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Audience Générale du Mercredi 25 Octobre 2023

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 25 Octobre 2023


Catéchèse – La passion pour l’évangélisation : le zèle apostolique du croyant – 24. Les saints Cyrille et Méthode, apôtres des Slaves

Chers frères et sœurs, bonjour !

Aujourd’hui, je vais vous parler de deux frères très célèbres en Orient, au point d’être appelés « les apôtres des Slaves » : les Saints Cyrille et Méthode. Nés en Grèce au IXe siècle dans une famille aristocratique, ils renoncent à leur carrière politique pour se consacrer à la vie monastique. Mais leur rêve d’une existence retirée est de courte durée. Ils sont envoyés comme missionnaires dans la Grande Moravie, qui comprenait alors divers peuples, déjà en partie évangélisés, mais parmi lesquels persistaient de nombreuses coutumes et traditions païennes. Leur prince demandait un maître pour expliquer la foi chrétienne dans leur langue.

La première tâche de Cyrille et Méthode est donc d’étudier en profondeur la culture de ces peuples. Toujours cette ritournelle : la foi doit être inculturée et la culture doit être évangélisée. Inculturation de la foi, évangélisation de la culture, toujours. Cyrille leur demande s’ils ont un alphabet ; ils lui répondent par la négative. Il réplique : « Qui peut écrire un discours sur l’eau ? En effet, pour annoncer l’Évangile et prier, il fallait un outil adéquat, approprié, spécifique. Il invente donc l’alphabet glagolitique. Il traduit la Bible et les textes liturgiques. Les gens sentent que la foi chrétienne n’est plus « étrangère », mais qu’elle devient leur foi, parlée dans leur langue maternelle. Pensez-y : deux moines grecs qui donnent un alphabet aux Slaves. C’est cette ouverture du cœur qui a enraciné l’Évangile parmi eux. Ils n’avaient pas peur ces deux-là, ils étaient courageux.

Très tôt, cependant, une opposition se fait jour de la part de certains Latins, qui s’estiment dépossédés du monopole de la prédication chez les Slaves, cette lutte à l’intérieur de l’Eglise, toujours ainsi. Leur objection est religieuse, mais seulement en apparence : Dieu ne peut être loué – disent-ils – que dans les trois langues écrites sur la croix, l’hébreu, le grec et le latin. Ceux-ci avaient la mentalité fermée pour défendre leur propre autonomie. Mais Cyrille répond avec force : Dieu veut que chaque peuple le loue dans sa propre langue. Avec son frère Méthode, il s’adresse au Pape qui approuve leurs textes liturgiques en langue slave, les fait placer sur l’autel de l’église de Sainte-Marie-Majeure et chante avec eux les louanges du Seigneur selon ces livres. Cyrille mourut quelques jours plus tard et ses reliques sont toujours vénérées à Rome, dans la Basilique de Saint-Clément. Méthode, quant à lui, est ordonné évêque et renvoyé dans les territoires des Slaves. Là, il devra beaucoup souffrir, il sera même emprisonné, mais, frères et sœurs, nous avons qu’on ne peut enchaîner la Parole de Dieu et elle se répand parmi ces peuples.

En considérant le témoignage de ces deux évangélisateurs, que Saint Jean-Paul II a voulu co-patrons de l’Europe et sur lesquels il a écrit l’Encyclique Slavorum Apostoli, examinons trois aspects importants.

Tout d’abord, l’unité : les Grecs, le Pape, les Slaves : à cette époque, il y avait en Europe une chrétienté non divisée, qui collaborait pour évangéliser.

Un second aspect important est l’inculturation, dont j’ai parlé précédemment : évangéliser la culture et l’inculturation met en évidence que l’évangélisation et la culture sont étroitement liées. On ne peut pas prêcher un Évangile abstrait, distillé, non : l’Évangile doit être inculturé et est aussi une expression de la culture.

Un dernier aspect, la liberté. La liberté est nécessaire dans la prédication mais la liberté a toujours besoin du courage, une personne est libre dans la mesure où elle est plus courageuse et ne se laisse pas enchainer par tant de choses qui la privent de sa liberté.

Frères et sœurs, demandons aux saints Cyrille et Méthode, apôtres des Slaves, d’être des instruments de « liberté dans la charité » pour les autres. Être créatifs, être constants et être humbles, avec la prière et avec le service.

* * *

Je salue cordialement les pèlerins de langue française en particulier les personnes venues du Bénin, de Suisse et de France, en particulier les jeunes confirmés des diocèses de Rouen, Bayeux et Coutances accompagnés de leurs évêques.

Nous fêterons la semaine prochaine la Solennité de tous les saints. Préparons-nous à cette belle fête.

Que Dieu vous bénisse.





30ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 34-40) – par Francis COUSIN

« Amour croisé ! »

Nous sommes toujours dans la dernière semaine de la vie de Jésus, et si nous regardons les différents évangiles de ces dernières semaines, on se rend compte d’une chose : ils parlent tous de réactions de Jésus à des interrogations de différents groupes : les chefs des prêtres, les anciens, les pharisiens, les hérodiens, les sadducéens, parfois alliés entre eux, tous des groupes attachés à la Loi de Moïse et qui refusent la Bonne Nouvelle annoncée par Jésus, … « pour le mettre à l’épreuve », dans le but de « le mettre à mort. » …

Cette semaine, c’est un pharisien, docteur de la loi, qui pose la question : « Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? ».

La réponse de Jésus est simple : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. » (Dt 6,5), ce qui ne peut que réjouir le docteur de la loi en reprenant un commandement de la loi juive, mais il ajoute aussitôt un autre commandement, lui aussi tiré de la bible : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » (Lev 19,18), ce qui est plus difficile à faire … même pour un docteur de la loi …

Un seul commandement qui se dédouble : « Tu aimeras … » à la fois… en même temps… simultanément : … Dieu et les humains … le Très-Haut … et les très-bas, les pauvres et les petits, les délaissés … les immigrés, dont il faut prendre soin, ainsi que nous le rappelle la première lecture … mais aussi le pape François, dans son encyclique « Fratelli Tutti », et dernièrement lors de la clôture des ’’Rencontres méditerranéennes’’ sur les migrations à travers la Méditerranée … et aussi pour nous, l’accueil des migrants Sri-Lankais, dont on parle moins ce moment, mais qui a donné lieu à diverses réactions pas souvent favorables à ces personnes …

Dieu est amour, et Jésus lui est semblable : Il ne sait qu’aimer, et il ne peut que nous inviter à aimer comme lui nous a aimé : « Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » (Jn 13,34).

Cette loi d’amour entre les humains a été développée par les premiers disciples, notamment saint Paul : « J’aurais beau parler toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante. » (1 Cor 13,1).

