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Rencontre autour de l’Évangile – 6ième Dimanche du Temps Ordinaire

Une invitation pressante à se repentir,

Et cela au plus profond du cœur…

(Mt 5,17-37)

 

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons  (Math 5, 17-37)

       L’Evangile de ce jour est parfois difficile. Il est comme un versant d’une montagne, inséparable du versant opposé.

       Face à un pécheur, le Dieu d’infinie Miséricorde n’a qu’un seul désir : lui pardonner, le relever, le combler et le fortifier, pour qu’il ne tombe plus et ne perde plus la Plénitude de la Vie, de la Paix, de la Joie. « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades ; je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs au repentir ». Et Dieu cherchera le pécheur « jusqu’à ce qu’il le retrouve » (Lc 5, 31-32 ; 15,4-7), pour son seul Bien. S’il accepte de se laisser reprendre, relever, combler, « heureux » sera-t-il. Cet appel au Bonheur, neuf fois répété (les Béatitudes), précède notre texte. Tel est un versant de la montagne.

       Pardonné, relevé, fortifié, accompagné, le pécheur est invité maintenant à tout faire, avec le soutien de la grâce de Dieu, pour ne plus retomber et rester debout sur le Chemin de la Vie, pour son seul Bien… Tel est l’autre versant de la montagne, l’Evangile de ce jour…

 

 Et soulignons les mots importants

  • La Loi était une étape du cheminement vers la vérité tout entière. Voilà pourquoi Jésus ne l’abolit pas mais l’accomplit. Relire « les Dix Paroles » (Ex 20,1-17) puis ce texte de St Paul. En souligner avec lui la conclusion (Rm 13,8-10) : « Ne gardez aucune dette envers personne, sauf la dette de l’amour mutuel, car celui qui aime les autres a parfaitement accompli la Loi. Ce que dit la Loi : Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne commettras pas de meurtre, tu ne commettras pas de vol, tu ne convoiteras rien ; ces commandements et tous les autres se résument dans cette parole : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. L’amour ne fait rien de mal au prochain. Donc, l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour ».

  • Quand Jésus parle de « rejeter» et « d’enseigner» puis « d’observer » et à nouveau « d’enseigner », qu’est-ce qui est toujours premier : l’acte ou la parole ? Conclusion pour chacun d’entre nous…

            Noter toutes les fois où Jésus passe de l’action extérieure, visible, à ce qui en fut d’abord la source : le cœur profond de l’homme. Qu’est-ce qui est donc important à ses yeux ? Où notre conversion doit-elle s’exercer en premier lieu ?

  • Maudire, c’est « la géhenne de feu », l’enfer. Mais alors, qu’est-ce que « le Ciel » ?

  • Qu’est-ce qui est premier pour Jésus : le culte ou le pardon fraternel ?

  • Jésus qui a guéri tant de malades et de pécheurs peut-il nous pousser à nous amputer de l’un quelconque de nos membres si ce dernier est pour nous une occasion de chute ? Que souligne-t-il en fait ? A travers toutes ces recommandations, si fortes ici, que veut-il nous éviter à tout prix ?

  • Souvenons-nous des deux versants de la montagne : à travers ces paroles, à interpréter dans le contexte de l’époque, à quoi Jésus invite ici les époux ?

Pour l’animateur

  • Celui qui aime accomplit la Loi. Tous créés à l’image et ressemblance de ce Dieu qui n’est qu’Amour (Gn 1,26-27 ; 1Jn 4,8.16), nous sommes invités à nous aimer les uns les autres « comme» Dieu nous aime (Jn 13,34 ; 15,12). Et Il nous aime, nous, pécheurs, avec une Miséricorde infinie. Alors « heureux les miséricordieux » (Mt 5,7) qui donnent l’amour comme Dieu le donne, gratuitement, avec joie. « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite. Que celui qui exerce la Miséricorde le fasse donc avec joie. Heureux les miséricordieux » (Ac 20,35 ; Jn 15,11 ; Rm 12,8).

  • L’agir est toujours premier. Conclusion : ne jamais enseigner ce que nous ne sommes pas capables nous-mêmes de mettre en pratique (Mt 23,1-4).

  • L’important pour Jésus, ce n’est pas ce qui se voit, l’extérieur, la façade ; l’important, c’est le cœur, ce cœur que Dieu connaît encore mieux que nous-mêmes ! C’est là où nous sommes invités avec le secours de sa grâce, de sa miséricorde et de sa force, à nous convertir de tout cœur en rejetant tout ce qui est mauvaise pensée, avant qu’elle ne devienne parole, mauvais désir avant qu’il ne devienne acte… L’aventure est possible car la Miséricorde de Dieu est infinie : avec Lui, nous pouvons toujours recommencer et recommencer encore !

  • Le Ciel, c’est bénir. Dieu ne fait que bénir. En effet, « Dieu est Amour ». Or « aimer, c’est tout donner et se donner soi-même », un principe à prendre pour Dieu au pied de la Lettre. Dieu ne cesse de donner ce qu’Il est en Lui-même… « Dieu est Esprit » ? Il donne l’Esprit… « Dieu est Lumière» ? Il donne la Lumière… « Dieu est Amour » ? Il donne l’Amour, et avec ce Don, la Force d’aimer comme Lui il aime. Et donner ainsi, gratuitement, par amour, c’est cela bénir… « Le Seigneur Dieu est un soleil, il donne la grâce, il donne la gloire » (Ps 84(83),12).

  • Le pardon fraternel est premier. Être chrétien n’est pas une « étiquette» : c’est une réalité de cœur qui engage toute la vie (Pape François).

  • Non, bien sûr, Jésus ne peut nous inviter à nous amputer, Lui qui veut que l’homme soit pleinement lui-même, dans toutes les dimensions de son être ! Il insiste ici avec force sur la nécessité de la conversion, car le péché nous prive de la Plénitude de la Vie et du Bonheur, pour nous plonger dans la géhenne de feu : « Souffrance et angoisse pour toute âme humaine qui fait le mal» (Rm 2,9). C’est cela que Jésus ne veut pas, de toute la force de son Cœur !

  • Dieu invite ceux qu’il a unis dans son Amour par le sacrement du mariage, à tout faire, avec le soutien de sa grâce, pour rester fidèles l’un à l’autre, dans l’amour. Premier versant de la vie chrétienne. Mais si nous tombons, il fera tout pour nous relever et nous relancer. Tel est l’autre versant de la vie chrétienne, celui de la Miséricorde infinie de Dieu avec qui tout est toujours possible…

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

   « Voici que Dieu est maintenant le seul qui compte. Il est au centre du monde… Il m’envahit tout entier et ma pensée ne peut plus éviter Sa rencontre. Une main puissante m’a retourné. Où est-elle, que m’a-t-elle fait ? Je ne sais, car son action n’est pas comme celle des hommes, elle est insaisissable et elle est efficace ; elle me contraint et je suis libre, elle transforme mon être et je n’ai pourtant pas cessé de devenir ce que je suis. Puis la lutte est venue, silencieusement tragique entre ce que je fus et ce que je suis devenu. Car la créature nouvelle qui a été greffée en moi implore de moi une réponse à laquelle je reste libre de me refuser. J’ai reçu le principe, il me faut passer aux conséquences. Mon regard a changé, mais mes habitudes de pensée et de conduite n’ont pas changé : Dieu les a laissées là où elles étaient. Il me faut abattre, adapter, reconstruire les installations intérieures et je ne puis être en paix que si j’accepte cette guerre. Je suis moi-même émerveillé et étonné du changement que la grâce a opéré en moi. Comme le dit Claudel, « l’état d’un homme qu’on arracherait d’un seul coup de sa peau pour le planter dans un corps étranger, au milieu d’un monde inconnu », est la seule comparaison que je puisse trouver pour exprimer cet état de désarroi complet. J’ai trouvé la paix, mais en même temps la lutte, lutte perpétuelle qui me fait progresser et plus je progresse, plus je m’aperçois de ma misère et du chemin infini qu’il me reste à parcourir. Si je reste stationnaire, je redescends. Dans cette expérience principale qui vient de bouleverser ma vie, je découvre pour finir une exigence permanente de réforme spirituelle. La conversion engendre un esprit, et cet esprit m’apprend que la religion n’est pas le confort, mais qu’elle sera toujours en un sens une conversion. Mais Dieu est là ; en Lui, j’ai la force d’apercevoir et d’accomplir ce que je dois être, à son image. »

                              Jacques Fesch, condamné à mort et exécuté le 1° octobre 1957.

