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Audience Générale du Mercredi 22 Juin 2016

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 22 Juin 2016


 

Frères et sœurs, la supplication du lépreux de l’Evangile, qui demande à être purifié, nous montre que, lorsque nous nous présentons devant Jésus, peu de paroles suffisent ; mais elles doivent être accompagnées d’une totale confiance envers lui, en sa toute-puissance, en sa bonté. Tout dépend de sa volonté et, nous devons, avec foi, oser nous mettre à genoux devant lui et l’appeler « Seigneur ». De même qu’il s’est laissé toucher par cet homme, Jésus a pitié de nous : « Je le veux sois purifié ». La grâce nous guérit en profondeur et nous guide sur le chemin de la sainteté. Elle ne recherche pas le sensationnel, mais elle modèle lentement et discrètement notre cœur sur celui de Jésus. Nous aussi, reconnaissons nos misères avec sincérité et sans hypocrisie. Seul avec Jésus, sachons nous agenouiller devant lui et implorer sa miséricorde.

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier les personnes engagées dans la société civile, accompagnées de Monseigneur Dominique Rey.

De même que Jésus a touché le lépreux pour le guérir, osons toucher les personnes pauvres que nous voulons aider. Ce geste de charité nous guérit de l’hypocrisie et nous remet une multitude de péchés.

Que Dieu vous bénisse !

 

 

 



 

 




« Serviteurs du Christ » (Homélie du Pape François pour le Jubilé des Diacres, 29/05)

« Serviteur du Christ » (Gal 1, 10). Nous avons entendu cette expression, par laquelle l’apôtre Paul se définit, en écrivant aux Galates. Au début de la lettre il s’était présenté comme « apôtre », par volonté du Seigneur Jésus (cf. Gal 1, 1). Les deux termes, apôtre et serviteur, vont ensemble, ils ne peuvent jamais être séparés ; ce sont comme deux faces d’une même médaille : celui qui annonce Jésus est appelé à servir et celui qui sert annonce Jésus.

Le Seigneur nous l’a montré le premier : Lui, la Parole du Père, Lui, qui nous a apporté la bonne nouvelle (Is 61, 1), Lui, qui esten lui-même la bonne nouvelle (cf. Lc 4, 18), il s’est fait notre serviteur (Ph 2, 7), « il n’est pas venu pour être servi mais pour servir » (Mc 10, 45). «  Il s’est fait le diacre de tous », a écrit un Père de l’Église (Saint Polycarpe, Ad Phil. V, 2). Comme il a fait Lui, ainsi nous sommes appelés à être ses annonciateurs. Le disciple de Jésus ne peut aller sur un chemin différent de celui du Maître, mais s’il veut annoncer il doit l’imiter, comme a fait Paul : aspirer à devenir serviteur. En d’autres termes, si évangéliserest la mission confiée à chaque chrétien dans le baptême, servir est le style avec lequel vivre la mission, l’unique manière d’être disciple de Jésus. Est son témoin celui qui fait comme Lui : celui qui sert les frères et les sœurs, sans se lasser du Christ humble, sans se lasser de la vie chrétienne qui est vie de service.

Par où commencer pour devenir « serviteurs bons et fidèles » (cf. Mt 25, 21) ? Comme premier pas, nous sommes invités à vivre la disponibilité. Le serviteur apprend chaque jour à se détacher du fait de disposer de tout pour soi et de disposer de soi comme il veut. Il s’entraîne chaque matin à donner sa vie, à penser que chaque jour ne sera pas le sien, mais sera à vivre comme une remise de soi. Celui qui sert, en effet, n’est pas un gardien jaloux de son propre temps, au contraire il renonce à être le patron de sa propre journée. Il sait que le temps qu’il vit ne lui appartient pas, mais que c’est un don qu’il reçoit de Dieu pour l’offrir à son tour : seulement ainsi il portera vraiment du fruit. Celui qui sert n’est pas esclave de l’agenda qu’il établit, mais docile de cœur, il est disponible à ce qui est non programmé : prêt pour le frère et ouvert à l’imprévu, qui ne manque jamais et est souvent la surprise quotidienne de Dieu. Le serviteur est ouvert à la surprise, aux surprises quotidiennes de Dieu. Le serviteur sait ouvrir les portes de son temps et de ses espaces à celui qui est proche et aussi à celui qui frappe en dehors des horaires, au risque d’interrompre quelque chose qui lui plaît ou le repos qu’il mérite. Le serviteur néglige les horaires. Cela me fait mal au cœur quand je vois un horaire, dans les paroisses : « De telle heure à telle heure ». Et ensuite ? Il n’y a pas de porte ouverte, il n’y a pas de prêtre, il n’y a pas de diacre, il n’y a pas de laïc qui reçoit les gens… Cela fait mal. Négliger les horaires : avoir ce courage, de négliger les horaires. Ainsi, chers diacres, en vivant dans la disponibilité, votre service sera privé de tout profit et évangéliquement fécond.

L’Évangile d’aujourd’hui nous parle aussi de service, nous montrant deux serviteurs dont nous pouvons tirer de précieux enseignements : le serviteur du centurion, qui est guéri par Jésus, et le centurion lui-même, au service de l’empereur. Les paroles que celui-ci envoie rapporter à Jésus, afin qu’il ne vienne pas jusque chez lui sont surprenantes et sont souvent le contraire de nos prières : « Seigneur, ne prends-pas cette peine, car je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit » (Lc 7,6) ; « je ne me suis pas autorisé moi-même à venir te trouver » (v. 7) ; « moi, je suis quelqu’un de subordonné à une autorité » (v. 8). Devant ces paroles, Jésus reste admiratif. La grande humilité du centurion, sa douceur, le frappent. Et la douceur est une des vertus des diacres. Quand le diacre est doux, il est serviteur et il ne joue pas à « singer » les prêtres, non, il est doux. Devant le problème qui l’affligeait, il aurait pu s’agiter et prétendre à être exaucé, faisant valoir son autorité ; il aurait pu convaincre avec insistance, même contraindre Jésus à se rendre dans sa maison. Au contraire il se fait petit, discret, doux, il n’élève pas la voix, et ne veut pas déranger. Il se comporte, peut-être sans le savoir, selon le style de Dieu, qui est « doux et humble de cœur » (Mt 11, 29). Dieu en effet, qui est amour, va par amour jusqu’à nous servir : avec nous il est patient, bienveillant, toujours prêt et bien disposé, il souffre pour nos erreurs et cherche le chemin pour nous aider et nous rendre meilleurs. Là sont aussi les traits doux et humbles du service chrétien, qui est d’imiter Dieu en servant les autres : les accueillant avec un amour patient, les comprenant sans nous lasser, faisant en sorte qu’ils se sentent accueillis, à la maison, dans la communauté ecclésiale, où ce n’est pas celui qui commande qui est grand mais celui qui sert (cf. Lc22, 26). Et jamais réprimander, jamais. Ainsi, chers diacres, dans la douceur, murira votre vocation de ministres de la charité.

Après l’apôtre Paul et le centurion, dans les lectures d’aujourd’hui, il y a un troisième serviteur, celui qui est guéri par Jésus. Dans le récit on dit qu’il était très cher à son patron et qu’il était malade, mais on ne sait pas quelle était sa grave maladie (v. 2). D’une certaine façon, nous pouvons nous aussi nous reconnaître dans ce serviteur. Chacun de nous est très cher à Dieu, aimé et choisi par lui et il est appelé à servir, mais il a surtout besoin d’être guéri intérieurement. Pour être aptes au service, il nous faut la santé du cœur : un cœur guéri par Dieu, qui se sente pardonné et qui ne soit ni fermé ni dur. Cela nous fera du bien de prier avec confiance chaque jour pour cela, demander d’être guéris par Jésus, de lui ressembler lui qui « ne nous appelle plus serviteurs mais amis » (cf. Jn 15, 15). Chers diacres, vous pouvez demander chaque jour cette grâce dans la prière, dans une prière où présenter vos peines, vos imprévus, vos fatigues et vos espérances : une prière vraie, qui porte la vie au Seigneur et le Seigneur dans la vie. Et quand vous servez à la table eucharistique, vous y trouverez la présence de Jésus, qui se donne à vous afin que vous vous donniez aux autres.

Ainsi, disponibles dans la vie, doux de cœur et en dialogue constant avec Jésus, vous n’aurez pas peur d’être serviteurs du Christ, de rencontrer et de caresser la chair du Seigneur dans les pauvres d’aujourd’hui.




MESSE D’ACTION DE GRACE DES 40 ANS D’EPISCOPAT 5 MAI 2016

 Ascension de Notre Seigneur Jésus-Christ

Esplanade de l’église du Chaudron

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SOULEVER LA REUNION JUSQU’AU CIEL !

Dans le diocèse de La Réunion, la fête de Pâques prend de plus en plus d’importance. Le triduum pascal est vécu avec ferveur. La messe chrismale anticipée, le Jeudi Saint avec la cène de Notre Seigneur, le Vendredi Saint avec la célébration de la passion et de la mort de Jésus qui prend sur lui toutes nos croix quotidiennes, le Samedi Saint avec la résurrection du Christ et la joie de la nuit pascale où il y a de plus en plus de baptêmes d’adultes ou de recommençants grâce aux équipes du Catéchuménat. Mais il nous faut aller plus loin en prenant conscience que nous ne pouvons pas séparer Pâques de l’Ascension et de la Pentecôte.

l'ascension de jésus

Résurrection – Ascension – Pentecôte

Aujourd’hui, nous célébrons la fête de l’Ascension. Cette fête arrive quarante jours après la résurrection de Jésus. Jésus prend le temps d’éduquer ses disciples, de les préparer à une forme de sa présence où il est toujours lui-même mais d’une autre manière. Pâques ? Souvenez-vous de Marie Madeleine, d’Emmaüs, de la rencontre avec les onze, de l’incrédulité de Thomas. « Si je ne mets pas mon doigt dans son côté, si je ne vois pas la marque des clous, non, je ne croirai pasThomas, avance ta main, ne sois pas incrédule mais croisparce que tu as vu, tu crois, heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20). C’est ainsi que tous les baptisés confirmés sont les héritiers de cette béatitude de Jésus : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ». Toi, sois heureux de croire. J’ai confiance en toi, dit Jésus à travers Sœur Faustine… Viens à ma suite et dans ma miséricorde infinie, je te donnerai une juste confiance en toi et dans les autres. Oui, Marie Madeleine, Emmaüs, les onze, Thomas et puis saint Paul le géant, terrassé avant de devenir l’Apôtre des Nations et les cinq cents frères à la fois, tous témoins du Christ ressuscité.

 

DSC_0710Aujourd’hui, l’évangile selon saint Luc nous rappelle que Jésus a dit que la conversion serait proclamée en son nom pour le pardon des péchés à toutes les nations jusqu’au bout du monde. Les disciples avaient été mis en demeure de se préparer à accueillir l’Esprit-Saint. A l’Ascension, Jésus lève les mains, bénit ses disciples et se sépare d’eux, emporté au ciel avec son corps de lumière, lumineux comme au jour de la Transfiguration. Ils se prosternent, ils retournent à Jérusalem en grande joie. En grande joie alors que Jésus n’est plus là ? Les disciples sont dans la joie parce que se réalise pour eux ce que Jésus leur avait dit. Tout d’abord, Jésus leur avait annoncé sa résurrection, ils n’y croyaient pas. Et puis, il est vraiment ressuscité. Jésus leur avait dit aussi « Mon Père enverra l’Esprit Saint en mon nom et vous enseignera toutes choses et vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit… Que votre cœur cesse de se troubler et de craindre. Vous l’avez entendu et je vous ai dit. Je m’en vais et je viens à vous. Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais vers le Père car le Père est plus grand que moi. Je vous ai parlé dès maintenant, avant l’événement afin que lorsqu’il arrivera, vous croyiez » (Jn 14, 28 à 29).

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Les apôtres se réjouissent du départ de Jésus vers le ciel parce qu’Il retourne vers Dieu son Père et Notre Père. « Vous vous réjouiriez de ce que je retourne vers le Père ». Ce départ du corps physique du Ressuscité du monde visible de la terre est la condition de l’envoi de l’Esprit Saint pour la mission de l’Eglise à la Pentecôte. Les retrouvailles du Père et du Fils ressuscité dans sa chair humaine venant de la chair de Marie sont un débordement de joie réciproque entre le Père et le Fils, entre le Fils et le Père. Cette joie du Fils retrouvant son Père comble Dieu le Père du retour du Fils qui a rempli sa mission jusqu’au bout de l’amour. Le débordement de la joie de Dieu en Dieu à travers la chair du Christ glorifiée devient la joie des disciples qui ont reçu cette grâce de partager l’intimité du Christ et l’intimité du Père par le Christ : « En ce jour-là vous connaîtrez que je suis en mon Père et que vous êtes en moi et moi en vous » (Jn 14, 20). Les disciples comprendront alors au fur et à mesure que toute chair humaine est portée au cœur du Père par Jésus ressuscité avec sa chair humaine. Ils comprendront que le Jésus de l’Histoire et le Jésus Fils éternel du Père, c’est tout un inséparablement. Ils comprendront que le Jésus, Fils éternel du Père, c’est aussi et en même temps le Verbe de Vie par lequel Dieu le Père fait tout exister, hier, aujourd’hui et demain.

