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Solennité de la Toussaint par le Diacre Jacques FOURNIER (1 Novembre)

« Dieu nous appelle tous au Bonheur » (Mt 5,1-12)…

 

En ce temps-là, voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui.
Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Il disait :
« Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés.
Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage.
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés.
Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde.
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu.
Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu.
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! C’est ainsi qu’on a persécuté les prophètes qui vous ont précédés.

béatitudes matthieu

 

            Jésus n’a semble-t-il, ici, qu’un seul mot à la bouche : « Heureux », répété neuf fois, et ce bonheur est proposé dès maintenant. En effet, dans cet appel, « heureux les pauvres de cœur, le Royaume des Cieux est à eux ! », le verbe est au présent ! Mais qui sont ces « pauvres de cœur » ? Jésus en est le premier exemple… Il est « l’Unique Engendré » (Jn 1,14.18) en tant qu’il reçoit de toute éternité du Père son être et sa vie. « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même. Je vis par le Père » (Jn 5,26 ; 6,57). Et il ne peut même rien faire de lui-même (Jn 5,19-20.30), car ses œuvres sont en fait celles du Père (Jn 14,10). Lui, il est « le Serviteur » du Père (Ac 3,13.26 ; 4,27). Jésus est donc « pauvre de cœur », « doux et humble de cœur » (Mt 11,29), car tout ce qu’Il Est, tout ce qu’il fait, il le doit non pas à lui-même, mais à un autre, le Père… « Être pauvre de cœur », c’est donc mettre un autre que soi-même à la première place en son cœur. C’est accepter de recevoir tout ce que l’on est, tout ce que l’on vit d’un autre… Le Royaume des Cieux n’est pas ainsi une réalité spirituelle qui se gagne à coup de bonnes actions qui mériteraient une récompense. Non, le Royaume des Cieux est une histoire d’amour entre le Maître de ce Royaume, Dieu, et tous ceux et celles qu’il invite à y entrer : tous les hommes, ses enfants, tous créés « à l’image et ressemblance » (Gn 1,26-28) de leur Dieu et Père (Lc 11,2 ; Jn 20,17). En effet, nous dit Jésus, « ne crains pas, petit troupeau car votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume » (Lc 12,32). Ce Royaume est donc donné gratuitement par amour à quiconque est assez « pauvre de cœur » pour accepter de le recevoir… Et ce Royaume des Cieux n’est pas un lieu, mais un état de vie, un Mystère de Communion avec Dieu dans l’unité d’un même Esprit : « Le Royaume des Cieux est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint » (Rm 14,17), cet Esprit Saint que Dieu donne gratuitement (1Th 4,8), par amour, « aux méchants et aux bons, aux justes et aux injustes » (Mt 5,45). Mais pour recevoir ce « Don de Dieu » (Jn 4,10, Ac 2,38 ; 8,20 ; 10,45 ; 11,17…), puisque le mal ne peut coexister avec Dieu, il est absolument nécessaire de se convertir de tout cœur, de renoncer au mal avec l’aide de Dieu, de changer de vie… D’où les premières Paroles de Jésus en St Marc : « Le Royaume des Cieux est tout proche ; repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle » (Mc 1,15), Bonne Nouvelle d’un Royaume donné gratuitement avec le Don de l’Esprit Saint… « Recevez l’Esprit Saint » dira le Ressuscité à ses disciples (Jn 20,22)… et avec ce Don de Dieu, « entrez dans la Vie » (Mc 9,43.45.47), la Vie éternelle, Source du seul vrai Bonheur…              DJF




30ième dimanche du temps ordinaire par P. Claude TASSIN (Spiritain)

  Commentaires des Lectures du dimanche 25 octobre 2015

Jérémie 31, 7-9 (L’aveugle et le boiteux, je les fais revenir)

Ces trois versets appartiennent à une section du livre de Jérémie souvent intitulée « livret de la consolation » (Jérémie 30, 1 – 31, 40). Ces deux chapitres chantent l’espérance du prophète. Il envisage le retour des Israélites du Nord (Jacob, Éphraïm), le royaume de Samarie, emmenés captifs en Assyrie (en 722 avant notre ère), vers le « pays du Nord » (voir 2 Rois 17, 5-18). Il imagine même que les deux nations, celle de Samarie et celle de Juda, s’uniront de nouveau en un seul peuple (Jérémie 31, 38-40), vivant ensemble d’une nouvelle alliance dans laquelle la Loi du Seigneur serait inscrite dans les cœurs (Jérémie 31, 31-34). Mais il se peut que ces versets de Jérémie aient été « contaminés » par l’espérance ultérieure du nouvel exode des Judéens, revenant de leur déportation à Babylone (Isaïe 40 – 55). Ainsi va, dans l’épaisseur de l’histoire humaine, la transmission de la révélation biblique.

  Retenons deux faits. C’est, d’une part, l’espérance d’un rassemblement universel, des « extrémités du monde ». C’est, d’autre part et contre ceux qui voient dans l’Ancien Testament l’image d’un Dieu sévère, cette tendre déclaration : « Je suis un père pour Israël. » Éphraïm, figure des tribus du Nord (Samarie), fut béni par Jacob en fils aîné à la place de Manassé, réel aîné (cf. Genèse 48, 9-20). Car, dans l’histoire des patriarches et contre la culture ambiante, Dieu choisit souvent pour ses desseins le cadet à la place de l’aîné. Relevons un beau parallélisme croisé (AB-BA) : « Je suis un père (A) pour Israël (B), Éphraïm (B) est mon fils aîné (A). »

La liturgie retient ce texte à cause d’une mention de l’aveugle, censée éclairer l’épisode de la guérison de Bartimée (évangile). On aurait pu aussi évoquer Isaïe 35, 5-6.

Hébreux 5, 1-6 (« Tu es prêtre de l’ordre de Melkisédek pour l’éternité. »)

L’auteur poursuit sa méditation sur le Christ « devenu grand prêtre » et exerçant sa fonction d’intercesseur auprès de Dieu en faveur des croyants. La première partie de la page insiste sur cette fonction d’ambassade, en soulignant la faiblesse d’un Jésus terrestre qui partage nottre condition humaine en sa fragilité. Le paragraphe s’achève par un point d’accrochage avec la suite : la fonction sacerdotale ne relève pas d’un honneur personnel, mais d’une vocation, d’une investiture divine. Le texte évoque Aaron, frère aîné de Moïse, ancêtre de tous les grands prêtres en Israël (cf. Exode 28, 1 et Lévitique 8 – 9) et mentionné trois cent fois dans l’Ancien Testament.

  À ce sacerdoce « aaronique », la seconde partie de la page oppose celui de Melkisédek, un nom qui, ignoré du reste du Nouveau Testament, reviendra encore sept fois dans notre épître. Melkisédek surgit dans une rencontre avec Abram (Genèse 14, 17-20) et ne se retrouve que dans un verset du célèbre Psaume 109 [110], cité ici : « Tu es prêtre de l’ordre de Melkisédek pour l’éternité. » Le caractère énigmatique de ce dernier a poussé les légendes juives, jusque dans la bibliothèque de *Qoumrân, à voir en lui un « ovni », un personnage de nature angélique, grand prêtre du culte dans le Temple des cieux et destiné à juger l’univers à la fin des temps. Il n’en fallait pas plus pour que l’Épître aux Hébreux voie en Jésus l’accomplissement de cette figure mystérieuse. Notre auteur ajoute une autre citatrion psalmique : « Tu es mon Fils… » (Psaume 2, 7). Rappelons que, dans la tradition juive, le « Messie » (Psaume 2, 2) peut être soit un roi, soit un prophète, soit un prêtre, soit les trois figures à la fois.

* Qoumrân et Melkisédek. « (Dieu) a fait tomber leur lot dans la part de Melkisédek, lui qui les ramènera vers ceux-ci et proclamera pour eux la libération en leur remettant la dette de leurs fautes. Et cela se fera dans la première semaine du jubilé venant après neuf jubilés. Et le jour des Expiations, c’est la fin du dixième jubilé. (…) Ce sera le moment de l’année de la bienveillance de Melkisédek. C’est lui qui, dans sa puissance, jugera les Saints de Dieu selon les actes de justice, ainsi qu’il est écrit à son sujet dans les cantiques de David qui a dit : Un dieu est debout dans l’assemblée divine, au milieu des dieux il juge. C’est aussi à son sujet qu’il a dit : Au-dessus d’elle retourne vers la hauteur, un dieu jugera les peuples » (Légende hébraïque de Melkisédek, grotte 11 de Qoumrân).