 

 

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Audience Générale du Mercredi 5 Février 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 5 Février 2020


Frères et sœurs, nous approfondissons aujourd’hui la première Béatitude : Heureux les pauvres en esprit car le Royaume des Cieux à eux. Saint Matthieu précise qu’il s’agit des pauvres en esprit : ceux qui se sentent pauvres, mendiants, dans l’intime de leur être. A ceux-là Jésus promet le Royaume des Cieux. Combien de fois le monde nous conseille le contraire : il faudrait à tout prix être quelqu’un, se faire un nom. Cette recherche obsessive de soi-même crée solitude et tristesse, car vivre en voulant cacher ses faiblesses est éprouvant et angoissant. Jésus enseigne qu’être pauvre en esprit est une occasion de grâce, un moyen de sortir de cette lassitude et d’obtenir le Royaume. Car règne vraiment celui qui sait aimer le bien plus que lui-même. C’est en cela que se manifeste la puissance de Dieu, en exerçant la miséricorde et le pardon, et, à la différence des rois de la terre, Jésus s’est montré puissant en donnant sa vie pour tous les hommes. Il y a une pauvreté que nous devons accepter, celle de notre être, et une pauvreté que nous devons rechercher, celle des choses de ce monde, qui nous rend libres afin de pouvoir aimer.

Je salue cordialement les pèlerins de langue française en particulier les jeunes venus de France. Frères et sœurs, reconnaître devant Dieu sa pauvreté et sa faiblesse est la vraie source du bonheur. Notre cœur devient disponible pour ne plus nous rechercher nous-mêmes mais aimer librement les autres et donner notre vie. Que Dieu vous bénisse.

 

 




5ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (St Matthieu 5,13-16)

 « Vous êtes le sel de la terre !

Vous êtes la lumière du monde ! »

 

Voilà une affirmation de Jésus que sans doute beaucoup de chrétiens n’appliquent pas à eux ; « C’est réservé à quelques-uns d’entre nous, c’est pour les saints, peut-être les prêtres, mais pas pour moi, je ne suis qu’un pauvre chrétien ordinaire ! »

Pourtant, c’est une affirmation forte de Jésus qui s’adresse à tous des disciples !

Il ne dit pas : « Soyez le sel de la terre …, essayez d’être la lumière du monde … »

Pour lui, ce n’est pas une option facultative, c’est une obligation, une réalité que nous devons tous atteindre.

Et ce passage de l’évangile de ce dimanche est la suite directe de l’énoncé des Béatitudes, c’est-à-dire la feuille de route de ce que nous devons faire.

Heureusement que nous pouvons compter sur la miséricorde de Dieu, qui sait combien nous ne sommes que de pauvres pécheurs !

Être le sel de la terre !

Du temps de Jésus, le sel était un aliment précieux, pour donner un goût aux autres aliments, mais surtout pour conserver ceux-ci, principalement la viande. Il n’y avait pas de réfrigérateurs ou de congélateurs pour cela, ni non plus de plats tout prêts (dans lesquels on dit maintenant qu’il y a trop de sel !).

Le sel qu’on met dans les aliments à cette particularité de se dissoudre totalement : il imprègne ceux-ci, mais on est incapable de le retrouver ou le voir.

Être le sel de la terre, c’est avoir des paroles qui n’obligent pas, des actions qui ne se voient pas vraiment, mais qui ont une influence sur notre environnement, notre entourage. Mais une influence positive. Une influence basée et guidée par l’enseignement de Jésus, qui donne du sens à la vie de notre entourage, et qui nous demande d’être dans le vrai, dans la foi en Jésus.

Être la lumière du monde !

À l’époque de Jésus, la lumière était rare, et elle se limitait à la lueur d’un feu, à une torche, ou à des lampes à huile. Et on vivait surtout à la lumière du soleil. Maintenant, la lumière est omniprésente, et on travaille de jour comme de nuit, elle sert pour travailler, mais aussi pour les loisirs, … et aussi pour faire de la pub dans des débauches de néons et autres spots.

Ce n’est pas de cette lumière-là dont parle Jésus ! Il parle de lumière pour faire réfléchir les gens, pour éclairer les consciences, pour dire ce que nous pensons être vrai et bon pour ceux qui nous entourent, là encore en suivant l’enseignement de Jésus.

C’est une manière d’être présent auprès des gens qui est plus visible que ’’la fonction sel’’, mais qui doit quand même se faire dans la discrétion, avec tact et circonspection.

On retrouve dans ces deux affirmations les deux tendances qui animent toute action pastorale, ou toute action missionnaire. Mais toute action pastorale est missionnaire et vice-versa !

L’action de l’intérieur, discrète (le sel), qui fut très en vogue après le concile Vatican II, et l’action plus extérieure, plus visible et ouverte (la lumière), qu’on revoit depuis quelques années.

Les deux manières de faire sont bonnes. Sinon Jésus n’aurait pas donner ces deux affirmations : être sel et lumière. En fonction des circonstances, l’une est préférable à l’autre. Il faut savoir doser.

Mais il n’y a pas que notre action à nous à considérer de ces deux points de vue.

Il y a aussi l’action des autres, de ceux qui ne sont pas chrétiens, ou qui n’agissent pas en tant que tel !

Il y a saveur et saveur ! Lumière et lumière !

Combien de personnes se satisfont de la lumière qui leur est donnée par la société mercantile qui propose les objets les plus divers, à grand renfort de publicité, qui sont sensés nous combler ?

Combien de personnes se satisfont du ’’sel’’ donné par les mêmes sociétés qui apportent tous les ans un petit plus à leur produit, et qui achètent ce dernier ?

Saveurs superficielles ! Lumières artificielles !

Et il n’y a pas que les sociétés commerciales qui prônent des délices (soi-disant …) pour satisfaire tout le monde. Je ne parle pas des élections municipales …, mais du gouvernement et du parlement où on nous propose comme un bien-pour-tous des lois qui vont amener l’eugénisme et/ou l’euthanasie des plus faibles …, dans une société sans repères quant à la procréation … qui n’est même plus capable de dire ce qu’est une vraie famille !

Ne nous laissons pas berner ! Le progrès n’est pas dans les lois-là !

N’ayons pas peur d’être sel de la terre ! D’être lumière du monde !

On n’est pas obligé de faire de grands discours pour être témoin.

Et on peut être témoin sans le savoir ! Cela arrive … et c’est encore mieux ainsi, parce qu’on n’est pas tenté de se faire valoir …

C’est seulement Dieu qui parle ou agit à travers nous … et c’est cela l’essentiel !

Seigneur Jésus,

être le sel de la terre, …

être la lumière du monde …

Mais c’est toi qui as dit :

« Je suis la lumière du monde »,

et tu voudrais qu’on soit comme toi ?

C’est un sacré challenge !

Mais tous ensemble,

et surtout avec toi,

on devrait y arriver …

Francis Cousin

  

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Prière dim ordinaire A 5°




Rencontre autour de l’Évangile – 5ième Dimanche du Temps Ordinaire

« Vous êtes le sel de la terre

Vous êtes la lumière du monde »

 

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons  (Math 5, 13-16)

Ce texte vient juste après les Béatitudes : ce sont elles qui vont donner tout leur poids aux paroles que Jésus adresse à ses disciples dans le passage court mais important que nous allons méditer.

 

 Et soulignons les mots importants

Les disciples rassemblés autour de Jésus : Quel nom pouvons-nous donner à ce groupe ?

Le sel : A quoi sert-il ? (faire chercher toutes les vertus du sel dans l’expérience humaine)

Vous êtes le sel de la terre : Jésus ne dit pas « vous devez être » le sel, mais « vous êtes » : à quelle condition les chrétiens sont-ils sel ?

La lumière : au temps de Jésus, on parlait de « lampe », une lampe à huile qui brille dans la nuit : à quelle condition ?