Ils comprennent que tout existe par Lui, avec Lui et en Lui, que nous soyons chrétiens catholiques, orthodoxes, protestants, évangéliques. Que nous soyons musulmans, hindous, athées, agnostiques. Cela ne veut pas dire que tous croient en ce que je viens de dire. Nous devons respecter les différences et reconnaître des oppositions, ne pas récupérer et ne pas chercher à assimiler. Mais nous connaissons la source de l’Espérance. Nous voudrions partager le trésor de cette résurrection qui nous ressuscite déjà et qui leur est destinée aussi parce que nous connaissons le Verbe de Vie qui les fait vivre, qui nous fait vivre tous. Chacun a une part de vérité mais Jésus a dit « Nul ne va au Père que par moi ». Et puis « Je suis le Chemin la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), et « Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père » (Jn 14,2). Voilà la mission des chrétiens aujourd’hui : Révéler l’Amour du Père par le Christ ressuscité pour que la vie soit fraternelle dans l’Esprit et que tous sachent de quel amour ils sont aimés par le Père.

Logo année de la Miséricorde - détail

Le temps de la miséricorde

La foi de l’Eglise est la même partout, à La Réunion, à Maurice, à Rodrigues, aux Seychelles, aux Comores, à Madagascar. Partout nous proclamons l’incarnation, la vie, la passion, la mort de Jésus, sa descente aux enfers de l’Humanité, sa résurrection, l’envoi de l’Esprit Saint pour le pardon des péchés, son retour dans la gloire pour les cieux nouveaux et la terre nouvelle. N’oublions pas que l’auteur de l’épître aux Hébreux nous dit : « Comme le sort des hommes est de mourir une seule fois et puis d’être jugés, ainsi le Christ s’est offert une seule fois pour enlever les péchés de la multitude. Il apparaîtra une seconde fois, non plus à cause du péché mais pour le salut de ceux qui l’attendent ». Alors il faut préparer ce salut avec la grâce de l’Ascension. Ne pas attendre pour nous convertir et appeler le salut du Christ.

En cette année de la Miséricorde, en cette joie de Pâques qui s’épanouit dans la joie de l’Ascension, faisons nôtres les paroles de saint Maxime de Turin dans une de ses homélies : « Mes frères, nous devons tous exulter en ce saint jour. Que personne ne se soustraie à la joie commune parce qu’il a conscience de ses péchés, que personne ne soit écarté des prières communes par le fardeau de ses fautes ! En un tel jour, même le pécheur ne doit pas désespérer du pardon ; c’est en effet un grand privilège. Si le malfaiteur a obtenu le paradis, pourquoi le chrétien n’obtiendrait-il pas le pardon ? » (Bréviaire p. 631) Le temps de la miséricorde, l’Année de la Miséricorde est importante. Le catéchisme de l’Eglise Catholique souligne pour nous l’importance du combat spirituel « Seigneur, délivre-nous du Mal ».

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Les premiers apôtres, avant l’Ascension, au cours d’un repas que Jésus partageait avec eux, ont posé à Jésus cette question « Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir le Royaume (pour Israël) ? » Et Jésus de répondre « Il ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité » (Ac 1, 1 à 11). Les apôtres pensaient encore en termes de pouvoir. Le catéchisme de l’Eglise Catholique précise « Le Royaume ne s’accomplira pas par un triomphe historique de l’Eglise selon un progrès ascendant mais par une victoire de Dieu sur le déchaînement du Mal qui fera descendre du ciel son épouse. Le triomphe de Dieu sur la révolte du Mal prendra la forme du jugement dernier après l’ultime ébranlement cosmique de ce monde qui passe » (n° 677)

Certains pourraient penser que ce n’est pas réjouissant. Mais c’est la réalité à laquelle nous n’échapperons pas un jour. Jésus nous a dit que le disciple n’est pas au-dessus du Maître. Que la Croix fait partie de la vie mais que la victoire sur le Mal est déjà remportée pour ceux qui, avec Lui, essayent de vivre dans la foi, l’espérance et l’amour. Peu importe le jour et l’heure de notre passage terrestre à une vie au-delà de ce que nous pouvons imaginer. Peu importe l’heure de la Transfiguration de cette terre par des événements qui dépasseront l’entendement humain dans la Miséricorde infinie de Dieu. Jésus nous a dit « Soyez prêts ». La fête de l’Ascension pour nous est la fête de la joie, présente et en devenir.

Construire notre communauté de destin

DSC_0918Dans le diocèse, nous avons l’habitude de célébrer symboliquement l’Ascension sur une montagne ou une colline. Cette année, à l’occasion de mon 40e anniversaire d’Episcopat, ce pèlerinage se passe ici, à proximité de l’Eglise du Saint-Esprit au Chaudron. Je remercie Dieu pour tout le parcours de vie que nous avons fait ensemble pendant quarante ans. Je remercie mes frères prêtres, religieux, religieuses, consacrés et aussi les familles chrétiennes, les enfants. Un grand merci aussi à tous ceux et toutes celles qui, dans l’exercice de leur profession ou de leur engagement dans les associations, les quartiers, les municipalités, les collectivités œuvrent pour le bien commun. Tout est dans l’amour de Dieu qui écoute notre prière. Alors,  demandons à Dieu de soulever notre terre de La Réunion avec tout ce peuple qui vit ici et de nous prendre tous dans son Amour. Que nous, chrétiens, prenions conscience de notre dignité fondamentale d’êtres humains et d’enfants de Dieu pour pouvoir cheminer avec les autres et pour construire notre communauté de destin par la construction du bien commun ici à La Réunion, dans chacune de nos îles et entre nos îles. Ce que nous ferons dans nos îles, ensemble et en Indianocéanie dépend d’abord de ce que nous voulons en faire, avec le respect de nos légitimes différences mais avec cette volonté spirituelle, citoyenne et politique d’établir des partenariats de complémentarité où chacun apportera aux autres ce qu’il a de meilleur.

La manifestation de Dieu à l’Ascension nous fait entendre sa Parole : Galiléens, Réunionnais, Mauriciens, Rodriguais, Seychellois, Comoriens, Malgaches, pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé d’auprès de vous reviendra de la même manière que les apôtres l’ont vu s’en aller vers le ciel. Ce que vous avez fait au plus petit des miens, c’est à moi que vous l’avez fait. Ne restez pas sur vos acquis, dans des situations figées. Refusez tout repli identitaire stérile. Il faut s’ouvrir aux autres pour la construction du bien commun. Comme le dit notre pape François dans Laudato si :

 

Obligation de promouvoir le bien commun

40 Mrg Aubry

« L’écologie humaine est inséparable de la notion de bien commun, un principe qui joue un rôle central et unificateur dans l’éthique sociale. C’est « l’ensemble des conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres, d’atteindre leur perfection d’une façon plus totale et plus aisée ».

 

« Le bien commun présuppose le respect de la personne humaine comme telle, avec des droits fondamentaux et inaliénables ordonnés à son développement intégral. Le bien commun exige aussi le bien-être social et le développement des divers groupes intermédiaires, selon le principe de subsidiarité. Parmi ceux-ci, la famille se distingue spécialement comme cellule de base de la société. Finalement, le bien commun requiert la paix sociale, c’est-à-dire la stabilité et la sécurité d’un certain ordre, qui ne se réalise pas sans une attention particulière à la justice distributive, dont la violation génère toujours la violence. Toute la société – et, en elle, d’une manière spéciale l’Etat – a l’obligation de défendre et de promouvoir le bien commun. » 

« Dans les conditions actuelles de la société mondiale, où il y a tant d’inégalités et où sont toujours plus nombreuses les personnes marginalisées, privées des droits humains fondamentaux, le principe du bien commun devient immédiatement, comme conséquence logique et inéluctable, un appel à la solidarité et à une option préférentielle pour les plus pauvres. Cette option implique de tirer les conséquences de la destination commune des biens de la terre mais comme j’ai essayé de l’exprimer dans l’exhortation apostolique Evangelii gaudium, elle exige de considérer avant tout l’immense dignité du pauvre à la lumière des convictions de foi les plus profondes. Il suffit de regarder la réalité pour comprendre que cette option est aujourd’hui une exigence éthique fondamentale pour la réalisation effective du bien commun. »  

« La notion de bien commun inclut aussi les générations futures. Les crises économiques internationales ont montré de façon crue les effets nuisibles qu’entraîne la méconnaissance d’un destin commun, dont ceux qui viennent derrière nous ne peuvent pas être exclus. On ne peut plus parler de développement durable sans une solidarité intergénérationnelle. Quand nous pensons à la situation dans laquelle nous laissons la planète aux générations futures, nous entrons dans une autre logique, celle du don gratuit que nous recevons et que nous communiquons. Si la terre nous est donnée, nous ne pouvons plus penser seulement selon un critère utilitariste d’efficacité et de productivité pour le bénéfice individuel. Nous ne parlons pas d’une attitude optionnelle, mais d’une question fondamentale de justice, puisque la terre que nous recevons appartient aussi à ceux qui viendront. » 

« Quel genre de monde voulons-nous laisser à ceux qui nous succèdent, aux enfants qui grandissent ? Cette question ne concerne pas seulement l’environnement de manière isolée, parce qu’on ne peut pas poser la question de manière fragmentaire. Quand nous nous interrogeons sur le monde que nous voulons laisser, nous parlons surtout de son orientation générale, de son sens, de ses valeurs. Si cette question de fond n’est pas prise en compte, je ne crois pas que nos préoccupations écologiques puissent obtenir des effets significatifs. Mais si cette question est posée avec courage, elle nous conduit inexorablement à d’autres interrogations très directes : pour quoi passons-nous en ce monde, pour quoi venons-nous à cette vie, pour quoi travaillons-nous et luttons-nous, pourquoi cette terre a-t-elle besoin de nous ? C’est pourquoi il ne suffit plus de dire que nous devons nous préoccuper des générations futures. Il est nécessaire de réaliser que ce qui est en jeu, c’est notre propre dignité. Nous sommes, nous-mêmes, les premiers à avoir intérêt à laisser une planète habitable à l’humanité qui nous succédera. C’est un drame pour nous-mêmes, parce que cela met en crise le sens de notre propre passage sur cette terre.» (§ 156 à 160)

Jeunes, l’amour vaincra !

DSC_0172Et vous les jeunes, restez jeunes ! Devenez jeunes ! Gardez votre capacité d’émerveillement et de créativité. Vous avez des talents à faire fructifier. Fermez vos oreilles à ceux qui vous disent « de notre temps c’était mieux ». Vous ne pouvez pas dire c’était mieux puisque vous n’avez pas vécu le passé. Aujourd’hui, il y a davantage de commodités et aussi plus de contraintes. Ne devenez pas vieux avant l’âge en vivotant blasés. Je souhaite que vous ayez autour de vous des adultes qui vous aiment vraiment et qui soient capables de vous résister parfois pour que vous puissiez devenir forts et aimants à votre tour. C’est vous-mêmes qui allez réussir votre vie, pas nous. Ayez un peu d’audace pour sortir des formatages convenus en essayant de progresser, pas à pas, jour après jour. Ne restez pas seuls.

Apprenez à faire équipe et que nous puissions vous accompagner pour vous aider à faire équipe. Il faut penser juste. Il faut vouloir juste. Il faut agir juste. Ayez le goût de ce qui est beau, de ce qui est bon, de ce qui est vrai. Soyez toujours en recherche sinon vous ne trouverez jamais. Maîtrisez les langues, les technologies qui évoluent très vite, le numérique. N’en devenez pas les esclaves. Développez l’humain avec le respect des conditions de la vie pour tous : la qualité de l’air, de l’eau, pouvoir se nourrir sainement, se loger dignement, fonder une famille, trouver sa vocation, pouvoir se déplacer, aller et venir dans le respect des consciences avec l’exercice de la liberté et de la responsabilité. Ici à La Réunion. Et allez voir ailleurs aussi.

Devenez des Réunionnais du monde, des citoyens du monde. Puis, revenez-nous si vous le pouvez pour nous enrichir de votre formation, de vos expériences et développez ce pays qui compte tellement sur vous et pour vous. Je vous en prie, n’ayez pas peur de prendre sur vous pour vous engager dans ce que vous pourrez dire ou faire. Devenez des hommes et des femmes d’engagement. Partout où vous serez, ménagez-vous des temps de silence pour la respiration de la prière, de l’élévation spirituelle avec les autres. Cela donne du souffle et du courage. Et si l’on vous méprise, continuez et aimez quand même, toujours, jusqu’au bout de l’amour. L’amour vaincra et tu donneras fidélité à l’amour. Tu trouveras le chemin de ton amour.

*

Chers amis, ce que je souhaite, c’est que la vie danse en vous, que notre peuple soit un peuple de fierté. Comme disait le Père René Payet « non pas un peuple qui attend mais qui prétend ». Qui prétend construire avec l’aide du Ressuscité. Belle fête de l’Ascension !

