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Epiphanie du Seigneur – par Francis COUSIN

Évangile selon saint Matthieu 2, 1-12

 

« Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.»

 

Les mages sont des savants, des intellectuels, des chercheurs à tout point de vue (contrairement à maintenant où les chercheurs sont obligés de se spécialiser dans un domaine précis), des personnes qui veulent comprendre ce qu’ils observent.

Ils aperçoivent une nouvelle étoile dans le ciel, et d’après ce que l’on disait à l’époque, c’était le signe qu’un nouveau roi était né. Une étoile, un astre brillant, une lumière dans le ciel, une lumière pour annoncer celui qui se dira la lumière du monde (Jn 8,12), mais ça, ils ne le savaient pas encore (l’ont-ils d’ailleurs su un jour ?).

Curiosité ? Ils la voient se déplacer. Alors ils la suivent pour connaître qui est ce nouveau roi. Jusqu’à ce qu’elle disparaisse à leurs yeux au pays de Judée. Sans doute est-ce un nouveau roi pour les juifs … Alors ils continuent leur recherche, vont jusqu’à la capitale, Jérusalem, et se renseignent.

Affolement dans toute la ville : Un nouveau roi est né ! Joie et espoir chez les juifs qui attendait le Messie … Consternation et crainte chez Hérode et son entourage : un ’’concurrent’’ qui veut prendre la place …

On leur indique Bethléem … et l’étoile reparaît pour les mener jusqu’à la Sainte Famille.

Ils se prosternent devant l’enfant nouveau-né, lui offrent des cadeaux, lui rendent hommage, c’est-à-dire qu’ils le reconnaissent comme quelqu’un d’important, comme leur souverain … prémonition de l’universalité (catholicité) de l’Église.

Qui sont ces mages ? Combien sont-ils ? Quels sont leur nom ? De quel pays viennent-ils ? L’évangile ne nous donne aucune réponse à ce sujet, et les premiers textes connus sur ces mages, ou sur ces Rois-mages, datent du VIII° siècle, et relèvent de la légende plus que d’une tradition. Le terme de ’’rois’’ vient du psaume 71, qui est le psaume de ce dimanche, et qui en parlant du Messie, du Roi d’Israël, dit : « Les rois de Tarsis et des Iles apporteront des présents. Les rois de Saba et de Seba feront leur offrande. Tous les rois se prosterneront devant lui, tous les pays le serviront. » (V. 10-11), et le fait qu’on présente habituellement trois mages, un natif d’Orient, un autre d’Europe, et le dernier d’Afrique, qui représentaient le monde connu de l’époque, vient du verset 17 de ce même psaume, non lu aujourd’hui : « En lui, que soient bénies toutes les familles de la terre ; que tous les pays le disent bienheureux ! ».

Dieu a parlé à ces mages, d’une manière qu’ils pouvaient comprendre ! C’étaient des chercheurs : ils ont suivi l’étoile ! Ils étaient attentifs aux ’’signes des temps’’.

C’est ce qui nous est demandé, à nous tous les chrétiens, en tant que membre de l’Église, d’être attentifs « aux signes des temps » : « l’Église a le devoir, à tout moment, de scruter les signes des temps et de les interpréter à la lumière de l’Évangile, de telle sorte qu’elle puisse répondre, d’une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future et sur leurs relations réciproques. » (GS 4 §1).

A nous d’être attentifs à la manière dont Dieu se manifeste ou veut nous faire comprendre quelque chose. Oh, bien sûr, ce ne sera pas une étoile, mais ça peut être une lecture, une rencontre, une parole, une personne, la suite d’une prière.

Dieu continue à nous interpeller, à nous parler. Il a besoin de nous. Soyons attentifs aux signes qu’il nous envoie. Et puis, surtout, sachons interpréter ces signes. Et souvent, cela ne se fait pas tout seul : il faut en parler avec d’autres. Avec Dieu, dans la prière, dans l’Adoration, en se mettant comme les mages, tout petit en face du Très-Grand.

Et une fois qu’on a pu interpréter les signes, il faut passer à l’action, se bouger.

Là encore comme les mages : ils sont repartis chez eux, mais ils avaient compris quelque chose des intentions d’Hérode, et ils ont pris un autre chemin.

Pour nous aussi, que notre prière, notre adoration, nous fasse prendre un autre chemin, un chemin non-physique, un chemin spirituel. Comme le dit le chant : « Ne rentrez pas chez vous comme avant, Ne vivez pas chez vous comme avant, Changez vos cœurs, chassez vos peurs, Vivez en hommes nouveaux. »

Seigneur Jésus,

En voyant l’étoile,

les mages n’ont pas hésité à venir vers toi.

Aide-moi à voir les signes

qui me permettront de me rapprocher de toi,

de t’adorer,

et de repartir différent,

illuminé de ta présence à mes côtés.

Francis Cousin                     

             

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La Sainte Famille – par Francis COUSIN

« Obéir au Dieu Sauveur »

 (Lc 2, 22-40)

  Quand fut accompli le temps prescrit par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus l’amenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur,
selon ce qui est écrit dans la Loi : ‘Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur.’
Ils venaient aussi offrir le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : ‘un couple de tourterelles ou deux petites colombes.’
Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui.
Il avait reçu de l’Esprit Saint l’annonce qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Christ, le Messie du Seigneur.
Sous l’action de l’Esprit, Syméon vint au Temple. Au moment où les parents présentaient l’enfant Jésus pour se conformer au rite de la Loi qui le concernait,
Syméon reçut l’enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
« Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole.
Car mes yeux ont vu le salut
que tu préparais à la face des peuples :
lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. »
Le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qui était dit de lui.
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction
– et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – : ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d’un grand nombre. »
Il y avait aussi une femme prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser. Elle était très avancée en âge ; après sept ans de mariage,
demeurée veuve, elle était arrivée à l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s’éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.
Survenant à cette heure même, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.
Lorsqu’ils eurent achevé tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth.
L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui.

 

« Les parents de Jésus l’emmenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur.»

 

Nous fêtons aujourd’hui la Sainte Famille, Jésus, Marie, Joseph.

Et on conçoit bien qu’elle puisse être appelée sainte car elle est constituée de l’union de Marie, mère de Dieu, qui a porté et élevé son fils Jésus, Fils unique de Dieu, conçu par la puissance du Saint Esprit, de Joseph qui a accepté le cadeau fait par Dieu à Marie et de devenir le père sur la terre de Jésus, prenant soin de lui comme son propre fils et participant à son éducation humaine et spirituelle, et de Jésus, le Fils de Dieu, envoyé par son Père sur la terre pour guider tous les hommes sur le chemin qui mène vers lui.

Mais si nous célébrons la Sainte Famille, c’est pour qu’elle soit un modèle pour nous, parce que chaque famille est appelée à devenir sainte à l’image de la famille de Nazareth.

Projet démesuré ? Hors de portée pour nous ? Sans doute … ou peut-être !

Tout projet est conçu pour nous faire avancer, nous faire partir d’un état A pour aller vers un état B.

Et si cela paraît impossible pour beaucoup, cela peut se faire, mais seulement dans la foi en Dieu, « car rien n’est impossible à Dieu » (Lc 1,37).

Pour toute famille catholique (et chrétienne), née de l’union devant Dieu d’un homme et d’une femme pour ne plus faire « qu’une seule chair » (Gn 2,24), il est normal de respecter la demande de Dieu aux premiers humains : « Soyez fécond, multipliez, emplissez la terre » (Gn 1,28) en ayant des enfants. Par là, les époux continuent et participent à la création du monde, par ce qu’on appelle couramment, quelque soit sa religion, la « procréation ». « En transmettant à leurs descendants la vie humaine, l’homme et la femme comme époux et parents, coopèrent d’une façon unique à l’œuvre du Créateur » (CEC 372).

Il peut arriver cependant que la naissance d’un enfant tarde à venir.

Mais l’exemple d’Abraham et de Sara, dans la première lecture, nous donne à réfléchir : Ils mettent toute leur foi en Dieu. Et malgré leurs âges à tous les deux, Dieu leur donne d’avoir un enfant qui soit né de leur union : « Regarde le ciel et compte les étoiles, si tu le peux … Telle sera ta descendance ! ». Foi en Dieu qui peut tout.

Mais aussi foi totale qui demeure quand elle est mise à l’épreuve, de façon abrupte et difficilement compréhensible : « Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait son fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses et entendu cette parole : c’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom. » (2° lect).

Abraham va jusqu’au bout dans la foi en Dieu.

