, bien sûr, il ne va pas tuer le veau gras et organiser un banquet … mais comme Jésus l’a dit lui-même juste avant cette parabole : « Il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15,7) … et c’est une joie qui est partagée …

Mais, cela ne plaît pas au fils ainé : « Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. Mais, quand ton fils que voilà est revenu après avoir dévoré ton bien avec des prostituées, tu as fait tuer pour lui le veau gras ! ».

Rancœur et jalousie …

Et là aussi, nous sommes concernés … Nous sommes aussi parfois, comme le fils ainé, jaloux de ce qui arrive aux autres, dans notre vie de société, … mais aussi dans notre vie paroissiale … dans notre vie en Église …

On fait tout bien, on va à la messe tous les dimanches, on participe au denier de la foi, on fait partie d’un groupe de prière, … des fois, on fait même le catéchisme …

Mais il manque souvent quelque chose : la relation à Dieu dans la prière … une relation personnelle, où je parle de ma vie de foi avec Dieu … et où je l’écoute … et qui fait que l’amour de Dieu pour les hommes vient peu à peu en moi … et permet que le vois les autres avec le regard de Dieu.

J’ai la foi, mais cette une foi vide, … ma foi est devenue une routine …

Et c’est alors que, comme pour le fils ainé, la jalousie arrive …

« Ah lui, on ne le voit pas souvent à la messe … mais quand il est là, c’est lui qui fait les lectures … ! » … Ou autres remarques du même genre …

Et on ne pense même pas à aller le saluer : « Bonjour, je suis bien content que tu sois venu ce dimanche … A bientôt. »

Laissons-nous prendre par l’amour de Dieu !

En lisant le passage de l’évangile de ce jour, une phrase m’a interpellée : « Et il partit pour un pays lointain. »

On ne peut s’empêcher de penser à toutes ces personnes qui ont quitté, et qui quitte encore leur pays, l’Ukraine, que l’on voit chaque jour aux informations télévisées, pour s’en aller vers d’autres pays … fuyants la guerre.

Ils ne sont pas comme le fils prodigue, ils n’ont pas emmené tout leur bien ! … Au contraire, ils ont laissé tout ce qu’ils avaient en Ukraine, et sont partis sans rien … ou peu de choses …

Ils ne savent même pas s’ils pourront retourner chez eux, retrouver ce qu’ils avaient, … et s’il y aura quelqu’un pour les accueillir …

Prions pour que, là où ils vont, ils soient accueillis avec amour, un amour comme celui du Père … et qu’ils puissent bientôt retourner chez eux …

Seigneur Jésus,

face à une mort brutale,

on est souvent tenté de te dire :

pourquoi n’as-tu rien fait ?

Et toi, tu nous dis

’’Soyez toujours prêts

pour l’heure de votre mort.

Convertissez-vous,

soyez prêts à comparaître

devant mon Père qui vous aime,

car vous ne connaissez ni le jour, ni l’heure.’’

                                                                                   Francis Cousin

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le lien suivant : Image dim Carême C 4°




4ième Dimanche de Carême – par le Diacre Jacques FOURNIER (Lc 15, 1-32)

Consentir à ce Dieu et Père qui nous cherche tous

(Lc 15,1-32)…

En ce temps-là, les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter.
Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! »
Alors Jésus leur dit cette parabole :
« Un homme avait deux fils.
Le plus jeune dit à son père : “Père, donne-moi la part de fortune qui me revient.” Et le père leur partagea ses biens.
Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait, et partit pour un pays lointain où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre.
Il avait tout dépensé, quand une grande famine survint dans ce pays, et il commença à se trouver dans le besoin.
Il alla s’engager auprès d’un habitant de ce pays, qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.
Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien.
Alors il rentra en lui-même et se dit : “Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim !
Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.
Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.”
Il se leva et s’en alla vers son père. Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de compassion ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers.
Le fils lui dit : “Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.”
Mais le père dit à ses serviteurs : “Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller, mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds,
allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons,
car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.” Et ils commencèrent à festoyer.
Or le fils aîné était aux champs. Quand il revint et fut près de la maison, il entendit la musique et les danses.
Appelant un des serviteurs, il s’informa de ce qui se passait.
Celui-ci répondit : “Ton frère est arrivé, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.”
Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d’entrer. Son père sortit le supplier.
Mais il répliqua à son père : “Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis.
Mais, quand ton fils que voilà est revenu après avoir dévoré ton bien avec des prostituées, tu as fait tuer pour lui le veau gras !”
Le père répondit : “Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi.
Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé !” »

 

                   L’Evangile de ce Dimanche est à lui seul un condensé de la Bonne Nouvelle. Trois paraboles s’enchaînent : la brebis perdue et retrouvée (Lc 15,4-7), la pièce de monnaie perdue et retrouvée (Lc 15,8-10), le plus jeune fils qui, ayant choisi au début un chemin de perdition, décide enfin de se repentir et de revenir chez son Père (Lc 15,11-32). Et ce dernier dira en l’accueillant les bras grands ouverts : « Mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ».

