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6ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

L’amour remplace le code

 Mt 5, 17-37

C’est un message extraordinaire que Jésus nous livre aujourd’hui. Jusqu’à lui, et, pour beaucoup, jusqu’à maintenant, on a cru qu’être religieux, faire partie d’une religion, c’était accomplir un certain nombre de gestes bien précis : ne pas tuer, ne pas commettre d’adultère, dire la vérité, offrir à Dieu, ne pas faire de faux serments ; bref, observer un code.

. Pour les juifs : ce seront les dix commandements donnés à Moïse par Dieu.

. Pour les musulmans : les cinq piliers que sont la prière, l’aumône, le pèlerinage, le jeune et la profession de foi.

Il n’y avait qu’à mettre cela en pratique et l’on « était quitte ». On était

 » en règle avec Dieu « , comme l’on disait : « Accomplissez un certain nombre de gestes prescrits et vous serez sauvés ». « Obéissez à un règlement, moyennant quoi on ne vous fera pas d’histoires ».

 Et voilà que Jésus vient nous dire aujourd’hui : « Attention, vous faites fausse route. Vous ne devez pas vous en tenir là ».

Ce ne sont pas tant les gestes que vous faites, qui comptent aux yeux de Dieu mais le cœur, l’intention, l’esprit avec lesquels vous accomplissez ces gestes. Un bon pratiquant qui se contenterait d’appliquer matériellement un ordre de Dieu ne serait pas un vrai chrétien. Obéir à un ordre, accomplir un commandement, exécuter une consigne, n’engage pas le cœur ; on peut le faire, sans être d’accord au fond de soi.

C’est ce que font les ouvriers à la chaîne, dans un atelier ; un serviteur à la voix de son maître ; une domestique à l’injonction de sa patronne : ils obéissent, ils font ce qu’on leur dit de faire : ça n’engage pas leur personne, ils le font et puis c’est tout ! Jésus dit aux chrétiens :

« La fidélité à des actes extérieurs ne suffit pas ! »

La vraie fidélité à Dieu va beaucoup plus loin : elle ne se contente pas d’observances extérieures, visibles, vérifiables. Elle doit venir du plus intime de notre cœur, du plus profond de nos désirs, de la plus droite de nos intentions, du plus exigeant de notre conscience, autrement dit, au lieu de faire ce que vous faites avec une mentalité de salarié qui fait son travail et pas plus, faites la même chose mais avec une  » mentalité de fils  » qui aime son père et qui travaille avec lui, à la même œuvre. Faites-le avec cœur, un cœur qui aime, faites-le, en vous engageant vous-même, en y mettant tout votre cœur, uni à l’Esprit même de Dieu qui agit avec vous.

Et cela change tout ! Transforme tout ! Rappelez-vous certaines tâches qu’il fallait que vous fassiez à tout prix et que vous n’aimiez pas faire : c’était une corvée, tandis que réaliser un projet qui vous tenait à cœur, avec quel enthousiasme vous le réalisiez !

C’est toute la différence entre une religion sans amour où l’on obéit à des commandements, par crainte, par calcul, où l’on paie sa redevance à une assurance vie-éternelle, et une religion  » vie de famille  » où chacun apporte aux autres et au Père, tout son amour, toute sa joie à faire le plus et le mieux possible !

Avec Jésus, nous passons de la religion du geste à la religion du cœur. C’est pourquoi dans cet Evangile, il répète :

« Vous avez appris qu’il a été dit, mais moi, je vous dis ».

Voilà pourquoi les commandements qui sont toujours valables sont de beaucoup dépassés par les Béatitudes.

« Je ne suis pas venu supprimer la loi, mais l’accomplir… », c’est-à-dire la transformer de telle façon qu’elle ne soit plus seulement une obéissance mais une preuve d’affection, un changement de mentalité, une exigence du cœur.

. Ne pas tuer ! Bien sûr ! Mais bien plus : repousser toute rancœur, colère et vengeance, pardonner, se réconcilier.

. Ne pas commettre d’adultère ! Bien sûr ! Mais encore : repousser tout désir, tout regard possessif qui tend à considérer la jeune fille ou la femme comme un objet à utiliser ou à consommer, alors qu’elle est une fille de Dieu à respecter et à aimer pour elle-même.

. Avoir un cœur pur, limpide, transparent : c’est voir toutes choses, ou tout être, avec le regard même de Dieu !

. Ne pas faire de faux serments ! Bien sûr ! Mais allez plus loin encore en étant d’une parfaite franchise dans nos rapports avec les autres et que votre  » oui  » soit un  » oui  » franc, net, droit ; et quand vous dites  » non « , que ce soit un  » non  » où il n’y ait pas de sous-entendus.

Notre religion, faut-il le redire, ce n’est pas d’observer un règlement, d’appliquer des consignes. Ce n’est pas être fidèle à une morale. C’est d’être fidèle par amour à Dieu lui-même qui voit jusqu’au fond de nos cœurs.

C’est parce que nous sommes des fils et non des serviteurs ou des clients de Dieu que nous agissons, pas seulement par des actions mais aussi par nos sentiments, par nos désirs personnels pour témoigner à notre Père, un amour filial et lui faire voir notre attachement.

Quand on a observé une loi, on s’est mis en règle avec la loi. On a la conscience tranquille, le sentiment du devoir accompli : point final… c’est terminé. Mais quand il s’agit de répondre à un appel de celui qui nous aime : notre Père du ciel, on ne cherche plus à se mettre en règle avec une loi mais on cherche à l’aimer, à se mettre en route avec lui, à le rejoindre, à s’attacher à lui.

Regardez comme Jésus se comportait à l’égard de son Père : « Ma nourriture, c’est de faire sa volonté ». « Je fais toujours ce qui lui plait ». Pour lui, c’était un besoin, une joie : ça n’était jamais fini !

Le monde de l’Ancien Testament était un ensemble de règles, fort bien faites pour faciliter la vie en commun, la vie en société. Jésus nous appelle maintenant à dépasser cet  » art de vivre ensemble  » pour adopter un « nouvel art de vivre  » : l’art de vivre « en fils, en filles de Dieu ».

Ainsi, c’est bien un monde nouveau qui commence, un monde où l’on ne se contente plus d’une fidélité extérieure, mais un monde où l’on vivra dans l’amour fraternel et dans l’amour filial de Dieu, un monde où l’on vivra sous le souffle de « l’Esprit de Dieu » qui est  » Esprit d’amour « .

C’est ce monde-là que Jésus, aujourd’hui, nous invite à bâtir, jour après jour, animés par son Esprit, dans la liberté, le choix.

Dieu, aujourd’hui, nous propose plus : il nous propose mieux. AMEN




5 ième Dimanche du Temps Ordinaire : Tous appelés, par la Miséricorde de Dieu, à être Lumière (D. Jacques FOURNIER ; Mt 5,13-16 ; Is 58,7-10).

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :

« Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel devient fade, comment lui rendre de la saveur ? Il ne vaut plus rien : on le jette dehors et il est piétiné par les gens.

Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée. Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison.

De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux » (Mt 5,13-15).

Cet évangile de Matthieu est centré sur les croyants : « Vous êtes le sel de la terre… Vous êtes la lumière du monde… Que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux »…

Mais lorsque St Matthieu a écrit son Evangile, il avait St Marc sous les yeux : « En ce temps-là, Jésus disait à la foule : « Est-ce que la lampe est apportée pour être mise sous le boisseau ou sous le lit ? N’est-ce pas pour être mise sur le lampadaire ? Car rien n’est caché, sinon pour être manifesté ; rien n’a été gardé secret, sinon pour venir à la clarté. Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! » Et il leur disait encore : « Faites attention à ce que vous entendez ! » (Mc 4,21-24).

 

St Marc lance donc un appel à écouter de tout cœur Celui qui parle, « le Verbe fait chair » (Jn 1,14), Celui qui ne fait que dire en sa chair les Paroles qu’il a lui-même entendues du Père : « Je dis la vérité que j’ai entendue de Dieu » (Jn 8,40). « Ce que je dis, tel que le Père me l’a dit, je le dis » (Jn 12,50). « Père, les Paroles que tu m’as données, je les leur ai données » (Jn 17,8).

En effet, Jésus est la Révélation, dans la chair, du Mystère de Dieu : « Qui m’a vu a vu le Père », dit-il à Philippe (Jn 14,9). St Paul écrit à la fin de sa Lettre aux Romains : « Jésus Christ : révélation d’un Mystère gardé depuis toujours dans le silence, Mystère maintenant manifesté au moyen des écrits prophétiques, selon l’ordre du Dieu éternel, mystère porté à la connaissance de toutes les nations pour les amener à l’obéissance de la foi » (Rm 16,25-27).