Ou saint Jean : « Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, puisque l’amour vient de Dieu. Celui qui aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour (…) Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas. » (1 Jn 4,7-8.20)

Cela nous entraîne loin dans l’amour des autres, surtout si l’on prend certains passages de l’Évangile : « Moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux. » (Mt 5,44).

L’amour des autres doit se traduire en actes, et pas simplement en paroles, sinon cela ne sert à rien : « Si vous accomplissez la loi du Royaume selon l’Écriture : Tu aimeras ton prochain comme toi-même, vous faites bien. Mais si vous montrez de la partialité envers les personnes, vous commettez un péché, et cette loi vous convainc de transgression. En effet, si quelqu’un observe intégralement la loi, sauf en un seul point sur lequel il trébuche, le voilà coupable par rapport à l’ensemble. » (Jc 2,8-10).

Voilà une parole qui est dure, difficile à vivre dans la vie courante, et qui nous oblige à nous reconnaître tous pécheurs et à demander à Dieu de nous donner sa miséricorde.

Malgré nos difficultés et nos faiblesses, essayons de vivre du mieux que nous pouvons ses deux commandements.

« À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13,35)

Pour nous souvenir de ces deux commandements liés, à chaque fois que nous faisons le signe de la Croix, pensons « aimer Dieu » dans le signe vertical, et « aimer les autres » dans le signe horizontal.

Seigneur Jésus,

un proverbe humain dit :

« À l’impossible, nul n’est tenu. »

mais le langage des hommes

n’est pas le tien !

Ce que tu nous demandes

avec ces deux commandements croisés

nous semble vraiment impossible,

mais avec l’aide de l’Esprit Saint,

tout est possible.

 

Francis Cousin

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Prière dim ord A 30°

 




30ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 34-40)- par le Diacre Jacques FOURNIER

 » Aimer Dieu, c’est aimer son prochain « 

(Mt 22, 34-40)

  En ce temps-là, les pharisiens, apprenant qu’il avait fermé la bouche aux sadducéens, se réunirent,
et l’un d’entre eux, un docteur de la Loi, posa une question à Jésus pour le mettre à l’épreuve :
« Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? »
Jésus lui répondit : « ‘Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit.’
Voilà le grand, le premier commandement.
Et le second lui est semblable : ‘Tu aimeras ton prochain comme toi-même.’
De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »

 

          

           Autrefois, le catéchisme s’apprenait par cœur, et régulièrement, Mr le Curé interrogeait ses élèves pour tester leurs connaissances. C’est l’épreuve que subit ici Jésus de la part d’un Pharisien, « Docteur de la Loi ». Et Lui, vrai homme et vrai Dieu, se prête au jeu et répond ! Quelle patience ! Et il citera deux passages de la Loi : le Livre du Deutéronome, central pour la foi juive, « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit » (Dt 6,5), et le Livre du Lévitique, le code de lois de l’époque : « Tu aimeras ton prochain comme toi‑même » (Lv 19,18).

        Pour Jésus, tout se résume donc à l’amour, et tout en citant Dieu en premier, il présente l’amour du prochain comme étant « semblable » à l’amour de Dieu. Le texte du Décalogue, les Dix Paroles (Ex 20,1-17), ne commence-t-il pas par « Moi, le Seigneur ton Dieu… » et ne se termine-t-il pas par « … tout ce qui est à ton prochain » ? Quiconque écoute ces Paroles pour les mettre en pratique ne pourra que respecter Dieu et son prochain. Et ceci se vérifie avec une intensité inégalée en Jésus Christ, vrai Dieu et vrai homme. Avec lui, qui aime Dieu vraiment ne peut qu’aimer l’homme vraiment…

       Face à ce Pharisien Docteur de la Loi, Jésus résume donc toute la Loi à l’amour… « Celui qui aime les autres a parfaitement accompli la Loi », écrira plus tard un autre Pharisien Docteur de la Loi, St Paul… « Ce que dit la Loi : Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne commettras pas de meurtre, tu ne commettras pas de vol, tu ne convoiteras rien ; ces commandements et tous les autres se résument dans cette parole : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. L’amour ne fait rien de mal au prochain. Donc l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour » (Rm 13,9-10).

       Mais l’amour de Dieu, cité ici en premier par Jésus, est la Source de l’amour du prochain. En effet, « Dieu est Esprit » (Jn 4,24), « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16), et pour Lui, aimer, c’est se donner soi-même, donner tout ce qu’Il Est en Lui-même. Quiconque ouvre son cœur à Dieu ne peut donc que recevoir au même moment ce Don qu’il ne cesse de faire de lui-même, et Il Est Esprit, Il Est Amour… « Si tu savais le Don de Dieu », dit Jésus à la Samaritaine. « Dieu vous a fait le Don de son Esprit Saint » et « l’Amour de Dieu a été versé dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Jn 4,10 ; 1Th 4,8 ; Rm 5,5). C’est donc le même Esprit qui jour après jour lave et purifie les pécheurs que nous sommes, et nous apprend, petit à petit, à aimer, dans la paix…                             DJF




30ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 34-40)- Homélie du Père Louis DATTIN

 Le grand commandement

Mt 22, 34-40

     Il faut bien l’avouer, frères et sœurs, le mot « commandement  » n’est pas un mot sympathique.

N’est-ce pas tous les jours que nous voyons dans la rue et autour de nous, de multiples « commandements » qui semblent vouloir limiter notre liberté; partout autour de nous des interdits, des rejets, des exclusives: « défense de stationner », « défense de fumer », « défense de marcher sur la pelouse », « sens interdit », « sens obligatoire », « interdit aux démarcheurs et aux représentants », « propriété privée », « entrée interdite », « attention chien méchant », « avis à la population », …

Le nombre de panneaux vous commandant de faire ceci et de ne pas faire cela se multiplie et en même temps, nous voulons crier :

« Mais, après tout, je suis bien libre ! Je deviens une marionnette de la société : asseyez-vous ici ; attendez votre tour ; prenez un numéro d’ordre ; prenez la file de gauche ; allez au guichet n° 22 ; il vous manque tel papier ; signez à cet endroit ; revenez dans trois semaines ».

Nous sommes enfermés dans des codes, des règlements, des procédures, des marches à suivre, un peu comme une bouteille, dans une usine perfectionnée, qui est mise sur la chaine : on la remplit, on l’étiquette, on la capsule, on la couche sur le côté puis mise en boites, …

Nous sommes, nous aussi, enfermés, de moins en moins libres d’agir selon notre guise et à notre fantaisie et pourtant, nous avons un cœur, des jambes, une tête… et alors ? Et notre liberté dans tout cela ? Nos initiatives, nos désirs d’innover, de prendre des responsabilités, de créer, de découvrir ?

