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25ieme Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

«Dieu, seule Source du Bien véritable»

(Lc 16, 1-13)

Jésus disait encore aux disciples : « Un homme riche avait un gérant qui lui fut dénoncé comme dilapidant ses biens.
Il le convoqua et lui dit : “Qu’est-ce que j’apprends à ton sujet ? Rends-moi les comptes de ta gestion, car tu ne peux plus être mon gérant.”
Le gérant se dit en lui-même : “Que vais-je faire, puisque mon maître me retire la gestion ? Travailler la terre ? Je n’en ai pas la force. Mendier ? J’aurais honte.
Je sais ce que je vais faire, pour qu’une fois renvoyé de ma gérance, des gens m’accueillent chez eux.”
Il fit alors venir, un par un, ceux qui avaient des dettes envers son maître. Il demanda au premier : “Combien dois-tu à mon maître ?”
Il répondit : “Cent barils d’huile.” Le gérant lui dit : “Voici ton reçu ; vite, assieds-toi et écris cinquante.”
Puis il demanda à un autre : “Et toi, combien dois-tu ?” Il répondit : “Cent sacs de blé.” Le gérant lui dit : “Voici ton reçu, écris quatre-vingts.”
Le maître fit l’éloge de ce gérant malhonnête car il avait agi avec habileté ; en effet, les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière.
Eh bien moi, je vous le dis : Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles.
Celui qui est digne de confiance dans la moindre chose est digne de confiance aussi dans une grande. Celui qui est malhonnête dans la moindre chose est malhonnête aussi dans une grande.
Si donc vous n’avez pas été dignes de confiance pour l’argent malhonnête, qui vous confiera le bien véritable ?
Et si, pour ce qui est à autrui, vous n’avez pas été dignes de confiance, ce qui vous revient, qui vous le donnera ?
Aucun domestique ne peut servir deux maîtres : ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent. »

dieu-et-largent 

Formidable liberté de Jésus. Il prend ici un de nos si nombreux faits divers, un cas de malhonnêteté financière, pour inviter ses disciples à être « habiles ». Mais c’est clair, ce « gérant » est « trompeur » au même titre que « l’Argent trompeur » qu’il a servi au mépris de toute justice. Et l’appel de Jésus est sans équivoque : « Faites-vous des amis avec l’Argent trompeur, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles ». L’argent appartient à ce monde qui passe, et il passera avec lui… Par contre, l’amitié vraie est appelée à durer éternellement. L’argent doit donc être un instrument d’amitié au service de l’homme, car ici-bas, lui seul a « une âme immortelle » (CEC 990 ; 1022). Et si « tout passe, l’amour seul demeure » (Ste Thérèse d’Avila).

            Contrairement à ce gérant qu’il a pourtant pris en exemple, Jésus invite ensuite à « être digne de confiance » aussi bien dans « une toute petite affaire » que « dans une grande ». En effet, ce n’est pas « l’affaire » en elle-même qui est importante, mais la manière, l’état d’esprit, le cœur avec lequel elle est traitée. « Qui vole un œuf, vole un bœuf ». Dans l’un ou l’autre cas, il s’agit toujours d’un vol…

            « Si vous n’avez pas été dignes de confiance avec l’Argent trompeur, qui vous confiera le bien véritable ? » « Le bien véritable » est en définitive ce qui appartient au « Dieu véritable » (Jn 17,3 ; 1Th 1,9 ; 1Jn 5,20), ce qui lui est propre : la Plénitude de son Esprit qui Est Lumière et Vie. Dieu, qui « Est Esprit » (Jn 4,24), a en effet créé tout homme « esprit », lui donnant ainsi de partager sa condition éternelle et donc immortelle. Et il l’a créé « esprit » pour le combler de la Plénitude de son Esprit, gratuitement, par Amour. Puisque tel est le projet de Dieu, on peut dire que, de son côté, cet Esprit nous est déjà donné. Et il est déjà pleinement « nôtre » au sens où nous avons tous été faits pour Lui… Mais ce Trésor qui fera notre Bonheur éternel ne vient pas de nous : il est un Don de Dieu que nous sommes appelés à recevoir… Et ceci ne pourra se réaliser que si nous acceptons, en toute liberté, de nous tourner de tout cœur vers Lui et de nous laisser aimer, de nous laisser combler… Or, se tourner vers Dieu, c’est au même moment se détourner du mal, se convertir. Il ne peut en être autrement. D’où cette si belle formule de Jésus : « Si vous n’avez pas été dignes de confiance pour des biens étrangers », en ne gérant pas correctement les biens de ce monde, et donc en se détournant de cœur de Dieu, « le vôtre », ce Bien véritable qui est appelé à être pleinement vôtre, celui qui, du côté de Dieu vous est déjà donné, « qui vous le donnera ? »            DJF

          

           




Rencontre autour de l’Évangile – 25ieme dimanche du temps ordinaire

« Vous ne pouvez pas servir à la fois

Dieu et l’Argent »

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et comprenons les mots important (Luc 16, 1-13)            

            Il semble que la notion de « biens » ait servi à St Luc de fil conducteur : que nos biens ne nous empêchent pas de répondre à Dieu qui nous invite tous au Festin du Royaume (Lc 14,15-24). « Quiconque ne renonce pas à tous ses biens ne peut pas être mon disciple » (14,33). Puis le Père « partagera son bien » avec ses deux fils, et le plus jeune « dissipa son bien en vivant dans l’inconduite ». Mais le Père, en l’accueillant à son retour, lui donnera à nouveau autorité sur tous ses biens. « Tout ce qui est à moi est à toi » dit-il en fait à tous ses fils (15,11-32). Et l’enseignement se poursuit ici sur l’attitude juste à avoir vis-à-vis de l’argent.

 

Le sens des mots           

  • L’Evangile commence par l’image d’un homme riche et du gérant qui s’occupait de ses biens. Mais que faisait-il en fait ? Comment est-il appelé par la suite ? Noter l’expression pour la seconde partie de notre Evangile : de quoi n’a-t-il pas été digne ? Et quelle décision son maître prend-il à son égard ?

  • Ce gérant fait le bilan de ce qu’il sait faire… Que décide-t-il et dans quel but ? Quelle qualité Jésus désire-t-il ici mettre en valeur ? Qu’est-ce qui devient le plus important maintenant pour ce gérant : l’argent ou les relations humaines ? Et de fait, quelle invitation Jésus donne-t-il en conclusion ? Que suppose-t-elle sur les relations que nous avons commencé à construire ici-bas ?

  • Dans la seconde partie de l’Evangile, une expression revient quatre fois, laquelle ? A quoi Jésus nous appelle-t-il dans le concret de notre vie ?

            Jésus parle par deux fois « d’une petite affaire » puis « d’une grande », une fois de manière positive, une autre fois de manière négative. Puis il parle « de l’argent trompeur » et « du bien véritable ». D’après ce parallèle, quelle importance l’argent a-t-il à ses yeux ? Et quel est ce « bien véritable » ?     

            Noter ensuite les deux expressions qu’il emploie : « des biens étrangers », quels sont-ils ? « Le vôtre », à quoi cela renvoie-t-il ? En renversant cette phrase au sens positif, « le vôtre », notre vrai bien, qui nous le donnera ? Conclusion : l’homme peut-il s’accomplir tout seul, peut-il trouver le vrai bonheur par lui-même ? Dans quelle direction doit-il chercher et pourquoi ? On peut se souvenir de ce que le Père en Lc 15,11-32 disait à ses deux fils…

  • A travers l’argent, que cherche l’homme ? Pense-t-il alors à autre chose que lui‑même ? Comment qualifier une telle démarche ? Est-elle compatible avec la recherche de Dieu ? Si non, pourquoi ?

            

   

Pour l’animateur 

  • Le gérant « gaspillait les biens » de son maître. Jésus le qualifie de « gérant trompeur ». Il n’a pas été digne de confiance… Son maître décide de le licencier.