« Qui m’a vu a vu le Père »… En effet, il est « Lumière née de la Lumière » en tant que « né du Père avant tous les siècles ». En effet, depuis toujours et pour toujours, « le Père aime le Fils et il a tout donné, il donne tout, en sa main », « tout ce qu’il a », tout ce qu’il est (Jn 3,35 ; 16,15 ; 17,10), de telle sorte que le Fils est l’éternel « engendré non pas créé, consubstantiel au Père », c’est-à-dire de même nature que le Père (Crédo)… Le Père « est Amour » ? Le Fils « est Amour » (1Jn 4,8.16). Le Père « est Lumière » ? Le Fils « est Lumière » (1Jn 1,5) en tant qu’il reçoit du Père de toute éternité d’être Lumière, comme le Père… Qui voit la Lumière du Fils voit donc la Lumière du Père, puisque c’est la même ! « Qui m’a vu a vu le Père »…

Voilà ce qui « a été manifesté », ce qui « est venu à la clarté ». « Je Suis la Lumière du monde » (Jn 8,12), et cette Lumière est celle de l’Amour qui ne cesse de toute éternité d’être Amour… Dieu ne peut pas ne pas Être ce qu’il Est. Nous sommes fidèles ? « Dieu est Amour »… Nous sommes infidèles ? « Dieu est Amour »… C’est ce qu’affirme St Paul lorsqu’il écrit : « Si nous sommes infidèles, Dieu, Lui, reste à jamais fidèle, car il ne peut se renier lui-même » (2Tm 2,13), il ne peut pas ne pas être ce qu’il Est, et il « Est Amour » (1Jn 4,8.16)…

Or l’Amour, par nature, est Don de tout ce qu’il Est en Lui-même… « Le Père aime le Fils et il a tout donné en sa main » (Jn 3,35)… Ce Don est souvent évoqué dans la Bible avec l’image du Soleil, ou de la Lumière : « Le Seigneur Dieu est un Soleil… Il donne la grâce, il donne la gloire » (Ps 84(83),12) en donnant « l’Esprit de la grâce » (Hb 10,29), « l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu » (1P 4,14), l’Esprit Saint (1Th 4,8 ; Jn 4,10-14 ; Ac 8,19-20), c’est-à-dire en donnant ce qu’il Est en Lui-même, car « Dieu Est Esprit » (Jn 4,24) et Dieu est Saint… Ce Don gratuit de l’Amour, ce Don de l’Esprit Saint, ce Don que le Père fait au Fils de toute éternité, Don par lequel il l’engendre en Fils, voilà ce que le Fils est venu nous communiquer pour que nous aussi nous soyons engendrés comme Lui à la Plénitude même de Dieu (Jn 1,12 ; 3,1‑8 ; Rm 8,28-30). Ce Don est aussi souvent évoqué avec l’image de l’Eau Vive : « Le dernier jour de la fête, le grand jour, Jésus, debout, s’écria : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! selon le mot de l’Écriture : De son sein couleront des fleuves d’Eau Vive. Il parlait de l’Esprit que devaient recevoir ceux qui avaient cru en Lui » (Jn 7,37-39).

Tel est le Don de Dieu, ce Don de l’Esprit Lumière, l’Esprit Eau Vive, qui est offert gratuitement à tout homme, quel qu’il soit, où qu’il soit : « Votre Père, qui est aux cieux, fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5,45). « Le Verbe était la Lumière véritable, qui éclaire tout homme venant dans le monde » (Jn 1,9). Or, « la Lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas saisie » (Jn1,5), les ténèbres ne l’ont pas empêchée de briller…

Autrement dit, le pécheur, qui « habite les ténèbres et l’ombre de la mort », s’il consent à recevoir le Don gratuit de l’Amour, cette Lumière de « l’Astre d’en Haut » (Lc 1,76-79), ce « Soleil de justice qui apporte la guérison dans ses rayons » (Ml 3,20) en mettant en œuvre « le pardon des péchés » au cœur du pécheur, ce pécheur « ténèbres » devient par Elle « Lumière » ! Merveille de l’Amour que nous, dans notre misère, nous appelons « Miséricorde »… « Jadis vous étiez ténèbres », écrit St Paul aux chrétiens d’Ephèse, « mais à présent », par votre foi, par l’obéissance de votre foi, en consentant à recevoir le Don gratuit de l’Amour, « vous êtes Lumière dans le Seigneur » (Ep 5,8), c’est-à-dire « Lumière » en tant qu’ils sont unis au Christ « Lumière du monde » (Jn 1,8) dans la Communion d’un même Esprit (2Co 13,13), dans « l’unité de l’Esprit » (Ep 4,3), un Esprit donné gratuitement par l’Amour, un Esprit reçu gratuitement dans l’Amour…

C’est cet Esprit qui est « Lumière » et « Vie » (Jn 8,12 ; cf. Rm 6,23) qui « brille » dans le Fils, le Fils le recevant du Père de toute éternité, ce même Esprit qui « brille » dans le croyant, ce pécheur qui consent à le recevoir du « Père des Lumières » (Jc 1,17), ce « Père des Miséricordes » (2Co 1,3) qui s’est manifesté avec le Fils et par le Fils, Lui qui « nous a visités dans les entrailles de Miséricorde de notre Dieu » (Lc 1,76-79)…

Or cet « Esprit » est « Amour » (Jn 4,24 et 1Jn 4,8.16), et « le propre de l’Amour est de se répandre, de se donner » (Pape François, audience du 14 juin 2017). Reçu, il ne peut donc que pousser à donner… Il s’agit donc de recevoir, de donner et de continuer à donner en continuant à recevoir, et cela sur la base même de ce que l’on reçoit…

Telle est toute la dynamique évoquée en Is 58,7-10 : « Partage ton pain avec celui qui a faim,… Donne à celui qui a faim ce que toi, tu désires »… Donne de ton pain… « Couvre celui que tu verras sans vêtement », comme St Martin de Tours qui, légionnaire dans l’armée romaine, coupa sa cape de soldat en deux pour couvrir un pauvre qu’il croisait sur le chemin… Alors, « ta Lumière jaillira comme l’aurore »… Il ne peut pas en être autrement puisqu’elle est déjà là, Lumière de l’Amour qui pousse à donner… Et c’est vraiment cette Lumière gratuite de l’Amour qui est évoquée en Isaïe, puisqu’elle est donnée au pécheur au cœur même de ses ténèbres : « Ta Lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera Lumière de midi », Lumière resplendissante, la Lumière même de ce « Dieu » qui « Est lumière » (1Jn 1,5), « splendeur et majesté, puissance et beauté » (Ps 96(95),6)…

« Le péché m’a fait perdre mes forces » (Ps 31(30),11) ? « Tes forces », écrit Isaïe, que tu avais perdues par suite de tes fautes, « reviendront vite », car cette « Lumière » est celle de « l’Esprit » (1Jn 1,5 ; Jn 4,24), « l’Esprit de Puissance » (Lc 1,35 ; 4,14) et de « Force » (Ac 1,8 ; 1Tm 1,7)…

« Devant toi marchera ta justice » écrit encore Isaïe… Mais dans le Livre de l’Exode, c’était le Seigneur Lui-même qui marchait devant son Peuple : « Le Seigneur lui-même marchait à leur tête : colonne de nuée le jour, pour leur ouvrir la route – colonne de feu la nuit pour les éclairer ; ils pouvaient ainsi marcher jour et nuit » (Ex 13,21 TOB). Mais le prophète Jérémie l’appelle par deux fois : « Le Seigneur est notre justice » (Jr 23,5-6 ; 33,16). Il est, en effet, Celui qui justifie l’injuste, gratuitement, par amour (Rm 3,21-26 ; 5,1-11), et cela par le Don de l’Esprit qui justifie (1Co 6,11), « l’Esprit qui sanctifie » (2Th 2,13)…

