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26ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 21, 28-32) – Francis COUSIN)

« La parole et les actes. »

 

L’évangile de ce jour nous parle d’un père qui propose à ses deux enfants d’aller « travailler à la vigne ». L’un dit « oui » et n’y va pas, l’autre dit « non », puis se ravise et y va.

Deux comportements différents qu’il nous est arrivé à tous d’avoir eu … pour diverses raisons, parce que le temps entre la réponse à la question et la démarche de faire ou ne pas faire l’action, ce temps de discernement, nous a permis d’analyser la demande et de voir si celle-ci était bonne pour tout le monde, ou seulement pour nous et pas pour les autres.

Dans le passage d’évangile, la demande est plus large.

On remarquera que le père ne parle pas de « sa » vigne, ou de « notre » vigne, mais de « la » vigne … comme s’il n’y qu’une seule vigne …

Or, dans la littérature biblique, la vigne est celle du Seigneur : « La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël » (Is 5, 7), c’est le peuple élu, choisi par Dieu, … d’où les reproches fait par Jésus aux grands prêtres et aux anciens qui ne se sont « même pas repentis plus tard pour croire à la parole » de Jean-Baptiste.

C’est la vigne que ceux-ci ont voulu prendre pour eux en tuant le fils du propriétaire (parabole des vignerons homicides) … et qui sera donnée à d’autres …

… à ceux qui ont cru à la parole de Jean-Baptiste et à celle de Jésus … et à celle de ses disciples, c’est-à-dire à l’Église …

La demande du père est donc celle du Père de Jésus, celui que nous appelons « Notre Père », qui s’adresse à nous aussi : « Va travailler aujourd’hui à la vigne. », … dans mon Église …

Quelle réponse vais-je donner ?

D’abord, est-ce que j’ai envie de me mettre au service de l’Église ?

Pas nécessairement un service matériel. Ce peut être par l’exemple que je peux montrer ma foi … en répondant à des questions qu’on peut me poser sur ma foi, sur l’Église … en étant un exemple pour mes enfants …

Mais on peut me demander de rendre un service.

Ma réponse dépendra de ce qu’on me demande … de mes compétences, de ma disponibilité, … mais surtout de ce qu’il y a dans mon cœur …

Saint Paul nous donne quelques conseils pour que notre cœur corresponde à ce que veut Jésus : « Recherchez l’unité. Ne soyez jamais intrigants ni vaniteux, mais ayez assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts ; pensez aussi à ceux des autres. », comme l’a fait Jésus : « Il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. » (deuxième lecture).

On peut refuser au départ, et on peut avoir de bonnes et justes raisons pour le faire, … mais il peut arriver que ce soit simplement parce qu’on veut être tranquille, qu’on ne veut pas être ennuyé, parce qu’en fait, on ne s’intéresse pas véritablement aux autres … et peut-être qu’après avoir réfléchi, analysé la situation, on revienne sur sa décision … à un moment ou à un autre …

Dieu est patient … et surtout il sera très heureux de vous voir revenir travailler à sa vigne …

Car n’oublions pas : « la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte. » (Jc 2,17).

Écoutons, et faisons nôtre cette prière du père Christian Delorme :

Avec toi, Ô Christ,

je me découvre un des fils bien-aimés du Père Éternel.

Il m’appelle à me mettre à la tâche.

J’entends sa voix qui vient murmurer à mon cœur.

Ce n’est pas une voix qui ordonne brutalement.

C’est jeune voix qui suggère,

une voix amicale, presque une voix qui supplie :

« Prends soin de ma vigne, me chuchote le Père.

J’ai besoin de toi et je compte sur toi ! » (…)

Toi qui n’as jamais cessé de faire la volonté du Père,

aide-moi à me montrer enfin

un bon ouvrier et un bon fils.

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 26°




Audience Générale du Mercredi 16 Septembre 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 16 Septembre 2020


Chers frères et sœurs, bonjour!

Pour sortir d’une pandémie, il est nécessaire de se soigner et de nous soigner mutuellement. Et il faut soutenir ceux qui prennent soin des plus pauvres, des malades et des personnes âgées. On a l’habitude de laisser de côté les personnes âgées, de les abandonner: cela n’est pas bien. Ces personnes – bien définies par le terme espagnol “cuidadores”, ceux qui prennent soin des malades – exercent un rôle essentiel dans la société d’aujourd’hui, même si souvent elles ne reçoivent pas la reconnaissance et la rémunération qu’elles méritent. Prendre soin est une règle d’or de notre condition d’êtres humains, et cela apporte en soi la santé et l’espérance  (cf.  Enc. Laudato si’ [LS], n. 70). Prendre soin de celui qui est malade, de celui qui a besoin, de celui qui est laissé de côté: c’est une richesse humaine et également chrétienne.

Ce soin, nous devons également l’apporter à notre maison commune: à la terre et à chaque créature. Toutes les formes de vie sont liées (cf. ibid., nn. 137-138), et notre santé dépend des écosystèmes que Dieu a créés et dont il nous a chargé de prendre soin (cf. Gn 2, 15). En abuser, en revanche, est un grave péché qui crée des dommages, qui fait mal et qui rend malade (cf. LS, n. 8; n. 66). Le meilleur antidote contre cette usage impropre de notre maison commune est la contemplation (cf. ibid., n. 85; 214). Mais comment cela se fait-il? N’y a-t-il pas un vaccin pour cela, pour le soin de la maison commune, pour ne pas la laisser de côté? Quel est l’antidote contre la maladie de ne pas prendre soin de la maison commune? C’est la contemplation.  «Quand quelqu’un n’apprend pas à s’arrêter pour observer et pour évaluer ce qui est beau, il n’est pas étonnant que tout devienne pour lui objet d’usage et d’abus sans scrupule» (ibid., n. 215). Toutefois, notre maison commune, la création, n’est pas une simple “ressource”. Les créatures ont une valeur en elles-mêmes et «reflètent, chacune à sa façon, un rayon de la sagesse et bonté infinies de Dieu» (Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 339). Cette valeur et ce rayon de lumière divine doit être découvert et, pour le découvrir, nous avons besoin de rester en silence, nous avons besoin d’écouter, et nous avons besoin de contempler. Même la contemplation guérit l’âme.

Sans contemplation, il est facile de tomber dans un anthropocentrisme déséquilibré et orgueilleux, le “moi” au centre de tout, qui surdimensionne notre rôle d’êtres humains, en nous plaçant comme les dominateurs absolus de toutes les autres créatures. Une interprétation déformée des textes bibliques sur la création a contribué à cette vision erronée, qui conduit à exploiter la terre jusqu’à l’étouffer. Exploiter la création: voilà quel est le péché. Nous croyons être au centre, en prétendant occuper la place de Dieu et, ainsi, nous détruisons l’harmonie de la création, l’harmonie du  dessein de Dieu. Nous devenons des prédateurs, nous oublions notre vocation de gardiens de la vie. Certes, nous pouvons et nous devons travailler la terre pour vivre et nous développer. Mais le travail n’est pas synonyme d’exploitation, et il est toujours accompagné par le soin: labourer et protéger, travailler et prendre soin… Telle est notre mission (cf. Gn 2, 15). Nous ne pouvons pas prétendre continuer à grandir au niveau matériel, sans prendre soin de la maison commune qui nous accueille. Nos frères les plus pauvres et notre mère la terre gémissent à cause des dommages et de l’injustice que nous avons provoqués et ils réclament une autre route. Ils réclament de nous une conversion, un changement de route: prendre soin également de la terre, de la création.

Il est donc important de retrouver cette dimension contemplative, c’est-à-dire de regarder la terre, la création comme un don, pas comme quelque chose à exploiter pour le profit. Quand nous contemplons, nous découvrons chez les autres et dans la nature quelque chose de beaucoup plus grand que leur utilité. Le coeur du problème est là: contempler c’est aller au-delà de l’utilité d’une chose. Contempler la beauté ne veut pas dire l’exploiter: contempler est gratuité. Nous découvrons la valeur intrinsèque des choses que Dieu leur a conférée. Comme l’ont enseigné de nombreux maîtres spirituels, le ciel, la terre et la mer, chaque créature possède cette capacité iconique, cette capacité mystique de nous reconduire au Créateur et à la communion avec la création. Par exemple, saint Ignace de Loyola, à la fin de ses exercices spirituels, invite à se mettre en “contemplation pour parvenir à l’amour”, c’est-à-dire à considérer comment Dieu regarde ses créatures et à se réjouir avec elles; à découvrir la présence de Dieu dans ses créatures et, avec liberté et grâce, les aimer et en prendre soin.

