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27ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN

Commentaire du samedi 3 Octobre et dimanche 4 Octobre 2020

27e dimanche ordinaire :
Isaïe 5 1–7 ; Philippiens 4 6–9 ; Matthieu 21 33–43

 

A l’époque d’Isaïe, les propriétaires avaient une préférence pour la culture de la vigne. Isaïe, en partant de la réalité de la vie quotidienne, nous explique, de manière allégorique, comment Dieu se conduit envers son peuple. Mon « Bien-aimé, c’est Dieu, et la vigne est le peuple choisi par Dieu. Dieu prend soin de sa vigne : Il bêche, il enlève les pierres, il plante du raisin vermeil, il bâtît une tour à la place d’une hutte faite de branchages, creuse un pressoir. Il attendait de beaux raisins de cette vigne, mais elle donna des raisins sauvages. Ce peuple choisi par Dieu n’a pas tenu compte de toutes ces petites attentions de Dieu à son égard. Dieu en attendait la pratique du droit et de la justice, il récolte l’iniquité, l’injustice. Ce thème se retrouve dans l’Evangile selon Matthieu. Comme d’habitude, Jésus évoque une parabole, qui est construit également comme une allégorie, en partant de la réalité de l’époque. Les propriétaires des vignes les confiaient à des vignerons contre une rémunération. Et pendant qu’ils travaillaient la vigne, les propriétaires partaient au loin, parfois à l’étranger. Mais ces propriétaires avaient également des émissaires, c’est-à-dire des personnes chargées d’une mission plus ou moins secrète qu’ils envoyaient auprès des vignerons. Selon le droit juif de l’époque, si le propriétaire d’un terrain mourait sans héritier ce terrain appartenait à celui qui l’occupait le premier. D’où cette réflexion des vignerons : « Celui-ci est l’héritier : venez ! tuons-le, que nous ayons son héritage ». Dans une allégorie, chaque mot important a une signification propre : Le propriétaire de la vigne c’est Dieu, et la vigne est le peuple de Dieu, Israël. V.34 : « Quand approcha le moment des fruits, il envoya ses serviteurs aux vignerons pour en recevoir les fruits ». Les serviteurs sont les prophètes envoyés auprès des vignerons (homicides), c’est-à-dire des Juifs qui ne croient pas en Dieu afin de les convertir. « 35 Mais les vignerons se saisirent de ses serviteurs (les prophètes), battirent l’un, tuèrent l’autre, en lapidèrent un troisième. 36 De nouveau Dieu envoya d’autres prophètes, plus nombreux que les premiers, et ils les traitèrent de même ». C’est ici l’histoire de l’Ancien Testament, où Dieu envoie ses prophètes pour conduire son peuple selon ses commandements, mais le peuple n’est pas fidèle à Dieu et préfère se tourner vers les idoles, comme c’était le cas pour le veau d’or. Les prophètes sont maltraités.

« 37 Finalement Dieu leur envoya son fils, en se disant : Ils respecteront mon fils. 38 Mais les vignerons homicides (ceux qui ne croient pas en J.C.), en voyant le fils, se dirent par-devers eux : Celui-ci est l’héritier : venez ! tuons-le, que nous ayons son héritage. 39 Et, le saisissant, ils le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent ». Et voilà le Fils de Dieu, cloué sur la croix par tous les juifs incrédules. Disons toute de suite que ce ne sont pas les Juifs, en tant que Juifs, qui ont tué le Christ, mais plutôt les pécheurs du monde entier. CEC 598 : « L’Église… n’a jamais oublié que  » les pécheurs eux-mêmes furent les auteurs et comme les instruments de toutes les peines qu’endura le divin Rédempteur  » (Catech. R. 1, 5, 11 ; cf. He 12, 3). Tenant compte du fait que nos péchés atteignent le Christ Lui-même (cf. Mt 25, 45 ; Ac 9, 4-5), l’Église n’hésite pas à imputer aux chrétiens la responsabilité la plus grave dans le supplice de Jésus…: « Nous devons regarder comme coupables de cette horrible faute, ceux qui continuent à retomber dans leurs péchés. Puisque ce sont nos crimes qui ont fait subir à Notre-Seigneur Jésus-Christ le supplice de la croix, à coup sûr ceux qui se plongent dans les désordres et dans le mal  » crucifient de nouveau dans leur cœur, autant qu’il est en eux, le Fils de Dieu par leurs péchés et le couvrent de confusion  » (He 6, 6). Et il faut le reconnaître, notre crime à nous dans ce cas est plus grand que celui des Juifs. Car eux, au témoignage de l’apôtre,  » s’ils avaient connu le Roi de gloire, ils ne l’auraient jamais crucifié  » (1 Co 2, 8). Nous, au contraire, nous faisons profession de Le connaître. Et lorsque nous Le renions par nos actes, nous portons en quelque sorte sur Lui nos mains meurtrières (Catech. R. 1, 5, 11). S. François d’Assise ajoute : « Et les démons, ce ne sont pas eux qui L’ont crucifié ; c’est toi qui, avec eux, L’as crucifié et Le crucifies encore, en te délectant dans les vices et les péchés (S. François d’Assise, admon. 5, 3).

Jésus dit à Padre Pio : P.85 : « Mon fils, ne crois pas que mon agonie n’ait duré que trois heures, non, à cause des âmes que j’ai le plus comblées, je serai en agonie jusqu’à la fin du monde. Pendant le temps de mon agonie, mon fils, il ne faut pas dormir. Mon âme va à la recherche de quelques gouttes de piété humaine; mais hélas, je suis seul sous le poids de l’indifférence. L’ingratitude et la somnolence de mes ministres (c’est-à-dire de tous ceux qui sont au service de l’Eglise) me rendent plus pénible mon agonie. Hélas, comme ils répondent mal à mon amour ! Ce qui m’afflige le plus, c’est que ceux-ci ajoutent à leur indifférence le mépris et l’incrédulité »… « v.40 Que fera donc le maître de la vigne à ces vignerons-là ? 41 Ils lui disent : Il fera misérablement périr ces misérables, et il louera la vigne à d’autres vignerons, qui lui en livreront les fruits en leur temps ». Le Maître de la vigne, Dieu, dit l’Évangile de Matthieu, « fera périr ces misérables ». Rappelons que Dieu est Amour, et s’Il est Amour, de Lui ne sortira que de l’amour. Dieu est Vie et ne donne que la Vie, jamais de mort. Il est venu sur terre pour nous sauver. Ceux qui, volontairement, de manière consciente, ne veulent pas suivre le Christ vont eux-mêmes à leur perte par le fait même de leur éloignement par rapport au Christ. Et comme Dieu est Miséricordieux, il faut vraiment le vouloir pour aller en Enfer. Dieu compte sur « d’autres vignerons pour avoir des fruits de la vigne ». « Le Royaume de Dieu vous sera retiré pour être confié à un peuple qui lui fera produire ses fruits ». Le peuple juif de l’époque ayant condamné le Christ à mort, c’est vers les païens que Paul se tourne pour les convertir au Christ. Et aujourd’hui, ces vignerons nouvelle génération sont ceux qui, à la suite du Christ, et avec l’aide de l’Esprit Saint, font leur maximum pour emmener avec eux tous les êtres humains, sans exception, au Royaume de Dieu. Il est vrai que la tâche du chrétien ne sera jamais facile, mais à Dieu rien n’est impossible. Le Christ, étant devenu la pierre d’angle, pierre de faîte, nous devons nous centrer sur le Christ. Le Pape François nous dit (« Amour, Service et Humilité » – P.84) : « Il nous faut toujours guerroyer sans cesse pour suivre notre Seigneur de toujours plus près.… Il y a un lien très étroit entre le fait de suivre le Seigneur, et la connaissance que nous avons de Lui. Mieux nous le connaissons, mieux nous connaissons le timbre de sa voix. P.90 : « Celui qui est disposé à recevoir le Seigneur de tout son cœur pourra Le connaître et Le suivre. En revanche, les cœurs inattentifs, dispersés, superficiels, centrés sur toute autre chose que sur l’essentiel, tuent le désir de Dieu et de communion à son Mystère…Il y a dans l’Eglise des hommes et des femmes brûlants de « grands désirs » qui, tout au long de leur vie, cherchent à suivre le meilleur des guides ». – Sainte Thérèse d’Avila nous aide dans le choix du chemin à suivre (Chemin de la Perfection – P.138) : « Le chemin qu’il s’agit de suivre est le chemin royal qui conduit au ciel. Dès lors qu’en le parcourant, on gagne un grand trésor, rien d’étonnant à ce qu’il nous semble coûter cher. Un temps viendra où vous comprendrez le peu de valeur de toutes les choses d’ici-bas, en comparaison d’un bien si précieux…A ceux qui veulent suivre ce chemin…il est pour eux d’une importance extrême, et même capitale, de prendre la résolution ferme et énergique de ne point cesser de marcher (tant) qu’ils ne soient (pas) arrivés à la source de vie. Ainsi donc, qu’ils avancent malgré toutes les difficultés, malgré tous les obstacles, malgré tous les travaux et malgré tous les murmures; que leur ambition soit d’atteindre le but ». Dieu ne conduit pas toutes les âmes par le même chemin. Pour Grignion de Monfort rien de mieux pour attirer Dieu en nous que de joindre l’oraison vocale et l’oraison mentale, en récitant le saint Rosaire et en méditant les 20 mystères qu’il renferme.