Jésus, avec la loi juive, a eu la même réaction : il avait en face de lui des pharisiens qui, à force de pratiquer la loi étaient devenus des automates, victimes de pratiques, de dévotions, de commandements de toutes sortes, à tel point qu’ils croient mettre Jésus dans l’embarras en lui demandant : « Maitre, quel est le plus grand commandement ? »

Il y en avait tellement ! En effet, les rabbins répartissent les 613 préceptes de la loi en 365 défenses : le nombre de jours de l’année et 248 commandements : le nombre, paraît-il, des composantes du corps humain … de quoi hésiter ? Non ? Ici encore, Jésus prend une position neuve, inattendue : il va en retenir deux, pas plus ! Et encore ce ne sont pas des commandements à proprement parler, mais des amours à cultiver : deux amours qu’il va souder : celui de Dieu – celui du prochain, mis sur le même plan et Jésus va encore plus loin.

Il ne s’agit plus d’une réglementation, il ne s’agit plus d’observer des articles, ni de m’aligner sur une conduite conforme à des commandements. Il s’agit seulement d’accueillir une présence : celle de Dieu, celle des autres. Jésus arrache les hommes à l’obsession des tabous, des observances : ce qu’il faut faire, ce qu’il ne faut pas faire, nos peurs et nos étroitesses.

Il nous rappelle que la sève de toute vie humaine, ce n’est pas un règlement, une conformité à des normes, c’est l’amour qui rejoint des êtres vivants et LE vivant. Il ne s’agit plus d’ordre ou d’obéissance, il s’agit de cœur, de visages, de contacts. En direct… Il ne s’agit plus de mettre sa conscience en règle, il s’agit d’aimer. Alors ? L’essentiel ?

L’essentiel a toujours un visage. Ce n’est pas quelque chose : un ordre, un avis, une interdiction, une loi. L’essentiel, c’est quelqu’un.

 

L’essentiel : le visage de mon époux, de mon épouse, de mes enfants, de mes voisins, de mes collègues de travail, tous ceux qu’il faut aimer et avec qui il faut vivre pour faire battre un cœur et promouvoir l’amour.

 

L’essentiel, c’est aussi, en même temps, le visage des visages : celui que Jésus a appelé “Père” pour que tous les hommes se sachent fils et frères. Le commandement devient alors une force intérieure de croissance et son fruit : tout ce qui fait qu’un homme devient plus homme.

Deux voisins dans un village de Polynésie étaient tout le temps en guerre. La vie devenait insupportable pour l’un comme pour l’autre, mais aussi pour tout le village. Un jour, des anciens viennent dire à l’un de ces 2 hommes :

« La seule solution maintenant que tu as tout essayé, c’est que tu ailles voir Dieu ». « Je veux bien, dit-il, mais où ? »

« Rien de plus simple, il suffit que tu montes là-haut sur la montagne et, là, tu verras Dieu ».

Et le voilà parti, sans trop hésiter, à la rencontre de Dieu. Après plusieurs jours de marche et d’effort, il découvre que Dieu était là et l’attendait : il avait beau se frotter les yeux, il n’y avait aucun doute, Dieu avait le visage de son voisin. Ce que Dieu lui a dit, personne ne le sait.

En tout cas, de retour au village, ce n’était plus le même homme ! Mais, malgré sa gentillesse, tout allait aussi mal car l’autre voisin redoublait d’imagination pour inventer de nouvelles querelles.

Les anciens se dirent entre eux : « Lui aussi, il faut qu’il monte voir Dieu ».

Ils réussirent à le persuader… la suite… vous l’avez deviné : Dieu avait aussi le visage de son voisin. De ce jour-là, tout a changé et désormais, l’un et l’autre sont devenus les meilleurs amis du monde. Pas besoin d’aller en Polynésie : nous avons, vous avez, vous aussi, des parents, des voisins que vous ne voyez peut-être pas avec plaisir, avec joie : dans ce cas-là, « N’hésitez pas, allez voir Dieu sur la montagne ». C’est le 1er, le grand commandement, le plus important, le plus urgent : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit ».

Si je ne vais pas voir Dieu, jamais je ne pourrai voir ma voisine querelleuse, mon mari renfermé, ma femme nerveuse, cet enfant turbulent, ce collègue horripilant.

Si je ne monte pas sur la montagne, c’est-à-dire en compagnie de Dieu, je ne verrai que leurs défauts, leurs caricatures, leur mauvais côté ; jamais je ne m’apercevrai qu’ils sont fils de Dieu et qu’ils sont mes frères.

Attention ! Jésus dit que ces commandements sont semblables, il ne dit pas que les deux sont interchangeables : il ne faut donc pas privilégier l’un au profit de l’autre : c’est clair, il est aussi urgent d’aimer Dieu que ses frères, aussi urgent de donner l’exemple d’hommes tout donnés à Dieu, que de montrer des chrétiens tout donnés à leurs frères.

Donnons-nous autant d’importance à l’amour de Dieu qu’à celui de nos frères ? L’un ne va pas sans l’autre ! Il a certainement tort celui qui dit : « Moi, je m’occupe de mes frères, c’est comme si je m’occupe de Dieu – donc charité, mais la prière, la messe, l’union à Dieu… quand j’ai le temps ».

Il a certainement tort également celui qui dit : « Moi, je m’occupe de Dieu, je prie, je vais à la messe ; donc les autres, je n’ai pas besoin de m’en occuper ».

Le service de nos frères doit nous conduire à la prière et la prière, à son tour, doit nous inciter à l’attention aux autres. Si le Seigneur ne sépare pas ces deux commandements, s’il les met ensemble : c’est que, justement, les deux sont inséparables et que c’est ensemble : amour de Dieu, amour des autres, qu’ils doivent s’accomplir.

Pour reprendre l’histoire de tout à l’heure :

« Si je monte à la montagne pour voir Dieu, j’ai des chances d’y voir mon voisin et si, étant descendu de la montagne, je vois mon voisin, j’ai des chances d’y voir Dieu ».

Que ce soit le même amour qui nous rassemble dans cette Eglise comme des frères parce que, tous, nous sommes fils d’un même Père qui nous dit : « Aimez-vous comme je vous aime ». AMEN




Rencontre autour de l’Évangile – 30ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 34-40)

 » Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit « 

 

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons (Mt 22, 34-40)

Un certain harcèlement des responsables religieux s’acharne sur Jésus : ses adversaires se mettent en groupe et veulent à tout prix le prendre en défaut.

 

Soulignons les mots importants 

Pour entrer dans le texte, une remarque importante :

Cette page d’évangile est connue. Nous l’avons entendue de nombreuses fois. Pourtant nous sommes au cœur de l’enseignement de Jésus. Ce serait dommage de ne pas l’accueillir avec une oreille attentive, comme si c’était la première fois !