La contemplation, qui nous conduit à une attitude de soin, n’est pas le fait de regarder la nature de l’extérieur, comme si nous n’y étions pas plongés. Mais nous sommes à l’intérieur de la nature, nous faisons partie de la nature. Elle se fait plutôt à partir de l’intérieur, en nous reconnaissant comme une partie de la création, en devenant des protagonistes et non de simples observateurs d’une réalité amorphe qui s’agirait seulement d’exploiter. Celui qui contemple de cette manière éprouve de l’émerveillement non seulement pour ce qu’il voit, mais également parce qu’il se sent faire partie intégrante de cette beauté; et il se sent également appelé à la préserver, à la protéger. Et il y a une chose que nous ne devons pas oublier: celui qui ne sait pas contempler la nature, la création, ne sait pas contempler les personnes dans leur richesse. Et celui qui vit pour exploiter la nature, finit par exploiter les personnes et les traiter comme des esclaves. C’est une loi universelle: si tu ne sais pas contempler la nature, il sera très difficile que tu saches contempler les gens, la beauté des personnes, ton frère, ta soeur.

Celui qui sait contempler se mettra plus facilement à l’œuvre pour changer ce qui cause la dégradation et des dommages à la santé. Il s’engagera à éduquer et à promouvoir de nouvelles habitudes de production et de consommation, à contribuer à un nouveau modèle de croissance économique qui garantisse le respect de la maison commune et le respect pour les personnes.  Le contemplatif en action tend à devenir un gardien de l’environnement: cela est beau! Chacun de nous doit être un gardien de l’environnement, de la pureté de l’environnement, en cherchant à conjuguer les savoirs ancestraux de cultures millénaires avec les nouvelles connaissances techniques, afin que notre style de vie soit toujours durable.

Enfin, Contempler et prendre soin: voilà deux attitudes qui montrent la voie pour corriger et rééquilibrer notre relation d’êtres humains avec la création. Très souvent, notre relation avec la création semble être une relation entre ennemis: détruire la création à mon avantage; exploiter la création à mon avantage. N’oublions pas que cela se paye cher; n’oublions pas ce dicton espagnol: “Dieu pardonne toujours; nous pardonnons parfois; la nature ne pardonne jamais”. Aujourd’hui, je lisais dans le journal une nouvelle sur ces deux grands glaciers de l’Antarctique, près de la Mer d’Amundsen: il vont tomber. Ce sera terrible, parce que le niveau de la mer montera et cela provoquera de nombreuses, nombreuses difficultés et beaucoup de mal. Et pourquoi? A cause du réchauffement, du manque de soin de l’environnement, du manque de soin de la maison commune. En revanche, si nous avons cette relation – je me permets le mot – “fraternelle” au sens figuré avec la création, nous deviendons les gardiens de la maison commune, les gardiens de la vie et les gardiens de l’espérance, nous sauvegarderons le patrimoine que Dieu nous a confié afin que les générations futures puissent en jouir. Et certains peuvent dire: “Mais moi, je m’en tire bien comme ça”. Mais le problème n’est pas comment tu t’en tires aujourd’hui – c’était ce que disait un théologien allemand, protestant, compétent: Bonhoeffer – le problème n’est pas comment tu t’en tires toi, aujourd’hui; le problème est: quel sera l’héritage, la vie de la génération future. Pensons aux enfants, aux petits-enfants: que leur laisserons-nous si nous exploitons la création. Sauvegardons ce chemin, ainsi nous deviendrons des “gardiens” de la maison commune, des gardiens de la vie et de l’espérance. Sauvegardons le patrimoine que Dieu nous a confié, afin que les générations futures puissent en profiter. Je pense de manière particulière aux peuples autochtones, envers lesquels nous avons tous une dette de reconnaissance – et même de pénitence, pour réparer tout le mal que nous leur avons fait. Mais je pense également à ces mouvements, associations, groupes populaires, qui s’engagent pour protéger leur territoire avec ses valeurs naturelles et culturelles. Ces réalités sociales ne sont pas toujours appréciées, on leur fait même parfois obstacle, parce qu’elles ne produisent pas d’argent; mais en réalité, elles contribuent à une révolution pacifique, nous pourrions l’appeler la “révolution du soin”. Contempler pour prendre soin, contempler pour sauvegarder, nous sauvegarder, ainsi que la création, nos enfants, nos petits enfants et sauvegarder l’avenir. Contempler pour prendre soin et pour sauvegarder et pour laisser un héritage à la génération future.

Il ne faut cependant pas déléguer à certaines personnes ce qui est la tâche de chaque être humain. Chacun de nous peut et doit devenir un “gardien de la maison commune”, capable de louer Dieu pour ses créatures, de contempler les créatures et de les protéger.


François a ensuite salué les pèlerins francophones:

Je suis heureux de saluer les personnes de langue française. Demandons la grâce de savoir contempler les merveilles de Dieu, afin que se développe une responsabilité individuelle et communautaire vis-à-vis de la protection et de la sauvegarde de la création.

Que Dieu vous bénisse !




25ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 20,1-16) – Francis COUSIN)

« … afin d’embaucher des ouvriers

pour sa vigne. »

 

Au départ de cette parabole, il y a un appel par le maître du domaine auprès d’ouvriers pour travailler à sa vigne. Et il le fait plusieurs fois dans la journée. Son domaine, c’est l’Église.

À la fin, il y a la récompense du travail, le salaire … qui est le même pour tous : c’est la vie éternelle.

Souvent les commentaires se sont intéressés à la fin de la parabole, quand tout le monde touche le même salaire. C’est vrai qu’à nos yeux humains cela paraît inadmissible, avec notre droit du travail, nos mentalités païennes et intéressées … mais on ne peut pas multiplier la vie éternelle … cela n’a aucun sens.

Mais avant, tout au long de la journée, il y a le travail, … le développement de l’Église, … sa mission …

Et ce qui me semble intéressant, c’est de voir que le maître du domaine, c’est-à-dire Dieu, ne cesse de retourner au village pour embaucher de nouveaux ouvriers …

Faut-il donc que les besoins de son domaine soient immenses … que les besoins de l’Église soient immenses … ?

Sans nul doute ! Car non seulement Dieu lui-même ’’embauche’’, mais il demande, par Jésus, de participer à cette embauche : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. » (Mt 9,37-38).

Dieu met dans le cœur de chacun l’amour envers lui, l’amour des autres, l’amour de l’annonce de l’évangile …

Mais est-ce suffisant ?

Il faut aussi des humains qui soient là pour inviter les gens à participer à la vie de l’Église …

Dans la parabole, le maître envoie les gens à sa vigne, … mais dans le travail de la vigne, il y a plusieurs façons de travailler, et c’est l’intendant qui va répartir les tâches : on peut couper le raisin (les vendangeurs), porter le raisin à la remorque (les porteurs), amener la remorque au pressoir (les cochets), presser le raisin (les fouleurs) … jusqu’à la mise en bouteilles. Tous participent à l’élaboration du vin. Et chacun, en fonction de ses capacités ou de ses goûts, se trouve associé à l’un ou l’autre poste.

Il doit en être de même dans notre Église … et dans chacune de nos paroisses…

Bien sûr, quand on parle d’ouvriers pour la moisson, on pense d’abord aux prêtres. Et comme ils ont répondu à l’appel de Dieu, on le laisse souvent faire !! … et on ne cherche pas à susciter des vocations … Mais il faut parfois un élément déclencheur pour qu’une vocation naisse … La rencontre avec un religieux, une religieuse, un prêtre, même un laïc … peut amener à penser à la vie religieuse … ou entretenir ou confirmer une vocation naissante … ou au contraire annihiler celle-ci !