Comme Joseph ira jusqu’au bout en acceptant Marie chez lui. Comme Marie accepta l’annonce de l’ange Gabriel : « Que tout m’advienne selon ta parole » (Lc 1,38), sans savoir ce qui l’attendait : « Et toi, ton âme sera traversée d’un glaive ». Tous les deux s’en remettaient à la volonté de Dieu pour l’accomplissement de leur mission.

Pour ces deux couples, et pour d’autres aussi, la mission confiée par Dieu était plus importante que leurs propres désirs. C’est sans doute en cela qu’ils sont devenus saints, parce qu’ils crurent de Dieu et qu’ils s’étaient mis en retrait pour que la volonté de Dieu soit faite.

C’est peut-être ce qui nous manque à nous, en cette époque où la consommation et le bien-être personnel sont tant mis en avant : voir et mettre la volonté de Dieu avant la nôtre. Et pourtant, nous disons chaque jour dans le Notre Père : « Que ta volonté soit faite ».

Sa volonté ? On pourrait résumer : que nous ayons foi en lui, et que nous nous aimions.

L’amour entre tous les membres de la famille est la condition nécessaire pour que nous arrivions à la sainteté.

Seigneur Jésus,

la première démarche de tes parents,

Marie et Joseph,

a été de te présenter à ton Père

dans le temple, selon la loi juive.

Toute votre vie à tout trois

a été de faire la volonté de Dieu,

dans l’amour des uns et des autres.

Aide-moi à en faire autant.

Francis Cousin




Nativité du Seigneur – par Francis COUSIN (Lc 2,1-14)

Évangile selon saint Luc 2,1-14

En ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre – ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. – Et tous allaient se faire recenser, chacun dans sa ville d’origine.

Joseph, lui aussi, monta de Galilée, depuis la ville de Nazareth, vers la Judée, jusqu’à la ville de David appelée Bethléem. Il était en effet de la maison et de la lignée de David. Il venait se faire recenser avec Marie, qui lui avait été accordée en mariage et qui était enceinte.

Or, pendant qu’ils étaient là, le temps où elle devait enfanter fut accompli. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune.

Dans la même région, il y avait des bergers qui vivaient dehors et passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’ange du Seigneur se présenta devant eux, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d’une grande crainte. Alors l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »

Et soudain, il y eut avec l’ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. »

  

« Ne craignez pas. », disent les anges aux bergers.

Encore une fois, Dieu ou ses représentants commencent leur annonce aux humains par l’une de ces phrases : « Soyez sans crainte », «  Ne craignez pas », «  Soyez dans la paix », «  La paix soit avec vous ». Comme si l’intervention de Dieu dans nos vies nous bouleverserait tellement qu’il faut nécessairement nous mettre dans une situation de confiance.

Il faut dire qu’il y avait de quoi !

Ces bergers, occupés à veiller leurs troupeaux dans la campagne, se retrouvent tout à coup entourés d’une grande lueur, et les voilà qui entendent cette « Bonne Nouvelle », cet « Évangile » : « Le Christ est né, pas loin d’ici, à Bethléem, la ville de David ».

Ils n’en reviennent pas ! Comment eux, des pauvres gens, mal considérés par la population, obligés de travailler nuit et jour pour pouvoir survivre, sont destinataires d’un message aussi important pour tout le peuple juif : « Le Christ, le Sauveur est né ! Près de chez eux ! »

Ils sont décontenancés ! D’habitude, des nouvelles comme celle-ci, on les annonce aux riches, aux personnes importantes !

La naissance du Messie, on l’annonce au Grand Prêtre, au Roi, au sanhédrin ! Mais pas à des gens comme eux. Ils croyaient Dieu lointain d’eux, au sens propre comme au sens figuré, et voici que Dieu leur parle, par l’intermédiaire de ses anges. Dieu les considère au même titre que les autres personnes.

Dieu bouleverse toutes nos habitudes. Un monde nouveau est né !

Les petits seront considérés, et les gens importants, ou qui se croient tels, ne seront plus les premiers servis. Déjà s’annonce le phrase de Jésus : « Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé ».

Et cela continue : « Vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »

Le Christ, le Messie, celui qui vient pour sauver le peuple, couché dans une mangeoire ! Comme un moins que rien ! Comme eux ! Comme quelqu’un qui leur ressemble !

La curiosité commence à les démanger, mais ils sont encore dans l’expectative.

Et voilà que les chœurs angéliques font donner leurs voix, et ils chantent ’’comme des anges’’ une louange à Dieu : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. »

Cette dernière phrase les réconforte : « Paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. »

C’est à eux que cela s’adresse. « Dieu nous aime ! Quel bonheur ! Le Dieu Très-Haut nous aime ! Nous, les bergers ; nous, les petits. »

Ils n’étaient pas habitués à ce qu’on leur dise des paroles comme celles-là ! et ce n’était pas du chiqué !

Alors, quand les anges furent partis, ce n’étaient plus la curiosité qu’ils avaient. Ils voulaient voir, et remercier ce Christ, cet envoyé de Dieu, de Dieu qui avaient de la considération pour eux.

Leurs cœurs étaient pleins de joie, comme les disciples d’Emmaüs, et c’est ainsi qu’ils partirent vers Bethléem pour adorer Jésus.

Aujourd’hui, nous commémorons la naissance de Jésus, prince de la Paix.

Ensemble à l’église. Dans nos maisons, en famille souvent.

On est content, heureux ! Parce que Jésus est né, parce qu’on est ensemble, parce qu’il y a des cadeaux, de la bonne nourriture … Tout va bien pour nous !

Mais en est-il de même pour tout le monde ?

Avons-nous une pensée, comme Dieu l’a fait avec les bergers, pour les plus pauvres … ?

Pour ceux qui n’ont pour compagnie qu’une télévision ? ou rien du tout ?

Pour ceux qui sont seuls, malades, à l’hôpital, en prison … ?

Pour ceux qui n’ont plus de famille, ou dont la famille est dispersée ou cassée … ?

Pour ceux qui vivent dans des pays en guerre … ? ou dans des pays où on ne peut pas fêter ouvertement Noël ?

Faisons que ce Noël nous ouvre vers les autres, vers ceux qu’on ne voient pas habituellement.

 

Seigneur Jésus,

tu viens parmi nous comme un enfant,

comme tous les humains.

Mais dans quelles conditions ?

Écarté, rejeté,

tu trouves ta place parmi les pauvres,

parmi les animaux, dans leur mangeoire,

sur le bois où se trouve leur nourriture…

 

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 Parole d’évangile semaine 17-52bis

Francis Cousin




Nativité du Seigneur – par le Diacre Jacques FOURNIER (Lc 2,1-14)

« Aujourd’hui vous est né un Sauveur »

(Lc 2,1-14)…

En ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre – ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. – Et tous allaient se faire recenser, chacun dans sa ville d’origine.

Joseph, lui aussi, monta de Galilée, depuis la ville de Nazareth, vers la Judée, jusqu’à la ville de David appelée Bethléem. Il était en effet de la maison et de la lignée de David. Il venait se faire recenser avec Marie, qui lui avait été accordée en mariage et qui était enceinte.

Or, pendant qu’ils étaient là, le temps où elle devait enfanter fut accompli. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune.

Dans la même région, il y avait des bergers qui vivaient dehors et passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’ange du Seigneur se présenta devant eux, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d’une grande crainte. Alors l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »

Et soudain, il y eut avec l’ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. »

 

 

            Un recensement ordonné par Auguste, qui fut empereur de 30 av JC à 14 ap JC, obligea Joseph à quitter Nazareth, en Galilée, au Nord, pour aller avec Marie à Bethléem, la ville de David, au sud, près de Jérusalem, car il était un lointain descendant de David. Mais les jours où Marie devait enfanter étaient arrivés, et elle mit au monde son fils premier-né qu’elle coucha dans une mangeoire par manque de place dans la salle commune où ils se trouvaient.

            D’un point de vue humain, cet événement est d’une incroyable simplicité, mais tout ici est « Parole de Dieu ». Grâce à un païen, Jésus, Sauveur des Juifs et des païens, naîtra dans la ville de David, et par Joseph, son père adoptif, il sera pleinement « fils de David ». Or, le Messie attendu devait être « fils de David » : « Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l’Esprit du Seigneur » (Is 11,1-9 ; Mc 1,9-11).

            Michée avait prophétisé dès le 8° s av JC que « celui qui doit régner sur Israël naîtra à Bethléem », qui signifie en hébreu : « la maison du pain ». Or Jésus dira de Lui-même qu’il est le « pain de vie qui descend du ciel et donne la vie au monde » (Jn 6,32-63). Et à peine né, Marie le dépose dans une mangeoire, comme elle l’offrira plus tard en acceptant sa mort en Croix !