  •  Ce gérant n’a pas la force de travailler la terre, et il aurait trop honte de mendier. Il va continuer à tromper la confiance de son maître, une attitude que Jésus dénoncera fortement par la suite, mais il va se montrer « habile» en faisant en sorte que beaucoup « l’accueillent» quand il sera « renvoyé » : il leur fait cadeau d’une grande partie de leurs dettes. Bientôt, il n’aura plus d’argent : ce seront alors ses amis qui l’aideront.

            Jésus part de ce contexte négatif, encore une fois clairement dénoncé par la suite, pour nous inviter à mettre à la première place dans notre vie les relations humaines, pour qu’elles deviennent le plus possible des relations d’amitié et d’entraide… Mais si tel est le cas, s’entraider implique de savoir puiser dans ses biens pour aider l’autre. Le plus important devient alors celui que l’on peut aider et non le bien matériel que nous pouvons avoir… L’argent, nécessaire à la vie, ne doit pas devenir une fin en soi, mais il doit être mis au service des relations humaines, pour qu’elles soient vraiment humaines et d’amitié, chacun ayant le souci, dans la mesure du possible, du bien de l’autre…

            « Faites vous des amis avec l’argent trompeur »… L’amitié vraie, contrairement à l’argent, ne trompe pas, ne déçoit pas… Elle fait partie ici-bas des vrais biens de cette vie… Et si nos vrais amis nous accueilleront dans les demeures éternelles, Jésus souligne à quel point l’amitié vraie, l’amour vrai, a valeur d’éternité pour ce Royaume de Dieu où l’Amour seul règnera… Et nos relations vraies, construites ici-bas, continueront « là-haut » avec une Plénitude qui sera celle-là même de Dieu !

  • « Etre digne de confiance » intervient quatre fois, ce qui suppose de ne pas être « trompeur» (trois fois ici, deux fois précédemment). L’attitude du gérant est donc clairement condamnée par Jésus… Cet appel à la confiance rejoint tous les aspects de notre vie : les exemples concrets ne peuvent manquer !

            Pour Jésus, l’argent est « une petite affaire ». La « grande » est ce « bien véritable » que Dieu veut nous donner et pour lequel il nous a tous créés. Voilà pourquoi Jésus dit que c’est le « nôtre » au sens où nous ne serons pleinement nous-mêmes que lorsque ce « bien véritable » sera véritablement « nôtre ». Et quel est-il ? Rien de moins que ce que Dieu Est en Lui-même : Plénitude d’Amour (1Jn 4,8.16), d’Esprit (Jn 4,24), de Lumière (1Jn 1,5) et de Vie (Jn 1,4). Or « Dieu est Amour » et « aimer, c’est tout donner et se donner soi-même » (Ste Thérèse de Lisieux ; Jn 3,35), une expression à prendre pour Dieu au pied de la lettre. Dans son Amour, Dieu est éternellement Don de Lui-même… Et il nous a tous créés pour que nous soyons comblés par ce Don qu’il ne cesse de faire de Lui-même (cf. Lc 1,15.41.67 ; 4,1 ; Ac 4,8 ; 6,5 ; 9,17…).  

Nul ne peut donc s’accomplir par lui-même… Notre bien véritable ne peut venir que du Père qui nous le donne par Amour et il est heureux de nous le donner, pour notre plus grand bien. Ainsi Est l’Amour qui ne pense qu’au bien de l’autre et qui se réjouit que l’autre soit bien (So 3,17 ; Lc 15,7.10.23-24.32)…

  • A travers l’argent, l’homme se recherche lui-même, et cela parfois au détriment des autres… Ne penser qu’à soi-même : tel est l’égoïsme. L’Amour au contraire est ouverture à l’autre, pur regard vers l’autre dans la seule recherche de son bien. Ainsi est Dieu, Lui qui n’est qu’Amour et qui n’a qu’un seul désir : nous combler de ce qu’il Est en Lui-même, et cela pour notre seul Bien.

            Nous sommes pécheurs, blessés… Mais si nous acceptons de nous laisser aimer jour après jour, tels que nous sommes, ce Don, petit à petit, va nous guérir et nous apprendre à aimer, à nous ouvrir à l’Autre et aux autres dans la recherche de leur seul bien…

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

            « Je ne cesserai pas de les suivre pour leur faire du bien… Je trouverai ma joie à leur faire du bien ». «  Si tu savais le Don de Dieu et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire, c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’Eau Vive », l’Eau Vive de l’Esprit Saint dont le fruit dans les cœurs est « amour, joie, paix ». « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite ». « Convertissez-vous et croyez en la Bonne Nouvelle » (Jr 32,40-41 ; Jn 4,10 ; 7,37-39 ; Ga 5,22 ; Jn 15,11 ; Mc 1,15).

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS

La Parole aujourd’hui dans notre vie 

            – Jésus nous appelle ici à être « dignes de confiance » notamment pour ce qui est de gérer l’argent, et cela à notre travail, dans nos familles, nos communautés paroissiales. Avons-nous pris son appel au sérieux ?

            – Dans la gestion de notre vie quotidienne, n’y a-t-il pas du gâchis ou des dépenses inutiles que nous pourrions éviter ?

            – Avons-nous trouvé avec Jésus la joie de donner, de partager, de semer de la joie autour de nous ?

     

Ensemble prions 

Seigneur Jésus, toi qui es venu nous arracher à nos égoïsmes pour nous introduire dans ton Royaume d’Amour et de Paix, que le Don de ton Esprit et de ta Vie nous aide à ne rien préférer à ton Amour. Que ta grâce triomphe en nous de tout mal pour que nous trouvions avec toi la joie de nous donner sans retour. Par Jésus, le Christ, notre Seigneur. Amen.

 

 

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24ième Dimanche du Temps Ordinaire- Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Lecture : Luc 15, 1-32

 

brebis retrouvéFrères et sœurs,

Nous connaissons tous par cœur ces paraboles, nous les avons entendues dans toutes les célébrations pénitentielles, c’est presque ressassé, remâché, et j’imagine la difficulté de certains prédicateurs en se disant que ces paraboles déjà entendues pendant le temps du carême, doivent à nouveau être expliquées !

Je voudrais attirer votre attention sur un tout petit aspect auquel on prête rarement attention pour expliquer ces trois paraboles. Vous avez remarqué le contexte, c’est pour cela que c’est bien de lire ce chapitre de saint Luc en entier. Le contexte est clair : Jésus a largement commencé sa mission d’annonce du Royaume de Dieu. Jésus prend là un parti extrêmement audacieux et dangereux. Alors que Jean-Baptiste annonçait une venue de Dieu terrifiante en faisant venir les gens vers lui au Jourdain et les invitant à la conversion et à la pénitence, Jésus, et c’est son originalité, a pris exactement le contre-pied en allant voir les gens. Le risque de cette option est très simple : si Jésus va rencontrer les membres du peuple de Dieu, et même d’autres personnes étrangères au peuple de Dieu, il se risquait à rencontrer tout le monde, et par conséquent, d’être invité par tout le monde. C’est bien ce que fait remarquer l’introduction des trois paraboles : « Les pharisiens voyant qu’il était invité et qu’il répondait à l’invitation des pécheurs, font des remarques ». Ce n’est pas « casher » d’aller manger chez un percepteur d’impôts. On dit bien que Jésus allait chez les publicains et les pécheurs, c’est-à-dire les deux classes d’hommes publics les plus détestés de la population juive de l’époque.

Il est très difficile pour Jésus de se justifier, il faut qu’il y mette tout son génie de conteur et de sage pour ceux qui sont persuadés d’avoir raison, car ils ne reprochent pas à Jésus d’annoncer le Royaume de Dieu, ils ne contestent même pas les premiers signes de sa messianité, mais ils n’acceptent pas qu’il aille chez des pécheurs, des gens qui exploitent la société, des profiteurs qui se débrouillent au détriment de tout respect de la Loi et du vivre ensemble. Les trois paraboles ont un point commun que l’on ne souligne pas assez. Il faut expliquer cette chose paradoxale et choquante, que Jésus va chez les pécheurs sans poser de conditions.