C’est la question que tout chrétien devrait se poser : ais-je déjà parler à un jeune qu’il pourrait entrer dans la vie religieuse ? Et aux parents : Est-ce que j’ai déjà pensé qu’un de mes enfants pourrait entrer dans la vie religieuse, et quelle serait ma réaction ?

Il y a une quantité d’autres choses à faire dans l’Église auxquelles chacun peut participer : on pense à tout ce qui a trait à la liturgie : les fleurs, les chants, la musique, les lecteurs, les quêteurs, l’accueil, les donneurs de communion … ceux qu’on voit … et tous ceux qu’on ne voit pas : les balayeuses (et parfois des balayeurs), ceux qui rédige les prières universelles, qui font les photocopies, qui assurent le secrétariat ou la comptabilité, qui s’occupe de l’ordinateur ou du site internet de la paroisse … et puis les catéchistes, c’est le moment où on en cherche … et puis …

Cela fait beaucoup de monde …

Mais qui va chercher tous des gens ?

Dieu bien sûr, qui ne cesse d’inciter les gens à participer à la vie de son Église …

Mais pas que lui.

Il y a des paroisses où c’est le prêtre qui s’occupe de tout, d’autres où le prêtre demande aux laïcs de chercher, et d’autres où il y a une recherche partagée et discutée entre tous … la décision finale revenant au prêtre. C’est sans doute la meilleure solution.

Mais je crois qu’il faut nous mettre à l’image de Dieu, qui sans cesse va à la recherche de personnes pour que son Église soit vivante, du matin au soir, chaque jour …

Prier pour que le Père envoie des ouvriers à la moisson, c’est bien …mais ce n’est pas suffisant. Il faut que chacun se sente concerné par la mission de l’Église et y participe … avec ses moyens … avec ses charismes … avec son cœur …

Comme le disait saint Paul :

« Les dons de la grâce sont variés, mais c’est le même Esprit.

Les services sont variés, mais c’est le même Seigneur.

Les activités sont variées, mais c’est le même Dieu qui agit en tout et en tous.

À chacun est donnée la manifestation de l’Esprit en vue du bien.

À celui-ci est donnée, par l’Esprit, une parole de sagesse ; à un autre, une parole de connaissance, selon le même Esprit ; un autre reçoit, dans le même Esprit, un don de foi ; un autre encore, dans l’unique Esprit, des dons de guérison ; à un autre est donné d’opérer des miracles, à un autre de prophétiser, à un autre de discerner les inspirations ; à l’un, de parler diverses langues mystérieuses ; à l’autre, de les interpréter.

Mais celui qui agit en tout cela, c’est l’unique et même Esprit : il distribue ses dons, comme il le veut, à chacun en particulier. » (1 Co 12, 4-11)

Tous, nous avons à aider Dieu à trouver des ouvriers pour la mission de l’Église.

Seigneur Dieu,

tu es toujours à la recherche

de nouveaux ouvriers

pour que vive ton Église,

mais tu n’es pas seul.

Chacun de nous est invité

à participer à la vie de ton Église,

et à susciter de nouveaux ouvriers

pour la mission de celle-ci.

Aide-nous de ton Esprit.

 

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 25°




25ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER

« La logique de l’Amour »

(Mt 20,1-16)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples cette parabole : « En effet, le royaume des Cieux est comparable au maître d’un domaine qui sortit dès le matin afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne.
Il se mit d’accord avec eux sur le salaire de la journée : un denier, c’est-à-dire une pièce d’argent, et il les envoya à sa vigne.
Sorti vers neuf heures, il en vit d’autres qui étaient là, sur la place, sans rien faire.
Et à ceux-là, il dit : “Allez à ma vigne, vous aussi, et je vous donnerai ce qui est juste.”
Ils y allèrent. Il sortit de nouveau vers midi, puis vers trois heures, et fit de même.
Vers cinq heures, il sortit encore, en trouva d’autres qui étaient là et leur dit : “Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?”
Ils lui répondirent : “Parce que personne ne nous a embauchés.” Il leur dit : “Allez à ma vigne, vous aussi.”
Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant : “Appelle les ouvriers et distribue le salaire, en commençant par les derniers pour finir par les premiers.”
Ceux qui avaient commencé à cinq heures s’avancèrent et reçurent chacun une pièce d’un denier.
Quand vint le tour des premiers, ils pensaient recevoir davantage, mais ils reçurent, eux aussi, chacun une pièce d’un denier.
En la recevant, ils récriminaient contre le maître du domaine :
“Ceux-là, les derniers venus, n’ont fait qu’une heure, et tu les traites à l’égal de nous, qui avons enduré le poids du jour et la chaleur !”
Mais le maître répondit à l’un d’entre eux : “Mon ami, je ne suis pas injuste envers toi. N’as-tu pas été d’accord avec moi pour un denier ?
Prends ce qui te revient, et va-t’en. Je veux donner au dernier venu autant qu’à toi :
n’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mes biens ? Ou alors ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ?”
C’est ainsi que les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. »

                    

             Deux logiques s’affrontent dans notre parabole : celle du mérite, et celle de la bonté.    Dans la première, l’homme est au centre, avec ses froids critères de justice qui ne laissent aucune place à la bonté, à la générosité. « Je travaille, je fais des efforts et des sacrifices : je mérite donc de recevoir le salaire qui correspond à ma peine. » Dans cette logique, l’homme est seul : il se contemple dans un miroir, lui et son œuvre, et il juge, il se juge, il apprécie, il s’apprécie. Dieu n’a rien à dire sinon à lui donner ce qu’il mérite, ce qui est juste à ses yeux… En fait, ici, c’est l’homme qui décide de tout : Dieu n’a plus qu’une seule chose à faire, obéir…

         Cette recherche de « soi », ne peut que déboucher sur l’autosatisfaction, l’amour propre, l’orgueil et le jugement des autres, sur la base des mêmes critères, des jugements rarement élogieux, souvent méprisants (Lc 18,11-12 ; Jn 7,49)… Loin de rassembler, ils ne font que creuser le fossé et marquer la distance : « Ces derniers venus n’ont fait qu’une heure », et ils reçoivent le même salaire, disent, scandalisés, ceux qui avaient été « embauchés dès le matin ». En fait, ils sont jaloux… « Ils ont travaillé moins que moi, et ils reçoivent autant que moi ! Ce n’est pas juste ! » Ce qui revient à dire à Dieu : « Tu n’es pas juste ! » Et voilà l’homme qui se place au-dessus de Dieu…

          La logique de la bonté ne recherche, elle, que le bien, le bonheur, la joie de l’autre (Jr 32,37-41). Les derniers embauchés n’étaient pas responsables de leur inactivité : « Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?… Parce que personne ne nous a embauchés ! » Leur bonne volonté est bien là, ils n’ont pas cherché à s’esquiver… Et lorsque vient l’heure de la paye, ils ne réclament rien car ils savent qu’ils ne méritent rien ! Mais voilà qu’ils reçoivent comme les premiers ! Bonté du Maître ! Joie !

          Voilà comment agit ce Dieu et Père qui est Amour (1Jn 4,8) en tout son être, et qui ne recherche que le bien le plus profond de tous ceux et celles qu’il aime, envers et contre tout (Mt 5,43-48) et il aime tous les hommes qu’il a créés (Sg 11,24 ; Jn 3,16-17 ; 1Tm 2,3-6) ! Heureux celui qui se tournera de tout cœur, et le plus tôt possible, vers Lui : il ne pourra qu’être comblé et comblé encore (Lc 19,26). Et dans cette logique de l’amour, où nul ne mérite rien, où tout se reçoit gratuitement (Ep 2,4-10 ; Rm 6,23), où chacun ne recherche pas son propre intérêt mais celui de l’autre (1Co 10,24), il se réjouira lui aussi du bonheur de ceux qui, peut-être après lui, à la dernière heure, ont enfin dit « Oui ! » à l’Amour !  DJF




Audience Générale du Mercredi 9 Septembre 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 9 Septembre 2020


Chers frères et sœurs, bonjour!

