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3ème Dimanche de l’Avent par le Diacre Jacques FOURNIER

« Es-tu celui qui dois venir ? »

(Mt 11, 2-11)

En ce temps-là, Jean le Baptiste entendit parler, dans sa prison, des œuvres réalisées par le Christ. Il lui envoya ses disciples et, par eux,
lui demanda : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »
Jésus leur répondit : « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez :
Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle.
Heureux celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute ! »
Tandis que les envoyés de Jean s’en allaient, Jésus se mit à dire aux foules à propos de Jean : « Qu’êtes-vous allés regarder au désert ? un roseau agité par le vent ?
Alors, qu’êtes-vous donc allés voir ? un homme habillé de façon raffinée ? Mais ceux qui portent de tels vêtements vivent dans les palais des rois.
Alors, qu’êtes-vous allés voir ? un prophète ? Oui, je vous le dis, et bien plus qu’un prophète.
C’est de lui qu’il est écrit : ‘Voici que j’envoie mon messager en avant de toi, pour préparer le chemin devant toi.’
Amen, je vous le dis : Parmi ceux qui sont nés d’une femme, personne ne s’est levé de plus grand que Jean le Baptiste ; et cependant le plus petit dans le royaume des Cieux est plus grand que lui. »

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« Es-tu celui qui doit venir ? » Mt 11,2-11

 Jean Baptiste était très différent de Jésus. « Il avait son vêtement fait de poils de chameau et un pagne de peau autour des reins » (Mt 3,4), comme le prophète Elie (2R 1,8). Jésus, Lui, avait un vêtement courant pour son époque, « une tunique sans couture, tissée d’une pièce à partir du haut » (Jn 19,23), et un manteau, avec des franges « dont la vue vous rappellera tous les commandements de Dieu » (Nb 15,37-39). Jésus se conformait donc à l’usage commun, même s’il dénonçait les abus de ceux qui, pour se faire remarquer, se font « des franges bien longues  » (Mt 23,5). Jean-Baptiste mangeait « des sauterelles et du miel sauvage » (Mt 3,4). Jésus, Lui, s’asseyait tout simplement là où il était invité et il mangeait bien à tel point que certains le traitaient de « glouton et d’ivrogne » (Mt 11,19). JeanBaptiste avait un discours quelque peu terrifiant, traitant ses auditeurs « d’engeance de vipères » et annonçant la venue de « la Colère prochaine » : « Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre donc qui ne produit pas de bon fruit va être coupé et jeté au feu » (Mt 3,8-10). Jésus, Lui, se présentait comme le Bon Pasteur, nommant ses adversaires « ses amis et ses voisins » (Lc 15,1-7). Et pour ce qui est de l’arbre qui ne produit pas de fruit, au Maître qui désirerait le couper parce qu’il use la terre pour rien, il répond : « Laisse-le cette année encore, le temps que je creuse tout autour et que je mette du fumier. Peut-être donnera-t-il des fruits à l’avenir… Sinon, tu le couperas » (Lc 13,6-9).
 On comprend que Jean-Baptiste, dans l’obscurité de son cachot, puisse être envahi par le doute : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Et Jésus cite le prophète Isaïe, ce même prophète avec lequel Jean-Baptiste s’était présenté autrefois comme étant celui qui « prépare les chemins du Seigneur » (Is 40,1-5). Non, il ne se trompe pas : « les aveugles qui voient » (Is 35,5-6) témoignent que « le Père nous arrache » avec son Fils et par Lui « à l’empire des ténèbres » et nous offre en surabondance « le pardon des péchés » (Col 1,11-14). Le pécheur blessé au plus profond de son être, si souvent « boiteux » dans son quotidien, se lève par la Puissance de l’Esprit et se met à marcher au Chemin de la Vie. L’oreille des « sourds » s’ouvre au murmure de la brise légère de ce même Esprit qui vient faire toutes choses nouvelles… La lèpre du péché est vaincue, la Bonne Nouvelle du « Père des Miséricordes » est annoncée aux pauvres de cœur qui acceptent de faire la vérité dans leur vie (2Co 1,3 ; Jn 3,21)… Les Ecritures s’accomplissent : le Messie met en œuvre la victoire de Dieu sur le mal…              
          DJF




2ième Dimanche de l’Avent par Francis COUSIN

« Convertissez-vous, car le Royaume des Cieux est tout proche. »

La prière intérieure

Convertissez-vous ! Cette phrase que Jean-Baptiste disait il y a deux mille ans à ceux qui venaient l’écouter dans le désert de Judée, là où on se retrouve seul face à Dieu, elle s’applique aussi aujourd’hui à chacun de nous, dans notre désert peuplé de gens, de marchandises et de désirs de toutes sortes.

La conversion, ce n’est pas d’abord changer de religion, mais c’est changer le regard de son cœur pour qu’il se tourne face à Dieu, pour qu’il l’écoute et en tire les conclusions nécessaires dans sa manière de vivre.

Déjà à l’époque, Jean-Baptiste disait :’’Je vous baptise dans l’eau, en vue de la conversion’’. Le baptême en lui-même ne sert à rien s’il n’est pas suivi d’une conversion, d’un retournement vers Dieu, si l’on ne change pas son cœur pour accueillir le Seigneur qui vient, le Messie. D’où les vifs reproches faits aux pharisiens et aux sadducéens, qui voyaient dans le baptême de Jean-Baptiste plus un rite que l’on fait comme tout le monde, mais en le laissant extérieur à soi, que comme une démarche de conversion, une mise en route pour préparer dans son cœur la venue du messie :’’Vous vous dites fils d’Abraham, mais l’important n’est pas d’où vous venez, mais ce que vous ferez. Engeance de Vipères ! …Produisez donc un fruit digne de la conversion’’. Une image qui sera reprise par Jésus :’’Un arbre bon ne peut pas donner de mauvais fruits, ni un arbre qui pourrit donner de beaux fruits’’ (Mt 7, 18), avec la même conclusion :’’Tout arbre qui ne donne pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu’’, montrant la continuité du message entre Jean-Baptiste et Jésus.

Convertissez-vous ! A chaque fois qu’on tourne son regard vers Jésus (ou Dieu), on est obligé de se reconnaître pécheur, vis-à-vis de lui et vis-à-vis des hommes, d’où l’importance de demander pardon à Dieu de nos péchés. Les célébrations pénitentielles vont bientôt commencer dans nos paroisses, et c’est l’occasion de faire cette démarche de réconciliation avec Dieu et les hommes en allant voir un prêtre pour qu’il nous donne le pardon au nom de Dieu. ’’Il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit’’ (Lc, 15,10). Cela fait aussi partie de la joie de Noël.

Convertissez-vous ! Dans ce temps de l’Avent préparatoire à Noël, il ne faudrait pas que cette préparation nous soit seulement extérieure, comme elle l’était pour les pharisiens et les sadducéens : choix des cadeaux, choix des menus, choix de la décoration de la maison (en oubliant parfois la crêche !) …

La conversion, c’est une affaire personnelle, qui regarde chacun, … mais qui est souvent bien plus facile à faire en s’aidant les uns les autres, en famille, en paroisse … en s’imprégnant de l’Écriture, de la Parole de Dieu :’’Les livres saints l’[ont] été pour nous instruire’’ (2° lecture), ’’Car la connaissance du Seigneur remplira le pays’’ (1° lecture) … et en se tournant vers les autres :’’Accueillez-vous donc les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis pour la Gloire de Dieu’’ ( 2° lecture).

En fait, les textes de ce dimanche ne nous préparent pas tellement à la venue de Jésus à Noël, mais ils nous mettent sur la route pour le retour de Jésus à la fin des temps.

Seigneur Jésus,

ta venue proche à Noël

nous invite à changer notre cœur

pour qu’il soit plus proche

de toi et des autres personnes.

Mais c’est aussi une démarche

qui m’engage tous les jours

en vue de ton retour à la fin des temps.