Vous êtes la lumière du monde : Pareillement il ne dit pas « vous devez être » la lumière, mais « vous êtes » : à quelle condition les chrétiens sont-ils lumière ?

Que votre lumière brille devant les hommes : Selon Jésus, de quelle manière les chrétiens peuvent « briller » devant les hommes ?

Ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux : être sel et être lumière dans quel but ?

Pour l’animateur

Jésus a voulu regrouper ses disciples : c’est l’Eglise. Si Jésus a voulu son Eglise, c’est pour qu’elle brille au-dehors, comme une ville sur une montagne ou une lampe sur le lampadaire. Sinon, elle est inutile, car elle ne peut plus conduire les hommes à reconnaître Dieu comme leur Père.

Aujourd’hui comme hier, le sel est un condiment indispensable du repas ; il rend les aliments savoureux et les conserve.

De plus pour les anciens,  le sel donne du goût à l’existence : « Ayez du sel en vous même et vivez en paix les uns avec les autres » (Mc 9,50) et qualifie le langage fraternel : « Que votre langage soit toujours aimable, assaisonné de sel » (Col 4,6)

Jésus, en quelque sorte,  dit aux chrétiens : vous êtes mes disciples, vous êtes « enfants de Dieu » (1Jn 3,1) donc vous êtes sel et lumière. C’est votre identité et votre mission. Mais vous ne pouvez êtes sel et lumière que si vous vivez les Béatitudes.

En vivant selon l’esprit des Béatitudes, les chrétiens, sans faire de bruit, comme le sel, donnent au monde qui les entoure le goût des valeurs de l’Evangile : partage, humilité et pureté du cœur,  non-violence, compassion et pardon, fraternité, amour de la justice etc… Ils donnent saveur au monde et le conserve devant Dieu.

Jean-Paul II disait aux Réunionnais, le 2 mai 1989 dans son homélie : « Le sel est précieux. Quand Jésus déclare « vous êtes le sel de la terre : si le sel s’affadit avec quoi le salera-t-on ? », il veut dire : ce que vous avez reçu vous rend précieux pour le monde ; rien ne peut remplacer ce que vous apportez. Il vous appartient d’être ici-bas ceux qui empêchent la vie de perdre son goût. »

Vous êtes la lumière du monde : c’était la vocation de Jérusalem, ville-lumière placée sur la Montagne pour attirer les peuples vers Dieu, vocation d’Israël. (annoncée par Isaïe 42, 6), figure de l’Eglise qui a pris le relais.

Comme la lampe qui brille dans la maison et qui attire, chaque chrétien personnellement, et les communautés d’Eglise, aident les hommes à reconnaître que Dieu est amour et Père, en faisant du bien de mille manières. L’Eglise existe pour servir la croissance du Royaume de Dieu. Par enfouissement comme le sel et par rayonnement comme la lumière, elle transforme le monde « comme du dedans » et l’attire vers Dieu. (voir texte de Vatican II, ci-contre)

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Vatican II l’Eglise N°31. «… le monde ne peut se transfigurer et être offert à Dieu en dehors de l’esprit des Béatitudes. La vocation propre des laïcs consiste à chercher le règne de Dieu précisément à travers la gérance des choses temporelles qu’ils ordonnent selon Dieu. Ils vivent au milieu du siècle, c’est-à-dire engagés dans tous les divers devoirs et travaux du monde, dans les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale dont leur existence est comme tissée. A cette place, ils sont appelés par Dieu pour travailler comme du dedans à la sanctification du monde, à la façon d’un ferment, en exerçant leurs propres charges sous la conduite de l’esprit évangélique, et pour manifester le Christ aux autres avant tout par le témoignage de leur vie, rayonnant de foi, d’espérance et de charité. C’est à eux qu’il revient, d’une manière particulière, d’éclairer et d’orienter toutes les réalités temporelles auxquelles ils sont étroitement unis, de telle sorte qu’elles se fassent et prospèrent constamment selon le Christ et soient à la louange du Créateur et Rédempteur.

Seigneur, que ces paroles inspirées par ton Esprit aux Pères du Concile,  soient gravées dans nos cœurs.

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS

La Parole aujourd’hui dans notre vie 

Nous savons ce que c’est qu’une personne qui n’a plus le goût de vivre, qui ne trouve plus de sens à son existence. Nous est-il arrivé de redonner la joie de vivre à quelqu’un, d’illuminer son cœur, lui faire retrouver, grâce à Jésus-Christ, le sens de son travail, de son foyer, de sa souffrance ?

 Etre sel de la terre et lumière du monde, c’est vivre selon l’esprit des Béatitudes. Après le partage de dimanche dernier, nous avons choisi de vivre une Béatitude : chacun est invité à dire ce qu’il ou elle a essayé de vivre.

Il arrive que par peur ou par tiédeur, nous ne rendons pas à l’Evangile un témoignage suffisant : pouvons-nous redire les uns aux autres quelle est la mission du fidèle laïc dans le monde  ?

Pour que notre lumière brille devant les hommes, non pas pour nous mettre en valeur, mais pour témoigner de l’amour du Père, qu’est-ce que nous pourrons « faire de bien » cette semaine ?

 

ENSEMBLE PRIONS 

Chant : Peuple de lumière (carnet p.320) Couplets 1, 2, 4, 5

Notre Père

Oraison : Seigneur Jésus, nous sommes vraiment enfants de Dieu. C’est pourquoi tu nous dis « vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde ». Nous te prions pour tous les baptisés. Accorde-leur la grâce de découvrir leur véritable identité et leur dignité ; et que partout où il y a des chrétiens, leur lumière attire les hommes vers le Père et le monde retrouve le goût de Dieu. Nous te le demandons à Toi, la Lumière du monde pour les siècles des siècles. Amen.

 

 

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Audience Générale du Mercredi 29 Janvier 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 29 janvier 2020


Frères et sœurs, aujourd’hui nous commençons une série de catéchèses sur les Béatitudes de l’Evangile selon saint Matthieu qui nous introduisent dans le Discours de Jésus sur la montagne. Ce texte, qui a illuminé la vie des croyants et même des non croyants, contient la “carte d’identité” du chrétien. En effet, le message des Béatitudes est adressé non seulement aux disciples, mais aussi à toute l’humanité. La montagne, dans l’Evangile, renvoie au Sinaï où Dieu donna les “Dix paroles” à Moïse. Cependant, il n’est plus question de tempêtes terrifiantes, mais de la douce force de la Bonne Nouvelle. Jésus y révèle le chemin du bonheur. Il ne s’agit pas ici d’un bonheur qui s’apparente aux joies passagères ou aux plaisirs, mais plutôt d’un bonheur qui sait vivre avec la souffrance. La finalité des Béatitudes réside dans la condition nouvelle que les bienheureux reçoivent comme don de Dieu. Dans cette prédication inaugurale, Jésus indique huit “portes” pour faire l’expérience de la puissance et de la providence de Dieu. En fait, le bienheureux est une personne qui est dans une condition de grâce, qui progresse dans la grâce de Dieu. Ainsi, le bonheur qui vient de Dieu, c’est la paix que le Christ nous donne.

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, les groupes venus de Belgique et de France, particulièrement les jeunes venus de Paris et de Saint Cloud. Les Béatitudes nous enseignent que Dieu, pour se donner à nous, choisit souvent des chemins impensables, ceux de nos limites, de nos larmes, de nos défaites. Demandons au Seigneur l’esprit des Béatitudes afin que nous puissions faire l’expérience de la puissance de Dieu qui se manifeste dans nos souffrances quotidiennes. Que Dieu vous bénisse !

 

 

 

 

 




Présentation de Jésus au Temple – par Francis COUSIN (St Luc 2, 22-40)

« Ouvre nos yeux, Seigneur ! »

 

Faisons un retour en arrière d’environ 2000 ans, et mettons-nous dans le Temple de Jérusalem … pour voir ce qui s’y passe.

À l’époque, les villes ne sont pas trop peuplées. On parle de 50 000 habitants à Jérusalem. Nous sommes à un jour tout à fait ordinaire, pas de fête particulière ou d’évènements quelconque.