La crise que nous vivons à cause de la pandémie frappe tout le monde; nous pouvons en sortir meilleurs si nous cherchons tous ensemble le bien commun; dans le cas contraire, nous en sortirons pires.  Malheureusement, nous assistons à l’apparition d’intérêts partisans. Par exemple, certains voudraient s’approprier de solutions possibles, comme dans le cas des vaccins et ensuite les vendre aux autres. D’autres profitent de la situation pour fomenter des divisions: pour chercher des avantages économiques ou politiques, en engendrant ou en accroissant les conflits. D’autres ne s’intéressent tout simplement pas à la souffrance d’autrui, passent outre  et poursuivent leur chemin (cf. Lc 10, 30-32). Ce sont les fidèles de Ponce Pilate, ils s’en lavent les mains.

La réponse chrétienne à la pandémie et aux conséquentes crises socio-économiques se base sur l’amour, tout d’abord l’amour de Dieu qui nous précède toujours (cf. 1 Jn 4, 19). Il nous aime le premier, Il nous précède toujours dans l’amour et dans les solutions. Il nous aime de manière inconditionnée, et quand nous accueillons cet amour divin, alors nous pouvons répondre de manière semblable. Je n’aime pas seulement ceux qui m’aiment: ma famille, mes amis, mon groupe, mais aussi ceux qui ne m’aiment pas, j’aime aussi ceux qui ne me connaissent pas, j’aime aussi ceux qui sont des étrangers, et aussi ceux qui me font souffrir ou que je considère comme des ennemis (cf. Mt 5, 44). C’est la sagesse chrétienne, c’est l’attitude de Jésus. Et le point le plus élevé de la sainteté, disons ainsi, est d’aimer ses ennemis, et ce n’est pas facile. Certes, aimer tout le monde, y compris ses ennemis, est difficile – je dirais que c’est un art! Mais un art qu’on peut apprendre et améliorer. L’amour vrai, qui nous rend féconds et libres, est toujours expansif et inclusif. Cet amour soigne, guérit et fait du bien. Bien souvent, une caresse fait plus de bien que beaucoup d’arguments, une caresse de pardon et pas tant d’arguments pour se défendre. C’est l’amour inclusif qui guérit.

L’amour ne se limite donc pas aux relations entre deux ou trois personnes, ou aux amis, ou à la famille, il va au-delà. Il comprend les rapports civiques et politiques (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique [CEC], nn. 1907-1912), y compris le rapport avec la nature (Enc. Laudato si’ [LS], n. 231). Etant donné que nous sommes des êtres sociaux et politiques, l’une des plus hautes expressions de l’amour est précisément celle sociale et politique, décisive  pour le développement humain et pour affronter chaque type de crise (ibid., n. 231). Nous savons que l’amour féconde les familles et les amitiés; mais il est bon de rappeler qu’il féconde également les relations sociales, culturelles, économiques et politiques, en nous permettant de construire une “civilisation de l’amour”, comme aimait le dire saint Paul VI[1] et, dans son sillage, saint Jean-Paul II. Sans cette inspiration prévaut la culture de l’égoïsme, de l’indifférence, du rebut, c’est-à-dire mettre au rebut celui que je n’aime pas, celui que je ne peux pas aimer ou ceux qui me semblent inutiles dans la société. Aujourd’hui, à l’entrée, un couple m’a dit: “Priez pour nous, parce que nous avons un fils porteur de handicap”. J’ai demandé: “Quel âge a-t-il? – Il est grand – Et qu’est-ce que vous faites? – Nous l’accompagnons, nous l’aidons”. Toute la vie des parents donnée à ce fils porteur de handicap.  C’est de l’amour. Et les ennemis, les adversaires politiques, selon notre opinion, semblent être des porteurs de handicap politiques et sociaux, mais ils semblent. Dieu seul sait s’ils le sont ou pas. Mais nous devons les aimer, nous devons dialoguer, nous devons construire cette civilisation de l’amour, cette civilisation politique, sociale, de l’unité de toute l’humanité. Tout cela est l’opposé des guerres, des divisions, des envies, également des guerres en famille. L’amour inclusif est social, il est familial, il est politique: l’amour envahit tout!

Le coronavirus nous montre que le vrai bien pour chacun est un bien commun pas seulement individuel et, vice-versa, le bien commun est un vrai bien pour la personne (cf.  CEC, nn. 1905-1906). Si une personne cherche seulement son propre bien, elle est égoïste. En revanche, la personne est davantage une personne quand elle ouvre son propre bien à tous, qu’elle le partage. La santé, outre qu’un bien individuel, est également un bien public. Une société saine est celle qui prend soin de la santé de tous.

Un virus qui ne connaît pas de barrières, de frontières ou de distinctions culturelles et politiques doit être affronté avec un amour sans barrières, frontières ou distinctions. Cet amour peur engendrer des structures sociales qui nous encouragent à partager plutôt qu’à entrer en compétition, qui nous permettent d’inclure les plus vulnérables et de ne pas les exclure, et qui nous aident à exprimer le meilleur de notre nature humaine et non le pire. Le véritable amour ne connaît pas la culture du rebut, il ne sait pas ce que c’est. En effet, quand nous aimons et que nous engendrons la créativité, quand nous engendrons la confiance et la solidarité, c’est là qu’apparaissent des initiatives concrètes pour le bien commun.[2] Et cela vaut aussi bien au niveau des petites et des grandes communautés, qu’au niveau international. Ce que l’on fait en famille, ce que l’on fait dans le quartier, ce que l’on fait dans le village, ce que l’on fait dans la grande ville et au niveau international est la même chose: c’est la même semence qui grandit et porte du fruit. Si dans ta famille, dans ton quartier, tu commences avec l’envie, avec la lutte, à la fin il y aura la “guerre”. En revanche, si tu commences avec l’amour, à partager l’amour, le pardon, alors, il y aura l’amour et le pardon pour tous.

Au contraire, si les solutions à la pandémie portent l’empreinte de l’égoïsme, qu’il soit de personnes, d’entreprises ou de pays, nous pouvons peut-être sortir du coronavirus, mais certainement pas de la crise humaine et sociale que le virus a soulignée et accentuée. Faites donc attention à ne pas construire sur le sable (cf. Mt 7, 21-27)! Pour construire une société saine, inclusive, juste et pacifique, nous devons le faire sur le roc du bien commun.[3] Le bien commun est un roc. Et c’est la tâche de tous, pas seulement de quelques spécialistes. Saint Thomas d’Aquin disait que la promotion du bien  commun est un devoir de justice qui incombe à chaque citoyen. Chaque citoyen est responsable du bien commun. Et pour les chrétiens c’est aussi une mission. Comme l’enseigne saint Ignace de Loyola, orienter nos efforts quotidiens vers le bien commun est une manière de recevoir et de diffuser la gloire de Dieu.

Malheureusement, la politique ne jouit pas souvent d’une bonne réputation, et nous savons pourquoi. Cela ne veut pas dire que les politiciens soient tous mauvais, non, je ne veux pas dire cela. Je dis seulement que, malheureusement, la politique ne jouit pas souvent d’une bonne réputation. Il ne faut cependant pas se résigner à cette vision négative, mais réagir en démontrant par les faits qu’une bonne politique est possible, et même un devoir,[4] celle qui met au centre la personne humaine et le bien commun. Si vous lisez l’histoire de l’humanité, vous trouverez beaucoup d’hommes politiques saints, qui sont allés sur cette voie. Cela est possible dans la mesure ou chaque citoyen et, en particulier qui assume des engagements et des responsabilités sociales et politiques, enracine sa propre action dans les principes éthiques et l’anime avec l’amour social et politique. Les chrétiens, en particulier les fidèles laïcs, sont appelés à donner un bon témoignage de cela et ils peuvent le faire grâce à la vertu de la charité, en cultivant sa dimension sociale intrinsèque.