            Jésus est appelé ici « le fils premier né », et il est de fait le « premier né » d’une humanité nouvelle appelée à renaître du Don de l’Esprit qu’il est venu proposer à tout homme : « Personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair n’est que chair ; ce qui est né de l’Esprit est esprit ». « C’est une création nouvelle : l’être ancien a disparu, un être nouveau est là. Et le tout vient de Dieu » (Jn 3,5-72 ; Co 5,17-18). Par sa résurrection, il sera aussi « le premier né d’entre morts » (Col 1,18), et par là l’exemple déjà accompli de ce que nous sommes tous appelés à vivre par delà notre mort… Et Marie recevra  au pied de la Croix la pleine révélation de sa vocation : être la Mère de l’humanité tout entière appelée elle aussi à renaître de la mort (Jn 19,25-27)…

            Dans la crèche, Jésus est « enveloppé de langes » comme il sera « enveloppé d’un suaire » avant d’être mis au tombeau. Et St Luc parle ici d’une « salle », un mot qui ne reviendra qu’une seule fois dans son Evangile, juste avant la Passion, lorsque Jésus instituera l’Eucharistie dans cette « salle » que lui ont préparée Pierre et Jean (Lc 22,11). Là se révèlera le sens profond de toute sa vie : « Ceci est mon corps, donné pour vous », pour le salut de tous les hommes pécheurs représentés ici par ces « bergers » considérés autrefois comme des voleurs… Et c’est bien à eux que les Anges transmettent la Bonne Nouvelle : « Voici que je vous annonce une grande joie qui sera celle de tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur ! Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime », à tous les hommes qu’il aime et qu’il appelle à la conversion et au salut (Lc 5,31 ; 1Tm 2,3-6) !                            DJF

 




4ième Dimanche de l’Avent – par Francis COUSIN

L’évangile de ce jour est celui de l’Annonciation, et ce soir même, nous fêterons Noël !

Quel raccourci ! Même si pour Dieu, « Mille ans sont comme un jour », le télescopage de ces deux jours habituellement séparés de neuf mois est surprenant. Mais les deux faits sont tellement liés : La naissance visible de Jésus est à Noël, mais sa conception, sa véritable naissance, là où le Verbe se fait chair, date de l’Annonciation. Comme pour tous les enfants.

Le jour de l’Annonciation, « quand les temps furent accomplis » (Ga 4,4), Dieu envoya l’ange Gabriel à Nazareth. Ce que tous les juifs attendaient allaient se réaliser : Le Messie vient sur terre.

L’initiative vient de Dieu, comme toujours dans l’histoire du Salut pour réparer les fautes des hommes. L’amour de Dieu pour son peuple, pour l’humanité toute entière, est tellement grand qu’il veut permettre que tous participent à sa vie auprès de lui, qui n’est qu’Amour.

Et ce ne sera pas un autre prophète qu’il va envoyer à son peuple. « Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l’esprit du Seigneur » (Is 11,1-2), mais ce ne sera pas non plus un roi terrestre, « ma royauté n’est pas de ce monde. » (Jn 18,36). Ce sera son propre Fils.

Si on regarde le texte de l’évangile, on sera surpris par la longueur des temps de parole de l’ange Gabriel, que l’on comprend bien vue l’importance de l’annonce qui est faite, comparée aux réponses de Marie. Des réponses courtes, ciblées, ne disant que l’essentiel de ce qu’elle ressent, empruntes de respect, d’humilité, de sentiment de petitesse devant la grandeur et la responsabilité de ce qui lui est proposé.

Encore que … ! Si on lit bien le texte, il ne s’agit pas d’une proposition, mais d’une série d’affirmations : « Tu as trouvé grâce … tu vas concevoir et enfanter … tu lui donneras … ».

Si on considère que Marie avait été consacrée à Dieu, et qu’elle avait fait vœu de chasteté (voir le Protévangile de Jacques et l’évangile du Pseudo-Matthieu), à part le bouleversement de cette annonce soudaine et inattendue, cela répondait en quelque sorte à sa volonté de se mettre au service du Seigneur. Mais pas comme elle s’y attendait, d’où sa réponse : « Comment cela va-t-il se faire puisque je ne connais pas d’homme ? ».

Bien sûr, elle avait été promise à Joseph, mais pour le moment son enfant serait considéré comme le fruit d’une relation adultérine, ce qui l’exposait à la répudiation de la part de Joseph et à la lapidation à la porte de la ville de la part du peuple. On peut comprendre l’affolement de Marie.

« Sois sans crainte ! » répond l’ange, « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu ». Un futur qui n’en est pas vraiment un, et qui n’attend que la réponse de Marie.

Enfin, elle connaît ce pour quoi elle s’était préparé depuis quelques années. Elle a la réponse à ses questions. Et malgré l’importance de la tâche qui lui est confiée (on pourrait dire l’énormité), elle est heureuse que Dieu lui confie cette responsabilité malgré les risques qu’elle prend.

« Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. ». C’est la Foi en Dieu qui guide Marie. Et aussitôt, Jésus vient en elle : « Le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous » (Jn 1,14).

Jésus, Fils de Dieu, Dieu, vient chez nous comme un petit enfant, comme un homme comme tous les hommes, dans une famille, avec Marie sa mère et Joseph qui accepte de prendre Marie chez lui.

La beauté de l’Annonciation, et son importance pour tous les chrétiens, et les autres, doit nous faire avoir une dévotion particulière pour cet événement, et il serait bon de reprendre cette habitude, que certains pourraient considérer comme vieillotte, de réciter l’angélus, sinon trois fois par jour (à 6h, 12h et 18h), ne serait-ce qu’une fois par jour. Même si ce n’est pas à la ’’bonne heure’’. On peut très bien le réciter en travaillant, en voiture, voire dans son lit.

Et que cette réponse de Marie à l’ange Gabriel nous engage, chacun, à accepter les engagements que le Seigneur nous demande, d’une manière ou d’une autre, pour que « sa volonté soit faite », répondant ainsi à la demande de Marie « Faites tout ce qu’il vous dira », avec humilité, générosité et persévérance.

Et si c’est pour Dieu, rappelons-nous les mots de l’ange Gabriel : « Sois sans crainte ! »

 

Seigneur Dieu, permet que nous te répondions comme l’a fait Marie à l’ange Gabriel :

« Qu’il me soit fait selon ta parole »,

quelques soient les difficultés qui risquent de se poser,

que nous soyons sans crainte,

« car rien n’est impossible à Dieu ».

 

Francis Cousin




4ième Dimanche de l’Avent – Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Lectures : Lc 1, 26-38

 

« L’ange entre chez elle ».

Frères et sœurs, dans la Bible, les anges sont assez mal élevés. Contrairement à ce qu’on pourrait croire ils ne respectent absolument pas les codes de politesse des hommes. Quand ils apparaissent, ils ne prennent aucune précaution, et généralement ceux qui bénéficient de leur apparition prennent peur. La vierge Marie ne fait pas exception. La nuit, ils réveillent les bergers, ce n’est pas très sympathique de réveiller les gens dans leur sommeil, surtout une nuit de Noël, surtout les bergers qui ont beaucoup travaillé la veille. Ici l’ange ne frappe pas à la porte, il transgresse tous les codes, et cette arrivée de l’ange se fait par effraction. Il y a une sorte de violence dans la scène qui est simplement évoquée par le fait que l’ange arrive sans crier gare.

Vous avez remarqué, surtout sur le tableau de Fra Angelico, les peintres en général ont tout fait pour atténuer cette dimension de violence et de force. Ici, par exemple il est clair que la vierge Marie est sous un patio, chez elle, c’est la petite cellule qui est derrière elle dont on voit un petit fenestron qui donne sur le jardin, et l’ange se tient tout de même à une distance respectueuse comme si l’un et l’autre étaient séparés par l’espace des deux arches. Tous les deux ont des poses très calmes, mais derrière cela, il y a quand même l’effraction de l’ange dans la vie privée de Marie. On pourrait trouver que c’est normal pour l’ange, il faut bien qu’il trouve le moyen d’entrer, cela fait partie de la manière de raconter l’événement. Mais habituellement on ne dit pas que les anges entrent, on dit qu’ils apparaissent. Il n’y a pas ce côté un peu de coup de force. D’ailleurs, Gabriel n’est pas un nom comme chérubin, ce n’est pas un nom d’ange un peu douceâtre. Gabriel veut dire littéralement « quelqu’un comme Dieu », c’est le côté fort, puissant, sûr de lui qui entre dans la vie de cette jeune fille d’Israël. L’ange de l’Annonciation est tout sauf un être efféminé, c’est celui qui représente vraiment la force puissante de Dieu, de l’intervention un peu violente de Dieu.