Et si « le Seigneur marche devant », il est aussi Celui qui, dans le Livre de l’Exode, se tient « derrière » Israël, le protégeant ainsi de ses ennemis, les Egyptiens, qui s’étaient lancés à leur poursuite : « L’Ange de Dieu », Dieu Lui-même (cf. Ex 3,1‑6), « qui marchait en avant du camp d’Israël se déplaça et marcha derrière eux, et la colonne de nuée se déplaça de devant eux et se tint derrière eux » (Ex 14,19). Et c’est bien ce qu’écrit encore Isaïe : « Et la gloire du Seigneur fermera la marche »… « Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra ; si tu cries », dans les souffrances, les détresses et les épreuves de la vie, « il dira : « Me voici » » car cela fait longtemps qu’il était déjà là ! « Je Suis, je Suis celui qui vous console » (Is 51,12) « car les montagnes peuvent s’écarter et les collines chanceler, mon amour ne s’écartera pas de toi, mon alliance de paix ne chancellera pas, dit le Seigneur qui te console » (Is 54,10)… Telle est la Bonne Nouvelle de cet « Amour Inconditionnel » (Pape François, audience du mercredi 14 juin 2017) que le Christ est venu nous révéler par tout son Être, toutes ses Paroles, toutes ses actions… « Et moi, une fois élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes… car je suis descendu du Ciel non pas pour faire ma volonté mais la volonté de celui qui m’a envoyé. Or, c’est la volonté de Celui qui m’a envoyé que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donné » (Jn 12,32 ; 6,38‑40)… Or, le Père a donné le monde entier à son Fils pour qu’il les sauve : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, l’Unique-Engendré, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas envoyé le Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui » (Jn 3,16-17). Telle est sa volonté (cf. 1Tm 2,3-6), la volonté que le Christ a voulu accomplir en se donnant « jusqu’à l’extrême de l’Amour » (Jn 13,1) pour chacun d’entre nous… Puissions-nous tous consentir à le recevoir, quelle que soit la gravité et l’étendue de notre misère, car « si pour les hommes, c’est impossible, cela ne l’est pas pour Dieu : car tout est possible pour Dieu » (Mc 10,27)… Sa Miséricorde est à son échelle : infinie et Toute Puissante…

                                                   D. Jacques Fournier

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Rencontre autour de l’Évangile – 6ième Dimanche du Temps Ordinaire

« Une invitation pressante à se repentir, 

et cela au plus profond du coeur.  »

 

 

 TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Ensemble lisons et comprenons les mots important (Mt 5, 17-37)

       L’Évangile de ce jour est parfois difficile. Il est comme un versant d’une montagne, inséparable du versant opposé.

       Face à un pécheur, le Dieu d’infinie Miséricorde n’a qu’un seul désir : lui pardonner, le relever, le combler et le fortifier, pour qu’il ne tombe plus et ne perde plus la Plénitude de la Vie, de la Paix, de la Joie. « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades ; je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs au repentir ». Et Dieu cherchera le pécheur « jusqu’à ce qu’il le retrouve » (Lc 5, 31-32 ; 15,4-7), pour son seul Bien. S’il accepte de se laisser reprendre, relever, combler, « heureux » sera-t-il. Cet appel au Bonheur, neuf fois répété (les Béatitudes), précède notre texte. Tel est un versant de la montagne.

       Pardonné, relevé, fortifié, accompagné, le pécheur est invité maintenant à tout faire, avec le soutien de la grâce de Dieu, pour ne plus retomber et rester debout sur le Chemin de la Vie, pour son seul Bien… Tel est l’autre versant de la montagne, l’Evangile de ce jour…

 

Soulignons les mots importants

  • La Loi était une étape du cheminement vers la vérité tout entière. Voilà pourquoi Jésus ne l’abolit pas mais l’accomplit. Relire « les Dix Paroles » (Ex 20,1-17) puis ce texte de St Paul. En souligner avec lui la conclusion (Rm 13,8-10) : « Ne gardez aucune dette envers personne, sauf la dette de l’amour mutuel, car celui qui aime les autres a parfaitement accompli la Loi. Ce que dit la Loi : Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne commettras pas de meurtre, tu ne commettras pas de vol, tu ne convoiteras rien ; ces commandements et tous les autres se résument dans cette parole : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. L’amour ne fait rien de mal au prochain. Donc, l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour ».

  • Quand Jésus parle de « rejeter» et « d’enseigner» puis « d’observer » et à nouveau « d’enseigner », qu’est-ce qui est toujours premier : l’acte ou la parole ? Conclusion pour chacun d’entre nous…

            Noter toutes les fois où Jésus passe de l’action extérieure, visible, à ce qui en fut d’abord la source : le cœur profond de l’homme. Qu’est-ce qui est donc important à ses yeux ? Où notre conversion doit-elle s’exercer en premier lieu ?

  • Maudire, c’est « la géhenne de feu », l’enfer. Mais alors, qu’est-ce que « le Ciel » ?

           • Qu’est-ce qui est premier pour Jésus : le culte ou le pardon fraternel ?

  • Jésus qui a guéri tant de malades et de pécheurs peut-il nous pousser à nous amputer de l’un quelconque de nos membres si ce dernier est pour nous une occasion de chute ? Que souligne-t-il en fait ? A travers toutes ces recommandations, si fortes ici, que veut-il nous éviter à tout prix ?

  • Souvenons-nous des deux versants de la montagne : à travers ces paroles, à interpréter dans le contexte de l’époque, à quoi Jésus invite ici les époux ?

 

       

Pour l’animateur 

  • Celui qui aime accomplit la Loi. Tous créés à l’image et ressemblance de ce Dieu qui n’est qu’Amour (Gn 1,26-27 ; 1Jn 4,8.16), nous sommes invités à nous aimer les uns les autres « comme» Dieu nous aime (Jn 13,34 ; 15,12). Et Il nous aime, nous, pécheurs, avec une Miséricorde infinie. Alors « heureux les miséricordieux » (Mt 5,7) qui donnent l’amour comme Dieu le donne, gratuitement, avec joie. « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite. Que celui qui exerce la Miséricorde le fasse donc avec joie. Heureux les miséricordieux » (Ac 20,35 ; Jn 15,11 ; Rm 12,8).

  • L’agir est toujours premier. Conclusion : ne jamais enseigner ce que nous ne sommes pas capables nous-mêmes de mettre en pratique (Mt 23,1-4).

  • L’important pour Jésus, ce n’est pas ce qui se voit, l’extérieur, la façade ; l’important, c’est le cœur, ce cœur que Dieu connaît encore mieux que nous-mêmes ! C’est là où nous sommes invités avec le secours de sa grâce, de sa miséricorde et de sa force, à nous convertir de tout cœur en rejetant tout ce qui est mauvaise pensée, avant qu’elle ne devienne parole, mauvais désir avant qu’il ne devienne acte… L’aventure est possible car la Miséricorde de Dieu est infinie : avec Lui, nous pouvons toujours recommencer et recommencer encore !

  • Le Ciel, c’est bénir. Dieu ne fait que bénir. En effet, « Dieu est Amour ». Or « aimer, c’est tout donner et se donner soi-même », un principe à prendre pour Dieu au pied de la Lettre. Dieu ne cesse de donner ce qu’Il est en Lui-même… « Dieu est Esprit » ? Il donne l’Esprit… « Dieu est Lumière» ? Il donne la Lumière… « Dieu est Amour » ? Il donne l’Amour, et avec ce Don, la Force d’aimer comme Lui il aime. Et donner ainsi, gratuitement, par amour, c’est cela bénir… « Le Seigneur Dieu est un soleil, il donne la grâce, il donne la gloire » (Ps 84(83),12).

  • Le pardon fraternel est premier. Être chrétien n’est pas une « étiquette» : c’est une réalité de cœur qui engage toute la vie (Pape François).

  • Non, bien sûr, Jésus ne peut nous inviter à nous amputer, Lui qui veut que l’homme soit pleinement lui-même, dans toutes les dimensions de son être ! Il insiste ici avec force sur la nécessité de la conversion, car le péché nous prive de la Plénitude de la Vie et du Bonheur, pour nous plonger dans la géhenne de feu : « Souffrance et angoisse pour toute âme humaine qui fait le mal» (Rm 2,9). C’est cela que Jésus ne veut pas, de toute la force de son Cœur ! 