Francis Cousin




2ème Dimanche de l’Avent par le Diacre Jacques FOURNIER

« Repentez-vous »

(Mt 3, 1-12)

En ces jours-là, paraît Jean le Baptiste, qui proclame dans le désert de Judée :
« Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. »
Jean est celui que désignait la parole prononcée par le prophète Isaïe : ‘Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers.’
Lui, Jean, portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage.
Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain se rendaient auprès de lui,
et ils étaient baptisés par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés.
Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens se présenter à son baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ?
Produisez donc un fruit digne de la conversion.
N’allez pas dire en vous-mêmes : “Nous avons Abraham pour père” ; car, je vous le dis : des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham.
Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu.
Moi, je vous baptise dans l’eau, en vue de la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu.
Il tient dans sa main la pelle à vanner, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera son grain dans le grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas. »

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La première parole de Jean-Baptiste est identique à celle que Jésus dira au tout début de son ministère : « Repentez-vous, car le Royaume des Cieux est tout proche » (Mt 4,17).

            Le verbe grec employé ici, « métanoéô », signifie littéralement « connaître après », « prendre conscience de »… Et cette prise de conscience est la conséquence directe du fait que « le Royaume des Cieux est tout proche »,ce qui est vrai depuis la création du monde. L’Ancien Testament l’affirme, en effet, dès le neuvième chapitre de la Genèse en présentant Dieu comme vivant en « Alliance éternelle avec toute chair » (Gn 9,8-17).

            Or, avec Jésus et par Jésus, le Fils, il nous est donné de pouvoir prendre conscience que « Dieu Est Amour » (1Jn 4,8.16), ce qui se traduit dans la relation éternelle Père – Fils par ce fondement exprimé par St Jean : « Le Père aime le Fils et il a tout donné, il donne tout en sa main » (Jn 3,35), tout ce qu’il a (Jn 16,15 ; 17,10), tout ce qu’Il Est. Et c’est par ce Don total de Lui-même que le Père engendre éternellement le Fils en « Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière » (Crédo). Nous découvrons ainsi, avec le Fils, le propre de l’Amour : être Don total et gratuit de Lui-même pour la seule vie de l’autre, pour son seul bien… Ainsi, de toute éternité, le Père dit au Fils : « Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime » (Is 43,4). Et puisque je t’aime, je me donne totalement à toi, gratuitement, pour ton seul bien, pour la Plénitude de ta vie, pour ta joie… Tel est le fruit concret de l’Amour du Père que le Fils accueille de toute éternité, un Don qui l’engendre en Fils, qui lui donne d’Être ce qu’Il Est, et Il Est Dieu, « exultant de joie dans l’Esprit Saint », et ne cessant de dire « Je te bénis Père » pour ce que Tu Es, pour ton Amour (Lc 10,21)…

            Or St Jean nous dit aussi « Dieu Est Lumière » (1Jn 1,5). L’Amour étant Don gratuit de Lui-même, Dieu est donc, depuis le commencement du monde, « la Lumière véritable qui éclaire tout homme » (Jn 1,9)… Grâce à elle, l’homme de bonne volonté peut « prendre conscience » du mal qui habite sa vie, de son cœur qui n’est pas totalement tourné vers son Créateur et Père. Et si tel est le cas, il ne peut pas bien sûr accueillir pleinement ce Don qui ne cesse de jaillir de l’Amour, il ne peut pas être pleinement heureux car nous avons tous été créés pour trouver le vrai bonheur en nous laissant combler par ce Don de l’Amour. « Le Père Lui-même vous aime »… « Si tu savais le Don de Dieu » (Jn16,27 ; 4,10)…

            Alors, « repentez-vous », détournez-vous du mal, tournez-vous vers votre Dieu et Père, car il n’a qu’une seule Parole à nous dire : « Je t’ai créé gratuitement, par Amour. Je ne désire et ne poursuis que ton bien. Et tu le trouveras si tu acceptes de te détourner du mal et donc, au même moment, de te tourner vers moi de tout cœur pour te laisser combler par l’Amour, par le Don gratuit de l’Amour, par le Don de l’Esprit Saint. Telle est toute la mission de Jésus exprimée ici par Jean Baptiste : « Il vous baptisera dans l’Esprit Saint et le Feu » (Mt 3,11)…                                                                            DJF




1er Dimanche de l’Avent- Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Lectures : Isaïe 2, 1-5 ; Romains 13, 11-14 ; Matthieu 24, 37-44

 

Frères et sœurs,

Vous le savez c’est le moment. Mais le moment de quoi ? Cette toute petite phrase de saint Paul paraît un truisme. Pourtant elle est peut-être une clé pour comprendre la manière dont nous, chrétiens, nous vivons, existons dans l’histoire de ce monde.

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« C’est le moment ». Pardonnez-moi de vous traduire ce mot en grec, pour eux ce « moment », ce mot « kairos » a une petite connotation d’opportunité, de chance à saisir le moment favorable, le moment où tout peut se jouer. Par conséquent lorsque Paul dit : « C’est le moment », il n’est pas question de consulter nos agendas pour concilier et trouver un moment qui convienne à deux interlocuteurs. Non. C’est le moment, c’est-à-dire, c’est un moment de ce temps mais dans lequel peut surgir quelque chose que nous n’attendions absolument pas. C’est une réalité qui a complètement polarisé les premières communautés chrétiennes et c’est un peu dommage que nous en soyons moins préoccupés. Je m’explique.

Dans l’Ancien Testament, quand on annonçait la venue du Messie, quand on annonçait les temps nouveaux, par exemple dans la prophétie d’Isaïe de la première lecture, on dit ceci : « Il arrivera dans l’avenir que la montagne du temple du Seigneur sera placée à la cime des monts, dominera les collines, les nations afflueront vers elle ». Dans ce genre de prophétie et de réflexion, de quoi s’agit-il ? On vit dans la continuité de tous les événements historiques qui se déroulent les uns après les autres et à la fin, un peu comme la cerise sur le gâteau, il va y avoir le dessert : Israël qui en a vu de toutes les couleurs, qui a été déporté, maltraité, dispersé, méprisé, va enfin devenir le pôle et le centre de l’histoire. Mais dans tous ces cas-là, il y a une continuité entre les événements qu’on vit maintenant, et le moment final, la lutte finale si vous voulez ! Donc, il y a une sorte d’homogénéité de l’histoire qui fait que tout va changer, mais doit changer dans ce temps. C’est vrai que l’espérance messianique juive a toujours dit : tout va bien se passer, comme on le voit dans Isaïe. Mais il peut aussi être question d’une autre éventualité : ça va être une catastrophe, vous allez tous y passer et c’est toujours la même idée : l’histoire aura une fin, l’histoire arrivera à un terme par des événements historiques et il faut faire très attention à ce qui va se passer.

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Or, il est très probable que les premières communautés chrétiennes ont vu les choses exactement de la même manière. En effet presque spontanément, elles se sont ralliées à ces catégories dans lesquelles ils pensaient tous, cela faisait partie de l’air du temps du moins dans le monde juif de l’époque. Ils ont donc pensé que les temps messianiques étaient arrivés simplement, il y avait quelque chose qui ne collait pas : pourquoi Jésus reconnu Messie par la communauté, proclamé comme le Seigneur, pourquoi Jésus était-il ressuscité et pourquoi rien ne s’en suivait pour la destinée personnelle de chacun des disciples ? Si les disciples avaient adhéré, c’était parce qu’on leur disait : la fin des temps est arrivée, le Christ est ressuscité. Donc ils pensaient qu’il était intéressant de se rallier à ce Messie puisque la fin des temps ne pouvait être qu’imminente, et dans la stricte continuité de ce qui vient de se passer. La résurrection du Christ, c’est le commencement de la fin. Donc tous les événements qui doivent s’enchaîner doivent être petit à petit l’entrée dans ce moment historique de transformation du monde, de transformation de la création, de transformation de notre existence qui fait qu’enfin on va être dans la position privilégiée de ceux qui auront été du bon côté pour accueillir la puissance de transformation du monde inaugurée par la résurrection de Jésus.

Pour nous aujourd’hui ce sont des notions assez lointaines. Cela ne correspond à rien dans notre vie parce que nous aujourd’hui, nous ne vivons qu’avec l’histoire et une histoire dans laquelle de temps en temps on se dit que cela pourrait servir à une catastrophe, mais en fait, on pense plus volontiers : « pourvu que ça dure » comme disait Madame Bonaparte.