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Pourquoi cette attitude ? C’est la pointe commune aux trois paraboles. Nous, comme nous avons orienté maintenant ces paraboles vers ce problème si difficile de la reconnaissance de notre péché, de la nécessité de demander pardon à Dieu, de faire cette démarche extrêmement désagréable qui consiste à raconter ses petites histoires à un prêtre, nous essayons de tirer la parabole du côté subjectif : que dois-je faire, moi qui suis le mouton perdu, la drachme perdue, le fils prodigue ? Nous utilisons cette parabole dans le sens de l’application subjective, qui fait insister davantage sur le fils perdu que sur les deux autres paraboles.

Que voulait donc dire Jésus à travers ces trois paraboles que Luc a très astucieusement réunies ? Le but est simple. Il y a cent brebis, s’il en manque une, rien ne va plus ; il y a dix drachmes, si l’une est perdue, rien ne va plus ; il y a deux fils, s’il y en a un qui part, rien ne va plus. C’est tout le problème de la parabole qui échappe à la compréhension des pharisiens. Jésus ne peut pas accepter d’annoncer le Royaume sans bouleverser, appeler, et rassembler tout le monde. Ces trois paraboles ont pour but de dire que le salut est non seulement une démarche individuelle mais c’est aussi une démarche qui nous introduit et nous restaure dans la plénitude du projet de Dieu qui était blessé par un élément absent.

miséricorde divine

Là, il y a quelque chose d’important qui peut nous aider à mieux saisir ce qu’est le pardon. Le deuxième élément commun de ces trois paraboles, consiste en ce qu’ils font la fête. Le berger qui revient avec sa brebis sur les épaules invite ses amis, la femme qui a retrouvé la drachme invite ses voisines, et le père fait une fête dans sa maison, et dès que le fils aîné reviendra des champs, il faut que lui aussi participe à la fête, mais la fin de la parabole est dramatique. Normalement, si vous faites un bilan et qu’il est bien égalisé, vous en êtes satisfait et c’est tout. Mais ici, au moment où arrive celui qui manque au banquet, cela provoque une sorte de débordement, c’est la fête. Ni le berger, ni la femme, ni le père ne peuvent se contenter de réintégrer leur bien. Le pardon n’est pas une opération blanche, la confession n’est pas une « mise en règle », c’est bien davantage. Ce n’est pas retourner à la situation antérieure, ce n’est pas un retour au début. La fragilité, l’échec temporaire, le manque, la perte, lorsqu’ils redeviennent des éléments du projet global, on fait la fête à cause de la globalité et de la totalité. Comment pourrait-on faire la fête quand on sait qu’il y a encore une brebis qui est en train de se perdre dans les buissons ? En revanche, quand ce qui manquait est réintégré à la plénitude du projet primitif de Dieu, alors pour Dieu, c’est la fête.

Ce que Jésus a voulu nous dire dans ces paraboles, hormis son exhortation à la pénitence et à la conversion, c’était de nous montrer que le pardon n’est que le moyen de réintégrer la plénitude du projet divin.

Quand les pécheurs font pénitence, pourquoi cela procure-t-il plus de joie à Dieu que ceux qui n’ont pas besoin de repentir, c’est parce que grâce à ce retour des pénitents qui est le fruit de sa grâce, il retrouve la plénitude de son projet. C’est comme si la totalité du peuple venait authentifier la vérité du projet primitif de Dieu. Quand on demande pardon, on ne se contente pas de rentrer dans le rang, c’est ce qui fait l’amertume du fils aîné. Le pardon vu du côté de Dieu est encore plus heureux pour celui qui pardonne que pour celui qui est pardonné. C’est toute la grandeur du mystère chrétien.

Ces paraboles sont révélatrices de notre cœur. Nous avons deux conceptions du pardon, l’une qui consiste à remettre les choses en place et à ranger la vaisselle dans l’armoire, ce qui n’est d’ailleurs pas méprisable, l’autre qui est ce que Jésus propose. Si le salut n’est pas la totalité, il manquera toujours quelque chose. Et la question demeure : comment Dieu voit-il l’enfer ? Comment Dieu voit-il le refus des hommes ? Il le voit certainement comme un manque, car si le salut n’est pas total et universel, il y aura comme une sorte de blessure même dans la joie du Royaume.

Frères et sœurs, nous n’en sommes pas là, mais ce qui compte pour l’instant, c’est que pour nous, lorsque nous faisons cette démarche de demande de pardon, c’est d’essayer de bien la resituer, de notre point de vue à nous, certes, mais du point de vue de la globalité et de la totalité du salut que Dieu veut pour tous les hommes. Amen.

miséricorde de dieu




24ieme Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

«Consentir à ce Dieu et Père

qui nous cherche tous»  (Lc 15, 1-32)

En ce temps-là,  les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter.
Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! »
Alors Jésus leur dit cette parabole :
« Si l’un de vous a cent brebis et qu’il en perd une, n’abandonne-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve ?
Quand il l’a retrouvée, il la prend sur ses épaules, tout joyeux,
et, de retour chez lui, il rassemble ses amis et ses voisins pour leur dire : “Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue !”
Je vous le dis : C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. »
Ou encore, si une femme a dix pièces d’argent et qu’elle en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu’àce qu’elle la retrouve ?
Quand elle l’a retrouvée, elle rassemble ses amies et ses voisines pour leur dire : “Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la pièce d’argent que j’avais perdue !”
Ainsi je vous le dis : Il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit. »
« Un homme avait deux fils.
Le plus jeune dit à son père : “Père, donne-moi la part de fortune qui me revient.” Et le père leur partagea ses biens.
Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait, et partit pour un pays lointain où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre.
Il avait tout dépensé, quand une grande famine survint dans ce pays, et il commença à se trouver dans le besoin.
Il alla s’engager auprès d’un habitant de ce pays, qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.
Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien.
Alors il rentra en lui-même et se dit : “Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim !
Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.
Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.”
Il se leva et s’en alla vers son père. Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de compassion ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers.
Le fils lui dit : “Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.”
Mais le père dit à ses serviteurs : “Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller, mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds,
allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons,
car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.” Et ils commencèrent à festoyer.
Or le fils aîné était aux champs. Quand il revint et fut près de la maison, il entendit la musique et les danses.
Appelant un des serviteurs, il s’informa de ce qui se passait.
Celui-ci répondit : “Ton frère est arrivé, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.”
Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d’entrer. Son père sortit le supplier.
Mais il répliqua à son père : “Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis.
Mais, quand ton fils que voilà est revenu après avoir dévoré ton bien avec des prostituées, tu as fait tuer pour lui le veau gras !”
Le père répondit : “Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi.
Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé !” »

 4ième dimanche de paques1

 

Dieu qui a l’initiative Trois récits s’enchaînent ici : la brebis « perdue » et « retrouvée »(Lc 15,4-7), la pièce de monnaie « perdue » et « retrouvée » (Lc 15,8-10), puis l’épisode de ce plus jeune fils qui, ayant choisi au début un chemin de perdition, décide de se repentir et de revenir chez son Père (Lc 15,11-32). Et ce dernier dira en l’accueillant les bras grands ouverts : « Mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ».

            Trois récits, et pourtant, juste avant le premier, St Luc écrit : « Jésus leur dit cette parabole », au singulier… Autrement dit, tout ce qui suit est comme une seule parabole. Ces trois récits renvoient donc à une seule et même réalité…

            Or, dans les deux premiers, le pasteur et la femme sont deux images qui renvoient à Dieu, ce « Père » qui nous aime avec des « entrailles » de Mère (Is 63,15‑17).Entre Dieu et l’homme pécheur qui l’a abandonné et si souvent offensé, c’est et qui, le premier, le « cherche avec soin, jusqu’à ce qu’il le retrouve ». Voilà comment il se comporte envers tout homme sur cette terre, car  « il veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4) ! Nous sommes donc tous des « cherchés par Dieu », des « voulus par Dieu », car il est notre Père à tous, un Père qui aime infiniment chacun de ses enfants. Non, « ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils en sacrifice de pardon pour nos péchés». (1Jn 4,10). « La preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous alors que nous étions encore pécheurs » (Rm 5,8).