Il est donc temps d’accroître notre amour social – je veux souligner cela: notre amour social –, en contribuant tous, à partir de notre petitesse. Le bien commun demande la participation de tous. Si chacun y met du sien, et si personne n’est laissé de côté, nous pourrons régénérer de bonnes relations au niveau communautaire, national, international et également en harmonie avec l’environnement (cf.  LS, n. 236). Ainsi dans nos gestes, même les plus humbles, deviendra visible quelque chose de l’image de Dieu que nous portons en nous, parce que Dieu est Trinité, Dieu est amour. C’est la plus belle définition de Dieu de la Bible. Elle nous est donnée par l’apôtre Jean, qui aimait tant Jésus: Dieu est amour. Avec son aide, nous pouvons guérir le monde en travaillant tous ensemble pour le bien commun, pas seulement pour notre propre bien, mais pour le bien commun, de tous.


[1] Message pour la Xe Journée mondiale de la paix 1er janvier 1977AAS 68 (1976), 709.

[2] Cf. S. Jean-Paul II, Enc. Sollicitudo rei socialis, 38.

[3]  Ibid., 10.

[4] Cf. Message pour la Journée mondiale de la paix 1er janvier 2019 (8 décembre 2018).


François a ensuite salué les pèlerins francophones:

Je salue cordialement les personnes de langue française.

La recherche du bien commun, dont nos sociétés ont tant besoin, demande la participation de chacun. Faisons grandir en nos cœurs l’amour pour la société dans laquelle nous vivons. Agissons dans le souci du bien de nos frères dans nos gestes quotidiens, et rendons ainsi témoignage de l’amour de Dieu qui nous habite.

Que Dieu vous bénisse.




24ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 21-35) – Francis COUSIN)

« C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur.»

 

Attention à ne pas nous tromper dans l’interprétation de cette phrase.

Elle ne veut pas dire, comme on pourrait le croire au premier abord, que, si nous voulons être pardonné par Dieu, il faut que nous pardonnions nous aussi, et donc que le pardon que nous donnons est prioritaire (en ce sens qu’il est le premier) pour nous permettre d’être pardonné, et donc d’être sauvé.

Ce n’est pas ce que nous dit l’évangile.

Le pardon, celui que nous donnons, ne peut pas être une obligation nécessaire.

Dieu, qui est amour, nous laisse toujours libre !

Et puis, cette obligation nous donnerait comme une sorte d’avantage sur Dieu : « J’ai pardonné, donc tu dois me pardonner ».

Cela n’est pas possible … nous ne pouvons pas avoir ’’la main’’ sur Dieu.

Cela ressemblerait à un marchandage que nous ferions avec Dieu … ce qui ne peut se faire.

C’est une mauvaise interprétation de la parabole, car il ne faut pas oublier le début : le roi, c’est-à-dire Dieu, a commencé par donner son pardon, à remettre sa dette, une dette énorme, à son serviteur (qu’il nommera par la suite le serviteur méchant) … et ce qui est reproché à celui-ci est de ne pas avoir remis à son compagnon une dette de beaucoup inférieure à la sienne.

Ce serviteur n’a regardé que les faits : mon compagnon a une dette envers moi, donc il doit me rembourser ! Mais il ne l’a pas mise en relation avec sa propre dette annulée …

Comme toujours, Dieu est le premier à agir, et il nous demande de faire comme lui.

Il aime tout le monde, et comme il aime, il pardonne les fautes que ceux qui se reconnaissent pécheurs.

Cela demande de l’humilité de reconnaître ses fautes !

Et l’humilité nous permet de reconnaître que nous ne sommes pas meilleurs que les autres, ou que les autres ne sont pas moins bons que nous !

Se reconnaître pécheurs nous permet aussi de reconnaître que les autres peuvent aussi être pécheurs, tout comme nous, … et à leur pardonner.

Mais le pardon est une chose qui peut être difficile à faire.

Dans la vie courante, il arrive souvent, quand on bouscule quelqu’un, quand malencontreusement on lui marche sur les pieds, ou quand on passe devant lui, qu’on utilise simplement le mot « pardon ! », sans qu’on sache exactement si c’est une excuse ou une demande de pardon … D’ailleurs, on ne demande pas de réponse et la personne à laquelle on s’adresse n’en donne généralement pas non plus. C’est un pardon qui n’en est pas vraiment un, et qui ne ’’coûte’’ rien.

La plupart du temps, il faut se forcer pour demander (ou pour donner son) pardon … et il faut mettre une croix sur son orgueil … et se reconnaître humble …

Mais il arrive parfois (et c’est peut-être le plus souvent) que certains faits soient très difficiles à pardonner … et qu’ils soient même parfois qualifiés d’« impardonnables », comme les meurtres, les atteintes à la vie (physique, sociale, spirituelle …) par ceux qui les subissent, directement ou indirectement, … et même par le droit international, la presse, et tous ceux qui en ont connaissance …

Et pourtant, à la demande de Pierre de savoir s’il faut pardonner jusqu’à sept fois, Jésus nous dit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. ».

Or le nombre sept, dans la Bible, représente la plénitude, la perfection. Pierre demandait donc s’il faut aller jusqu’à la perfection dans le pardon. Jésus lui, demande d’aller au-delà de la perfection, au-delà de la limite humaine, ce qui n’est possible que dans le surnaturel, dans ce qui est divin, donc seulement avec la grâce de Dieu. Le véritable pardon ne peut se faire qu’avec l’aide de Dieu.

Jésus, lui, est allé jusqu’au bout et il a demandé le pardon quand, humilié, bafoué, calomnié, outragé, « obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix » (Ph 2, 8), il demande à son Père : « Pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34).

Pour nous, quand le pardon devient difficile, on ne peut le demander (ou l‘accorder) qu’en demandant l’aide de Jésus.

Certains ont réussi à le faire … Pourquoi pas nous ?

Et si Jésus a pu dire : « C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15,7), on pourrait aussi ajouter, car cela me semble aussi vrai : « Et qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui est pardonné par celui à qui il a fait du tort … »

Seigneur Jésus,

tu nous invites à toujours pardonner …

mais bien souvent,

c’est au-dessus de nos forces,

car nous sommes humains,

trop fiers, pas assez humbles.

Donne-nous la grâce du pardon !

 

Francis Cousin

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le titre ci-après:

Prière dim ordinaire A 24°




Audience Générale du Mercredi 2 Septembre 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 2 Septembre 2020


Chers frères et sœurs, bonjour !

Après tant de mois, nous reprenons notre rencontre face à face et non devant un écran. Face à face. C’est beau ! L’actuelle pandémie a mis en évidence notre interdépendance : nous sommes tous liés, les uns aux autres, tant dans le mal que dans le bien. C’est pourquoi, pour sortir meilleurs de cette crise, nous devons le faire ensemble. Ensemble, pas tout seuls, ensemble. Seuls non, parce que l’on ne peut pas ! Ou on le fait ensemble, ou on ne le fait pas. Nous devons le faire ensemble,  tous, dans la solidarité. Je voudrais souligner ce mot aujourd’hui : solidarité.

En tant que famille humaine, nous avons notre origine commune en Dieu ; nous habitons dans une maison commune, la planète-jardin, la terre dans laquelle Dieu nous a placés ; et nous avons une destination commune dans le Christ. Mais quand nous oublions tout cela, notre interdépendance devient dépendance de certains à l’égard d’autres – nous perdons cette harmonie de l’interdépendance dans la solidarité – qui accroît l’inégalité et la marginalisation ; le tissu social s’affaiblit et l’environnement se dégrade. Toujours la même chose. La même façon d’ agir.

C’est pourquoi, le principe de solidarité est aujourd’hui plus que jamais nécessaire, comme l’a enseigné saint Jean-Paul II (cf. Enc. Sollicitudo rei socialis, nn. 38-40). Dans un monde interconnecté, nous faisons l’expérience de ce que signifie vivre dans le même « village global ». Cette expression est belle : le grand monde n’est autre qu’un village global, parce que tout est lié. Mais nous ne transformons pas toujours cette interdépendance en solidarité.  Il y a un long chemin entre l’interdépendance et la solidarité. Les égoïsmes – individuels, nationaux et des groupes de pouvoir – ainsi que les rigidités idéologiques alimentent au contraire des « structures de péché » (ibid., n. 36).