Dans l’Annonciation, même si nous avons fait beaucoup de choses pour atténuer le côté un peu brutal de l’affaire, il y a un petit côté « choc des cultures ». Il s’agit là vraiment, dans cet événement capital et grave, du passage d’un monde à l’autre. On peut donc dire choc des cultures, non pas au sens de ceux cultures humaines qui s’affrontent, mais deux mondes qui s’affrontent. C’est pour cela que c’est un ange, celui qui est du monde céleste, qui vient annoncer ce chamboulement définitif. L’ange vient dire à Marie : tu vas devenir mère d’un fils. Comme nouvelle pour une jeune fille, surtout qui est fiancée, on ne peut pas dire que ce soit un cadeau. Marie dans sa répartie est assez habile, elle dit : comment cela se fera-t-il ? Je ne connais pas d’homme. Joseph est là en promesse, mais rien n’est décidé. Cette réponse peut vouloir dire : pour ce qui concerne l’enfant, il faudrait étudier cela de plus près. Il y a une réticence de la part de Marie, une sorte de peur qui la bouleverse, et ensuite la question. Est-ce que l’ange se rend compte du côté incongru de sa demande?

L’Annonciation serait un peu le prototype de ce qui est la base du salut. Surtout dans le monde moderne, nous imaginons que le salut se passe en douceur. Nous imaginons que la foi est une sorte de simple supplément de qualité esthétique, spirituelle, humaine, par rapport à ce qu’on a vécu. Or, ce n’est pas simplement un plus. Il y a comme une sorte de brisure, de rupture, qui et d’autant plus complexe que Marie a été comme préparée à cela. Lorsque l’ange la salue, il lui dit ce qu’on traduit habituellement par « comblée de grâce », cela veut dire : « toi qui a déjà été radicalement transformée par la grâce ». Le mot grec qui est utilisé là signifie le résultat d’un acte, d’une transformation antérieure. Ce n’est pas « tu as beaucoup de chance, réjouis-toi Marie, tu es privilégiée, tu vas devenir mère du Sauveur ». Non, l’ange lui dit : « tu es déjà préparée à cet événement ». Et malgré tout cela, cette annonce reste un choc, quelque chose de surprenant. Marie est déjà préparée à cela, elle est comblée de grâce, elle a déjà été transformée mystérieusement par la grâce. Elle représente à ce moment-là, elle seule, en sa personne, la fine pointe de l’humanité en tant qu’elle est capable d’accueillir la venue de Dieu. Il y avait un seul individu d’exception, une jeune femme, Marie qui était prête à accueillir le salut et qui avait été préparée pour cela. C’est ce qu’on dira plus tard en proclamant le dogme de l’Immaculée Conception. Ici, c’est très clair que l’ange ne dit pas simplement : tu as de la chance, mais tu as été transformée pour cela, tu es faite pour accueillir le salut la première, tu es la fine pointe du peuple d’Israël, de toute l’humanité, et à travers ce que tu es maintenant, tu as les moyens de dire oui au projet de Dieu. Il faut que ce qui lui a été donné, ce qui la constitue comme pleine de grâce, c’est-à-dire capable d’accueillir le salut, il faut encore que ce soit ratifié par une sorte d’arrachement à elle-même pour qu’elle puisse dire : « oui, j’accueille cet enfant, cette vie qui m’est donnée de Dieu ».

Que s’est-il passé dans le cœur de Marie ? Ce n’est pas la peine d’appliquer des catégories psychologiques, d’essayer de transposer de façon imaginative, et je crois que les peintres ont essayé de dire quelque chose à travers leur peinture, mais ce serait dangereux de vouloir aller plus loin. Ce qui est sûr, c’est qu’au moment même de l’Annonciation, c’est pour cela qu’on insiste toujours sur la foi de Marie, ce qu’elle a accepté à ce moment précis, elle ne pouvait l’accepter qu’en se faisant violence pour dire « oui » à ce projet, et en acceptant que ce projet la dépasse complètement. En même temps qu’elle était préparée pour être celle qui accueille le salut, il fallait que dans un acte de liberté qui dépassait tout son pouvoir, qu’elle accepte fondamentalement de devenir la mère de Dieu. Elle était préparée par la grâce, elle ne pouvait l’accepter que par la grâce qui en elle faisait une sorte d’œuvre de violence pour lui permettre d’être à la hauteur de l’accueil de son Fils.

 

Ce texte n’est pas un texte très calme. On a toujours voulu y voir une sorte d’intimité très douce, feutrée, très féminine. En réalité, c’est le premier moment où l’univers bascule dans une dimension nouvelle. C’est l’Annonciation, ce moment où notre monde, notre vieux monde marqué par le péché, incapable par lui-même de se sauver, est en train par l’acceptation de la vierge Marie, par l’Incarnation du Fils de Dieu, est en train de basculer dans une dimension nouvelle. L’Annonciation c’est le début d’une situation de crise, et nous savons ce que c’est aujourd’hui. Devant une situation de cris, il y a deux attitudes : le repli frileux sur soi, et il y a le fait de faire face à la crise. Aujourd’hui, à travers le mystère de l’Annonciation, à cause du destin spirituel de chacun d’entre nous, nous sommes invités à voir comment nous pouvons entrer dans cette situation de « crise » dans laquelle Dieu nous fait passer du vieux monde dans lequel on est pris, qui est en train de se fissurer et de craqueler, et de nous faire entrer dans un monde nouveau.

Si Marie est la première des croyants, c’est parce qu’elle a vécu cela. Elle a vécu l’enfantement du Fils de Dieu comme un véritable combat par rapport à elle-même, l’acceptation du dessein de Dieu sur elle et le fait d’être conduite au-delà de tout ce qu’elle pouvait imaginer, de tout ce que son désir pouvait attendre, et de tout ce que sa foi pouvait lui représenter. C’est la même chose maintenant pour chacun d’entre nous, et quand on fête Noël, on fête le moment où cette irruption du salut de Dieu nous entraîne dans un mouvement, dans un monde nouveau à travers une sorte de crise intérieure, et c’est normal, mais c’est le prix que doit payer notre liberté pour entrer dans ce monde nouveau. Amen.

 




3ième Dimanche de l’Avent par Francis Cousin

Dimanche 17 décembre 2017 –  3° dimanche de l’Avent – Année B

 

Première lettre de saint Paul aux Thessaloniciens 5,16-24

 

« N’éteignez pas l’Esprit ! »

 

Quelle richesse dans tous les textes de ce dimanche. Et ce qui frappe en premier, c’est le thème de la joie qui avait donné son nom à ce dimanche, avant le concile Vatican II, le dimanche de “Gaudete“ d’après le premier mot de l’introït, la prière d’ouverture : « Réjouissez-vous ! ».

Dans la première lecture, le prophète Isaïe déclare : « Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu.».

Le cantique, qui remplace le psaume, est le début du Magnificat : « Mon âme exalte le Seigneur »

Dans la deuxième lecture, saint Paul proclame : « Frères, soyez toujours dans la joie … »

Dans l’Évangile : Tiens, on ne parle par de joie ! Sans doute parce que tout l’Évangile, la Bonne Nouvelle apportée par Jésus, ne peut être que joie. Et ce n’est pas le pape François qui dira le contraire, lui qui a écrit l’exhortation  apostolique “ Evangelii gaudium“, la joie de l’Évangile.

Mais il y a un autre point commun à tous ces textes : tous les auteurs de ces textes ou ceux dont on parle sont des personnes dont la rencontre avec Dieu a changé la vie, les a remplis de joie, pas une joie superficielle qui pousse à rire, à faire le mariole, mais une joie qui se niche dans le fond du cœur, une joie intérieure, qui ne fait pas de bruit, mais qui déborde de ce cœur pour pousser à l’action, qui elle, fera du bruit, non pas du fait de l’auteur mais à cause des conséquences que cette action aura. Une joie dont l’origine est la découverte qu’ils sont aimés de Dieu, malgré leurs faiblesses ou leurs oppositions, malgré leur petitesse. Que Dieu a un dessein pour eux, et qu’ils l’acceptent par amour de Dieu en réponse à son amour.

Que la joie soit une conséquence de l’amour, et surtout d’un amour réciproque, ne surprendra personne, car c’est ce qui se passe entre les humains, entre époux et épouse, entre amis ou amies. Mais c’est sans doute plus difficile à réaliser entre un humain et Dieu.