 

 

Marc 10, 46b-52 (Rabbouni, que je retrouve la vue !)

Notre extrait liturgique omet le début d’un verset qui, dans son intégralité, dit ceci : « Ils arrivent à Jéricho. Et comme il sortait de Jéricho… » On ne sait pas ce que Jésus a fait à Jéricho. C’est l’indice que Marc, qui n’a pas connu le Jésus terrestre, puise à une source antérieure. En outre, un évangile apocryphe du 2e siècle (l’Évangile secret de Marc), s’est chargé de combler la lacune par le récit d’une trouble rencontre de Jésus avec un jeune homme (celui de Marc 14, 51-52 ?) dans cette ville. Tout ceci n’est qu’anecdotique.

Jéricho

D’abord, du point de vue théologique, le passage de Jésus à Jéricho s’impose, avant qu’il soit acclamé comme le Messie lors de sa proche entrée à Jérusalem : « Béni soit le Règne qui vient, de notre père David ! » (Marc 11, 10). De fait, l’oasis de Jéricho, à quelque vingt kilomètres de la capitale, était une ville royale par excellence et l’on comprend alors que Bartimée, par deux fois, interpelle Jésus comme « fils de David ». En second lieu, rappelons que le fils de David le plus réputé est Salomon que les traditions juives considéraient comme le saint patron des exorcistes et des guérisseurs. Quand les malheureux invoquent Jésus comme « fils de David », ils n’élaborent pas dans leur âme un acte foi théologique en lui comme Messie, même si les évangélistes écrivent en ce sens. Simplement, ils espèrent trouver en Jésus un nouveau Salomon soulageant leurs souffrances.En outre, le titre araméen Rabbouni décerné par l’aveugle à Jésus exprime une certaine proximité empreinte de respect qui fait contraste avec la solennelle requête à l’adresse du « fils de David ».

Miracle ou vocation ?

Il faut se méfier des traits apparemment anecdotiques de saint Marc. Ils sont lourds de sens. Le fait que Bartimée bondit vers Jésus se réfère à la promesse d’Isaïe 35, 5-6 : « Alors se dessilleront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds s’ouvriront. Alors le boiteux bondira comme un cerf… » L’abandon du « manteau » peut se référer à l’image du vêtement neuf qu’on ne coud pas sur une vieille pièce (Marc 2, 12). Dans ce cas, il s’agit de la nouveauté de la destinée de celui qui a recouvré la vue. À moins qu’il ne s’agisse d’une annonce de la fuite du jeune homme, représentant les futurs baptisés, qui abandonne son vêtement lors de l’arrestation de Jésus à Gethsémani (Marc 14, 52-53). Sur ce point, la recherche est ouverte.

  Certes, le récit a pour cadre une scène de miracle. Mais on reste frappé par ces expressions : « Appelez-le…, il t’appelle… et il le suivait sur le chemin », indices du motif d’une vocation. L’évangile de Marc ne connaît que deux guérisons d’aveugles. La première, réalisée difficilement à Béthsaïde (Marc 8, 22-26) visait l’inintelligence des disciples : « Vous ne comprenez pas encore ? Vous ne saisissez pas ? Avez-vous donc l’esprit bouché, des yeux pour ne pas voir et des oreilles pour ne pas entendre ? » (Marc 8, 17-18). Cette fois, la guérison de l’aveugle de Jéricho semble facile. Elle évoque symboliquement la démarche du vrai disciple prêt à suivre Jésus… sur le chemin de la croix. La dernière invocation de l’aveugle s’ouvre par le titre de Rabbouni : mon maître, mon rabbi. Cette forme, rabbouni, ne se retrouve dans le Nouveau Testament qu’une autre fois,  sur les lèvres de Marie de Magdala (Jean 20, 16).

Sur le chemin

Depuis Marc 10, 32-34, nous savons que ce chemin mène à la croix et que les relations entre les membres de la communauté chrétienne, relations exigeant une conversion, se vivent sous l’horizon d’un chemin de croix. En un premier épilogue (dimanche dernier), Jacques et Jean n’ont pas compris cette perspective : ils demandent toujours les premières places dans la gloire de Jésus. À l’opposé et symboliquement, Bartimée nous représente : nous avons pour vocation de suivre le Crucifié sur sa route, dans une conversion constante des relations interhumaines qui entre dans la logique de la croix.

  Pour finir et en manière de plaisanterie, notons qu’il n’y a pas à élucubrer sur le nom de « Bar-timée » (= fils de Timée) pas plus que sur celui de « Jaïre » (Marc 5, 22). Comme nous connaissons, chez les Français, « Marius et Olive », et comme Flavius Josèphe appelle souvent « Éléazar » des personnages juifs dont il ne connaît pas vraiment l’identité, les évangélistes tendent à « baptiser », selon une tendance pan-orientale, des anonymes.




30ième dimanche du temps ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER (25 Octobre)

« Jésus, fils de David, aie de la miséricorde pour moi ! » (Mc 10,46-52)

En ce temps-là, tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, le fils de Timée, Bartimée, un aveugle qui mendiait, était assis au bord du chemin.
Quand il entendit que c’était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : « Fils de David, Jésus, prends pitié de moi ! »
Beaucoup de gens le rabrouaient pour le faire taire, mais il criait de plus belle : « Fils de David, prends pitié de moi ! »
Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le. » On appelle donc l’aveugle, et on lui dit : « Confiance, lève-toi ; il t’appelle. »
L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus.
Prenant la parole, Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » L’aveugle lui dit : « Rabbouni, que je retrouve la vue ! »
Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t’a sauvé. » Aussitôt l’homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin.

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Jésus est en marche vers Jérusalem où il va vivre sa Passion pour le salut du monde. Bartimée, « un mendiant aveugle » est « assis au bord de la route ». Par deux fois, il lui crie dans le grec des Évangiles : « Éléêson mé ». Or, « éléos », c’est « la miséricorde ». On pourrait donc traduire : « Jésus, Fils de David, aie de la miséricorde pour moi ! ». Mais c’est exactement ce que Jésus est venu mettre en œuvre pour tous les hommes : « la Toute Puissance de la Miséricorde de Dieu », pour reprendre les termes de la Vierge Marie (Lc 1,49-50), car il est, dit peu après Zacharie, « l’Astre d’en haut, qui nous a visités dans les entrailles de miséricorde de notre Dieu ». Autrement dit, tout en lui n’est que manifestation de l’infinie Miséricorde qui remplit le cœur de Dieu… Le mal nous a plongés de cœur, spirituellement, dans les ténèbres ? « L’Astre d’en Haut nous a visités pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres » car sa Lumière, et « Dieu Est Lumière », « a brillé dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas saisie » (1Jn 1,5 ; Jn 1,5). Mais, puisque « Dieu Est Amour » (1Jn 4,8.16) et qu’Il n’Est qu’Amour (François Varillon), cette Lumière est celle de l’Amour. Autrement dit, aucun péché, aucune misère, aussi énorme soit-elle, ne pourra empêcher Dieu d’Être ce qu’Il Est, et Il Est Amour, heureux de notre joie, bouleversé par nos souffrances et par nos peines, fussent-elles les conséquences de notre péché… Aussi n’a-t-il qu’une Parole à nous dire, et cette Parole retentit jusqu’au cœur de notre misère : « Je t’aime ! » « Le Père Lui-même vous aime », nous dit Jésus (Jn 16,27 ; 17,23 ; Ap 1,5). Et dans ce « je t’aime » se cache un Don qu’il veut voir régner en nos cœurs et qu’il ne reprendra jamais : le Don de sa Lumière, appelée à régner dans nos nuits, le Don de sa Vie, appelée à triompher de tous nos états intérieurs de « mort »…