  • Dieu invite ceux qu’il a unis dans son Amour par le sacrement du mariage, à tout faire, avec le soutien de sa grâce, pour rester fidèles l’un à l’autre, dans l’amour. Premier versant de la vie chrétienne. Mais si nous tombons, il fera tout pour nous relever et nous relancer. Tel est l’autre versant de la vie chrétienne, celui de la Miséricorde infinie de Dieu avec qui tout est toujours possible…

LA PAROLE DANS NOS MAINS

« Voici que Dieu est maintenant le seul qui compte. Il est au centre du monde… Il m’envahit tout entier et ma pensée ne peut plus éviter Sa rencontre. Une main puissante m’a retourné. Où est-elle, que m’a-t-elle fait ? Je ne sais, car son action n’est pas comme celle des hommes, elle est insaisissable et elle est efficace ; elle me contraint et je suis libre, elle transforme mon être et je n’ai pourtant pas cessé de devenir ce que je suis. Puis la lutte est venue, silencieusement tragique entre ce que je fus et ce que je suis devenu. Car la créature nouvelle qui a été greffée en moi implore de moi une réponse à laquelle je reste libre de me refuser. J’ai reçu le principe, il me faut passer aux conséquences. Mon regard a changé, mais mes habitudes de pensée et de conduite n’ont pas changé : Dieu les a laissées là où elles étaient. Il me faut abattre, adapter, reconstruire les installations intérieures et je ne puis être en paix que si j’accepte cette guerre. Je suis moi-même émerveillé et étonné du changement que la grâce a opéré en moi. Comme le dit Claudel, « l’état d’un homme qu’on arracherait d’un seul coup de sa peau pour le planter dans un corps étranger, au milieu d’un monde inconnu », est la seule comparaison que je puisse trouver pour exprimer cet état de désarroi complet. J’ai trouvé la paix, mais en même temps la lutte, lutte perpétuelle qui me fait progresser et plus je progresse, plus je m’aperçois de ma misère et du chemin infini qu’il me reste à parcourir. Si je reste stationnaire, je redescends. Dans cette expérience principale qui vient de bouleverser ma vie, je découvre pour finir une exigence permanente de réforme spirituelle. La conversion engendre un esprit, et cet esprit m’apprend que la religion n’est pas le confort, mais qu’elle sera toujours en un sens une conversion. Mais Dieu est là ; en Lui, j’ai la force d’apercevoir et d’accomplir ce que je dois être, à son image. »           

                              Jacques Fesch, condamné à mort et exécuté le 1° octobre 1957

 

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6 Dimanche ordinaire A

 

 

 

 

 

 

 

 

 




6ième Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

 

Aller avec Jésus aux racines de notre cœur 

(Mt 5,17-37)…

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir.
Amen, je vous le dis : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas un seul iota, pas un seul trait ne disparaîtra de la Loi jusqu’à ce que tout se réalise.
Donc, celui qui rejettera un seul de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire ainsi, sera déclaré le plus petit dans le royaume des Cieux. Mais celui qui les observera et les enseignera, celui-là sera déclaré grand dans le royaume des Cieux. »
Je vous le dis en effet : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux.
Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens : ‘Tu ne commettras pas de meurtre’, et si quelqu’un commet un meurtre, il devra passer en jugement.
Eh bien ! moi, je vous dis : Tout homme qui se met en colère contre son frère devra passer en jugement. Si quelqu’un insulte son frère, il devra passer devant le tribunal. Si quelqu’un le traite de fou, il sera passible de la géhenne de feu.
Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande à l’autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi,
laisse ton offrande, là, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande.
Mets-toi vite d’accord avec ton adversaire pendant que tu es en chemin avec lui, pour éviter que ton adversaire ne te livre au juge, le juge au garde, et qu’on ne te jette en prison.
Amen, je te le dis : tu n’en sortiras pas avant d’avoir payé jusqu’au dernier sou. »
Vous avez appris qu’il a été dit : ‘Tu ne commettras pas d’adultère.’
Eh bien ! moi, je vous dis : Tout homme qui regarde une femme avec convoitise a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur.
Si ton œil droit entraîne ta chute, arrache-le et jette-le loin de toi, car mieux vaut pour toi perdre un de tes membres que d’avoir ton corps tout entier jeté dans la géhenne.
Et si ta main droite entraîne ta chute, coupe-la et jette-la loin de toi, car mieux vaut pour toi perdre un de tes membres que d’avoir ton corps tout entier qui s’en aille dans la géhenne.
Il a été dit également : ‘Si quelqu’un renvoie sa femme, qu’il lui donne un acte de répudiation’.
Eh bien ! moi, je vous dis : Tout homme qui renvoie sa femme, sauf en cas d’union illégitime, la pousse à l’adultère ; et si quelqu’un épouse une femme renvoyée, il est adultère. »
Vous avez encore appris qu’il a été dit aux anciens : ‘Tu ne manqueras pas à tes serments, mais tu t’acquitteras de tes serments envers le Seigneur.’
Eh bien ! moi, je vous dis de ne pas jurer du tout, ni par le ciel, car c’est le trône de Dieu,
ni par la terre, car elle est son marchepied, ni par Jérusalem, car elle est la Ville du grand Roi.
Et ne jure pas non plus sur ta tête, parce que tu ne peux pas rendre un seul de tes cheveux blanc ou noir.
Que votre parole soit “oui”, si c’est “oui”, “non”, si c’est “non”. Ce qui est en plus vient du Mauvais. »

 

           

              Après avoir donné sur la montagne la Loi Nouvelle de l’Alliance Nouvelle, ces huit Béatitudes qui révèlent le chemin du Vrai Bonheur (Mt 5,1-12), Jésus revient ici sur la Loi de Moïse, fondement de l’Ancienne Alliance (Ex 20,1-17 ; Dt 5,6-21). Et il va tout de suite affirmer que l’esprit de cette Loi est toujours valable… En ce sens, il n’est pas venu « l’abolir », la supprimer. Il est venu « l’accomplir », la porter à sa perfection. Certes, les rites vont changer, et Jésus, en instituant le sacrement de l’Eucharistie, fera bien du nouveau… Mais avec lui, le rite n’a de valeur que par l’amour qu’il exprime…

            Changer le précepte ne signifie donc pas « violer le précepte », lui faire violence, nier son intention… Un précepte nouveau, même s’il prend la place d’un plus ancien, peut inviter à un réel progrès. En reprenant la direction, l’intention de l’ancien, il peut conduire à aller beaucoup plus loin. Et celui qui acceptera de se laisser ainsi guider constatera par lui-même que l’ancien est non seulement accompli mais encore largement dépassé…

            Et Jésus va prendre le temps de multiples exemples… Le premier, avec « tu ne commettras pas de meurtre », est le plus fondamental, car il touche à la vie même de l’individu et à la sauvegarde de la société tout entière… Ce sommet de violence, quand il n’est pas généré par la folie ou l’intégrisme, commence souvent par des « insultes ». Jésus s’attaque ainsi aux tous premiers germes de violence pour les condamner aussitôt et il nous invite de suite à une attitude positive : quelque soit le motif de la discorde, va vers ton frère, parle lui, cherche à te réconcilier avec lui, autant qu’il t’est possible…

            Avec « tu ne commettras pas l’adultère », il sait bien que tout commence par un « regard » et un « désir » intérieur. Le laisser grandir, le cultiver, c’est risquer un jour de passer à l’acte… Une réelle ascèse du cœur, qui passe par la garde des sens, est donc indispensable… Il s’agit de couper net, dès le début, tout ce qui peut conduire au mal… 

            Jésus passe donc du regard extérieur sur tel ou tel précepte, accompli ou non, et telle est « la justice des Pharisiens », au regard intérieur… Il nous entraîne au plus profond de notre cœur, là où naissent les pensées, les impulsions, les désirs… Avec l’aide de l’Esprit, il est possible de prendre du recul par rapport à tout cela, pour discerner à sa Lumière ce qui est bon ou pas, et ensuite passer ou non à l’acte, avec le secours de sa Force… D’où l’invitation de St Paul : « Priez sans relâche, rendez grâce en toute circonstance : c’est ce que Dieu attend de vous dans le Christ Jésus. N’éteignez pas l’Esprit… mais discernez la valeur de toute chose. Ce qui est bien, gardez-le ; éloignez-vous de tout ce qui porte la trace du mal » (1Th 5,17-22).

                                                                                                                                              DJF




5ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Mat 5, 13-16)

« Toi, t’es une lumière ! »

 

Il arrive que l’on emploie cette expression, mais dans deux sens différents, selon le ton avec lequel on la dit.

Si on la dit de manière terne ou morne, elle aura alors un sens péjoratif, voulant dire : « T’es nul ! ».

Si on la dit de manière enjouée, enthousiaste, elle aura alors un sens positif, signifiant : « Heureusement que tu étais là, tu nous sauves ! ».