Pour Thérèse d’Avila, Le « Notre Père » et l’Ave Maria peuvent suffire à ceux et celles qui prient : « Si vous vous attachez avec zèle au Pater et si vous demeurez dans l’humilité, vous n’avez pas besoin d’autre chose…car la valeur de la prière est fonction, dans une âme, de la qualité de son comportement moral. Impossible de concevoir l’oraison comme une activité autonome qui pourrait coexister avec une vie chaotique. Les conseils ascétiques préliminaires se ramènent à trois chefs principaux: amour fraternel, détachement à l’égard des créatures, humilité veritable…(P.142) suivez seulement ceux que vous verrez imiter fidèlement la vie du Christ. Veillez à garder la pureté de la conscience, l’humilité et le mépris de tous les biens d’ici-bas. Croyez fermement ce qu’enseigne notre Mère, la sainte Eglise; et soyez assurés que vous suivez le bon chemin ».

A ceux qui auront fait un bout de chemin pour suivre le Christ, peu importe qu’il ait fait un an, deux ans, dix ans, soixante ans ou quatre-vingts ans pour certains, ou même pendant quelques secondes comme pour les derniers ouvriers de la vigne ou comme pour le bon larron, et bien qu’ils aient été imparfaits, découragés, même si à un certain moment de leur vie ils se sont éloignés du Christ, ce dernier pourra leur dire comme il l’a dit à Sœur Faustine : « §86 – Ce n’est pas la réussite que Je récompense, mais la patience et la peine prises pour Moi ». Et de manière plus personnelle, plus intime, au plus profond du cœur de chaque chrétien, il chuchotera comme il l’a fait à un moine Chartreux :« N’aie crainte ! Ce n’est pas un idéal haut, ni une morale élevée que je te propose et que tu te sais bien incapable de réaliser. Je ne te sermonne pas. Je te connais trop bien. D’accord, tu es pécheur, tu ne vaux rien, tu ne sais pas aimer ni faire de grands actes. Mais ne comprends-tu pas ? Cela n’a aucune importance. Je t’ai aimé exactement comme tu es. J’ai pris sur moi-même tes faiblesses, je les ai partagées, toutes sauf ton péché. N’en parlons plus. Tout cela est vaincu, fini. ». C’est pourquoi, Paul nous dit à son tour : « 6 N’entretenez aucun souci; mais en tout besoin recourez à l’oraison et à la prière, pénétrées d’action de grâces, pour présenter vos requêtes à Dieu. 7 Alors la paix de Dieu…prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées, dans le Christ Jésus ». Nous devons nous préoccuper de « tout ce qu’il y a de vrai, de noble, de juste, de pur, d’aimable, d’honorable, tout ce qu’il peut y avoir de bon dans la vertu et la louange humaines ». Autrement dit, ayons un moral tourné vers tout ce qui est divin, car c’est l’Esprit de Dieu qui nous guide en ce sens. Ph 4,9 : « Ce que vous avez appris, reçu, entendu de moi et constaté en moi, voilà ce que vous devez pratiquer. A nous de mettre en pratique les commandements de Dieu et les enseignements du Christ. A cause de nos faiblesses, demandons à Marie de nous accompagner à la suite du Christ.




27ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 21, 33-43) – Francis COUSIN)

« La vi(gn)e et la mort. »

 

Troisième dimanche de suite où Jésus nous parle de la vigne.

Rappelons-nous que « la vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël » (Is 5,7, première lecture), et ce qui suit maintenant : l’Église.

Il y a quinze jours, le propriétaire, Dieu, ne cessait d’embaucher des ouvriers pour y travailler, et tous recevait le même salaire : la Vie Éternelle.

La semaine dernière, deux comportements contradictoires pour travailler à la vigne : l’un dit oui et fait non, l’autre dit non et répond oui.

Cette semaine on va encore plus loin dans la discussion entre Jésus et les grands prêtres et les anciens du peuple, c’est-à-dire pour la plupart des pharisiens.

Dieu est amour, et bien entendu, il montre de l’amour pour son peuple choisi : il fait tout pour qu’il puisse vivre correctement, en travaillant bien sûr, mais à l’abri et avec tout ce qu’il faut : « Il planta une vigne, l’entoura d’une clôture, y creusa un pressoir et bâtit une tour de garde ». Et il la donne en location à son peuple.

Mais le peuple s’éloigne de Dieu. Des dix paroles de Dieu, ils en ont fait une loi avec 613 prescriptions, à cause de l’endurcissement de leur cœur, et certains mènent une vie contraire à cette loi. Échec de Dieu ?

Alors Dieu envoie des messagers, les prophètes, pour régler les comptes, mais ils ne sont pas écoutés par son peuple (mais parfois écoutés par les étrangers : Ninive !). Échec de Dieu ?

Dieu envoie son Fils : « Ils respecterons mon fils ! ». Mais son peuple le tue pour avoir « l’héritage ». Échec de Dieu ?

Les pharisiens, qui connaissent bien la bible, ont reconnu, en entendant Jésus, le passage d’Isaïe et le psaume de ce jour. Mais pas la mort du fils … ils ne le savaient pas encore … Alors, quand Jésus leur demande quelle sera la réaction du propriétaire de la vigne, ils répondent crânement : « Il les fera périr misérablement. Il louera la vigne à d’autres vignerons. ».

Réponse à moitié fausse.

Car Dieu qui est amour ne va pas exterminer le peuple qu’il avait choisi !