Comprenez bien ce que pouvait être l’espérance messianique. Il va y avoir quelque chose qui va sceller définitivement le geste inauguré par Jésus au matin de Pâques et cela ne peut pas tarder parce que sinon c’est une preuve qu’il n’était pas ressuscité. S’il faut attendre indéfiniment alors c’est un leurre d’annoncer la résurrection puisqu’elle ne vient pas. Quand vous relisez les épîtres de saint Paul, vous retrouvez cette idée presque à chaque page. Les gens lui disent : bon d’accord, tu nous annonces la résurrection mais tous nos amis sont morts, tu nous as annoncé la résurrection mais rien ne change, c’est toujours pareil. Alors quoi ? Tout l’effort de la prédication chrétienne a été de chercher pour trouver la véritable manière d’annoncer la résurrection. Il ne s’agissait pas simplement de convaincre les gens : un tel, Jésus Messie, est ressuscité. A la limite c’était très facile, dire qu’un monsieur était ressuscité à l’époque, on n’avait pas encore des visions aussi rationalistes que nous de la conception de la vie humaine. Dire qu’un personnage était ressuscité pouvait encore marcher. Cependant cela ne marchait pas partout parce que précisément à Athènes lorsque Paul a annoncé la résurrection des morts, tout le monde s’est esclaffé en disant : si tu crois qu’on a envie de ressusciter avec notre corps, tu nous raconteras cela une autre fois.

Mais dans le monde juif, proclamer une résurrection, il y avait tout un courant juif qui disait : oui, ce message, nous pouvons l’entendre. Dire que ce moment de la résurrection inaugurait un temps nouveau, on comprenait que ce temps allait se terminer. Et c’est pour cela je vous signale que la communauté de Jérusalem s’est considérablement appauvrie parce qu’à Jérusalem, l’idée de la fin des temps était évidente. Ils vendaient tous leurs biens, ils ne cultivaient plus, ils ne travaillaient plus parce qu’ils se disaient : puisque ce temps nouveau va arriver assez rapidement ce n’est pas la peine de se casser la tête, il suffit d’attendre. C’est comme çà que les habitants de Jérusalem qui avaient des prairies, des propriétés ont tout gaspillé en soupe populaire en vendant leurs biens et en les rapportant aux pieds des apôtres. On en a fait après une chose idéale mais sur le moment c’était loin d’être une situation idéale parce que la communauté s’est radicalement appauvrie. Et pourquoi ont-ils agi de cette manière ? Parce qu’ils étaient persuadés que tout allait changer dans le quart d’heure qui venait.

homme en prière1Donc l’effort des prédicateurs chrétiens a été de faire comprendre -et cela n’a pas été facile- que le moment était venu, oui, mais pas venu comme ils pensaient ou comme on pouvait imaginer. Le moment était venu certes, la fin des temps était arrivée, c’était clair. Tout le Nouveau Testament veut transmettre ce message : quand on dit que Jésus est ressuscité, et que la fin des temps est arrivée, mais la fin des temps coïncide, est en étroite corrélation permanente avec le temps tel que nous le vivons maintenant. Il n’y a pas une histoire qui va finir, il y a superposition, implication, imbrication l’une dans l’autre de deux temporalités. La temporalité dans laquelle on est, au jour le jour, mais en même temps une autre temporalité qui est d’un autre ordre : c’est la présence du Christ ressuscité qui inaugure réellement l’éternité. Ce n’est pas passé du premier coup. Et quel thème a-t-il fallu trouver pour essayer d’expliciter la situation ? Le thème majeur a été la vigilance. C’et ce qu’on entend à travers une parole que Jésus déjà d’ailleurs a mis en évidence : au jour de Noé il s’est passé quelque chose que personne n’attendait. Mais précisément ce qui est intéressant c’est que personne n’attendait au moment où cela se passait, et cela s’est passé jusqu’au moment où Noé entre dans l’arche. C’est-à-dire, il y avait déjà un secret dans les jours de Noé, une sorte de double temporalité : l’insouciance tranquille, on mangeait, on buvait, on se mariait et ce, pendant la préparation du cataclysme. Et évidemment qu’à ce moment-là Jésus prend bien soin de montrer que dans les deux temporalités, la deuxième a surgi comme un coup de tonnerre, c’est le cas de le dire pour le déluge, et elle a anéanti les espérances du temps précédent. Ce que Jésus voulait montrer, c’est la coexistence des deux : le temps ordinaire que nous vivons jour après jour, et le surgissement caché de quelque chose qui est d’un autre ordre et qui change tout, même ce temps ordinaire.

C’est le temps chrétien. Dans le temps chrétien, on est un peu schizophrène c’est-à-dire qu’il y a à la fois le fait que nous devions vivre comme Jésus nous le demande, comme Paul nous le demande, c’est-à-dire c’est le moment, vivre en face du moment présent et l’assumer totalement, vivre vraiment dans l’histoire, mais chaque fois avec une sorte de point d’interrogation. Quand c’est le moment, c’est le moment de quoi ? C’est le moment du surgissement de l’éternité. C’est cela qui a changé la conscience de vivre l’histoire telle que celle qu’on avait auparavant. Auparavant le temps était vraiment linéaire, même s’il était parfois aussi cyclique, peu importe, mais il était unidimensionnel, je crois qu’on peut dire çà et là il devient un temps peut-être pas en 3D mais en tous cas en 2D, en deux dimensions. C’est un temps dans lequel maintenant ce que nous vivons est riche d’une irruption inattendue. C’était vraiment la conviction pour les premiers chrétiens que désormais la manière dont ils vivaient dans l’histoire n’était plus comme avant. L’histoire était désormais minée de l’intérieur, habitée par la présence de l’éternité du Christ et de sa résurrection. Tout était changé. Auparavant et comme d’ailleurs un peu aujourd’hui nous sommes revenus à une sorte de néo-paganisme, auparavant on pensait que l’histoire seule avait ces possibilités. Chaque jour était riche du lendemain, mais c’était le jour précédent qui était riche du lendemain qui ressemblerait quand même beaucoup à hier. Tandis que là, ce n’est pas que le jour est riche du lendemain. Le jour est riche déjà maintenant, l’aujourd’hui, le moment est riche de l’éternité, c’est-à-dire de la puissance de la résurrection de Dieu au moment de l’histoire des hommes et de l’histoire du monde. D’où le fait que nous vivons une sorte de recul par rapport à l’histoire.

Nous ne sommes pas complètement immergés dans la chronologie que nous imposent les historiens ou les journaux selon nos lectures. Mais tout en étant complètement immergés dans cette histoire, qui peut prétendre être en dehors de l’histoire ? Personne. Mais nous savons que cette histoire porte en elle les possibilités incalculables que représente l’avènement de la résurrection du Christ. Il a fallu que les premières communautés chrétiennes apprennent que cette irruption de l’éternité n’était pas nécessairement quelque chose d’explosif. Elle ne pouvait surgir que par signes.

Et c’est là qu’est arrivé de façon claire et de plus en plus claire le sens des sacrements. Car qu’est-ce qu’un sacrement ? C’est de l’éternité du Christ ressuscité qui fait signe à l’intérieur de l’histoire. Et c’est pour cette raison que saint Paul -c’est le premier grand théoricien des sacrements-, explique que nous vivons dans un temps où nous avons toutes nos affaires mais : « Vous qui avez été baptisés dans le Christ, vous êtes déjà configurés au Christ mort et ressuscité ». Evidemment que cela changeait les choses pour eux ! Le baptême est le moment où un enfant entre dans le mystère de l’éternité tout en restant dans l’histoire avec nous et en la vivant avec nous. Voilà ce qu’est le sacrement. Le sacrement, c’est un signe de quelque chose. C’est le fait que dans un geste qui apparemment fait totalement partie de l’histoire, plonger un enfant dans une bassine d’eau ou lui verser quelques gouttes d’eau sur le front, des gestes très humains, très historiques, très simples, mais en réalité fait irruption à ce moment-là la plénitude du salut et donc la plénitude de la mort et de la résurrection du Christ.