Sans doute par ce que, bien souvent, nous ne nous rendons pas compte à quel point Dieu nous aime. Dieu n’est qu’amour, et il n’a de cesse que de partager cet amour. D’abord entre les trois personnes de la Sainte Trinité. Et puis avec toute la création, et surtout avec les humains qu’il a créés « à son image et ressemblance », insufflant son Esprit en nous.

Cet amour partagé de Dieu, Jésus a voulu qu’il soit étendu à tous les humains : « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés » grâce à l’action de l’Esprit.

Aussi, dans les conseils que Paul donne aux Thessaloniciens, qui sont tous importants, il en est un qui est essentiel : « N’éteignez pas l’Esprit ». Parce que sinon, il n’y a plus d’amour, d’amour vrai, d’amour agapè.

Il n’y a plus d’Évangile vécu.

Et si le pape François a mis en garde les prêtres pour qu’ils ne deviennent pas des mondains, des gens du monde, on peut étendre cette mise en garde à tous les chrétiens, tous les baptisés. Car un chrétien sans amour, amour vrai, profond, intérieur, ne peut être un vrai chrétien, ne peut être dans la joie, ne peut être dans la relation d’amour avec Dieu.

« N’éteignez par l’Esprit », afin « que le Dieu de la paix lui-même vous sanctifie tout entiers ; que votre esprit, votre âme et votre corps, soient tout entiers gardés sans reproche pour la venue de notre Seigneur Jésus Christ. ».

Seigneur Dieu,

l’amour que tu mets dans notre cœur

nous pousse à t’aimer

et à aimer aussi tous nos frères humains.

Mais garde-nous d’oublier ton Esprit Saint,

sinon le Malin mettra les ténèbres dans notre cœur.

Francis Cousin                     

 

 

                                    

                 

              

Pour accéder à une prière illustrée, cliquer sur le titre suivant : Prière dim avent B 3° A6

Si vous désirez une illustration du texte d’évangile commenté ce jour cliquer sur le lien suivant :  Parole d’évangile semaine 17-51




3ième Dimanche de l’Avent – Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

 

Lectures : Is 61, 1-2.10-11 ; 1 Th 5, 16-24 ; Jn 1, 6-8.19-28

 

 

« Qui es-tu donc ? » Je suis la voix, la voix qui crie dans le désert : « Préparez les chemins du Seigneur, aplanissez ses sentiers ! » C’est cette parole de l’Écriture que le chemin, le sentier de Dieu, Jean-Baptiste, a choisi pour dire qui il était à ceux qui l’interrogeaient. Peut-être que, pour en comprendre tout le sens, nous devons essayer de restituer cette parole du prophète Isaïe dans le contexte même où elle est née. En effet, je crains qu’en entendant cette parole nous n’ayons ce réflexe de nous dire qu’après tout, ce que le précurseur nous demande, c’est une sorte de préparation. Il faudrait que nous fassions un chemin, il faudrait que nous fassions la place à Dieu, comme si Dieu avait besoin d’une sorte de préparation, de préliminaires de la part de l’homme pour pouvoir intervenir dans sa propre vie.

Or, cet oracle du prophète Isaïe a été prononcé dans des circonstances très précises. C’est au moment où le peuple est en exil à Babylone, et l’exil, ça a été tout d’abord pour le peuple d’Israël un chemin de captivité, de souffrance et de marche très dure. Pour ce peuple qui vivait dans un pays très montagneux, les chemins étaient des sentiers qui reliaient entre elles les villes, les petites bourgades de Judée et de Samarie. Et voici qu’un jour, arraché à son propre pays, ce peuple, conduit par des soldats, par des gardiens, a dû s’avancer sur les routes d’un immense empire ; des routes qui n’étaient plus simplement des pistes caravanières, mais de grands itinéraires militaires de l’empire assyrien qui venait de l’assaillir, de l’envahir.

Tout à coup, Israël a fait l’expérience d’un chemin qui dépassait infiniment ce qu’il pouvait se représenter et imaginer. Et, dans Babylone même, c’étaient ces grandes voies, ces grandes artères dans lesquelles on faisait des processions religieuses d’un très grand éclat, d’une très grande magnificence, au cours desquelles on promenait la statue du dieu. Pour Israël, cette expérience du chemin, de la route, était une expérience beaucoup plus grandiose et en même temps cruelle, car ces routes qui n’en finissaient pas de se dérouler à travers le désert, avaient été pour Israël, les routes de la souffrance, de l’exil, de l’expiation de son propre péché, de sa propre douleur, du fait que le peuple était déraciné, déporté, malheureux, mis à mort.

Voici qu’au milieu de cette souffrance et de ce dénuement d’Israël, une voix s’élève. C’est la voix d’un prophète, d’un frère qui console le peuple. Cette voix crie : « Dans le désert, maintenant, préparez un chemin au Seigneur ! » Ces chemins sont tellement grands que le peuple lui-même ne pense pas à les préparer de ses propres forces. « Préparez un chemin, frayez une voie pour votre Dieu », un chemin qui passera tout droit, par-dessus les montagnes et les aplanira, les nivellera, car maintenant ce ne sont plus les statues des dieux païens qui vont s’y promener, mais c’est Dieu Lui-même, le Dieu d’Israël qui va y passer.

Cette voix crie dans le désert. Il semble que c’est dans le désert que Dieu va passer. C’est dans ce désert et dans cet abandon que Dieu va passer au milieu de son peuple. Et le prophète réveille le cœur de ces hommes abattus, en exil, de ces hommes aux prises avec leur misère et leur dénuement, en leur disant : cette expérience du chemin que vous avez suivi de Jérusalem jusqu’ici à Babylone, dans la souffrance, dans des entraves et des fers, c’est l’expérience du chemin que vous avez vécue ici en voyant les grandes processions de ces dieux païens, de ces idoles. Maintenant, voici que, sur ce même chemin de péché, de misère et de détresse de ce peuple, c’est Dieu qui va passer et ouvrir la route. Pour dire cela, il n’y a pas de mots, pas de parole compréhensible, il n’y a qu’une voix, celle du prophète Isaïe, qui crie simplement, parce que ce qui se passe est indicible : avoir vécu un chemin, avoir marché sur le chemin dans la détresse, dans le désespoir, en pensant que tout était fini, et refaire le même chemin en sens inverse, dès maintenant, à la suite d’un Dieu qui ouvre le chemin Lui-même, à la suite d’un Dieu qui marche au devant de son peuple et qui l’entraîne, qui le reprend et qui le console, qui le reconduit dans Jérusalem là où tout avait été pillé, dévasté.

Il n’y a qu’une voix pour dire cela et c’est la voix du prophète. C’est cela qu’il veut dire : Dieu agit et Il veut que ce soit un « veilleur », un crieur public qui proclame, qui attire l’attention des hommes, qui leur dise : attention, voici quelque chose d’extraordinaire qui se passe, le chemin de votre détresse, le chemin de votre misère, ce chemin, c’est Dieu Lui-même, en personne, qui l’emprunte et qui vient parmi vous pour vous sauver.

Nous sommes dans un temps d’Avent, de conversion et le précurseur, Jean-Baptiste est la figure de cet homme, de cette voix qui crie simplement les merveilles de Dieu. Je voudrais faire appel à une expérience que vous avez tous plus ou moins faite. C’est l’expérience de cet abandon, de ce silence que nous sentons de temps à autre, régulièrement dans notre cœur, lorsque nous revenons en nous-mêmes, sur nos propres péchés. Au fond, lorsque nous nous regardons, lorsque nous regardons ce chemin de notre vie, nous sommes souvent extrêmement déçus et très désemparés, et nous avons toujours une tentation, celle de nous dire que sur ce chemin, nous n’avançons jamais, nous piétinons. Nous avons beau faire des efforts, nous avons beau nous dire que sur tel et tel point il faut faire un pas, nous sentons fort bien que sur ce chemin de notre vie, nous sommes comme le peuple en exil ; nous marchons, mais nous marchons courbés, écrasés de peine et de chaleur, et au fond, nous ne marchons qu’à coups de trique, qui sont les événements de la vie et qui nous forcent à faire un pas et encore un autre. C’est le chemin de notre péché, de notre solitude. Il n’est pas étonnant que livrés seuls, abandonnés sur ce chemin, nous ayons l’impression de piétiner et de faire du sur place.