Mais à moitié vraie, car il louera la vigne à ceux qui reconnaîtrons l’amour de Dieu dans le don de son Fils qui a donné sa vie pour nous, et par sa résurrection qui nous ouvre à la vie éternelle.

Échec de Dieu ? Pas vraiment, car c’est un échec apparent qui masque l’amour inconditionnel de Dieu pour les hommes, qui sans cesse se renouvelle.

Une chose sur laquelle il faut revenir : par deux fois on parle de louer la vigne. Dieu loue la vigne à des vignerons homicides, puis il l’a louera à d‘autres.

C’est pour nous les hommes un rappel : la vigne, le raisin, le produit de la terre n’est pas notre propriété. Nous n’en sommes que les bénéficiaires …

Certes, Dieu nous a confié la terre : « Soyez féconds et multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la. » (Gn 1,28).

Et nous, avec la traduction « soumettez-la », on a compris que nous étions des « commandeurs » vis-à-vis de la terre, que nous pouvions en faire ce que nous voulions, que nous pouvions « en tirer le maximum » comme bon nous semblait …

Et ce faisant, nous nous sommes comportés comme si « nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter. » (Laudato Si’ 2).

Or l’utilisation à plein, « et le gaspillage des ressources de la Création commence là où nous ne reconnaissons plus aucune instance au-dessus de nous, mais ne voyons plus que nous-mêmes » (Benoît XVI cité en LS 6).

Nous nous sommes coupés de Dieu.

Nous sommes comme les vignerons de la parabole qui n’ont pas seulement tué le fils, mais surtout l’héritier … pour prendre pour eux la propriété du père.

Nous nous comportons comme si nous étions Dieu … mais sans l’amour que lui a pour la création …

Non seulement nous utilisons et défigurons la nature, mais nous voulons (pas tout le monde, heureusement) défigurer l’homme, image de Dieu, en voulant imposer des lois iniques sur l’avortement, la PMA, la GPA, l’euthanasie et toutes sortes de choses contraires à la nature humaine, au nom du « progrès » ( ??? ) et parce que tout le monde le fait …

Bonjour les moutons de Panurge …

En ce jour, où nous fêtons saint François d’Assise et la fin de la Saison de la Création, gardons l’humilité de nous reconnaître tous comme des éléments de la création, parmi d’autres, doués de raison, certes, mais pas toujours raisonnables

Père éternel,

tu nous as confié la terre

 pour que nous en vivions … ,

mais nous avons coupé les ponts avec toi,

et maintenant nous nous la sommes appropriée,

et nous l’exploitons sans vergogne.

Aide-nous à reconnaître,

et à faire reconnaître par les autres,

le mal que nous lui faisons.

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 27°




26ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 21, 28-32) – Francis COUSIN)

« La parole et les actes. »

 

L’évangile de ce jour nous parle d’un père qui propose à ses deux enfants d’aller « travailler à la vigne ». L’un dit « oui » et n’y va pas, l’autre dit « non », puis se ravise et y va.

Deux comportements différents qu’il nous est arrivé à tous d’avoir eu … pour diverses raisons, parce que le temps entre la réponse à la question et la démarche de faire ou ne pas faire l’action, ce temps de discernement, nous a permis d’analyser la demande et de voir si celle-ci était bonne pour tout le monde, ou seulement pour nous et pas pour les autres.

Dans le passage d’évangile, la demande est plus large.

On remarquera que le père ne parle pas de « sa » vigne, ou de « notre » vigne, mais de « la » vigne … comme s’il n’y qu’une seule vigne …

Or, dans la littérature biblique, la vigne est celle du Seigneur : « La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël » (Is 5, 7), c’est le peuple élu, choisi par Dieu, … d’où les reproches fait par Jésus aux grands prêtres et aux anciens qui ne se sont « même pas repentis plus tard pour croire à la parole » de Jean-Baptiste.

C’est la vigne que ceux-ci ont voulu prendre pour eux en tuant le fils du propriétaire (parabole des vignerons homicides) … et qui sera donnée à d’autres …

… à ceux qui ont cru à la parole de Jean-Baptiste et à celle de Jésus … et à celle de ses disciples, c’est-à-dire à l’Église …

La demande du père est donc celle du Père de Jésus, celui que nous appelons « Notre Père », qui s’adresse à nous aussi : « Va travailler aujourd’hui à la vigne. », … dans mon Église …

Quelle réponse vais-je donner ?

D’abord, est-ce que j’ai envie de me mettre au service de l’Église ?

Pas nécessairement un service matériel. Ce peut être par l’exemple que je peux montrer ma foi … en répondant à des questions qu’on peut me poser sur ma foi, sur l’Église … en étant un exemple pour mes enfants …

Mais on peut me demander de rendre un service.

Ma réponse dépendra de ce qu’on me demande … de mes compétences, de ma disponibilité, … mais surtout de ce qu’il y a dans mon cœur …

Saint Paul nous donne quelques conseils pour que notre cœur corresponde à ce que veut Jésus : « Recherchez l’unité. Ne soyez jamais intrigants ni vaniteux, mais ayez assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts ; pensez aussi à ceux des autres. », comme l’a fait Jésus : « Il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. » (deuxième lecture).

On peut refuser au départ, et on peut avoir de bonnes et justes raisons pour le faire, … mais il peut arriver que ce soit simplement parce qu’on veut être tranquille, qu’on ne veut pas être ennuyé, parce qu’en fait, on ne s’intéresse pas véritablement aux autres … et peut-être qu’après avoir réfléchi, analysé la situation, on revienne sur sa décision … à un moment ou à un autre …

Dieu est patient … et surtout il sera très heureux de vous voir revenir travailler à sa vigne …

Car n’oublions pas : « la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte. » (Jc 2,17).

Écoutons, et faisons nôtre cette prière du père Christian Delorme :

Avec toi, Ô Christ,

je me découvre un des fils bien-aimés du Père Éternel.

Il m’appelle à me mettre à la tâche.

J’entends sa voix qui vient murmurer à mon cœur.

Ce n’est pas une voix qui ordonne brutalement.

C’est jeune voix qui suggère,

une voix amicale, presque une voix qui supplie :

« Prends soin de ma vigne, me chuchote le Père.

J’ai besoin de toi et je compte sur toi ! » (…)

Toi qui n’as jamais cessé de faire la volonté du Père,

aide-moi à me montrer enfin

un bon ouvrier et un bon fils.

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 26°




25ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 20,1-16) – Francis COUSIN)

« … afin d’embaucher des ouvriers

pour sa vigne. »

 

Au départ de cette parabole, il y a un appel par le maître du domaine auprès d’ouvriers pour travailler à sa vigne. Et il le fait plusieurs fois dans la journée. Son domaine, c’est l’Église.

À la fin, il y a la récompense du travail, le salaire … qui est le même pour tous : c’est la vie éternelle.

Souvent les commentaires se sont intéressés à la fin de la parabole, quand tout le monde touche le même salaire. C’est vrai qu’à nos yeux humains cela paraît inadmissible, avec notre droit du travail, nos mentalités païennes et intéressées … mais on ne peut pas multiplier la vie éternelle … cela n’a aucun sens.

Mais avant, tout au long de la journée, il y a le travail, … le développement de l’Église, … sa mission …

Et ce qui me semble intéressant, c’est de voir que le maître du domaine, c’est-à-dire Dieu, ne cesse de retourner au village pour embaucher de nouveaux ouvriers …

Faut-il donc que les besoins de son domaine soient immenses … que les besoins de l’Église soient immenses … ?