            Trois récits, et pourtant, juste avant le premier, St Luc écrit : « Jésus leur dit cette parabole », au singulier… Autrement dit, tout ce qui suit est comme une seule parabole. Ces trois récits renvoient donc à une seule et même réalité…

            Or, dans les deux premiers, le pasteur et la femme sont deux images qui renvoient à Dieu, ce « Père » qui nous aime avec des « entrailles » de Mère (Is 63,15‑17). Entre Dieu et l’homme pécheur qui l’a abandonné et si souvent offensé, c’est Dieu qui a toujours l’initiative et qui ne cesse de le « chercher avec soin, jusqu’à ce qu’il le retrouve ». Voilà comment Dieu se comporte envers tout homme sur cette terre ! Nous sommes tous des « cherchés par Dieu », des « désirés par Dieu », des « voulus par Dieu », car Dieu est notre Père à tous, un Père qui aime infiniment chacun de ses enfants. Non, « ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils qui est la victime offerte pour nos péchés ». (1Jn 4,10). « La preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous alors que nous étions encore pécheurs » (Rm 5,8).

            « Je ne cesserai pas de les suivre pour leur faire du bien, je trouverai ma joie à leur faire du bien » (Jr 32,40-41). Voilà ce que fait Dieu vis-à-vis de l’homme qui se perd dans les ténèbres de son péché… Et quand ce dernier dresse enfin l’oreille de son cœur, il ne peut qu’entendre la Voix de Celui qui n’a cessé de le suivre pour lui offrir toute sa Tendresse, son Amour et sa Miséricorde infinie… S’il accepte de se laisser rejoindre, de se laisser aimer tel qu’il est, il s’entendra dire alors : « Je t’ai suivi jusqu’à maintenant dans tous tes errements. Maintenant, lève-toi, détourne-toi de tout ce qui en fait te détruit, et suis-moi ! ». Et Dieu au même moment lui offrira la Force de son Esprit sans laquelle il ne peut rien… Avec Elle et par Elle, c’est Lui qui le portera et le ramènera à la Maison (les deux premiers récits). Mais rien ne se fera sans le consentement libre et responsable de ce fils perdu, qui, une fois retrouvé par son Dieu et Père, décide de consentir à cet Amour qui le précède : « Je vais retourner chez mon Père, et je lui dirai : « Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi »… Et il se retrouvera aussitôt revêtu de la plus belle robe de la Maison du Père, celle du Père Lui-même, Robe de Splendeur, de Majesté, de Lumière et de Gloire…         DJF




4ième Dimanche de Carême – Homélie du Père Louis DATTIN

L’enfant prodigue

Lc 15, 1-32

On appelle habituellement cet  évangile, celui  de « l’Enfant prodigue « . Mais, en fait, il faudrait l’appeler la parabole du « Père prodige ». Prodige et prodigue d’amour, d’un amour qui pardonne, qui oublie, qui ne retient pas pour lui, amour gratuit, large comme un horizon sans fin. La parabole est construite selon un drame en deux actes : le conflit d’un père avec ses deux enfants, également et follement aimés. C’est lui, le Père, qui est le personnage principal du récit. C’est lui qui prodigue son amour et son pardon.

 

Acte premier : l’attitude du père envers son plus jeune fils : le plus jeune de ses enfants est (cela arrive plus souvent qu’on ne le croit) un profiteur. Il réclame, comme si ça lui était dû, de l’argent, beaucoup d’argent. Il ne pense qu’à lui, lui seul :

« Donne-moi la part du domaine qui me revient ».

Quand on sait, combien dans le milieu rural, la terre, le domaine, le foncier a de l’importance, un bien que l’on n’aliène jamais ! C’est le gagne-pain de toute la famille : et voilà que le père s’exécute !