            « Je ne cesserai pas de les suivre pour leur faire du bien, je trouverai ma joie à leur faire du bien » (Jr 32,40-41). Voilà ce que fait Dieu vis-à-vis de l’homme, quel qu’il soit, qui se perd dans les ténèbres de son péché… Et quand ce dernier dresse enfin l’oreille de son cœur, il ne peut qu’entendre la Voix de Celui qui n’a cessé de le suivre pour lui offrir toute sa Tendresse, son Amour et sa Miséricorde infinie… S’il accepte de se laisser rejoindre, de se laisser aimer tel qu’il est, il s’entendra dire alors : « Je t’ai suivi jusqu’à maintenant dans tous tes errements. Maintenant, lève-toi, détourne-toi de tout ce qui en fait te détruit, et suis-moi ! ». Et au même moment Dieu lui offrira la Force de son Esprit sans laquelle il ne peut rien… Avec Elle et par Elle, c’est Lui qui le portera et le ramènera à la Maison (les deux premiers récits). Mais rien ne se fera sans le consentement libre et responsable de ce fils perdu (le troisième récit), qui, une fois retrouvé par son Dieu et Père, décide de consentir à cet Amour qui le précède : « Je vais retourner chez mon Père, et je lui dirai : « Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi »… Et il se retrouvera aussitôt dans les bras de son Père, « couvert de baisers », et vite revêtu de « la plus belle robe » de la Maison du Père, celle du Père Lui-même, une Robe de Splendeur, de Majesté, de Lumière et de Gloire…             DJF

          

           




Rencontre autour de l’Évangile – 24ieme dimanche du temps ordinaire

« Dieu cherche le pécheur

et l’attend sur le seuil de sa Maison« 

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et comprenons les mots important (Luc 15, 1-10)            

            Jésus vient d’inviter celles et ceux qui désirent le suivre à l’humilité (Lc 14,7-11), à l’amour désintéressé (14,12-14), à mettre Dieu à la première place dans leur vie (14,15-33). Puis vient un appel à ne pas s’affadir (14,34-35). Mais tout homme est pécheur, blessé, marqué par la faiblesse et si souvent défaillant ! Heureusement, Jésus nous dévoile ici le Cœur de Dieu, et ce qui fait que l’impossible pour nous est malgré tout possible : une Miséricorde infinie…

 

Le sens des mots

Qui étaient « les Pharisiens », « les scribes », « les publicains » et  ceux que l’on regardait comme des « pécheurs » ?

            Bien noter qui est en relation avec qui, et si cette relation existe, en quoi consiste-t-elle ? Imaginer les circonstances de cette scène… A qui Jésus va-t-il s’adresser ici tout particulièrement ? Nous nous rappellerons la réponse ([).

            « Jésus leur dit cette parabole », le mot est au singulier. Or, combien de récits imagés vont suivre ? Comment donc devons-nous les considérer, séparément ou comme un tout ? Or, dans les deux premiers, qui cherche qui, qui va vers qui ? Et ceci est répété deux fois… Et dans le dernier, qui va vers qui ? Mais d’après ce que nous venons de dire sur l’ensemble du récit, si cette dernière attitude est possible, nous le devons en fait à qui ?

  • Relisons bien la première parabole. Dès qu’un homme se perd, quelle est l’unique réaction de Dieu, et cela jusqu’à quand ? Qui le ramène à la Maison ? Quelle est la seule attitude qui lui est alors demandée ? « Réjouissez-vous avec moi » : souvenons-nous de ([) ; à qui cet appel est-il lancé ? Comment Jésus qualifie-t-il ici, dans cette parabole, ceux qui sLa deuxième parabole i souvent s’opposent à Lui ?

            Entre Dieu et l’homme, qui offense qui ? Et pourtant, qui court après qui ? Rappelons-nous, qui ramène qui ? Et qui est le premier à se réjouir de ce retour ? Quel visage de Dieu pressent-on déjà ici ?

            Tout homme est pécheur (Rm 3,9-20 ; 3,23). Quelle réalité se cache derrière ces « quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion » ?

  • La deuxième parabole reprend la première. Mais comment Dieu apparaît-il ici ?

Il s’agissait auparavant de « chercher jusqu’à ce qu’il retrouve ». Quelle précision supplémentaire apparaît ici ? Un même message est donc répété deux fois. St Luc insiste : entre Dieu et l’homme, qui avant tout cherche qui ?

  • Dans le troisième récit, le fils demande, le Père donne… Quel message se cache derrière cette image ; dans la relation Dieu-homme, qu’est-ce que Dieu respecte infiniment ?

                Le fils abandonne le Père, dans quel état se retrouve-t-il ? Qu’est-ce qui motive son retour, l’amour du Père ? Quelle démarche accepte-t-il d’accomplir à son égard ? « Comme il était encore loin, son Père l’aperçut »… Qu’est-ce que cela suppose ? Que fait tout de suite le Père ? « Où » le fils dira-t-il donc cette phrase qu’il avait longuement préparée ? Mais le Père le coupe et l’empêche d’aller jusqu’au bout, pourquoi ? Dans quel « état » le fils se retrouve-t-il ensuite, et qu’a-t-il fait, lui, pour se retrouver ainsi ? La bague portait le sceau qui servait à signer : avec cette bague, que donne à nouveau le Père à son Fils ?

            Pourquoi le fils aîné se met-il en colère ? Pour lui, que mérite « ton fils que voilà » ? Et lui, que pense-t-il mériter et pourquoi ? Ce qu’il devrait recevoir, serait-il alors pour lui de l’ordre du salaire ou de l’ordre du Don gratuit de l’Amour ? Noter ce que le Père lui dit à propos de tous ses biens : dans quelle logique est-il, Lui ? Dans cet Evangile, qui sont ici « les fils aînés » ?

            

   

Pour l’animateur 

  • Les Pharisiens étaient des hommes comme tout le monde, mais ils voulaient pratiquer le mieux possible la Loi de Moïse et leurs traditions. Aussi vivaient-ils ensemble, séparés (sens du mot Pharisien en hébreu) des autres, étudiant la Loi chaque jour, et évitant tout contact avec les ‘impurs’…

Les scribes, appelés parfois « Docteurs de la Loi » étaient des spécialistes auxquels on s’adressait pour avoir des conseils sur une bonne pratique de la Loi.

Les Publicains étaient chargés de récolter l’impôt pour l’occupant romain. Ils étaient considérés comme impurs, car en contact avec des païens impurs. De plus, ils avaient la réputation d’être des voleurs…

Les pécheurs étaient les prostituées, les mendiants, les tanneurs travaillant sur des cadavres d’animaux, les pasteurs, les marchands ambulants, etc…

Jésus est en relation avec les Publicains et les pécheurs : il leur fait bon accueil, il mange avec eux et tous viennent à lui pour l’écouter. Les Pharisiens et les scribes n’ont aucune relation avec lui. Dehors, ils récriminent contre lui. C’est d’abord à eux que Jésus va s’adresser.

  •  « Une parabole », et pourtant trois récits suivront : ¬ la brebis perdue, ­la pièce d’argent perdue, et ® le retour du fils prodigue. L’ensemble forme donc une unité et renvoie à une seule et même réalité. Or, c’est d’abord Dieu qui part à la recherche de l’homme, et cela est dit deux fois (¬ et ­). Si le fils peut revenir (®) c’est donc d’abord parce que Dieu est parti à sa recherche et qu’il l’a retrouvé… Revenir à Dieu est donc un Don de Dieu, et cela demande pourtant du côté de l’homme l’entier consentement de sa liberté…

  • Un homme se perd ? Dieu part à sa recherche et cela jusqu’à ce qu’il le retrouve ! Et sa Patience est infinie ! Puis il le porte et le ramène à la Maison ! L’homme a juste à accepter de se laisser prendre et de se laisser porter…

            « Réjouissez-vous avec moi » : cet appel est lancé aux Pharisiens et aux scribes, les adversaires de Jésus qu’il appelle « ses amis et ses voisins » !