Arrive un jeune couple avec un enfant, pour faire la présentation de celui-ci à Dieu, comme le veut la loi de Moïse : « Le Seigneur parla à Moïse. Il dit : ’’Consacre-moi tous les premiers-nés parmi les fils d’Israël, car les premiers-nés des hommes et les premiers-nés du bétail m’appartiennent.’’ » (Ex 13,2). Marie et Joseph viennent à la rencontre de leur Dieu pour présenter leur fils nouveau-né Jésus, et pour la purification de la mère. Ils n’étaient sans doute pas les seuls …

Ils viennent incognito, pour une célébration officielle, mais intime : pas de grand-prêtre, de lévite, de scribe pour les accueillir … Et pourtant, c’est le Fils de Dieu qui vient dans la maison de son Père … Ils connaissaient la prophétie de Malachie (première lecture) … Ils étaient censés être proche de Dieu … Ils étaient sur place …

Ils ne l’ont pas vu !

Et nous, l’aurions-nous vu ?

Ouvre nos yeux, Seigneur ! 

Pourtant un homme l’a reconnu ! Syméon. Il ne faisait pas parti du ’’staff’’ du temple, mais « c’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui. ». Il vint au temple, « sous l’action de l’Esprit », pour rencontrer « le Christ, le Messie du Seigneur ».

Mais on ne lui en avait pas dit plus. Pouvoir rencontrer le Messie, c’était ce qui le faisait encore vivre … Mais voir le Messie en un petit enfant de quarante jours … Qui l’eut cru ? On aurait plutôt pensé à quelqu’un dans la force de l’âge, sérieux, présentant bien …

Mais lui n’a pas hésité ! Il avait l’Esprit en lui, il était proche de Dieu, il ne vivait que pour cela ! « Syméon reçu l’enfant dans ses bras ».

Et nous, l’aurions-nous reconnu ?

Ouvre nos yeux, Seigneur ! 

 Une femme aussi l’a reconnu ! Anne, fille de Phanuel. Elle aussi était âgée : 84 ans. 84 = 7 x 12 ; 7, perfection dans le domaine spirituel ; 12, perfection dans le domaine temporel. Elle avait tout pour elle ! D’ailleurs, elle servait « Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière. ». Sa préparation spirituelle lui avait ouvert le cœur, et elle pouvait voir ce que nous ne pouvons pas voir, avec le cœur de Dieu : « Elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem ».

Et nous, aurions-nous proclamer les louanges d’un petit enfant ?

Ouvre nos yeux, Seigneur ! 

Cet évangile est une histoire de rencontres : rencontre entre Marie et Joseph avec Dieu, rencontre entre son Père et Jésus, rencontre entre Syméon et Jésus, rencontre entre Anne et Jésus …

Mais c’est aussi de non-rencontres : non-rencontre entre les grands-prêtres et Jésus, non-rencontre entre les lévites et Jésus, non-rencontre entre les scribes et Jésus, non-rencontre entre la foule et Jésus.

Pourquoi y a-t-il parfois rencontre, et parfois pas …

Tout est une question de cœur. Cœur ouvert ou fermé, cœur plein d’amour ou non, cœur disponible à l’amour de Dieu ou non, cœur répondant à l’amour de Dieu ou non …

Et nous avons tous à nous poser la question : Quel est l’état de mon cœur ?

Oh, bien sûr, on sait très bien qu’il n’est jamais parfait ! Nous sommes tous des pécheurs, et nous avons tous à nous convertir pour devenir plus proches de Dieu … et des hommes …

Mais aujourd’hui, dans notre église (revenons sur terre, malheureusement, on n’est pas à Jérusalem), est-ce que je rencontre vraiment Dieu dans sa Parole, est-ce que je l’entends, est-ce qu’elle me bouscule ?

Quand je vais communier tout à l’heure, est-ce que je suis conscient que c’est Jésus, « le pain vivant qui est descendu du ciel » (Jn 6,41) qui vient en moi, qui vient à ma rencontre ? … que « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. » (Jn 6,56) ? La rencontre parfaite !

Qu’à la fin de la messe, quand le prêtre dit : « Allez dans la paix du Christ », c’est que le Christ est en moi, « lumière qui se révèle aux nations », et que je dois être porteur de cette lumière !

Ouvre nos yeux, Seigneur ! … les yeux de nos cœurs !

Ouvre mes yeux, Seigneur, aux merveilles de ton amour,

Je suis l’aveugle sur le chemin,

Guéris-moi, je veux te voir !   …  et en chacun de tous mes frères humains …

Francis Cousin

  

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Image dim Présentation au Temple A




Présentation du Seigneur au Temple – Homélie du Père Louis DATTIN

Mes yeux ont vu ton salut

Lc 2, 22-40

Il y a souvent, dans l’Evangile, des récits qui se complètent les uns les autres.

–   Ainsi, rappelez-vous, après le récit de l’Annonciation à la Vierge Marie, il y eut celui de la Visitation. De même, ici, après le récit de la naissance de Jésus, il y a le récit de la Présentation au temple : récit qui clôture aujourd’hui le temps de Noël.

–   Nous sommes à 40 jours de Noël et à quelques jours de l’entrée en Carême : le mercredi des Cendres qui, lui-même, est à 40 jours de Pâques. Tout cela veut nous montrer, bien que la vie du Christ est cohérente, qu’elle s’unifie dans un seul but : celui du salut des hommes par la Passion et la Résurrection dont Noël était déjà l’annonce.

Aujourd’hui, nous sommes au temple : ce temple qui était le « signe de la présence de Dieu » parmi les hommes ; désormais, ce temple, il est inutile, déclassé, il a perdu son rôle. Il est à classer « monument historique », car désormais, le vrai temple, c’est Jésus. C’est lui : la présence de Dieu parmi les hommes :

« Détruisez ce temple, dit Jésus, en parlant de lui-même, et je le rebâtirai en trois jours ».

Temple définitivement consacré par la Passion-Résurrection : Jésus, tête de l’Eglise ; c’était-là, dans le temple, qu’avait commencé l’Evangile avec l’annonce à Zacharie, le père de Jean-Baptiste et c’est là aussi qu’il s’achève lorsque la prière des disciples célèbre la Résurrection de leur Seigneur : lui, le nouveau temple de Dieu.

Luc est tout d’abord soucieux de souligner l’obéissance parfaite de Joseph et de Marie à la loi juive.

.  « Quand arriva le jour fixé par la loi de Moïse pour la purification »

« Selon ce qui est prescrit dans la loi »

.  « Le sacrifice prescrit par la loi de Moïse »

.  « Pour accomplir les rites de la loi qui le concernaient »

. « Lorsqu’ils eurent accompli tout ce que prescrivait la loi du Seigneur ».

Jésus, fils de Dieu, n’est pas au-dessus des lois. Elles ne sont pas faites pour lui mais il est devenu homme et il se met totalement dans la condition de l’homme juif soumis à la loi : lui, le seul qui n’avait pas besoin d’être baptisé, s’avance vers Jean-Baptiste pour y recevoir l’eau versée sur sa tête et la Trinité Sainte en profite pour manifester sa divinité.

Il n’est pas pécheur mais il prend nos péchés.  De même, en cette fête de la Présentation : s’il y en avait un qui n’avait pas besoin d’être présenté au Père, c’était bien lui, le Fils ! Et s’il y en avait une qui n’avait pas besoin d’être purifiée, c’était bien elle, la Vierge Marie, Immaculée Conception.

Cependant, l’obéissance à la loi, même pour eux, est prioritaire :

« Nul n’est exempté de la loi », nous rappelle le code civil. Il semble bien que dans la Bible, Dieu pense également la même chose.

A peine né, Jésus est conduit au temple, et c’est le temple, plus tard, qui le conduira à la mort. Jésus se soumet au sacrifice imposé par la croix.