Les pharisiens et les sadducéens : en quoi ces deux groupes sont les adversaires de Jésus ?

Docteur de la Loi : Qui appelait-on ainsi ?

Maître : Que signifie ce titre adressé à Jésus par ses adversaires ?

Dans la Loi : Quelle est la signification de ce mot dans la Bible ?

Le grand, le premier commandement :

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur de toute ton âme et de tout ton esprit : Qu’est-ce que ce premier commandement engage dans la personne du croyant ?

Le second lui est semblable : que veut dire exactement ce mot « semblable » dans la bouche de Jésus ?

Ton prochain comme toi-même : quelle est la mesure de l’amour du prochain ?

L’Ecriture – La Loi et les Prophètes : par quel mot pourrions-nous remplacer ces expressions ?

Dépend de …Finalement, pour Jésus, quel est le grand principe qui permet d’interpréter les Ecritures et doit diriger la vie du croyant ?

 

Pour l’animateur  

Les pharisiens étaient opposés à Jésus parce qu’ils lui reprochaient de ne pas respecter la Loi avec toutes les traditions (613 obligations et interdits ») qui avaient été ajoutées, en particulier concernant le Sabbat. En fait Jésus avait redonné au Sabbat son vrai sens de ‘Jour du Seigneur’ pour l’adorer et aimer son prochain. Chose que les pharisiens avaient tendance à oublier.

Les sadducéens, une organisation de religieux qui ne croyaient pas en la résurrection : ils ont essayé de piéger Jésus. Et Jésus leur a fermé la bouche.

Docteur de la Loi : On appelait ainsi un expert dans la connaissance de la Bible, c’est-à-dire les Écrits de l’Ancien Testament. Il considère Jésus comme quelqu’un qui enseigne avec autorité puisqu’il l’appelle « Maître ». Dans les écoles rabbiniques de l’époque, la question qu’il pose à Jésus était une question classique : Quel est le plus grand commandement de toute la Loi ?

En réponse, Jésus cite le commandement de l’amour de Dieu qui engage l’homme au plus profond de lui-même (« le cœur »), qui engage ses énergies (« son âme ») et ses pensées (« son esprit »). Mais Jésus répond de manière originale en liant l’amour de Dieu et du prochain : il considère l’amour du prochain comme « comparable » et inséparable du premier commandement. L’un et l’autre sont aussi importants et urgents, mais pas interchangeables.

L’amour du prochain se mesure à l’amour qu’on porte à soi-même, car quiconque se sait aimer de Dieu s’aimera lui-même.

Dans la Bible, l’amour n’a rien à voir avec un sentiment qui change avec les humeurs d’affectivité : il s’agit de la décision de s’attacher à quelqu’un et des actes concrets qui expriment cette décision.  Aimer Dieu, c’est faire la volonté du Père, en mettant son cœur, ses énergies, sa vie même, à sa disposition.

Pour Jésus, le grand principe qui permet d’interpréter toute la Bible (« la Loi et les prophètes »), c’est le commandement double de la nouvelle alliance. C’est aussi le grand principe qui doit diriger toute la vie du croyant.

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS :

Dieu notre Père, malgré les cœurs fermés, malgré les oppositions, rien n’arrête ton projet d’Amour. Nous te demandons pardon. Et nous te rendons grâce pour Jésus Christ. C’est lui aujourd’hui la Vigne et nous sommes les sarments greffés sur lui pour porter toutes sortes de bons fruits. 

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

La Parole aujourd’hui dans notre vie             

Pour le chrétien l’amour de tous les hommes est inséparable de l’amour de Dieu, tout comme pour un arbre on ne pourrait séparer le tronc des racines : Dans quel sens ?

Pour Jésus, aimer Dieu son Père, c’est accomplir sa volonté. L’amour n’est pas simplement un sentiment : « Et pourquoi m’appelez-vous « Seigneur, Seigneur » et ne faites-vous pas ce que je vous dis ? »

Et nous, comment nous accueillons cette interpellation de Jésus ?

Notre prière, les sacrements que nous recevons nous portent-ils à aimer nos frères, à agir pour faire régner la paix… ?

L’amour inséparable de Dieu et du prochain est-il la grande règle qui dirige notre vie, nos comportements, nos relations ?

Ensemble prions 

Chant : Aimez-vous p.126 

Seigneur, notre Père, tu nous as faits à ton image, avec un coeur capable d’aimer.

Ce n’est pas toujours facile, d’aimer ! C’est un effort de tous les jours, car nous avons des préjugés sur les personnes, nous avons nos faiblesses, nos caractères ; nous avons aussi peur du regard des autres…mais tu nous dis que c’est possible.

Par ton Esprit qui a été répandu dans nos cœurs, nous pouvons essayer d’aimer toujours plus. Que nos paroles, nos pensées et nos actions tendent, chaque jour, à l’accomplissement de ta sainte volonté.

Par Jésus Christ, ton Fils bien-aimé, dans l’unité du Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Amen ! 

 

Pour lire ou imprimer le document en PDF cliquer ici :  30ième Dimanche du Temps Ordinaire

 

 

 

 

 




29ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 15-21) – Homélie du D. Alexandre ROGALA

Depuis plusieurs dimanches, la liturgie nous propose d’entendre des débats opposant Jésus et les autorités religieuses de son temps.  À ce stade de l’évangile, les autorités religieuses juives ont décidé d’arrêter Jésus et de le supprimer. Une seule chose les en empêche: Jésus est soutenu par les foules qui le prennent pour un prophète: « Tout en cherchant à larrêter, ils eurent peur des foules, parce quelles le tenaient pour un prophète. » (Mt 21, 46)

Si elles veulent éliminer Jésus, les autorités religieuses doivent d’une part, le discréditer en tant qu’enseignant auprès des foules, et d’autre part, le présenter aux autorités romaines comme un opposant.

Dans l’évangile de ce dimanche, pour arriver à leur fin, les pharisiens tendent à Jésus un piège presque parfait. Tout d’abord, les pharisiens ne s’adressent pas eux-mêmes à Jésus, car Jésus les connait et il sait bien qu’ils veulent le supprimer. En envoyant leurs disciples, c’est à dire en recourant à des « visages inconnus » de Jésus, les pharisiens espère que Jésus sera moins méfiant, et qu’il tombera dans leur piège (v. 16).

C’est une stratégie bien connue. Dans le monde du travail, quand des salariés veulent faire remonter un problème à leur patron, ils choisissent en général d’envoyer quelqu’un qui a une bonne relation avec le patron, ou quelqu’un qui ne s’est encore jamais plaint. Ici la stratégie des pharisiens est un peu la même.