            C’est l’homme qui abandonne Dieu, et pourtant c’est Dieu qui court après lui, qui le ramène et se réjouit de son retour ! Dieu apparaît déjà ici, et ce sera pleinement le cas ensuite, comme un Père qui veut le salut de tout homme, son enfant. Son Bonheur ne sera plénier que lorsque tous les hommes seront sauvés, car telle est sa volonté (1Tm 2,3-6). Et tout ce que Dieu veut, il le fait (Ps 135(134),6)! Les soi-disant « justes » sont dans l’illusion de leur orgueil !

  • Dieu apparaît ensuite comme une femme ! Il est tout en même temps masculin et féminin. Il est un Père qui nous aime avec des Entrailles de Mère (Is 63,15-16). Et il nous « cherche» tous « avec soin »… C’est Dieu qui cherche l’homme !

  • Dieu respecte infiniment la liberté de chacun d’entre nous. Il ne fera rien sans notre consentement. Il ne nous forcera jamais à recevoir la Plénitude qu’il veut nous donner, pour laquelle il nous a créés et qui seule peut faire notre vrai bonheur. Il se tient à notre porte et il frappe, jusqu’à ce qu’elle s’ouvre (Ap 3,20) !

Ayant abandonné son Père, le fils est dans un état lamentable, privé de sa Gloire (Rm 3,23) et de sa Beauté. Il se sent mal, il a faim : son désir du Père est intéressé ! Mais il accepte de reconnaître son péché en vérité. Son Père l’attend, le guette, l’espère. En fait, nous l’avons vu, le Père est déjà présent à sa démarche car c’est Lui qui la rend possible ! Il est « bouleversé jusqu’au plus profond de lui-même » par sa détresse et sa souffrance. Il se jette à son cou, il le prend dans ses bras, il le couvre de baisers. Le fils expérimente alors à quel point il est aimé. Et c’est là qu’il va lui dire son péché, mais il sait qu’il est déjà pardonné. Le Père le coupe alors : il est son fils, pas question de le traiter comme un mercenaire. Vite, on le revêt du « plus beau vêtement » que l’on peut trouver dans la Maison du Père. Il appartient donc au Père Lui-même : « Revêtu de Magnificence, tu as pour manteau la Lumière » (Ps 104(103),2) ! Voilà ce que le Père veut faire pour tout homme ! Et le sceau révèle au fils que le Père lui donne à nouveau autorité sur tous ses biens ! « Tout ce qui est à moi est à toi » (cf. Jn 16,15 ; 17,10)…

            Son frère est en colère. Il représente ici les Pharisiens. Lui n’est pas dans la logique de l’Amour, mais dans celle du mérite et de l’orgueil : j’ai bien agi, je n’ai jamais désobéi à tes ordres, je mérite d’être récompensé. Lui, il a mal agi, il mérite d’être sévèrement puni ! Il a toujours obéi… à quoi, à son orgueil ? Manifestement pas à l’Amour, car par Amour, le Père lui avait déjà tout donné, « tout ce qui est à moi est à toi », et lui n’a pas même mangé un chevreau ! L’Amour demande à être accueilli gratuitement, car l’Amour n’a d’autre raison d’aimer que Lui-même !

       

Ensemble prions 

Seigneur, apprends-nous à t’aimer et à nous aimer les uns les autres comme Toi tu nous aimes ! Apprends-nous à accueillir ton Amour et avec Lui le Don de ton Esprit d’Amour que tu ne cesses de nous proposer…

 

 

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23ieme Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

«  Porter sa croix à la suite du Christ»

(Lc 14, 25-33)

     De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit :
« Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple.
Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple.
Quel est celui d’entre vous qui, voulant bâtir une tour, ne commence par s’asseoir pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi aller jusqu’au bout ?
Car, si jamais il pose les fondations et n’est pas capable d’achever, tous ceux qui le verront vont se moquer de lui :
“Voilà un homme qui a commencé à bâtir et n’a pas été capable d’achever !”
Et quel est le roi qui, partant en guerre contre un autre roi, ne commence par s’asseoir pour voir s’il peut, avec dix mille hommes, affronter l’autre qui marche contre lui avec vingt mille ?
S’il ne le peut pas, il envoie, pendant que l’autre est encore loin, une délégation pour demander les conditions de paix.
Ainsi donc, celui d’entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple.

 

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            « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple. »

            Notre traduction liturgique a tout de suite bien interprété le verbe employé ici par St Luc, « miséô, haïr », en le traduisant par « préférer ». Quand Dieu nous dit : « Honore ton père et ta mère » (Ex 20,12), et que Jésus se bat pour qu’il en soit vraiment ainsi (cf. Mc 7,8-13 ; Mt 19,16-22), il ne peut être question de les haïr ! De même pour mettre en pratique le cœur de la vie chrétienne, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mc 12,31), il est impensable de « haïr » sa propre vie.

            « Préférer » suppose l’existence de deux réalités entre lesquelles nous avons à choisir. Suivre le Christ, entrer avec Lui dans le Royaume de l’Amour, du Service, du Don de soi, suppose que l’on mette l’Amour de Dieu et toutes les exigences qui en découlent à la première place… Et comme nous sommes tous pécheurs, si nos proches les plus proches nous invitent à adopter une attitude contraire à celle de l’Evangile, il nous faudra choisir… A qui obéirons-nous ? Et nous savons bien que si nous montrons notre désaccord, nous pouvons être rejetés par ceux-là même que nous aimons le plus, ce qui sera, humainement parlant, une grande souffrance… Jésus en était bien conscient lorsqu’il disait, en pensant à ces cas précis : « Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre : je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. Oui, je suis venu séparer l’homme de son père, la fille de sa mère, la belle-fille de sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa propre maison » (Mt 10,34-36 ; Lc 12,51-53).

            Et puisque nous sommes tous pécheurs, des désirs égoïstes de toutes sortes, contraires bien sûr à l’Esprit de l’Evangile, peuvent naître en nos cœurs… Et le Christ nous invite ici sans ménagements à y renoncer, ce qui est toujours difficile pour notre être blessé… « Celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même », à son égoïsme, à son orgueil, à son amour propre, « qu’il prenne sa croix chaque jour et qu’il me suive » (Lc 9,23).

            Et par les deux paraboles qui suivent, Jésus nous invite à regarder bien en face toutes ces difficultés et les forces qui sont à notre disposition. Sur qui allons-nous compter pour mener un tel combat. Sur nous-mêmes ? Nous n’irons pas bien loin… Mais si nous nous appuyons, par la prière du cœur, sur le Christ et sur sa grâce (Mt 11,28-30), nous pouvons espérer, qu’envers et contre tout, ce vœu s’accomplira : « Seigneur, que ma faiblesse à ton service tienne bon » (Guillaume de St Thierry)…                                                                                                                                                                                                 DJF

 

           




Rencontre autour de l’Évangile – 23ieme dimanche du temps ordinaire

« Renoncer à tout pour le Christ« 

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et comprenons les mots important (Luc 14, 25-33)            

Jésus vient de donner un certain nombre de conseils à ses disciples : qu’ils soient humbles (Lc 14,7-11) et attentifs aux blessés de la vie (14,12-14)… Qu’ils ne laissent ni les biens matériels ni les plaisirs les détourner de l’essentiel : l’invitation que Dieu adresse à tous les hommes à partager son festin (14,15-24). Et l’appel de Jésus se fait ici encore plus radical !

 

Le sens des mots

  • Notre traduction liturgique a tout de suite bien interprété le verbe employé ici par St Luc, « miséô, haïr », en le traduisant par « préférer». Quand Dieu nous dit : « Honore ton père et ta mère » (Ex 20,12), et que Jésus se bat pour qu’il en soit vraiment ainsi (cf. Mc 7,8-13 ; Mt 19,16-22), il ne peut être question maintenant de les haïr ! De même pour mettre en pratique le cœur de la vie chrétienne, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Mc 12,31), il est impensable de se haïr soi‑même. Alors, que peut vouloir dire ce « préférer » ? Essayer de donner des exemples concrets.