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                                                                                  Monseigneur Gilbert AUBRY




« Recevez l’Esprit Saint du Père des Miséricordes »…

« Soyez miséricordieux comme le Père est miséricordieux »

Dieu Père (Giovanni Battista Cima) 2

Que Dieu soit Père et qu’il soit Miséricordieux, le prophète Jérémie l’affirmait dès le 6° siècle avant JC :

« Reviens rebelle Israël, oracle du Seigneur, car JE SUIS miséricordieux.

Reconnais seulement ta faute (il la connaît donc déjà parfaitement

                                                                             et Israël va l’apprendre de sa bouche…) :

tu t’es révoltée contre le Seigneur ton Dieu,

et tu n’as pas écoutée ma voix.

Et moi qui m’étais dit : comment te placerais-je au rand des fils ?

          Je te donnerai une terre de délices, l’héritage le plus précieux d’entre les nations.

          Je me disais : « Vous m’appellerez « Mon Père »,

          et vous ne vous séparerez pas de moi. »

          Mais non… Ils m’ont abandonné, ils ont encensé d’autres dieux,

          Ils se sont prosternés devant l’œuvre de leurs mains…

          Et maintenant, vois ta terre en solitude, tes villes incendiées…

          N’as tu pas provoqué cela pour avoir abandonné le Seigneur ton Dieu,

          alors qu’il te guidait sur ta route ?

          Comprend et vois comme il est mauvais et amer

               d’abandonner le Seigneur ton Dieu.

          Ai-je été un désert pour Israël, ou une terre ténébreuse ?

          Pourquoi mon Peuple dit-il : « Nous vagabondons, nous n’irons plus à toi ? »

          Une vierge oublie-t-elle sa parure, une fiancée sa ceinture ?

          Mais mon peuple m’a oublié depuis des jours sans nombre…

          Ah ! Comme tu t’es tracée un bon chemin pour quêter l’amour ! » (Jr 2-3)

Dieu-Amour

     Et Jésus ne fera que nous rappeler que « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16), Amour Créateur, Amour Pur, Amour qui ne fait que poursuivre le bien de l’être aimé, Amour qui se réjouit de sa joie, Amour qui s’attriste de ses peines…

     Et c’est bien ainsi dont les prophètes Jérémie et Sophonie parlaient déjà de l’Amour :

« Je vais les rassembler de tous les pays où » ils se sont égarés par suite de leurs fautes.

« Je les ramènerai en ce lieu et les ferai habiter en sécurité.

Ils seront mon peuple, et moi, je serai leur Dieu.

Je leur donnerai un seul cœur, un seul chemin, afin qu’ils me craignent chaque jour, pour leur bonheur et celui de leurs fils après eux.

Je conclurai avec eux une alliance éternelle :

je ne cesserai pas de les suivre pour les rendre heureux

et je mettrai ma crainte en leur cœur pour qu’ils ne s’écartent pas de moi.

J’aurai de la joie à les rendre heureux ;

en vérité, je les planterai dans ce pays, de tout mon cœur et de toute mon âme. »

          Oui, ainsi parle le Seigneur : « De même que » leurs fautes ont fait venir sur eux

          « tout ce grand malheur,

          de même, je fais venir sur eux tout le bonheur dont je parle » (Jr 32,37-42).

« Pousse des cris de joie, fille de Sion ! Éclate en ovations, Israël !

Réjouis-toi, de tout ton cœur bondis de joie, fille de Jérusalem !

Le Seigneur a levé les sentences qui pesaient sur toi, il a écarté tes ennemis.

Le roi d’Israël, le Seigneur, est en toi. Tu n’as plus à craindre le malheur.

Ce jour-là, on dira à Jérusalem : « Ne crains pas, Sion ! Ne laisse pas tes mains défaillir !

Le Seigneur ton Dieu est en toi, c’est lui, le héros qui apporte le salut.

Il aura en toi sa joie et son allégresse, il te renouvellera par son amour ;

il exultera pour toi et se réjouira, comme aux jours de fête. »

J’ai écarté de toi le malheur, pour que tu ne subisses plus l’humiliation.

Me voici à l’œuvre contre tous tes oppresseurs.

En ce temps-là je sauverai la brebis boiteuse, je rassemblerai celles qui sont égarées…

          En ce temps-là je vous ramènerai, en ce temps-là je vous rassemblerai…

          je ramènerai vos captifs, et vous le verrez, – dit le Seigneur » (So 3,14-20).

BonPasteur

          D’un côté, Dieu est donc « Père » de tous les hommes, « lui qui les a tous créés à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28), pour qu’ils vivent en relation avec Lui, comblés par Lui. En effet, ce « Père » est « Amour » : il ne cesse de désirer, de vouloir, de poursuivre le bien de tous ces hommes, ses enfants, qu’il a créés par Amour pour qu’ils connaissent le Bonheur en accueillant, en leur cœur, la Plénitude de ses Bienfaits…

     Mais les hommes se sont détournés de lui, et du même coup, ils se sont privés du Don de Dieu. « Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu » (Rm 3,23). « Souffrance et angoisse pour toute âme humaine qui commet le mal » (Rm 2,9). « Souffrance, angoisse » et « tristesse », comme pour ce jeune homme riche qui ne répond pas à l’appel que lui avait lancé Jésus, « Suis-moi ! », car il avait de grands biens. Alors, « il repartit, tout triste » (Lc 18,18-23)…

     Mais rien n’empêche Dieu d’Être, de son côté, ce qu’Il Est depuis toujours et pour toujours : « Dieu est Amour » et il veut, encore plus, le bien de l’homme pécheur qui souffre et qui est triste par suite de ses fautes : « Quand nous sommes infidèles, Dieu, Lui, reste à jamais fidèle, car il ne peut se renier Lui-même » (2Tm 2,13), écrit St Paul, et Il Est Amour, Il n’Est qu’Amour et donc recherche inlassable du bien de l’autre…

     Telle est ce que nous appelons « la Miséricorde de Dieu » : la découverte, infiniment heureuse, du fait que nous sommes aimés au cœur même de notre misère et de notre indignité par « Quelqu’un » qui, de son côté, ne poursuit, ne désire, ne travaille qu’à notre Bien le plus profond.

Esprit Saint

     Nous avons tous été créés pour être « comblés » par le Don de Dieu, le Don gratuit de l’Amour, un Don qui Est Plénitude de Vie, de Paix, de Joie ? C’est ce que Jésus, le Fils éternel du Père, vient nous proposer au Nom de son Père, et cela gratuitement, par amour, pour notre seul bien : « Si tu savais le Don de Dieu » dit-il à cette femme samaritaine qui vivait maritalement avec un homme, et c’était, déjà, son sixième ! Et pour nous aider à l’accueillir, il ca commencer par nous proposer d’effacer tout notre passé d’infidélités par son pardon offert en surabondance, sans regarder à la dépense, son seul but étant notre bonheur. Alors si quelque chose nous inquiète, quoique ce soit, aussi énorme cela puisse-t-il être, Jésus nous invite à l’offrir à ce Dieu immense, infini, Lui qui a créé l’infini de l’Univers qui nous entoure, Lui qui est Amour, tout aussi infini… Et nous serons pardonnés, nos fautes disparaîtront, il n’y aura plus rien, car Jésus est « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29), tous les péchés, de tous les hommes, de tous les temps, et cela, il l’a fait une fois pour toutes en s’offrant en sacrifice sur le bois de la Croix pour chacun d’entre nous, pour nous tous. Infini de l’Amour qui rendra possible, si nous y consentons, l’accomplissement total de la volonté de Dieu : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité. En effet, il n’y a qu’un seul Dieu ; il n’y a aussi qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous » (1Tm 2,3-6). Alors, « j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main. Et ils s’écriaient d’une voix forte : « Le salut appartient à notre
fouleDieu qui siège sur le Trône et à l’Agneau ! »Tous les anges se tenaient debout autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants ; se jetant devant le Trône, face contre terre, ils se prosternèrent devant Dieu. Et ils disaient : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! » L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? » Je lui répondis : « Mon seigneur, toi, tu le sais. » Il me dit : « Ceux-là viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau. C’est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, et le servent, jour et nuit, dans son sanctuaire. Celui qui siège sur le Trône établira sa demeure chez eux. Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif, ni le soleil ni la chaleur ne les accablera, puisque l’Agneau qui se tient au milieu du Trône sera leur pasteur pour les conduire aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux
» (Ap 7,9-17).

Coeur de Jésus- Paray le Monial     Jésus, le Fils, est donc « l’Agneau » qui se propose d’être « le Pasteur » de tous les hommes « pour les conduire aux sources des eaux de la vie ». Et quelles sont-elles ? Ce sont les Sources de l’Amour qui ne cesse de se donner gratuitement, de se proposer gratuitement, de s’offrir gratuitement à toutes ses créatures, pour leur seul bien, leur seul bonheur, leur seule joie. Le Pape François dit ainsi : « L’amour de Dieu est gratuit. Il ne nous demande rien en échange ; il demande seulement de l’accueillir » (Juin 2015). Ecoutons ce que Jésus dit à la Samaritaine : « Si tu savais le Don de Dieu, et qui est celui qui te dit : « Donne-moi à boire », c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’Eau vive » (Jn 4,10). Et quelle est-elle cette « Eau Vive ». St Jean lui-même nous donne la clé de cette image au chapitre sept de son Evangile, lorsque Jésus, debout, cria : « « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l’Écriture : De son cœur couleront des fleuves d’eau vive. » En disant cela, il parlait de l’Esprit Saint qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en lui » (Jn 7,37-39). Et de fait, Ressuscité, il dira à ses disciples : « Recevez l’Esprit Saint » (Jn 20,22).

     Tel est le Don de Dieu par excellence, le Don de l’Amour, offert gratuitement à notre foi, un Don qui est appelé à devenir en nous la Source de notre vrai bonheur, de notre vraie vie, de notre Plénitude, inégalée, incomparable, car elle est celle de Dieu Lui-même : « Quiconque boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif. L’eau que je lui donnerai deviendra en lui source d’eau jaillissant en vie éternelle » (Jn 4,13-14).

  Jésus Sr Faustine   Cette vie n’est rien de moins que celle que Jésus reçoit du Père de toute éternité. « Si tu savais le Don de Dieu », dit-il à la Samaritaine. Il le connaît bien, Lui, car c’est par ce Don que le Père l’engendre en Fils de toute éternité. « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même. Je vis par le Père » (Jn 5,26 ; 6,57), et cela, depuis toujours et pour toujours, en « Fils né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu, vrai Dieu né du vrai Dieu, engendré non pas créé » (Crédo), « engendré » par ce Don du Père, le Don de « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63 ; 2Co 3,6), cet « Esprit qui est vie » (Ga 5,25), « Eau Vive »… Alors si nous acceptons de recevoir à notre tour ce Don par lequel le Père engendre son Fils, nous serons nous aussi engendrés à cette même Plénitude, et notre vocation de créatures « appelées à reproduire l’image du Fils » (Rm 8,29) s’accomplira…

     « Quand vous priez, dites : Père » (Lc 11,2). Avec moi, tournez-vous vers le Père (Jn 1,18) pour recevoir avec moi le Don du Père, et avec Lui, la Plénitude de ma vie, de ma paix, de ma joie… « De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi… Amen, amen, je vous le dis : il a la vie éternelle, celui qui croit… Je vous laisse la paix, c’est ma paix que je vous donne… Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite… Recevez l’Esprit Saint » (Jn 6,57.47 ; 14,27 ; 15,11 ; 20,22)…

                                                                                                                             D. Jacques Fournier




L’Ascension par P. Claude Tassin (5 Mai 2016)

Actes des Apôtres 1, 1-11 (« Tandis ques les Apôtres le regardaient, il s’éleva »)

Le texte, qui ouvre le livre des Actes des Apôtres, se divise en trois parties.

1) Le prologue s’adresse à Théophile, qui était déjà le destinataire, réel ou fictif, du «premier livre», l’évangile de Luc. Pour l’auteur, la mission du Christ va du «commencement», c’est-à-dire le Baptême de Jésus par Jean, jusqu’à l’Ascension, une autre manière de parler de Pâques : Jésus le Crucifié est exalté par Dieu. Dans son évangile, Luc place l’ascension au soir de Pâques (Luc 24, 50-52) ; au début des Actes, il la situe au bout de quarante jours d’apparitions «pédagogiques». Ce sont deux manières de présenter, dans le temps, un mystère qui échappe au temps.

2) L’ultime dialogue s’articule ainsi : les Apôtres vont être baptisés dans l’Esprit Saint, comme Jésus le fut au seuil de sa mission (Lc 3, 21-23). En bons lecteurs des prophètes, ils pensent que la fin des temps arrive, puisque l’Esprit revient. Jésus va donc restaurer l’État d’Israël. Qu’ils se détrompent! L’Esprit les fera prophètes, témoins de Jésus, pour prolonger son message «jusqu’aux extrémités de la terre».

3) La scène de l’ascension elle-même est sobre : «* ils le virent s’élever»… L’accent porte sur l’intervention des deux êtres «en vêtements blancs», des anges. Par eux, le Ciel confirme notre espérance (Christ viendra), mais nous interdit toute attente béate et stérile et nous pousse au témoignage, par la force de l’Esprit.