« Le mot “solidarité” est un peu usé et, parfois, on l’interprète mal, mais il désigne beaucoup plus que quelques actes sporadiques de générosité. C’est plus que cela ! Il demande de créer une nouvelle mentalité qui pense en termes de communauté, de priorité de la vie de tous sur l’appropriation des biens par quelques-uns » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 188). Cela signifie solidarité. Il ne s’agit pas seulement d’aider les autres – c’est bien de le faire, mais c’est plus que cela –  il s’agit de justice (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, nn. 1938-1940). L’interdépendance, pour être solidaire et porter des fruits, a besoin de fortes racines dans l’humain et dans la nature créée par Dieu, elle a besoin du respect des visages et de la terre.

Dès le début, la Bible nous avertit. Pensons au récit de la Tour de Babel (cf. Gn 11, 1-9), qui décrit ce qui se produit quand nous cherchons à atteindre le ciel – notre objectif – en ignorant le lien avec l’humain, avec la création et avec le Créateur. C’est une façon de dire : cela arrive chaque fois que l’on veut monter, monter, sans tenir compte des autres. Moi seulement ! Pensons  à la tour. Nous construisons des tours et des gratte-ciels, mais nous détruisons la communauté. Nous unifions les édifices et les langues, mais nous mortifions la richesse culturelle. Nous voulons être les maîtres de la Terre, mais nous détruisons la biodiversité et l’équilibre écologique. Je vous ai raconté au cours d’une autre audience l’histoire de ces pêcheurs de  San Benedetto del Tronto qui sont venus cette année et qui m’ont dit : « Nous avons récupéré de la mer 24 tonnes de déchets, dont la moitié était du plastique ». Imaginez ! Ces hommes capturent des poissons, oui, mais ils ont aussi l’idée de capturer les déchets et de les extraire pour nettoyer la mer. Mais cette [pollution] signifie détruire la terre, ne pas avoir de solidarité avec la terre qui est un don et l’équilibre écologique.

Je me souviens d’un récit médiéval qui décrit ce « syndrome de Babel », qui se produit quand il n’y a pas de solidarité. Ce récit médiéval  dit que, lors de la construction de la tour, quand un homme tombait – c’étaient des esclaves – et mourait, personne ne disait rien, au mieux : « Le pauvre, il s’est trompé et est tombé ». Mais si une brique tombait, tous se plaignaient. Et si quelqu’un était coupable, il était puni ! Pourquoi ? Parce qu’une brique coûtait cher à fabriquer, à préparer, à cuire. Il fallait du temps et du travail pour fabriquer une  brique. Une brique valait plus que la vie humaine. Que chacun de nous pense à ce qui se produit aujourd’hui. Malheureusement, aujourd’hui aussi, quelque chose de ce genre peut se produire. Le marché financier perd quelques points – nous l’avons vu sur les journaux ces jours-ci – et la nouvelle est rapportée par toutes les agences. Des milliers de personnes tombent à cause de la faim, de la misère, et personne n’en parle.

En opposition totale à Babel, nous trouvons la Pentecôte, nous l’avons entendu au début de l’audience (cf. Ac 2, 1-3). L’Esprit Saint, en descendant d’en haut comme le vent et le feu, investit la communauté enfermée au cénacle, lui insuffle la force de Dieu, la pousse à sortir et à annoncer à tous le Seigneur Jésus. L’Esprit crée l’unité dans la diversité, il crée l’harmonie. Dans le récit de la Tour de Babel, il n’y avait pas l’harmonie : il y avait le fait d’aller de l’avant pour gagner de l’argent. Là, l’homme n’était qu’un simple instrument, une simple « force de travail », mais ici, avec la Pentecôte, chacun de nous est un instrument, mais un instrument communautaire qui participe de tout son être à l’édification de la communauté. Saint François d’Assise le savait bien et, animé par l’Esprit, il donnait à toutes les personnes, et même aux créatures, le nom de frère ou sœur (cf. LS, n. 11; cf. Saint Bonaventure, Legenda maior, VIII, 6: FF 1145). Même le frère loup, rappelons-nous.

Avec la Pentecôte, Dieu se fait présent et inspire la foi de la communauté unie dans la diversité et dans la solidarité. Diversité et solidarité unies dans l’harmonie, telle est la voie. Une diversité solidaire possède les « anticorps » afin que la particularité de chacun – qui est un don, unique et irrépétible – ne tombe pas malade à cause de l’individualisme, de l’égoïsme. La diversité solidaire possède également les anticorps pour guérir les structures et les processus sociaux qui ont dégénéré en systèmes d’injustice, en systèmes d’oppression (cf. Compendium de la doctrine sociale de l’Eglise, n. 192). La solidarité est donc aujourd’hui la voie à parcourir vers un monde après la pandémie, vers la guérison de nos maladies interpersonnelles et sociales. Il n’y en a pas d’autre. Ou nous allons de l’avant sur la voie de la solidarité ou les choses seront pires. Je veux le répéter : on ne sort pas pareils qu’avant d’une crise. La pandémie est une crise. On sort d’une crise meilleurs ou pires. Nous devons choisir. Et la solidarité est précisément une voie pour sortir meilleurs de la crise, pas avec des changements superficiels, avec un coup de peinture comme ça tout va bien. Non ! Meilleurs !

Au milieu de la crise, une solidarité guidée par la foi nous permet de traduire l’amour de Dieu dans notre culture mondialisée, non pas en construisant des tours ou des murs – et combien de murs se construisent  aujourd’hui – qui divisent mais ensuite s’écroulent, mais en tissant des communautés et en soutenant des processus de croissance véritablement humaine et solide. C’est pour cela que la solidarité peut aider. Je pose une question : est-ce que je pense aux besoins des autres ? Que chacun réponde dans son cœur.

Au milieu des crises et des tempêtes, le Seigneur nous interpelle et nous invite à réveiller et à rendre active cette solidarité capable de donner une solidité, un soutien et un sens à ces heures où tout semble sombrer. Puisse la créativité de l’Esprit Saint nous encourager à engendrer de nouvelles formes d’accueil familial, de fraternité féconde et de solidarité universelle. Merci.


Je salue cordialement les pèlerins de langue française.

En ces temps difficiles que nous traversons je vous encourage à répondre dans la foi aux appels que l’Esprit-Saint nous adresse à faire preuve de solidarité envers les personnes que nous rencontrons et qui comptent sur notre soutien fraternel.

Que Dieu vous bénisse !




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN

Ézékiel 33 7–9 ; Romains 13 8–10 ; Matthieu 18 15–20

 