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C’est tout le sens de l’Avent, de la liturgie, de la vie chrétienne : nous vivons vraiment l’histoire telle qu’elle est, avec tous les ennuis et tous les soucis, avec la crise, avec le gouvernement, avec tout ce que vous voulez, mais çà n’empêche qu’au cœur de tout cela, nous vivons sacramentellement l’éternité. Nous savons qu’aujourd’hui par exemple quand on est là ensemble pour cette eucharistie, nous posons le signe de l’irruption du Corps et du Sang du Christ ressuscité dans notre assemblée. Et c’est pour cela que la messe du dimanche n’est pas un problème simplement de pratique religieuse, c’est la reconnaissance dans le temps tel que nous le vivons et tel que nous l’expérimentons au jour le jour, d’un surgissement à travers le geste le plus humble qui soit, boire à une coupe et partager un morceau de pain et dire : c’est le surgissement de l’éternité dans l’existence que nous vivons maintenant.

Alors frères et sœurs, que cette entrée dans cette nouvelle année nous donne effectivement le goût de retrouver que ce que nous sommes en assemblée, en prière, en célébrant les sacrements, en catéchèse, dans la charité des frères, tout cela c’est le sacrement de l’éternité qui ressurgit au cœur même de l’histoire, de l’histoire de nos communautés, de leur enracinement dans tous les ennuis que nous connaissons avec le chômage, la vie sociale etc., mais déjà surgit le mystère de l’éternité car comme le dit saint Paul : « C’est le moment ». Amen.




1er Dimanche de l’Avent par le Diacre Jacques FOURNIER

« Veillez et priez »

(Mt 24, 37-44)

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« Comme il en fut aux jours de Noé, ainsi en sera-t-il lors de la venue du Fils de l’homme.
En ces jours-là, avant le déluge, on mangeait et on buvait, on prenait femme et on prenait mari, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ;
les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis : telle sera aussi la venue du Fils de l’homme.
Alors deux hommes seront aux champs : l’un sera pris, l’autre laissé.
Deux femmes seront au moulin en train de moudre : l’une sera prise, l’autre laissée.
Veillez donc, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient.
Comprenez-le bien : si le maître de maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait, il aurait veillé et n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison.
Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »

 

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Jésus évoque ici sa venue au dernier Jour du monde ou de notre vie… « Alors, on verra le Fils de l’Homme venant sur les nuées du ciel avec puissance et grande gloire ». Et il insiste sur la soudaineté imprévisible de cet évènement : on ne « se doute de rien jusqu’à » son arrivée… « Vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra », « c’est à l’heure où vous n’y pensez pas » qu’il arrivera…

            Tout est donc centré sur Lui : c’est Lui que tous les hommes découvriront, resplendissant de Lumière, car « Dieu est unique, unique aussi le médiateur entre Dieu et les hommes ». Nous verrons alors « le Christ Jésus, celui qui est mort, que dis‑je ? ressuscité, qui est à la droite de Dieu et qui intercède pour nous » (Rm 8,34 ; 1Jn 2,1-2) car « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés ». « Voilà ce qui est bon et ce qui plaît à Dieu notre Sauveur » (1Tm 2,3-6)… Jésus, vrai homme et vrai Dieu, l’exprimait lui aussi dans sa prière à son Père, juste avant sa Passion, alors qu’il regardait ses disciples et à travers eux tous les hommes : « Père, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi » (Jn 17,24)…

            Mais cette réalité du ciel que nous attendons dans l’espérance se propose chaque jour à nos cœurs dans la foi. En effet, Jésus disait encore : « Que votre cœur ne se trouble pas. Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures, sinon je vous l’aurais dit ; je vais vous préparer une place. Et quand je serai allé et que je vous aurai préparé une place, à nouveau je viendrai et je vous prendrai près de moi afin que là où je suis, vous aussi vous soyez » (Jn 14,1-3). Et où est Jésus, le Fils ? Uni de toute éternité à son Père dans la communion d’un même Esprit. Et c’est cet Esprit qu’il est venu nous communiquer gratuitement, par Amour, au nom de son Père, pour qu’en le recevant nous puissions « être » nous aussi « là où il est »… « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma Parole et mon Père l’aimera et nous viendrons vers lui et nous nous ferons une demeure chez lui », par l’Esprit et dans l’Esprit (Jn 14,23 et 17).

            Or cet Esprit est un Esprit de Lumière et de Paix… « N’éteignez donc pas l’Esprit… Vérifiez tout : ce qui est bon, retenez-le ; gardez-vous de toute espèce de mal » (1Th 5,19‑20), « veillez ! ». « Vivez dans la prière ; priez en tout temps dans l’Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable » (Ep 6,18). Et si « notre cœur venait à nous condamner », nous nous abandonnerions aussitôt entre les mains du « Père des Miséricordes », « car il est bien plus grand que notre cœur et il connaît tout » (1Jn 3,20).

DJF

 




33e dimanche ordinaire – Année C – Claude WON FAH HIN

Luc 21, 5-19

feu-de-dieu-600x400C’est Hérode le Grand qui, à partir de l’an 19 avant J.C.  avait commencé à rebâtir le Temple  qui n’avait été que modestement et rapidement restauré  au retour du peuple Juif de l’exil vers 538 avant J.C. Ce monument richement orné faisait la fierté du peuple juif, et voilà que Jésus annonce qu’il sera détruit. Autrement dit, tout ce que le peuple a construit de plus beau et de plus grandiose, sera détruit. L’homme s’attache à des choses grandioses qui seront toutes détruites : « viendront des jours où il ne restera pas pierre sur pierre, tout sera jeté bas ». Le bien matériel est une fausse sécurité. On passe son temps à essayer de bien vivre sur terre tout en oubliant qu’après la mort, il y a une autre vie pour l’éternité. Mais c’est maintenant qu’il faut se battre pour vivre heureux sur terre et dans l’éternité. Le Royaume de Dieu commence ici-bas avec le Christ et dans l’amour du prochain. Si l’on remet toujours pour « après », ou « à plus tard » pour s’occuper de sa vie spirituelle, ce « plus tard », ce sera trop tard car vous pourrez avoir un AVC dans les cinq minutes qui viennent. On est en train de se battre pour mener une belle vie éphémère sur terre,  et l’on risque de rater sa vie spirituelle dans le Christ qui nous donne déjà une vie éternelle. Il faut être réaliste devant la mort qui arrivera inéluctablement. Mieux vaut s’occuper sérieusement de sa propre relation au Christ au sein de l’Eglise, relation qui passe aussi par une bonne relation avec le prochain. Le Pape François dénonce ceux qui « se disent catholiques parce qu’ils vont à la messe, à ceux qui conçoivent le fait d’être catholique comme un statut et qui « en cachette, font leurs affaires » (« Méditations quotidiennes – P.304). A force de ne penser qu’à l’argent, de vivre pour l’argent, de ne parler que de l’argent et de richesse, on finit par en faire une idole puisque toute sa vie tourne autour de l’argent, ou encore des titres honorifiques, ou du pouvoir. 