* «Ils le virent s’élever»… «Iils le regardaient»…, «à leurs yeux»…, «ils fixaient le ciel»…, «pourquoi… regarder vers le ciel»…, «de la même manière que vous l’avez vu»… Cinq mentions de «vision» pour treize lignes du lectionnaire! Qui peut faire plus ? Pourquoi cette insistance ? La clé se trouve dans la scène de l’ascension d’Élie en 2 Rois 2, 1-14, où se trouve la même insistance : Élisée recevra la plénitude de l’Esprit prophétique d’Élie s’il voit l’enlèvement céleste de son maître. Et il le voit ! Or, pour saint Luc, Jésus est le nouvel Élie. Comme Élisée hérita de l’Esprit prophétique d’Élie, de même les Apôtres vont hériter, à la Pentecôte, de l’Esprit de Jésus. Ne coinçons pas nos doigts entre l’arbre et l’écorce en prétendant trouver «ce qui s’est passé» (l’écorce) dans le mystère indicible de l’Ascension (l’arbre) ! Contentons-nous de comprendre ce que Luc veut nous dire en recourant à l’icône de l’ascension d’Élie : nous avons à continuer par le monde entier l’œuvre prophétique de libération que Jésus a inaugurée au pays des Juifs..

Lettre aux Hébreux 9,24-28 ; 10,19-23 (« Le Christ est entré dans le ciel même »)

L’Ascension est l’entrée de Jésus, le grand prêtre, dans le sanctuaire du ciel, et notre entrée à sa suite. La figure du grand prêtre juif nous parle peut-être peu. Alors, dans le contexte de ce passage, prenons l’image plus séculière d’un délégué, notre représentant auprès de Dieu. Jésus, notre délégué, entre chez Dieu, rouvre la porte, *«le rideau du Sanctuaire» et, à nous qui sommes massés derrière lui, il reviendra dire qu’il a gagné notre cause, que nous sommes admis auprès de Dieu.

Pourtant, nous pourrions hésiter à suivre l’auteur, pour trois raisons : 1) Ce délégué nous représente-t-il vraiment ? Ne défend-il pas ses propres intérêts ? Non, dit la Lettre aux Hébreux : ce médiateur a payé de son sang l’accès auprès du Maître de l’univers. 2) Admettons ! Mais sommes-nous sûrs qu’il est bien entré chez Dieu, et non pas dans un de ces vestibules d’attente que sont les temples terrestres ? «Il est entré dans le ciel même» et Dieu l’a même «établi» sur sa «maison», affirme l’auteur. 3) Soit ! Mais une foule de médiateurs prétendent faussement nous conduire à Dieu. Ce n’est pas le cas, répond l’auteur, de celui qui se donne lui-même totalement, «une fois pour toutes».

* Le rideau du Sanctuaire. L’auteur songe au voile qui séparait le Saint des Saints du reste du Temple. Le grand prêtre, et lui seul, traversait une fois par an ce rideau, au jour du Grand Pardon (le Kippour) pour obtenir de Dieu le pardon des péchés commis par le Peuple élu. C’est cette tenture que les évangiles voient se déchirer lors de la mort de Jésus (Marc 15, 38). Par ce symbole, ils signifient à la fois la fin du culte ancien de Jérusalem et l’accès de tous les humains, sans plus de voile, auprès de Dieu.

La lettre aux Hébreux choisit une autre transposition : chaque année, le grand prêtre, gravissait quelques marches pour exerceer sa fonction (symbole horizontal) sans vraiment rencontrer Dieu ; le Christ, lui, par sa résurrection, est monté dans le vrai Saint des Saints, une fois pour toutes (symbole vertical). Nous bénéficions de son ministère sacerdotal de pardon.

 

Luc 24, 46-53 (« Tandis qu’il les bénissait, il fut emporté au ciel »)

Luc boucle son évangile en une journée, celle de Pâques. Le soir, après l’épisode des disciples d’Emmaüs, Jésus rejoint «les onze apôtres et leurs compagnons». Il leur livre son ultime testament et les entraîne vers le lieu de son ascension.

Le testament de Jésus

Le testament de Jésus est un envoi pour lequel d’abord «il leur ouvre l’esprit à l’intelligence des Écritures» (verset 45) : nous devons lire l’Ancien Testament avec des lunettes chrétiennes, c’est-à-dire comme une carte tracée par Dieu pour nous conduire à la révélation de son Fils. D’ailleurs la mission confiée à l’Église par Jésus se branche sur le dernier prophète de l’Ancien Testament, Jean Baptiste, qui «proclamait un baptême de conversion pour le pardon des péchés» (Luc 3, 3).

Luc annonce aussi le plan des discours que prononceront les Apôtres dans les synagogues juives. C’est d’ailleurs le schéma de toute prédication chrétienne : la Passion, la résurrection du Christ, l’appel à la conversion en vue du «pardon des péchés», nouveau départ dans la vie, une grâce divine que le monde juif expérimente au jour du Grand Pardon (le Kippour).

Ce message concerne «toutes les nations, en commençant par Jérusalem» : ce que Jésus a inauguré au sein de son peuple, «les témoins» l’exporteront par le monde entier. Ils pourront le faire parce qu’ils vont recevoir la «force venue d’en haut», c’est-à-dire l’Esprit Saint que Jésus reçut à son baptême et qui anima sa mission de Messie prophète. Que les disciples doivent être «revêtus» de l’Esprit est une expression étrange. Elle vient du passage biblique selon lequel l’Esprit prophétique passa à son disciple Élisée par le biais du vêtement de son maître Élie (2 Rois 2, 13-15 – comparer 1 Rois 19, 19 !). Or, pour Luc, Jésus est le nouvel Élie transmettant à ses disciples l’Esprit qui aniimait sa mission terrestre.

L’Ascension

La fin de l’évangile de Luc et le début des Actes des Apôtres se «tuilent», selon un procédé littéraire cher à l’évangéliste : mêmes derniers entretiens de Jésus avec les siens, même programme d’une mission universelle, même scène d’ascension (cf., ci-dessus, le commentaire de la 1ère lecture).  Mais les points de vue diffèrent. Les Actes situent l’ascension sur le mont des Oliviers (Actes 1, 12 – comparer Zacharie 14, 4), et l’icône est celle du nouvel Élie, le prophète, qui revêtira ses disciples de son Esprit prophétique. L’évangile situe l’ascension à Béthanie, là où les croyants avaient proclamé la souveraineté de Jésus (voir Luc 19, 29-38), et l’icône est celle d’un nouvel Élie *grand prêtre en qui le culte nouveau se réalise. D’ailleurs, c’était le 1er du mois de Nisan, peu avant la fête de la Pâque, que le nouveau grand prêtre entrait en fonction.

Du Temple au Temple

L’évangile de Luc commençait au Temple, avec la vision de Zacharie, père de Jean Baptiste. Il s’achève au Temple, avec les disciples de Jésus qui ont désormais un grand prêtre céleste (2e lecture). Ils attendent, dans une grande joie la venue de l’Esprit par qui va s’ouvrir un culte nouveau, et qui fera d’eux les témoins de la mission de Jésus par tout l’univers.

*Jésus, grand prêtre. Selon Luc, Jésus avait annoncé «une année de bienfaits», allusion à l’année jubilaire juive en laquelle les dettes étaient remises et les esclaves libérés (cf. Luc 4, 18). Or, c’est le grand prêtre qui ouvrait officiellement l’année jubilaire, à la fête du Grand Pardon (le Kippour). Et nous lisons, au terme de l’évangile : «levant les mains, il les bénit». Jésus imite le grand prêtre qui, lors du Grand Pardon, bénissait l’assemblée prosternée (voir la scène en Siracide 50, 20-21).

Certains cercles juifs d’alors spéculaient sur l’existence d’un grand prêtre qui, monté au ciel, officiait devant Dieu et reviendrait à la fin des temps libérer son peuple : pour les uns, c’était Élie – or, Luc voit en Jésus le nouvel Élie ; pour d’autres, c’était le patriarche Hénoch, né sans père selon les légendes ; pour les gens de Qumrân, c’était Melkisédeq (cf. Genèse 14, 17-20), figure du Christ selon la Lettre aux Hébreux. Le Nouveau Testament exploite les figures légendaires susceptibles de donner toute son ampleur à la mission du Christ.

 




Rencontre autour de l’Évangile – 6ième Dimanche de Pâques

« Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole »

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et situons le texte (Jn 14, 25-27)

Dans le discours après la Cène, Jésus vient d’annoncer la mission de l’Esprit qui le rendra présent dans l’Eglise. A ceux qui gardent sa Parole, son Père et lui se feront connaître : ils habiteront en eux comme dans un temple. Et l’Esprit les conduira vers la vérité toute entière. Dès maintenant Jésus leur lègue la paix qui sera le fruit de sa victoire sur le péché et sur la mort.

Soulignons les mots importants

Si quelqu’un m’aime : Jésus dit clairement c’est quoi l’aimer.

Fidèle à ma parole : Que signifie ce mot « fidèle» appliqué à la parole de Jésus ?

Nous viendrons chez lui : De qui Jésus parle-t-il en disant « nous » ?

Demeurer auprès de lui : Comment comprendre ce mot « demeurer » ? Qu’est-ce qu’il nous dit d’important de la vie du chrétien ?

Du Père qui m’a envoyé : Jésus dit clairement qu’il a reçu une mission : de qui et dans quel but ?

L’Esprit Saint : Quel sera le rôle de cette Personne que Jésus révèle ?

La paix : C’est quoi cette paix que Jésus laisse à ses disciples

« Je m’en vais et je reviens » : Comment comprendre cette parole de Jésus ?

Le Père est plus grand que moi : Cette parole de Jésus est étonnante. N’est- il pas le Fils, en tout égal à son Père ?

 

Ta Parole dans nos cœurs

 Contemplons le Seigneur Jésus.

Jésus fait à ses amis, et à nous, des révélations très importantes sur lui, sa mission, sur Dieu, sur l’Esprit Saint, sur la dignité du baptisé.

Chacun peut redire une parole de Jésus qui l’a touché, quelques mots importants du texte, répétés comme en écho.

 

Pour l’animateur

  • Aimer Jésus, c’est essentiellement être fidèle à sa parole, garder sa parole, mettre en pratique l’Evangile : en un mot le commandement de l’amour. « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime » (Jn 14, 21). Il faudrait ici lire tout le Sermon de Jésus sur la Montagne (Mt Ch.5,6,7). Ce n’est pas une affaire de sensibilité. Ce n’est pas dire « Seigneur, Seigneur…Mt7,21) »

     Etre fidèle à la parole de Jésus, c’est finalement être fidèle à Jésus lui-même et au Père qui l’a envoyé : ne pas s’écarter de lui, lui rester attaché de manière durable, même et surtout dans les moments difficiles. Cette fidélité n’est possible que par le don du Défenseur, l’Esprit de vérité.

     Le résultat de cette fidélité à Jésus, c’est l’habitation de « la famille divine » en chacun des chrétiens : en disant « nous viendrons chez lui », Jésus nous révèle qu’il est intiment uni au Père et à l’Esprit dans le coeur du baptisé. Comme le dit l’apôtre saint Paul « vous n’êtes plus des étrangers ni des hôtes…ous êtes de la famille de Dieu » (Ep 2,19)

     Jésus se reconnaît comme l’Envoyé du Père : et il est en permanence en communion avec lui. Tout ce qu’il dit et tout ce qu’il fait exprime la parole et l’action de son Père. Cependant, dans la condition humaine, sa gloire de Fils éternel, égal au Père, est voilée : c’est ce que Jésus veut dire en disant « le Père est plus grand que moi. » Le Père est plus grand parce que tout vient de lui et tout va à lui : en particulier l’envoi du Fils et sa glorification. Cela montre combien Jésus se reconnaît vraiment l’un de nous, acceptant avec amour et soumission sa condition humaine.

     Le soir de Pâques, en se montrant à ses disciples, la première parole qu’il leur dit c’est « Paix à vous » et il souffle alors sur eux en leur disant « recevez l’Esprit-Saint » (Jn 20, 19-22). Cette paix, c’est le salut (pardon et vie de Dieu) que Jésus a mérité par sa mort et sa résurrection, et qu’il communique par son Esprit. C’est la paix messianique annoncée par les prophètes et que Jésus donne à ses disciples pour toute la durée de l’histoire, quelles que soient les épreuves.

     « Je m’en vais et je reviens vers vous » c’est ainsi que Jésus annonce sa mort et sa résurrection : il est désormais présent, mais d’une autre manière, de façon permanente auprès de ses disciples et ce doit être pour eux une source de joie.

 

 

L’ Évangile aujourd’hui dans notre vie

Souvent nous cherchons Dieu en dehors de nous. Où est Dieu ?