Mais, de la manière dont Jésus parle à toute cette foule qui est là, sur le mont qu’on appelle maintenant le mont des Béatitudes, une foule qui le suit et qui l’écoute, des sympathisants … (et pas seulement les apôtres qui ne sont pas encore institués), la phrase qu’il utilise n’a qu’un sens qui n’a rien de péjoratif : « Vous êtes la lumière du monde. ».

Ce n’est pas une invitation, du genre : « Est-ce que vous pourriez devenir la lumière du monde ? ».

Non. C’est un constat, une obligation : « Vous m’avez suivi, vous adhérez à mes paroles, vous croyez en nom mon, vous êtes devenus enfants de Dieu (Jn 1,12), alors vous devenez la lumière du monde. Et cela a des conséquences : vous ne pouvez plus vivre comme avant. ».

 Et Jésus continue tout de suite : « Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. ».

Cela signifie qu’en suivant les Paroles de Jésus, on devient un exemple pour les autres … même si on ne s’en rend pas compte …

Mais si on ne les suit pas toujours, et c’est malheureusement souvent notre cas, … on devient un mauvais exemple : « Oh lui, c’est bien la peine d’aller à la messe, il ne vaut pas mieux que nous ! » …

C’est exigeant d’être chrétien … et on ne peut vivre en chrétien qu’en restant en relation avec Jésus de manière continue …

Être comme saint Paul qui pouvait dire : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » (Ga 2,20).

En fait, c’est ce que nous demande Jésus, lui qui a dit : « Moi, je suis la lumière du monde. » (Jn 8,12).

Il nous demande d’être ce que lui-même est.

Et c’est pour tout pareil : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé. » (Jn 15,12), « Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. » (Jn 17,21) …

« Le Verbe de Dieu s’est fait homme pour que nous devenions Dieu. » (St Athanase)

Être témoin de ce que nous croyons, non par « le prestige du langage ou de la sagesse » mais par l’exemple de notre vie, comptant sur « l’Esprit et sa puissance » (2° lecture) en cette occasion.

Cette lumière ne peut grandir en nous que par la connaissance active de la Parole de Jésus et par la prière.

« Alors, voyant ce que vous faites de bien, [les hommes] rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. ».

Seigneur Jésus,

Tu nous demande d’être

lumière dans notre monde,

alors que ce monde a plutôt tendance

à mettre en lumière certaines personnes,

pour le bien ou pour le moins bien …

Donne-nous la sagesse

de faire ce que toi tu veux,

et non ce que le monde veut.

 

Francis Cousin    

   

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Prière dim ord A 5°




5ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN (Mt 5, 13-16)

Le sel de la terre

Mt 5,13-16

Il vous est certainement arrivé, un jour ou l’autre, d’avoir faim et de vous mettre à table avec entrain. Vous plongez la louche dans un potage qui parait particulièrement appétissant. Mais, dès la 1ère cuillerée  portée à votre bouche, vous n’allez pas plus loin… Oh !  On a oublié le sel ! Ce potage qui semblait si bon : il est fade ! II n’a pas de goût, sans saveur ; si bien que l’on ne sent pas, que l’on ne goûte pas toutes les bonnes choses qui ont été mises dedans.

C’est dommage : on a l’impression que tout y était, que rien n’y manquait et pourtant, déception ! C’est fade, neutre, sans saveur. C’est d’autant plus bête qu’il ne suffit que de quelques grains de sel, une pincée, pour que le tout soit transformé et que devienne délicieux ce que nous allons manger.

Le sel, voyez-vous, ça ne se consomme pas à la cuillère, ça ne se remarque pas dans les aliments, sauf s’il y en a trop, ou trop peu. C’est fait pour être mêlé à autre chose, pour donner sa saveur à autre chose…

Nous, les chrétiens, nous sommes le sel de cette terre. Nous, l’église avec sa saveur d’Evangile, nous devons donner au monde son vrai goût. Et toi, et chacun d’entre nous, tu es là comme le sel, non pas pour toi : du sel tout seul et mis à part, n’a aucune utilité. Tu n’es pas là pour toi-même, mais pour d’autres à qui tu dois porter ta saveur, à qui nous devons donner ou redonner le goût de vivre.

Un chrétien n’est pas un chrétien pour lui. Il est un chrétien pour les autres : pour donner du goût aux autres, pour relever la saveur du monde.

Aussi le sel n’est pas fait pour rester à part : il est fait pour être mélangé avec, enfoui, mis dedans, mis avec le reste. Nous n’existons que pour les autres. Un chrétien qui se replierait sur soi, qui s’isolerait, n’a plus aucun sens, aucun rôle, aucune mission : il est inutile, stérile. Du sel tout seul, c’est inutilisable. Un chrétien isolé, sans  contact  avec le monde, ça n’a pas de sens. Par contre, s’il est brassé avec le reste, s’il est versé dedans, bien mélangé, bien fondu avec et dans le reste, ah ! Alors ! Ça change tout ! Tout ce mets qui jusqu’ici semblait inodore et insipide et qui laissait notre goût insatisfait ; le voilà devenu délicieux, relevé parce qu’on a mis dedans quelques grains de sel ; le voilà qui fait chanter tous les autres ingrédients qui ont participé à la confection du plat.

Le message du Christ est clair : l’Evangile est le sel des hommes, le seul qui puisse leur faire trouver le vrai goût de la vie et si nous savons faire passer toute cette saveur évangélique au monde dans lequel nous vivons, alors nous accomplissons notre mission.

            Ce sont les chrétiens, ayant goût d’Evangile, qui donneront sa vraie saveur au monde, à condition, bien sûr, de vivre dedans. C’est cela être missionnaire.

« Oui, c’est bien joli tout cela, mais si, nous-mêmes, nous ne sommes pas imprégnés d’Evangile, si l’Evangile n’est pas la substance de notre vie intérieure et de notre comportement extérieur, alors quel est notre rôle ? »

Et le monde, avec quoi lui donnera-t-on son goût ? Son sens ? Et sa véritable saveur ? Et c’est là que nous pouvons mesurer notre responsabilité de chrétiens et de baptisés !

Comment donner saveur au monde si nous sommes insipides nous-mêmes ? Incolores, inodores et sans saveur ? Des chrétiens couleurs de muraille ! S’entendre dire que l’on est « sel de la terre », d’un côté, et entendre de l’autre : « Oh ! Ils ne sont pas meilleurs que les autres » : cela fait mal !

C’est vrai que souvent, nous sommes de bien piètres témoins de l’Evangile. Comment être pour Jésus-Christ cet écran sur lequel se reflète son visage de ressuscité ?

Comment faire pour que les hommes qui nous voient se demandent qui est notre Dieu ? Quel est ce Dieu qui nous fait vivre ?

A quoi sert notre foi ? Justement, à faire goûter aux autres la saveur de la vraie vie. L’homme moderne, plus  encore que dans les âges précédents, est immergé dans la banalité, dans la grisaille  quotidienne :

– gestes stéréotypés et insipides du travailleur à la chaîne ;

– visages blafards sous les lumières au néon, objets standardisés en plastique, platitude  de  tant  de  conversations  courantes : les « marques » ou  les « modes », ras le bol devant les idéologies et les courants politiques.

La vie a-t-elle encore du goût ? Si l’on parle tant de la qualité de la vie, ne serait-ce point précisément que nous l’avons perdue ?

Donner du sel, c’est donner du sens aux réalités quotidiennes en mettant le Royaume de Dieu : dedans ; c’est relever le défi de tous ces athéismes qui ne cessent de proclamer que « la vie est absurde et n’a pas de sens ».

Avec Jésus, tout peut « prendre du sens », du « goût », même la souffrance, même la vieillesse, même la mort.  Si le sel se dénature… il n’est plus bon à rien… Si notre foi n’a plus goût de Dieu, s’il n’y a plus d’Evangile dans notre vie, alors, à quoi servons-nous ?

C’est Claudel qui clamait, lui qui avait toute la générosité et la virulence d’un converti : « L’Evangile, c’est du sel et vous en avez fait du sucre ».

Avec force, Jésus nous met en garde : notre foi risque de s’affadir, de s’affaiblir et peut-être perdons-nous toute la force corrosive du sel de l’Evangile.

Si  le  chrétien  n’est  plus  du  sel, il  ne  sert  plus  à  rien. Vous savez, le « chrétien caméléon » qui adopte toutes les modes, toutes les mentalités du monde païen, qui prend la couleur de son milieu de vie : « Puisque tout le monde pense ainsi… puisque ça se fait partout … mais tout le monde le fait…», ceux qui s’affadissent, deviennent peu à peu un vague résidu, incolore, inodore, sans saveur.