Sans nul doute ! Car non seulement Dieu lui-même ’’embauche’’, mais il demande, par Jésus, de participer à cette embauche : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. » (Mt 9,37-38).

Dieu met dans le cœur de chacun l’amour envers lui, l’amour des autres, l’amour de l’annonce de l’évangile …

Mais est-ce suffisant ?

Il faut aussi des humains qui soient là pour inviter les gens à participer à la vie de l’Église …

Dans la parabole, le maître envoie les gens à sa vigne, … mais dans le travail de la vigne, il y a plusieurs façons de travailler, et c’est l’intendant qui va répartir les tâches : on peut couper le raisin (les vendangeurs), porter le raisin à la remorque (les porteurs), amener la remorque au pressoir (les cochets), presser le raisin (les fouleurs) … jusqu’à la mise en bouteilles. Tous participent à l’élaboration du vin. Et chacun, en fonction de ses capacités ou de ses goûts, se trouve associé à l’un ou l’autre poste.

Il doit en être de même dans notre Église … et dans chacune de nos paroisses…

Bien sûr, quand on parle d’ouvriers pour la moisson, on pense d’abord aux prêtres. Et comme ils ont répondu à l’appel de Dieu, on le laisse souvent faire !! … et on ne cherche pas à susciter des vocations … Mais il faut parfois un élément déclencheur pour qu’une vocation naisse … La rencontre avec un religieux, une religieuse, un prêtre, même un laïc … peut amener à penser à la vie religieuse … ou entretenir ou confirmer une vocation naissante … ou au contraire annihiler celle-ci !

C’est la question que tout chrétien devrait se poser : ais-je déjà parler à un jeune qu’il pourrait entrer dans la vie religieuse ? Et aux parents : Est-ce que j’ai déjà pensé qu’un de mes enfants pourrait entrer dans la vie religieuse, et quelle serait ma réaction ?

Il y a une quantité d’autres choses à faire dans l’Église auxquelles chacun peut participer : on pense à tout ce qui a trait à la liturgie : les fleurs, les chants, la musique, les lecteurs, les quêteurs, l’accueil, les donneurs de communion … ceux qu’on voit … et tous ceux qu’on ne voit pas : les balayeuses (et parfois des balayeurs), ceux qui rédige les prières universelles, qui font les photocopies, qui assurent le secrétariat ou la comptabilité, qui s’occupe de l’ordinateur ou du site internet de la paroisse … et puis les catéchistes, c’est le moment où on en cherche … et puis …

Cela fait beaucoup de monde …

Mais qui va chercher tous des gens ?

Dieu bien sûr, qui ne cesse d’inciter les gens à participer à la vie de son Église …

Mais pas que lui.

Il y a des paroisses où c’est le prêtre qui s’occupe de tout, d’autres où le prêtre demande aux laïcs de chercher, et d’autres où il y a une recherche partagée et discutée entre tous … la décision finale revenant au prêtre. C’est sans doute la meilleure solution.

Mais je crois qu’il faut nous mettre à l’image de Dieu, qui sans cesse va à la recherche de personnes pour que son Église soit vivante, du matin au soir, chaque jour …

Prier pour que le Père envoie des ouvriers à la moisson, c’est bien …mais ce n’est pas suffisant. Il faut que chacun se sente concerné par la mission de l’Église et y participe … avec ses moyens … avec ses charismes … avec son cœur …

Comme le disait saint Paul :

« Les dons de la grâce sont variés, mais c’est le même Esprit.

Les services sont variés, mais c’est le même Seigneur.

Les activités sont variées, mais c’est le même Dieu qui agit en tout et en tous.

À chacun est donnée la manifestation de l’Esprit en vue du bien.

À celui-ci est donnée, par l’Esprit, une parole de sagesse ; à un autre, une parole de connaissance, selon le même Esprit ; un autre reçoit, dans le même Esprit, un don de foi ; un autre encore, dans l’unique Esprit, des dons de guérison ; à un autre est donné d’opérer des miracles, à un autre de prophétiser, à un autre de discerner les inspirations ; à l’un, de parler diverses langues mystérieuses ; à l’autre, de les interpréter.

Mais celui qui agit en tout cela, c’est l’unique et même Esprit : il distribue ses dons, comme il le veut, à chacun en particulier. » (1 Co 12, 4-11)

Tous, nous avons à aider Dieu à trouver des ouvriers pour la mission de l’Église.

Seigneur Dieu,

tu es toujours à la recherche

de nouveaux ouvriers

pour que vive ton Église,

mais tu n’es pas seul.

Chacun de nous est invité

à participer à la vie de ton Église,

et à susciter de nouveaux ouvriers

pour la mission de celle-ci.

Aide-nous de ton Esprit.

 

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 25°




25ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER

« La logique de l’Amour »

(Mt 20,1-16)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples cette parabole : « En effet, le royaume des Cieux est comparable au maître d’un domaine qui sortit dès le matin afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne.
Il se mit d’accord avec eux sur le salaire de la journée : un denier, c’est-à-dire une pièce d’argent, et il les envoya à sa vigne.
Sorti vers neuf heures, il en vit d’autres qui étaient là, sur la place, sans rien faire.
Et à ceux-là, il dit : “Allez à ma vigne, vous aussi, et je vous donnerai ce qui est juste.”
Ils y allèrent. Il sortit de nouveau vers midi, puis vers trois heures, et fit de même.
Vers cinq heures, il sortit encore, en trouva d’autres qui étaient là et leur dit : “Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?”
Ils lui répondirent : “Parce que personne ne nous a embauchés.” Il leur dit : “Allez à ma vigne, vous aussi.”
Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant : “Appelle les ouvriers et distribue le salaire, en commençant par les derniers pour finir par les premiers.”
Ceux qui avaient commencé à cinq heures s’avancèrent et reçurent chacun une pièce d’un denier.
Quand vint le tour des premiers, ils pensaient recevoir davantage, mais ils reçurent, eux aussi, chacun une pièce d’un denier.
En la recevant, ils récriminaient contre le maître du domaine :
“Ceux-là, les derniers venus, n’ont fait qu’une heure, et tu les traites à l’égal de nous, qui avons enduré le poids du jour et la chaleur !”
Mais le maître répondit à l’un d’entre eux : “Mon ami, je ne suis pas injuste envers toi. N’as-tu pas été d’accord avec moi pour un denier ?
Prends ce qui te revient, et va-t’en. Je veux donner au dernier venu autant qu’à toi :
n’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mes biens ? Ou alors ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ?”
C’est ainsi que les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. »

                    

             Deux logiques s’affrontent dans notre parabole : celle du mérite, et celle de la bonté.    Dans la première, l’homme est au centre, avec ses froids critères de justice qui ne laissent aucune place à la bonté, à la générosité. « Je travaille, je fais des efforts et des sacrifices : je mérite donc de recevoir le salaire qui correspond à ma peine. » Dans cette logique, l’homme est seul : il se contemple dans un miroir, lui et son œuvre, et il juge, il se juge, il apprécie, il s’apprécie. Dieu n’a rien à dire sinon à lui donner ce qu’il mérite, ce qui est juste à ses yeux… En fait, ici, c’est l’homme qui décide de tout : Dieu n’a plus qu’une seule chose à faire, obéir…