« Le Seigneur a beaucoup de cœur », « il est miséricordieux et compatissant » (Jc 5,11)… « JE SUIS miséricordieux », avait-il déjà dit par son prophète Jérémie (3,12). Or, ce seul « JE SUIS » suffit à exprimer tout ce qu’Il Est (Ex 3,14). Nous retrouvons ainsi, avec l’Ancien Testament, que Dieu Est tout entier Amour, un Amour qui face à notre misère prend le visage d’une inlassable Miséricorde. Et il n’a qu’une Parole à nous répéter jour après jour : « Je t’aime », et tes blessures, je les ai prises sur moi, pour que tu en guérisses: « Par tes blessures, ô Christ, nous sommes guéris ! » (1P 2,24). Aussi nous invite-t-il jour après jour à tout lui offrir, et il triomphera, pour notre joie !     DJF




Rencontre autour de l’Evangile – 30ème dimanche du Temps Ordinaire

 » Que veux-tu que je fasse pour toi…

Rabouni, que je retrouve la vue… « 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

(Mc 10, 46-52)

C’est la dernière étape avant l’entrée à Jérusalem où Jésus connaîtra l’opposition la plus farouche puis sa Passion et sa mort. Dans cette guérison de l’aveugle, Marc voit le type du vrai croyant : négligeant les menaces, il appelle Jésus à l’aide et bondit vers lui quand le Christ le fait venir.

Regardons-réfléchissons-méditons 

Faire lire lentement le texte, suivre les personnages et entrer dans le dialogue

Jéricho : Une ville bien connue de la Bible, située pas loin de la Mer Morte. Elle est située à 400 mètres en dessous du niveau de la mer. Jérusalem est à 600 m au-dessus du niveau de la mer : une simple addition nous aide à réaliser ce que la bible appelle « la montée vers Jérusalem ».

Avec ses disciples et une foule nombreuse : Que fait cette foule avec Jésus ?

Un mendiant aveugle, Bartimée : Que signifie la présence de cet aveugle sur la route de Jésus ?

Jésus, fils de David : Pourquoi ce titre donné à Jésus ?

Aie pitié de moi : Quels sentiments expriment ce cri de l’aveugle ?

Beaucoup de gens l’interpellaient vivement pour le faire taire : La foule est souvent un obstacle qui empêche d’approcher Jésus. Pensons à Zachée.

Jésus s’arrête et dit : « appelez-le » : Admirer l’attitude de Jésus par rapport à celle de la foule.

 Confiance, lève-toi, il t’appelle : Jetant son manteau, il bondit et vint vers Jésus : Quelle était l’importance du manteau au temps de Jésus ? Que signifient ce bond et cette course de l’aveugle, alors qu’il est dans sa nuit ?

Que veux-tu que je fasse pour toi ? Pourquoi cette question étonnante de Jésus ?

Rabbouni, que je voie : Quels peuvent être les deux sens du mot « voir » dans la demande de l’aveugle ?

Va, ta foi t’a sauvé… : Quelle est le sens de la guérison faite par Jésus ?

 Il cheminait à sa suite :

Comment définir le disciple de Jésus dans l’évangile ? 

 

 

  

Pour l’animateur

Jéricho, c’est la dernière ville étape avant de « monter à Jérusalem ». Cette montée, c’est le symbole de toute la vie de Jésus, qui a été une montée vers la Passion et la Mort.

L’aveugle Bartimée, est le symbole de l’aveuglement des disciples qui ne comprennent pas que Jésus doit passer par le chemin du Serviteur souffrant pour réaliser sa mission de Messie.

Fils de David : Dans la tradition biblique, c’est le titre qu’on donnait au Messie attendu par le Peuple élu. Pour l’aveugle, Jésus est ce Roi-Messie : C’est pourquoi, il l’appelle « Fils de David ». «Aie pitié de moi » : Son cri est l’expression d’une grande détresse, mais surtout d’une étonnante confiance.

La foule le considère comme un gêneur et veut empêcher le pauvre de parler, mouvement de rejet qui caractérise bien la société de l’époque vis à vis des exclus. A l’inverse de la foule qui est pressée d’aller à Jérusalem, Jésus « s’arrête » : Une fois encore, le Messie manifeste sa volonté de se laisser approcher par ceux que ses amis veulent  écarter. (comme avec les enfants).

Jésus le fait appeler. On lui dit : « confiance, lève-toi ! Il t’appelle » : Ce « lève-toi » veut dire aussi « ressuscite ».

L’aveugle jeta son manteau : Dans la Bible, le manteau du pauvre, c’est à la fois sa maison, sa couverture, son lit… le vêtement symbolise la personnalité de celui qui le porte. Son manteau est l’unique bien que possède « le pauvre ». Il quitte tout pour suivre le Christ, ce que l’homme riche n’a pas pu faire.

Il bondit : Ce bond, alors qu’il est encore  dans la nuit, est le bond de la foi. Il courut vers Jésus : Pareillement cette course pour rejoindre le Sauveur exprime sa grande foi impatiente.

« Que veux-tu que je fasse pour toi ? » Cette question étonne, car les besoins de cet homme sont évidents. Mais Jésus respecte toujours la liberté humaine de celui qui l’approche. Et il veut qu’il exprime son attente.

« Rabbouni, que je voie » : ces mots ont toute leur force. Rabbouni signifie « mon Maître », avec une note de vénération et de familiarité, (un peu comme lorsque nous disons « Mon Seigneur et mon Dieu »). Le « que je voie » exprime sans doute le désir de retrouver la vue, mais aussi un besoin plus profond.

La réponse de Jésus le rejoint au niveau le plus profond, au niveau de sa foi : « va, ta foi, ta sauvé » : « va », c’est un envoi. Jésus libère l’homme de ce qui le paralysait. Le don fait par Jésus est plus qu’une guérison physique : c’est le salut de l’homme tout entier. C’est le sens profond des miracles accomplis  par Jésus.

Aussitôt : L’homme guéri emboîte le pas à Jésus. Il se met à le suivre : formule bien connue qui désigne l’attitude du « disciple ».

Bartimée, qui était assis à côté de la route, aveugle et mendiant, le voilà debout, en marche sur la route, voyant clair et porteur de la Bonne Nouvelle.

Placé à cet endroit où Jésus chemine vers Jérusalem, entraînant ses disciples et la foule vers « une lumière » plus grande sur sa personnalité et sa mission, ce récit veut montrer clairement ce qui  fait « le vrai disciple » : Il faut se laisser conduire par le Maître à l’illumination de la foi : Jésus invite ses amis et tous ceux qui veulent le suivre à ouvrir les yeux de leur cœur pour accueillir, dans la foi, la vision d’un Messie souffrant et triomphant.

 

 

 TA PAROLE DANS NOTRE VIE

 La Parole aujourd’hui dans notre vie

 Quelle est la bonne nouvelle que nous apporte cet évangile ?

Quel visage de Dieu Jésus nous révèle-t-il dans cette rencontre avec l’aveugle Bartimée ?

 Jésus entend quand nous crions vers lui notre misère.

Cet aveugle voulait voir clair ; il a crié sa détresse à Jésus, malgré l’hostilité de la foule. Est-ce que nous demandons à Jésus, avec la même persévérance, de voir le chemin où la volonté de Dieu nous appelle ?

En la personne de Jésus, le Père nous révèle qu’il ne veut laisser personne au bord du chemin, dans le « fénoir ». 

Quelle attention portons-nous à ceux qui « ne voient pas », ceux qui sont dans « la nuit de la foi », ceux ont perdu le chemin de leur baptême, le chemin de l’Église, ceux qui sont « assis au bord du chemin » : Peut-être que leur cri est étouffé par notre différence.

Peut-être sommes-nous aveugles sur la médiocrité de notre foi, de notre vie intérieure. Peut-être nous nous fermons les yeux sur notre misère pour éviter de suivre les exigences du Christ ?

ENSEMBLE PRIONS

Chant : Ouvre mes yeux, Seigneur (Carnet des paroisses p. 183)

 Notre Père

 

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29ième dimanche du temps ordinaire par P. Claude TASSIN (Spiritain)

  Commentaires des Lectures du dimanche 18 octobre 2015

Isaïe 53, 10-11 (S’il remet sa vie en sacrifice de réparation, il verra une descendance et il prolongera ses jours.)