Or, Jésus nous dit aujourd’hui : « Vous devez être différents du monde, si vous voulez être  pour  lui, du sel ».  Exigence  pour  de nous, “ de passer au monde, ce que Dieu a fait en nous ‘’.  AMEN




5ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (Mt 5,13-16).

« Vous êtes le sel de la terre

et la lumière du monde »

 

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel devient fade, comment lui rendre de la saveur ? Il ne vaut plus rien : on le jette dehors et il est piétiné par les gens.
Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée.
Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison.
De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. »

« Vous êtes le sel de la terre. Si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? Il n’est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent ».

            Dans l’Evangile selon St Jean, Jésus parle à ses disciples d’une manière semblable, mais avec une autre image, celle de la vigne et des sarments : « Je Suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est comme un sarment qu’on a jeté dehors, et qui se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent » (Jn 15,5-6). La vigne est la source de la sève pour les sarments. Et ce n’est que grâce à cette sève reçue de la vigne que les sarments peuvent rester verts et porter du fruit… Or Jésus s’est déjà présenté comme une source : « « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l’Écriture : Des fleuves d’eau vive jailliront de son cœur. » En disant cela, il parlait de l’Esprit Saint, l’Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui » (Jn 7,37-39).

            Cette sève de la vigne est donc « l’Esprit Saint », Plénitude de Lumière et de Vie que le Fils reçoit éternellement du Père et qui l’engendre en Fils. Si le sarment reçoit lui aussi, par sa foi en Jésus, ce Don de l’Esprit, alors et alors seulement, il pourra porter du fruit : « Le fruit de l’Esprit est amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, humilité et maîtrise de soi » (Ga 5,22).

            Le sel de notre Evangile renvoie donc lui aussi à « l’Esprit Saint », ce Don de Dieu que le Fils est venu nous offrir au Nom du Père pour que notre vocation à tous puisse s’accomplir : « devenir des fils à l’Image du Fils » (Rm 8,29 ; Jn 1,12 ; 1Jn 3,1-2) en nous laissant engendrer à notre tour à la Plénitude des fils par ce Don de l’Esprit (Rm 8,14-17)…

            « Dieu est Esprit » (Jn 4,14), « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5)… Recevoir le sel de l’Esprit Saint, c’est donc aussi recevoir la Lumière de l’Esprit. « Autrefois, vous étiez ténèbres ; maintenant, dans le Seigneur, vous êtes lumière ; conduisez-vous comme des enfants de lumière. Or la lumière a pour fruit tout ce qui est bonté, justice et vérité » (Ep 5,8‑9). « Que votre Lumière brille donc devant les hommes : alors en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux », ce « Père des Lumières » (Jc 1,17) qui donne aux pécheurs repentants de pouvoir devenir des « fils de la Lumière » (Jn 12,36). Dans ce monde si souvent dénaturé, ils pourront alors y semer le sel de la tendresse et de la miséricorde, et contribuer ainsi à lui redonner un goût d’humanité… DJF




4ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN (St Mt 5, 1-12)

Commentaire du samedi 28 et Dimanche 29 janvier 2023

 

Sophonie 2.3; 3.12–13 ; 1Corinthiens 1.26–31 ; Matthieu 5.1–12

L’Evangile d’aujourd’hui comprend 10 béatitudes parfois difficile à comprendre. 1ère béatitude : « 3 Heureux ceux qui ont une âme de pauvre, car le Royaume des Cieux est à eux », alors que Luc dit « Heureux, vous les pauvres , car le Royaume de Dieu est à eux ». Si on comprend qu’il faut être pauvre pour être heureux, ou que les pauvres sont heureux, on comprend mal le texte. Dieu ne désire pas la pauvreté pour l’homme, Il a même lutté contre elle ( multiplication des pains, guérison des malades). La pauvreté, comme la souffrance, n’est pas un bien en soi car elles détruisent l’homme physiquement, moralement, spirituellement. La pauvreté peut facilement conduire à la misère; la souffrance liée à la misère ou la jalousie à l’égard des riches peut amener à une révolte contre Dieu et les hommes. C’est pourquoi, il faut lutter contre la pauvreté. A l’inverse, la richesse peut être un bien ou un mal pour le riche. Tout dépend de ce qu’il en fait car la richesse peut détourner le riche de Dieu et aussi des hommes. On ne peut pas généraliser et dire « c’est parce que vous êtes pauvres que vous recevrez le Royaume de Dieu », car Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et pas seulement les pauvres. Il ne s’agit donc pas de devenir pauvre pour avoir le Royaume de Dieu. Il serait plus juste de dire ou de penser que les pauvres ou les pauvres en esprit, ou encore ceux qui ont une âme de pauvre qu’ils sont bienheureux parce qu’ils ont le Royaume de Dieu maintenant ; c’est parce qu’ils ont le Royaume de Dieu (déjà sur terre) qu’ils sont bienheureux, et non pas à cause de leur pauvreté. Maintenant, il est vrai aussi que les pauvres et ceux qui ont une âme de pauvre, ou qui sont pauvres en esprit sont aussi ceux qui se tournent vers Dieu en permanence, et c’est Dieu qui les rend bienheureux, mais ce n’est pas la pauvreté en soi qui les rend heureux. « Le Christ vient pour délivrer l’homme de son malheur et non pas pour l’y enfoncer davantage. Le christianisme ne valorise pas la souffrance pour elle-même, car la souffrance n’a jamais sauvé personne» (Antoine Baron – « Les Béatitudes »). Le Pape François (Gaudete et Exsultate – §69-70) nous dit « cette pauvreté d’esprit est étroitement liée à la « sainte indifférence » que saint Ignace de Loyola proposait, et par laquelle nous atteignons une merveilleuse liberté intérieure: « Pour cela il est nécessaire de nous rendre indifférents à toutes les choses créées…70. Luc ne parle pas d’une pauvreté en « esprit » mais d’être « pauvre » tout court (cf. Lc 6, 20) ; ainsi il nous invite à une existence austère et dépouillée, et nous appelle à partager la vie des plus pauvres, la vie que les Apôtres ont menée, et en définitive à nous configurer à Jésus qui, étant riche, « s’est fait pauvre » (2 Co 8, 9).

2ème béatitude : « Heureux les doux, car ils posséderont  ( hériteront ) la terre ». Il ne s’agit pas ici du caractère « doux » d’une personne.  « La douceur envers Dieu est cette disposition d’esprit par laquelle nous acceptons tout ce qu’Il nous donne comme étant un bienfait, et ceci sans discussion ni résistance. Dans l’A.T, les doux, les débonnaires, les bienveillants, les tolérants… étaient ceux qui s’en remettaient entièrement à Dieu et non à leur propre force pour les défendre contre l’injustice » (Bible Oneline). Jésus en est le meilleur exemple : « lui qui insulté ne rendait pas l’insulte, souffrant ne menaçait pas, mais s’en remettait à Celui qui juge avec justice…( 1P2,23) ». Le Pape François nous dit (Gaudete et Exsultate – §74) : « Il vaut mieux toujours être doux, et nos plus grands désirs s’accompliront : les doux « posséderont la terre », autrement dit, ils verront accomplies, dans leurs vies, les promesses de Dieu. En effet, les doux, indépendamment des circonstances, espèrent dans le Seigneur, et les humbles posséderont la terre et jouiront d’une grande paix (cf. Ps 37, 9.11). En même temps, le Seigneur leur fait confiance : « Celui sur qui je porte les yeux, c’est le pauvre et l’humilié, celui qui tremble à ma parole » [Is 66, 2). « Hériter la terre » pourrait aussi désigner la Terre Promise, le Royaume de Dieu. – 3ème béatitude : 5 Heureux les affligés,  car ils seront consolés. Les affligés sont ceux qui se lamentent à cause de leurs propres péchés. La tristesse évoquée ici est également spirituelle. La consolation appartiendra à celui qui est consterné par ses iniquités (ses fautes, ses péchés), ses manquements devant son Dieu (#2Co 7:9-10). Celui qui éprouve cette « tristesse selon Dieu » reconnaîtra en lui le « Dieu de toute consolation » (#2Co 1:3). Voici l’avis du Pape François (Gaudete et Exsultate – §75-76) : 75. Le monde nous propose le contraire : le divertissement, la jouissance, le loisir, la diversion, et il nous dit que c’est cela qui fait la bonne vie. L’homme mondain ignore, détourne le regard quand il y a des problèmes de maladie ou de souffrance dans sa famille ou autour de lui. Le monde ne veut pas pleurer : il préfère ignorer les situations doulou­reuses, les dissimuler, les cacher. Il s’ingénie à fuir les situations où il y a de la souffrance, croyant qu’il est possible de masquer la réalité, où la croix ne peut jamais, jamais manquer. 76. La personne qui voit les choses comme elles sont réellement se laisse transpercer par la douleur et pleure dans son cœur, elle est capable de toucher les profondeurs de la vie et d’être authentiquement heureuse.70 Cette personne est consolée, mais par le réconfort de Jésus et non par celui du monde. Elle peut ainsi avoir le courage de partager la souffrance des autres et elle cesse de fuir les situations doulou­reuses. De cette manière, elle trouve que la vie a un sens, en aidant l’autre dans sa souffrance, en comprenant les angoisses des autres, en soulageant les autres. Cette personne sent que l’autre est la chair de sa chair, elle ne craint pas de s’en approcher jusqu’à toucher sa blessure, elle compatit jusqu’à se rendre compte que les distances ont été supprimées. Il devient ainsi possible d’accueillir cette exhortation de saint Paul : « Pleurez avec qui pleure » (Rm 12, 15).