Les disciples des pharisiens commencent par flatter Jésus sur la véracité de son enseignement. C’est une stratégie bien pensée, car cet éloge vise non seulement à diminuer la méfiance de Jésus, mais aussi à amener Jésus à faire une déclaration irréfléchie. En effet, s’il est vrai que Jésus ne regarde pas la condition de la personne, il doit le prouver en s’exprimant avec honnêteté, même quand il s’agit des autorités romaines et de l’empereur César.

« Est-il permis, oui ou non, de payer limpôt à César, lempereur ? »

Si Jésus exprime une réticence par rapport à l’impôt, ses adversaires pourront alors le faire accuser devant les autorités romaines en disant qu’il incite les juifs à ne pas payer l’impôt. Au contraire, si la réponse de Jésus est positive, il risque d’être discrédité auprès du peuple qui souffre sous le poids de l’impôt. Le peuple cesserait alors de le protéger.

Jésus reconnait la méchanceté et l’hypocrisie de ses adversaires (v. 18). Jésus leur demande donc de lui montrer « la monnaie de l’impôt ». Le détail est important, car le fait que ses adversaires aient sur eux cette monnaie romaine, signifie qu’ils payent bien l’impôt. Et s’ils paient l’impôt, leur question n’est pas une vraie question. Jésus révèle publiquement leur hypocrisie et intentions mauvaises. Les disciples des pharisiens ne l’ont pas abordé pour clarifier une situation, mais pour le tenter.

La parole conclusive de Jésus réduit à néant l’attaque de ses adversaires: « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. » (v. 21)

En disant cela, Jésus suggère que si en payant l’impôt, ses adversaires rendent à César ce qui lui revient, en revanche, ils ne rendent pas à Dieu ce qui est à Dieu. Rappelons nous la parabole des vignerons homicides qui ne veulent pas remettre le produit de la vigne au maître (Mt 21, 34ss.).

Et pour moi aujourd’hui ? Que pourrait signifier « rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu » ? Dans le verbe grec traduit en français par « rendre » (ἀποδίδωμι), il y a l’idée de répondre à des obligations suite à un contrat. Il me semble que les autres lectures de ce dimanche peuvent nous donner une idée de nos obligations en tant que bénéficiaires et contractants de l’Alliance avec le Seigneur.

La première lecture est un extrait du chapitre 45 du livre du prophète Isaïe. Ce prophète est actif autour de la fin de l’exil à Babylone, donc au moment où l’Empire Perse avec Cyrus à sa tête, monte en puissance et est en train de devenir le maître du Proche Orient. C’est ce même Cyrus qui permettra aux exilés de rentrer en Terre Promise.

Même si Cyrus est païen et qu’il ne connait pas le Seigneur (v. 4), le Seigneur l’a choisi pour faire sa volonté, c’est à dire libérer le peuple d’Israël exilé.

En reconnaissant que c’est le roi Cyrus qui permet concrètement aux exilés israélites de rentrer en Terre Promise, Isaïe « rend à César ce qui est à César ». Isaïe reconnait la puissance et la « bienveillance » de Cyrus. Toutefois, le prophète souligne bien qu’à travers Cyrus, c’est en réalité, Dieu qui agit. Cyrus n’est finalement qu’un instrument du Seigneur. Ce n’est donc pas Cyrus, mais le Seigneur qu’il faut adorer.

Dans le psaume 95, le Seigneur est loué pour sa gloire et sa puissance. Le psalmiste nous  invite à adorer Dieu, pour ce qu’il est: « Apportez votre offrande, entrez dans ses parvis. Adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté ». Comme dans la première lecture, le psaume nous rappelle que nous devons à Dieu « l’adoration ».

Dans la deuxième lecture, saint Paul et ses collaborateurs déclarent sans cesse rendre grâce à Dieu au sujet des croyants de Thessalonique en se souvenant de leur foi active, de leur espérance et de leur charité. L’action de grâce est une prière qui exprime à Dieu notre reconnaissance pour quelque chose que l’on a reçu.

Pour l’Apôtre et ses collaborateurs, il n’est pas question de fausse-modestie. Ils ont conscience du rôle essentiel qu’ils ont joué dans l’annonce de l’évangile à Thessalonique. Cependant, ils ont aussi l’humilité de reconnaître que la fécondité de cette annonce de l’Évangile ne vient pas d’eux, mais du Seigneur: « Nous le savons, frères bien-aimés de Dieu, vous avez été choisis par lui. En effet, notre annonce de l’Évangile na pas été, chez vous, simple parole, mais puissance, action de lEsprit Saint, pleine certitude » (1 Th 1, 5). Paul et ses collaborateurs reconnaissent l’action de Dieu dans leur ministère apostolique. Ils savent bien que sans le soutient de l’Esprit Saint, la mission à Thessalonique aurait été un échec. En « rendant grâce », c’est à dire, en exprimant à Dieu leur reconnaissance et en partageant avec lui leur joie, saint Paul et ses compagnons rendent à Dieu ce qui lui revient: le « mérite » (pour ainsi dire) du succès de leur prédication à Thessalonique.

En résumé, « rendre à Dieu ce qui est à Dieu » implique de (re)prendre conscience que Dieu est non seulement maître des événements et de l’histoire, mais qu’il agit aussi dans ma vie. Ainsi, je peux lui rendre, c’est à dire lui reconnaitre, ce qui lui revient: la gloire, la puissance, la sainteté, la royauté etc. et lui exprimer ma reconnaissance en l’adorant en vérité (cf. Jn 4, 24).

Prenons donc un moment de silence avant la suite de la célébration pour nous souvenir de tout ce que Dieu a fait pour nous, afin que nous puissions aujourd’hui lui rendre grâce en vérité. Amen !




Audience Générale du Mercredi 18 Octobre 2023

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 18 Octobre 2023


Catéchèse – La passion pour l’évangélisation : le zèle apostolique du croyant – 23. Saint Charles de Foucauld, cœur vibrant de la charité dans la vie cachée

Chers frères et sœurs, bonjour !

Nous poursuivons dans notre rencontre avec certains chrétiens témoins riches de zèle dans l’annonce de l’Évangile. Le zèle apostolique, le zèle pour l’annonce : et nous allons à la rencontre de certains chrétiens qui ont été des exemples de ce zèle apostolique. Aujourd’hui, je voudrais vous parler d’un homme qui a fait de Jésus et de ses frères les plus pauvres la passion de sa vie. Je me réfère à Saint qui, « grâce à son expérience intense de Dieu, a fait un cheminement de transformation jusqu’à se sentir le frère de tous » (Lett. enc. Fratelli tutti, 286).