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Et Le Pape François nous rappelle  (Méditations quotidiennes – P.305) : « L’argent devient une idole et on finit par lui rendre un culte. Jésus nous dit : tu ne peux servir à la fois l’idole de l’argent et la foi ». Ml 3,19 (première lecture d’aujourd’hui): « le Jour vient, brûlant comme un four. Ils seront de la paille, tous les arrogants et malfaisants; le Jour qui arrive les embrasera au point qu’il ne restera ni racine, ni rameau ». Et quand le Christ dit que « tout sera jeté bas », on commence à se poser la question : quand cela aura-t-il lieu et quel sera le signe que tout cela est sur le point d’arriver ?
Mais avant que ce jour n’arrive, Jésus nous demande d’être vigilant (v.8) : « Prenez garde de vous laisser abuser, car il en viendra beaucoup sous mon nom qui diront : c’est moi! et le temps est tout proche. N’allez pas à leur suite ». Et tout de suite, nous pensons à certaines sectes qui passent chez nous pour nous dire que la fin du monde est pour telle ou telle date. Elles vous diront que le « temps est proche », et qu’il faut se décider très vite pour faire partie des 144 000 élus, interprétation fausse et mal comprise. Même si vous ne connaissez pas grand-chose à la Bible, ne tenez aucun compte de toutes les citations bibliques que ces sectes peuvent vous débiter par cœur, car leur bible a été remaniée, faussée, tronquée, et forcément mal interprétée.
Mare à Vieille Place 2Ne quittez surtout pas l’Eglise catholique pour une secte. Ne suivez pas non plus ceux qui désobéissent à notre évêque pour fonder leur propre groupe de prière comme certaines personnes à Saint-Paul, à Saint-Joseph, et à Bois d’Olive qui tous servaient notre Eglise et maintenant, sortent de l’Eglise pour faire bande à part, c’est ce qu’on appelle l’apostasie (séparation, défection).  2 Th 2,3-4 : « Que personne ne vous séduise d’aucune manière. Auparavant doit venir l’apostasie et se révéler l’Homme impie, l’Etre perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant lui-même comme Dieu ». He 10,26-27 nous parle du danger de l’apostasie : « 26 … si nous péchons volontairement, après avoir reçu la connaissance de la vérité , il n’y a plus de sacrifice pour les péchés . 27 Il y a, au contraire, une perspective redoutable, celle du jugement et d’un courroux de feu qui doit dévorer les rebelles ». He 6, 4-6 : « 4 Il est impossible, en effet, pour ceux qui une fois ont été illuminés, qui ont goûté au don céleste, qui sont devenus participants de l’Esprit Saint, 5 qui ont goûté la belle parole de Dieu et les forces du monde à venir, 6 et qui néanmoins sont tombés, de les rénover une seconde fois en les amenant à la pénitence, alors qu’ils crucifient pour leur compte le Fils de Dieu et le bafouent publiquement ». Cette sévère mise en garde (et non une condamnation) nous rappelle que Seul le Christ est le Sauveur, et qu’il a des représentants sur terre que sont le Pape, les évêques et les prêtres. Si quelqu’un veut faire son chemin seul sans l’accord du prêtre, de l’évêque et du Pape, il se sépare de l’Eglise. Et nous n’avons surtout pas à les suivre. Sœur Faustine (§93) nous dit : « La vertu d’obéissance est tellement indispensable que, (même si la personne) faisait des bonnes actions en dehors de l’obéissance, elles deviendraient mauvaises ou sans mérite ».

envoi en mission

Concernant les faux prophètes, voici ce que dit Jr 14,14-17 : « 14 …Yahvé me dit : C’est le mensonge que ces prophètes prophétisent en mon nom; je ne les ai pas envoyés, je ne leur ai rien ordonné, je ne leur ai point parlé. 16 Quant aux gens à qui ils prophétisent, ils seront jetés dans les rues de Jérusalem, victimes de la famine et de l’épée; il n’y aura personne pour les enterrer, ni eux, ni leurs femmes, ni leurs fils, ni leurs filles. Je verserai sur eux leur méchanceté! (être privé de sépulture en Israël était perçu comme un mal horrible, faisant partie des châtiments dont on menaçait les impies) – Jr 23,16 : « N’écoutez pas les paroles de ces prophètes qui vous prophétisent; ils vous dupent, ils débitent les visions de leur cœur, rien qui vienne de la bouche de Yahvé ». Restez fidèles à la Parole de Dieu (Bible de Jérusalem) et aux dogmes de l’Eglise catholique, jetez ou brûlez les bibles faussées, falsifiées, et offertes par toutes les sectes, et surtout,  selon l’évangile d’aujourd’hui (v.8) « n’allez pas à leur suite ». Et si vous avez un doute sur l’Eglise Catholique ou si vous avez besoin de vous conforter sur les vérités révélées par le Christ à son Eglise, il faut venir vous former, entre autres au SEDIFOP. Cela consolidera votre foi et vous serez ancrés dans le Christ. Ne vous en faites pas pour la fin des temps de savoir quand cela se fera. Vivez tout simplement, jour après jour, votre vie dans la paix du Christ et ne tenez aucun compte de la date de la fin des temps. Parce que vivre constamment dans l’amour et la paix du Christ fera de vous, quelqu’un qui est toujours prêt pour le Royaume de Dieu, peu importe la date. N’ayez aucune peur des différentes annonces de la fin du monde, ce sera toujours faux car personne, à part Dieu, ne connaît cette date. Nous avons bien vu que la fin du monde annoncée à grand renfort de télévision pour le 21 décembre 2012 n’est pas arrivée. Et tout le monde a fini par rigoler car cette annonce des mayas était quasi scientifique.
Après avoir dénoncé les faux prophètes, Jésus dénonce la peur créée par les guerres, les tremblements de terre, les pestes, les famines, les phénomènes terrifiants, les persécutions, mais cela ne sera pas encore la fin. « Il faut que cela arrive d’abord ». Rappelons simplement que  cela arrive toujours depuis que le monde existe et que cela arrive sans cesse. Gardons la tête froide et restons toujours dans l’amour  du Christ. Ces versets de l’évangile d’aujourd’hui ont ce qu’on appelle un genre littéraire apocalyptique, une manière d’écrire, un style d’écriture voulu pour dire que Dieu est Maître de tout et donc aussi de l’Histoire, et que malgré les graves événements qui vont arriver, malgré les persécutions, malgré les dénonciations et les trahisons (v.16 : « vous serez livrés par vos père et mère, vos proches et vos amis »), malgré que vous serez haïs par tous (v.17), malgré tout cela, eh bien v.18, « pas un cheveu de votre tête ne se perdra », et au v.19  « c’est par votre constance », par votre persévérance dans la fidélité au Christ, par votre foi au Seigneur de la Vie « que vous sauverez vos vies » et que v.4 « vous n’aurez même pas besoin de préparer votre défense, car c’est le Christ lui-même qui vous donnera les armes de la sagesse pour vous défendre. Dieu est fidèle jusqu’au bout. Mettons notre confiance en Jésus.

Jésus Miséricordieux




33ième Dimanche du Temps Ordinaire- Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Lecture : Luc 21, 5-19

 

Comment vivons-nous le temps qui passe ?

 

Frères et sœurs,

Grand Ilet 8Il vous est peut-être arrivé ces derniers temps de prendre un peu de temps pour vous promener dans la nature. Il y a une sorte de calme, de silence imperceptible qui se fait dans toute chose, dans l’univers autour de nous, dans la nature qui se transforme lentement et inlassablement, dans cette beauté saisissante et insaisissable, dans cette douceur indéfinissable qui a déjà un relent de mort et d’apaisement. Cela se mêle à une sorte de paix et de calme intérieurs, au souvenir en ces temps-ci de ceux qui sont morts et que nous aimions tant, et au pressentiment que nous-mêmes, marchons très lentement vers notre demeure d’éternité. Et dans ces moments-là, qui n’ont pas en eux-mêmes une valeur spécifiquement religieuse, se pose à nous cette question : « Mais au fond, comment est-ce que je vis le temps qui passe ? »

Oui, frères et sœurs, comment vivons-nous le temps qui passe ? Et c’est peut-être avec cette question qu’il nous faut relire ce matin, les textes qui nous sont proposés. D’abord, ne vivrions-nous pas le temps qui passe comme un mouvement incessant dans lequel il n’y a aucune paix, aucun repos, dans une lutte permanente pour se ménager un temps de repos, puis un temps pour travailler, puis un temps de loisirs, un temps de vie de famille, un temps mesuré, découpé, haché, qui n’a plus aucune épaisseur, aucune intimité, un temps qui n’apporte aucune joie, un temps d’esclaves, un temps d’hommes et de femmes écrasés par un travail que nous nous fixons, un temps qui nous alourdit et qui nous asservit ? Ou bien, au contraire, ne vivrions-nous pas davantage comme ces chrétiens de Thessalonique auxquels l’apôtre Paul s’adresse ? Nous aurions tendance à nous dire qu’après tout, tout a une fin et que si tout a une fin, rien n’a d’importance. Ce n’est plus la peine de travailler, la fin des temps est proche. On peut tout laisser aller à vau l’eau. Et ce temps qui file entre nos doigts nous le laissons couler lentement dans la paresse, vers son néant et vers notre propre néant. Ou encore le temps ne serait-il pour nous une réalité insupportable, inacceptable, que nous ne voudrions pas voir en face parce qu’il affirme sans cesse au plus intime de nous-mêmes ce rappel de la mort. Et alors, le temps serait vécu comme une sorte de refoulement : ne pas voir en face que nous vivons dans le temps, ne pas regarder en face ce chemin d’aventure dans lequel nous nous engageons, et qui est tout à la fois fait de vie et de mort entremêlées.