Que nous révèle Jésus dans cet Evangile ? Cela devrait entraîner des conséquences pour notre vie quotidienne ? pour notre prière. (Cherchons ensemble)

 Nous connaissons bien des bouleversements dans le monde et dans l’Eglise :

Pouvons-nous citer quelques-uns qui peut-être nous touchent de plus près ? Quelles sont nos raisons de ne pas désespérer ? (Jésus lui-même nous dit : nous avons un Défenseur. Il nous assure de sa présence : « Je m’en vais et je reviens vers vous ». Sa présence met notre coeur dans « sa paix »)

 Jésus ne cesse de communiquer sa paix par son Esprit-Saint (lorsque nous sommes en relation avec lui, dans un groupe de disciples, dans la prière, dans l’accueil de sa parole, dans l’eucharistie

Comment vivre de cette paix ? Quels sont les lieux sur notre paroisse ou notre commune…où nous voyons des situations de « non-paix » ? Comment faire gagner la paix ?

L’Esprit Saint est le « maître intérieur » de l’Eglise et de chacun de nous. C’est lui qui enseigne à comprendre et à vivre l’Evangile aujourd’hui.

Quel temps donnons-nous à la prière personnelle, à la méditation de l’Ecriture, à notre formation chrétienne : dans les groupes de réflexion, dans les propositions de formation proposées par le diocèse ?

Ensemble prions 

 

O Christ, toujours vivant dans ton Eglise Conduis-là par ton Esprit à la plénitude la vérité. Tous : Reste avec nous, Seigneur Jésus. Tu veux habiter en nous avec le Père et l’Esprit-Saint : Donne- nous le goût de la Parole et aide-nous à la mettre en pratique. (Tous : reste …) Par ta résurrection, tu as vaincu la mort et les forces du mal, et tu nous donnes ta paix : soutiens notre combat pour faire reculer la violence. Chant : Seigneur, foyer d’amour p.115 Ou Donne à ceux qui demandent p.233

 

 

 Pour lire ou imprimer le document en PDF cliquer ici : 6ième Dimanche de Pâques Année C

 

 

 

 

 

 

 

 

 




L’Annonciation du Seigneur par P. Claude TASSIN (Spiritain)

    Commentaires des Lectures de la messe du lundi 4 Avril 2016

 

Isaïe 7, 10-16 (Voici que la Vierge concevra)

Rappelons d’abord que la solennité de «l’Annonciation» n’est pas une fête mariale, mais une fête du Seigneur Jésus, la célébration de son «incarnation» en Marie (le 25 mars et le 25 décembre se font chronologiquement pendant, évidemment).

Les circonstances historiques de l’oracle

«Les deux rois» (finale du texte) de Damas et de Samarie vont assiéger Jérusalem pour forcer le roi Acaz à se coaliser avec eux contre l’Assyrie. S’il refuse, ils le déposeront, le remplaceront par un inconnu de leur choix, et ce sera la fin de l’alliance de Dieu avec la «maison de David», la dynastie de David. Acaz a choisi de se soumettre à l’Assyrie. Dans la culture de l’époque, cela signifie que ce traité de vassalité soumet le Dieu d’Israël aux dieux assyriens.

La position du prophète Isaïe

La position d’Isaïe, qui s’affronte à son roi, est claire : Pas d’alliance avec l’Assyrie ! Il faut tenir bon dans la confiance envers le Dieu qui a juré fidélité à David. Et si Acaz doute, qu’il demande à Dieu un signe extraordinaire. Mais le roi ne veut pas faire marche arrière ; il se dérobe au conseil d’Isaïe par un argument de fausse piété : il ne faut pas tenter le Seigneur, dit-il, en lui demandant un signe.

La promesse de l’Emmanuel

Dans ce cas, répond le prophète, Dieu fournira son propre signe aux incrédules, puisque c’est le Seigneur lui-même qui propose son signe : «la jeune femme», la reine, femme d’Acaz, est enceinte. Le fils qui naîtra s’appellera *Emmanuel, car on verra que «Dieu est avec nous». Sa nourriture sera le lait et le miel, signe d’abondance et de paix pastorale. Il aura le discernement qui manque à Acaz, son père. Et avant même qu’il ait atteint l’âge de raison, l’Assyrie aura châtié Damas et Samarie. Pour nous, la promesse de l’Emmanuel trouvera tout son sens dans la venue de Jésus, né de la Vierge Marie.

* L’Emmanuel (en hébreu Immanou-El = «Avec nous Dieu») rendrait Dieu présent «avec nous» par ses qualités. Ainsi naquit Ézékias, fils et successeur d’Acaz ; mais il fut un souverain décevant. Pourtant, la Bible conserva l’oracle de l’Emmanuel. Si aucun roi, dans l’histoire, ne réalisait l’idéal annoncé par Isaïe, pensait-on, on devait encore attendre avec confiance celui qui serait le vrai Messie. Puis les Juifs d’Alexandrie traduisirent Isaïe en grec. «Voici que la jeune femme conçoit», lisait-on en hébreu. Ce qui devint, en grec : « oici que la vierge concevra.» Cette vierge est l’Israël idéal qui donnera le Messie au monde. La Bible grecque offrait aux évangélistes un dernier chaînon pour rendre compte de la conception virginale de Jésus (cf. Matthieu 1, 22-23 ; Luc 1, 31).

Hébreux 10, 4-10 (« Je suis venu pour faire ta volonté »)

L’auteur anonyme de la Lettre aux Hébreux s’adresse à des chrétiens qui fondaient trop leur foi sur le culte du Temple de Jérusalem ; il leur montre que la venue du Christ doit changer notre lecture de l’Ancien Testament. Dans ce passage, il raisonne ainsi, sur trois plans.

1) Selon notre auteur, dans le Psaume 39 [40], c’est le Christ qui, prophétiquement, parle par avance. Il dit que Dieu n’attend pas de lui, pour montrer la fidélité de sa mission terrestre, des sacrifices matériels, mais l’offrande de son corps, de toute sa personne, en totale obéissance à sa volonté : «Me voici, je suis venu pour faire ta volonté.» Dans ces quelques mots se résument le mystère et le sacrifice de la Croix, aboutissement de l’Incarnation.

2) L’auteur précise alors : les sacrifices du Temple de Jérusalem étaient prescrits par la Loi de Moïse. Or, avec la venue du Christ, Dieu «n’en a plus voulu». C’est donc qu’un nouveau culte, l’offrande de soi du Christ, remplace l’ancien.

3) De fait, par cette volonté de Dieu accomplie jusqu’au bout, par le don de soi du Christ en sa Passion, nous sommes «sanctifiés», c’est-à-dire de nouveau en relation vraie avec Dieu – et cela «une fois pour toutes», alors qu’avant, à Jérusalem, il fallait refaire chaque année les mêmes sacrifices pour obtenir le pardon divin, la restauration de bonnes relations avec lui.

Ainsi, l’Incarnation annoncée à Marie (évangile) inaugure la route du *sacrifice de la Croix qui aboutit à notre rédemption. Dieu n’attend plus que nous lui offrions «des choses», mais que nous nous offrions sans cesse à son vouloir, à la suite d’un Christ «frère des hommes».

* Le sacrifice de la Croix. « En souffrant pour nous, [le Fils de Dieu] ne nous a pas seulement donné l’exemple, afin que nous marchions sur ses pas, mais il a ouvert une route nouvelle : si nous la suivons, la vie et la mort deviennent saintes et acquièrent un sens nouveau (Vatican II, Gaudium et Spes, n° 22).

 

Luc 1, 26-38 (Marie comblée par Dieu)

Pour présenter *l’incarnation du Messie et la mission de sa Mère, Luc utilise le schéma biblique des récits d’Annonciation (voir le même schéma dans l’Annonciation à Joseph, ci-dessus, le 19 mars). On en repère aisément les éléments principaux :

Manifestation du messager de Dieu.

L’ange Gabriel s’est présenté à Zacharie (Luc 1, 11.19). La seconde Annonciation, à Marie, ne se situe plus dans le Temple illustre de Jérusalem, mais dans un lieu retiré, en Galilée. Jésus sera le Messie des humbles, le Galiléen. Luc présente Marie comme une vierge (cf. 1ere lecture) et comme accordée en mariage à «un homme de la maison de David», la famille dont doit naître le Messie. Selon la coutume, un temps notable s’écoulait entre la conclusion du mariage et l’installation de l’épouse chez son époux. L’ange salue Marie en lui donnant pour nom «Comblée de grâce», un titre dans lequel la Tradition catholique voit le signe de sa conception immaculée. «Le Seigneur est avec toi» : cette formule, dans maints récits de vocation (Moïse, Exode 3, 12 ; Gédéon, Juges 6, 12), signifie que Dieu confie une mission à quelqu’un et lui apporte son soutien.

Réaction de Marie.

Zacharie était saisi de crainte (Luc 1, 12). Le bouleversement de Marie tient simplement à une interrogation sur ce que Dieu attend d’elle. Luc signale la non-foi de Zacharie (Luc 1, 20) et la foi de Marie (1, 45). Mais il serait vain de chercher les indices de ce contraste : le récit n’en livre aucun.

Le message de l’ange.

Voici en quoi Marie est «comblée de grâce» : Dieu la charge d’enfanter le Messie. Car l’ange assemble, dans son annonce, une mosaïque d’expressions qui renvoient notamment à la prophétie de l’Emmanuel : «Voici que la vierge enfantera et concevra un fils» (Isaïe 7, 14, selon la Bible grecque ; voir aussi Isaïe 9, 6). Le messager céleste s’exprime selon les clichés de l’Ancien Testament, même si, en profondeur, «le règne qui n’aura pas de fin» évoque déjà le règne du Christ ressuscité (Actes 2, 29-36).

Objection, réponse et don d’un signe.

Si Marie connaît, imaginons-le, les merveilleuses naissances de la Bible, comme celle d’Isaac (voir Genèse 17). Si elle sait que sa mission s’impose, son actuelle virginité n’est-elle pas un obstacle insurmontable au projet divin ? L’objection de l’élue permet à l’ange Gabriel d’approfondir, pour nous lecteurs, le mystère du Messie : nouvelle Ève, Marie enfantera le Vivant (Luc 24, 5) par un acte de l’Esprit qui présidait à la première création (Genèse 1, 2). La puissance de Dieu investira Marie, telle la nuée du désert «prenant sous son ombre» la Demeure de Dieu (Exode 40, 35). Et puisque l’Esprit créateur est «saint», l’enfant sera «Saint», consacré. Cet adjectif, chez les premiers chrétiens, est un des titres les plus anciens du Messie (cf. Luc 4, 34 ; Actes 3, 14).

Déjà – tel est le signe donné par l’ange et que Marie vérifiera par la bouche de sa cousine –, Dieu a réalisé pour Élisabeth, stérile et âgée, ce qu’il avait accompli pour Sara (cf. Genèse 18, 14). Marie croit-elle que Dieu peut faire plus encore, et introduire son Fils, grâce à elle, par une création qui enracine Jésus en «Adam, fils de Dieu» (Luc 3, 38) ?

La foi de Marie

Oui, selon le récit de Luc, elle le croit ! Elle est la figure de l’Église chargée d’enfanter son Sauveur au monde d’aujourd’hui. Elle est le modèle de tout croyant qui se fait serviteur de la parole du Seigneur, qui sait que «rien n’est impossible à Dieu».

* L’incarnation. «Parce que [dans le Christ] la nature humaine a été assumée, non absorbée, par le fait même, cette nature a été élevée en nous aussi à une dignité sans égale. Car, par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. Il a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme, il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché» (Vatican II, Gaudium et Spes, n° 22).

 

 




2ième Dimanche de Pâques par P. Claude Tassin (3 Avril 2016)

Actes des Apôtres 5, 12-16 (La communauté des premiers chrétiens)

L’Église unit des gens qu’a priori rien ne rassemble, sinon le fait qu’ils vivent une communion sans pareille parce qu’ils éprouvent au milieu d’eux la présence de celui qui, depuis l’Ascension, est l’Absent. Dans les Actes des Apôtres, Luc résume cette expérience en *trois sommaires (égrenés au 2° dimanche de Pâques des années A, B, C) montrant comment les chrétiens découvrent cette présence de l’Absent. Le 3° sommaire, aujourd’hui, souligne trois traits :

Signes et prodiges

Les Apôtres continuent les «signes et prodiges» accomplis par Jésus. Le contact physique de Pierre guérit, et même son ombre, comme naguère le contact de Jésus (Marc 6, 56). Partout où l’Église s’occupe de la santé des humains, le Christ ressuscité révèle sa présence.

Crainte et attachement

La communauté, dit Luc, produit une double réaction dans l’environnement : de crainte sacrée (on n’osait pas se joindre à eux) et d’attirance (on s’attachait au Seigneur par la foi). Les vraies Églises révèlent toujours une présence mystérieuse et attirante, celle du Christ. Ce sentiment ambigu du sacré se traduit dans certaines traditions animistes par cette boutade (que j’ai entendue) adressée aux chrétiens : «Nos fétiches ne peuvent rien contre vous, car les vôtres sont plus forts que les nôtres.»

Le portique

Luc montre les croyants déambulant, au Temple de Jérusalem, sous le «portique» de Salomon. Les philosophes grecs les plus populaires de ce temps étaient ceux du Portique, ou stoïciens. Ils déambulaient sous les portiques pour délivrer leur enseignement à leurs adeptes. l’Église essaie toujours de participer aux meilleurs courants de pensée de son temps.