Il reçoit tout de son père et ne semble même pas le remercier : ça lui est dû ! Il ne sait qu’une chose : exiger, réclamer, forcer la main, jouir pour soi. Et puis, c’est l’aventure où l’on claque cet argent si laborieusement amassé. Aventure où l’on s’éclate mais qui, au bout de quelques semaines, ne laisse que des débris.

Parfois, les commentateurs de ce récit embellissent un peu trop sa conversion : au fond son envie de revenir chez papa n’est-elle pas motivée par son intérêt personnel et égoïste ?

«  Moi, ici, je meurs de faim, je vais aller chez mon père, où les ouvriers eux-mêmes ont tout ce qu’il faut ! »

Il veut tout simplement « se remplir le ventre », retrouver le gîte et le couvert, non pas retrouver « la famille« , mais « la pension de famille« : se mettre les pieds sous la table ! Il a davantage mal au ventre que mal au cœur !

Pauvre gosse, victime de ses instincts, gâté, pourri par l’amour de son père qui ne sait rien lui refuser, qui le croit sans doute un homme alors que ce n’est encore qu’un adolescent mal élevé et revendicatif comme on en rencontre parfois.

Pauvre gosse, au fond, qui a perdu l’habitude d’aimer, qui ne consulte que ses besoins et jamais celui des autres.

Ne lui jetons pas la pierre : comme beaucoup de jeunes mal partis, il est aussi bien malheureux. Il faut l’aimer, malgré lui, malgré tout…Et c’est bien justement ce que ne cesse de faire son père. Lui, le père, on dirait qu’il est vraiment tout le contraire de ce fils dévoyé : il n’est que gratuité, don désintéressé, amour et quand l’enfant revient, c’est encore le père qui fait tout.

Notons-le. Avant même que l’enfant n’ait ouvert la bouche, c’est le père qui fait quatre gestes significatifs : « Il l’aperçoit de loin » ; « Il est ému de compassion » ; « Il court » ; « Il l’embrasse »,  et  c’est  lui, le  père, qui  décide  cette  prodigalité dans  la  fête du  retour, de  la  réconciliation : « Vite, le plus beau vêtement » ; « la bague au doigt » ; « les sandales aux pieds » ; « le veau gras » pour un festin joyeux avec musiques et danses.

Telle est l’image de Dieu, que Jésus vient de nous révéler. Comment se fait-il que, aujourd’hui encore, tant d’hommes aient dans leur esprit l’image d’un Dieu méchant, d’un Dieu qui punit, d’un Dieu vengeur, d’un Dieu qui voudrait le malheur de l’homme ?

Ce Dieu- là, n’est pas le Dieu de Jésus ! Le Dieu de Jésus est amour, il n’est qu’amour et prodige, prodigue d’amour. Il distribue
ses biens, même à ceux qui se moquent de lui… et il attend, il attend avec patience, respectant la liberté de ceux qui se sont éloignés de lui. Et, quand il les voit revenir à la maison, il court à leur rencontre, les embrasse tendrement et c’est lui, encore, une fois de plus, qui fait les frais d’un repas de fête, incroyablement généreux.

+ Acte second : l’attitude du père envers le fils aîné.

Le fils aîné, rentrant du travail, entend ces cris, ces bruits de fête, la musique, les danses : il se fait donner des explications et refuse  d’entrer.  Le  fils  ainé  n’a  rien  compris, lui  non  plus, de l’amour de son père. Lui aussi, comme son cadet, il se situe dans un système de revendication : il calcule, non seulement ce qu’il a fait, mais plus encore : ce que son père aurait dû faire pour lui :

«  Tu ne m’as jamais donné un chevreau ».

Ce fils aîné représente tous ceux qui pratiquent scrupuleusement leur religion par devoir, sans amour, qui croient accumuler des mérites, des indulgences « quarante jours et quatre quarantaines ». Ils croient que Dieu est un caissier patron qui paie mal son salarié : religion sans joie, commerciale, intéressée.

« Si je fais ça pour toi, Seigneur, combien tu me donnes ? »

« Regarde, Seigneur, tout ce que je fais pour toi ! Regarde mes mérites ! Ne suis-je pas un type bien ? Moi, je n’ai pas quitté la maison, je continue à travailler, moi, je ne suis pas comme ce petit cagnard qui ne pense qu’à s’éclater et à tout claquer ».

« Voilà tant d’années que je te sers, moi, je n’ai pas désobéi, et moi, qu’est-ce-que tu m’as donné? Je suis un pratiquant moi 

En outre, il est sans pitié pour les autres : il passe son temps à juger, à condamner, à dénoncer les péchés de son frère. Il se croit en règle avec un Dieu comptable.