horloge

C’est ici peut-être que la parole de Jésus nous rejoint en ce jour. Les disciples étaient fiers du Temple de Jérusalem, car ils avaient perçu obscurément, à travers les pierres de ce monument qui faisait l’orgueil d’un peuple, quelque chose de durable, de solide, comme la pierre défie le temps. Pour le peuple et les disciples qui s’extasient devant le Temple, c’est le symbole même d’une sorte de pérennité. Vous avez déjà remarqué comme nous sommes saisis par la visite de ruines antiques, car ce sont des réalités de notre terre qui subsistent précisément parce qu’elles sont profondément enracinées dans notre terre, ce que nous voyons d’abord ce sont des fondations et cette force extraordinaire qui dépasse l’humain et qui s’élève vers le ciel. Songez aux fûts des piliers de nos cathédrales, aux colonnes des temples grecs, tout cet effort humain qui se hisse vers Dieu et qui défie le temps parce qu’il s’appuie sur la terre. Or, Jésus va directement à l’encontre d’une telle certitude et d’une telle sécurité : « Il n’en restera pas pierre sur pierre ». De tout ce que nous croyons fonder sur des réalités terrestres, de tout ce temps que nous croyons saisir pour le transformer en une fausse éternité, Jésus nous dit : « Il ne reste rien. Si vous continuez à vivre le temps sur le mode d’un refoulement et d’une résistance, vous ne verrez pas l’avènement du Jour du Seigneur. Si vous continuez à vous enfermer dans cette lutte incessante en calculant votre temps ou, au contraire, en le laissant filer entre vos doigts sans voir ce qu’il vous apporte, vous ne verrez pas l’avènement du Jour du Seigneur ». Car notre temps doit être vécu autrement que de cette manière toute humaine. Ce temps qui était source d’inquiétude, ou de lutte, ce temps qui engendrait en nous le sentiment de l’évanescence et du néant, voici qu’il est désormais rempli comme en creux, par une présence que nous ne soupçonnions pas, le voici devenu porteur de l’avènement du Fils de l’Homme.

lumière

Voilà pourquoi nous avons tant de mal à vivre notre temps chrétien. Nous le vivons de manière toute humaine, nous sommes aux prises avec des horaires et nous désespérons du temps, et nous le refusons. Jamais nous ne l’acceptons comme ce que Dieu en fait désormais pour nous : le porteur de la présence de Dieu. Chaque minute qui s’écoule, c’est Dieu qui vient, c’est l’éternité infinie de Dieu qui vient se glisser subrepticement là où normalement il devrait y avoir la mort et la désespérance. Et c’est dans ce creux et dans ce sentiment d’impuissance que Dieu se glisse avec douceur et en silence pour venir nous dire au cœur : « Je suis là ».

C’est pourquoi frères, si l’on vous dit qu’Il est ailleurs, qu’Il est en dehors de « maintenant », n’y allez pas, car Il est là maintenant dans votre cœur, Il se tient à la porte, et Il frappe.

Mais il ne faudrait pas croire pour autant que tout se passe dans une sorte de paix moite et de silence béat qui nous procureraient une fausse plénitude intérieure, une sorte de repos et d’ataraxie à l’instar de certaines religions orientales. Non, ce temps n’en reste pas moins un temps de lutte et d’épreuve, car si Dieu veut venir dans notre temps, il y a toutes les forces du monde en dehors de nous et au-dedans de nous qui se conjuguent et qui s’assemblent pour refuser cet avènement du Fils de l’Homme. Et c’est pourquoi nous sommes traînés devant les tribunaux, trahis par nos frères et nos sœurs, nous risquons la mort et les plus grandes épreuves parce qu’à travers ce temps, ce temps dans lequel Dieu veut s’infiltrer pour le saisir et le faire exploser de l’intérieur, par la splendeur et la douceur de sa lumière, ce temps est encore le lieu du combat contre tous les refoulements, tous les désirs de destruction des hommes contre toutes les insouciances, et tous les péchés du monde. Et il faut pour que Dieu fasse resplendir l’avènement de sa présence que ce combat soit livré au plus intime de nous-mêmes.

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Voilà comment devrait se déployer dans notre cœur et dans notre vie, le temps qui passe. Non pas une lutte désespérée qui n’a plus rien à attendre ni de Dieu ni des hommes ni de soi-même, mais comme un combat plein d’espérance. C’est vrai qu’il y a encore en nous le vieil homme qui se refuse à Dieu, c’est vrai qu’Il y a encore au cœur du monde et au cœur de notre existence à tous, toutes ces forces de mal, de mensonge et d’égoïsme qui se déchaînent ; mais c’est vrai aussi, et cela est peut-être plus difficile à accepter qu’on ne pense, qu’il y a cette présence de Dieu qui lutte et qui combat auprès de nous pour qu’en vérité son avènement, son jour puisse briller dans le cœur de tous les hommes.

Vous comprenez, frères et sœurs, pourquoi la lecture du prophète Malachie nous disait que « son jour » apporterait la guérison. C’est l’image de ce que nous sommes aujourd’hui : des êtres malades, blessés par le péché, blessés à mort par la mort, blessés par toutes les détresses que nous portons. Mais nous vivons déjà un temps de guérison. Voici que le Seigneur est « sorti » de son éternité, qu’il s’est penché vers nous pour se couler davantage dans notre temps, comme dans une blessure le baume qui guérit. Alors, si nous voulons savoir comment vivre le temps qui passe, il ne nous reste plus qu’un mot : l’espérance en l’amour du Seigneur. Amen.




33ieme Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

Triompher des épreuves avec le Christ

(Lc 21,5-19)

En ce temps-là, comme certains parlaient du Temple, des belles pierres et des ex-voto qui le décoraient, Jésus leur déclara :
« Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit. »
Ils lui demandèrent : « Maître, quand cela arrivera-t-il ? Et quel sera le signe que cela est sur le point d’arriver ? »
Jésus répondit : « Prenez garde de ne pas vous laisser égarer, car beaucoup viendront sous mon nom, et diront : “C’est moi”, ou encore : “Le moment est tout proche.” Ne marchez pas derrière eux !
Quand vous entendrez parler de guerres et de désordres, ne soyez pas terrifiés : il faut que cela arrive d’abord, mais ce ne sera pas aussitôt la fin. »
Alors Jésus ajouta : « On se dressera nation contre nation, royaume contre royaume.
Il y aura de grands tremblements de terre et, en divers lieux, des famines et des épidémies ; des phénomènes effrayants surviendront, et de grands signes venus du ciel. »
Mais avant tout cela, on portera la main sur vous et l’on vous persécutera ; on vous livrera aux synagogues et aux prisons, on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs, à cause de mon nom.
Cela vous amènera à rendre témoignage.
Mettez-vous donc dans l’esprit que vous n’avez pas à vous préoccuper de votre défense.
C’est moi qui vous donnerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront ni résister ni s’opposer.
Vous serez livrés même par vos parents, vos frères, votre famille et vos amis, et ils feront mettre à mort certains d’entre vous.
Vous serez détestés de tous, à cause de mon nom.
Mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu.
C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie. »

Jésus

 

            En 66, Israël se soulève contre l’occupant romain… Le 29 août 70, Titus, le fils de l’empereur Vespasien, prend la ville de Jérusalem… Le Temple est incendié, détruit, démantelé… Il est encore possible aujourd’hui de voir  les énormes pierres qui furent jetées au pied de ses murs d’enceinte… Les premières paroles de Jésus font ici allusion à cette catastrophe : « Il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera jeté bas »…