  • Jésus aimait la vie… On le voit souvent invité par les uns et par les autres, accomplissant son premier signe en St Jean en offrant à une noce plus de 800 litres de « bon vin » (Jn 2,1-12), mangeant et buvant à tel point que certains le traitaient de « glouton et d’ivrogne » (Lc 7,34). Que peut donc vouloir dire ici « préférer» Jésus « même à sa propre vie » ?

  • Vient ensuite à nouveau une expression très forte : « porter sa croix » ; mais, en lisant bien le texte, cela se fera comment, dans quelles circonstances ? Or, quand Dieu nous adresse un appel, il nous donne toujours la grâce qui nous permet de répondre à cet appel. St Paul dit ainsi : « Dieu nous a appelés d’un saint appel, non en considération de nos œuvres, mais conformément à son propre dessein et à sa grâce qu’il nous a donnée » (2Tm 1,9).

            Suivre Jésus, mettre en pratique sa Parole, lui rester fidèle, est loin d’être toujours facile dans les multiples circonstances de nos vies. Si une difficulté se présente, Dieu donne sa grâce pour nous aider à la traverser. Mais une difficulté reste une difficulté : quand elle se présente, nous avons le choix entre deux attitudes, lesquelles ? Et Jésus ici nous invite à laquelle ? 

  • Jésus invite ensuite par des images (« bâtir une tour », « partir en guerre ») à bien regarder ces difficultés en face. Contre quel danger nous met-il en garde ? Mais souvenons-nous de la phrase précédente : « prendre sa croix pour marcher derrière moi». Qui a ici l’initiative première de la démarche, nous ou Jésus ? Et Jésus peut-il nous demander ce qu’il nous sait être incapables d’accomplir par nous‑mêmes ?

Conclusion : en tout ce que nous désirons entreprendre pour lui, quelle devrait être notre première attitude ?             

   

Pour l’animateur  

  • Les exemples concrets dépendront de la vie et de la situation de chacun, et ils sont tous les bienvenus… Le Père appelle tout homme à « venir à Jésus » son Fils Unique envoyé dans le monde pour notre salut à tous (Jn 3,16-18). Et puisque toute démarche vis-à-vis de Dieu n’est possible que par un Don qui vient de Lui, « venir à Jésus » est un Don du Père : « Nul ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire » (Jn 6,44), « si cela ne lui est donné par le Père » (Jn 6,65). Et tout Don de Celui qui est Amour (Jn 4,8.16) ne peut qu’être de l’ordre de l’amour… Et maintenant, qu’allons-nous choisir si Dieu nous appelle, d’une manière ou d’une autre, à quitter nos proches ? Et pourtant, l’amour que nous leur portons est bien légitime, il n’est pas à renier ! Mais il sera vécu autrement, avec le sacrifice, de notre côté, de cette proximité qui nous est chère…

            Nous sommes tous pécheurs… Il se peut aussi que ces proches que nous aimons nous invitent à agir d’une manière contraire à notre foi. Qu’allons-nous choisir ? Leur obéir, et tout ira bien avec eux, mais c’est notre amour pour Dieu qui sera blessé… Ou les contrarier, au risque de se voir rejeter ? Mais si l’amour qui unit deux personnes est authentique, il ne peut être à sens unique. Et un amour sincère ne peut que se construire sur la vérité. Le choc de la contrariété passé, l’amour vrai saura, avec le temps, reconnaître où est la vérité et la justice, et surmonter l’épreuve…

            Nous sommes tous pécheurs… Ces difficultés peuvent se rencontrer aussi bien dans notre famille, que dans notre communauté paroissiale ou religieuse… Jésus est le premier à en être conscient lorsqu’il demande à Pierre : « M’aimes-tu plus que ceux-ci ? » (Jn 21,15). Et les premiers à les entourer à ce moment-là étaient « Thomas, Nathanaël, les fils de Zébédée », Jacques et Jean (Mc 1,19), et « deux autres disciples » (Jn 21,2). Avec Pierre, ils étaient sept en tout, un chiffre symbole de plénitude qui renvoie à l’ensemble de l’Eglise primitive…

  • Nous sommes tous pécheurs… Des désirs égoïstes où nous nous recherchons nous-mêmes, d’une manière ou d’une autre, ne cessent de frapper à la porte de nos cœurs. Qu’allons-nous choisir ? Leur obéir et nous laisser entrainer sur un chemin contraire à celui de l’amour, amour pour Dieu, amour pour celles et ceux qui nous entourent, amour qui nous invite à nous donner ? Et dans des circonstances que nul ne choisit pour lui-même, ce choix de la foi peut aller jusqu’au don total de soi, la mort pour le Christ, le martyre…

  •  Choisir implique toujours un renoncement à ce que nous laissons de côté. Renoncer à une fausse harmonie humaine, à notre égoïsme, là est la vraie Croix. Et c’est tous les jours, d’une manière ou d’une autre, que nous sommes invités à la prendre… Nous n’y arrivons pas à chaque fois… L’important est de repartir sans cesse… La Miséricorde infinie qui nous entoure nous presse de nous relever et de nous relever encore… Et de pardon en pardon, c’est Elle qui nous donnera d’atteindre le but : une Vie éternelle et Bienheureuse dans la Maison du Père !

  • Humainement parlant, prendre sa Croix est difficile… Laissés à nos seules forces, l’aventure est même impossible. « Pour les hommes c’est impossible, mais pour Dieu tout est possible» (Mt 19,26). Et Jésus connaît nos failles, nos limites et nos faiblesses… Si nous arrivons à tout lui offrir, ce qui est « semé dans la faiblesse», ressuscitera dans sa force (1Co 15,43) car « ce qui est impossible pour les hommes est possible pour Dieu » (Lc 18,27). Et plus nous nous appuierons sur lui, plus notre Croix sera « légère » et « facile à porter » : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger » (Mt 11,28-30).

  • Avec ces deux images, « bâtir une tour, partir en guerre contre un autre roi », Jésus nous invite à bien réfléchir, à regarder les choses en face, à bien nous connaître pour éviter de nous lancer dans une aventure qui, manifestement, dépasse nos forces. La grâce ne supprime pas la nature ! Elle l’accomplit…           

          . L’image de la tour est peut-être un clin d’œil à « la tour de Babel » (Gn 11,1-9), présomption, folie orgueilleuse des hommes qui se sont appuyés sur leurs propres forces, et cela pour atteindre le Ciel ! Telle était au début l’attitude de Pierre : « Si tous succombent à cause de toi, moi je ne succomberai jamais » (Mt 26,33). Et Pierre tombera. Mais il se relèvera grâce à la Miséricorde de Dieu, et en s’appuyant cette fois sur Lui, il mourra en martyre à Rome !

         . L’image de la guerre souligne le fait que suivre Jésus est un combat avant tout contre nous-mêmes, notre péché, et aussi face à celui des autres, et face au « Prince de ce monde » (Jn 12,31 ; 14,30 ; 16,11) qui ne pense qu’à « voler, égorger et faire périr » (Jn 10,10). Seule la prière, qui est accueil du Don de Dieu, l’Esprit Saint, nous permet de vaincre grâce à Lui toutes ces difficultés.

       

Ensemble prions 

« Tournez les yeux vers l’hôte intérieur, sans rien vouloir que cette Présence ; vivez de l’Esprit pour être celui qui donne son Nom à votre Père. Tournons les yeux vers l’hôte intérieur, car il habite nos silences et nos prières » (Claude Tassin).  

 

 

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22ième Dimanche du Temps Ordinaire- Homélie du Frère Daniel BOURGEOIS, paroisse Saint-Jean-de-Malte (Aix-en-Provence)

Lecture : Luc 14, 1.7-14

 

C’’est une chose bien connue que les manières de table sont le lieu privilégié d’expression d’une culture ou d’une civilisation. C’est pourquoi, aujourd’hui, quand on va au restaurant ou dans un self-service, on sait qu’il y a une différence dans le menu, non seulement par la finesse des plats qui sont préparés, mais selon qu’on est servi dans des assiettes en plastique ou des assiettes en porcelaine à filet doré ou bien que l’on a des fourchettes en plastique ou de l’argenterie Louis XV.

