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33ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 14-30) par D. Alexandre ROGALA

Depuis quelques années dans l’Église, nous nous interrogeons sur la place des femmes. Lors de la première session générale du Synode pour une Église synodale à Rome, la question l’ordination des femmes a même été évoquée. Il est assez courant d’entendre des personnes critiquer le modèle patriarcal de l’Église. Moi le premier ! Nous avons tendance à nous souvenir uniquement des versets bibliques qui présentent les femmes comme inférieures aux hommes, et nous généralisons: « Les auteurs bibliques sont tous misogynes ! ». Nous oublions qu’il existe aussi des textes bibliques qui parlent de la femme autrement et qui font son éloge.

La première lecture fait partie de ces textes. Il s’agit d’un extrait du dernier chapitre du Livre des Proverbes (ch. 31) qui est, j’ose le dire, « féministe ».

Ce texte fait le portrait de la « femme parfaite », et celle-ci est l’opposée de la « femme soumise ». Le femme de valeur travaille et prend des initiatives: « Elle sait choisir la laine et le lin, et ses mains travaillent volontiers » (v. 13). La femme de valeur sait aussi être généreuse et tendre la main aux pauvres (v. 20). Une telle femme est digne de louange ! (v. 30-31)

L’Église est appelée à avoir les mêmes qualités que cette « femme parfaite » de la première lecture si elle veut « entrer dans la joie de son maître ».

Comme la semaine dernière, le texte d’évangile d’aujourd’hui (Mt 25, 14-30) est une parabole prononcée par Jésus dans le cadre du discours eschatologique des chapitres 24-25 de l’Évangile selon saint Matthieu. Jésus veut une fois de plus, nous mettre en garde pour nous éviter une issue négative au jour du jugement.

Le maître de la parabole représente Jésus, et à travers les serviteurs, ce sont les différentes options de comportement des croyants pendant l’absence de Jésus sur terre qui sont décrites.

Une première remarque que nous pouvons faire est que les tâches que les disciples ont à remplir sont distribuées de manière individuelle, car à chacun des serviteurs est confiée une somme d’argent différente « en fonction de ses capacités ». Mais cette différence de capacité, ne s’inscrit pas dans une logique de valeur et de mérite.

Faisons une petite digression, éclairons l’Écriture par l’Écriture, et relisons un extrait du célèbre passage sur les charismes de la Lettre de saint Paul aux Corinthiens qui fait écho à la « parabole des talents » de Jésus:

« Les dons de la grâce sont variés, mais cest le même Esprit. Les services sont variés, mais cest le même Seigneur. Les activités sont variées, mais cest le même Dieu qui agit en tout et en tous. À chacun est donnée la manifestation de lEsprit en vue du bien. À celui-ci est donnée, par lEsprit, une parole de sagesse ; à un autre, une parole de connaissance, selon le même Esprit ; un autre reçoit, dans le même Esprit, un don de foi ; un autre encore, dans lunique Esprit, des dons de guérison ; à un autre est donné dopérer des miracles, à un autre de prophétiser, à un autre de discerner les inspirations ; à lun, de parler diverses langues mystérieuses ; à lautre, de les interpréter. Mais celui qui agit en tout cela, cest lunique et même Esprit : il distribue ses dons, comme il le veut, à chacun en particulier ».(1 Co 12, 4-11)

Quand nous lisons dans la parabole que le maître donne « à chacun selon ses capacités », il faudrait peut-être comprendre « selon la diversité des charismes ». Puisqu’il est un don de l’Esprit Saint, chaque charisme a une grande valeur. D’ailleurs, le « talent » que le maître donne à ses serviteurs dans la parabole est une somme d’argent colossale ! Elle correspond à 6000 deniers, c’est à dire au salaire de 6000 journées de travail. Même celui qui n’a reçu qu’un talent a donc reçu une somme d’argent énorme !

La somme d’argent reçue, comme le charisme, n’implique pas une hiérarchie entre les disciples. Alors qu’au départ, ils n’avaient pas reçu la même somme d’argent, le fait qu’à la fin, les deux serviteurs qui ont agi selon la volonté du maître, soient honorés exactement de la même manière le prouve: « entre dans la joie de ton seigneur »

Disons-le en passant, si à la fin, tout le monde reçoit la même récompense, il est inutile d’envier le talent d’une autre personne.

Regardons maintenant de plus près l’attitude du « serviteur mauvais et paresseux » car c’est justement sur lui qu’insiste Jésus pour nous mettre en garde afin que nous ne nous ne faisions pas comme lui.

D’où vient son inaction ? Pourquoi a-t-il caché le talent dans la terre ?

Le serviteur se sent obligé de se justifier. Il cherche à expliquer son comportement au maître. Il dit: « Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu nas pas semé, tu ramasses là où tu nas pas répandu le grain. Jai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre » (v.24-25).

Le serviteur dit avoir eu peur de son maître. Mais craindre le Seigneur n’est pas quelque chose de positif ? N’avons nous pas lu dans la première lecture que la « femme parfaite est justement celle qui craint le Seigneur ? « La femme qui craint le Seigneur mérite la louange » (Pr 31, 30).

En fait, dans la Bible, la « crainte du Seigneur » désigne le sens de la grandeur de Dieu et la conscience de la distance entre Dieu et nous. En régime chrétien, la « crainte du Seigneur » est un don de l’Esprit Saint qui suscite non seulement une attitude d’humilité et d’émerveillement, mais aussi la prise au sérieux de la volonté de Dieu.

Dans la parabole, la peur du troisième serviteur ne peut pas être le don de l’Esprit Saint, car cette peur l’a complètement paralysé et l’a conduit à faire tout le contraire de la volonté du Seigneur.

La peur du troisième serviteur prend racine dans l’image qu’il se fait de son maître, qu’il considère comme un homme dur. Or, pour nous qui entendons cette parabole aujourd’hui, nous savons bien que cette image ne peut pas s’appliquer à Jésus.

Jésus est tout le contraire d’un maitre dur. D’ailleurs dans ce même évangile selon saint Matthieu, il se définit lui-même par sa douceur: « je suis doux et humble de cœur » (11, 29), et il est capable de montrer sa compassion (9, 36 par ex.).

Alors, écoutons l’exhortation de saint Paul dans la deuxième lecture: « Ne restons pas endormis comme les autres, mais soyons vigilants et restons sobres » (1 Th 5, 6).

N’ayons pas peur, et accomplissons avec assurance, la mission qui nous est confiée par le Seigneur selon notre charisme personnel.

Ainsi, le jour où notre Seigneur Jésus reviendra à la fin des temps, « ne nous surprendra pas comme un voleur » (cf. 1 Th 5, 4). Pleins de confiance, nous pourrons aller à la rencontre du Seigneur, et il nous dira, peut-être avec les mots du psalmiste: « Heureux es-tu ! À toi, le bonheur ! »  (Ps 127, 2)




33ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 14-30) – par Francis COUSIN

« Avoir confiance ou peur … »

 La parabole des talents, que nous lisons ce jour a été dite par Jésus à ses seuls apôtres. C’est donc une parabole qui les concerne principalement, … et nous aussi, en tant que baptisés, nous aussi disciples de Jésus.