4ème béatitude : 6 Heureux les affamés et assoiffés de la justice,  car ils seront rassasiés.

Les affamés et les assoiffés de justice sont ceux qui reconnaissent qu’ils ont en eux-mêmes un manque de justice, parce qu’ils ne sont pas eux-mêmes des justes, et qu’il est important pour eux de le devenir. La faim et la soif de justice les concernent, eux, et non les autres. Il ne s’agit donc pas de regarder les autres et de dire s’ils sont justes ou non. Il s’agit de reconnaître en soi-même un manque de justice. Mais la notion de justice elle-même est à revoir et ce n’est pas une simple notion d’équité, d’honnêteté, de bonne foi, de rectitude entre les hommes. Quand dans la Bible, on parle de juste, de justice, de justification, de justifié, on parle surtout de justice par rapport à Dieu. Une personne est juste, justifié, lorsqu’il est « ajusté » sur Dieu, lorsqu’il fait la volonté de Dieu, lorsqu’il applique ses commandements. Dieu nous aime tels que nous sommes comme point de départ vers la sainteté, pour que nous soyons par la suite « justifiés », amenés à faire sa volonté, à accepter ses commandements, surtout celui d’aimer Dieu et son prochain car « celui qui aime autrui a, de ce fait, accompli la Loi » (Rm 12,8). Dieu rend l’homme juste, aligné sur lui-même, il fait de nous des saints, des êtres transformés dans la sainteté. 5ème béatitude : 7 Heureux les miséricordieux,  car ils obtiendront miséricorde. La miséricorde de Dieu va bien plus loin qu’un simple pardon tel que nous pouvons le penser. Sainte Thérèse de Lisieux nous dit que Dieu nous sauve, non pas parce que nous faisons de belles choses sur terre, mais parce que Dieu est miséricordieux. Il nous faut donc croire, en toute confiance, que Dieu nous sauve par sa miséricorde qui est infinie sauf si elle est limitée par le « non » d’une âme qui refuserait sa miséricorde jusqu’au bout, c’est-à-dire même après la mort. C’est pourquoi il ne faut pas prendre à la légère la notion de pardon à donner ou à recevoir. Ne laissons pas notre orgueil prendre le dessus, car c’est l’orgueil qui nous empêche de pardonner ou de recevoir un pardon. Personne ne pourra le faire à notre place. Rappelons au passage les œuvres de miséricorde que nous pouvons accomplir: nourrir ceux qui ont faim; donner à boire à ceux qui ont soif; vêtir ceux qui sont nus; recueillir les étrangers; visiter les malades et les prisonniers; apporter le salut aux prisonniers; ensevelir les morts; instruire les ignorants; conseiller ceux qui doutent; consoler les affligés; reprendre les pécheurs; pardonner les offenseurs; supporter avec patience les personnes ennuyeuses; prier pour tous les vivants et les morts. Jésus lui-même se met en colère contre ceux qui ne se montrent pas miséricordieux et en Mc 3,5, il promène sur les Pharisiens un regard de colère, navré de l’endurcissement de leur cœur, pour avoir interdit de guérir un malade le jour du sabbat.

6ème béatitude : 8 Heureux les cœurs purs,  car ils verront Dieu. Quand on parle de cœur dans la Bible, il ne s’agit pas forcément de sentiment ou de sensibilité. Le cœur de l’homme est la source même de sa personnalité consciente, intelligente et libre, le lieu de ses choix décisifs et de l’action mystérieuse de Dieu » (VTB). Et la pureté est la disposition requise pour s’approcher des choses sacrées ; elle est procurée non par des actes moraux, mais par des rites (prières, sacrements), et par l’obéissance aux commandements de Dieu. Celui qui a le « cœur pur » aime Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de tout son pouvoir, et son amour n’est pas tiraillé par des amours contradictoires comme par exemple « servir Dieu et l’argent », ou encore servir Dieu et « un autre dieu » (entre guillemets). Le « pur amour pour Dieu » englobe aussi l’amour du prochain. Les cœurs purs verront Dieu, c’est une promesse de Dieu qui comble tous les désirs de l’homme fidèle à Dieu. 7ème béatitude : 9 Heureux les artisans de paix,  car ils seront appelés fils de Dieu. Les artisans de paix sont ceux qui font la paix dans la société, ceux qui maintiennent ou restaurent la paix entre les hommes. Et pourquoi donc les artisans de paix seront appelés « fils de Dieu » ? Le Christ lui-même a pour nom « Prince de Paix » (Is 9,5-6) et Michée 5,4 dit « Celui-ci sera paix ». Autrement dit, la mission du Messie est d’instaurer la paix définitive dans le monde et dans toute la création comme nous le dit Pierre (2P3,13) : « Ce sont de nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera ». Le Ps 2 nous montre cette investiture du Christ comme « Fils de Dieu » envoyé dans le monde en tumulte, en désordre : 1 Pourquoi ces nations en tumulte, ces peuples qui murmurent en vain? 2 Les rois de la terre s’insurgent, les princes tiennent tête à Yahvé et à son Messie : 3 Rompons leurs chaînes, débarrassons-nous de leurs liens! 4 Celui qui siège dans les cieux s’en amuse, Yahvé les tourne en dérision. 5 Puis dans sa colère il leur parle, dans sa fureur il les épouvante :6 C’est moi qui ai sacré mon roi sur Sion, ma montagne sainte. 7 Je publierai le décret de Yahvé : Il m’a dit : Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré. 8 Demande, et je te donne les nations pour héritage, pour domaine les extrémités de la terre; 9 tu les briseras avec un sceptre de fer, comme un vase de potier tu les casseras. 10 Et maintenant, rois, comprenez, corrigez-vous, juges de la terre! 11 Servez Yahvé avec crainte, 12 baisez ses pieds avec tremblement;  qu’il s’irrite, et vous vous perdez en chemin : en un instant flambe sa colère. Heureux qui s’abrite en lui! ». « Parce qu’ils sont avec le Christ, les acteurs de son règne, tous ceux qui participent au travaille messianique d’instauration de la paix reçoivent le même titre que le Messie « fils de Dieu ». 8ème béatitude : 10 Heureux les persécutés pour la justice,  car le Royaume des Cieux est à eux. De nombreuses personnes sont persécutées pour de raisons diverses: religieuses, progrès social au bénéfice des plus petits, inventions ingénieuses qui gênent le pouvoir ou la richesse de certaines personnes, dénonciation des corrompus avec preuves à l’appui etc…De nombreux chrétiens sont morts pour s’être battus du côté des pauvres, victimes de l’injustice de ceux qui ont le pouvoir et la richesse. Tapez le mot « Nicaragua » sur Internet, et vous verrez des évêques, des prêtres et des laïcs traduits en justice pour avoir dénoncé des injustices. Il en est de même pour la persécution des chrétiens en Chine qui sont l’objet de bon nombre d’injustices telle que les pressions faites sur les chrétiens : interdiction aux enfants des chrétiens d’aller à l’université par exemple, et probablement des pressions pour les empêcher d’avoir du travail ou même pour se déplacer d’une ville à une autre etc…Ces chrétiens persécutés sont à l’image du Christ persécuté, alors que ce dernier n’avait et n’a toujours aucune faute. Heureux êtes-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi. Le Christ nous a montré le chemin et, avec l’aide de Marie, nous espérons suivre son exemple. Il nous l’a promis : votre récompense sera grande dans les cieux.




4ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Mat 5, 1-12)

« Béatitudes. »

 

Le texte nous présente neuf béatitudes, neuf occasions de se sentir heureux ;

Les huit premières concernent chacun, en lui-même, et s’adressent à tous les humains, quel que soit leur religion.

Elles sont presque toutes bâties sur le même modèle :

« Heureux ceux qui … ils seront … » avec un verbe au futur …

Sauf deux béatitudes :

La première : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux. »

Et la huitième : « Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux. »

Avec des mots-clefs : le cœur, ce qui correspond à l’amour, et la justice, qui correspondent à ce qu’est Dieu : Dieu est amour, et Dieu est justice.

Deux mots que l’on retrouve dans le psaume 84 :

                                            « Amour et vérité se rencontrent,

Justice et paix s’embrassent. »

Des mots que l’on ne peut séparer et qui sont la quintessence de ce qu’est Dieu.

Et ces deux béatitudes ont la même conclusion, au présent : « car le royaume des Cieux est à eux. ». C’est acquis pour eux, … à condition qu’ils gardent leur esprit dans les mêmes conditions toute leur vie … et cela est vrai pour tous les humains ! On voit mal que des personnes comme le Mahatma Gandhi ou le Dalaï Lama, par exemple, ne soient pas accueillis dans le royaume de Dieu.

La neuvième est différente : « Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi. Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! ». Elle s’adresse à tous ceux qui croient en Jésus et qui ont à subir des remarques ou autres actions à cause de leur amour de Jésus, de Dieu, … pouvant aller jusqu’au martyr. Elle s’adresse à tous ceux qui s’engagent dans la mission … c’est-à-dire normalement à tous les baptisés !

Jésus proclame le bonheur : Heureux …

L’amour qui vient de Dieu est toujours premier, et il veut que nous bénéficiions encore de son amour dans l’au-delà, ce qui nous est assuré si … nous suivons les béatitudes … et même si on ne les suit pas toutes, … car Dieu est miséricordieux …

Car l’amour de Dieu est pour tous les humains … même ceux qui le rejettent maintenant … car Dieu est patient … et une conversion est toujours possible …

La preuve : Matthieu lui-même : il est né juif …mais il est devenu publicain, au service des Romains, et d’une certaine manière, il a rejeté la loi juive pour l’argent … et les juifs le lui ont bien rendu : « Comme Jésus était à table à la maison, voici que beaucoup de publicains (c’est-à-dire des collecteurs d’impôts) et beaucoup de pécheurs vinrent prendre place avec lui et ses disciples. Voyant cela, les pharisiens disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? » (Mt 9,10-11).

Et pourtant, Jésus l’a choisi pour être un de ses disciples, un de ses apôtres … et lui a même ’soufflé’ d’écrire comment il avait ressenti ce qu’il avait dit lorsqu’il était parmi les humains !

Alors, les béatitudes : sont-elles des commandements … des guides de vie … des repères … ?

Plutôt les deux dernier mots … car toutes ces béatitudes sont inscrites dans un seul commandement, celui que Jésus a ajouté après le premier commandement qui parle de l’amour porté à Dieu : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » (Jn 13,34).

Et « les uns et les autres », ce n’est pas que les catholiques ou les chrétiens, mais tous les humains

L’amour … toujours l’amour !

Si on suit ce commandement, alors vivre selon les béatitudes devrait être une formalité !…

Malheureusement, ce n’est pas le cas … et nous le savons bien pour nous-mêmes …

Jésus, tu es venu habiter parmi eux.

Tu es venu leur dire :

« Heureux êtes-vous

parce que Dieu vous aime

et qu’il se veut tout proche de vous !

Le Dieu qui a voulu un monde d’amour,

vous est plein de reconnaissance

quand vous vous montrez des cœurs purs,

et que vous cultivez en vous la douceur et la miséricorde.

il vous chérit quand vous construisez la paix

et défendez la justice. (…)

Aide-nous à savoir être des artisans de paix !

Aide-nous à être de ceux qui font miséricorde

et défendent la justice.

Aide-nous à rendre heureux,

comme ont su le faire, déjà,

tant de saints et de saintes de l’histoire humaine.

                                  (Christian Delorme)

 

Francis Cousin    

    

   

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Prière dim ord A 4°




4ième Dimanche du Temps Ordinaire par le Diacre Jacques FOURNIER

 

Heureux ceux qui croient à l’Amour

(Mt 5,1-12)…

En ce temps-là, voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui.
Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Il disait :
« Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés.
Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage.
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés.
Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde.
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu.
Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu.
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! »

Autrefois, dans le cadre de l’Alliance conclue avec son Peuple, Dieu donna sa Loi à Moïse sur une montagne (Ex 19-20). Ici, Jésus « gravit la montagne » et donne aux « grandes foules qui le suivirent, venues de la Galilée (Juifs), de la Décapole (païens), de Jérusalem (Juifs), de la Judée (Juifs), et de la Transjordanie (païens) » (Mt 4,25), la Loi Nouvelle de « l’Alliance nouvelle » (Lc 22,20 ; 1Co 11,25 ; 2Co 3,6) et éternelle, une Alliance qui existe de fait depuis la création du monde (Gn 9,8-17) entre Dieu et tous les hommes. Avec Jésus et par Lui (Hb 9,15 ; 12,24), ce Mystère est dorénavant pleinement révélé (Rm 16,25-27)…

            Cette Loi nouvelle est un appel au bonheur ! Dieu a créé l’homme pour le bonheur (Gn 2,8), il veut son bonheur (Dt 4,40 ; 5,16.29.33 ; 6,3…), il ne cesse de le désirer, d’y travailler… Pourquoi ? Car « Dieu Est Amour » (1Jn 4,8.16). C’est pourquoi, « il ne cesse de nous suivre pour nous faire du bien » (Jr 32,40). Et que fera-t-il pour nous permettre d’atteindre ce bonheur ? Jésus, le Fils, en est le parfait exemple : « Le Père aime le Fils et il a tout donné, il donne tout, en sa main » (Jn 3,35). Gratuitement, par Pur Amour, le Père ne cesse de se donner tout entier à son Fils pour le combler de tout ce qu’Il Est en Lui-même, lui donnant ainsi, de toute éternité, « avant tous les siècles », d’avoir part à sa vie (Jn 5,26) en « Unique-Engendré » (Jn 1,14.18 ; 3,16.18), « non pas créé », « Lumière » (Jn 1,9 ; 3,19 ; 8,12 ; 9,5 ; 12,46) « née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu ». Le Père « est Lumière » (1Jn 1,5), il est aussi « Esprit » (Jn 4,24) ? Dans un acte d’Amour éternel, il donne au Fils la Plénitude de son Esprit de Lumière… Et « le fruit de l’Esprit est joie » (Ga 5,22), bonheur profond. Jésus « tressaille ainsi de joie sous l’action de l’Esprit » (Lc 10,21), « le Don de Dieu » (Jn 4,10), ce Don qu’il ne cesse de recevoir du Père et qui l’engendre en Fils vivant de la Plénitude même du Père… Cette joie, voilà ce que Jésus veut voir régner en nos cœurs : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 15,10). Et pour qu’il en soit effectivement ainsi, il nous invite à recevoir à notre tour en nos cœurs ce que lui-même reçoit du Père de toute éternité : « Recevez l’Esprit Saint » (Jn 20,22) !

            Jésus nous presse donc d’accepter de reconnaître notre misère, pour la lui offrir. Le pardon infini et surabondant de Dieu l’enlèvera bien vite.  Il nous rendra ainsi capables de recevoir avec Lui ce Don de l’Esprit Saint qu’il reçoit du Père de toute éternité et qui l’engendre en Fils. « Le fruit de l’Esprit est douceur » (Ga 5,23) ? « Heureux les doux » ! « Le fruit de l’Esprit est Amour Miséricordieux » (Ga 5,22) ? « Heureux les miséricordieux » ! « Le fruit de l’Esprit est Paix » (Ga 5,22) ? « Heureux les artisans de paix » ! L’Esprit lave et purifie les cœurs blessés par le péché (Ez 36,24-28 ; 1Co 6,11) ? « Heureux les cœurs purs » ! Oui, vraiment, « heureux ceux qui croient » (Jn 20,29) que « Dieu est Amour », Pur Amour !

                                                                       DJF