Pourtant, ce que Dieu vient nous dire par la voix de Jean-Baptiste et par celle de son prophète Isaïe, c’est que tant que nous ne considérons que ce chemin et nul autre, tant que nous pensons que c’est à nous d’avancer et de faire un pas puis encore un pas, nous serons toujours livrés à une très grande solitude et à notre grand abandon. Tant que nous n’aurons pas compris que ce chemin de péché, de détresse et d’abandon, est précisément ce chemin-là que Dieu vient emprunter et découvrir en nous, ce chemin par lequel Il veut se frayer un nouveau passage jusqu’à nous, tant que nous n’aurons pas saisi cela, nous serons toujours en proie à cette tentation de désespoir, d’abandon et de solitude. Ce qui est extraordinaire, c’est que Dieu ait choisi de venir marcher sur ces chemins qu’Il se fraye Lui-même dans notre cœur, ces chemins par lesquels Il marche dans le désert de nos solitudes et de nos abandons. La plus grande tentation de notre vie chrétienne est de ne pas voir que c’est Dieu qui nous fait avancer et qu’Il marche sur un très grand chemin, une voie qui a aplani toutes les montagnes. Et lorsque nous comparons nos modestes pas à ses grandes enjambées, nous ne sommes pas dignes ni capables de dénouer la courroie de ses sandales, nous ne pouvons pas marcher au rythme de Dieu et nous avons tendance à nous désespérer et à nous dire que nous n’y arriverons jamais. C’est là, peut-être, la tentation la plus subtile de notre vie de conversion : croire que nous ne ferons jamais vraiment ce pas qui nous donnerait la satisfaction de nous dire que nous avons avancé.

Si nous constations que nous avançons, ce serait le fruit de notre péché, car, à ce moment-là, cela voudrait dire que nous avons pris comme mesure, non le pas de Dieu qui avance à nos côtés, mais nos propres actions et nos propres désirs : ce serait d’une certaine manière le commencement de la fin. Si nous avions l’impression que nous avançons, que nous progressons, et que, peu à peu, nous acquérons ce progrès spirituel dont nous pourrions être très fier, c’est alors que nous nous ferions une illusion terrible et qu’au lieu de nous convertir en nous tournant vers Dieu, nous ne ferions que nous retourner sur nous-mêmes et nous enfermer un peu plus dans notre péché. Marcher à la suite de Dieu n’est pas facile. Mais, au moins, qu’en marchant à la suite de Dieu, nous ne nous laissions pas ronger par cette illusion que nous n’avançons pas, que nous ne pouvons jamais faire de progrès. En réalité, c’est la vérité de la mise en route. C’est parce que Dieu est là sur notre chemin, qu’Il marche à nos côtés, que nous éprouvons effectivement cette difficulté à avancer. Mais c’est là une épreuve de vérité, car si Dieu nous fait marcher à son propre pas, si Dieu nous fait marcher dans cet infini et cet absolu de son amour, il n’est pas étonnant que nous ne soyons pas pleinement convertis. Amen.

 




2ième Dimanche de l’Avent – Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

 

Lectures : Is 40, 1-5.9-11 ; 2 P 3, 8-14 ; Mc 1, 1-8

 

« Consolez, consolez mon peuple, parlez au cœur de Jérusalem ». Nous célébrons, en ce deuxième dimanche de l’Avent, le mystère de notre enracinement dans l’histoire du salut, dans l’ancienne Alliance. C’est une fête de famille, la fête des ancêtres du Christ et par conséquent la fête de nos ancêtres. Nous célébrons ce dimanche avec saint Abraham, avec les saints patriarches, avec Moïse, avec David et avec tous les saints prophètes qui ont désiré voir le jour du Christ. « Ils l’ont vu, dit le Seigneur Jésus Lui-même, et ils se sont réjouis ».

C’est donc une fête de famille et je vous propose ce matin de méditer ensemble, quelques instants, sur une question qui pourra vous paraître oiseuse, mais pourtant très importante : Pourquoi le Seigneur a-t-Il voulu naître dans une famille humaine ? Pourquoi est-Il venu à la suite d’une longue histoire ? Cette question, des générations et des générations de chrétiens se la sont posée. Ils disaient : « Pourquoi le Seigneur est-Il venu si tard ? » En effet après cette énorme catastrophe du péché originel, on aurait pu imaginer que Dieu arrive tout de suite sur les lieux du désastre. Normalement quand on voit quelqu’un en grave danger, s’impose à nous le sens de l’urgence à lui porter secours. Or, on a l’impression que lorsque Dieu tire la leçon du péché originel et explique à Adam que, désormais, il lui faut travailler, Il se contente de donner une « bonne promesse », et qu’il faudra attendre très longtemps. Si encore Il avait tout de suite entrepris son plan de sauvetage ! Il a fait, pour ainsi dire, traîner l’affaire. Il a commencé avec Abraham, mais il a fallu des années de souffrance et de captivité en Egypte pour ensuite donner un pressentiment du salut véritable à travers la Pâque, l’Exode. Et puis, il a fallu conquérir la terre. Et ensuite Dieu a donné un roi qui était la figure prophétique du Messie. Il a fallu encore un exil : il a fallu que, d’une certaine manière, Israël soit anéanti. Israël avait perdu son autonomie politique, les structures théocratiques et royales de la monarchie, et même un véritable sacerdoce, et finalement, devant la détresse extrême et urgente, Dieu a fini par envoyer son Fils !

D’où la question : « Pourquoi si tard ? » Cette question n’est pas tout à fait hors de nos préoccupations d’hommes modernes. Aujourd’hui encore on se dit : « Le Seigneur est venu, le salut a été inauguré, c’est entendu : on y croit ». Mais en réalité, ce n’est pas si simple parce que le monde est un spectacle permanent de mal, de péchés et d’atrocités. Le Mal, le Prince de ce monde exerce encore un pouvoir réel sur ce monde, et à certains moments nous sommes brisés et déchirés et nous avons envie de dire à Dieu : « Tu as envoyé ton Fils. Le salut est acquis, la victoire est acquise. Mais en réalité, pourquoi le Fils ne viendrait-Il pas plus tôt que prévu ? Pourquoi n’est-Il pas là tout de suite ? Pourquoi la plénitude de la vie n’est-elle pas encore épanouie au cœur de notre existence ? »

Le fait de s’interroger sur la manière dont Dieu gère notre temps n’est pas une question tout à fait vaine. On pourrait même dire qu’être chrétien, c’est être comme ces prophètes et ces hommes d’Israël qui, obscurément, ont attendu la visite du Messie en criant : « Viens, Seigneur, déchire les cieux, viens ! Nous avons besoin que Tu sois parmi nous ». Un chrétien est un homme impatient de Dieu.

Alors pourquoi Dieu nous tient-Il en haleine comme cela ? J’ai une hypothèse à vous proposer. L’Ancien Testament est, me semble-t-il, le temps d’une grossesse. C’est le moment où Dieu a porté dans son sein son Enfant Bien-aimé Israël, et à travers Israël, Il portait en son sein Celui qui devait prendre définitivement figure humaine, Jésus le Christ venu dans notre chair, dans la chair d’Israël. Ce n’est pas moi qui invente cette image, c’est la Bible elle-même qui la donne : pour parler de l’amour de Dieu, elle utilise un mot qui désigne le sein maternel, les entrailles d’une mère, la matrice d’une mère. Dieu est un Etre dont l’amour pour les hommes vibre et résonne comme l’amour d’une mère pour son enfant. C’est quelque chose de prodigieux, car nous sommes tous bénéficiaires de cette première expérience. Dans ce temps de la gestation d’un enfant, à partir du moment même où l’embryon est formé, il se crée une communication et une communion permanentes entre l’enfant et sa mère. Et cette communion n’est pas d’ordre intellectuel, elle est à la fois affective, psychologique et charnelle. Une mère et son enfant dans son sein se comprennent charnellement. C’est à travers les soubresauts de l’enfant dans le sein de sa mère que la mère voit se transfigurer petit à petit son corps et son cœur de mère dans la tendresse, la joie d’être mère. Ainsi donc, dans ce temps mystérieux qui précède notre venue au monde se tissent et s’approfondissent déjà tous les éléments de nos futures relations humaines. Tout ce qui adviendra par la suite devra se greffer sur cette première communication vitale, à la fois psychologique, physiologique et spirituelle qui constitue le soubassement, les fondations humaines de notre être et de notre vie.