Ce passage du livre d’Isaïe conclut le fameux poème du Serviteur souffrant (Isaïe 52, 13 – 53, 12) que nous lisons dans son intégralité le vendredi saint, au début de la célébration. Les deux versets ici retenus par la liturgie veulent établir un parallèle avec la déclaration finale de Jésus dans l’évangile de ce jour : « Le Fils de l’homme » est venu pour « donner sa vie en rançon pour la multitude. » Le rapprochement lexical entre ces deux textes n’est pas évident (voir plutôt Isaïe 43, 3-4). Néanmoins, le rapport entre le « Serviteur » énigmatique du livre d’Isaïe et la mission de Jésus reste pertinent.

  Dans ce poème, le Serviteur représente sans doute les exilés à Babylone. Ils ne sont pas plus pécheurs que ceux qui, restés sur la terre d’Israël, ont échappé à cette épreuve. Au contraire, les déportés ont dans leur exil et aux yeux de Dieu, la valeur d’un *sacrifice de réparation qui pardonne ici les péchés de tout le peuple, « les multitudes », même de ceux qui n’ont pas connu ce malheur. En d’autres termes, le Seigneur ne punira plus son peuple, parce que la fidélité envers lui des exilés est un sacrifice suffisant pour obtenir son pardon et un gage d’avenir, comme s’ils se « chargeaient », sans le savoir peut-être, des péchés de tous.

  Le Serviteur, ainsi compris, est un « juste » et il « justifie » les multitudes. Ce verbe « justifier » se comprend, au sens de la théologie juive : est juste celui que Dieu considère comme juste, en raison de sa conduite. Ainsi, le Serviteur, par sa fidélité et son sacrifice, un sacrifice qu’il ignore lui-même, obtient le fait inouï que le Peuple entier redevient juste aux yeux du Seigneur. C’est ce paysage spirituel qu’il faut avoir en mémoire, lorsque Pierre déclare, dans le Temple et à propos de Jésus : « Vous avez chargé le Saint et le Juste » (Actes 3, 14).

* Le sacrifice de réparation. Voir le rituel de Lévitique 5, 14-26. C’est une compensation personnelle donnée à Dieu, par l’offrande d’un bélier pour les fautes commises par inadvertance contre l’un ou l’autre commandement. Dans le 4e chant, c’est le Serviteur, quel que soit ce personnage, qui joue volontairement ce rôle. D’où cette image : « comme du petit bétail conduit à l’abattoir » (Isaïe 53, 7).

Hébreux 4, 14-16 (« Avançons-nous avec assurance vers le Trône de la gloire. « )

Lorsqu’on présente Jésus comme « Messie », répétons-le, on se rappelle que, dans l’Ancien Testament, le mot messie signifie oint par l’huile et que l’onction peut évoquer trois personnages, trois figures : le roi, le prophète et le grand prêtre. Les évangiles se sont concentrés sur les figures royale et prophétique pour présenter Jésus comme Messie. Apparemment, seule la Lettre aux Hébreux s’est risquée à présenter Jésus comme Messie en tant que grand prêtre, grand prêtre par son entrée dans le sanctuaire du ciel à travers sa Passion et sa Résurrection.

  Dans ces deux versets d’aujourd’hui, on passe, dans la même veine, à un autre registre. Dans nos inquiétudes politiques et économiques, à qui nous fier ? Nous voici convoqués à « tenir ferme dans l’affirmation de notre foi ». La figure du grand prêtre est double. D’une part, selon les légendes juives dont s’inspire notre auteur, le grand prêtre est semblable à un ange qui est accès au ciel et peut même se rendre invisible. D’autre part, selon l’histoire de la Bible et du judaïsme, certains grands prêtres furent assassinés pour avoir défendu la justice au sein de leur peuple. Voir, par exemple, 2 Chroniques 24, 20-22. C’est ce second aspect que retient notre texte. Jésus n’est pas venu pour résoudre nos misères, mais pour partager nos épreuves. Il a endossé les faiblesses de l’humanité, jusqu’à la croix évoquée ici à demi-mot. Il a donc affronté la perspective de la mort, selon la commune destinée humaine et, lui « il n’a pas péché » en se révoltant. Voilà ce qui doit motiver notre confiance envers le « Dieu tout-puissant », si nous comprenons la solidarité du Christ qui, à travers sa mission terrestre, nous accompagne, en *médiateur, vers un Dieu toujours secourable.

* Le Médiateur. « Ô Seigneur médiateur, Dieu plus haut que nous, homme à cause de nous, je reconnais ici ta miséricorde. Car, que toi, qui es si grand, tu sois ainsi troublé par une attention de ton amour, cela console bien des membres de ton corps, qui sont troublés par leur faiblesse, et cela les empêche de désespérer et de périr » (Saint Augustin).

Marc 10, 35-45 (Le Fils de l’homme est venu pour donner sa vie en rançon pour la multitude)

Un double épilogue achève, selon le « montage » de Marc, le discours de Jésus sur les relations communautaires chrétiennes. Le premier, aujourd’hui, à travers la requête des fils de Zébédée, manifeste une incompréhension du discours, mais livre en même temps la clé de lecture de tout l’épisode. Le second, dimanche prochain, souligne une vraie réussite, dans l’aveugle Bartimée.

  Le passage se divise en deux parties. C’est d’abord la requête incongrue de Jacques et Jean, puis l’indignation des « dix autres » qui conduit à une déclaration décisive de Jésus.

La requête de Jacques et de Jean

En recopiant Marc, Matthieu se montre plus courtois envers les deux frères. Selon lui, c’est « la mère des fils de Zébédée » (Matthieu 20, 20) qui, en bonne mère juive, intercède pour ses rejetons. La tradition évangélique en général ne ménage pas les deux frères. Leur surnom est « fils du tonnerre » (Marc 3, 17). Ils veulent faire tomber la foudre sur un village samaritain inhospitalier (Luc 9, 54) et Jean veut empêcher un outsider de pratiquer des exorcismes au nom de Jésus (Marc 9, 38).

  La demande des deux frères manifeste une étrange incompréhension du discours qui s’achève. Ils demandent de siéger dans la gloire de Jésus, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche. Ici se profile de nouveau l’ironie de l’évangéliste. D’abord un sous-entendu : lequel sera à droite et l’autre à gauche ? Voilà une source de jalousie renvoyant à la dispute sur « le plus grand » (Marc 9, 33-37), au début du discours. C’est ensuite l’annonce cruelle de la Passion. Car, en fait d’assistants glorieux, Jésus sera crucifié entre deux bandits, « l’un à sa droite, l’autre à sa gauche » (Marc 15, 27). La réponse de Jésus joue sur deux registres.

  Au premier chef, Jésus annonce sa propre destinée : il va « boire la coupe », une expression juive ancienne désignant le sort mortel de l’humanité (« boire la coupe de la mort »). S’ajoute l’image du baptême, c’est-à-dire l’engloutissement, la noyade : « Pouvez-vous être baptisés du baptême dont je suis baptisé ? » (traduction littérale). À l’évidence, Marc dépend ici, dans ce qu’il fait dire à Jésus, de la théologie baptismale de son maître, saint Paul : « Par le baptême dans sa mort, nous avons été ensevelis avec lui » (Romains 6, 4). On notera que, dans le passage parallèle, Matthieu (20, 22) omet cette mention, en raison de sa théologie différente du baptême qui, pour lui, signifie et signe une appartenance du croyant au Dieu trinitaire (Matthieu 28, 19). Les évangélistes ne sont pas des copistes, mais des théologiens et des pasteurs, responsables de leur transmission des traditions sur Jésus. En second lieu, on notera la réponse brève des deux impétrants : « Nous le pouvons. » Jésus les invite à partager son sort, et ils l’acceptent. L’histoire chrétienne ultérieure montrera que, de fait, tous ces témoins subiront le martyre. Ils se voient ainsi *encouragés dans cette voie, mais sans nul horizon ambitieux.