* Les trois sommaires sur la première Église. Luc parsème ses Actes des Apôtres de « sommaires », des résumés ou refrains, soit qu’il se trouve à court de documents pour présenter les premières Églises, soit qu’il veuille nous livrer par là, dans les années 80, son interprétation des origines chrétiennes. Ainsi a-t-il bâti trois sommaires sur l’Église de Jérusalem, trois tableaux subtils dont se serviront ensuite, parfois sans grand discernement, certaines Églises et maints instituts religieux. Le 1er sommaire (Actes 2, 42-47), année A, insiste sur la communion fraternelle. Le second sommaire, Année B, toujours au 2e dimanche de Pâques (Actes 4, 32-35), insiste sur le partage concret incarnant cet idéal de communion. Les trois sommaires reprennent une même expression : «d’un même cœur». Ces tableaux de l’Église primitive ne décrivent pas un l’âge d’or du christianisme. Cet âge d’or n’a jamais existé. Luc indique simplement à quelles conditions les Églises à venir seront des témoins authentiques du Christ ressuscité.

 

Psaume 117 (« Le jour que fit le Seigneur »)

Nous retrouvons ce psaume que nous chantions en la veillée pascale et au matin de Pâques. En ce dimanche, le poème a peu à voir avec la lecture des Actes qui le précède. Il s’agit d’une prière « phare » pour l’ensemble du temps pascal. Rappelons la mise en scène proposée par le livre des psaumes : un roi, après une victoire difficile, vient rendre grâce au Temple. Il converse rituellement avec le peuple qui l’entoure et les prêtres qui accueillent le souverain. Cette forme de dialogue apparaît mieux dans les versets retenus aujourd’hui :

Le roi : Oui, que le dise Israël !

Le peuple : Éternel est son amour !

Le roi : Oui, que le dise la maison d’Aaron [= les prêtres]^ :

Le prêtre  :  Éternel est son amour !

Le roi :  Qu’ils le disent ceux qui craignent le Seigneur [= le peuple et les prêtres] :

Tous :  Éternel est son amour !

Le prêtre :  La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle.

Tous : C’est là l’œuvre du Seigneur, La merveille devant nos yeux.

Le prêtre : Voici le jour que fit pour nous le Seigneur, qu’il soit pour nous jour de fête et de joie !

Tous : Donne, Seigneur, donne le salut !  Donne, Seigneur, donne la victoire !

[Que] Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient ! [= Bénis-nous avec le roi sui vient.]

Le prêtre : De[puis] la maison du Seigneur, nous vous bénissons !

Tous : Dieu, le Seigneur, nous illumine !

Inutile d’expliciter le sens pascal chrétien de ce psaume, à moins d’une totale absence de sens poétique. Cependant, rappelons que dans le prêtre, nous entendons la voix de Dieu le Père ; que, par la voix du roi, c’est le Christ ressuscité qui s’exprime, et que, par le tous, c’est nous qui disons notre foi pascale.

Ajoutons un détail : l’expression «donne le salut» a été rendu curieusement dans la Bible grecque par Hosanna, une version conservée pour l’entrée de Jésus à Jérusalem, à savoir une annonce de la victoire pascale :  Hosanna au Fils de David !  Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur» (Matthieu 21, 9). Ce texte est passé dans notre liturgie eucharistique, avec une transposition. Car, au départ, il faut comprendre ceci : Que soit beni par le nom du Seigneur – par les prêtres – celui qui vient, c’est-à-dire le roi qui va entrer dans le Temple. La tradition juive et chrétienne a compris : «celui qui vient au nom du Seigneur», c’est-à-dire le Messie.

 

Apocalypse 1, 9-11a.12-13.17-19 (« J’étais mort, et me voilà vivant pour les siècles des siècles »)

Les visions de l’Apocalyse présentent des icônes littéraires : elles dépeignent des tableaux du Christ ressuscité en collant ensemble, de manière inattendue et poétique, des citations de l’Ancien Testament.

Aujourd’hui, nous lisons la vision inaugurale qui éclaire tout le livre. Jean, auteur inconnu (ce n’est pas l’évangéliste du même nom), est déporté sur l’île de Patmos en raison de la persécution menée par l’empereur Domitien (81-96). L’assemblée eucharistique, «le jour du Seigneur», est pour l’auteur l’occasion d’une vision : derrière lui s’ouvre le Temple du ciel aux sept chandeliers (le Temple de Jérusalem n’avait qu’un chandelier à sept branches). Si Jean tombe «comme mort» d’émotion (un cliché des apocalypses juives), c’est en découvrant le «Fils d’homme» annoncé par Daniel 7, 13-14 et le grand prêtre céleste ; car la ceinture d’or barrant la poitrine est un insigne sacerdotal. Il s’agit surtout du Ressuscité qui détient les clés de la Mort et ouvre les portes de la vie à ceux qui meurent par fidélité à leur foi. Le dimanche, *«jour du Seigneur», nous n’avons sans doute pas de visions, mais la certitude répétée que notre foi au Ressuscité nous sauvera de la mort.

* Le jour du Seigneur. C’est le grand jour ! «Le jour de gloire est arrivé», chante la Marseillaise. Dans l’Ancien Testament, sous la plume des prophètes, le «jour du Seigneur», espéré comme un jour de victoire, devint un jour de jugement divin sans concession (voir Amos 5, 18). Chez les chrétiens, le dimanche, c’est-à-dire, selon l’étymologie latine (dominica dies), le jour du Seigneur redevient un jour d’espérance, dans la suite du Christ, premier-né de notre future résurrection.

 

Jean 20, 19-31 (« Huit jours plus tard, Jésus vient »)

Cette page d’évangile, lue chaque année en ce dimanche, constituait sans doute primitivement la fin de l’évangile de Jean et son sommet. Quatre séquences nous conduisent pas à pas à saisir notre situation de croyants.

Il était là

C’est l’apparition de Jésus aux disciples, le soir de Pâques. Jean ne précise pas l’identité du groupe : il vise toute la communauté chrétienne, et pas seulement les Onze. C’est une réunion liturgique, «le premier jour de la semaine» (cf. «le jour du Seigneur», 1ère lecture). Alors Jésus «vint», *«il était là» et se fait reconnaître comme le Crucifié. On dit pas qu’il traverse les portes verrouillées, mais qu’il se rend présent dans une totale liberté. C’est pour les disciples une bénédiction (ils sont «remplis de joie») et un acte de foi, car ils voient non pas seulement Jésus, mais «le Seigneur». Celui-ci apporte la paix qu’il avait promise (cf. Jean 14, 27) et les recrée : comme Dieu «insuffla dans les narines (d’Adam) le souffle de vie», Jésus répand sur eux son souffle et leur donne mission de remettre ou de maintenir les péchés, de discerner le bien et le mal dans ce monde divisé. Ce qui se réalisera, grâce au baptême et à la lutte contre le péché, par exemple par la prière (cf. 1 Jean 5, 16-17).

Ainsi s’accomplissent les grandes promesses de la Bible : la nouvelle création, **la venue de l’Esprit qui purifie (Ezékiel 36, 25-27) et le pardon des péchés inaugurant l’Alliance nouvelle (Jérémie 31, 31-34).

Une transition

Les disciples ont vu et ils ont cru. Ils communiquent à Thomas leur credo pascal : «Nous avons vu (celui qui est maintenant) le Seigneur». Thomas repousse leur témoignage ; il lui faut des signes miraculeux (voir le reproche de Jean 4, 40).

Avec Thomas

C’est la seconde apparition avec la présence de Thomas, «le huitième jour». Grâce à la parole de Jésus, Thomas accède à la vraie foi. Les païens saluaient l’empereur Domitien comme «notre Seigneur et notre Dieu» ; c’est Jésus que le disciple confesse ainsi : «mon Seigneur et mon Dieu», les titres mêmes du Dieu d’Israël. Les autres avaient reconnu le Seigneur ; lui confesse le Verbe de Dieu qui est retourné en Dieu, dans la gloire qu’il avait «avant le commencement du monde» (Jean 17, 5).

Thomas est béni comme le dernier de ceux qui ont vu et qui ont cru. Depuis que ces témoins ont disparu, nous sommes bénis comme «ceux qui croient sans avoir vu».

Conclusion

«il y a encore beaucoup d’autres signes…» Jean ne dit pas que le Christ se sépare des disciples. Car il nous reste une présence invisible, grâce à l’Esprit qui apporte le pardon, qui nous rappelle et nous fait comprendre ce que Jésus a fait et dit «en présence des disciples». Ce souvenir nous conduit à la foi en Jésus comme Fils de Dieu, et la foi nous conduit à la vie.

* «Il était là». Les récits d’apparitions pascales tentent de rendre ce qui dépasse l’expérience ordinaire. Les témoins constatent que Jésus est vivant, que sa présence s’impose et qu’il leur donne une mission. Leur vocabulaire est riche et varié : Il se fit voir, il vint, il se tint au milieu d’eux, il les rencontra, il s’approcha d’eux, il se manifesta. L’expérience des premiers témoins fut sans pareille ; mais les mots qu’ils emploient disent que, dans notre vie aussi, le Ressuscité se rend présent.

* La venue de l’Esprit. On ne date pas la venue de l’Esprit Saint sur un calendrier et les évangélistes cherchent seulement à déployer la richesse du don de cet Esprit. Si on traduit Jean 19,30 par «il transmit l’Esprit», alors cet Esprit, signifié par l’eau et le sang, est offert dans le don suprême de la croix. En Jean 20, c’est au soir de Pâques que le Christ souffle l’Esprit de la création nouvelle. La Pentecôte juive célébrant l’alliance du Sinaï, c’est ce jour-là que Luc situe l’irruption de l’Esprit de la nouvelle alliance (Actes 2).

 

 

 

 

 

 

 




Messe Christmale 2016 : homélie de Mgr Gilbert Aubry

« LEVEZ-VOUS, ALLONS ! » (St Jean Paul II)

prodigueCette année, d’une manière particulière, nous sommes invités à accueillir et à vivre la miséricorde qui nous vient du Père, par Jésus le Christ, dans le souffle de l’Esprit. Père, Fils, Esprit. L’Humanité a toujours été à la recherche de Dieu. Dans sa longue histoire, c’est seulement depuis 2000 ans que les disciples de Jésus-Christ se situent sous le signe de la croix glorieuse. Nous faisons le signe de la croix sur nos corps pour dire que nous demandons à Dieu de nous prendre pour Lui, de nous protéger en nous maintenant en sa sainte volonté. Le baptême nous fait devenir enfants de Dieu et de l’Eglise. Nous devenons membres du Christ, prêtres, prophètes et rois.

Pape FrancoisLorsque nous chantons parfois « Peuple de prêtres, peuple de rois », il s’agit de toute l’Eglise, de tous les baptisés ensemble, en route vers la sainteté, vers la plénitude du Royaume. Isaïe avait déjà prophétisé « Vous serez appelés « Prêtres du Seigneur » ; ou on vous dira « Serviteurs de notre Dieu » (cf. Isaïe 61). L’Apocalypse de Jean écrit que Jésus-Christ « fait de nous un royaume de prêtres pour son Dieu et Père ». L’Evangile de Luc nous montre Jésus proclamant qu’aujourd’hui s’accomplit le passage de l’Ecriture « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce-que le Seigneur m’a consacré par l’onction, Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération ». C’est toute l’Eglise qui est sacerdotale, c’est toute l’Eglise qui est un « peuple sacerdotal ». Si dans l’Eglise, il y a des baptisés-confirmés qui sont appelés et ordonnés prêtres comme signes du Bon Pasteur pour être et agir « in persona Christi capitis » : « dans la personne du Christ, en tant que personne du Christ, Christ tête ». Rassembler, proclamer la Bonne Nouvelle, sanctifier. Vivre et proclamer la Bonne Nouvelle, pardonner les péchés, célébrer l’Eucharistie. Ce mystère est grand. Nous prêtres, nous l’expérimentons dans notre générosité et aussi dans nos faiblesses.

Nous expérimentons ce grand mystère dans notre générosité. La gratuité d’un moment de plénitude spirituelle peut nous être donnée dans la célébration d’un sacrement, dans les tâches multiples du service sacerdotal et pastoral, lorsque souvent nous supportons le poids du jour et de la chaleur. Je t’aime Seigneur tel que je suis en me laissant façonner par toi pour devenir ce que tu veux. Le poids du jour et de la chaleur, vous l’avez porté plus particulièrement la semaine dernière dans ces longues liturgies pénitentielles où la fatigue elle-même devenait sanctifiante. « Qui peut pardonner les péchés sinon Dieu seul ? » (Mc 2, 7). Va et ne pèche plusJésus pardonne « Va, ne pèche plus ». Nous ne sommes pas Dieu et nous pardonnons parce que nous recevons la mission de « lier et de délier » par le Christ lui-même. Nous ne sommes pas le Christ et pourtant, c’est Lui qui agit à travers nous et se rend présent avec son corps, son sang, son âme et sa divinité quand Il dit en nous « Ceci est mon corps… ceci est mon sang ». C’est lui qui agit et nous agissons en Lui parce que sa Parole est vraie sur chacun de nous. « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et institués afin que vous partiez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure » (Jn15, 16). Le Christ souverain Prêtre nous aime comme le Père l’a aimé. Il donne sa vie pour ses brebis. En ne faisant qu’un avec le Christ, nous avons à vivre le commandement qu’Il nous laisse, plus particulièrement à nous ses prêtres bien-aimés. « Demeurez dans mon amour » (Jn 15, 9). Cette messe chrismale et la célébration du Jeudi Saint nous remue d’une manière spéciale.