 Tel est, je crois, le sens de l’ancienne Alliance. Dieu, en laissant se former en Lui Israël, en laissant se former Israël dans son amour, le prépare tout à coup à une sorte d’accouchement. Le mystère de l’histoire de l’Ancien Testament, c’est la manière dont Dieu devient fécond d’une humanité nouvelle. Il la laisse grandir, pousser, germer, s’épanouir en son sein. Et Il la fait grandir en essayant d’établir et d’approfondir des liens de communion avec ce peuple qui, au début, est un seul homme, un seul germe, Abraham, et qui grandit à travers la multiplication des individus, comme il y a une multiplication cellulaire qui forme un homme depuis la conception jusqu’au moment où il devient un bébé pleinement formé et capable de quitter le sein de sa mère. Par le même procédé, Dieu forme un seul peuple, le peuple messianique, en le laissant mûrir à l’intérieur de son amour comme dans un sein maternel, ainsi la communication n’est pas d’abord purement intellectuelle. Dieu le fait vivre, lui communique sa vie, son sang, son amour dans une grande proximité et profondeur de communion : à travers le don de la vie qu’Il fait à Sara, à travers le don de la Loi qu’Il fait à Moïse pour tout le Peuple, à travers les prophéties messianiques qu’Il donne par les prophètes pour David et sa descendance, à travers les appels sans cesse renouvelés à la tendresse, à la miséricorde et à l’amour, Dieu façonne, Dieu crée, Dieu pétrit la chair d’Israël et en fait un peuple messianique. Tel est le sens de l’ancienne Alliance. Nous-mêmes, nous avons ou croyons avoir tellement « d’idées très hautes et très évoluées » que nous sommes choqués par l’attitude de ce peuple qui va conquérir la terre promise avec son épée et au prix du sang. Mais il ne s’agit pas de voir cela d’abord selon de purs préceptes moraux, il s’agit de voir comment Dieu est obligé d’enfanter, Dieu est obligé de laisser grandir dans le sein de son amour maternel ce peuple. Et pour cela il Lui faut protéger son peuple, comme une femme enceinte doit se protéger de l’influence de maladies qui pourraient gêner l’épanouissement de l’enfant qu’elle porte en son sein.

Mais arrive le moment, au bout de neuf mois l’enfant ne peut pas rester dans le sein de sa mère. Il se passe un événement terrible pour l’enfant et très éprouvant pour la mère, l’accouchement. C’est une rupture. Or lorsque le Christ vient, Il est le premier-né, le premier-né d’Israël, Celui qui ouvre le sein maternel pour qu’un peuple nouveau, transfiguré par Lui, puisse sortir du sein maternel qui était un peu comme une prison et qu’il puisse vivre au grand jour dans la liberté des enfants de Dieu.

La venue du Christ que nous allons bientôt fêter à Noël est le moment où commence l’accouchement d’un monde nouveau, accouchement qui commence non seulement lorsque la Vierge Marie met au monde son Enfant, mais qui continue, à travers le mystère de la mort, de la mise au tombeau d’où le Christ, à nouveau, comme d’un sein maternel, va jaillir, ressuscité au matin de sa Pâque. Il s’agit pour Dieu d’enfanter des cieux nouveaux et une terre nouvelle. C’est pourquoi nous vivons dans un temps difficile, dans ce moment où il s’agit de sortir d’un enfermement dans lequel on se sentait bien au chaud. Et quand un enfant se trouve dans le sein de sa mère, si on devait alors lui expliquer que dans quelques jours ou dans quelques heures, il lui faudra en sortir, je crois qu’il dirait : « Je me trouve très bien ici, il y fait bon, il y fait chaud, c’est tranquille et douillet, je n’ai absolument pas envie d’en sortir ! » Or, il faut sortir de cette condition première. Il faut que ce peuple de Dieu qui a été si douillettement et si profondément entretenu par cette communication vitale de la vie et de l’amour de Dieu, comme dans un sein maternel, passe par un véritable accouchement messianique.

Tel est le sens des chemins qu’il faut frayer, de la voix qui crie dans le désert : « Préparez un sentier ». Comme le petit enfant doit se frayer un chemin à travers le sein de sa mère pour arriver à la pleine autonomie de la vie filiale, il faut qu’Israël passe à travers l’épreuve douloureuse de la mort et de la résurrection. C’est pour ça que le Christ vient comme le premier-né, celui qui apprend à Israël à sortir de sa condition première pour arriver au plein épanouissement, à la pleine condition filiale, à vivre en vis-à-vis de Dieu dans la pleine autonomie et la pleine liberté que Dieu veut pour ses enfants. Cela est douloureux. Saint Pierre nous dit qu’il faut passer travers le feu.

Il ne faudrait pas croire que cet accouchement s’est passé simplement entre le temps où Jean-Baptiste a dit : « Préparez les chemins du Seigneur » et le moment où le Christ est mort et ressuscité. En réalité, ce monde dans lequel nous vivons n’en finit pas d’être accouché pour la véritable filiation. Comme l’a dit saint Paul : « Toute la création gémit dans les douleurs de l’enfantement ». Et c’est pour cela que nous vivons un monde si dur. A certains moments, nous souffrons comme une mère au moment du travail et de la mise au monde. Et nous sommes confrontés à de multiples dangers et difficultés, et nous avons peur d’avancer, nous manquons de foi.

Cependant, nous vivons ce temps de l’Avent et ce temps de l’attente pour entrer dans la vraie vie filiale. Et le Christ est là et nous dit : « Courage, toutes ces épreuves que vous vivez, tout ce temps difficile que vous traversez, tout ce temps de l’accouchement, c’est pour que vous parveniez à votre véritable condition d’enfants de Dieu ». Amen.




2ième Dimanche de l’Avent – Claude WON FAH HIN

 

2ème dimanche de l’Avent – Marc 1 1–8 – Année B

 

Le temps de l’Avent célèbre simultanément la venue du Christ à Bethléem, il y a deux mille ans, donc son incarnation, sa naissance et pour employer un langage populaire, c’est la préparation de Noël, et c’est aussi l’attente du second avènement, c’est-à-dire le retour du Christ à la fin des temps.  La plupart des gens d’aujourd’hui ne pense plus au retour du Christ, bien qu’il soit mentionné en de nombreux passages de la Bible. Et à l’époque de Pierre, des détracteurs commencent à décourager les fidèles en se moquant d’eux et en semant le doute, en accusant le Seigneur de retarder ce qu’il a promis, laissant ainsi entendre qu’en fin de compte, Il ne tiendra pas sa promesse. Or, pour Dieu, un jour est comme mille ans et mille ans est comme un jour. Cela signifie que Dieu peut présenter une chose comme très proche et parce que nous sommes dans le temps, nous allons comprendre que ce qu’il a promis cela va se faire assez rapidement, de notre vivant, alors que Dieu peut effectivement prendre son temps pour réaliser ce qu’Il a promis puisque, pour Dieu, un jour est comme mille ans. Lorsque pour nous c’est mille ans, pour Dieu c’est toujours « aujourd’hui ». Pour Dieu, il n’y a donc pas de retard dans l’accomplissement de ses promesses. Par contre ce qui est compris comme un retard chez les hommes n’est en réalité rien d’autre que la Miséricorde de Dieu. Puisque les hommes « ont la nuque raide », puisqu’ils continuent de se complaire dans le péché, qu’ils ne désirent pas au fond d’eux-mêmes se mettre véritablement à la suite de Dieu, Dieu retarde la seconde venue du Christ sur terre. A nos yeux, Dieu prend son temps pour le retour du Christ, non pas parce qu’il ne veut pas accomplir sa promesse mais parce qu’il attend que chacun de nous se convertisse (2P 3,9) : « il use de patience envers nous, voulant que personne ne périsse, mais que tous arrivent au repentir ». Le Seigneur dans sa grande miséricorde se montre patient envers nous. Il attend que nous soyons tous convertis afin que tous soient sauvés au moment de sa seconde venue sur terre. Mais comme personne ne connaît le moment du retour, il est sage de se convertir sérieusement et au plus vite. C’est dès maintenant qu’il faut se décider de changer afin de plaire au Christ et de faire sa volonté. Et ce qu’Il veut c’est que « nous aimons Dieu et notre prochain ». Et dans les deux cas, il s’agit de s’oublier soi-même et d’agir pour Dieu, pour la gloire de Dieu et en faveur du prochain. A chacun de voir comment il agit dans tout ce qu’il fait. Faire la volonté de Dieu, c’est-à-dire appliquer ses commandements d’amour doit être la première de nos préoccupations.