Pour lui, enfant de pauvres, ce sera le prix de deux tourterelles : le sacrifice offert par les nécessiteux, le prix des pauvres. Désormais, Jésus fait partie du peuple des rachetés, lui le rédempteur. Au prix de deux tourterelles, Jésus entre dans l’histoire, l’histoire d’un peuple ayant été ainsi racheté. Jésus pourra donc être revendu, 33 ans plus tard, pour trente pièces d’argent et c’est ce même temple qui sera l’acheteur et le bénéficiaire. Pour l’instant, c’est un vieillard qui accueille Jésus à la porte du temple, un vieillard en état d’attente ; à tel point que nos frères orientaux appellent cette fête de la Chandeleur : la fête de la « rencontre », rencontre du Vieux Testament, du peuple élu, avec le Nouveau Testament, le Fils élu.  Dans cette rencontre du vieil homme et de l’enfant se joue tout le projet de l’amour de Dieu : rencontre du désir et de la réalisation, celle de l’attente avec l’arrivée.

« Il attendait la consolation d’Israël » : et l’Esprit (c’est l’Esprit Saint qui est l’organisateur de cette rencontre) lui avait révélé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie.

 « Poussé par l’Esprit, Siméon vint au temple … ». Depuis le temps qu’il attendait ! Depuis le temps qu’il criait son attente ! Dieu l’a entendu ! Ce Siméon est un guetteur de Dieu.  Il est toute l’attente du monde et il n’a pas attendu Dieu en dormant, mais debout, sentinelle de garde, à la porte du temple : un homme du seuil, un homme du guet.

Sur combien de visages a-t-il dû se pencher, en se demandant si par hasard ce ne serait pas lui ? Maintenant, il peut mourir, car « ses yeux ont vu le salut », dit-il, pas seulement « pour le peuple hébreu » : « le salut que tu as préparé à la face des peuples, lumière pour éclairer les nations païennes et gloire d’Israël ton peuple ».

Les paroles du vieillard « plongent dans l’étonnement le père et la mère de l’enfant » : une étape de plus pour réaliser peu à peu qui est cet enfant qui leur a été confié ; étape dans le pèlerinage de leur foi.  D’ailleurs, Siméon s’adresse maintenant à Marie pour lui dire combien cet enfant sera un signe de contradiction : facteur de division, écartèlement qui s’opérera à propos de lui.

Les uns opteront pour lui, ce sera leur « relèvement » ; les autres opteront contre lui et ce sera leur chute. Jésus ne s’impose pas : il doit être librement accepté par la foi, salut non imposé mais proposé.

Tous, nous avons à prendre parti pour ou contre et lorsque nous-mêmes, nous parlons de Jésus aux autres, nous n’avons pas à faire comme les témoins de certaines sectes, de terrorisme spirituel, en voulant imposer de force, nos convictions.

Nous avons à proposer Jésus : signe offert à la foi et à la liberté des hommes. Nous le savons, en Israël, beaucoup refuseront ; d’autres accepteront de le suivre et à ceux-là, le Seigneur ne va pas leur annoncer la réussite et le bonheur immédiats, au contraire. Ecoutez ce que Siméon dit à Marie :

« Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée ».

Ceux qui vont le suivre doivent passer par la Croix. Il n’y a rien de moins démagogique que la religion chrétienne qui annonce à ceux qui vont y entrer, qu’ils devront en baver en suivant Jésus jusqu’à la mort.

Nous sommes loin des promesses électorales et de leurs miroirs aux alouettes, mais la Passion n’est que l’entrée et l’aurore de la Résurrection.

Elle arrive aussi cette joie en la personne d’Anne. Cette pieuse veuve, fort avancée en âge et qui conclut sur une perspective radieuse : « Elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance d’Israël ».

A la suite de cet évènement, notre regard se tourne vers l’avenir : dans quatre semaines, nous entrons en Carême et comme Siméon, nous avons le regard de Marie dans notre cœur ; elle le tourne vers la Croix. Ce regard contient toutes les souffrances des femmes, des enfants, des hommes du monde entier car Jésus, devenu notre frère, vit les mêmes souffrances pour pouvoir nous en sauver.

Mais au-delà de ce salut, il y a la lumière : Anne et Siméon ont tous les deux des yeux usés, qui pourtant voient plus loin que les nôtres.

–   Comment ont-ils pu reconnaître en ce petit enfant pauvre d’un couple anonyme, la « gloire de Dieu » ? Pour détecter ce qui se cachait dans ce petit paquet de chair humaine, il ne fallait rien moins qu’une révélation de l’Esprit Saint, l’Esprit de Dieu lui-même.

Par trois fois, Luc répète que ce n’était pas seulement des yeux humains qui voyaient mais une  » lumière » plus haute : celle de l’Esprit Saint.

.  La foi seule, pour nous aussi, peut permettre, si nous l’acceptons librement, de voir au-delà des apparences « comme si nous voyions l’invisible »

.  Dans la foi, ces deux vieillards, aux yeux lumineux ont vu plus loin

.  Par la foi, nos yeux nous permettront de voir plus loin, dans notre vie quotidienne, dite « ordinaire » et qui nous permet de voir l’extraordinaire de Dieu.

C’est bien ce qui va arriver maintenant à Marie et à Joseph : que font-ils après toutes ces révélations qui les étonnent ?

« Lorsqu’ils eurent accompli ce que prescrivait la loi, ils retournèrent en Galilée, dans leur village de Nazareth ».

« L’enfant grandissait et se fortifiait » : c’est le retour au quotidien, à l’ordinaire de nos vies. Tout apparait si normal, que les habitants de Nazareth seront choqués lorsqu’ils entendront Jésus parler dans leur synagogue :

« L’enfant grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse et la grâce de Dieu était sur lui ».

C’est cette grâce de Dieu, vue par Siméon, devinée par Anne, ignorée des habitants de son village qui, pendant 30 ans, va se condenser, puis éclater dans sa Passion et sa Résurrection. C’est elle qui va changer le sort du monde et lui promettre le bonheur total. AMEN




Présentation du Seigneur au Temple – par le Diacre Jacques FOURNIER (Lc 2, 22-40)

Obéir au Dieu Sauveur …

 

Quand fut accompli le temps prescrit par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus l’amenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur,
selon ce qui est écrit dans la Loi : ‘Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur.’
Ils venaient aussi offrir le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : ‘un couple de tourterelles ou deux petites colombes.’
Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui.
Il avait reçu de l’Esprit Saint l’annonce qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Christ, le Messie du Seigneur.
Sous l’action de l’Esprit, Syméon vint au Temple. Au moment où les parents présentaient l’enfant Jésus pour se conformer au rite de la Loi qui le concernait,
Syméon reçut l’enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
« Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole.
Car mes yeux ont vu le salut
que tu préparais à la face des peuples :
lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. »
Le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qui était dit de lui.
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction
– et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – : ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d’un grand nombre. »
Il y avait aussi une femme prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser. Elle était très avancée en âge ; après sept ans de mariage,
demeurée veuve, elle était arrivée à l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s’éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.
Survenant à cette heure même, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.
Lorsqu’ils eurent achevé tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth.
L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui.

Marie, Joseph et l’enfant Jésus montent au Temple pour accomplir ce qui était « prescrit par la Loi du Seigneur ». Or la Loi était à l’époque l’expression de la volonté de Dieu. Obéir à la Loi, choisir de la mettre en pratique, c’était garder la  Parole de Dieu, et en définitive l’aimer…

            « Voici la servante du Seigneur » avait déjà dit Marie à l’Ange Gabriel. Tout en elle était « oui » à Dieu… La Loi disait : « Si une femme est enceinte et enfante un garçon, elle sera impure pendant sept jours… et pendant trente-trois jours encore elle restera à purifier son sang. Elle ne touchera à rien de consacré et n’ira pas au sanctuaire jusqu’à ce que soit achevé le temps de sa purification ». Et « quand sera achevée la période de sa purification » (« Lorsque furent accomplis les jours pour leur purification », écrit St Luc), « elle apportera au prêtre, à l’entrée du Temple un agneau d’un an et un pigeon ou une tourterelle… Si elle est incapable de trouver la somme nécessaire pour une tête de petit bétail, elle prendra deux tourterelles ou deux pigeons… Le prêtre fera sur elle le rite d’expiation et elle sera purifiée » (Lv 12,2-4.6-8).