C’est une parabole qui est confiée aux apôtres peu de temps avant que Jésus ne meurt, et qu’il parte pour un long voyage. C’est un peu comme une feuille de route que Jésus propose à ses apôtres : il les appelle « et leur confia ses biens ».,

Quels biens ? lui « qui n’avait pas d’endroit où reposer sa tête » ? (Mt 8,20). Des biens matériels ? Aucuns, sans doute : il ne vivait que d’aumônes et de partages. Mais il avait donné tout son enseignement, trois ans de discussions avec ses apôtres … et c’est à eux qu’il confie ce cadeau inestimable … « à chacun selon ses capacités. », non pas actuelles, ils n’ont pas passé d’examen … mais les capacités futures. Jésus savait déjà ce que ferait chacun.

Et il donne des talents, dans notre compréhension actuelle … 5 talents, 2 talents, 1 talent.

Et il partit …

Aussitôt, chacun s’évertua de faire fructifier ses talents, de leur donner vie en faisant découvrir aux autres l’enseignement de Jésus …

Sauf un, peut-être Judas … qui alla enterrer son talent … qui devint inutile. Le maître absent devient ignoré, en même temps que le talent : il n’existe plus pour lui.

Qu’est-ce qui fait la différence entre ceux qui ont plusieurs talents et Judas ? La confiance réciproque entre Jésus et les onze apôtres … et l’absence de confiance réelle de Judas vis-à-vis de Jésus.

Judas a peur de Jésus, une peur qui l’empêche de parler à Jésus, de lui demander pardon … une peur qui l’empêche de croire à l’amour de Jésus qui est toujours là, et en sa miséricorde …

il préfère fuir et se pendre …

Dommage pour lui … « Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dans les ténèbres extérieures ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents ! », c’est-à-dire « Jetez-le en enfer »

Il aurait pu faire comme Pierre, lors de son reniement : « Le Seigneur, se retournant, posa son regard sur Pierre. Alors Pierre se souvint de la parole que le Seigneur lui avait dite : ’’Avant que le coq chante aujourd’hui, tu m’auras renié trois fois.’’. Il sortit et, dehors, pleura amèrement. » (Lc 22,61-62). Pas une seule parole entre les deux, mais un regard d’amour auquel répondit un regard de regret, et Pierre sût qu’il était pardonné …

La confiance n’a pas besoin de mots …

Mais il faut avoir les yeux fixés sur ceux de Jésus pour le comprendre …

Ce sont les mêmes talents que Jésus nous confie aujourd’hui, à la suite des apôtres : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les (ou faites-les baptiser) au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28,19-20).

Dans la confiance, et dans l’amour partagés … en sachant que Jésus est toujours avec nous, et que quand cela va mal pour nous, il suffit de dire : « Seigneur, sauve-moi ! », alors il étendra la main et nous remettra d’aplomb. (cf Mt 14,30-31)

Et surtout pensons que Jésus regarde toujours vers l’avenir … et non pas le passé …

« Quand le Seigneur nous appelle, il ne pense pas à ce que nous sommes, à ce que nous étions, à ce que nous avons fait ou cessé de faire. Au contraire, au moment où il nous appelle, il regarde tout ce que nous pourrions faire, tout l’amour que nous sommes capables de propager. Lui parie toujours sur l’avenir, sur demain. Jésus te projette à l’horizon, jamais au musée. (…)

Jésus n’est pas le Seigneur du confort, de la sécurité et de la commodité. Pour suivre Jésus, il faut avoir une dose de courage, il faut se décider à changer le divan contre une paire de chaussures qui t’aideront à marcher, sur des routes jamais rêvées et même pas imaginées, sur des routes qui peuvent ouvrir de nouveaux horizons, capables de propager la joie, cette joie qui naît de l’amour de Dieu, la joie que laissent dans ton cœur chaque geste, chaque attitude de miséricorde. Aller par les routes en suivant la ‘‘folie’’ de notre Dieu qui nous enseigne à le rencontrer en celui qui a faim, en celui qui a soif, en celui qui est nu, dans le malade, dans l’ami qui a mal tourné, dans le détenu, dans le réfugié et dans le migrant, dans le voisin qui est seul. » (Pape François, JMJ Cracovie, 30 juillet 2016).

Et ce qui est vrai pour les jeunes … est aussi valable pour les plus âgés …

Seigneur Jésus,

trop souvent on entends des gens dire

« je ne suis pas capable »

avant même d’essayer …

Heureusement que Toi,

tu avais confiance en tes apôtres,

tu as cru en eux, et eux ont cru en toi.

Aide-nous à découvrir nos talents cachés

pour les mettre à ton service

et à celui de nos frères.

 

Francis Cousin

Cliquer sur le lien ci-dessous pour accéder à l’image illustrée : Prière dim ord A 33°

 




Rencontre autour de l’Évangile – 33ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 14-30)

«  Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître. « 

 

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons (Mt 25, 14-30)

Jésus parle de sa venue à la fin des temps. La parabole des talents vient juste après celle des jeunes filles invitées de la noce.

 

Soulignons les mots importants 

Lire attentivement la parabole.

Il appela ses  serviteurs, il leur confia ses biens : que penser du comportement de ce  maître ?

Chacun selon ses capacités : Qu’est-ce que cette expression nous apprend de ce maître  et de ses  serviteurs?

Les talents : Aujourd’hui on emploie ce mot dans certaines expressions courantes. Lesquelles ? Savons-nous  ce qu’il représentait au temps de Jésus ?

Aussitôt : Pourquoi ce mot dans la parabole ?

Longtemps après : Jésus insiste souvent sur ce long temps qui sépare le présent de sa venue. Pourquoi ?

Seigneur…Tu m’as confié…A qui nous fait penser ce mot « Seigneur » ?

J’en ai gagné… : Qu’est-ce qu’il a fallu comme qualité pour cela ?

Serviteur bon et fidèle… je t’en confierai beaucoup entre dans la joie de ton maître : quel est le sens de ces paroles pour nous chrétiens ?

J’ai eu peur… : que penser de cette « peur » ? Est-ce de la prudence de la part du troisième serviteur ?

Serviteur mauvais et paresseux : Qu’est-ce qu’il lui est reproché en réalité ?

Celui qui a recevra encore : Comment cela ?

Jetez -le dehors : Pourquoi cette sévérité ?

 

Pour l’animateur  

A la fin de la parabole des jeunes filles de la noce, Jésus disait «  veillez ». Mais comment veiller ? Cette parabole des talents donne une réponse. C’est une sorte de fable racontée avec le langage des affaires. Le talent était à la fois un poids et une monnaie. Comme poids, le talent équivalait à 35 kg. Il se divisait en «  mines » et en « sicles ». Un talent = 150.000 sicles. Il servait à peser les métaux précieux.

En tant que monnaie, le talent d’argent = 6000 F or ;  le talent d’or : 150.000 F or. Donc, dans la parabole, il s’agit d’une somme très importante. Celui qui a reçu un talent  a en main l’équivalent de plus de quinze ans de salaire d’un ouvrier de l’époque.

Il leur «confia ses biens » : C’est un acte de confiance sans limite.

Il laisse toute liberté pour la gestion de ces sommes. Il tient compte des capacités de chacun. Chacun est unique et différent Il y a un appel et une responsabilité confiée. Les « serviteurs » deviennent des partenaires « gérants »..

Le mot « aussitôt » souligne l’empressement des deux premiers serviteurs : ils se risquent dans des opérations qui leur permettent de doubler leur capital.

Le troisième enterre son talent : il joue la prudence. Dans le droit juif, enterre un dépôt, c’était pour un maximum de sécurité et une manière pour le dépositaire de se dégager de toute responsabilité.