            A cette même époque, les Juifs qui n’avaient pas reconnu en Jésus le Messie, persécuteront leurs compatriotes devenus chrétiens. Le Grand Prêtre Caïphe avait en effet crié au blasphème lorsque Jésus avait fait allusion à sa dignité de rang divin (Mt 26,64-66). Etienne sera lapidé (Ac 7,55-60), Paul et ses compagnons « ravageaient l’Eglise ; allant de maison en maison, ils en arrachaient hommes et femmes et les jetaient en prison » (Ac 8,3). Les chrétiens seront exclus des synagogues. Nous en trouvons un écho dans l’Evangile de Jean écrit à la fin du 1° siècle : « Les parents (de l’aveugle né) avaient peur des Juifs ; car déjà les Juifs avaient convenus que, si quelqu’un reconnaissait Jésus pour le Christ, il serait exclu de la synagogue » (Jn 9,22). « On vous persécutera, on vous livrera aux synagogues et aux prisons », dit ici Jésus. « Vous serez livrés même par vos père et mère, vos frères, vos proches et vos amis ; on fera mourir plusieurs d’entre vous »…

            Mais les chrétiens persécutés pour leur foi ne seront pas abandonnés à eux-mêmes. « Ce sera l’occasion pour vous de rendre témoignage… Je vous inspirerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance ni contradiction », dit ici Jésus. « Quand on vous livrera, ne vous tourmentez donc pas pour savoir ce que vous direz ni comment vous le direz : ce que vous aurez à dire vous sera donné à cette heure-là. Car ce n’est pas vous qui parlerez, c’est l’Esprit de votre Père qui parlera en vous » (Mt 10,19-20). « Heureux alors serez-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi. Soyez dans la joie et l’allégresse », « car l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu repose sur vous » (Mt 5,11-12 ; 1P 4,14). Tel est en effet le grand cadeau que Dieu propose à tout homme de bonne volonté pour le soutenir, le réconforter, le consoler dans ses épreuves (2Co 1,3-7). Grâce à Lui, il est possible de traverser les difficultés, toujours pénibles humainement parlant, avec « quelque chose » qui, envers et contre tout, est de l’ordre de la joie, « la joie de l’Esprit Saint » (1Th 1,6).                                                  DJF




32ieme Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

La question de la Résurrection (Lc 20,27-38)

 

En ce temps-là, quelques sadducéens – ceux qui soutiennent qu’il n’y a pas de résurrection – s’approchèrent de Jésus
et l’interrogèrent : « Maître, Moïse nous a prescrit : ‘Si un homme a un frère qui meurt en laissant une épouse mais pas d’enfant, il doit épouser la veuve pour susciter une descendance à son frère.’
Or, il y avait sept frères : le premier se maria et mourut sans enfant ;
de même le deuxième,
puis le troisième épousèrent la veuve, et ainsi tous les sept : ils moururent sans laisser d’enfants.
Finalement la femme mourut aussi.
Eh bien, à la résurrection, cette femme-là, duquel d’entre eux sera-t-elle l’épouse, puisque les sept l’ont eue pour épouse ? »
Jésus leur répondit : « Les enfants de ce monde prennent femme et mari.
Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts ne prennent ni femme ni mari,
car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont enfants de Dieu et enfants de la résurrection.
Que les morts ressuscitent, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent, quand il appelle le Seigneur ‘le Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob.’
Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Tous, en effet, vivent pour lui. »

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Des Sadducéens, proches du Grand Prêtre, viennent trouver Jésus. Contrairement aux Pharisiens plutôt ouverts aux problèmes de leur temps, et donc aux idées nouvelles, les Sadducéens se réclamaient, eux, de l’immuable tradition des anciens. Ils n’acceptaient donc pas les Livres les plus récents, comme celui de Daniel ou ceux dits « des Maccabées », où commençait à émerger la foi en la résurrection des morts. Forts de leurs certitudes, ils viennent donc ici convaincre Jésus de l’absurdité d’une telle croyance…

Et cela semble si évident… Ils partent du Livre du Deutéronome, le Livre de la Loi par excellence : « Si des frères habitent ensemble et que l’un d’eux meurt sans avoir de fils, la femme du défunt n’appartiendra pas à un étranger, en dehors de la famille ; son beau-frère ira vers elle, la prendra pour femme et fera à son égard son devoir de beau-frère. Le premier fils qu’elle mettra au monde perpétuera le nom du frère qui est mort ; ainsi son nom ne sera pas effacé d’Israël » (Dt 25,5-6). Pour souligner encore le grotesque de la situation en cas de résurrection, ils envisagent le cas d’une femme qui aurait épousé sept frères puisque les uns après les autres seraient morts sans laisser d’enfants… « Eh bien, à la résurrection, cette femme, de qui sera-t-elle l’épouse puisque les sept l’ont eu pour femme ? » On imagine les rires et les moqueries…

Mais la résurrection n’est pas le retour à la vie d’ici-bas… Elle est « une recréation inimaginable, une transformation radicale de l’être humain » (Hugues Cousin) qui participera, selon sa condition de créature, tout comme les anges, à la Plénitude de la nature divine… La chair sera alors totalement assumée par l’Esprit, une réalité « tout autre » à l’image et ressemblance du Dieu Tout Autre… Le Christ Ressuscité, apparaissant au milieu de ses disciples, parfois non reconnu au premier abord (Lc 24,15-16 ; Jn 20,11-18 ; 21,4 ; 21,12), en sera un exemple déroutant pour notre raison raisonnante…

Et Jésus reprend ensuite le Nom de Dieu que les Sadducéens employaient le plus souvent, par fidélité aux anciens : « le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de JacobIl n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants », car « Dieu n’a pas fait la mort, il a tout créé pour l’être » et pour la vie (Sg 1,13-14). Moïse et Elie, « apparus en gloire » au jour de la Transfiguration du Christ, en sont le plus bel exemple (Lc 9,28-36)…

 

DJF

                          




32ième Dimanche du Temps Ordinaire- Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Lecture : Luc 20, 27-38

 

Je suis le Dieu des vivants

 

Frères et sœurs,

jugementmariageLe mariage est au service du patrimoine, donc il faut que le patrimoine reste dans la famille. Si un homme meurt sans descendance, il faut que le frère cadet se dévoue pour susciter une descendance. Cela faisait sans doute la joie des discussions théologiques des Sadducéens parce que c’était une prescription de Moïse, et cela apportait de l’eau au moulin des Sadducéens qui prétendaient qu’il n’y avait pas résurrection des morts comme Luc le rappelle. De l’autre côté, après avoir accompli le mariage, de qui la femme allait-elle être l’épouse ? Pour les Sadducéens, cela voulait tout simplement dire qu’il n’y avait pas de résurrection des morts. C’est plus simple de considérer que les lois mosaïques s’appliquent pour le monde présent, cela se termine normalement dans le monde présent, donc il n’y a pas de monde à venir. C’était une grande discussion à l’intérieur des différents mouvements et tendances spirituelles et théologiques juives à l’époque de Jésus, les Pharisiens croyaient à la résurrection des morts, tandis que les Sadducéens la niaient. Comme on sentait que Jésus avait plutôt un enseignement qui s’ouvrait à perspective de la résurrection des morts, les Sadducéens (il ne faut pas oublier qu’ils avaient beaucoup de pouvoir à Jérusalem), essaient de mettre Jésus en difficulté sur ce sujet.