Et quel a été le « secret » de Charles de Foucauld, de sa vie ? Après avoir vécu une jeunesse loin de Dieu, sans croire à rien sinon qu’à la recherche désordonnée du plaisir, il le confie à un ami non-croyant, auquel, après s’être converti en accueillant la grâce du pardon de Dieu dans la Confession, il révèle la raison de sa vie. Il écrit : « J’ai perdu mon cœur pour Jésus de Nazareth » [1]. Frère Charles nous rappelle ainsi que le premier pas dans l’évangélisation est d’avoir Jésus dans son cœur, c’est de « perdre la tête » pour Lui. Si ce n’est pas le cas, difficilement nous réussissons à le montrer par notre vie. Nous risquons en revanche de parler de nous-mêmes, dans notre groupe d’appartenance, d’une morale ou, pire encore, d’un ensemble de règles, mais pas de Jésus, de son amour, de sa miséricorde. Cela je le vois dans certains nouveaux mouvements qui émergent : ils parlent de leur vision de l’humanité, ils parlent de leur spiritualité et ils se sentent une nouvelle voie… Mais pourquoi ne parlez-vous pas de Jésus ? Ils parlent de beaucoup de choses, d’organisation, de chemins spirituels, mais ils ne savent pas parler de Jésus. Je crois qu’aujourd’hui, il serait bon que chacun d’entre nous se demande : « Est-ce que j’ai Jésus au centre de mon cœur ? Ai-je un peu perdu la tête pour Jésus ?

Charles le fait, au point de passer de l’attraction pour Jésus à l’ imitation de Jésus. Conseillé par son confesseur, il se rend en Terre Sainte pour visiter les lieux où le Seigneur a vécu et pour marcher où le Maitre a marché. En particulier, c’est à Nazareth qu’il comprend le devoir de se former à l’école du Christ. Il vit une relation intense avec le Seigneur, passe de longues heures à lire les Évangiles et se sent comme son petit frère. Et connaissant Jésus, nait en lui le désir de le faire connaitre : cela survient toujours ainsi. Lorsque chacun de nous connait plus Jésus, nait le désir de le faire connaitre, de partager ce trésor. En commentant le récit de la visite de la Vierge à Elisabeth, il Lui fait dire, à la Vierge, à lui : « Je me suis donné au monde… portez-moi au monde ». Oui mais comment faire ? Comme Marie dans le mystère de la Visitation : « en silence, par l’exemple, par la vie » [2]. Par la vie, parce que « toute notre existence, écrit frère Charles – doit crier l’Évangile » [3]. Et tant de fois notre existence crie mondanité, crie tant de choses stupides, choses étranges et lui nous dit : “Non, toute notre existence doit crier l’Évangile”.

Il décide alors de s’installer dans des régions lointaines pour crier l’Évangile dans le silence, en vivant dans l’esprit de Nazareth, dans la pauvreté et de manière cachée. Il se rend dans le désert du Sahara, parmi les non-chrétiens, et y arrive en ami et en frère, apportant la douceur de Jésus Eucharistie. Charles laisse que ce soit Jésus à agir silencieusement, convaincu que la « vie eucharistique » évangélise. En effet, il croit que le Christ est le premier évangélisateur. Il reste donc en prière aux pieds de Jésus, devant le tabernacle, environ dix heures par jour, sûr que la force évangélisatrice se trouve là et réalisant que c’est Jésus qui le rend proche de tant de frères lointains. Et nous, je me demande croyons-nous au pouvoir de l’Eucharistie ? Notre sortie vers les autres, notre service, trouve-t-il là, dans l’adoration, son commencement et son accomplissement ? Je suis convaincu que nous avons perdu le sens de l’adoration : nous devons le retrouver, en commençant par nous, personnes consacrées, évêques, prêtres, religieuses et toutes les personnes consacrées. « Perdre » du temps devant le tabernacle, retrouver le sens de l’adoration.

Charles de Foucauld écrivait : « Tout chrétien est un apôtre » [4] et rappelle à un ami qu’ « à côté des prêtres, nous avons besoin de laïcs qui voient ce que le prêtre ne voit pas, qui évangélisent avec une proximité de charité, avec une bonté pour tous, avec une affection toujours prête à se donner » [5]. Les saints laïcs, pas les arrivistes, mais ces laïcs, hommes et femmes qui sont amoureux de Jésus, font comprendre au prêtre qu’il n’est pas un fonctionnaire, qu’il est un médiateur, un prêtre. Combien nous, prêtres, avons besoin d’avoir à nos côtés ces laïcs qui croient sérieusement et qui, par leur témoignage, nous enseignent le chemin. Charles de Foucauld, avec cette expérience laïque, anticipe l’époque du Concile Vatican II, il perçoit l’importance des laïcs et comprend que l’annonce de l’Évangile est la responsabilité du peuple de Dieu tout entier. Mais comment accroître cette participation ? Comme Charles de Foucauld l’a fait : en se mettant à genoux et en accueillant l’action de l’Esprit, qui suscite toujours de nouvelles manières pour s’engager, rencontrer, écouter et dialoguer, toujours dans la collaboration et dans la confiance, toujours en communion avec l’Église et avec les pasteurs.

Saint Charles de Foucauld, figure qui est une prophétie pour notre temps, a témoigné de la beauté de la communication de l’Évangile à travers l’ apostolat de la douceur : lui qui se sentait « frère universel » et accueillait tous, nous montre la force évangélisatrice de la douceur, de la tendresse. Ne l’oublions pas, le style de Dieu ce sont trois paroles : proximité, compassion et tendresse. Dieu est toujours proche, toujours compatissant, toujours tendre. Et le témoignage chrétien doit suivre ce chemin : de proximité, de compassion, de tendresse. Et il était ainsi doux et tendre. Il voulait que quiconque le rencontrait voit, à travers sa bonté, la bonté de Jésus. Il disait qu’il était en fait « le serviteur de quelqu’un qui est bien meilleur que moi » [6]. Vivre la bonté de Jésus l’entrainait à tisser des liens fraternels et d’amitié avec les pauvres, avec les Touaregs, avec ceux qui sont les plus éloignés de sa mentalité. Peu à peu, ces liens généraient la fraternité, l’inclusion, l’appréciation de la culture de l’autre. La bonté est simple et demande d’être des gens simples, qui n’ont pas peur de donner un sourire. Et avec son sourire, avec sa simplicité, Frère Charles a témoigné de l’Évangile. Jamais de prosélytisme, jamais : le témoignage. L’évangélisation ne se fait pas par le prosélytisme, mais par témoignage, par attraction. Demandons-nous alors enfin si nous portons en nous et aux autres la joie chrétienne, la douceur chrétienne, la tendresse chrétienne, la compassion chrétienne, la proximité chrétienne. Merci.

* * *

Je salue cordialement les pèlerins de langue française présents à cette audience, notamment les groupes de paroissiens et d’élèves venus de Suisse, de Côte d’Ivoire, de France et du Maroc, notamment la Délégation de l’Institut oecuménique de théologie Al Mowafaqa, accompagnée par le Cardinal Cristobal Lopez Romero et Madame Karen Smith.