Longtemps après, (le long temps de la mission, temps pour mettre à profit les biens reçus) c’est l’heure des comptes. Les serviteurs s’adressent  à leur maître  en l’appelant « Seigneur » : ce mot rappelle au lecteur que le Seigneur Jésus demandera à son Eglise  les comptes de sa gestion des biens du Royaume.

Voici ce que « j’ai gagné » : les deux premiers serviteurs ont géré les biens du maître comme leurs propres biens : ils ont agi en partenaires et non comme esclaves. Le maître reconnaît la valeur de cette attitude : « très bien serviteur bon et fidèle ». Les deux serviteurs ont la même promotion et la même récompense « je t’en confierai beaucoup, entre dans joie de ton maître » parce que chacun est allé jusqu’au bout de ses capacités.  Au sens profond, nous comprenons qu’au chrétien qui gère bien tous les talents reçus (toutes les richesses spirituelles, ses dons personnels, ses biens…) en vrais fils et filles de Dieu participera pleinement au Royaume de Dieu.

Le troisième a eu peur. Il est traité de paresseux, bon à rien. Il n’a pas fait comme si le talent était à lui « voilà ton talent » « ce qui t’appartient. Ce n’est pas une attitude responsable digne des dons reçus. Il s’est conduit comme un esclave.

« Celui qui a » : celui qui a acquis un capital de fidélité, celui-là recevra sa récompense.  Celui qui n’a rien produit, n’a rien de fait de mal ; mais, pire, il n’a rien fait. Il n’est pas digne du Royaume. Le verdict du maître souligne le sérieux de l’enseignement de Jésus sur tout ce qu’il a confié à son Eglise et à chaque baptisé.

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS :

Seigneur, donne-nous de prendre au sérieux tout ce que tu nous as confié : nous pouvons en faire le compte. Tu nous fais confiance. Tu as été généreux envers nous : nous ne le réalisons pas toujours. Délivre-nous de la peur.

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

La Parole aujourd’hui dans notre vie         

Selon notre état de vie et notre vocation personnelle, le Seigneur a remis entre nos mains des « talents », c’est-à-dire des « dons de l’Esprit » liés aux responsabilités qui sont les nôtres pour nous mettre au service des autres.

Quels sont ces « dons ou talents  » que le Seigneur nous a confiés ? (chacun est invité à faire le compte pour soi-même)

Chacun a reçu aussi des « dons », des « capacités » : comment les faisons-nous produire du fruit pour le Royaume de Dieu ? Comment les mettons-nous au service des autres ?

Et ce bien si précieux qu’est notre vie et dont nous sommes les gérants ?

 

Et il y a toutes les richesses spirituelles que le Seigneur a laissées à son Eglise : sa Parole, les sacrements…Il y a quelques années, lors d’une visite en Métropole, le pape Jean-Paul II s’adressait aux chrétiens en leur disant : « Qu’avez-vous fait de votre baptême ? »

Nous pouvons nous poser la même question.

Nous ressemblons parfois au troisième serviteur : nous l’allons peut-être  pas jusqu’au bout de nos possibilités…par peur du risque.

Ensemble prions  

« Seigneur, pardonne-nous d’avoir, souvent, enfoui les trésors de notre cœur dans un bas de laine et d’avoir eu peur de prendre des risques!

Nous n’avons pas toujours su aimer à fond, à pleins poumons.

Te considérant parfois plus comme un Juge sévère que comme un Père, nous avons observé, méticuleusement, scrupuleusement, tous tes commandements. Nous avons ainsi, peu à peu, transformé ton Alliance d’Amour en devoirs religieux. Par excès de prudence et par manque de confiance, nous avons canalisé et figé la lave incandescente de ta Bonne Nouvelle.

Nous avons, souvent, enfoui les trésors de la foi, de l’espérance et de la charité, dans le maquis des préceptes à observer. » (Michel Hubaut)

 

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33ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 14-30) – par le Diacre Jacques FOURNIER

 » Aimer, c’est recevoir et se donner soi-même ... »

  (Mt 25, 14-30)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples cette parabole : « Un homme qui partait en voyage appela ses serviteurs et leur confia ses biens.
À l’un il remit une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul talent, à chacun selon ses capacités. Puis il partit. Aussitôt,
celui qui avait reçu les cinq talents s’en alla pour les faire valoir et en gagna cinq autres.
De même, celui qui avait reçu deux talents en gagna deux autres.
Mais celui qui n’en avait reçu qu’un alla creuser la terre et cacha l’argent de son maître.
Longtemps après, le maître de ces serviteurs revint et il leur demanda des comptes.
Celui qui avait reçu cinq talents s’approcha, présenta cinq autres talents et dit : “Seigneur, tu m’as confié cinq talents ; voilà, j’en ai gagné cinq autres.”
Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.”
Celui qui avait reçu deux talents s’approcha aussi et dit : “Seigneur, tu m’as confié deux talents ; voilà, j’en ai gagné deux autres.”
Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.”
Celui qui avait reçu un seul talent s’approcha aussi et dit : “Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain.
J’ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t’appartient.”
Son maître lui répliqua : “Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, que je ramasse le grain là où je ne l’ai pas répandu.
Alors, il fallait placer mon argent à la banque ; et, à mon retour, je l’aurais retrouvé avec les intérêts.
Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix.
À celui qui a, on donnera encore, et il sera dans l’abondance ; mais celui qui n’a rien se verra enlever même ce qu’il a.
Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dans les ténèbres extérieures ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents !” ».

                           

La mort de Jésus est désormais toute proche. Très bientôt, « il partira en voyage », l’ultime voyage, en confiant à ses disciples le soin de continuer sa mission : annoncer la Bonne Nouvelle de ce Dieu Père, plein d’amour et de tendresse pour tous les hommes. Pour cela, il leur « confiera ses biens », tous ses biens, en leur donnant cet Esprit Saint (Ac 1,8) qu’il reçoit Lui-même du Père, un Esprit qui communiquera à chacun ses Dons différents (1Co 12,7-11), pour le bien de tous…

Le disciple de Jésus, en croyant en Lui, s’est ouvert à l’Amour de Dieu, à son infinie Miséricorde. Avec Lui, il a découvert « où » se trouve la vraie Plénitude, et du même coup, tout ce qui lui est contraire. Aidé par la Force de cet Amour, il va apprendre petit à petit à s’aimer lui-même en rejetant tout ce qui le souille, le blesse, le fait souffrir, le détruit, et l’empêche finalement d’accueillir cette Plénitude de Vie que Dieu veut voir régner au cœur de tous les hommes. Entraîné dans cette logique d’Amour, il ne pourra aussi qu’apprendre petit à petit à aimer tous ceux et celles qui l’entourent, à désirer le meilleur pour eux, ce meilleur qu’il a expérimenté en accueillant le Christ et le Don de sa Vie. Aimer son prochain ne pourra alors qu’être synonyme de travailler à son bien pour qu’il puisse accueillir lui aussi cette Plénitude de Vie offerte gratuitement à tous.