Le Serviteur

Si « les dix autres » s’indignent de la requête de Jacques et de Jean, c’est qu’eux-mêmes, jaloux, se situent dans la même perspective ambitieuse. La réponse de Jésus résume le contenu de son discours que nous avons suivi depuis plusieurs dimanches : dans la relation entre les enfants et les adultes, entre l’homme et la femme, entre le riche et le pauvre, le tout est d’adopter la position du serviteur. Même si, en manière d’hyperbole, apparaît le mot « esclave », le serviteur selon l’Évangile n’est pas un larbin servile, mais celui qui met son honneur à servir l’autre, à l’épanouir, à l’estimer digne d’être servi.

  Ainsi agit « le Fils de l’homme », c’est-à-dire à la fois, selon le contexte juif de l’expression, l’être céleste qui jugera l’univers et en même temps celui qui partage en tout la condition humaine. En donnant sa vie « pour la multitude », c’est-à-dire pour tous, il accomplit la figure du Serviteur souffrant (cf. Isaïe 53, 11-12). Le mot « rançon » doit être bien compris. La passion du Seigneur n’a rien d’un prix à payer pour apaiser le courroux divin. Le terme évoque la notion hébraïque du gôél, le sauveur chargé de sauver, de racheter les membres de sa famille tombés en esclavage ou retenus prisonniers.

* Encouragés. « Voyez de quelle manière il les exhorte et les entraîne à demander ce qu’il faut. Il ne leur dit pas : “Pouvez-vous affronter la mort violente ? Pouvez-vous verser votre sang ?” Mais : Pouvez-vous boire à la coupe, et il ajoute pour les attirer : celle que je vais boire ? afin qu’ils désirent être en communion avec lui. En outre, il appelle cela un baptême pour montrer que ce sera la grande purification du monde entier » (saint Jean Chrysostome).

 




29ième dimanche du temps ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER (18 Octobre)

« Pour nous et pour notre salut » (Mc 10,35-45)…

 Alors, Jacques et Jean, les fils de Zébédée, s’approchent de Jésus et lui disent : « Maître, ce que nous allons te demander, nous voudrions que tu le fasses pour nous. »
Il leur dit : « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? »
Ils lui répondirent : « Donne-nous de siéger, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire. »
Jésus leur dit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire, être baptisé du baptême dans lequel je vais être plongé ? »
Ils lui dirent : « Nous le pouvons. » Jésus leur dit : « La coupe que je vais boire, vous la boirez ; et vous serez baptisés du baptême dans lequel je vais être plongé.
Quant à siéger à ma droite ou à ma gauche, ce n’est pas à moi de l’accorder ; il y a ceux pour qui cela est préparé. »
Les dix autres, qui avaient entendu, se mirent à s’indigner contre Jacques et Jean.
Jésus les appela et leur dit : « Vous le savez : ceux que l’on regarde comme chefs des nations les commandent en maîtres ; les grands leur font sentir leur pouvoir.
Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur.
Celui qui veut être parmi vous le premier sera l’esclave de tous :
car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. »

dieu amour

Quand Jésus annonça pour la première fois à ses disciples sa mort et sa résurrection prochaines, Pierre l’avait tiré à part et s’était mis à lui faire de vifs reproches (Mc 8,31-33)… La seconde fois, les disciples ne comprirent toujours pas (Mc 9,30-32), et juste après, « ils discutaient entre eux pour savoir qui était le plus grand ». Et Jésus leur avait dit : « Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous » (Mc 9,33-35). Mais ils ne comprenaient toujours pas… Alors, pour la troisième fois, Jésus leur annonça sa Passion (Mc 10,32-34). Et il eut pour réponse cette démarche de Jacques et de Jean rapportée ici : « Maître, nous voulons que tu fasses pour nous ce que nous allons te demander ». Ce sont eux qui commandent… « Accorde-nous de siéger, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire »… Voilà bien l’attitude qui habite spontanément nos cœurs de pécheurs : rechercher les places d’honneur, ne pas perdre une occasion de se mettre soi-même en avant, courir après la gloire humaine, la notoriété, la célébrité…

Le Christ, lui, a toujours vécu dans l’obéissance à son Père, cherchant à accomplir sa volonté, en Serviteur du Père… « Que ta volonté soit faite », nous apprend-il à dire, car la volonté de ce Dieu Amour n’est que Plénitude de Vie pour chacun d’entre nous. Or, si « le salaire du péché, c’est la mort, le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle par notre Seigneur Jésus Christ » (Rm 6,23). C’est pourquoi « le Fils de l’homme », dit ici Jésus, « n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude », afin qu’ils passent, par le « oui » de leur foi, des ténèbres à la lumière, de la mort à la vie… Tel est l’Amour qui est prêt à se donner tout entier pour le seul bien de l’être aimé : « Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » (Jn 15,13). Et Jésus se donnera tout entier sur la Croix, versant son sang, donnant sa vie « pour la multitude en rémission des péchés » (Mt 26,28). Car il est venu avant tout pour les pécheurs. En effet, « souffrance et angoisse pour toute âme humaine qui fait le mal » (Rm 2,9). Et ce ne sont pas « les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs, au repentir » (Lc 5,32). Certes, « il n’est pas de juste, pas un seul » (Rm 3,9-20), mais le Dieu d’Amour et de Tendresse ne peut faire des merveilles de Miséricorde qu’avec celles et ceux qui se reconnaissent pécheurs, et lui offrent tout, jour après jour… DJF




Rencontre autour de l’Evangile – 29ème dimanche du Temps Ordinaire

 » Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir. « 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

(Mc 10, 35-45)

Jésus, pour la troisième fois, vient d’annoncer à ses disciples qu’il va souffrir et mourir, et que trois jours après il ressuscitera. Mais une fois de plus, c’est l’incompréhension de leur part.

Regardons-réfléchissons-méditons

Faire lire lentement le texte, suivre les personnages et entrer dans le dialogue

Jacques et Jean : Avec Pierre, ces frères formaient un trio particulièrement proche de Jésus. Dès le début ils suivaient Jésus, après avoir tout quitté. Comment qualifier leur démarche auprès de Jésus ?

Quelle était leur ambition ?

Accorde-nous de siéger l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire ?

Qui sera à droite et à gauche de Jésus…sur la croix ?

Pouvez-vous boire à la coupe que je vais boire ?

Que veut dire Jésus ?

Recevoir le baptême dans lequel je vais être plongé ? : Qu’est-ce que Jésus appelle son baptême ? Quel lien avec le baptême qu’il a reçu de Jean Baptiste ?

La coupe, vous y boirez et le baptême… vous le recevrez : Qu’est-ce que Jésus prédit pour ces deux disciples par ces paroles ?

Les dix autres s’indignaient : Quelle est la raison de leur indignation ?

Les chefs des nations… les grands font sentir leur pouvoir :

Quelle est cette conception de l’autorité ?

Quelle est la conception du pouvoir de Jésus dans son Église ?

Le plus grand sera serviteur… le premier sera l’esclave de tous : Quelle leçon à ces disciples qui rêvent de domination, de supériorité !

« Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon… »  

Que révèle Jésus dans ces paroles ? 

Pour la multitude : c’est à dire ? 

 

  

Pour l’animateur

Chaque fois que Jésus annonce sa Passion à ses disciples, il y a incompréhension ; la première fois, Pierre veut empêcher Jésus, et il est remis à sa place. La deuxième fois, les disciples discutent entre eux pour savoir qui est le plus grand ; et cette fois, deux amis proches de Jésus, Jacques et Jean, qui avaient tout quitté (filets, barque et leur père) pour suivre Jésus, ne manquent pas d’audace : ils rêvent d’un réel pouvoir de gouvernement dans le Royaume de Jésus.

L’ironie du sort fera que ce sont deux bandits qui seront à la droite et à la gauche de Jésus sur le trône de la croix !

Jésus les remet en face de ce qui va se passer ; il emploie pour cela des images fortes :

La coupe : dans la Bible, c’est souvent le symbole de souffrances à subir. On dit « boire la coupe jusqu’à la lie » en parlant d’épreuves qu’on doit endurer.

Quand le baptisé était plongé tout entier, la tête comprise, il passait par un moment critique : il était plongé dans la mort.