J’envoie mon messager en avant de toi pour préparer ta route. Jean Baptiste est ce messager qui prépare la route à la venue du Seigneur : « vient derrière moi Celui qui est plus fort que moi ». Et le lieu choisi n’est pas forcément là où il y a le plus de monde, c’est le désert. Il est la « voix de celui qui crie dans le désert : préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers ». La signification spirituelle de la notion du « désert », ce sont les « moments de solitude dans la prière, de réflexion, de méditation, d’effort pour se désencombrer de l’inutile ». La rencontre du Seigneur se fait dans le désert, c’est-à-dire retiré du monde même si on se trouve au milieu du monde, dans la solitude de la prière, dans le secret de la méditation, dans l’étude persévérante de la parole de Dieu, dans le silence de la contemplation, dans la joie secrète de s’abandonner à Dieu et de se vider de sa propre volonté afin de lui laisser toute sa place dans notre cœur pour que sa divine volonté s’accomplisse en nous. « Se retirer du monde au milieu du monde », « solitude de la prière », « secret de la méditation », « silence de la contemplation », toutes ces expressions indiquent que le rencontre avec le Seigneur se fait intérieurement en nous, dans le secret du cœur, et non pas sur l’apparence extérieure de « nos » actions. C’est à l’intérieur de nous-mêmes que nous devons « aplanir une route pour notre Dieu », que nous devons raser la montagne d’orgueil et d’égoïsme qui sont en nous, bien aplanir au rouleau compresseur nos péchés, nos langues qui sèment la zizanie, comme le dit souvent notre Pape François, écraser nos ambitions personnelles pour faire grandir l’Eglise, le bien commun, au sein de chaque groupe, de chaque communauté ou de chaque paroisse. Il nous faut aussi combler toute vallée, combler nos ignorances en renforçant nos connaissances de Dieu (plus nous connaissons Dieu, plus nous l’aimerons parce qu’en Lui, il n’y a pas de défauts) et ainsi éloigner de nous toutes sortes de superstitions ou de mal croyance des vérités divines et de l’Eglise, accepter de sacrifier son orgueil pour plaire au Seigneur en lui laissant toute la place dans notre cœur. C’est notre cœur qu’il faut aplanir afin d’y faire une route pour le Seigneur. C’est notre cœur qu’il faut combler avec la connaissance des vérités divines et l’amour de Dieu et non pas avec des ambitions personnelles et secrètes. C’est notre cœur que nous devons surveiller, et non pas ceux des autres, afin de le purifier et garder un lien constant avec le Seigneur et ne jamais s’éloigner de Lui. Car c’est seulement lorsque nous arriverons à garder constamment le lien avec le Seigneur, c’est-à-dire l’amour de Dieu en nous, que nous pouvons sans dommage nous tourner vers les autres afin de partager avec eux l’amour reçu de Dieu en notre cœur. Sinon, nous sèmerons plus de dégâts chez les autres même si nous n’en avons pas toujours conscience. C’est pourquoi, c’est notre cœur qu’il faut travailler afin de le libérer des péchés, qu’il devienne une route bien aplanie et bien propre pour Dieu, pour qu’il puisse le recevoir plus facilement, pour qu’il devienne plus accessible à Dieu.

Une des grandes grâces reçues au désert, c’est de comprendre que l’homme dépend de Dieu, que sans Lui on ne peut rien faire et donc qu’il faut tout faire pour que l’on reste dans la grâce de Dieu. C’est tout l’enseignement de l’Eglise qui se résume à dire qu’il faut « rester dans l’amour du Christ », ce qui nous ramène au premier commandement : « Tu adoreras Dieu seul et tu l’aimeras plus que tout ». C’est pourquoi, Jean Baptiste proclame un baptême pour la rémission des péchés pour être purifié et cette purification nous justifie, nous aligne sur Dieu, nous remet dans l’amour de Dieu et donc nous remet en lien avec Dieu. Mais il ne suffit pas d’être purifié un jour, il faut désirer constamment, avec la grâce de Dieu, enlever le mal qui se trouve en chacun de nous – pas chez les autres –  et c’est par la prière qu’on le fait. Si vous voulez enlever le mal chez les autres, vous pouvez le faire mais avec la langue, mais avec la prière, le jeûne, les messes et les sacrements. Et ce qu’a fait Jean Baptiste. Il n’a pas passé son temps à critiquer les gens, à dénicher leurs défauts, mais leur a dit qu’il faut se convertir par le baptême. Bien sûr son baptême n’a pas la même valeur que le baptême enseigné par Jésus, il en est parfaitement conscient, quand il dit Mc 1,8 : « Moi, je vous ai baptisés avec de l’eau, mais Lui vous baptisera avec l’Esprit Saint ». Jn3,3.5 : 3 Jésus lui répondit :  En vérité, en vérité, je te le dis, à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu.  5 … à moins de naître d’eau et d’Esprit, nul ne peut entrer dans le Royaume de Dieu ».

Naître d’eau et d’Esprit :

  • L’eau: On sait d’où elle vient et où elle va. L’eau ne va pas là où elle veut : elle suit les pentes et les ravines. C’est déjà insinuer que le baptême d’eau est forcément limité puisque l’eau ne va pas, par exemple, dans des lieux bien abrités sur les hauteurs. 

  • L’Esprit : Il est représenté par le souffle du vent et est totalement libre. L’esprit ne souffle pas que sur les eaux (Gn 1,2), il souffle où il veut. Autrement dit, l’action divine ne se limite pas seulement aux chrétiens, à ceux qui reçoivent les sacrements. L’Esprit de Dieu souffle aussi sur les non-chrétiens, les musulmans, les bouddhistes, les athées (parabole du Semeur), et sur tous ceux qui ne connaissent pas Dieu. Et Dieu veut que « tous les hommes soient sauvés» (1Tm 2 ,4). Le salut est donc offert à tous. Ep 2,8 : « Car c’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu ». Reste à savoir si chacun de nous veut être sauvé ou non.

  • En Jn 5,5-6, Jésus demande à une personne qui est infirme depuis trente-huit ans : « Veux-tu guérir ? ». A première vue, la question ne se pose pas, c’est l’évidence même qu’une personne malade même avec une simple toux voudrait guérir au plus vite. Mais cette question nous permet de comprendre que Jésus ne guérit pas de force sans l’avis des malades. Il veut notre coopération, notre accord. Il en est de même pour le salut. Dieu ne nous sauvera pas sans notre accord. Et notre accord implique nous appliquons les commandements de Dieu.

  • Des questions se posent alors et qui pourraient intéresser bon nombre de personnes :  

    • Ceux qui ne seront jamais baptisés, ceux qui ne connaîtront jamais le Christ, peuvent-ils être sauvés ?

      • Réponse : Oui !

    • Comment seront-ils sauvés ?

      • Réponse : encore par le baptême.

En fait, il y a « un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême » (Ep 4,5). Un seul baptême, mais 3 formes de ce même baptême[1] :

  • Le baptême d’eau et d’Esprit: c’est le baptême rituel qu’on fait dans l’Eglise.

  • Le baptême de sang: le martyr. Ceux qui sont martyrisés en raison de la foi, sans avoir reçu le baptême, sont baptisés par leur mort violente pour et avec le Christ. C’est le baptême qu’a vécu Jésus dans sa Passion. C’est le type même du baptême : Jésus donne sa vie pour sauver les pécheurs. C’est le vrai baptême de Jésus différent de celui reçu de Jean Baptiste parce que mourir pour sauver une vie, c’est le sommet de l’amour.

  • Le baptême de désir.

  • Lumen Gentium § 16: …Ceux qui, sans qu’il y ait de leur faute, ignorent l’Évangile du Christ et son Église, mais cherchent pourtant Dieu d’un cœur sincère et s’efforcent, sous l’influence de sa grâce, d’agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte, eux aussi peuvent arriver au salut éternel [33]. À ceux-là mêmes qui, sans faute de leur part, ne sont pas encore parvenus à une connaissance expresse de Dieu, mais travaillent, non sans la grâce divine, à avoir une vie droite, la divine Providence ne refuse pas les secours nécessaires à leur salut.

  • Gaudium et Spes 22-5: C’est le baptême de sincérité. « Cela (= le salut) ne vaut pas seulement pour ceux qui croient au Christ, mais bien pour tous les hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels, invisiblement, agit la grâce [38]. En effet, puisque le Christ est mort pour tous [39] et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal ». Grâce au sacrifice unique du Christ, tous les êtres humains peuvent donc bénéficier de la Miséricorde de Dieu, à condition qu’ils se montrent de bonne volonté dans le cœur desquels agit la grâce divine.

Ainsi, tout homme qui, ignorant l’Evangile du Christ et son Eglise, cherche, malgré tout, la vérité (la lumière, la sagesse, la paix) avec l’aide de la grâce, et fait la volonté de Dieu, autant qu’il la connaît, peut être sauvé. C’est le baptême de l’Esprit seul qui souffle où il veut et inspire à qui il veut, un commencement de bonne volonté. Il atteint tous ceux qui ne refusent pas obstinément ce qui leur parvient de lumière. Prions avec Marie pour qu’aucun être humain ne refuse Dieu.

[1] « CROIRE » – « Vivre la Foi dans les sacrements » – Th. Rey-Mermet – Droguet & Ardent – P.66.