Dans cette parabole, deux disciples reçoivent l’un cinq Dons de l’Esprit, l’autre deux. Ils les accueillent vraiment et entrent donc dans cette dynamique d’Amour qui ne peut que chercher le bien de l’autre, de tous les autres. Et en puisant dans ce Trésor dont ils sont eux-mêmes les premiers heureux bénéficiaires, ils travaillent activement à l’annonce de l’Evangile…

Le Maître donne aussi un talent à un troisième, mais contrairement aux deux premiers, il ne le reçoit pas vraiment et il enterre ce Don de Lumière et de Vie, comme on le fait pour un mort. Son cœur ne peut qu’être dans les ténèbres. « Si la lumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténèbres ! » (Mt 6,23). Et c’est à « la lumière » de ces « ténèbres » qu’il va regarder son Maître. Sa perception ne pourra qu’en être faussée… Il est « doux et humble de cœur », « bouleversé » devant la souffrance des hommes ? « Tu es un homme dur ! » Il n’est que Bonté ? « Tu moissonnes là où tu n’as pas semé », comme le pire des voleurs… Autrement dit, ce n’est pas la Lumière qu’il voit, mais ces ténèbres qui l’habitent : tout pour lui devient ténèbres. Hélas, il est bien sous « l’empire de Satan », ce « voleur qui ne vient que pour voler, égorger et faire périr » (Ac 26,18 ; Jn 10,10). Aurait-il quelque chose ? Avec un tel maître, de toute façon, « il se fera enlever même ce qu’il a ». S’il avait choisi la Vérité et la Lumière de l’Amour, n’aurait-il rien eu au départ, sinon sa misère et son péché, la Miséricorde infinie de Dieu aurait eu vite fait de tout lui pardonner pour le combler, car l’Amour ne sait que donner et donner encore. C’est pourquoi, « celui qui a », pour l’avoir reçu de l’Amour, ne pourra que recevoir et recevoir encore, pour sa plus grande joie !    DJF

           




33ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 14-30) – Homélie du Père Louis DATTIN

Talents

Mt 25, 14-30

Aujourd’hui, frères et sœurs, nous sommes appelés à prendre conscience de ce qu’exige notre vocation de chrétien.

Être chrétien, ce n’est pas rien : nous avons beaucoup, beaucoup reçu. Au départ, il y a eu le Baptême, devenus fils de Dieu, nourris ensuite par l’Eucharistie, nous sommes aussi confirmés, pardonnés à chaque fois que nous avons péché, réconfortés alors que nous étions malades, fortifiés pour vivre une vie conjugale ou sacerdotale : sans oublier la Parole de Dieu, le soutien de l’Église, … Oui, c’est vrai, ce que nous avons reçu est énorme : d’ailleurs, un « talent », dans le temps, c’était aussi une somme énorme, environ « 35 kg d’or » qui correspondait au salaire de 6 000 journées de travail d’un ouvrier.

« Il leur confia ses biens, à chacun, selon ses capacités ». Dieu nous a beaucoup donné : Dieu espère beaucoup de nous ! Il fait confiance, nous laisse un capital conséquent et il va même partir en voyage, nous laissant le soin du domaine. Bien sûr, il reviendra et nous demandera des comptes : c’est dans l’ordre des choses. Mais, en attendant, c’est nous, les chrétiens, c’est nous, qui devenons responsables de la fortune de Dieu.

Dieu me confie ses biens : il ne suffit pas de veiller les bras croisés ou les mains jointes. Il faut être actifs, entreprenants.

Deux serviteurs font fructifier ce que le Seigneur leur a donné, le troisième enterre l’unique talent qui lui a été remis. Après tout, ce 3e, il est honnête : il va rendre à son maitre ce que son maitre lui a confié. Il est même prudent : il va enterrer, ce trésor de 6 000 francs or. Honnête, prudent : ce ne sont pas des qualités chrétiennes prioritaires. Avec tout ce qu’il a reçu, le chrétien, lui, doit être avant tout dynamique, constructif, productif. Dieu ne nous a pas confié sa création, son amour, l’Évangile, le message de son Fils, pour le garder pour nous, à notre profit personnel : nous devons rendre compte, un jour de la façon dont nous aurons mis en valeur tout ce que Dieu m’a donné.

Autrement dit, nous devenons  responsables, responsables non pas comme un gardien de coffre-fort, mais responsable comme un entrepreneur, comme un architecte.

Au départ, Dieu nous donne les matériaux : à chacun de nous de les utiliser au mieux pour en faire un chef-d’œuvre qui sera celui de notre vie.

Ma vie chrétienne n’est pas quelque chose à garder soigneusement, à veiller jalousement, un trésor à cacher. Elle est, au contraire, un capital à multiplier, une somme à placer pour la faire produire et fructifier : le chrétien ne se contente pas de conserver et de restituer.

Dieu nous a dotés en plus, chacun également, de qualités et aussi d’une liberté d’initiatives qui va nous permettre de mettre en œuvre toute une créativité, une participation qui ne sera d’ailleurs pas uniquement extérieure à nous, mais dont nous serons, nous-mêmes, les premiers bénéficiaires.

On a souvent confondu christianisme avec conservation. Il fallait « garder », « protéger », « veiller sur », observer les commandements, conserver la foi qui nous a été transmise comme un précieux dépôt. Dans les banques, il y a deux sortes de capitaux : ceux qui dorment, enfermés dans la salle des coffres, improductifs et ceux qui travaillent sur le marché ; investis, ils alimentent le marché du travail, de la production, de l’entreprise. Il y a l’argent qui travaille et l’argent qui dort.

Eh bien, dans l’Eglise aussi, il y a la grâce de Dieu qui travaille et celle qui ne travaille pas. Dieu donne à chacun sa grâce, sa vie, ses biens : qu’en faisons-nous ? Est-ce-que nous capitalisons ce que Dieu nous a donné et qui ne servira jamais à rien parce que nous ne le communiquons pas aux hommes de notre temps ? Un capital qui dort parce que son propriétaire est un chrétien assoupi ou au contraire, une somme de grâces qui va, comme dit le monde financier, « faire des petits » parce qu’il est lancé sur le marché des hommes, placé à bon escient, investi par des chrétiens actifs, avisés, entreprenants, qui se risquent et qui se lancent dans le monde de l’évangélisation, de la charité, de l’apostolat.

Ce capital de ma foi, va-t-il donner de la foi aux autres ? Cet amour de mon cœur va-t-il être partagé et se répandre ? Cette espérance qui est mienne, va-t-elle soulever l’espoir des hommes autour de moi ?

            Ne pas garder pour moi ce dont les autres ont tant besoin : ils ont droit à notre foi, droit à notre amour, ils réclament notre espérance. Rappelez-vous cette affiche d’une banque où l’on voyait un homme au regard vif qui disait : « Votre argent m’intéresse ».

Les hommes les plus conscients des besoins de notre époque disent aux chrétiens la même chose : « Vos talents, votre foi, votre espérance, votre charité nous intéressent ». Ce que vous avez reçu, c’est la clé qui ouvre la vraie porte, le mot de passe qui nous fait aller plus loin, le passeport qui nous permet de passer dans le pays VRAI : celui de Dieu.

Ces clés, ces mots de passe, ces passeports, ces messages qui ne doivent pas rester secrets : les garderons-nous pour nous ? Allons-nous les enterrer, les mettre au coffre ou bien les mettre à disposition de tous ?

Oui, c’est vrai, nous avons reçu un trésor, nous avons, depuis notre Baptême, notre Confirmation, dans notre Evangile, un véritable trésor : qu’en faisons-nous ? Sert-il à quelque chose ?