         Cette recherche de « soi », ne peut que déboucher sur l’autosatisfaction, l’amour propre, l’orgueil et le jugement des autres, sur la base des mêmes critères, des jugements rarement élogieux, souvent méprisants (Lc 18,11-12 ; Jn 7,49)… Loin de rassembler, ils ne font que creuser le fossé et marquer la distance : « Ces derniers venus n’ont fait qu’une heure », et ils reçoivent le même salaire, disent, scandalisés, ceux qui avaient été « embauchés dès le matin ». En fait, ils sont jaloux… « Ils ont travaillé moins que moi, et ils reçoivent autant que moi ! Ce n’est pas juste ! » Ce qui revient à dire à Dieu : « Tu n’es pas juste ! » Et voilà l’homme qui se place au-dessus de Dieu…

          La logique de la bonté ne recherche, elle, que le bien, le bonheur, la joie de l’autre (Jr 32,37-41). Les derniers embauchés n’étaient pas responsables de leur inactivité : « Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?… Parce que personne ne nous a embauchés ! » Leur bonne volonté est bien là, ils n’ont pas cherché à s’esquiver… Et lorsque vient l’heure de la paye, ils ne réclament rien car ils savent qu’ils ne méritent rien ! Mais voilà qu’ils reçoivent comme les premiers ! Bonté du Maître ! Joie !

          Voilà comment agit ce Dieu et Père qui est Amour (1Jn 4,8) en tout son être, et qui ne recherche que le bien le plus profond de tous ceux et celles qu’il aime, envers et contre tout (Mt 5,43-48) et il aime tous les hommes qu’il a créés (Sg 11,24 ; Jn 3,16-17 ; 1Tm 2,3-6) ! Heureux celui qui se tournera de tout cœur, et le plus tôt possible, vers Lui : il ne pourra qu’être comblé et comblé encore (Lc 19,26). Et dans cette logique de l’amour, où nul ne mérite rien, où tout se reçoit gratuitement (Ep 2,4-10 ; Rm 6,23), où chacun ne recherche pas son propre intérêt mais celui de l’autre (1Co 10,24), il se réjouira lui aussi du bonheur de ceux qui, peut-être après lui, à la dernière heure, ont enfin dit « Oui ! » à l’Amour !  DJF




24ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 21-35) – Francis COUSIN)

« C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur.»

 

Attention à ne pas nous tromper dans l’interprétation de cette phrase.

Elle ne veut pas dire, comme on pourrait le croire au premier abord, que, si nous voulons être pardonné par Dieu, il faut que nous pardonnions nous aussi, et donc que le pardon que nous donnons est prioritaire (en ce sens qu’il est le premier) pour nous permettre d’être pardonné, et donc d’être sauvé.

Ce n’est pas ce que nous dit l’évangile.

Le pardon, celui que nous donnons, ne peut pas être une obligation nécessaire.

Dieu, qui est amour, nous laisse toujours libre !

Et puis, cette obligation nous donnerait comme une sorte d’avantage sur Dieu : « J’ai pardonné, donc tu dois me pardonner ».

Cela n’est pas possible … nous ne pouvons pas avoir ’’la main’’ sur Dieu.

Cela ressemblerait à un marchandage que nous ferions avec Dieu … ce qui ne peut se faire.

C’est une mauvaise interprétation de la parabole, car il ne faut pas oublier le début : le roi, c’est-à-dire Dieu, a commencé par donner son pardon, à remettre sa dette, une dette énorme, à son serviteur (qu’il nommera par la suite le serviteur méchant) … et ce qui est reproché à celui-ci est de ne pas avoir remis à son compagnon une dette de beaucoup inférieure à la sienne.

Ce serviteur n’a regardé que les faits : mon compagnon a une dette envers moi, donc il doit me rembourser ! Mais il ne l’a pas mise en relation avec sa propre dette annulée …

Comme toujours, Dieu est le premier à agir, et il nous demande de faire comme lui.

Il aime tout le monde, et comme il aime, il pardonne les fautes que ceux qui se reconnaissent pécheurs.

Cela demande de l’humilité de reconnaître ses fautes !

Et l’humilité nous permet de reconnaître que nous ne sommes pas meilleurs que les autres, ou que les autres ne sont pas moins bons que nous !

Se reconnaître pécheurs nous permet aussi de reconnaître que les autres peuvent aussi être pécheurs, tout comme nous, … et à leur pardonner.

Mais le pardon est une chose qui peut être difficile à faire.

Dans la vie courante, il arrive souvent, quand on bouscule quelqu’un, quand malencontreusement on lui marche sur les pieds, ou quand on passe devant lui, qu’on utilise simplement le mot « pardon ! », sans qu’on sache exactement si c’est une excuse ou une demande de pardon … D’ailleurs, on ne demande pas de réponse et la personne à laquelle on s’adresse n’en donne généralement pas non plus. C’est un pardon qui n’en est pas vraiment un, et qui ne ’’coûte’’ rien.

La plupart du temps, il faut se forcer pour demander (ou pour donner son) pardon … et il faut mettre une croix sur son orgueil … et se reconnaître humble …

Mais il arrive parfois (et c’est peut-être le plus souvent) que certains faits soient très difficiles à pardonner … et qu’ils soient même parfois qualifiés d’« impardonnables », comme les meurtres, les atteintes à la vie (physique, sociale, spirituelle …) par ceux qui les subissent, directement ou indirectement, … et même par le droit international, la presse, et tous ceux qui en ont connaissance …

Et pourtant, à la demande de Pierre de savoir s’il faut pardonner jusqu’à sept fois, Jésus nous dit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. ».

Or le nombre sept, dans la Bible, représente la plénitude, la perfection. Pierre demandait donc s’il faut aller jusqu’à la perfection dans le pardon. Jésus lui, demande d’aller au-delà de la perfection, au-delà de la limite humaine, ce qui n’est possible que dans le surnaturel, dans ce qui est divin, donc seulement avec la grâce de Dieu. Le véritable pardon ne peut se faire qu’avec l’aide de Dieu.

Jésus, lui, est allé jusqu’au bout et il a demandé le pardon quand, humilié, bafoué, calomnié, outragé, « obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix » (Ph 2, 8), il demande à son Père : « Pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34).

Pour nous, quand le pardon devient difficile, on ne peut le demander (ou l‘accorder) qu’en demandant l’aide de Jésus.

Certains ont réussi à le faire … Pourquoi pas nous ?

Et si Jésus a pu dire : « C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15,7), on pourrait aussi ajouter, car cela me semble aussi vrai : « Et qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui est pardonné par celui à qui il a fait du tort … »

Seigneur Jésus,

tu nous invites à toujours pardonner …

mais bien souvent,

c’est au-dessus de nos forces,

car nous sommes humains,

trop fiers, pas assez humbles.

Donne-nous la grâce du pardon !