En réalité, si les manières de table ont une telle importance, ce n’est pas simplement pour étaler un luxe et impressionner les invités. Les manières de table sont d’abord un rite de société : elles révèlent la manière dont nous nous abordons les uns les autres ou peut-être plus fondamentalement dont nous nous accueillons les uns les autres. Ceci est un vieil héritage de l’humanité et il n’est pas étonnant que lorsque le Seigneur est venu parmi nous, Il se soit permis de donner son avis sur cette question-là.

P1130846La convivialité, la joie d’être à table, ce n’est pas simplement la joie de manger ensemble des bonnes choses, mais c’est aussi un moment intense de l’existence humaine dans lequel nous nous accueillons les uns les autres. C’est pourquoi, au lieu de donner quelques préceptes qui pourraient davantage relever du registre culinaire, le Christ donne plutôt quelques conseils qui relèvent du registre de l’accueil. Ces conseils sont au nombre de deux. 

Le premier est de ne pas rechercher les premières places. Quand un homme invite, dans le monde sémitique, cela veut dire que l’espace familial dans lequel il vit habituellement s’ouvre à un certain nombre d’hôtes, d’amis qui y répondent. Par conséquent l’invitation c’est une sorte de mise à disposition de la convivialité, de l’espace privé de la maison à un certain nombre de gens qui précisément reçoivent l’appel à venir partager la joie, la communion, la fête. Par conséquent il est très important que le jeu de l’invitation se fasse jusqu’au bout, que les invités ne profitent pas de cette offre d’entrer dans la maison de celui qui les accueille pour y prendre leur place à leur gré. En réalité, le fait d’être invité ne signifie pas une prise de possession, ni que désormais chacun des invités va gérer cette possibilité qui lui est offerte de s’asseoir à la table. Il faut que l’invitation se fasse jusqu’au bout. On ne prend pas sa place avant que le maître de maison l’ait véritablement donnée, offerte, que, d’une certaine manière le maître de maison ait été aussi le maître de l’agencement de la communion des invités. C’est sans doute là l’erreur de ceux qui se précipitent sur les divans des premières places, dans la salle du banquet en se disant : « Chic alors, je vais avoir les premières places, et surtout le buffet ».

En réalité ils n’ont pas compris qu’ils étaient invités. Ils n’ont pas compris que c’était par pure grâce de la part du maître de maison qu’ils pouvaient entrer, avoir accès à cet espace privé qui est le lieu même de la fête qu’il ouvre à ceux qu’il considère comme ses amis. Autrement dit, ils ont trahi le sens de l’amitié qui fondait l’invitation. Il n’y a aucun droit à « une place déterminée » lorsque les hommes sont invités à la table de Dieu. Il n’y a pas de prérogative, il n’y a pas de mérite qui ferait valoir des fauteuils d’orchestre et non pas des loges de poulailler. Il n’y a qu’une offre fondamentale de la part du maître de maison pour dire : « Venez dans ma maison ! » Mais après, par le fait même d’entrer et de répondre à l’invitation, on est à la merci du maître de maison qui, lui-même, vous fonde dans la communion de tous les invités et de tous ses amis.

Ce n’est pas non plus un encouragement à ces espèces de fausse modestie des publicains qui restent toujours au fond des églises, mais c’est plus profondément le fait que, lorsqu’on est invité, on ne peut pas imposer sa propre personne : tout le mystère de l’invitation c’est que celui qui vient, celui qui est invité est reconnu, accueilli, et même célébré personnellement par le maître de maison. C’est le mystère même de Dieu. Dieu est un maître de maison qui nous invite à son banquet et à son festin. Dieu Lui-même donne du prix à la personne de ses invités uniquement et gratuitement en fonction de son amour.

 Mère Théresa

C’est la raison pour laquelle la deuxième petite parabole s’enchaîne si rigoureusement avec la première. Le Christ dit : « Quand tu invites, invite ceux qui ne peuvent pas « rendre » la pareille ». Non pas simplement pour montrer que tu es plus généreux que d’autres, mais pour montrer véritablement le sens de l’invitation. Le sens de l’invitation, cela veut tellement dire que c’est le maître lui-même qui devient le porteur de la communion, de la relation entre tous les hommes, qu’il faut que cette relation et cette invitation soient les plus gratuites et les plus généreuses possibles pour montrer que le principe d’unité, de communion entre tous les invités vient vraiment du maître et du maître seul : finalement, une invitation est toujours à fonds perdus, il ne faut pas attendre la réponse. Il faut inviter les pauvres, les estropiés et les boiteux, non pas pour organiser des soupes populaires, mais parce que le geste même de l’invitation n’exige pas une sorte de réciprocité. Pour que la réciprocité vienne ensuite, il faut d’abord qu’il y ait une gratuité fondamentale pour accueillir le cœur de l’autre et la personne de l’autre. 

st sacrement2C’est pourquoi chaque fois que nous célébrons l’eucharistie nous vivons la plupart du temps, hélas sans nous en rendre compte, ces lois fondamentales de l’hospitalité. C’est exactement le principe de la table eucharistique. Aucun d’entre nous n’a plus droit qu’un autre à l’eucharistie. Et vous savez, à certains moments, à quel point il y a eu des ambiguïtés sur le fait de se croire digne de l’eucharistie ou de ne pas l’être. Personne, absolument personne n’est digne de l’eucharistie. Et souvent hélas, ceux qui s’en croient dignes ne sont pas les plus dignes. Personne n’est digne de l’eucharistie parce que l’eucharistie est une invitation du Christ qui nous donne notre place dans la communion des enfants du Père. Par conséquent nous n’avons aucun droit à la réclamer. Commencer à vouloir la réclamer ou avoir ses places à l’eucharistie, c’est commencer à fausser le jeu même de l’invitation du maître de maison. Si nous ne vivons pas dans cette radicale gratuité de l’invitation du maître de maison, si nous faussons le jeu des invitations, nous faussons la communion de l’Église, nous faussons le visage de l’Église.

Nous n’avons pas à nous précipiter aux premières places car c’est Dieu qui donne du prix à notre vie, à notre cœur et à notre existence. C’est Dieu qui accueille et c’est Lui qui nous donne notre propre place dans son cœur. Par conséquent, ce n’est pas une affaire de conquête. Et la deuxième chose, c’est que chaque fois que nous sommes invités au repas du Seigneur, Il invite ces hommes que nous sommes, et nous sommes des pauvres, des boiteux, des aveugles, incapables de rendre la pareille à notre Dieu. C’est Dieu Lui-même qui nous accueille et le don de son corps et de son sang est un don gratuit, à fonds perdus. Et c’est précisément à cause de la gratuité du don de Dieu que nous pouvons vivre nous-mêmes en action de grâces. 

Qu’à travers ces paraboles apparemment si simples, de bon sens, j’allais dire presque de convenances, nous ne restions pas à une lecture superficielle, mais que nous y découvrions un des aspects les plus fondamentaux de notre propre situation lorsque nous venons recevoir le corps et le sang du Seigneur. Amen.