Pauvre type qui ne pense qu’à ce qu’il a fait, lui. Il n’a jamais réalisé l’amour de son père. Il n’a jamais pensé qu’il  était attelé avec son père à une œuvre commune : un fils amer, envieux.

Que répond le père ? « Toi, mon  enfant, tu es toujours avec moi et tout ce qui est à moi est à  toi ».

Mieux encore, le père ne lui fait aucun reproche : il lui rappelle tout simplement son amour, un amour de tous les instants qui ne se dément pas ; mais l’aîné ne voit rien, il ne sent rien.

Les deux frères ne sont pas meilleurs l’un que l’autre, et l’un et l’autre  ont  besoin d’entendre, de voir l’amour du père, l’amour de Dieu pour eux et voici que ce pauvre père plein d’amour recommence avec le second les démarches de réconciliation qu’il vient de prodiguer au premier : « Il sort de nouveau au- devant de son fils révolté » et il le supplie.

Là encore, Jésus nous révèle l’amour de Dieu : un Dieu qui ne cesse jamais d’aimer ses enfants, tous ses enfants, car ils sont  pécheurs aussi bien les  uns  que  les  autres… mais ils sont aimés autant les uns que les autres!

+ Pourrions-nous laisser passer cet évangile sans rien  transformer en nous ? Allons-nous nous laisser être aimé par ce Père et l’aimer en retour ? Que  faisons-nous  spécialement  en  ce  temps  de Carême pour aimer Dieu ? Allons-nous, enfin, nous mettre à aimer nos frères ?

La parabole reste tragiquement  inachevée. Que s’est-il passé ensuite ? Dieu  est un Père, c’est sûr, mais les deux frères se sont-ils réconciliés ? L’aîné s’est-il laissé convaincre  et est-il entré dans la joie de son Père ?

C’est à nous de donner la conclusion. Entrons dans la fête de l’amour, cette fête que Dieu a préparée, pas seulement pour moi, mais aussi pour l’autre, pour nous tous.  AMEN




3ième Dimanche de Carême – par Francis COUSIN (Lc 13, 1-9)

« La faute à qui ? »

 

Le passage d’évangile de ce jour commence par l’évocation d’un fait divers : « Des gens qui se trouvaient là rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer, mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient. ».

On ne sait rien des commentaires faits par ces gens, mais la réponse de Jésus nous les suggère : « Quels fautes avaient-ils fait pour être ainsi punis ? ».

C’était la pensée de l’époque que tout mal (maladie, accident, …) était la conséquence d’un péché antérieur de la personne ou de ses ancêtres : « Je punis la faute des pères sur les fils, jusqu’à la troisième et la quatrième génération. » (Ex 20,5).

En plus, le massacre avait eu lieu dans le temple, puisque c’était le seul endroit où on pouvait offrir des sacrifices d’animaux, et leur sang s’était mélangé avec celui des animaux offerts : le sang du malheur mélangé avec celui de la louange à Dieu … Pourquoi Dieu a-t-il permis cela ?

Jésus répond de suite : « Ils n’ont pas plus péché que les autres. Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. ».

Et comme le sujet est sensible, politique, puisque c’est l’occupant romain qui en est à l’origine, Jésus rapporte un autre fait : la chute de la tour de Siloé : dix-huit morts ! Un accident ! Et sa conclusion est la même : « Ils n’ont pas plus péché que les autres. Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. ».

Les gens regardent vers le passé : il est mort … donc il a péché … C’est une punition de Dieu …

Jésus regarde vers l’avenir : Convertissez-vous ! Changez votre regard ! Il dit ce que disait déjà Dieu dans la bouche d’Ézéchiel : « oracle du Seigneur Dieu – je ne prends pas plaisir à la mort du méchant, mais bien plutôt à ce qu’il se détourne de sa conduite et qu’il vive. Retournez-vous ! Détournez-vous de votre conduite mauvaise. » (Ez 33,11) ; Et qui est méchant ? Tous ceux qui ne suivent pas la volonté de Dieu … c’est-à-dire quasiment tout le monde !