 

Francis Cousin

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23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN

Ézékiel 33 7–9 ; Romains 13 8–10 ; Matthieu 18 15–20

 

Les textes d’aujourd’hui ont en commun de parler de la communauté qu’est l’Eglise, et des petits groupes de chrétiens au sein de l’Eglise. Et dans une communauté ou même des groupes, il y a des règles du vivre ensemble. Ces règles sont établies par les responsables hiérarchiques quand il s’agit de l’Église, et il y a tout simplement des règles du savoir-vivre ensemble que les gens d’une même région ou du même quartier connaissent sans que cela soit clairement indiqué. En tout cas, concernant les chrétiens qui se rassemblent, toutes les règles n’ont qu’une fin : union, solidarité, entre aide, paix, bonne entente et tout cela, en toile de fond, le commandement du Christ : « aimez-vous les uns les autres ». Et c’est en suivant les commandements de Dieu qu’on reconnaît celui qui aime Jésus. Jn 14,21 : « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime; or celui qui m’aime sera aimé de mon Père; et je l’aimerai et je me manifesterai à lui ». Et c’est parce qu’on oublie les commandements de Dieu et les enseignements du Christ que l’on finit par ne regarder que ses propres intérêts. On finit alors par s’éloigner du Christ, à commettre des fautes, à semer la mésentente. Le fait d’oublier le Christ, d’oublier ses commandements, d’oublier l’Eglise, nous amène à ne s’occuper que de nous-mêmes, bien égoïstement. Egoïstement parce qu’on est toujours bien attaché au monde et non pas à Dieu ou au Christ. Grignion de Monfort : §75 – « Cette sagesse du monde (qui concerne ceux qui délaissent Dieu) est une conformité parfaite aux maximes et aux modes du monde; c’est une tendance continuelle vers la grandeur et l’estime; c’est une recherche continuelle et secrète de son plaisir et de son intérêt, non pas d’une manière grossière et criante, en commettant quelque péché scandaleux, mais d’une manière fine, trompeuse et politique; autrement ce ne serait plus selon le monde une sagesse, mais un libertinage. §76 – Un sage du siècle (c’est-à-dire quelqu’un qui semble ne pas avoir besoin de Dieu) est un homme qui sait bien faire ses affaires, et faire réussir tout à son avantage temporel, sans quasi paraître vouloir le faire; qui sait l’art de déguiser et de tromper finement sans qu’on s’en aperçoive; qui dit ou fait une chose et pense l’autre; qui n’ignore rien des airs et des compliments du monde; qui sait s’accommoder à tous pour en venir à ses fins, sans se mettre beaucoup en peine de l’honneur et de l’intérêt de Dieu; qui fait un secret mais funeste accord (ou un mélange) de la vérité avec le mensonge, de l’Evangile avec le monde, de la vertu avec le péché, de Jésus-Christ avec Bélial (2Co 6,15 :  c’est-à-dire avec le diable); qui veut passer pour un honnête homme, …. Enfin, un sage mondain est un homme qui, ne se conduisant que par la lumière des sens et de la raison humaine, ne cherche qu’à se couvrir des apparences de chrétien et d’honnête homme, sans se mettre beaucoup en peine de plaire à Dieu, ni d’expier, par la pénitence, les péchés qu’il a commis contre sa divine Majesté ». Voilà pourquoi dans une communauté, et particulièrement dans une communauté chrétienne, des règles sont là pour que le « vivre ensemble » se passe au mieux. Mais parce que l’homme est souvent encore attaché aux choses du monde et pas assez à Dieu, les règles du « vivre ensemble » de la communauté peuvent ne pas être respectées. C’est alors le trouble au sein même de l’Eglise. En cas de conflit, une procédure est à observer. La première démarche consiste à rencontrer en tête à tête la personne conflictuelle et qui pose problème au sein du groupe. Le but est de se comprendre. Dans tous les cas, il faut être diplomate et y aller avec douceur.

Premier cas : Si la personne pêche directement contre Dieu et que l’on soit au courant, il faut essayer d’accompagner, seul à seul, le pécheur avec suffisamment de tact et d’intelligence pour qu’il prenne conscience de son péché et puisse s’en sortir. Des textes tirés de la Bible ou des exemples pris dans la vie courante peuvent fortement contribuer à faire prendre conscience de la gravité du péché. Là encore, la formation biblique peut aider le pécheur à progresser dans son union au Christ et par conséquent dans son attitude à avoir dans la communauté ou dans un groupe.

Deuxième cas, si la personne pêche contre nous, c’est-à-dire nous fait du tort. Là aussi, de manière diplomate, on sera amené à faire comprendre, seul à seul, avec douceur, à la personne le tort qu’il nous a fait personnellement ou au groupe de manière. Si cette première démarche se montre infructueuse, on aura alors recours à la communauté ou au groupe pour corriger fraternellement le fautif. Si, même dans ce cas, ce dernier ne se corrige pas, alors cela peut aller jusqu’à la coupure de certains liens d’ordre social pour que le groupe puisse continuer sereinement sa mission, ou, à un autre niveau si les cas est extrêmement grave, aller jusqu’à l’excommunication par la hiérarchie. C’est ce qui s’est passé il y a quelques années lorsque l’évêque de la Réunion a fait afficher dans chaque église un communiqué pour dire qu’à la Réunion une personne a été excommuniée de l’Église. Dans tous les cas, comme tout péché, c’est toujours une affaire en rapport avec les commandements de Dieu : aimer Dieu et aimer son prochain, mais aussi d’obéissance de la foi. Parce que nous avons foi en Dieu, cette foi nous amène à l’obéissance des commandements de Dieu. Et tout péché est une désobéissance. Ne pas aimer son prochain c’est une manière aussi de dire qu’on ne pense pas aux autres et qu’on pense surtout à soi-même. Comme dit le créole : « A moins même mon maître ». Or, tout l’enseignement du Christ est de nous dire qu’il faut aimer Dieu et son prochain. Il ne nous demande pas d’être amoureux de tout le monde mais d’aimer tout le monde. Et aimer, cela commence souvent par « des petits riens » qui peuvent faire plaisir aux autres : un regard, un bonjour, un petit signe de la main, ne pas se mettre en colère alors même qu’il y aurait toutes les raisons de l’être, éviter la critique, ne rien dire à ceux qui vous regardent de travers, etc…Dans tous les cas, le chrétien peut toujours se conduire en chrétien, et il le pourra à la seule condition d’avoir le regard fixé sur le Christ. Mi 6,8 : « On t’a fait savoir, ô homme, ce qui est bien, ce que Yahvé réclame de toi : rien d’autre que d’accomplir la justice, d’aimer la bonté et de t’appliquer à marcher avec ton Dieu ». Accomplir la justice, c’est se comporter de manière à rester en accord avec les commandements de Dieu tout en vivant dans le monde, dans une communauté ou dans un groupe de chrétiens. Ce qui signifie que Celui qui est à la suite du Christ doit être capable de garder son sang-froid, son calme, avec une paix intérieure qui ne le quitte pas parce son regard intérieur est fixé sur le Seigneur alors même, qu’il subit toutes sortes de vexations ou de critiques et être capable de reconnaître qu’il a tort dans certains cas.  « Le Seigneur ne demande rien d’extraordinaire à l’homme, mais seulement d’agir de manière droite en évitant le péché (c’est le sens de l’expression « pratiquer le droit »), aimer et pratiquer la miséricorde (hesed), et enfin vivre humblement avec Dieu. Voilà la conduite de l’homme qui plait à Dieu. On n’a pas besoin de tout retenir de la Bible, mais une seule expression : « Celui qui aime autrui a de ce fait accompli la Loi », ce qui signifie que tant que vous aimez le prochain, quel qu’il soit, vous ne péchez pas et tout ce qui est dit dans la Bible vous êtes en train de l’accomplir parce que vous avez de l’amour pour les autres. L’amour ou la charité c’est la même chose, et « la charité est la Loi dans sa plénitude ». Saint Augustin nous dit : « aime et fais ce que tu veux ».