Le baptême dont parle Jésus, c’est sa Passion : il va être submergé par les flots de la mort. Cette plongée dans la mort était annoncée par la « plongée » de Jésus, avec les pécheurs, dans l’eau du Jourdain.

Jésus annonce que Jacques et Jean boiront à sa coupe et recevront son baptême: une manière d’annoncer que l’un et l’autre auront à souffrir pour son Nom. Jacques connaîtra le martyre, et l’Apôtre Jean, s’il est décédé de mort naturelle, est passé, selon la tradition, par des épreuves redoutables.

L’indignation des dix autres : Est-ce l’audace trop grande des deux autres qui les fait réagir ? Ou peut-être plutôt la jalousie : on connaît la préoccupation du groupe pour la course aux honneurs.

Jésus en profite pour leur donner une leçon magistrale sur sa façon de concevoir le pouvoir dans son Église : à l’inverse de la façon d’exercer le pouvoir dans l’Empire romain et dans les sociétés civiles (domination le plus souvent totalitaire), Jésus entrevoit pour le gouvernement de son Église une manière tout à fait originale :  en se mettant à la place de « l’esclave » : à l’époque, les esclaves étaient au dernier rang de la société. L’image se veut frappante pour les Douze qui rêvent de domination, de supériorité.

Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi…Jésus donne pour modèle sa propre personne et il dévoile le sens de toute son existence : il est le « serviteur souffrant » dont parle Isaïe (53, 10-11).

En rançon : il paiera le prix fort, en donnant sa vie pour les péchés de « la multitude », c’est à dire de « tous les hommes » sans exception.

Dans l’Église, le fonctionnement des responsables ou l’exercice de l’autorité devra toujours se vérifier en référence à son fondateur : le service et le don de soi jusqu’à l’extrême.

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Seigneur Jésus, Toi le Maître et Seigneur, tu t’es mis à la place de l’esclave. Tu es allé jusqu’à donner ta vie pour nous sauver. Libère-nous de toute tentation de grandeur, de pouvoir, de supériorité. Quand nous avons une responsabilité dans ton Église, aide-nous à l’exercer « en Église » pour ne pas tomber dans le piège de l’autoritarisme et du pouvoir dominateur.

 

 TA PAROLE DANS NOTRE VIE

La Parole aujourd’hui dans notre vie

Quelle est la Bonne Nouvelle que nous apporte cet évangile ?

Aux yeux de Dieu, celui qui est grand, c’est celui qui imite son Fils Jésus : Celui qui s’abaisse sera élevé. N’est-ce pas le chant de Marie : Dieu « renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles. »

Quel visage de Dieu Jésus nous révèle-t-il dans ce passage ?

Le Dieu qui se révèle en Jésus n’est pas un potentat, dominateur, qui écrase l’homme : sa toute-puissance est une «toute-puissance» d’amour qui s’exprime dans la faiblesse. En Jésus, Dieu se fait humble et serviteur. Un théologien a parlé de « l’humilité de Dieu »

Ne rêvons-nous pas de grandeur humaine, d’accroître notre pouvoir sur les autres, plutôt que de les servir ?

Quand nous accomplissons nos tâches de service (dans notre profession, comme père et mère de famille, comme catéchiste, ou responsable de liturgie ou autre…) le faisons-nous à l’image du Christ Serviteur ?

Il arrive parfois, peut-être même souvent, que l’on refuse de partager une responsabilité avec les autres, on va jusqu’à répondre  « j’ai pas besoin » à quelqu’un qui propose sa collaboration : Une telle attitude ne construit nullement le « Corps du Christ »

 

ENSEMBLE PRIONS

On peut proposer au groupe de prier avec le Cantique de Marie (Magnificat)

Béni sois-tu, Seigneur ! Dieu des humbles et secours des opprimés !

Béni sois-tu, Seigneur ! Soutien des faibles et abri des abandonnés !

Béni sois-tu, Seigneur ! Sauveur des désespérés, à toi la gloire éternelle.

  

Notre Père …..

 Pour lire ou imprimer le document en PDF cliquer ici : 29ième Dimanche du Temps Ordinaire B

 

 

 

 

 

 

 

 

 




28ième dimanche du temps ordinaire par P. Claude TASSIN (Spiritain)

  Commentaires des Lectures du dimanche 11 octobre 2015

Sagesse 7, 7-11. (À côté de la Sagesse, j’ai tenu pour rien la richesse)

Sous la plume d’un écrivain juif anonyme  d’Alexandrie, au milieu du 1er siècle avant notre ère, c’est l’antique roi Salomon qui est censé s’exprimer. L’écrivain reprend ici le célèbre passage du 1er Livre des Rois (3, 4-15) où, dans un songe à Gabaon, le jeune souverain ne demande au Seigneur ni richesse ni pouvoir, mais seulement la sagesse. Cependant, pour l’auteur de notre livre alexandrin, écrit en un très beau grec, la sagesse n’est plus seulement une qualité intellectuelle et morale. Elle est devenue presque une personne divine, une figure que le christianisme identifiera au Christ et à l’Esprit saint (voir déjà Sagesse 1, 4-5). La basilique Sainte Sophie de Constantinople n’était pas dédiée à quelque sainte, mais au Christ « Sainte Sagesse » de Dieu. Sous un autre aspect complémentaire, rappelons en effet qu’en grec la sophia (Sagesse) est un terme féminin et l’auteur, en sa quête de celle-ci, parle d’elle comme d’une femme désirée et aimée, même au-dessus de la santé et de la beauté.

  Dans ces conceptions, Dame Sagesse relève à la fois d’un talent naturel de l’homme (Sagesse 8, 19-21) et d’un don de Dieu qui ne s’obtient que par la prière, comme dans le fameux chapitre où le poète s’adresse au Dieu des pères et Seigneur de tendresse, en ces termes « Donne-moi la Sagesse qui partage ton trône » (Sagesse 9, 4). Différent du roi historique qui a fini son règne dans la luxure, ce Salomon réinventé préfère le don de la Sagesse à toutes les autres richesses.

  Cette lecture veut préparer notre passage d’évangile dans lequel l’homme riche qui refuse de quitter ses « grands biens » pour suivre le Christ Sagesse qui l’y invitait avec affection.

Hébreux 4, 12-13 (Elle est vivante, la parole de Dieu)

Ces deux versets forment la conclusion d’une homélie basée sur le Psaume 94 [95], surtout sur les versets 7-8 du poème : « Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas votre cœur comme au temps du défi » Selon le prédicateur, l’avertissement vaut encore pour les chrétiens auxquels il s’adresse en ces termes : « Nous avons reçu une Bonne Nouvelle, comme ces gens_là ceux (qui étaient sortis d’Égypte) ; cependant la parole entendue ne leur servit à rien, parce qu’elle ne fut pas reçue avec foi par ses auditeurs » (Hébreux 4, 2).

  Dans ce cadre, la Parole de Dieu est une réalité vivante, active, efficace. Elle a un lien très fort avec le Christ, puisque, selon notre auteur, « dans les jours où nous sommes, il nous a parlé par le Fils… » (Hébreux 1, 2). Cette parole n’est pas un phénomène vocal, mais un message qui pénètre en nous et nous engage, en révélant notre foi ou notre non-foi.

  Elle a alors une fonction judiciaire, comme le montre l’épée à deux tranchants, pouvant frapper de tous côtés et symbolisant, à l’origine, le pouvoir du magistrat, comme la balance à deux plateaux de notre symbole de la justice.. À propos de l’intervention divine, dans la nuit de la Pâque, nuit de la sortie d’Égypte, le Livre de la Sagesse avait déjà utilisé cette image : « Du haut des cieux, ta Parole toute-puissante s’élança du trône royal (…) portant pour épée acérée ton irrévocable décret. » Dans les visions de l’Apocalypse, cette épée acérée, instrument du jugement final, apparait dans la bouche, dans la parole du Christ ressuscité (Apocalypse 1, 16 ; 2, 12).