Convertissez-vous ! Changez votre regard ! … regardez vers l’avenir …

Ayez un regard d’amour, comme Dieu, … et non de haine …

Ayez un regard de justice, vous serez « rassasiés », … et non de partialité …

Pour faire le bien autour de vous … et non le mal …

Un changement de regard qui s’adresse à tous … et envers tout le monde … ceux qui croient en Dieu, et ceux qui n’y croient pas …

Ayez le regard de Dieu, qui pardonne, qui fait œuvre de justice, qui est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour … (Psaume)

Jésus termine son intervention en parlant d’un figuier qui tarde à donner du fruit : trois ans sans rien donner … ce qui, pour un arbre fruitier semble normal … mais le maître du domaine veut le couper …

Alors, son vigneron lui dit : « Maître, laisse-le encore cette année, je vais prendre soin de lui : bêcher autour de lui et mettre du fumier, l’arroser, le tailler … Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas. »

Dieu prend son temps, il est patient, il ne se décourage pas … il nous donne le temps de nous convertir …

… dans cette vie terrestre … jusqu’à notre mort humaine, la première mort …

… ou dans l’autre vie … dans ce qu’on appelle le purgatoire … jusqu’au jour du jugement et notre deuxième mort …

« Car Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité. » (1Tm 2,4)

Mais si Dieu est patient … on n’est pas obligé d’attendre pour se retourner vers le Seigneur !

Seigneur Jésus,

face à une mort brutale,

on est souvent tenté de te dire :

pourquoi n’as-tu rien fait ?

Et toi, tu nous dis

’’Soyez toujours prêts

pour l’heure de votre mort.

Convertissez-vous,

soyez prêts à comparaître

devant mon Père qui vous aime,

car vous ne connaissez ni le jour, ni l’heure.’’

                                                                                   Francis Cousin

 

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3ième Dimanche de Carême – par le Diacre Jacques FOURNIER (Lc 13, 1-9)

Choisis la Vie,

et non le péché et la mort (Lc 13,1-9) !

Un jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer, mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient.
Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ?
Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même.
Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ?
Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. »
Jésus disait encore cette parabole : « Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas.
Il dit alors à son vigneron : “Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol ?”
Mais le vigneron lui répondit : “Maître, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier.
Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas.” »

 

        A l’époque de Jésus beaucoup pensaient qu’il existe un lien direct entre péché, malheurs, maladie et mort. Cette conception s’enracine dans les temps les plus anciens. Déjà, les peuples voisins d’Israël, croyaient en ce que l’on appelle souvent « le Principe de Rétribution selon les actes ». Cette croyance était totalement païenne, au sens où les dieux n’intervenaient pas. Elle est très certainement née de l’expérience, mais la vision du monde qu’elle transmet est non seulement simpliste, mais encore erronée. Selon cette conception, lorsqu’un homme commet le mal, il déclenche une puissance malfaisante qui, tôt ou tard, retombera sur lui et sur son entourage.

            Israël va accueillir cette croyance et l’intégrer dans sa foi encore toute jeune. Lors de la sortie d’Egypte, racontée dans le Livre de l’Exode, ils ont vu le Seigneur à l’œuvre avec une grande Puissance, et ils en ont déduit que cette Puissance ne pouvait qu’être celle du Dieu Créateur, ce Dieu Tout Puissant qui a fait surgir l’univers du néant. Et ils se faisaient une telle idée de cette Toute Puissance de Dieu qu’ils pensaient que rien ne pouvait lui échapper, pas même le mal (Am 3,6 ; Lm 3,38)… Ces conséquences mauvaises qui, soi disant, retombent sur le pécheur ne pouvaient donc venir que de Dieu. « Le Principe de Rétribution selon les actes » a ainsi conduit Israël à s’imaginer que Dieu était un Juge qui, du haut du ciel, récompense les justes et punit ceux qui font le mal : « Toi, écoute au ciel et agis ; juge entre tes serviteurs : déclare coupable le méchant en faisant retomber sa conduite sur sa tête, et justifie l’innocent en lui rendant selon sa justice » (1R 8,32 ; Ez 7,3 et 22,31).

            Avec une telle croyance, les galiléens massacrés par Pilate et ces « dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé », ne pouvaient qu’être des pécheurs que Dieu avait punis par suite de leurs fautes. « Eh bien non », dit Jésus. Ils n’étaient pas « plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem. Et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière. »

            Nous sommes donc de nouveau invités ici à nous convertir, à renoncer au péché qui nous tue pour apprendre, avec Jésus, à aimer. Et la parabole suivante du figuier insiste tout particulièrement sur la patience de Dieu, qui inlassablement s’offre à nos cœurs pour les purifier, les nourrir et leur donner de pouvoir enfin porter du fruit (Jn 15)…             DJF