Ces « talents », nous ne devons pas les garder pour nous en disant : « Moi, je fais mon salut. Je n’ai qu’une âme qu’il faut sauver. Que les autres se débrouillent, c’est leur problème ».

Dieu ne nous donne que pour distribuer à notre tour, pour partager, pour rayonner. Un don gardé pour soi est une valeur qui pourrit parce qu’elle n’est pas utilisée, comme une nourriture gardée trop longtemps au frigidaire. Tout ce que Dieu nous donne est offert par Dieu pour que je l’offre aux autres.

Rappelez-vous les dernières paroles de Jésus avant l’Ascension : « Maintenant, allez, évangélisez ; de toutes les nations faites des disciples ». Evangéliser, c’est faire fructifier les talents confiés. Posons-nous la question : « Est-ce-que je suis un secours pour les autres ? Est-ce-que je porte aux autres une espérance ? Peuvent-ils compter sur mon partage ? Bénéficient-ils, eux aussi, de tous les talents que j’ai reçus du maître ?

En cette période de crise monétaire, toutes les bourses de New-York, Londres, Paris, Tokyo peuvent s’affoler, toutes les monnaies peuvent perdre des points et les courbes plonger. Les valeurs évangéliques, elles, celles qui justement sont toujours stables et actuelles, ces valeurs-là, ont-elles « la côte » aux yeux des hommes grâce à des chrétiens qui les lancent sur le marché et les font apprécier comme étant les seules qui ne peuvent pas se dévaluer, s’écrouler, ces valeurs qui, dit la liturgie, « ne passent pas » mais « demeurent » ?

Frères et sœurs, nous sommes les gérants de cette fortune, ne la cachons pas dans l’oreiller sur lequel nous dormirons. Lançons la aux quatre coins du monde afin qu’elle puisse fructifier. N’ayons pas « peur » comme le 3e serviteur, mais usons de l’audace que la liberté de Dieu nous accorde, afin que le maître, à son retour, puisse nous dire, à nous aussi : « Très bien ». AMEN




32ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 15-21) – Homélie du D. Alexandre ROGALA

L’autre jour, un prêtre qui a été missionnaire en Centrafrique me racontait que lorsqu’il était là-bas, des gens venaient  régulièrement au presbytère pour mendier. Il frappaient à la porte, et lorsque l’un des prêtres ouvrait, ils criaient: « Matthieu 7, 7 » ! Il s’agit du verset dans lequel Jésus dit à ces disciples : « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ».

En citant ce verset de l’Évangile, ces pauvres essayaient de forcer les prêtres à répondre à leurs besoins.

Cependant, il me semble que lorsque Jésus dit « « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez », il  ne parle pas de biens matériels. Ce sont plutôt les biens spirituels que Jésus nous invite à demander et à rechercher.

Pourquoi ne chercherions-nous pas la sagesse ?

D’ailleurs, la première lecture tirée du Livre de la Sagesse (Sg 6, 12-26) nous dit que la sagesse « se laisse trouver par ceux qui la cherchent » (v. 12), ou encore que « Celui qui la cherche dès laurore ne se fatiguera pas : il la trouvera assise à sa porte » (v. 14).

Comment la recherche de la sagesse peut-elle être si simple ?

Un peu plus loin dans le livre, relisant le célèbre épisode d’1 R 3 dans lequel Salomon demande à Dieu de lui donner un cœur sage pour gouverner son peuple, l’auteur du Livre de la Sagesse écrit: « Je savais que je ne pourrais jamais obtenir la sagesse si Dieu ne me la donnait, et il me fallait déjà du discernement pour savoir de qui viendrait ce bienfait. » (Sg 8, 21) Donc pour trouver la sagesse, il suffit de la demander au Seigneur: «  Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ».

Relisons la fin du texte :

« celui qui veille à cause delle sera bientôt délivré du souci. Elle va et vient à la recherche de ceux qui sont dignes delle ; au détour des sentiers, elle leur apparaît avec un visage souriant ; dans chacune de leurs pensées, elle vient à leur rencontre » (v. 15-16).

Relevons tout d’abord qu’il est ici question de « veille » et de « rencontre » comme dans le texte d’évangile de ce dimanche: « Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre. » (Mt 25, 6) ; « Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni lheure » (Mt 25, 12).

Ensuite dans notre texte, la sagesse semble personnifiée. L’auteur en parle comme s’il s’agissait d’une personne. Mais qui est-elle ? La Tradition chrétienne l’a identifié à Jésus. Pourquoi pas ?

En ce qui me concerne, je dirai simplement que si l’auteur du Livre de la Sagesse écrit sous l’autorité de Salomon, Jésus lui, affirme qu’il est « bien plus que Salomon » (cf. Mt 12, 42). Ce n’est pas rien, car Salomon est la figure de sagesse par excellence dans l’Ancien Testament.

Soyons donc attentif à l’enseignement de « Rabbi Jésus » sur la sagesse.

Le texte d’évangile de ce dimanche est une parabole qui s’inscrit dans le cadre du long discours eschatologique des chapitres 24-25. Dans ce contexte de « fin des temps », l ‘époux désigne le Christ lors de son retour glorieux, la salle des noces est une image du Royaume des cieux, et les dix jeunes filles représentent la communauté de celles et ceux qui suivent Jésus, c’est à dire nous.

 

Dans cette parabole, cinq des jeunes filles sont « prévoyantes » et « sages » (φρόνιμοι), alors que cinq sont « insouciantes », ou plutôt « insensées » (μωραί). Jésus veut nous mettre en garde, et nous inviter à imiter les jeunes filles sages et prévoyantes. L’enjeu est donc de taille, car la « sagesse » est requise pour entrer dans la salle des noces, c’est à dire dans le Royaume des Cieux.

Que signifie « être sage » ? Quel est le sens de la métaphore des flacons d’huile que prennent avec elles, les jeunes filles sages de la parabole ?

Réfléchissons ensemble ! L’invocation des jeunes filles insensées: « Seigneur ! Seigneur ! Ouvre-nous ! » au v. 11, ne nous est-elle pas familière ? Et, n’y a t-il pas un autre passage dans l’évangile selon saint Matthieu où il est question de deux personnages, l’un « sage / prudent » (φρόνιμος) et l’autre « insensé » (μωρός) ?

En fait, le texte d’évangile que nous avons entendu aujourd’hui fait écho à la fin du chapitre 7 de l’évangile de Matthieu dans lequel l’invocation « Seigneur ! Seigneur ! » est présente, et dans lequel deux hommes, l’un prévoyant et l’autre insensé, s’apparentent aux jeunes filles prévoyantes et insensées de notre parabole. Ce chapitre 7 peut donc nous éclairer et nous permettre de comprendre ce que signifie « être sage » pour Jésus:

À la fin du chapitre 7 nous lisons:

« Ce nest pas en me disant : Seigneur, Seigneur !quon entrera dans le royaume des Cieux, mais cest en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux » (7, 21).

Nous avons déjà une réponse. S’il faut être « sage » pour entrer dans le Royaume, cette sagesse, c’est faire la volonté du Père Céleste.