Il y a une probabilité absolue pour que cette controverse se soit réalisée à peu près exactement comme elle est relatée par Luc. Vous pouvez consulter un certain nombre d’historiens, notamment John Paul Meier qui a écrit quatre mille pages sur les enseignements de Jésus, et vous constaterez que les controverses et les polémiques ont été enjolivées, mais celle-ci ne l’est pas du tout. Elle est d’une rigueur absolue et elle montre une empoignade assez violente. Le problème est grave, car si Jésus dit qu’il y a la résurrection des morts, il ne peut pas résoudre le cas pratique et s’il doit réfuter, il faut qu’il ait au moins une autorité aussi forte pour aller contre le précepte de Moïse dans la Loi. On ne peut pas jouer sur le sentiment. Il faut un argument venant de la Loi.

christ ressuscité

Jésus va répondre très nettement aux deux questions posées. La première question touche au mode de la résurrection : si on ressuscite, comment ressuscite-t-on ? La question des Sadducéens est comme un fusil à deux coups : que va-t-il se passer là-haut quand les sept frères vont retrouver la même femme ? Et ensuite, cela va-t-il vraiment se passer ? Il y a le mode et le fait. Le mode est le plus surprenant car la plupart du temps, on croit que Jésus élude la question en répondant qu’on peut donc penser que là-haut, on sera de purs esprits. Si c’était cela, la réponse ne serait pas très satisfaisante. Si nous ressuscitons, c’est dans notre corps, et pour Jésus et ses contemporains il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un corps sexué. Si l’on dit qu’on devient de purs esprits après la résurrection, on peut douter des sources de Jésus. A ce moment-là, la résurrection n’assure pas la continuité personnelle car notre sexualité fait partie de notre identité, donc il faudrait la supprimer. Il faut bien avouer que lorsque l’évangile est passé en tradition grecque et romaine, on s’est régalé du fait que nous allions devenir de purs esprits. Or, précisément dans la Bible les anges ne sont pas de purs esprits. Il y a deux indices fondamentaux pour prouver cela, dans le chapitre 6 de la Genèse (donc écrit mosaïque pour les auteurs de la controverse), on dit que les « fils des dieux sont venus séduire les filles des hommes ». Les fils des dieux, ce sont les anges. S’ils sont venus chercher les filles des hommes c’est qu’ils sont sexués. Cela fait un tel désordre que Dieu est obligé d’envoyer le déluge pour nettoyer la situation.

personne en méditationLa deuxième référence c’est la vision d’Isaïe au chapitre 6 : les séraphins ont chacun six ailes, deux pour se couvrir la face, deux pour se couvrir les pieds. Ici, les pieds désignent les organes sexuels. On ne s’imaginait pas les anges sur le mode d’êtres asexués. Tout le monde à l’époque de Jésus pensait que les anges étaient sexués. C’est le premier aspect de la réponse de Jésus. Si on devient comme les anges, qu’est-ce que cela change ? Pour Jésus, les anges sont des êtres sexués, mais ils vivent une sorte de consécration de célibataires pour Dieu. Là-haut, tout le monde serait au régime du célibat ! Non pas célibataire frustré, mais célibataire au sens de toute la puissance vitale que Dieu nous donne par la création, consacré désormais à la contemplation et à la louange de Dieu. Il admet une sorte de rupture, non pas une rupture d’identité, mais de finalité.

La réponse de Jésus est très simple et très belle, ce n’est pas que l’on perde son identité corporelle, mais dans son identité corporelle, toutes les forces d’humanité, de vie que nous avions seront désormais finalisées dans l’adoration et la contemplation du mystère de Dieu. Les sept hommes voulaient que la vie continue. Jésus leur certifie que la vie continuera mais au lieu d’être finalisée par la transmission patrimoniale par le fait d’avoir des enfants, ce sera immédiatement finalisé vers Dieu.

La femme et les sept frères seront complètement éblouis par l’amour de Dieu et ils ne se poseront même plus la question de savoir de qui ils ont été l’époux ou duquel des sept elle a été l’épouse. C’est une réponse assez subtile qui veut à la fois ménager la continuité de l’identité de chacun d’entre nous, mais elle montre que quand on est en présence immédiate de Dieu, c’est la plénitude même de tout notre être, y compris nos puissances affectives et notre sexualité qui sont complètement finalisées pour Dieu. Ce n’est pas une condamnation de la sexualité, contrairement à ce que l’on a parfois avancé. C’est l’idée que tout dans l’homme, y compris les capacités de transmission de vie vont être désormais finalisées par la contemplation de Dieu.

je suis la résurrection

La deuxième chose est encore plus forte. Jésus sait bien comment les Sadducéens ont manœuvré. Ils ne veulent pas simplement lui montrer un cas de casuistique impossible, ils veulent savoir si oui ou non la résurrection des morts aura lieu. Jésus, à cause de l’autorité de Moïse est obligé de répondre par un texte de la Loi. Ce texte n’est pas rien, c’est dans l’Exode au chapitre 3, versets 13-14, c’est au moment où Dieu se révèle à Moïse, le verset source de la Loi : « Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob ». Jésus fait sans doute une interprétation du texte la plus éblouissante qui soit, que les contemporains, soit juifs, soit chrétiens, avant Jésus ou après Jésus, n’ont jamais utilisée. C’est un cas absolument unique de l’interprétation du nom divin : « Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob » et Jésus ajoute, « le Dieu non pas des morts mais des vivants ». Que veut-il dire ? Quand Dieu se manifeste à Moïse, dans la chronologie classique telle qu’on l’utilisait à l’époque, il y avait trois cents ans que Abraham, Isaac et Jacob étaient morts.

Jésus leur dit : croyez-vous que Dieu aurait pu se présenter à Moïse comme le Dieu des vieux ancêtres sur les tombes desquelles on va déposer des fleurs au cimetière ? Dieu est-il le Dieu des morts, des tombes, des caveaux, des ossements ou est-il le Dieu des vivants ? Pourquoi Dieu a-t-il pris le soin au moment même où il se présentait à Moïse de se dénommer comme Dieu mais par rapport à des gens qui ont vécu trois cents ans avant Moïse ? On peut dire que c’est une manière de se repérer, comme un élément identitaire. Dieu se présente comme le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob vivants. Au moment où Moïse est vivant sur la terre, eux sont vivants auprès de Dieu dans le ciel.

résurection 1

Jésus propose ici une perspective sur la résurrection qui consiste à dire qu’à partir du moment où Dieu par la création a donné la vie, ce serait une contradiction pour lui de dire que les morts restent morts. Et cela, on ne l’avait jamais dit, c’est Jésus qui, le premier, l’affirme. Curieusement quand on lit toute la littérature et tous les commentaires des plus grands auteurs patristiques aucun d’entre eux ne souligne cet aspect. C’est ce qui est à la racine la plus profonde, puisque c’est dans doute une parole de Jésus lui-même, de ce que nous disons quand nous parlons de la résurrection générale ou du jugement général. Certes, nous chrétiens, nous confessons que Jésus est la source de la résurrection, mais il n’en est pas l’initiative. Dieu ne serait plus Dieu s’il ne faisait pas vivre tout homme créé au-delà de la mort.

C’est un texte unique sur la résurrection de l’humanité comme projet de Dieu. Jésus, à la faveur d’un texte qui apparemment n’a pas l’air de vouloir dire cela affirme que Dieu est le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob en tant que vivants. Vous ne pouvez pas d’une quelconque manière nier la résurrection sans nier Dieu. Vous méconnaissez l’être de Dieu si vous ne reconnaissez pas qu’un Dieu vivant est capable de faire vivre les gens au-delà de la mort. C’est plus large que la foi chrétienne, ce texte nous aide à comprendre toutes les tentatives dans les différentes cultures de l’humanité et les différentes religions pour penser la survie, l’après de la mort. Pourquoi y a-t-il quelque chose de si universel, sauf maintenant où l’on essaie de plus en plus de se cacher la mort parce qu’on ne veut pas se poser la question d’un au-delà ? Il faut bien avouer que notre civilisation contemporaine est le premier moment dans l’histoire de l’humanité où l’on veut absolument effacer la question de l’au-delà, en fait, toutes les croyances dans l’immortalité, la régénération, la métempsychose, toutes les formes d’expression, quelquefois un peu puériles et incohérentes cachent cette question. Le problème de la résurrection des morts, Dieu à partir du moment où il s’est engagé par création ne peut pas résilier ce contrat de la vie. C’est cela que Jésus veut dire aux Sadducéens.

C’est une ouverture universelle du salut, même si l’on ne croit pas en Jésus qui personnellement est le premier-né d’entre les morts, ce qui va être le cœur de l’annonce chrétienne. C’est Jésus qui est le moyen et le canal de cette résurrection, le fondement, et le fait même de la résurrection est affirmée de la façon la plus claire par Jésus lui-même. Amen.