            Voilà le rituel qui la concernait et auquel elle obéit parfaitement. Toutes ces prescriptions sont maintenant révolues, mais l’important n’est pas tel ou tel geste en lui même, mais l’amour avec lequel on l’accomplit…

            Et son obéissance va lui permettre de vivre ce qu’elle n’avait pas prévu : la rencontre avec Syméon. Lui aussi a obéi de tout cœur à l’Esprit qui l’a poussé au Temple, sans rien lui dire en cet instant du pourquoi de cette démarche… Et la prophétie qu’il avait reçue autrefois, « tu ne verras pas la mort avant d’avoir vu le Christ du Seigneur », s’accomplit. « Le Christ », c’est, en grec, « celui qui a reçu l’onction ». Plus tard, grâce à l’épisode du baptême, beaucoup pourront prendre conscience que l’onction de l’Esprit Saint repose en plénitude sur Jésus (Lc 3,21-22). Ce même Esprit « reposait » sur Syméon, nous dit St Luc. « Dieu est Esprit, Dieu Est Lumière ». « Par ta Lumière, nous verrons la Lumière » (Jn 4,24 ; 1Jn 1,5 ; Ps 36,10). Grâce à la Lumière de l’Esprit qui illumine son cœur, Syméon peut « voir » le Christ Lumière du monde (Jn 8,12 ; 12,46), alors que cette Lumière, spirituelle, est, par nature, invisible à nos seuls yeux de chair… « Mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples : Lumière pour éclairer les nations païennes, et Gloire d’Israël ton peuple. »                                                                           DJF

 




Rencontre autour de l’Évangile – Présentation du Seigneur au Temple

Jésus, Messie du Seigneur,

Lumière pour éclairer les nations…

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons  (Lc 2, 22-40)

Jésus vient de naître à Bethléem. Huit jours après, en obéissance à la Loi de Moïse, il recevra la circoncision (Lv 12,3). Puis, écrit St Luc, « l’enfant reçut le nom de Jésus, le nom que l’ange lui avait donné avant sa conception » (Lc 2,21 ; 1,31). N’oublions pas que « Jésus » vient de l’hébreu « Yéchoua » qui signifie « Yahvé sauve », « Dieu sauve ». Pour Jésus, vrai homme et vrai Dieu, c’est « le Père » qui « sauve »…

 

 Et soulignons les mots importants 

  • Dans les trois premiers versets de notre Evangile, le mot « Loi» intervient trois fois. A l’époque, la Loi était l’expression de la volonté de Dieu. Quelle est donc la seule préoccupation de Marie et de Joseph ? Et avec la Loi, quelle valeur fondamentale de la foi vivent-ils ? Noter les deux démarches qu’ils accomplissent ici…

  • Syméon signifierait en hébreu « a entendu ». Qu’est-ce que Syméon « a entendu », et qui lui a « parlé » ? Or, pour entendre Dieu, il faut être de tout cœur tourné vers Lui : noter les expressions qui, pour Syméon, nous l’indiquent.

            Comment arrive-t-il au Temple ? Quelle valeur fondamentale de la foi vit-il lui aussi ? Marie et Joseph ont vécu la même valeur avec la Loi, et tous se rencontrent : est-ce le fruit du hasard ?

  • Que signifie le mot ‘Messie’ (de l’hébreu Massiah ; en grec Khristos) ? Qu’est-ce que Syméon attendait ? Et que recevra-t-il dans ses bras ? Conclusion ? Noter en quels termes la mission du Christ sera évoquée par la suite. Noter aussi ce que nous dit indirectement de Jésus l’expression employée pour décrire ceux à qui la prophète Anne s’adressait.

  • Comment comprendre ces deux expressions :

            1 – « Il provoquera la chute et le relèvement de beaucoup » ?

            2 – « Il sera un signe de division. Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée. Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre ».

  • Enfin, Anne nous rappelle deux valeurs de la vie chrétienne, lesquelles ?

Pour l’animateur 

  • La seule préoccupation de Marie et de Joseph est d’obéir à la volonté de Dieu, de la faire passer très concrètement dans leur vie. Ils vivent l’obéissance de cœur. « Être chrétiens, c’est vivre et témoigner de la foi dans la prière, dans les œuvres de charité, dans la promotion de la justice, dans l’accomplissement du bien » (Pape François ; Angélus, 25/08/2013).

            Les deux démarches accomplies : la purification de Marie et l’offrande à Dieu du fils premier-né. Leur offrande souligne leur pauvreté.

  • Syméon a entendu de l’Esprit Saint « qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie du Seigneur». Il était « juste et pieux », et « l’Esprit Saint reposait sur lui », le Don de Dieu « reposait sur lui », comme la lumière du soleil repose sur une plante toujours tournée vers lui. « Le Seigneur Dieu est un Soleil, il donne la Grâce, il donne la Gloire » (Ps 84(83), 12), il donne la Lumière de l’Esprit Saint qui ne peut que reposer, de manière stable, sur quiconque demeure tourné de tout cœur vers Lui.

            Syméon arrive au Temple « poussé par l’Esprit ». Il est donc docile à l’Esprit, à ses inspirations, à son impulsion : il lui obéit. Or la signature de l’Esprit est « amour, joie, paix » (Ga 5,22)… Syméon fuit tout ce qui lui fait perdre la paix du cœur. Il n’éteint pas l’Esprit, il vérifie tout à sa Lumière, retient ce qui est bon et se garde de toute espèce de mal (1Th 5,19-22).

            Marie et Joseph obéissent à la Loi, et à travers elle, à Dieu. Syméon obéit à l’Esprit, et à travers lui, à Dieu. Et les trois se retrouvent au Temple dans « la Maison de Dieu ». C’est donc Lui qui est à l’origine de cette rencontre, grâce à l’obéissance de cœur des uns et des autres… Noter l’harmonie entre la Loi et l’Esprit : la Loi authentiquement vécue ne peut qu’aller dans le sens de l’Esprit Saint puisque c’est Lui qui l’a inspirée au cœur de Moïse (Comparer Ex 31,18 ; Lc 11,20 et Mt 12,28).

  • « Messie » vient de l’hébreu « massiah » ou « messiah », la langue de l’Ancien Testament, « celui qui a reçu l’onction ». « Christ » vient du grec « khristos », langue du Nouveau Testament, avec le même sens.

                Syméon attendait « la consolation d’Israël » ; il reçoit le Christ. La  mission  première  du  Christ  est  donc  de  « consoler »  tous ceux qui souffrent,  et  notamment  les pécheurs,  car le péché  n’engendre  dans les cœurs que « souffrance et angoisse » (Rm 2,9). Et le Christ sera « salut » pour « tous les peuples », « délivrance » notamment « de Jérusalem », « lumière pour éclairer les nations païennes et gloire d’Israël ton peuple.»

  • Il sera ‘chute’ pour les superbes appelés à descendre de leurs montagnes d’orgueil ; et ‘relèvement’ pour les humbles qui accepteront de recevoir de sa Miséricorde le pardon de leurs fautes, la guérison de leurs blessures intérieures, sa Vie qui sera Résurrection, Lumière et Paix. Et un orgueilleux qui se repent devient cet humble que le Seigneur relève…

  • « Les pensées secrètes », droiture de cœur ou non, loyauté ou non, acceptation de faire la vérité ou non, humilité ou orgueil, amour ou haine, tout cela se révèlera en Présence du Christ « Lumière du monde ». Alors, les hommes se diviseront d’eux-mêmes : ceux qui croiront ou non, ceux qui accueilleront le Christ et ceux qui le tueront, plongeant de cœur Marie sa Mère dans d’indicibles souffrances…

  • Anne nous rappelle « la prière et le jeûne », le jeûne notamment de tout ce qui nous empêche de vivre pleinement notre relation à Dieu.

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Je vous le demande : êtes-vous des chrétiens « d’étiquette » ou en vérité ? Et chacun répond à l’intérieur ! Non, pas des chrétiens d’étiquette, jamais ! Des chrétiens en vérité, de cœur. Etre des chrétiens, c’est vivre et témoigner de la foi dans la prière, dans les œuvres de charité, dans la promotion de la justice, dans l’accomplissement du bien (Pape François).

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS

La Parole aujourd’hui dans notre vie 

L’Eglise nous invite à être fidèles à l’Eucharistie dominicale, à partager avec ceux qui nous entourent, à vivre le jeûne et la prière pour la paix dans le monde. Avons-nous à cœur cette obéissance de la foi ?