Dès lors, se pose la question de savoir comment faire pour être sûr de faire la volonté du Père. Poursuivons notre lecture de la fin du chapitre 7:

« Celui qui entend les paroles que je dis là et les met en pratique est comparable à un homme prévoyant qui a construit sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, les vents ont soufflé et se sont abattus sur cette maison ; la maison ne sest pas écroulée, car elle était fondée sur le roc. Et celui qui entend de moi ces paroles sans les mettre en pratique est comparable à un homme insensé qui a construit sa maison sur le sable. La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, les vents ont soufflé, ils sont venus battre cette maison ; la maison sest écroulée, et son écroulement a été complet. » (7, 24-27)

Tout est dit. Pour faire la volonté du Père, il faut écouter les paroles de Jésus et les mettre en pratique. C’est cela la vraie sagesse. La seule qui est nécessaire pour entrer dans la salle des noces, pour entrer dans le Royaume des Cieux.

Suivant le conseil de Jésus, et à l’exemple de Salomon, tournons-nous vers Dieu le Père, « demandons et recevons ;  cherchons et trouvons » la grâce de cette sagesse véritable. Ainsi au retour glorieux du Christ, comme l’écrit saint Paul dans la deuxième lecture, « nous serons emportés sur les nuées du ciel, à la rencontre du Seigneur. Ainsi, nous serons pour toujours avec le Seigneur » (1 Th 4, 17).

Amen !




32ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 1-13) – par Francis COUSIN

« Maranatha ! »

« Le royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces, qui prirent leur lampe pour sortir à la rencontre de l’époux. »

Ces dix jeunes filles ne sont pas des demoiselles d’honneur, comme souvent on le pense, car alors, nécessairement, elles entrent toutes à la noce, même avec peu de retard. En fait, elles représentent chacun de nous, filles ou garçons, baptisés … ou pas encore … qui faisons partie des habitants du monde, et qui sont appelés … à mourir … et donc à devenir « des invités au repas des noces de l’Agneau. » (Ap 19, 9), dans le Royaume des cieux, pour les noces entre Jésus et l’Église, entre Jésus et chaque croyant …

Parmi ces jeunes filles, cinq sont dites prévoyantes, et les autres insouciantes !

Pourquoi ? parce que les prévoyantes ont amené une réserve d’huile, et pas les autres !

Et on voit à la fin de la parabole que celles qui avaient prévue une réserve sont admises dans le Royaume des cieux … et pas les autres …

Tout ça pour une question d’huile !!

La vie éternelle perdue … pour une question d’huile !

Mais que représente donc cette huile ?

Ce n’est pas tant l’huile qui compte, mais la préparation de notre la rencontre avec Jésus et son Père … mais surtout Jésus, car à la fin des temps, c’est lui qui reviendra pour juger si on peut entrer dans le Royaume des Cieux, directement ou en passant par ce qu’on appelle le purgatoire, … ou aller « Là [où] il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob, et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous-mêmes, vous serez jetés dehors. » (Lc 13,28) … ce que je ne souhaite pour personne …

Et comment s’y préparer : Saint Matthieu l’explique un peu plus loin dans un texte que nous lirons dans quinze jours, en citant les sept œuvres corporelles de miséricorde : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25,40), quand on voit Jésus dans chaque être humain, et qu’on réagit comme l’aurait fait Jésus, … c’est-à-dire avec amour …

Il faut pour cela beaucoup de temps … toute une vie … pour agir comme Jésus, pour lui montrer notre amour …

Une durée qui nous est donné par Jésus pour que nous puissions lui montrer que l’amour que nous avons pour lui est un amour vrai, qui n’est pas qu’une passade, une émotion superficielle, qui ne dure pas …

Un temps suffisamment long pour nous permettre d’améliorer notre amour, le parfaire …

            Et un temps suffisamment long pour que Jésus puisse s’assurer de « la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur » (Ep 3,18) de notre amour pour lui, … de sa sincérité …

            Dans la parabole, Jésus met en avant notre relation avec la lumière, que certaines filles avaient en suffisance, et d’autres qui ne pouvaient en avoir pour longtemps.

Si on prend le début de l’évangile selon saint Jean, on lit : « Au commencement était le Verbe, … et le Verbe était Dieu … En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ; la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée. » (Jn 1,1.4-5), et plus loin : « Moi, je suis la lumière du monde. » (Jn 8,12).

La lumière … qui illumine nos vies … c’est Jésus, c’est l’amour de Jésus pour nous … et c‘est aussi l’amour que nous avons pour Jésus.

Un amour déposé dans notre cœur le jour de notre baptême par l’onction du saint chrême, sans qu’on y fasse vraiment attention … et qui dure toute notre vie …

Une vie qui peut être courte pour certains … sans doute parce que Jésus avait éprouvé la grandeur de leur amour pour lui dès leur jeune âge. On peut penser à Ste Blandine, Ste Agnès, St Tarcisius, et plus près de nous à St Dominique Savio, Ste Thérèse de l’enfant Jésus et de la sainte face, Claire de Castelbajac, St Pier Gorgio Frassati ou Carlo Acutis … et bien d’autres, connus ou inconnus, ceux dont seul Dieu connait la grandeur de leur amour pour lui.

Tiens ma lampe allumée,

la flamme est si fragile,

Ce soir je viens mendier

ton pain, ton eau, ton huile.

Tiens ma lampe allumée

jusqu’à ton domicile, (Le Royaume des Cieux)

Toi seul, peut me guider.

 

 Allume dans mes yeux quelque chose de pur,

Quelque chose de Toi que rien ne puisse éteindre,

Ni le poids du présent, ni l’avenir peu sûr,

Et que dans mon regard ta clarté vienne poindre.

                                     (Jean-Claude Gianadda)

Francis Cousin

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Prière dim ord A 32°

 




Rencontre autour de l’Évangile – 32ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 1-13)

« Veillez donc car vous ne savez

ni le jour ni l’heure »

 

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons (Mt 25, 1-13)

Matthieu a regroupé à la fin de son évangile, juste avant la Passion, les paraboles de la vigilance où Jésus parle de sa venue à la fin des temps

 

Soulignons les mots importants 

Lire attentivement la parabole.

Jésus parle de sa venue à la fin des temps

Les jeunes filles insensées. Les cinq jeunes filles prévoyantes

Que représentent ces « vierges » ?

Toutes s’endormirent :

Est-ce qu’il leur est reproché de s’être endormies ?

La demande des insensées et le refus des prévoyantes :

Qu’est-ce que Jésus veut faire comprendre?

Voici l’époux : Qui représente l’époux ? L’époux tardait : Que symbolise ce retard ? Que représente la salle des noces ?

La porte close : En quoi cette porte close nous  interpelle-t-elle ?

Amen ! Je ne vous connais pas : comment ne pas entendre cette parole de la bouche de Jésus sans une certaine gêne ? Et pourtant sur quoi Jésus veut mettre l’accent ?

Veillez : Cela veut dire ?

Pour l’animateur  

L’assoupissement des dix jeunes filles n’est pas fautif : il indique seulement que l’époux a tardé plus que prévu ; sa brusque arrivée réveille tout le monde.

Par la discussion entre les insensées et les prévoyantes et  Jésus veut faire comprendre que l’heure est décisive et que le sort de chacun va se jouer ;  nul ne peut plus rien pour l’autre.

Cette parabole peut être lue comme une « allégorie »  (chaque détail représente quelque chose).

Les premiers chrétiens se servaient de cette histoire pour parler de la « parousie », c’est-à-dire la venue du Christ à la fin des temps :

 l’époux, c’est le Christ

 les vierges représentent l’Eglise qui se porte au-devant du Christ.

 Le retard symbolise la longue attente de la venue du Christ.