  Certains, pacifistes dans l’âme, se choqueront peut-être de voir la Parole divine assimilée à un glaive. Mais, dans cette image et selon la contexte biblique général, il faut lire l’inverse de cette première impression. Le vrai sens honnête, est celui-ci  : Dieu ne veut avoir pour glaive envers les humains que sa Parole, et non celui de ses légions célestes. C’était déjà, en Isaïe 11, 5 à 9, le portrait du Messie pacifique idéal qui éradiquerait les méchants seulement « par le bâton de sa bouche » et « par le souffle de ses lèvres », et qui ferait en même temps que « le loup habite avec l’agneau ».

  Reste l’essentiel dans ce message de la Lettre aux Hébreux : la Parole entendue ne se contente pas de bons sentiments superficiels. La foi authentique accepte de ne prendre pour critère décisif de conduite que la Bonne Nouvelle qui juge l’hypocrisie ou la passivité, qui « pénètre au plus profond de (notre) âme » et qui « juge des intentions et des pensées du cœur ».

Marc 10, 17-30 (Vends ce que tu as et suis-moi)

Nous lisons toujours le discours communautaire de Jésus tel que Marc en fait le montage dans sa « Section du chemin » (Marc 9, 30 – 10, 52). Dimanche dernier, il prêchait une conversion des relations entre hommes et femmes, entre adultes et enfants. Aujourd’hui, après un nouveau départ géographique, il en vient à la relation entre la richesse et la pauvreté, envisagée sous trois angles. D’abord la rencontre avec celui qui « avait de grands biens ». Elle introduit deux retombées : un premier bref discours du « bon Maître » sur la richesse ; puis une promesse pour ceux qui l’ont suivi.

La rencontre

Celui qui vient à Jésus, avec sa question, est chez Marc, en grec, simplement « quelqu’un », sans nulle identité. Selon leur réinterprétation respective de la mission de Jésus, les héritiers de Marc feront de lui, chez Matthieu (19, 20), « un jeune homme », élève des rabbis et cherchant, entre différentes écoles juives, sa voie de futur enseignant ; et chez Luc (18, 18), un « notable ».

  « Personne n’est bon, sinon Dieu seul. » Personne ne niera que Jésus soit un « bon Maître ». Dans la réponse étonnante de Jésus, nous reconnaissons l’ironie coutumière de Marc. : Si tu me dis « bon », c’est que tu vois en moi quelque chose de Dieu… Le Maître rappelle à son interlocuteur les commandements de la deuxième table (cf. Exode 20, 12-17), ceux qui concernent les relations avec le prochain, comme il convient dans ce discours de Marc portant sur la vie communautaire.

  Marc ménage ses effets. À la fin, on apprend que cet homme est très riche. Pour l’heure, Jésus se trouve pris d’affection pour celui qui depuis toujours a observé ces commandements et qui, cependant, reste insatisfait dans sa quête religieuse. Voilà pourquoi il se voit proposer un « plus » : tout quitter pour suivre Jésus et le suivre en une annonce itinérante du Royaume dénuée de toute sécurité matérielle. Si bien disposé au départ, l’homme se dérobe. Le projet de vivre dans l’intimité du bon Maître et de sa mission ne fait pas le poids face à la sécurité de « grands biens ». L’homme a situé sa demande sur le plan de l’héritage de la vie éternelle. Jésus lui répond sur le même plan, en lui adressant, avec une affection spécifique, un appel personnel. Le récit ne s’intéresse en rien au salut à venir de ce déserteur . D’une part, « tout est possible à Dieu », déclare Jésus, à l’adresse de bien des gens qui ne l’ont pas suivi. D’autre part, sous la plume de l’évangéliste, l’épisode n’était qu’un prétexte introduisant la leçon sur la richesse.

La leçon

Le regard circulaire de Jésus, dans la mise en scène de l’évangéliste (comparer Marc 3, 34), signifie son attention particulière au cercle de ceux qui boivent ses paroles. Ici, Jésus ne condamne ni l’argent malhonnête ni la richesse en général, mais l’attachement tel à la richesse que l’on ne voit plus d’autre valeur dans la vie. Quand la richesse prend tout l’horizon, on ne peut plus rien voir des valeurs exigeantes et libératrices du Royaume de Dieu. C’est pourquoi Jésus s’exprime à travers une hyperbole : le chameau, en sa grosseur, ne passe pas par le trou d’une aiguille ; le riche obnubilé par ses biens, en sa grosseur, ne passe pas davantage par l’entrée étroite dans les valeurs du Royaume.

  On comprend que les auditeurs soient stupéfaits, déconcertés. Ils vivent dans un monde où la richesse signifie la bénédiction de Dieu. Alors, si Dieu ne respecte plus ce postulat, « qui peut être sauvé ? ». Jésus reconnaît que son discours était une hyperbole et que, malgré ce renversement des valeurs, Dieu peut sauver même ceux qui ne parviennent pas à ce renversement.

Les Douze et les autres…

Peut-être l’homme qui, au début du récit, rencontrait Jésus, était plus vertueux que les Douze dont Pierre est le porte-parole. Mais eux, au moins, ont franchi le pas et ont suivi Jésus. Marc, en son temps, réaménage les paroles de Jésus en deux leçons.

  1. Dans les premières Églises, des gens se sont vus, parce qu’ils devenaient chrétiens (« à cause de l’Évangile »), rejetés par leur famille païenne, et dépouillés de leurs biens, comme les lois le permettaient à l’égard de ceux qui désertaient le culte de l’État. Mais ces persécutés n’ont-ils pas trouvé, dans la solidarité chrétienne, ce qu’ils avaient perdu, en suivant Jésus ?

  2. Dans sa relecture du message de Jésus, Marc ajoute au problème des biens matériels, celui des liens familiaux. Ce n’est pas seulement la richesse qui risque de prendre tout l’horizon du croyant, mais aussi des liens familiaux excessifs qui peuvent empêcher le chrétien de s’engager à la suite du « bon Maître », dans la logique du Royaume de Dieu qui renverse des valeurs humaines trop communément admises.




28ième dimanche du temps ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER (11 Octobre)

Accueillir avec Jésus la vraie Joie (Mc 10,17-30)

En ce temps-là, Jésus se mettait en route quand un homme accourut et, tombant à ses genoux, lui demanda : « Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? »
Jésus lui dit : « Pourquoi dire que je suis bon ? Personne n’est bon, sinon Dieu seul.
Tu connais les commandements : Ne commets pas de meurtre, ne commets pas d’adultère, ne commets pas de vol, ne porte pas de faux témoignage, ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère. »
L’homme répondit : « Maître, tout cela, je l’ai observé depuis ma jeunesse. »
Jésus posa son regard sur lui, et il l’aima. Il lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; alors tu auras un trésor au ciel. Puis viens, suis-moi. »
Mais lui, à ces mots, devint sombre et s’en alla tout triste, car il avait de grands biens.
Alors Jésus regarda autour de lui et dit à ses disciples : « Comme il sera difficile à ceux qui possèdent des richesses d’entrer dans le royaume de Dieu ! »
Les disciples étaient stupéfaits de ces paroles. Jésus reprenant la parole leur dit : « Mes enfants, comme il est difficile d’entrer dans le royaume de Dieu !
Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu. »
De plus en plus déconcertés, les disciples se demandaient entre eux : « Mais alors, qui peut être sauvé ? »
Jésus les regarde et dit : « Pour les hommes, c’est impossible, mais pas pour Dieu ; car tout est possible à Dieu. »
Pierre se mit à dire à Jésus : « Voici que nous avons tout quitté pour te suivre. »
Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre
sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle.