Autrement dit, en aimant le prochain, vous accomplissez toutes les lois qui se trouvent dans la Bible et donc les dix commandements dont certains ont été repris par le deuxième texte d’aujourd’hui : « Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne tueras pas, tu ne voleras pas, tu ne convoiteras pas, et tous les autres se résument en cette formule : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. 10 La charité ne fait point de tort au prochain. La charité est donc la Loi dans sa plénitude ». Et la correction fraternelle dont parle l’Evangile, contrairement à ce qu’on pourrait penser, est une manière d’exercer la charité, l’amour, pour aider le pécheur à rectifier sa conduite de manière à plaire à Dieu. Le 1er texte d’aujourd’hui s’adresse au prophète qui doit avoir un rôle de guetteur. Le prophète n’est pas quelqu’un qui prédit l’avenir, son rôle est de dire la parole de Dieu. Tout chrétien, d’une certaine manière, est capable de dire la parole de Dieu, et donc d’être prophète à son niveau. Dieu donne donc la parole aux prophètes que sont les chrétiens pour faire passer ses lois, ses messages d’amour et de paix. Au prophète Jérémie (Jr 1,9) voici ce que Dieu lui dit : 9 … Voici que j’ai placé mes paroles en ta bouche ». Cet homme que Dieu inspire a le devoir de dire la parole de Dieu lorsque c’est nécessaire. Ézékiel nous dit: « Si je dis au méchant :  Méchant, tu vas mourir, et que tu ne parles pas pour avertir le méchant d’abandonner sa conduite, lui, le méchant, mourra de sa faute, mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang. 9 Si au contraire tu as averti le méchant d’abandonner sa conduite pour se convertir et qu’il ne s’est pas converti, il mourra, lui, à cause de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie ». L’Évangile d’aujourd’hui dit la même chose : 15 « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le, seul à seul. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère ». S’il n’écoute pas, cela retombera sur lui-même, il mourra de sa faute mais le chrétien qui l’aura conseillé sera quitte devant Dieu parce qu’il aura fait un geste d’amour envers le fautif pour essayer de le ramener à Dieu. C’est ce qu’on appelle la « correction fraternelle ». Et la correction fraternelle » est un devoir pour tout chrétien. Jc 5,20 : « celui qui ramène un pécheur de son égarement sauvera son âme de la mort et couvrira une multitude de péchés ». 1P4,8 : « conservez entre vous une grande charité, car la charité couvre une multitude de péchés ». Que Marie nous aide à répandre autour de nous l’amour de Dieu.




23ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 15-20) – Francis COUSIN)

 « Si ton frère a commis un péché contre toi … »

 

Dans l’évangile de ce jour, Jésus nous montre, non seulement l’importance du pardon, de la réconciliation, mais aussi une manière de faire pour obtenir cette réconciliation, en trois étapes :

– D’abord seul à seul, discrètement, sans grand bruit. Et si cela fonctionne, « Tu as gagné ton frère ».

– Ensuite, avec « un ou deux témoins » qui pourront certifier que la réconciliation est faite.

– Enfin, devant toute « l’assemblée de l’Église », afin que chacun soit témoin du tort effectué et de la réparation éventuelle. (La plupart des traductions actuelles parle de l’Église, ce qui un peu anachronique, et il semble préférable de traduire par communauté ou assemblée)

Et si aucun accord ne se fait, il faut considérer que la personne s’exclut de la communauté et doit être mise au rang des païens.

L’intérêt de ce passage est de montrer la dimension collective de la faute, qui est pourtant individuelle, et ce de deux manières. Dans la faute, il y a celui qui fait la faute, le pécheur, et celui qui subit la faute, la victime.

La faute établie une injustice entre deux membres de la communauté, ce qui fait que les liens entre tous les membres ne sont plus les mêmes : il y a un dés-accord qui joue sur l’harmonie de la communauté toute entière.

Pour ré-accorder l’harmonie entre les membres, il y a donc nécessité que chacun participe, au final, à la mise en œuvre de la réconciliation à l’intérieur de la communauté.

Pécheurs, nous le sommes tous. C’est pourquoi au début de nos célébrations nous nous reconnaissons pécheurs, en pensée, en paroles, par action et par omission, chacun pour soi, mais nous demandons aussi à la communion des saints et à tous nos frères présents de prier pour [nous] le Seigneur notre Dieu. C’est la dimension collective de la réparation des fautes.

Mais cette dimension collective n’exclut pas la dimension individuelle de prier pour les pécheurs, ainsi que le demandait Notre-Dame à Bernadette, à Lourdes : « Priez pour la conversion des pécheurs ».

Et ce que Dieu dit à Ézéchiel dans la première lecture peut aussi s’appliquer à chacun de nous : « Si tu ne lui dis pas d’abandonner sa conduite mauvaise, lui, le méchant, mourra de son péché, mais à toi, je demanderai compte de son sangAu contraire, si tu avertis le méchant d’abandonner sa conduite, et qu’il ne s’en détourne pas, lui mourra de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie. »

Pourtant, cette manière de penser n’est pas vraiment entrée dans les mœurs.

Quand on parle d’un pécheur, la première réaction est bien souvent de l’exclure … et de dire du mal de lui. Et peut-être d’en rajouter … surtout si on n’est pas concerné par la faute …

C’est ce qu’on appelle ici des ladi-lafé, ailleurs des commérages, des cancanages …

Ce à quoi le pape François disait : « Nous sommes habitués aux commérages, aux ragots, et souvent nous transformons nos communautés et même notre famille en un « enfer » où se manifeste cette forme de criminalité qui conduit à « tuer son frère et sa sœur avec sa langue » (Sainte Marthe, 2/9/2013), en s’appuyant sur le texte de saint Jean : « Quiconque a de la haine contre son frère est un meurtrier, et vous savez que pas un meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui. » (1 Jn 3,15).

Peut-être que nous devrions nous poser la question : Est-ce que, dans nos communautés, paroissiales ou de mouvements, nous laissons courir les ragots, voire même nous les alimentons en en rajoutant une couche ? Ou est-ce que nous faisons, avec les autres, tout notre possible pour atténuer au maximum les différents qui peuvent se faire jour parmi nous en essayant de réconcilier les personnes concernées ?

Jésus a dit, en parlant de nos communautés : « Tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13,35). Mais on pourrait dire aussi : « Tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous êtes capables de vous pardonner les uns les autres ».

Car c’est dans ces conditions-là, le pardon de tous dans la communauté, que l’amour se fera montrer.

En effet, on pourrait dire :

Le pardon est la condition de la réalisation de l’amour, et

L’amour est la condition de la réalisation du pardon.

Les deux sont indissolublement liés.

Seigneur Jésus,

tu nous invites à aller vers les autres

pour proposer le pardon,

mais tu insistes aussi

sur la responsabilité collective de la communauté

pour que le pardon soit effectif entre tous,

et qu’ainsi l’amour règne entre tous.

Mais on l’oublie souvent.