Puisse saint Charles de Foucauld, nous apprendre la valeur du silence et la force évangélisatrice d’une vie cachée en Dieu.

Que le Seigneur vous bénisse !




Ordination Épiscopale de Mgr Pascal CHANE TENG (15/10/2023)

Voici quelques photos prises par Jean Bernard, de l’équipe Cycle Long, de l’ordination épiscopale de Mgr Pascal Chane Teng, célébrée le dimanche 15 octobre 2023 sur l’esplanade de l’Eglise du Chaudron…

A la fin de la célébration, Mgr Pascal Chane Teng nous a partagés ces quelques lignes de la première Lettre de St Paul à Timothée (1Tm 1,12-14) : « Je suis plein de gratitude envers celui qui me donne la force, le Christ Jésus notre Seigneur, car il m’a estimé digne de confiance lorsqu’il m’a chargé du ministère, moi qui étais autrefois blasphémateur, persécuteur, violent. Mais il m’a été fait miséricorde, car j’avais agi par ignorance, n’ayant pas encore la foi ; la grâce de notre Seigneur a été encore plus abondante, avec elle la foi, et avec l’amour qui est dans le Christ Jésus ». Et il a poursuivi en souhaitant être le Serviteur, pour tous, de cette Miséricorde…

Toute l’équipe du Sedifop, à laquelle il a appartenu pendant des années en enseignant la Théologie au Cycle Long pour les deux groupes de Saint Denis, l’assure de son soutien et de sa prière dans l’accomplissement de cette oeuvre de Miséricorde, à laquelle nous sommes tous heureux de participer pour la part qui est la nôtre…

D. Jacques Fournier

Si vous désirez voir la célébration en son entier, il vous suffit de cliquer sur le lien ci-dessous:

Si vous désirez lire l’homélie donnée en ce jour par Mgr Gilbert AUBRY, il suffit de cliquer sur le lien suivant :

Accueil et homélie Mgr Gilbert Aubry (15/10/23)

Si vous désirez lire le mot de remerciement final de Mgr Pascal CHANE TENG, il suffit de cliquer sur le lien suivant :

Remerciements de Mgr Pascal Chane-Teng

 

 




29ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 15-21) – par Francis COUSIN

« Dieu ou César … une histoire d’image ! »

« Maitre (…), donne-nous ton avis : Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à César, l’empereur ? »

C’est la question que les pharisiens et les hérodiens posent à Jésus.

Jésus ne répond pas directement ; il s’en sort par une pirouette, avec la pièce de monnaie qui sert à payer l’impôt et la figure, l’image qui s’y trouve …

Car pour lui, la question posée n’est pas essentielle, elle est même biaisée car l’impôt est dû à l’occupant, qu’on le veuille ou non … et selon la réponse de Jésus, on pourra l’accuser d’être pro-Romain ou traître à la nation juive, quelqu’un qui renie son Dieu.

Or, l’essentiel pour Jésus est dans la relation à Dieu … relation qui semble aussi loin des pharisiens et des hérodiens que ne l’est César à Rome …

Alors qu’en fait, Dieu est aussi proche d’eux que ne le sont les pièces d’argent dans leurs besaces pendues à leur ceinture …

Mais ils ne le savent pas, ou refusent de le savoir : Dieu est là, juste en face d’eux en la personne de son fils Jésus, véritable image de Dieu : « Le Père et moi, nous sommes UN. » (Jn 10,30).

Et cela dès avant la création du monde, avant que l’homme et la femme ne fussent créés : « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme. » (Gn 1,27).

La réponse finale de Jésus : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. », est peut-être énigmatique.

La première partie est évidente, … mais pas la seconde … et je crois que c’est cela qui a déstabilisé les pharisiens et les hérodiens : ils ne l’ont pas compris … et ils ont conduit Jésus à la mort …

« Rendre à Dieu ce qui est à Dieu. » … c’est aussi pour nous … et c’est difficile de le faire, il y a tellement de différence entre Dieu et nous … à commencer par l’amour des autres

Toute l’action de Jésus était conduite par l’amour pour les humains, à l’image de Dieu le Père, qui est tout amour

Et tous, nous avons à faire ce choix

entre ce qui est du Dieu d’amour et ce qui est du monde,

    entre ce qui est du Dieu d’amour et ce qui est des humains,

entre ce qui est du Dieu d’amour et ce qui est de l’argent,

entre ce qui est du Dieu d’amour et ce qui est du pouvoir.

Et l’actualité récente nous montre bien que ce n’est pas gagné, qu’il y a encore beaucoup à faire, un niveau individuel ou au niveau international : la guerre en Ukraine qui traine, dans le Haut-Karabakh, le conflit entre Israël et le Hamas, l’attentat d’Arras, du rond-point du Sacré-Cœur, etc …

Où est l’amour des autres ?

« Rendre à Dieu ce qui est à Dieu, c’est cela pour chacun de nous : à partir de notre cœur, de plus en plus ressembler à Jésus et le rayonner autour de nous, même sans le savoir, et surtout sans trop faire exprès. Y a-t-il un autre rayonnement possible pour un disciple de Jésus que cette discrète mise en lumière de l’image de Jésus en nous, bien plus efficace que toute réussite ou tout autre succès qui risque de devoir quelque chose à l’autre image, celle d’un quelconque César d’ici-bas qui ne cesse de nous fasciner, même malgré nous ? » (André Louf, 1999).

Seigneur Jésus,

Tu nous invites à être image de toi

auprès des autres,

même sans le savoir,

avoir toujours l’amour des autres

dans toutes nos actions.

Mais nous ne le pourrons

que si tu nous aides,

par l’Esprit Saint.

 

Francis Cousin

Cliquer sur le lien ci-dessous pour accéder à l’image illustrée :

Prière dim ord A 29°

 




29ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 22, 15-21) – Homélie du Père Louis DATTIN

Rendez à César

Mt 22, 15-21

 

En ce même dimanche, nous sommes invités à réfléchir sur l’action missionnaire de l’Église, sur son expansion et sur son influence sur les hommes de notre époque et aussi, sur la célèbre formule « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu » : la question délicate, parfois épineuse, des rapports de la religion et de la politique, de l’Eglise et de l’état, de la laïcité.

 

La question était déjà fort compliquée au temps de Jésus : autant dire que c’était une question piège. Si Jésus répond qu’il faut payer l’impôt à César (c’est-à-dire à l’occupant romain), il perd toute sa popularité auprès du peuple qui ne supporte pas l’occupation romaine : il sera traité de « collaborateur ».