Les textes d’aujourd’hui ont en commun de parler de la communauté qu’est l’Eglise, et des petits groupes de chrétiens au sein de l’Eglise. Et dans une communauté ou même des groupes, il y a des règles du vivre ensemble. Ces règles sont établies par les responsables hiérarchiques quand il s’agit de l’Église, et il y a tout simplement des règles du savoir-vivre ensemble que les gens d’une même région ou du même quartier connaissent sans que cela soit clairement indiqué. En tout cas, concernant les chrétiens qui se rassemblent, toutes les règles n’ont qu’une fin : union, solidarité, entre aide, paix, bonne entente et tout cela, en toile de fond, le commandement du Christ : « aimez-vous les uns les autres ». Et c’est en suivant les commandements de Dieu qu’on reconnaît celui qui aime Jésus. Jn 14,21 : « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime; or celui qui m’aime sera aimé de mon Père; et je l’aimerai et je me manifesterai à lui ». Et c’est parce qu’on oublie les commandements de Dieu et les enseignements du Christ que l’on finit par ne regarder que ses propres intérêts. On finit alors par s’éloigner du Christ, à commettre des fautes, à semer la mésentente. Le fait d’oublier le Christ, d’oublier ses commandements, d’oublier l’Eglise, nous amène à ne s’occuper que de nous-mêmes, bien égoïstement. Egoïstement parce qu’on est toujours bien attaché au monde et non pas à Dieu ou au Christ. Grignion de Monfort : §75 – « Cette sagesse du monde (qui concerne ceux qui délaissent Dieu) est une conformité parfaite aux maximes et aux modes du monde; c’est une tendance continuelle vers la grandeur et l’estime; c’est une recherche continuelle et secrète de son plaisir et de son intérêt, non pas d’une manière grossière et criante, en commettant quelque péché scandaleux, mais d’une manière fine, trompeuse et politique; autrement ce ne serait plus selon le monde une sagesse, mais un libertinage. §76 – Un sage du siècle (c’est-à-dire quelqu’un qui semble ne pas avoir besoin de Dieu) est un homme qui sait bien faire ses affaires, et faire réussir tout à son avantage temporel, sans quasi paraître vouloir le faire; qui sait l’art de déguiser et de tromper finement sans qu’on s’en aperçoive; qui dit ou fait une chose et pense l’autre; qui n’ignore rien des airs et des compliments du monde; qui sait s’accommoder à tous pour en venir à ses fins, sans se mettre beaucoup en peine de l’honneur et de l’intérêt de Dieu; qui fait un secret mais funeste accord (ou un mélange) de la vérité avec le mensonge, de l’Evangile avec le monde, de la vertu avec le péché, de Jésus-Christ avec Bélial (2Co 6,15 :  c’est-à-dire avec le diable); qui veut passer pour un honnête homme, …. Enfin, un sage mondain est un homme qui, ne se conduisant que par la lumière des sens et de la raison humaine, ne cherche qu’à se couvrir des apparences de chrétien et d’honnête homme, sans se mettre beaucoup en peine de plaire à Dieu, ni d’expier, par la pénitence, les péchés qu’il a commis contre sa divine Majesté ». Voilà pourquoi dans une communauté, et particulièrement dans une communauté chrétienne, des règles sont là pour que le « vivre ensemble » se passe au mieux. Mais parce que l’homme est souvent encore attaché aux choses du monde et pas assez à Dieu, les règles du « vivre ensemble » de la communauté peuvent ne pas être respectées. C’est alors le trouble au sein même de l’Eglise. En cas de conflit, une procédure est à observer. La première démarche consiste à rencontrer en tête à tête la personne conflictuelle et qui pose problème au sein du groupe. Le but est de se comprendre. Dans tous les cas, il faut être diplomate et y aller avec douceur.

Premier cas : Si la personne pêche directement contre Dieu et que l’on soit au courant, il faut essayer d’accompagner, seul à seul, le pécheur avec suffisamment de tact et d’intelligence pour qu’il prenne conscience de son péché et puisse s’en sortir. Des textes tirés de la Bible ou des exemples pris dans la vie courante peuvent fortement contribuer à faire prendre conscience de la gravité du péché. Là encore, la formation biblique peut aider le pécheur à progresser dans son union au Christ et par conséquent dans son attitude à avoir dans la communauté ou dans un groupe.

Deuxième cas, si la personne pêche contre nous, c’est-à-dire nous fait du tort. Là aussi, de manière diplomate, on sera amené à faire comprendre, seul à seul, avec douceur, à la personne le tort qu’il nous a fait personnellement ou au groupe de manière. Si cette première démarche se montre infructueuse, on aura alors recours à la communauté ou au groupe pour corriger fraternellement le fautif. Si, même dans ce cas, ce dernier ne se corrige pas, alors cela peut aller jusqu’à la coupure de certains liens d’ordre social pour que le groupe puisse continuer sereinement sa mission, ou, à un autre niveau si les cas est extrêmement grave, aller jusqu’à l’excommunication par la hiérarchie. C’est ce qui s’est passé il y a quelques années lorsque l’évêque de la Réunion a fait afficher dans chaque église un communiqué pour dire qu’à la Réunion une personne a été excommuniée de l’Église. Dans tous les cas, comme tout péché, c’est toujours une affaire en rapport avec les commandements de Dieu : aimer Dieu et aimer son prochain, mais aussi d’obéissance de la foi. Parce que nous avons foi en Dieu, cette foi nous amène à l’obéissance des commandements de Dieu. Et tout péché est une désobéissance. Ne pas aimer son prochain c’est une manière aussi de dire qu’on ne pense pas aux autres et qu’on pense surtout à soi-même. Comme dit le créole : « A moins même mon maître ». Or, tout l’enseignement du Christ est de nous dire qu’il faut aimer Dieu et son prochain. Il ne nous demande pas d’être amoureux de tout le monde mais d’aimer tout le monde. Et aimer, cela commence souvent par « des petits riens » qui peuvent faire plaisir aux autres : un regard, un bonjour, un petit signe de la main, ne pas se mettre en colère alors même qu’il y aurait toutes les raisons de l’être, éviter la critique, ne rien dire à ceux qui vous regardent de travers, etc…Dans tous les cas, le chrétien peut toujours se conduire en chrétien, et il le pourra à la seule condition d’avoir le regard fixé sur le Christ. Mi 6,8 : « On t’a fait savoir, ô homme, ce qui est bien, ce que Yahvé réclame de toi : rien d’autre que d’accomplir la justice, d’aimer la bonté et de t’appliquer à marcher avec ton Dieu ». Accomplir la justice, c’est se comporter de manière à rester en accord avec les commandements de Dieu tout en vivant dans le monde, dans une communauté ou dans un groupe de chrétiens. Ce qui signifie que Celui qui est à la suite du Christ doit être capable de garder son sang-froid, son calme, avec une paix intérieure qui ne le quitte pas parce son regard intérieur est fixé sur le Seigneur alors même, qu’il subit toutes sortes de vexations ou de critiques et être capable de reconnaître qu’il a tort dans certains cas.  « Le Seigneur ne demande rien d’extraordinaire à l’homme, mais seulement d’agir de manière droite en évitant le péché (c’est le sens de l’expression « pratiquer le droit »), aimer et pratiquer la miséricorde (hesed), et enfin vivre humblement avec Dieu. Voilà la conduite de l’homme qui plait à Dieu. On n’a pas besoin de tout retenir de la Bible, mais une seule expression : « Celui qui aime autrui a de ce fait accompli la Loi », ce qui signifie que tant que vous aimez le prochain, quel qu’il soit, vous ne péchez pas et tout ce qui est dit dans la Bible vous êtes en train de l’accomplir parce que vous avez de l’amour pour les autres. L’amour ou la charité c’est la même chose, et « la charité est la Loi dans sa plénitude ». Saint Augustin nous dit : « aime et fais ce que tu veux ».

Autrement dit, en aimant le prochain, vous accomplissez toutes les lois qui se trouvent dans la Bible et donc les dix commandements dont certains ont été repris par le deuxième texte d’aujourd’hui : « Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne tueras pas, tu ne voleras pas, tu ne convoiteras pas, et tous les autres se résument en cette formule : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. 10 La charité ne fait point de tort au prochain. La charité est donc la Loi dans sa plénitude ». Et la correction fraternelle dont parle l’Evangile, contrairement à ce qu’on pourrait penser, est une manière d’exercer la charité, l’amour, pour aider le pécheur à rectifier sa conduite de manière à plaire à Dieu. Le 1er texte d’aujourd’hui s’adresse au prophète qui doit avoir un rôle de guetteur. Le prophète n’est pas quelqu’un qui prédit l’avenir, son rôle est de dire la parole de Dieu. Tout chrétien, d’une certaine manière, est capable de dire la parole de Dieu, et donc d’être prophète à son niveau. Dieu donne donc la parole aux prophètes que sont les chrétiens pour faire passer ses lois, ses messages d’amour et de paix. Au prophète Jérémie (Jr 1,9) voici ce que Dieu lui dit : 9 … Voici que j’ai placé mes paroles en ta bouche ». Cet homme que Dieu inspire a le devoir de dire la parole de Dieu lorsque c’est nécessaire. Ézékiel nous dit: « Si je dis au méchant :  Méchant, tu vas mourir, et que tu ne parles pas pour avertir le méchant d’abandonner sa conduite, lui, le méchant, mourra de sa faute, mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang. 9 Si au contraire tu as averti le méchant d’abandonner sa conduite pour se convertir et qu’il ne s’est pas converti, il mourra, lui, à cause de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie ». L’Évangile d’aujourd’hui dit la même chose : 15 « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le, seul à seul. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère ». S’il n’écoute pas, cela retombera sur lui-même, il mourra de sa faute mais le chrétien qui l’aura conseillé sera quitte devant Dieu parce qu’il aura fait un geste d’amour envers le fautif pour essayer de le ramener à Dieu. C’est ce qu’on appelle la « correction fraternelle ». Et la correction fraternelle » est un devoir pour tout chrétien. Jc 5,20 : « celui qui ramène un pécheur de son égarement sauvera son âme de la mort et couvrira une multitude de péchés ». 1P4,8 : « conservez entre vous une grande charité, car la charité couvre une multitude de péchés ». Que Marie nous aide à répandre autour de nous l’amour de Dieu.




23ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 15-20) – Francis COUSIN)

 « Si ton frère a commis un péché contre toi … »

 

Dans l’évangile de ce jour, Jésus nous montre, non seulement l’importance du pardon, de la réconciliation, mais aussi une manière de faire pour obtenir cette réconciliation, en trois étapes :

– D’abord seul à seul, discrètement, sans grand bruit. Et si cela fonctionne, « Tu as gagné ton frère ».

– Ensuite, avec « un ou deux témoins » qui pourront certifier que la réconciliation est faite.

– Enfin, devant toute « l’assemblée de l’Église », afin que chacun soit témoin du tort effectué et de la réparation éventuelle. (La plupart des traductions actuelles parle de l’Église, ce qui un peu anachronique, et il semble préférable de traduire par communauté ou assemblée)

Et si aucun accord ne se fait, il faut considérer que la personne s’exclut de la communauté et doit être mise au rang des païens.

L’intérêt de ce passage est de montrer la dimension collective de la faute, qui est pourtant individuelle, et ce de deux manières. Dans la faute, il y a celui qui fait la faute, le pécheur, et celui qui subit la faute, la victime.

La faute établie une injustice entre deux membres de la communauté, ce qui fait que les liens entre tous les membres ne sont plus les mêmes : il y a un dés-accord qui joue sur l’harmonie de la communauté toute entière.

Pour ré-accorder l’harmonie entre les membres, il y a donc nécessité que chacun participe, au final, à la mise en œuvre de la réconciliation à l’intérieur de la communauté.

Pécheurs, nous le sommes tous. C’est pourquoi au début de nos célébrations nous nous reconnaissons pécheurs, en pensée, en paroles, par action et par omission, chacun pour soi, mais nous demandons aussi à la communion des saints et à tous nos frères présents de prier pour [nous] le Seigneur notre Dieu. C’est la dimension collective de la réparation des fautes.

Mais cette dimension collective n’exclut pas la dimension individuelle de prier pour les pécheurs, ainsi que le demandait Notre-Dame à Bernadette, à Lourdes : « Priez pour la conversion des pécheurs ».

Et ce que Dieu dit à Ézéchiel dans la première lecture peut aussi s’appliquer à chacun de nous : « Si tu ne lui dis pas d’abandonner sa conduite mauvaise, lui, le méchant, mourra de son péché, mais à toi, je demanderai compte de son sangAu contraire, si tu avertis le méchant d’abandonner sa conduite, et qu’il ne s’en détourne pas, lui mourra de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie. »

Pourtant, cette manière de penser n’est pas vraiment entrée dans les mœurs.

Quand on parle d’un pécheur, la première réaction est bien souvent de l’exclure … et de dire du mal de lui. Et peut-être d’en rajouter … surtout si on n’est pas concerné par la faute …

C’est ce qu’on appelle ici des ladi-lafé, ailleurs des commérages, des cancanages …

Ce à quoi le pape François disait : « Nous sommes habitués aux commérages, aux ragots, et souvent nous transformons nos communautés et même notre famille en un « enfer » où se manifeste cette forme de criminalité qui conduit à « tuer son frère et sa sœur avec sa langue » (Sainte Marthe, 2/9/2013), en s’appuyant sur le texte de saint Jean : « Quiconque a de la haine contre son frère est un meurtrier, et vous savez que pas un meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui. » (1 Jn 3,15).

Peut-être que nous devrions nous poser la question : Est-ce que, dans nos communautés, paroissiales ou de mouvements, nous laissons courir les ragots, voire même nous les alimentons en en rajoutant une couche ? Ou est-ce que nous faisons, avec les autres, tout notre possible pour atténuer au maximum les différents qui peuvent se faire jour parmi nous en essayant de réconcilier les personnes concernées ?

Jésus a dit, en parlant de nos communautés : « Tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13,35). Mais on pourrait dire aussi : « Tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous êtes capables de vous pardonner les uns les autres ».

Car c’est dans ces conditions-là, le pardon de tous dans la communauté, que l’amour se fera montrer.

En effet, on pourrait dire :

Le pardon est la condition de la réalisation de l’amour, et

L’amour est la condition de la réalisation du pardon.

Les deux sont indissolublement liés.

Seigneur Jésus,

tu nous invites à aller vers les autres

pour proposer le pardon,

mais tu insistes aussi

sur la responsabilité collective de la communauté

pour que le pardon soit effectif entre tous,

et qu’ainsi l’amour règne entre tous.

Mais on l’oublie souvent.

 

Francis Cousin

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le titre ci-après:

Prière dim ordinaire A 23°




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER

Travailler, ensemble, à « gagner nos frères »

(Mt 18, 15-20)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère.
S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins.
S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain.
Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.
Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux.
En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »

                    

             « Libre à l’égard de tous », écrivait St Paul, « je me suis fait l’esclave de tous, afin de gagner le plus grand nombre… Je me suis fait faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver à tout prix quelques-uns » (1Co 9,19‑22), car « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4-6)…

            Alors, « si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul », pour lui éviter d’être humilié devant les autres, « et montre lui sa faute » sans jamais oublier que nous sommes tous pécheurs, d’une manière ou d’une autre. Et « s’il t’écoute » avec simplicité et humilité, « tu auras gagné ton frère », et alors quelle joie ! Et un jour peut-être, c’est lui qui, à son tour, viendra te « gagner »…

            Aussi, « frères, même dans le cas où quelqu’un serait pris en faute, rétablissez-le en esprit de douceur, te surveillant toi-même, car tu pourrais bien toi aussi être tenté. Portez les fardeaux les uns des autres et accomplissez ainsi la Loi du Christ. Car si quelqu’un estime être quelque chose alors qu’il n’est rien, il se fait illusion » (Ga 6,1-3)…

            Et « s’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes » en espérant que le poids « plus lourd » de votre charité commune pourra percer l’écorce de son cœur… S’il refuse encore, que « toute l’Eglise » unisse ses forces et sa prière, car, « nous tous qui avons été abreuvés d’un même Esprit, nous ne formons qu’un seul Corps » (1Co 12,13). C’est pourquoi, si un membre est malade, c’est le Corps tout entier qui souffre (1Co 12,26). Et si un membre manque à l’appel, il manque à tous, car nous avons tous besoin les uns des autres pour que l’Eglise soit pleinement elle-même…

            En effet, cette Eglise, du point de vue de Dieu, a en fait la dimension de l’humanité tout entière, cette famille incroyablement nombreuse de ses enfants « créés à son Image et Ressemblance » (Gn 1,26-28). Qu’un seul manque à l’appel, et Dieu « s’en ira après celui qui est perdu jusqu’à ce qu’il le retrouve » (Lc 15,4-7). Puisque l’Eglise est « le Corps du Christ », il est impossible qu’elle n’adopte pas la même attitude envers tous, et surtout envers les plus petits… C’est pourquoi Jésus a repris cette parabole de la brebis perdue pour l’appliquer, juste avant notre passage, à l’Eglise car «  on ne veut pas, chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ces petits se perde » (Mt 18,14). Quiconque prie le « Notre Père » en disant « que ta volonté soit faite », ne peut donc que travailler, d’une manière ou d’une autre, au salut de tous, sans aucune exception… DJF