 Accéder à la salle des noces, c’est entrer dans le Royaume

 La porte close : rappelle la fin du Sermon sur la Montagne (Mt 7, 22-23) et exprime le rejet définitif.

« Je ne vous connais pas » : La sévérité  de la parole d’exclusion, et la réaction qu’elle provoque chez le lecteur,  souligne bien  le message de la parabole : pour cette fête peu ordinaire, être invité ne suffit pas ; il faut s’être préparé « Veillez ».

Sans être un être stressé comme si le retour du Christ allait se produire dans l’immédiat, le chrétien doit prendre ses dispositions pour gérer sa foi dans la durée : c’est l’image de l’huile qui ne doit jamais manquer, si l’on ne veut pas être surpris.

L’Eglise sait qu’à l’horizon de l’histoire, il y aura la venue du Christ son Epoux, mais c’est aujourd’hui, jour après jour, dans nos choix quotidiens conformes à l’Evangile que nous nous préparons

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS :

Seigneur Jésus, tu ne veux pas que nous rations le grand rendez-vous de la rencontre avec toi. Tu ne cesses de nous dire « soyez prêts ». Ne permets pas que les soucis de la vie quotidienne nous égarent loin de toi. Que chacune de nos journées soit vécue en ta présence dans l’amour, l’amour de Dieu et de nos frères. C’est bien cela « l’huile » qui ne doit jamais manquer dans la lampe de notre cœur. Nous nous rappelons que « l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné. » (Rm 5 ,5)

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

La Parole aujourd’hui dans notre vie             

– Nous sommes tous les invités des « noces éternelles »  du Royaume des cieux : Quels sentiments cela fait naître en nos cœurs ?

– L’heure de la rencontre avec le Christ peut sonner pour chacun(e) de nous à n’importe quel moment : c’est quoi concrètement « veiller » ?

–  Nous préparons-nous à sortir à la rencontre du Christ le jour de notre mort où il viendra nous chercher ?

–  Sommes-nous prêts à rencontrer Jésus-Christ quel que soit le moment où il se présente à nous, à travers telle rencontre, tel événement, telle parole de l’évangile…?

– Quels moyens l’Église nous propose-t-elle pour que « notre lampe ne manque pas de réserve d’huile» ?

Ensemble prions 

Chant : Heureux celui  …p.154  c.1-2-3-5

VEILLEZ ET PRIEZ

Seigneur Jésus, tu nous dis

de veiller et de prier,

puisque nous ne savons

ni le jour ni l’heure.

Fais que chaque jour nous trouve plus prêts

à t’accueillir en notre vie,

et que le dernier de tous

en soit plus joyeux,

puisque nous rentrerons alors à la maison.

Vienne le jour où nous te verrons face à face,

Toi notre Père,

Jésus, notre Seigneur et notre frère, et

L’Esprit qui habité en nos cœurs. Amen.

 

 

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32ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 1-13) – par le Diacre Jacques FOURNIER

 » Veillez à demeurer dans l’Amour… »

(Mt 25,1-13)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples cette parabole :
« Le royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces, qui prirent leur lampe pour sortir à la rencontre de l’époux.
Cinq d’entre elles étaient insouciantes, et cinq étaient prévoyantes :
les insouciantes avaient pris leur lampe sans emporter d’huile,
tandis que les prévoyantes avaient pris, avec leurs lampes, des flacons d’huile.
Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent.
Au milieu de la nuit, il y eut un cri : “Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre.”
Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent et se mirent à préparer leur lampe.
Les insouciantes demandèrent aux prévoyantes : “Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent.”
Les prévoyantes leur répondirent : “Jamais cela ne suffira pour nous et pour vous, allez plutôt chez les marchands vous en acheter.”
Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva. Celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et la porte fut fermée.
Plus tard, les autres jeunes filles arrivèrent à leur tour et dirent : “Seigneur, Seigneur, ouvre-nous !”
Il leur répondit : “Amen, je vous le dis : je ne vous connais pas.”
Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure. »

         

                   « Vous verrez le Fils de l’homme siéger à la droite du Tout-Puissant et venir sur les nuées du ciel », dira Jésus pendant sa Passion, peu après notre passage (Mt 26,64). Ce retour glorieux du Christ ressuscité marquera la fin de notre monde… «  Au signal donné par la voix de l’archange, et par la trompette divine, le Seigneur lui-même descendra du ciel… Pour ce qui est des temps et des moments de la venue du Seigneur, vous savez très bien, frères, que le jour du Seigneur vient comme un voleur dans la nuit » (1Th 4,16 ; 5,1‑2)… Et il en est de même pour la mort de chacun d’entre nous, qui sera aussi pour nous, « le Jour du Seigneur », le Jour du face à face avec Lui dans la Lumière…

            Avec cette parabole des dix vierges, Jésus nous invite ici à nous préparer à cette rencontre. Chacune a une lampe, que nous pourrions regarder comme notre cœur… Cette lampe n’est rien en elle-même : pour être lumière, elle a besoin d’huile… Or, l’huile dans la Bible renvoie souvent au Don de Dieu, l’Esprit Saint. Ainsi, Samuel entendit un jour Dieu lui dire : « Prends une corne que tu rempliras d’huile, et pars ! Je t’envoie auprès de Jessé de Bethléem, car j’ai vu parmi ses fils mon roi. » Et en rencontrant le jeune David, « Samuel prit la corne pleine d’huile, et lui donna l’onction au milieu de ses frères. L’Esprit du Seigneur s’empara de David à partir de ce jour-là » (1Sm 16,1-13)…

            Or « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16) et le propre de l’Amour est de donner, gratuitement, tout ce qu’Il Est en Lui-même (Jn 3,35). Si « Dieu est Esprit  » (Jn 4,24) et si « Dieu est Saint » (Ps 99(98)), il ne cesse donc de donner « l’Esprit Saint ». Mais pour le recevoir, encore faut-il se tourner de tout cœur vers lui, et donc au même moment renoncer à tout ce qui lui est contraire. Tel est l’appel au repentir, à la conversion que Jésus lance en St Marc dès ses premières paroles (Mc 1,15). Que cet appel soit entendu, et aussitôt, le Don de l’Esprit pourra trouver le chemin du cœur qui s’ouvre ainsi à lui, et il accomplira son œuvre purificatrice, vivificatrice, illuminatrice… Et il s’agira ensuite de « se tenir sur nos gardes, de peur que nos cœurs ne s’appesantissent dans la débauche, l’ivrognerie, les soucis de la vie » (cf. Lc 21,34). « N’éteignez donc pas l’Esprit », dira St Paul, « mais vérifiez tout : ce qui est bon, retenez-le ; gardez-vous de toute espèce de mal » (1Th 5,19-22). Autrement, privés du Don de Dieu, nous ne serions plus en communion avec lui, une situation qu’évoque Jésus avec l’époux qui dit ici aux vierges folles: « Je ne vous connais pas »…

                                                                                                                                              DJF

           




32ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 25, 1-13)- Homélie du Père Louis DATTIN

Les 10 Vierges

 Mt 25, 1-13

 

Pour bien comprendre cette comparaison choisie par Jésus, il faut savoir comment se passait une noce à son époque et dans son pays. Pendant les fiançailles, les jeunes gens restaient séparés chacun dans leur maison, chez leurs parents respectifs. Le jour de la noce, les parents de la jeune fille allaient chez ceux du jeune homme pour mettre au point les derniers détails au sujet de la dot. Ces palabres orientaux duraient parfois fort longtemps. D’ailleurs, on n’était pas pressé puisque c’est le soir, tard, à cause de la chaleur, que commençait la fête proprement dite.