Le regard des brebis

Saint JeanLa grandeur du sacerdoce ministériel, nous l’expérimentons aussi dans nos faiblesses. Quand la communauté ecclésiale, le groupe, la paroisse, l’Eglise ne correspondent pas à l’idée que nous nous en faisions ou à celle que l’on voudrait avoir ou à celle qu’elle doit être, alors nous prêtres, nous pouvons connaître la tentation du doute. Nous pouvons nous sentir moches. Le désespoir peut arriver. Tentation de nous dire à nous-mêmes, je me retire. J’arrête. Mais déjà le regard des brebis qui nous ont été confiées par le Christ se pose sur nous et nous supplie : « Nous avons besoin de toi pour avancer, avance avec nous, nous avancerons avec toi ». Dans ce regard, nous rencontrons le regard du Christ qui s’était posé sur l’enfant, l’adolescent, le jeune homme, l’homme que nous étions, l’adulte que nous sommes devenus.

Ce regard était une Parole. Elle nous arrivait à travers la Tradition de l’Eglise, à travers la vie de l’Eglise dans notre vie. Dans le souffle de l’Esprit, c’est le Christ lui-même qui nous a dit « Viens, suis-moi, j’ai besoin de toi ! Je ferai de toi un pêcheur d’hommes ». Nous l’avons suivi dans la disponibilité et la joie. Et nous avons fait -ou nous ferons aussi- l’expérience de l’homme perdu, au creux même de notre ministère. Aujourd’hui, le regard du Christ se pose encore sur moi, sur toi, sur chacun de nous, prêtre. Christ-Bon-Pasteur-mosaïque-de-San-Lorenzo-détailJésus me soulève, moi brebis peut-être perdue. Il me prend sur ses épaules. Il me porte. Et nous voilà tête contre tête. Nos regards regardent ensemble dans la même direction, dans la même mission. Porter la Bonne Nouvelle, ensemble. En Lui, le Christ Jésus a besoin de mon regard en son regard pour descendre à la profondeur de la détresse humaine rencontrée en moi et dans les autres. En moi, j’ai besoin du regard du Christ Jésus en mon regard pour regarder la vie sauvée et transfigurée en Dieu. Chacun de nous peut se souvenir alors de la Parole que le Seigneur Jésus avait dite à Pierre « Avant que le coq chante aujourd’hui, tu m’auras renié trois fois » (Lc 22,61). « Heureux les miséricordieux, ils obtiendront miséricorde » (Mt 5,7). Devenons en tant que prêtres « Miséricordieux comme le Père » dans nos regards, dans nos paroles, dans nos attitudes, dans nos relations. Comme l’apôtre Pierre, nous pouvons dire au Christ « Seigneur, tu sais tout, tu sais que je t’aime » (Jn 21,15).

Saint Léon le Grand a écrit : « (…) cette adoption de notre nature par la divinité, grâce à laquelle le Verbe s’est fait chair et a demeuré parmi nous, a-t-elle exclu aucun homme de sa miséricorde, sauf s’il refuse la foi ? L’homme n’a-t-il pas une nature commune avec le Christ, s’il a accueilli Celui qui a pris cette nature et s’il n’a été régénéré par l’Esprit qui a engendré le Christ ? Celui qui a pris la nourriture, a connu le repos du sommeil, le trouble de la tristesse, les larmes de l’amitié ; cela ne prouve-t-il pas qu’il avait pris la condition d’esclave ? » (Bréviaire T. II, p. 239). La condition du serviteur des serviteurs de tous. Nos frères diacres par leur ordination et leur ministère nous rappellent à tous que cette dimension du service est fondamentale : nouer le tablier et nous laver les pieds les uns aux autres. Surtout quand c’est sale. Surtout quand ça sent mauvais.

Icône Christ TaizéAujourd’hui, chers frères prêtres, laissons-nous aimer par le Seigneur qui nous a choisis et qui nous choisit encore, pour « servir en sa présence ». Il sait bien de quelle pâte nous sommes pétris. Etant aimés par le Seigneur, nous pouvons à notre tour aimer comme Il nous aime, jusqu’au bout de l’amour. Dans un instant, nous allons renouveler nos promesses sacerdotales. En réalité, c’est Dieu qui s’est promis à nous en Jésus-Christ, par Lui et avec Lui le souverain prêtre éternel. Renouveler nos engagements, c’est d’abord reconnaître que Dieu lui-même a mis en nous prêtres le désir de répondre à son appel, l’intelligence, la compréhension de ce qu’Il attend de nous et la volonté de suivre le Christ, même « si parfois la croix nous semble dure et si nos mains craignent les clous ». Alors, n’hésitons pas à nous laisser renouveler par le Christ en renouvelant nos engagements. Que cela nous stimule à vivre cette fraternité sacerdotale qui sera pour les autres un témoignage et pour nous-mêmes un soutien tant pour notre vie personnelle que pour nos diverses missions pastorales. Comme disait le pape Jean-Paul II « Levez-vous, allons ! »

Île de la Réunion -Cilaos - Hélico

Ile de la Réunion : la ville de Cilaos, au pied du Piton des Neiges

Chers frères, chères sœurs, chers laïcs, chers amis, à La Réunion, nous avons la réputation de donner publiquement une place à la religion, au fait religieux. Nous sommes des êtres religieux. C’est bien. Mais est-ce que nous sommes vraiment chrétiens ? Nous n’avons pas fini d’apprendre à être vraiment disciples du Christ dans tous les domaines de notre vie. Il nous faut davantage mettre en cohérence notre vie et notre foi, dans la miséricorde et la patience de Dieu. Qu’il nous donne cet élan à faire Eglise dans l’Eglise même d’abord. Et le monde dira « Voyez comme ils s’aiment ». Sans le savoir, nous leur ouvrirons peut-être le chemin de la foi.

Chaque famille est telle qu’elle est, mais nous ne lâchons jamais cet idéal et ce soutien où Dieu Lui-même vient faire alliance avec un homme et une femme dans le mariage. Le sacrement de mariage c’est pour que la vie continue d’une génération à l’autre, pour que l’Eglise continue d’une génération à l’autre. Apprenons à nous écouter, à nous pardonner, à nous entraider pour que la violence disparaisse et que s’instaure un climat de paix.

le de la Réunion - Confirmation dans la chapelle du Cirque de Mafate

Ile de la Réunion – Confirmation dans la chapelle du Cirque de Mafate

Vous les jeunes, gardez en vous votre capacité d’émerveillement, de créativité. Vous avez des talents qu’il vous appartient de développer pour aimer, pour gagner votre vie, pour aider les autres à gagner leur vie, pour harmoniser notre société. Cherchez votre vocation. Cherchez et vous trouverez.

Confirmation Cirque de Mafate - Mgr Gilbert Aubry

Confirmation dans le Cirque de Mafate – Mgr Gilbert Aubry

« Consacrés par l’onction » que le Seigneur nous donne la grâce d’être réconciliés avec la grâce de notre baptême, de notre confirmation, de nos diverses consécrations, de notre ordination diaconale, de notre ordination presbytérale, de notre ordination épiscopale. En cette année de la miséricorde, ayant reçu la Bonne Nouvelle de la miséricorde, portons cette Bonne Nouvelle à tous les humbles, à tous les pauvres.

 

                                                                                       Monseigneur Gilbert Aubry

                                                    Messe Christmale, Eglise de St Louis, le mercredi 23 Mars 2016




Vivre du Dieu « Source de Vie »…

« Dieu est Esprit » nous dit St Jean (Jn 4,24) et il a créé l’homme « esprit » pour lui donner de pouvoir participer à ce qu’Il Est Lui-même. Notre « esprit » peut ainsi être comparé à une « capacité spirituelle » que Dieu désire « remplir » de ce qu’Il Est Lui‑même : son Esprit qui est Vie…

Le prophète Jérémie présente ainsi deux fois « Dieu » comme étant « une Source d’Eau Vive » :

Jr 2,13 : « Mon peuple a commis deux crimes :

Ils m’ont abandonné, moi la source d’eau vive,

pour se creuser des citernes,

citernes lézardées qui ne tiennent pas l’eau. »

Source 3

Jr 17,13 : « Espoir d’Israël, Yahvé,

tous ceux qui t’abandonnent seront honteux,

ceux qui se détournent de toi seront inscrits dans la terre,

car ils ont abandonné la source d’eaux vives, Yahvé. »

Le Psaume 36 présente également Dieu comme une Source :

Ps 36,10 : « En toi (Seigneur) est la source de vie,

par ta lumière nous voyons la lumière. »

St Jean reprendra l’image de l’Eau Vive en expliquant qu’elle représente l’Esprit de Dieu, et donc ce que Dieu Est en Lui-même :

Jésus Miséricordieux

 Jn 7,37-39 : « Le dernier jour de la fête, le grand jour,                                                     Jésus, debout, s’écria :

Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive,                                                      

              celui qui croit en moi !  

selon le mot de l’Écriture :                                                                                        

             De son sein couleront des fleuves d’eau vive.

Il parlait de l’Esprit                                                                                          

             que devaient recevoir ceux qui avaient cru en lui »…

Et puisque Dieu nous a tous créés pour être remplis de l’Eau Vive de son Esprit, tous les hommes ont un désir spirituel, une faim spirituelle, une soif spirituelle… Comme image, nous pouvons prendre notre corps qui a été créé pour vivre de ce qu’il reçoit : nourriture et boisson… Pour cela il dispose d’un « estomac » qui est « capacité corporelle » destinée à être remplie de ce pour quoi elle a été faite… Et lorsque notre « estomac » est vide, tout le corps réclame de la nourriture : nous avons faim, nous ne pouvons plus vivre pleinement, nous expérimentons une souffrance, un mal-être général… Par contre, quand il est plein, nous ressentons une impression de bien-être. Il en est de même de notre dimension spirituelle… Lorsque notre esprit ou notre cœur est vide des réalités spirituelles pour lesquelles il a été créé, nous expérimentons un manque, une faim, une soif de plénitude, le désir d’un bonheur profond qui n’est pas au rendez-vous, un mal-être difficile à exprimer, une tristesse générale mêlée de souffrance et d’angoisse… Et pourtant, Dieu n’a qu’un seul désir : le remplir, car il nous a tous créés pour cela…

C’est pourquoi le psalmiste exprime ce désir avec l’image de « la soif de Dieu », car il est une révélation indirecte de ce pour quoi nous avons tous été créés : pour être remplis de l’Esprit de Dieu, cette « Eau Vive » qui est Plénitude de Vie, de Paix et donc Bonheur profond, la seule qui peut combler notre soif profonde…

Cerf altéré - St Clément RomePs 42,2-3 :

« Comme un cerf altéré cherche l’eau vive,

        ainsi mon âme te cherche, toi, mon Dieu.

Mon âme a soif de Dieu, le Dieu vivant.

Quand pourrai-je m’avancer,

          paraître face à Dieu ? »

Or, comme le disait le prophète Jérémie, en abandonnant Dieu « Source d’Eau Vive », l’homme se prive par lui-même de la Plénitude de cette Eau Vive, la Plénitude de la Vie éternelle… Mais comme nous avons tous été créés pour être comblés, pour être heureux, l’homme va se lancer dans une quête éperdue de bonheur… Et il le cherchera dans une recherche effrénée des plaisirs de la vie, du pouvoir, de l’argent, des réalités matérielles… Mais s’il est sincère avec lui-même, il ne pourra que constater que le vrai bonheur n’est toujours pas au rendez-vous… Alors, faut-il « avoir » plus ? Il essaiera, sans résultats… Peut-être faut-il être plus haut placé dans la société ? Il essaiera, sans résultats… Toutes ces quêtes sont comme des citernes qu’il prend beaucoup de peine à creuser en espérant qu’un jour elles seront pleines d’eau, et donc de vie, de promesses de vie, de rassasiement, de bonheur… Mais comme l’écrit Jérémie, elles sont fissurées dès le départ … Elles ne peuvent retenir l’eau et offrir le vrai bonheur, la vraie vie… L’espérance de plénitude ne peut qu’être déçue… Pire, le fait qu’elles soient à sec est synonyme de mort…

Le Père va donc envoyer le Fils dans le monde pour donner aux hommes de pouvoir retrouver avec Lui le chemin qui conduit à Dieu et donc à l’Eau Vive de l’Esprit qui ne cesse de jaillir de Lui pour combler ses créatures… « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi », disait St Augustin. Le Christ est ainsi venu offrir aux hommes, gratuitement, par amour, cette Plénitude d’Esprit et donc de Vie pour laquelle nous avons tous été créés…