ENSEMBLE PRIONS 

A la Vierge Marie, Porte du Ciel, demandons qu’elle nous aide à franchir la porte de la foi, à laisser son Fils transformer notre existence comme il a transformé la sienne, pour porter à tous la joie de l’Evangile (Pape François).

 

 

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Dimanche 26 janvier : Premier Dimanche de la Parole de Dieu

Le 30 septembre 2019, en la mémoire liturgique de saint Jérôme en ce début du 1600e anniversaire de sa mort, le pape François a publié une lettre apostolique en forme de motu proprio intitulée Aperuit illis. Lettre par laquelle il entend « répondre à de nombreuses demandes » qui lui sont parvenues « de la part du peuple de Dieu » afin que, dans toute l’Église, « on puisse célébrer en unité d’intentions le “Dimanche de la Parole de Dieu” ». Il établit donc que, le « IIIe Dimanche du temps ordinaire soit consacré à la célébration, à la réflexion et à la proclamation de la Parole de Dieu » (cf. la-croix.com).

Voici donc le texte complet de cette lettre apostolique :

  1. « Alors il ouvrit leur intelligence à la compréhension des Écritures » (Lc 24, 45). Voilà l’un des derniers gestes accomplis par le Seigneur ressuscité, avant son Ascension. Il apparaît aux disciples alors qu’ils sont rassemblés dans un même lieu, il rompt avec eux le pain et ouvre leur esprit à l’intelligence des Saintes Écritures. À ces hommes effrayés et déçus, il révèle le sens du mystèrepascal : c’est-à-dire que, selon le projet éternel du Père, Jésus devait souffrir et ressusciter des morts pour offrir la conversion et le pardon des péchés (cf. Lc 24, 26.46-47) et promet l’Esprit Saintqui leur donnera la force d’être témoins de ce Mystèrede salut (cf. Lc 24, 49).

La relation entre le Ressuscité, la communauté des croyants et l’Écriture Sainte est extrêmement vitale pour notre identité. Si le Seigneur ne nous y introduit pas, il est impossible de comprendre en profondeur l’Écriture Sainte. Pourtant le contraire est tout aussi vrai : sans l’Écriture Sainte, les événements de la mission de Jésus et de son Église dans le monde restent indéchiffrables. De manière juste, Saint Jérôme pouvait écrire : « Ignorer les Écritures c’est ignorer le Christ » (In Is., prologue : PL 24, 17)

  1. En conclusion du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde, j’avais demandé que l’on pense à « un dimanche entièrement consacré à la Parole de Dieu, pour comprendre l’inépuisable richesse qui provient de ce dialogue constant de Dieu avec son peuple » (Misericordia et misera, n. 7). Consacrer de façon particulière un dimanche de l’Année liturgique à la Parole de Dieu permet, pardessus tout, de faire revivre à l’Église le geste du Ressuscité qui ouvre également pour nous le trésor de sa Parole afin que nous puissions être dans le monde des annonciateurs de cette richesse inépuisable. À cet égard, les enseignements de Saint Éphrem me viennent à l’esprit : « Qui donc est capable de comprendre toute la richesse d’une seule de tes paroles, Seigneur ? Ce que nous en comprenons est bien moindre que ce que nous en laissons, comme des gens assoiffés qui boivent à une source. Les perspectives de ta parole sont nombreuses, comme sont nombreuses les orientations de ceux qui l’étudient. Le Seigneur a coloré sa parole de multiples beautés, pour que chacun de ceux qui la scrutent puisse contempler ce qu’il aime. Et dans sa parole il a caché tous les trésors, pour que chacun de nous trouve une richesse dans ce qu’il médite » (Commentaires sur le Diatessaron, 1, 18). Par cette Lettre, j’entends donc répondre à de nombreuses demandes qui me sont parvenues de la part du peuple de Dieu, afin que, dans toute l’Église, on puisse célébrer en unité d’intentions le Dimanche de la Parole de Dieu. Il est désormais devenu une pratique courante de vivre des moments où la communauté chrétienne se concentre sur la grande valeur qu’occupe la Parole de Dieu dans son quotidien. Dans les diverses Églises locales, de nombreuses initiatives rendent les Saintes Écritures plus accessibles aux croyants, ce qui les rend reconnaissants pour un tel don, engagés à le vivre quotidiennement et responsables de le témoigner avec cohérence. Le Concileœcuménique Vatican IIa donné une grande impulsion à la redécouverte de la Parole de Dieu par la Constitution dogmatique Dei Verbum. De ces pages, qui méritent toujours d’être méditées et vécues, émerge clairement la nature de l’Écriture Sainte, transmise de génération en génération (chap. II), son inspiration divine (chap. III) qui embrasse Ancien et Nouveau Testament (Chap. IV et V) et son importance pour la vie de l’Église (chap. VI). Pour accroître cet enseignement, Benoît XVI convoqua en 2008 une Assemblée du Synode des Évêques sur le thème « La Parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église », à la suite de laquelle il publia l’Exhortation ApostoliqueVerbum Domini, qui constitue un enseignement incontournable pour nos communautés [1]. Dans ce document, le caractère performatif de la Parole de Dieu est particulièrement approfondi surtout, lorsque dans l’action liturgique, émerge son caractère proprement sacramentel [2].

Il est donc bon que ne manque jamais dans la vie de notre peuple ce rapport décisif avec la Parole vivante que le Seigneur ne se lasse jamais d’adresser à son Épouse, afin qu’elle puisse croître dans l’amour et dans le témoignage de foi.

  1. J’établis donc que le IIIe Dimanche du Temps Ordinaire soit consacré à la célébration, à la réflexion et à la proclamation de la Parole de Dieu. Ce dimanche de la Parole de Dieu viendra ainsi se situer à un moment opportun de cette période de l’année, où nous sommes invités à renforcer les liens avec la communauté juive et à prier pour l’unité des chrétiens. Il ne s’agit pas d’une simple coïncidence temporelle : célébrer le Dimanche de la Parole de Dieu exprime une valeur œcuménique, parce que l’Écriture Sainte indique à ceux qui se mettent à l’écoute le chemin à suivre pour parvenir à une unité authentique et solide. Les communautés trouveront le moyen de vivre ce dimanche comme un jour solennel. Il sera important, en tout cas que, dans la célébration eucharistique, l’on puisse introduire le texte sacré, de manière à rendre évidente à l’assemblée la valeur normative que possède la Parole de Dieu. En ce dimanche, de façon particulière, il sera utile de souligner sa proclamation et d’adapter l’homéliepour mettre en évidence le service rendu à la Parole du Seigneur. Les Évêques pourront, en ce dimanche, célébrer le ritedu lectorat ou confier un ministère similaire, pour rappeler l’importance de la proclamation de la Parole de Dieu dans la liturgie. Il est fondamental, en effet, de faire tous les efforts nécessaires pour former certains fidèles à être de véritables annonciateurs de la Parole avec une préparation adéquate, comme cela se produit de manière désormais habituelle pour les acolytes ou les ministres extraordinaires de la communion. De la même manière, les prêtres en paroissepourront trouver la forme la plus adéquate pour la remise de la Bible, ou de l’un de ses livres, à toute l’assemblée, afin de faire ressortir l’importance d’en continuer la lecture dans sa vie quotidienne, de l’approfondir et de prier avec la Sainte Écriture, se référant de manière particulière à la Lectio Divina.

  1. Le retour du peuple d’Israël dans sa patrie, après l’exil babylonien, fut marqué de façon significative par la lecture du livre de la Loi. La Biblenous offre une description émouvante de ce moment dans le livre de Néhémie. Le peuple est rassemblé à Jérusalem sur la place de la Porte des Eaux à l’écoute de la Loi. Dispersé par la déportation, il se retrouve maintenant rassemblé autour de l’Écriture Sainte comme s’il était « un seul homme » (Ne 8, 1). À la lecture du livre sacré, le peuple « écoutait » (Ne 8, 3), sachant qu’il retrouvait dans cette parole le sens des événements vécus. La réaction à la proclamation de ces paroles fut l’émotion et les pleurs : « Esdras lisait un passage dans le livre de la loi de Dieu, puis les lévites traduisaient, donnaient le sens, et l’on pouvait comprendre. Néhémie le gouverneur, Esdras qui était prêtreet scribe, et les lévites qui donnaient les explications, dirent à tout le peuple : « Ce jour est consacré au Seigneur votre Dieu ! Ne prenez pas le deuil, ne pleurez pas ! » Car ils pleuraient tous en entendant les paroles de la Loi. […] Ne vous affligez pas : la joie du Seigneur est votre rempart ! » (Ne 8, 8-10).