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            Un Juif fervent demande à Jésus : « Que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? » Nous sommes bien dans la logique pharisienne : « faire pour avoir ». Mais après un « faire », « l’avoir » est souvent considéré comme un mérite, un salaire, un dû… Dans un premier temps, Jésus rejoint cet homme dans son système de pensée, et lui redit tout simplement quelques « commandements » extraits du cœur de la Loi, « les dix commandements » (Ex 20,1-17). « Maître, tout cela, je l’ai observé dès ma jeunesse ». Mais quel but a-t-il vraiment poursuivi ? Le faisait-il pour plaire à Dieu, ou pour se rechercher lui-même ? Accomplir de belles œuvres peut en effet être un moyen de se glorifier soi-même, comme « ceux qui sonnent de la trompette » quand ils font l’aumône, « afin que tout le monde les voit » (Mt 6)…

            Cette logique n’est pas celle de Dieu, et Jésus l’a suggéré dès le début quand cet homme l’a appelé « bon Maître » et qu’il lui a répondu : « Pourquoi dire que je suis bon ? Personne n’est bon, sinon Dieu seul ». Pourtant Jésus, le Fils, est Dieu ! Mais il est « Dieu né de Dieu », « né du Père avant tous les siècles », et c’est de Lui qu’il tient de toute éternité l’Être et la vie… Sans Lui, il n’est rien, il ne peut rien (Jn 5,19-20 ; 5,26). Ainsi, avec Jésus, le Dieu Tout Puissant se révèle ainsi comme étant « pauvre de cœur » (Mt 5,3 avec Jn 15,11), « doux et humble » (Mt 11,29), …

            « Jésus le regarda et l’aima »… Or « aimer », pour Dieu, c’est « tout donner » (Jn 3,35), tout ce qu’il a, tout ce qu’il est (Jn 16,15 ; 17,10 ; Lc 15,31). « Dieu est Esprit » (Jn 4,24), Dieu est Saint ? Avec ce « Jésus l’aima », le Don de l’Esprit Saint qui est Vie, Paix et Joie vient frapper à la porte de son cœur… Ouvrira-t-il ? Un choix s’impose… Ou bien la logique de l’argent : amasser pour soi au détriment des autres… Ou bien la logique de Dieu : donner, partager pour le bien des autres (Lc 3,11). Ici, Jésus est radical : « Va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; alors tu auras un trésor au ciel », le trésor de l’Esprit Saint offert dès maintenant à notre foi. « Puis viens, suis-moi », abandonne-moi ta vie et je te conduirai, pour le meilleur, car l’Amour ne peut que vouloir le meilleur pour celles et ceux qu’il aime… Aujourd’hui, « à ces mots, il devint sombre et s’en alla tout triste, car il avait de grands biens ». Mais demain, peut-être, avec le secours d’en haut, réussira-t-il à renoncer à ses biens ; alors il recevra « le centuple dès maintenant » avec ce Trésor de l’Esprit qui est Amour, Paix, Joie… DJF

 

            




Rencontre autour de l’Evangile – 28ème dimanche du Temps Ordinaire

 « Posant son regard sur lui, Jésus se mit à l’aimer…. »

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Mc 10, 17-30

L’appel de l’homme riche fait suite à cette scène étonnante où Jésus accueille les enfants face aux prétentions orgueilleuses des disciples. Il s’agit dans ce passage du dépouillement nécessaire pour celui qui veut suivre le Christ.

Regardons-réfléchissons-méditons

Faire lire lentement le texte, suivre les personnages et entrer dans le dialogue.

Un homme accourut vers Jésus : La démarche de cet homme !

Se mit à genoux : son geste.

Bon maître : Cette manière de s’adresser à Jésus.

Dieu seul est bon : Réplique étonnante de Jésus.

Que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ?

Une question qui révèle le souci de ce juif pieux

Les commandements : Jésus cite l’essentiel de la Loi. L’importance du Décalogue.

J’ai observé… depuis ma jeunesse : Révélation de la droiture et de la fidélité religieuse de ce juif pieux.

Posant son regard : Souvent il est question du regard de Jésus  dans l’évangile.

« Jésus se mit à l’aimer » : Expression qui en dit long sur l’amour de Dieu, amour gratuit qui est toujours premier.

Une seule chose te manque : Jésus va lui adresser un appel d’une exigence rare.

« Viens, suis-moi » : C’est la pointe de l’appel.

Trésor dans le ciel : Image chère à Jésus. « Là où est ton trésor là aussi sera ton cœur ! »

Il avait de grands biens : L’obstacle majeur au dépassement que Jésus demande de cet homme.

  

Pour l’animateur

La démarche de l’homme, qui accourt vers Jésus montre qu’il y a chez lui un désir pressant de rencontrer Jésus et son geste de se mettre à genoux exprime une grande vénération pour Jésus reconnu comme un « bon maître ».

« Personne n’est bon, sinon Dieu seul » : Cette réplique de Jésus est étonnante, mais on la comprend, parce que Jésus est devant un Juif qui connaît bien la Torah (la Loi) et il tient d’abord à réaffirmer l’essentiel de la foi juive : Dieu et lui seul possède la « Bonté ».

L’héritage de la vie éternelle : Le souci de parvenir au bonheur futur est louable chez le juif pieux, et Jésus accueille avec bienveillance sa question. En bon connaisseur de la Loi, Jésus cite d’abord les commandements divins est la voie, normale, suffisante pour parvenir à la « vie éternelle ». On découvre que ce juif est un familier de la Torah. Sa réponse  révèle sa droiture et sa fidélité religieuse (« J’ai observé… depuis ma jeunesse »). Jésus le reconnaît, et son regard sur cet homme est un regard de tendresse et d’estime. « Il se mit à l’aimer » : Tout comme l’amour de Dieu est au départ du choix d’Israël, le regard de Jésus le pousse à porter son choix sur ce juif fidèle. Ce choix, Jésus va l’exprimer par un appel particulièrement exigent. Jésus lui dit : «  Viens, suis-moi », c’est à dire, dépasse la foi de tes pères, et deviens disciple du Messie que je suis. Dépassement difficile. Il ne s’agit plus de suivre une loi, mais de suivre quelqu’un. On découvre seulement à la fin que cet homme était très riche et que cette richesse l’a empêché de répondre positivement à l’appel de Jésus.

Dans l’entretien particulier avec ses disciples, Jésus insiste sur le fait que la possession de la richesse est un obstacle majeur quand quelqu’un veut se mettre en route à sa suite . Marc nous fait assister à une vocation manquée. Jésus vient révéler une exigence plus haute que la religion juive, dont le Décalogue pourtant était pour Israël un chemin en direction de la vie éternelle.

La Bonne nouvelle proposée par Jésus est l’appel à un dépassement. Pour se dire chrétien, il ne suffit pas d’être fidèle aux commandements de Dieu, il faut se mettre à la suite de la personne même du Messie. La foi chrétienne vient accomplir la foi juive. Suivre le Christ ne va pas sans un certain dépouillement. N’oublions pas que Jésus marche vers sa Passion.

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Seigneur Jésus, tu es venu, non pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir. A celui qui pratique les commandements, tu adresses l’appel à te suivre, à devenir ton disciple. A celui qui est encombré par ses richesses, ses biens matériels, tu demandes le détachement, pour te suivre avec un cœur libéré. A certains, tu adresses l’appel à tout quitter pour te suivre de plus près.

 

 TA PAROLE DANS NOTRE VIE

 La Parole aujourd’hui dans notre vie

Quelle est la bonne nouvelle que nous apporte cet évangile ?

Quel visage de Dieu Jésus nous révèle-t-il dans cette rencontre avec l’homme riche ? 

Cet homme  a accouru vers Jésus et s’est mis à genoux devant lui :

Qu’est-ce qui empêche les gens d’aujourd’hui d’aller à Jésus ?

Cet homme avait de grands biens : Qu’est-ce qui encombre les gens d’aujourd’hui et qui les empêches d’entendre l’appel de Jésus ?

La foi chrétienne, est-ce seulement suivre les commandements ?

Ce qui nous distingue, ce ne sont pas de beaux enseignements et de belles prières. On trouve cela également dans d’autres religions. Ce que nous sommes  les seuls à avoir, c’est un Maître qui peut nous dire : « Viens et suis-moi », car lui-même a marché sur nos route humaines. Il nous a ouvert le chemin de la résurrection.

 

ENSEMBLE PRIONS

Dieu notre Père, tu as toujours appelé l’homme à dépasser son égoïsme. Ton Fils Jésus est venu nous montrer le chemin du don total pour ceux que l’on aime. Nous ne pouvons pas dire que nous avons fait assez pour suivre Jésus ton Fils. Quand l’Évangile nous paraît difficile, quand il nous semble impossible de tout donner pour suivre Jésus, toi-même tu nous donnes ta force et nous permets d’avancer sur le chemin de la foi.

Notre Père…..