Jésus et la SamaritaineDans l’Evangile selon St Jean, au chapitre 4, Jésus est présenté comme étant assis près d’un puits… Cette image visible est la révélation invisible de ce qu’Il Est de toute éternité : le Fils qui est tourné vers le Père « Source d’Eau Vive ». Voilà ce qu’il reçoit de Lui depuis toujours et pour toujours : l’Eau Vive de l’Esprit. Or, si Dieu est Esprit (Jn 4,24), ce mot « Esprit » suffit à lui seul pour évoquer le mystère de la nature divine, c’est-à-dire ce que Dieu Est en Lui-même. St Jean dira également « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5) et deux fois « Dieu est Amour » (1Jn 1,4,8.16). Ces trois mots expriment donc des aspects d’une seule et unique réalité : cette nature divine que le Père donne au Fils de toute éternité. Et nous confessons du Fils dans notre Crédo : « Il est Dieu né de Dieu, Lumière né de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu. Engendré non pas créé, de même nature que le Père »…

Ainsi, Jésus assis près du puits est une image du Fils toujours près du Père, tourné de cœur vers le Père (Jn 1,18), recevant du Père la Vie que le Père a en lui-même (Jn 5,26). Et il va dire « J’ai soif » à une femme samaritaine… En effet, il est « fatigué par la marche » et « c’était environ la sixième heure, c’est-à-dire midi ». La Samaritaine va s’étonner que Jésus lui adresse la Parole car la Loi interdisait à un homme d’aborder une femme seule, et les Juifs n’entretenaient pas de relations avec les Samaritains, leurs ennemis « héréditaires »… Mais Jésus fait tomber toutes ces barrières car il a, lui, le désir de partager avec elle ce Don de la Plénitude de l’Esprit qu’il ne cesse de recevoir de son Père et qui comble son cœur… Alors, il va lui mettre « l’eau à la bouche » et lui parler de cette Eau Vive en espérant que viendra le moment où elle aussi lui dira « J’ai soif » de recevoir cette Vie dont tu me parles…

Jn 4,10 : Jésus lui dit :

A – Si tu savais le don de Dieu                         Le Don de Dieu est évoqué

                   B – et qui est celui qui te dit :        Jésus demande à la femme

                                    C – Donne-moi à boire,                                      Donne-moi à boire

                   B’ – c’est toi qui l’aurais prié          La femme aurait demandé à Jésus

A’ – et il t’aurait donné de l’eau vive.                Le Don de Dieu est précisé : l’Eau Vive

Le texte est très bien construit : Jésus dit à la Samaritaine « Donne-moi à boire » pour qu’un jour la Samaritaine lui dise « Donne-moi à boire »… Jésus lui révèle ainsi le Don qu’il est venu offrir à tous les hommes : l’Eau Vive de l’Esprit, la seule réalité capable de remplir nos cœurs et donc de nous offrir la vraie Vie, le vrai Bonheur… Voilà pourquoi il nous invite à le demander en St Luc avec une incroyable insistance :

Lc 11,9-13 : « Et moi, je vous dis :

A – demandez et l’on vous donnera ;

         B – cherchez et vous trouverez ;

                  C – frappez et l’on vous ouvrira.

 A’ – Car quiconque demande reçoit ;

           B’ – qui cherche trouve ;

                   C’ – et à qui frappe on ouvrira.

Exemple I – Quel est d’entre vous le père auquel son fils demandera un poisson,

                             et qui, à la place du poisson, lui remettra un serpent ?

Exemple II – Ou encore s’il demande un œuf, lui remettra-t-il un scorpion ?

Conclusion : A – Si donc vous, qui êtes mauvais,

                                  B – vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

                        A’ – combien plus le Père du ciel       (qui est infiniment bon)

                                    B’ – donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »

Demander, librement, manifestera alors notre désir de recevoir… Et nous ne pourrons qu’être exaucés car la Source n’a pas attendu notre demande pour couler : elle coule de toute éternité… Le Psalmiste exprime également ce Mystère de l’Amour de Dieu avec l’image du Soleil… Dieu est un Soleil, il ne cesse de briller, il ne cesse de donner la Lumière et il est Lumière… Autrement dit, il ne cesse de donner ce qu’il est en Lui‑même… Dieu est Esprit ? Il est Source, et ne cesse de donner l’Eau Vive de l’Esprit… Se tourner de tout cœur vers Lui, c’est déjà recevoir, gratuitement, par amour… Nous retrouvons cette phrase de Ste Thérèse de Lisieux, à appliquer littéralement à Dieu qui est Amour, et tout spécialement au Père : « Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même ». Dieu est Esprit ? Il donne l’Esprit… Dieu est Lumière, Soleil ? Il donne la Lumière…

Dieu Soleil

Ps 84,12 : « Le Seigneur Dieu est un Soleil…

                             Il donne la grâce,

                                    il donne la gloire »…

Alors, si nous répondons à l’appel de Dieu, « repentez-vous, tournez-vous vers moi et vous serez sauvés, tous les lointains de la terre » (Is 45,22), en tournant notre cœur vers la Source d’Eau Vive, nous serons intérieurement comme un jardin tout irrigué :

jardin arroséIs 58,11 : « Le Seigneur sans cesse te conduira,

il te rassasiera dans les lieux arides,

il donnera la vigueur à tes os,

et tu seras comme un jardin arrosé,

comme une source jaillissante 

                       dont les eaux ne tarissent pas.»

                                                                                   

C’est ce que dit Jésus à la Samaritaine :

Jn 4,13-14 : « Jésus lui dit :

Quiconque boit de cette eau aura soif à nouveau ;

mais qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ;

l’eau que je lui donnerai deviendra en lui source d’eau jaillissant en vie éternelle. »

Herbe-arrosée-300x183Et comme « un homme ne peut rien recevoir si cela ne lui a été donné du ciel » (Jn 3,27), celui qui a, c’est qu’il a reçu… S’il a reçu, c’est qu’il est tourné vers Dieu et ouvert à Dieu. Et comme Dieu est Source, il recevra et recevra encore : « C’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu’on versera dans votre sein » (Lc 6,38)…

Et le Christ va mourir sur la croix pour que nous puissions recevoir cette Eau Vive de l’Esprit. Là encore, le corporel est signe visible du spirituel. Un soldat romain va transpercer son cœur d’où s’écouleront sur la terre toute « l’eau et le sang » qui le remplissaient (Jn 19,33-35). Or dans la Bible, les deux sont symbole de vie. Ainsi, le cœur « spirituel » est désormais ouvert à tous les hommes et de lui s’écoule pour eux la Plénitude de l’Eau Vive de l’Esprit qui le remplit et qu’il reçoit de son Père de toute éternité… Avec Lui et par Lui, une Source a jailli en ce monde pour combler notre soif intérieure…

Waterfall

Joël 4,18 :

« Une source jaillira de la maison de Yahvé

et arrosera le ravin des Acacias »…

Deux images de l’Ancien Testament sont accomplies. Celle du Rocher :

Ex 17,1-7 : Toute la communauté des Israélites partit du désert de Sîn, sur l’ordre de Yahvé,

            et ils campèrent à Rephidim. Or il n’y avait pas d’eau à boire pour le peuple.

( 2)             Celui-ci s’en prit à Moïse; ils dirent : Donne-nous de l’eau, que nous buvions !

            Moïse leur dit : Pourquoi vous en prenez-vous à moi ?

            Pourquoi mettez-vous Yahvé à l’épreuve ?

( 3)             Le peuple y souffrit de la soif, le peuple murmura contre Moïse et dit :

            Pourquoi nous as-tu fait monter d’Égypte ?

            Est-ce pour me faire mourir de soif, moi, mes enfants et mes bêtes ?

( 4)             Moïse cria vers Yahvé en disant : Que ferai-je pour ce peuple ?

            Encore un peu et ils me lapideront.

( 5) Yahvé dit à Moïse : Passe en tête du peuple et prends avec toi quelques anciens d’Israël ;

            prends en main ton bâton, celui dont tu as frappé le Fleuve, et va.

( 6)             Voici que je vais me tenir devant toi, là sur le rocher (en Horeb),

            tu frapperas le rocher, l’eau en sortira et le peuple boira.

            C’est ce que fit Moïse, aux yeux des anciens d’Israël.

( 7)             Il donna à ce lieu le nom de Massa et Meriba,

            parce que les Israélites cherchèrent querelle

            et parce qu’ils mirent Yahvé à l’épreuve en disant :

            Yahvé est-il au milieu de nous, ou non ?

Ce texte sera très souvent repris par la suite (Nb 20,1-13 ; Is 48,21 ; Ps 78,15-16 ; 105,41 ; 114,8 ; Sg 11,4). Et l’image du rocher renvoie dans la Bible au Mystère de Dieu (Ps 18,3 ; 18,32 ; 18,47 ; 19,15 ; 28,1 ; 31,4…).

St Paul dira que ce rocher dans le Livre de l’Exode, c’était le Christ…

Jésus Miséricordieux1Co 10,1-4 : « Je ne veux pas que vous l’ignoriez, frères :

nos pères ont tous été sous la nuée,                                                                                          

tous ont passé à travers la mer,

tous ont été baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer,

tous ont mangé le même aliment spirituel

et tous ont bu le même breuvage spirituel

ils buvaient en effet à un rocher spirituel                                                                                               

qui les accompagnait, et ce rocher c’était le Christ. »

Avec le Christ et par le Christ, vrai homme et vrai Dieu, c’est Dieu Lui-même qui a été frappé et l’Eau Vive de sa Vie s’écoule en Plénitude sur les hommes pécheurs qui l’ont frappé pour les guérir petit à petit de leur méchanceté et leur donner enfin d’aimer…

La deuxième image est celle du Temple.

            Ez 47, 1-12 : « Il me ramena à l’entrée du Temple,

            et voici que de l’eau sortait de dessous le seuil du Temple, vers l’orient,

            car le Temple était tourné vers l’orient.

            L’eau descendait de dessous le côté droit du Temple, au sud de l’autel.

(2)             Il me fit sortir par le porche septentrional et me fit faire le tour extérieur,

            jusqu’au porche extérieur qui regarde l’orient,

            et voici que l’eau coulait du côté droit.

(3)             L’homme s’éloigna vers l’orient, avec le cordeau qu’il avait en main,

            et mesura mille coudées;

            alors il me fit traverser le cours d’eau :

                        j’avais de l’eau jusqu’aux chevilles.

(4)             Il en mesura encore mille et me fit traverser le cours d’eau

                        j’avais de l’eau jusqu’aux genoux.            

            Il en mesura encore mille et me fit traverser le cours d’eau :

                        j’avais de l’eau jusqu’aux reins.

(5)             Il en mesura encore mille,

                        et c’était un torrent que je ne pus traverser,

                        car l’eau avait grossi pour devenir une eau profonde, un fleuve infranchissable.

Fleuve abondant

(6)             Alors il me dit : As-tu vu, fils d’homme?  

            Il me conduisit puis me ramena au bord du torrent.

(7)             Et lorsque je revins, voici qu’au bord du torrent

            il y avait une quantité d’arbres de chaque côté.

(8)             Il me dit : Cette eau s’en va vers le district oriental, elle descend dans la Araba

et se dirige vers la mer ; elle se déverse dans la mer en sorte que ses eaux deviennent saines.

(9)             Partout où passera le torrent, tout être vivant qui y fourmille vivra.

            Le poisson sera très abondant, car là où cette eau pénètre, elle assainit,

            et la vie se développe partout où va le torrent.

Réplique de la mosaïque de Madaba

Réplique de la mosaïque de Madaba (6° s) : le Jourdain (et ses poissons) se jette dans la Mer Morte, la Araba…

(10)             Sur le rivage, il y aura des pêcheurs.

            Depuis En-Gaddi jusqu’à En-Églayim des filets seront tendus.

  Les poissons seront de même espèce que les poissons de la Grande mer, et très nombreux.

(11)       Mais ses marais et ses lagunes ne seront pas assainis, ils seront abandonnés au sel.

(12)      Au bord du torrent, sur chacune de ses rives, croîtront toutes sortes d’arbres fruitiers

            dont le feuillage ne se flétrira pas et dont les fruits ne cesseront pas :

            ils produiront chaque mois des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire.

            Les fruits seront une nourriture et les feuilles un remède. »

oranger

Le Christ en se présentant comme le vrai « Sanctuaire de Dieu » (Jn 2,13-22), car « le Père est en lui » (Jn 14,11 ; 17,21), accomplira ce texte… Et de son côté ouvert sur la Croix, le côté droit (Ez 47,2) d’après le Linceul de Turin, coulera en surabondance l’Eau Vive de l’Esprit qui purifie et rend la vie aux cœurs blessés par la mort du péché. Ce même Esprit nourrit et donne de porter du fruit en tout temps, des fruits pour la vie des autres… Et même les feuilles deviennent des remèdes pour guérir les malades. Ainsi, grâce à l’Esprit, ceux et celles qui le reçoivent contribuent à la vie du monde en tout ce qu’ils sont et en tout ce qu’ils font… Telle est l’Eglise qui, en témoignant de ce qu’elle a reçu elle-même de la Miséricorde de Dieu, travaille à ce que le plus possible de pécheurs puissent eux aussi vivre ce qu’elle a vécu. «  Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d’entre les morts le troisième jour », dit le Ressuscité à ses disciples, « et qu’en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. De cela vous êtes témoins » (Lc 24,46-48), les heureux témoins…

                                                                                                                      D. Jacques Fournier

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