 

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 23°




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER

Travailler, ensemble, à « gagner nos frères »

(Mt 18, 15-20)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère.
S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins.
S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain.
Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.
Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux.
En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »

                    

             « Libre à l’égard de tous », écrivait St Paul, « je me suis fait l’esclave de tous, afin de gagner le plus grand nombre… Je me suis fait faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver à tout prix quelques-uns » (1Co 9,19‑22), car « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4-6)…

            Alors, « si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul », pour lui éviter d’être humilié devant les autres, « et montre lui sa faute » sans jamais oublier que nous sommes tous pécheurs, d’une manière ou d’une autre. Et « s’il t’écoute » avec simplicité et humilité, « tu auras gagné ton frère », et alors quelle joie ! Et un jour peut-être, c’est lui qui, à son tour, viendra te « gagner »…

            Aussi, « frères, même dans le cas où quelqu’un serait pris en faute, rétablissez-le en esprit de douceur, te surveillant toi-même, car tu pourrais bien toi aussi être tenté. Portez les fardeaux les uns des autres et accomplissez ainsi la Loi du Christ. Car si quelqu’un estime être quelque chose alors qu’il n’est rien, il se fait illusion » (Ga 6,1-3)…

            Et « s’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes » en espérant que le poids « plus lourd » de votre charité commune pourra percer l’écorce de son cœur… S’il refuse encore, que « toute l’Eglise » unisse ses forces et sa prière, car, « nous tous qui avons été abreuvés d’un même Esprit, nous ne formons qu’un seul Corps » (1Co 12,13). C’est pourquoi, si un membre est malade, c’est le Corps tout entier qui souffre (1Co 12,26). Et si un membre manque à l’appel, il manque à tous, car nous avons tous besoin les uns des autres pour que l’Eglise soit pleinement elle-même…

            En effet, cette Eglise, du point de vue de Dieu, a en fait la dimension de l’humanité tout entière, cette famille incroyablement nombreuse de ses enfants « créés à son Image et Ressemblance » (Gn 1,26-28). Qu’un seul manque à l’appel, et Dieu « s’en ira après celui qui est perdu jusqu’à ce qu’il le retrouve » (Lc 15,4-7). Puisque l’Eglise est « le Corps du Christ », il est impossible qu’elle n’adopte pas la même attitude envers tous, et surtout envers les plus petits… C’est pourquoi Jésus a repris cette parabole de la brebis perdue pour l’appliquer, juste avant notre passage, à l’Eglise car «  on ne veut pas, chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ces petits se perde » (Mt 18,14). Quiconque prie le « Notre Père » en disant « que ta volonté soit faite », ne peut donc que travailler, d’une manière ou d’une autre, au salut de tous, sans aucune exception… DJF




22ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 16, 21-27) – Francis COUSIN)

On oublie toujours quelque chose …

 

L’annonce par Jésus de son passion et de sa mort voulues par les « anciens, les grands prêtres et les scribes », et de sa résurrection le troisième jour a été pour les apôtres comme un coup de massue.

Il venait juste d’être reconnu comme le Messie, « le Christ, le Fils du Dieu vivant » !

Sans doute abasourdis, les apôtres se taisent …

Alors Pierre entraîne Jésus à part et lui souffle à l’oreille : « Cela ne t’arrivera pas ! ».

Il pensait réconforter Jésus … mais c’est une réponse virulente de la part de Jésus qui arrive : « Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute ».

Pourquoi ce reproche ?

Parce que Jésus doit aller jusqu’au bout de sa mission sur la terre, et l’aide humaine de Pierre et des autres apôtres ne s’inscrit pas dans la vision divine.

Mais aussi parce que, comme nous aussi le faisons souvent, Pierre n’a pas attendu et donc entendu la fin de la phrase de Jésus pour se faire son opinion : « … et le troisième jour ressusciter. »

Il en est resté aux souffrances infligées à Jésus … à ce qui est mal, et qui fait mal …

Peut-être aussi parce que la résurrection, certains juifs en parlaient, mais cela restait mystérieux, on ne savait pas trop ce que c’était, comment cela se passait … (encore maintenant …). Ce n’était pas un sujet qui passionnait les gens simples comme l’étaient les apôtres …

Ils n’avaient aucune expérience de ce que c’était. Même pour la fille de Jaïre, Jésus s’était défendu de la ressusciter ; il avait seulement dit : « Ne pleurez pas ; elle n’est pas morte : elle dort. » (Lc 8,52).

Ils ne comprendront vraiment ce que cela voulait dire que le jour de la résurrection de Jésus, même s’il en avait parlé plusieurs fois.

Nous aussi, nous sommes comme Pierre ou les apôtres : nous ne retenons souvent qu’une partie de la phrase que nous entendons, et nous occultons le reste.

Cela arrive souvent avec la Parole de Jésus dans les évangiles : nous acceptons ce que nous comprenons, ce qui nous semble ‘correct’, normal, à nos pensées humaines … mais nous oublions les autres.

Comme dans le passage de l’évangile de ce jour : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. » …

On veut bien suivre Jésus, on est prêt à le faire … et souvent on en reste à « prendre sa croix » … et cela nous fait peur … parce qu’on ne sait pas quelle est cette croix, qui est individuelle, spécifique pour chacun …

Et quand arrive une situation difficile pour nous, on se dit : « Cela doit être ma croix ! », mais on n’en est jamais sûr … et on essaye de vivre avec en se disant : « Si je veux aller au ciel, il faut que je l’accepte » … mais en fait, on ne l’accepte pas, on la subit, et notre seul désir est qu’elle disparaisse …

Et il arrive que nous en voulions à Jésus de nous imposer cette croix … (« Qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour … »)

Pourtant, il y a une autre phrase de Jésus qu’on oublie : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos (…) Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. » (Mt 11,28.30)

Peut-être parce que c’est une phrase qu’on a du mal à comprendre … parce que nos « pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. », et que, bien que nous le désirions, nous avons du mal à sortir de notre condition humaine pour nous élever vers Dieu.

Et aussi parce qu’il y a une partie de la première phrase que nous avons occultée, celle qui est mise en premier : « qu’il renonce à lui-même ».

Et on l’occulte d’autant plus facilement qu’elle va à l’encontre de tout ce qui est véhiculé dans notre société actuelle où on met en avant l’individualisme, avec tout ce que cela comporte, à tous les niveaux : familial, social, travail, économique, politique, éthique …

C’est toujours « moi d’abord », avec dans les messages publicitaires : « Soyez le meilleur … », « Avec … soyez différents », « Distinguez-vous des autres … ».

On comprend qu’on oublie cette partie de la phrase, parce que renoncer à soi-même, d’une certaine manière, c’est renoncer à ce qu’on est intrinsèquement, renoncer à son « soi », … et cela n’est pas humainement naturel …

Parce que renoncer à soi-même, c’est accepter de mettre en premier quelqu’un d’autre, et pour nous, c’est Jésus, c’est Dieu … C’est mettre en avant la Parole de Dieu, ne vivre que pour elle, comme le fit saint Paul : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » (Ga 2,20).

C’est accepter que cette Parole de Dieu « attire sur [nous] l’insulte et la moquerie. » (Première lecture), et cela arrive quand on défend la position des chrétiens, notamment dans les débats concernant la nouvelle loi de Bioéthique, entre autres …

Que cette Parole de Dieu soit pour nous, comme elle le fut pour Jérémie, « un feu brûlant dans [notre] cœur » qu’on n’arrive pas à « maîtriser » (Première lecture) … avec l’aide de Jésus qui est toujours là près de nous, pour nous aider à porter notre joug, à porter notre croix.

Seigneur Jésus,

on croit bien connaître ton évangile,

mais il y a toujours des passages qu’on oublie …

et ce sont souvent les plus importants,

ceux qu’on a du mal à suivre,

ceux qui nous coûtent,

parce qu’ils nous demandent beaucoup d’humilité …

et nous sommes trop fiers …

Pardonne-nous !

 

Francis Cousin

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