Par contre, s’il dit qu’il ne faut pas payer, il sera mis dans la catégorie des résistants, des subversifs : il sera facile de le dénoncer au pouvoir en place.

Essayons de comprendre toute la pensée de Jésus et de l’appliquer à notre époque : « Rendez à césar ce qui est à César ».

Dans la mentalité de l’Ancien Testament : tout pouvoir vient de Dieu. Ainsi dans la 1ère lecture, le roi Cyrus, un étranger et un païen, devient un instrument entre les mains de Dieu. Dieu se sert de lui pour accomplir ses volontés. Ce sera par Cyrus que Dieu permet au peuple juif de rentrer d’exil et de retourner au pays.

« Je l’ai rendu puissant alors qu’il ne me connaissait pas, pour que l’on sache, de l’Orient à l’Occident, qu’il n’y a rien d’autre que moi ».

A travers les hommes politiques qui se succèdent et se prennent la place les uns aux autres, c’est Dieu qui reste le Maître des événements : Maître de l’histoire. Il en contrôle le déroulement et St-Paul dira la même chose aux premiers chrétiens : ils ont donc à se soumettre à l’autorité civile dans la mesure où celle-ci essaie de respecter l’homme, lui reconnaître ses droits et lui assurer sa liberté.

« Rendez à César ce qui est à César » : nul ne peut mépriser, ni même ignorer, encore moins s’il est missionnaire, la vie civile d’un pays, ses institutions, ses orientations sociales et civiques. On ne peut pas couper la vie humaine en tranches séparées comme si les chrétiens et l’Église pouvaient ignorer la politique.

Tout chrétien missionnaire doit tenir compte de l’opinion de la vie de la cité, du déroulement des affaires, de la législation familiale, sociale, celles du travail, de la santé, de l’enseignement, de la sécurité, …

Il est vrai que Jésus a toujours refusé de jouer le rôle d’un messie socio-politique. Rappelez-vous la 3e tentation dans le désert : « Tous ces pays, dit Satan, je t’en donne le pouvoir, si te jetant à mes pieds, tu m’adores ».

Rappelez-vous sa fuite dans le désert pour prier, quand la foule veut le faire roi après la multiplication des pains.

Rappelez-vous sa réponse à Pilate, qui lui demande s’il est roi :

« Oui, je le suis, mais mon Royaume n’est pas de ce monde ! »

Pourtant, dans ce « Rendez à césar ce qui est à César », on peut voir une invitation à tenir compte de ̏ l’autorité établie ̋, à respecter ses droits.

 Mais en prenant cette attitude, Jésus introduit dans le monde antique une distinction révolutionnaire : il « désacralise la politique « . César n’est jamais « que » César. Il n’est pas Dieu.

Alors, qu’il continue à exercer ses fonctions. Oh ! Tant bien que mal avec ses grandeurs et ses servitudes ! Mais c’est une fonction laïque, humaine, soumise à tous les aléas et à la complexité des réalités socio-politiques, des régimes, des idéologies.

Mais tout n’est pas dit ! Voyons la suite ! « Rendez à Dieu ce qui est à Dieu ! » Nous autres, hommes modernes, nous savons maintenant où conduit toute politique qui prétend se moquer de ce « Rendez à Dieu ce qui est à Dieu ».

Les sociétés « sans Dieu « , qu’elles se prétendent de droite ou de gauche : nazisme ou marxisme, celle de Hitler ou de Staline, des talibans ou de Mao de la Corée du Nord , sont des sociétés inhumaines. Dès que l’État se construit sans Dieu, il écrase l’homme et cela même où ? Aux camps de concentrations, au goulag ou à la prison ou à l’asile psychiatrique, car César, tout César qu’il est, doit se soumettre à Dieu et rendre à Dieu ce qui lui appartient.

On pose à Jésus une question sur les devoirs du citoyen à l’égard du pouvoir, question temporelle : Jésus répond à une autre question sur les devoirs du chrétien à l’égard de Dieu, question spirituelle.

« Rendez à Dieu ce qui est à lui » et c’est toute la vie de Jésus qui a crié cela et voilà l’essentiel de la tâche du chrétien missionnaire dans notre monde d’aujourd’hui : reconnaître Dieu, lui rendre tout ce à quoi, il a droit, savoir le servir, lui, le premier, mieux le connaître, mieux l’aimer.

La politique, si importante soit-elle, puisqu’en principe elle est l’art du bien commun, n’est pas le tout de l’homme, n’est pas la part la plus essentielle de l’homme. “L’homme ne vit pas seulement de pain ”, ni de logement, ni de marché, ni de subventions, ni de production. “Créé à l’image de Dieu”, “à l’effigie de Dieu”, l’homme baptisé a pour destin, pour avenir, de partager la vie même de Dieu !

« Montrez-moi la monnaie de l’impôt ! Quelle image y a-t-il ? Celle de César ? » Mais l’homme, lui, de qui est-il l’image ? Il est « créé à l’image de Dieu », à l’effigie de Dieu et non à celle de César. «Rendez donc à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Rendez l’homme, image de Dieu, fils de Dieu, non pas à un souverain qui se prétend dictateur, mais à un Dieu qui se prétend Père !

Je finirai par ce beau texte de St-Augustin, il résume tout :

« De même que césar cherche son image sur une pièce de monnaie, Dieu cherche son image en toi, en ton âme !

Que réclame de toi, César ? Son image !

Que réclame de toi, le Seigneur ? Son image !

Mais l’image de César est sur une pièce de monnaie,

l’image de Dieu est en toi.

Si la perte d’une pièce de monnaie te fait pleurer,

parce que tu as perdu l’image de César,

combien plus, dois-tu pleurer d’abîmer ou de ternir, en toi,

cette image de Dieu qui fait toute ta valeur, toute ta grandeur ».

« Vous êtes créés, vous, à l’image de Dieu », « Dieu créa l’homme à son image, il le fit ». Un chrétien, à plus forte raison un missionnaire chrétien, c’est celui qui rend transparent dans sa vie l’image de Dieu. Son Baptême a gravé en lui cette image, sa confirmation la rend visible à son entourage : il est le témoin de l’amour de Dieu, du pardon de Dieu, de la tendresse de Dieu, de la patience de Dieu, de la paternité de Dieu. Il devient le miroir fidèle, le messager de tout ce que Dieu veut nous confier. Puisqu’il faut « rendre » à César son image sur sa pièce de monnaie, symbole de vie économique et sociale, rendons à Dieu, à plus forte raison, son image : l’homme tout entier, marqué à son « effigie ».

« Comment rendrai-je à Dieu tout le bien qu’il m’a fait ? », se demandait un psalmiste, et il répond : « J’élèverai la coupe du Salut et j’invoquerai le nom du Seigneur ». Au cours de cette messe, c’est ce que nous allons faire maintenant. AMEN