22ieme Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

«  Dieu élève les humbles »

(Lc 14,1a.7-14)

     Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient.
Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit :
« Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi.
Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : “Cède-lui ta place” ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place.
Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : “Mon ami, avance plus haut”, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi.
En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »
Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour.
Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

 

main de dieu

           

         Invité à un repas chez un Pharisien, Jésus remarque que certains« choisissaient les premières places », les places d’honneur, soit pour se mettre en avant, soit dans la certitude qu’ils étaient, eux, des invités de marque… Tel est bien « le levain des Pharisiens » (Mc 8,15) : l’orgueil qui pousse à se croire au dessus des autres. « Mon Dieu », disait un Pharisien dans le Temple de Jérusalem, « je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes : voleurs, injustes, adultères… Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne » (Lc 18,11-12). Il se vante lui-même de ses bonnes œuvres, et il les accomplit non pas par amour, mais uniquement pour se mettre en avant. La conséquence immédiate d’une telle attitude ne peut qu’être le mépris pour tous ceux et celles qui vivent et agissent différemment. « Cette foule qui ne connaît pas la Loi, ce sont des maudits ! » (Jn 7,48-49). Hélas, c’est justement par un tel jugement si complaisant à leur égard et si dur envers les autres, qu’ils s’excluent eux­­-mêmes du Royaume des Cieux…

            Un autre jour, Jésus fut invité à manger, non pas comme ici chez un Pharisien, mais chez Matthieu, le collecteur d’impôts, le collaborateur avec l’occupant Romain, le pécheur (Lc 5,29-32). Les Pharisiens récriminèrent aussitôt contre lui et ils disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? ». Eux, les purs, les justes, restaient bien sûr dehors pour ne pas se souiller au contact de ces « maudits »… Mais Jésus, qui avait entendu, leur dit de l’intérieur : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Allez apprendre ce que signifie : « C’est la miséricorde que je désire, et non les sacrifices » qui, accomplis par orgueil, ne font que nourrir l’orgueil…

            Tout homme est pécheur, blessé, spirituellement malade, de beaucoup ou de peu (Lc 7,36-50). Telle est la vérité : « Il n’en est pas de juste, pas un seul… Tous ont péché et sont privés de la Gloire de Dieu » (Rm 3,9-26 ; 7,1-25). Ne pas le reconnaître, c’est refuser de faire la vérité, c’est être encore dans l’illusion de son orgueil… Avec un tel état d’esprit, l’irruption dans la vérité de Dieu, au dernier jour de la mort, ne pourra qu’être vécu comme un abaissement, une humiliation, alors que Dieu, répétons-nous, ne cherche, de son côté, que le bien de tous : « Dieu veut que tous les hommes », ses enfants, « soient sauvés » (1Tm 2,3-6 ; Jn 3,16-17)… Par contre, celui qui accepte de faire cette démarche de vérité sur lui-même en reconnaissant dès maintenant ses faiblesses, ses misères, s’ouvre aussitôt au même moment à Celui qui, en tout son être, est « la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), Vérité d’un Amour infini, d’une Miséricorde toute Puissante qui n’a qu’un seul désir : élever tous les hommes au ciel pour les faire asseoir à sa droite, aux places d’honneur (Lc 22,28-30), là où le plus petit est le plus grand dans le Royaume des Cieux (Mt 11,11)…                                                                                                                                                DJF




Rencontre autour de l’Évangile – 22ieme dimanche du temps ordinaire

« Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser :

Tu trouveras grâce devant le Seigneur. »

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et comprenons les mots important (Luc 14, 1 ; 7-14)            

Nous continuons à suivre Jésus dans sa marche vers Jérusalem : c’est là qu’il va achever sa mission et que par sa mort et sa résurrection, il va nous ouvrir la porte d’entrée du Royaume de Dieu. Les conditions d’entrée dans le Royaume sont exigeantes. Jésus profite de tous les occasions pour nous les donner.

 

Soulignons les mots importants

Pharisien : Rappelons-nous qui étaient les pharisiens ?

Invité à des noces : Jésus utilise souvent l’image des “ noces ” dans son enseignement. Vers quoi veut-il tourner nos pensées ?

Première place – Dernière place : Jésus dans cet évangile veut-il nous donner une leçon de politesse ? ou veut-il nous dire autre chose ?

Qui s’élève, sera abaissé 

Qui s’abaisse, sera élevé                         

N’invite pas…les riches

Invite… les pauvres

Tu seras heureux

Résurrection des justes

Quelles sont les conditions posées par Jésus pour être admis au Royaume de  Dieu ?

Pourquoi Jésus demande de ne pas inviter les gens qui ont les moyens ?

Qu’est-ce qu’il nous révèle du Royaume de Dieu son Père ?

Où est le véritable bonheur pour celui qui fait honneur aux petits et aux pauvres ?

 

 

 

TA PAROLE DANS NOS COEURS

Ensemble regardons Jésus 

Seigneur Jésus, en venant chez nous tu t’es mis à la dernière place. Pour nous inviter au festin des Noces du Royaume de Dieu, tu t’es fait solidaire de notre humanité à commencer par les pécheurs et les déshérités. Tu t’es fait pauvre avec les pauvres. A celui qui se fait petit pour accueillir l’invitation, tu dis “ mon ami, monte plus haut ”.  A celui qui se met au service de ses frères, sans rien attendre en retour, gratuitement, comme toi, tu dis “ tu es heureux ”, car tu auras part au grand festin que Dieu donnera lors de la résurrection.

 

   

Pour l’animateur  

– Les pharisiens formaient une confrérie de juifs qui cherchaient à appliquer tous les préceptes de la Loi, en particulier les obligations et les interdits du Sabbat et les rites de purification légale. De bonne foi au départ, ils ont fini par être esclaves des pratiques extérieures et oublier la religion du cœur. Dans l’évangile on les appelle souvent “ scribes et docteurs de la loi ”. Ils aimaient se mettre en avant, vivaient séparés des autres pour ne pas “se salir ”, et ils s’invitaient entre eux, et au cours de ces repas les discussions religieuses allaient bon train. Jésus acceptaient de partager leur repas.

– Le Nouveau Testament voit dans la grande fête que constituent les noces une figure  du festin des Noces de l’Agneau, à la fin des temps. Tous les hommes sont invités à y participer. Jésus a commencé son ministère en participant aux noces de Cana.

– Dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus ne donne pas seulement des conseils de prudence et de bonne tenue à table, il indique  les conditions d’admission au Royaume de Dieu :

– D’abord rejeter tout sentiment de supériorité pour se faire petit devant Dieu. C’est lui seul qui donne la vraie gloire, le véritable honneur. Il élève les humbles et abaisse les orgueilleux. Celui qui se croit plus grand que les autres n’est pas dans la vérité : pour Jésus, nous sommes tous frères, et nous n’avons qu’un seul Père. Lui seul est le Maître et il a voulu être serviteur.

–  Ensuite,  comme Jésus, accorder le meilleur de son attention et de son amour aux plus pauvres : à cet amour désintéressé c’est Dieu lui-même qui répondra en ressuscitant les justes.

–  L’humilité et le désintéressement : deux aspects de la véritable charité !

       

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS

L’Evangile aujourd’hui dans notre vie

  « Heureux les invités au festin des noces de l’Agneau »

Est-ce que nous réalisons que nous sommes des invités du Père pour prendre part au Royaume de vie et de joie avec son Fils? Est-ce que cela donne sens à tout ce que nous vivons, à tout ce que nous faisons ?

Le disciple n’est pas au dessus de son maître. Jésus s’est abaissé pour être le serviteur de ses frères. Nous vivons dans un monde où il faut être le plus haut, le plus grand, le plus fort !

Parfois le sentiment de détenir la vérité nous rend durs, nous donnent un air supérieur et intolérant !

Avons-nous assez d’humilité pour remettre en cause nos jugements, nos attitudes religieuses, nos manières d’agir, même s’ils nous paraissent sans reproche ?

Le témoignage qui porte, c’est celui d’un homme ou d’un groupe désintéressé.

Est-ce que nous agissons pour nous servir des autres, ou pour les servir ?

Est-ce que nous fréquentons surtout des gens qui peuvent nous être utiles un jour ?

Quelle place faisons-nous aux plus pauvres, dans notre quartier, dans notre communauté chrétienne, dans la catéchèse, dans nos relations, dans notre enseignement scolaire ..?

 

Ensemble prions 

Refrain : Jésus Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père.

Le Christ Jésus ayant la condition de Dieu ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti prenant la condition de serviteur. (ref)

Devenu semblable aux hommes, reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort sur la croix. (ref)

C’est pourquoi Dieu l’a exalté, il lui a donné le Nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur la terre et aux enfers, et que toute langue proclame :

“ Jésus Christ est Seigneur ” à la gloire de Dieu le Père

 

 

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