Pendant ce temps-là, la mariée attendait dans sa maison, en compagnie de ses demoiselles d’honneur, jusqu’à ce que le futur mari arrive et vienne chercher sa fiancée pour la conduire dans sa maison. C’était alors un cortège joyeux, une procession aux flambeaux qui se déplaçait d’une maison à l’autre.

Mais une fois le cortège introduit dans la maison du mari, on fermait les portes, tout de suite, pour éviter que ne s’introduisent de faux invités, des pique-assiettes et aussi de mauvais plaisants toujours prêts à faire des farces de plus ou moins mauvais goût pendant une nuit de noces.

Et voilà une histoire joliment commencée. Les dix jeunes filles du cortège se préparent : la robe, le maquillage, les bijoux.

C’est le grand jour, ça n’arrive pour elles que deux ou trois fois dans leur vie ! Et, vous savez ce que c’est, un jour de fête ; on est plus ou moins affolé, il règne un climat fiévreux, les autres amies qui arrivent déjà, alors on se dépêche : « Ah ! Ma lampe, où est-elle ? Ouf ! La voilà ! Vite, allons rejoindre les autres ».

Les palabres pour le contrat de mariage ont dû être longs, ce soir-là, un peu plus longs que d’habitude. On attend.

L’époux ne vient toujours pas, alors, on s’allonge, et comme toute la nuit, on va danser, il serait sage de prendre un peu de sommeil à l’avance. Pendant ce temps-là, les lampes continuèrent à brûler, car le fiancé peut arriver d’un moment à l’autre. Et tout à coup, dans la nuit, pas loin de la maison, on entend un cri : « Voici l’époux, sortez à sa rencontre ! »

Dès lors, entre les demoiselles d’honneur, qui, toutes, se sont assoupies, s’opère un tri décisif. Cinq d’entre elles sont dites ‘’prévoyantes’’, sages, avisées : un qualificatif qui traduit moins une sagesse humaine qu’une intelligence active et efficace du projet de Dieu. Celles-là se trouvent immédiatement prêtes à prendre part, ‘’ lampes allumées’’, au cortège qui s’avance à la rencontre de l’époux.

Par contre, les cinq autres, dites ‘’insensées’’ : c’est plus qu’une simple distraction, c’est une attitude spirituelle ‘’d’oubli de Dieu’’. Est ‘’insensé’’ selon la Bible, « celui qui s’égare sur des chemins qui ne sont pas ceux de Dieu ». Celles-là, n’ayant pas su prévoir une quantité d’huile suffisante, se trouvent prises au dépourvu par l’arrivée soudaine de l’époux, le temps de courir chez le marchand, le cortège a déjà pénétré dans la maison nuptiale et la porte de la salle des fêtes s’est définitivement refermée.

Le sens de cette parabole, vous l’avez compris. Un soir, une nuit : la nuit est dans la Bible le symbole du péché. Le sommeil, lui, est le signe de l’engourdissement spirituel.

Un cri retentira : ‘’Jésus !’’ Il est là ! Il vient te chercher ! Il vient t’emmener, te prendre dans son cortège nuptial qui va célébrer éternellement les noces de Dieu avec l’humanité, noces du Christ avec son Église.

Es-tu prêt ? Es-tu capable de te lever immédiatement avec ta lampe allumée, c’est-à-dire avec une vie intérieure éclairée et nourrie par la pratique évangélique, pour aller à la rencontre de celui, qui, nous le savons, doit venir.

 

Tous les dimanches à la messe, nous disons : « Nous attendons ton retour » et « nous espérons le bonheur que tu promets et l’avènement de Jésus-Christ notre sauveur ».

L’attendons-nous vraiment ? Car là est le problème : « Nous ne savons ni le jour ni l’heure » et nous risquons, nous aussi, de nous endormir, d’être pris à l’improviste.

Sommes-nous vraiment prêts à rencontrer Jésus-Christ quel que soit le moment où il se présente à nous, pas seulement à la fin de notre existence dont nous ne savons pas d’ailleurs, quand elle aura lieu, mais aussi rencontre de lui, avec lui, dès ici-bas, à travers telle personne, tel événement, telle parole de l’Évangile ?

Dans nos moments d’obscurité et de doutes, quand c’est la nuit et que le sommeil ou la lassitude nous gagne, sommes-nous prêts à nous dresser et à dire au Seigneur :

«Tu es là, je t’attendais. Dis-moi ce que je dois faire pour t’accompagner, faire partie de ton cortège : j’ai préparé pendant ma vie, assez de force, assez de lumière, assez de foi pour te tenir compagnie jusqu’à ce que nous arrivions ensemble à la salle du Royaume ?»

Sincèrement, nous préparons-nous à sortir avec joie à la rencontre du Christ qui vient nous chercher chaque jour pour vivre avec lui dans le quotidien, et un jour, celui de notre passage vers lui, quand il viendra nous chercher définitivement.

Pourrai-je dire simplement :

« Mais, bien sûr, Seigneur, je t’attendais, je savais que j’avais rendez-vous avec toi ; aussi tout est prêt ; j’ai eu assez de foi, assez d’amour, assez d’espérance pour ne vivre qu’en toi, pour toi, avec toi ».

Le Seigneur nous rappelle aujourd’hui : « Attention ! Une rencontre, ça se prépare ». Il faut, comme dit la rose au petit prince, « s’habiller le cœur ».

 Notre cœur est-il assez habillé ? A-t-il revêtu la tenue des noces auxquelles nous sommes invités ? Avons-nous préparé assez d’huile spirituelle pour devenir lumière pour les autres ?

‘’Vous êtes la lumière du monde’’. Une lumière, on ne la met pas sous la table, mais dessus, pour qu’elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison.

Chrétiens, nous sommes des porte-lumière : « Que votre lumière brille aux yeux des hommes pour que, voyant vos bonnes actions, ils puissent, eux aussi, être éclairés et rendre gloire à votre Père qui est aux Cieux ».

Cette rencontre : il faut, et c’est là la leçon de cette parabole, la PREPARER. Nous pouvons la redouter ou la désirer. Peu importe, elle est inéluctable. Il s’agit de la préparer avec soin. Comment ? Par un désir toujours plus ardent d’aller vers Dieu et ceci dès maintenant . Nous avons chanté : « Mon âme a soif du Dieu Vivant ; quand le verrai-je face à face ? » En avons-nous si soif que ça ? Si oui, libérons-nous progressivement de tout ce qui nous détourne de lui et ceci, dans la droiture, la simplicité, la pureté du cœur : on ne met pas de l’eau à la place de l’huile !

Je vous livre pour finir cette belle prière de St-Augustin, elle est l’expression de ce que devrait dire notre cœur aujourd’hui :

« Seigneur mon Dieu, Père, Fils et Esprit Saint,

je t’ai cherché autant que je l’ai pu.

J’ai désiré te voir, j’ai beaucoup travaillé à te rencontrer.

Dieu, mon unique espoir,

permets que je ne me lasse jamais de te chercher ;

mais fais que je cherche ardemment ta face.

Donne-moi la force de te chercher,

toi qui m’as trouvé,

toi qui m’as donné, de plus en plus, l’espoir de te trouver ». AMEN