Ces mots contiennent un grand enseignement. La Biblene peut pas être seulement le patrimoine de quelques-uns et encore moins une collection de livres pour quelques privilégiés. Elle appartient, avant tout, au peuple convoqué pour l’écouter et se reconnaître dans cette Parole. Souvent, il y a des tendances qui tentent de monopoliser le texte sacré en le reléguant à certains cercles ou groupes choisis. Il ne peut en être ainsi. La Bibleest le livre du peuple du Seigneur qui, dans son écoute, passe de la dispersion et de la division à l’unité. La Parole de Dieu unit les croyants et les rend un seul peuple.

  1. Dans cette unité générée par l’écoute, les pasteurs ont en premier lieu la grande responsabilité d’expliquer et de permettre à tous de comprendre l’Écriture Sainte. Puisqu’elle est le livre du peuple, ceux qui ont la vocation d’être ministres de la Parole doivent ressentir avec force l’exigence de la rendre accessible à leur communauté. L’homélie, en particulier, revêt une fonction tout à fait particulière, car elle possède « un caractère presque sacramentel » (Evangelii Gaudium, n. 142). Faire entrer en profondeur dans la Parole de Dieu, dans un langage simple et adapté à celui qui écoute, permet au prêtrede faire découvrir également la « beauté des images que le Seigneur utilisait pour stimuler la pratique du bien » (Ibid.). C’est une opportunité pastorale à ne pas manquer !

Pour beaucoup de nos fidèles, en effet, c’est l’unique occasion qu’ils possèdent pour saisir la beauté de la Parole de Dieu et de la voir se référer à leur vie quotidienne. Il faut donc consacrer le temps nécessaire à la préparation de l’homélie. On ne peut improviser le commentaire aux lectures sacrées. Pour nous, comme prédicateurs, il est plutôt demandé de ne pas s’étendre au-delà de la mesure avec des homélies ou des arguments étrangers. Quand on s’arrête pour méditer et prier sur le texte sacré, on est capable de parler avec son cœur pour atteindre le cœur des personnes qui écoutent, pour exprimer l’essentiel qui est reçu et qui produit du fruit. Ne nous lassons jamais de consacrer du temps et de prier avec l’Écriture Sainte, pour qu’elle soit accueillie « pour ce qu’elle est réellement, non pas une parole d’hommes, mais la parole de Dieu » (1Th 2, 13). Il est également souhaitable que les catéchistes, par le ministère dont ils sont revêtus, aident à faire grandir dans la foi, ressentant l’urgence de se renouveler à travers la familiarité et l’étude des Saintes Écritures, leur permettant de favoriser un vrai dialogue entre ceux qui les écoutent et la Parole de Dieu.

  1. Avant de se manifester aux disciples enfermés au cénacle et de les ouvrir à l’intelligence de l’Écriture (cf. Lc 24, 44-45), le Ressuscité apparaît à deux d’entre eux sur le chemin qui mène de Jérusalem à Emmaüs (cf. 24, 13-35). Le récit de l’évangéliste Luc note que c’est le jour de la Résurrection, c’est-à-dire le dimanche. Ces deux disciples discutent sur les derniers événements de la passion et de la mort de Jésus. Leur chemin est marqué par la tristesse et la désillusion de la fin tragique de Jésus. Ils avaient espéré en Lui le voyant comme le Messielibérateur, mais ils se trouvent devant le scandale du Crucifié. Discrètement, le Ressuscité s’approche et marche avec les disciples, mais ceux-ci ne le reconnaissent pas (cf. v. 16). Au long du chemin, le Seigneur les interroge, se rendant compte qu’ils n’ont pas compris le sens de sa passion et de sa mort ; il les appelle « esprits sans intelligence et lents à croire » (v. 25) « et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait » (v. 27) Le Christ est le premier exégète ! Non seulement les Écritures anciennes ont anticipé ce qu’Il aurait réalisé, mais Lui-même a voulu être fidèle à cette Parole pour rendre évidente l’unique histoire du salut qui trouve dans le Christ son accomplissement.

  1. La Bible, par conséquent, en tant qu’Écriture Sainte, parle du Christ et l’annonce comme celui qui doit traverser les souffrances pour entrer dans la gloire (cf. v. 26). Ce n’est pas une seule partie, mais toutes les Écritures qui parlent de Lui. Sa mort et sa résurrectionsont indéchiffrables sans elles. C’est pourquoi l’une des confessions de foi les plus anciennes souligne que « le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures, et il fut mis au tombeau ; il est ressuscité le troisième jour conformément aux Écritures, il est apparu à Pierre » (1Co 15, 3-5). Puisque les Écritures parlent du Christ, elles permettent de croire que sa mort et sa résurrectionn’appartiennent pas à la mythologie, mais à l’histoire et se trouvent au centre de la foi de ses disciples. Le lien entre l’Écriture Sainte et la foi des croyants est profond. Puisque la foi provient de l’écoute et que l’écoute est centrée sur la parole du Christ (cf. Rm 10, 17), l’invitation qui en découle est l’urgence et l’importance que les croyants doivent réserver à l’écoute de la Parole du Seigneur, tant dans l’action liturgique que dans la prière et la réflexion personnelle.

  1. Le « voyage » du Ressuscité avec les disciples d’Emmaüs se termine par le repas. Le mystérieux Voyageur accepte l’insistante demande que lui adressent les deux compagnons : « Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse » (Lc 24, 29). S’assoyant à table avec eux, Jésus prend le pain, récite la bénédiction, le rompt et le leur donne. Alors, leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent. (cf. v. 31) Nous comprenons de cette scène, combien est inséparable le rapport entre l’Écriture Sainte et l’Eucharistie. Le ConcileVatican IIenseigne : « L’Église a toujours vénéré les divines Écritures comme elle le fait aussi pour le Corps même du Seigneur, elle qui ne cesse pas, surtout dans la sainte liturgie, de prendre le pain de vie de la table de la Parole de Dieu et de celle du Corps du Christ, pour l’offrir aux fidèles » (Dei Verbum, n. 21).

La fréquentation constante de l’Écriture Sainte et la célébration de l’Eucharistierendent possible la reconnaissance entre personnes qui s’appartiennent. En tant que chrétiens, nous sommes un seul peuple qui marche dans l’histoire, fort de la présence du Seigneur parmi nous qui nous parle et nous nourrit. Ce jour consacré à la Bibleveut être non pas « une seule fois par an », mais un événement pour toute l’année, parce que nous avons un besoin urgent de devenir familiers et intimes de l’Écriture Sainte et du Ressuscité, qui ne cesse de rompre la Parole et le Pain dans la communauté des croyants. C’est pourquoi nous avons besoin d’entrer constamment en confiance avec l’Écriture Sainte, sinon le cœur restera froid et les yeux resteront fermés, frappés comme par d’innombrables formes de cécité.

Écriture et Sacrements sont donc inséparables. Lorsque les sacrements sont introduits et illuminés par la Parole, ils se manifestent plus clairement comme le but d’un chemin où le Christ lui-même ouvre l’esprit et le cœur pour reconnaître son action salvifique. Il est nécessaire, dans ce contexte, de ne pas oublier l’enseignement qui vient du livre de l’Apocalypse. Il est dit ici que le Seigneur est à la porte et qu’Il frappe. Si quelqu’un entend sa voix et lui ouvre, Il entre pour dîner avec lui (cf. 3, 20). Le Christ Jésus, à travers l’Écriture Sainte, frappe à notre porte; si nous écoutons et ouvrons la porte de notre esprit et celle de notre cœur, alors Il entrera dans notre vie et demeurera avec nous.

  1. Dans la deuxième lettre à Timothée, qui constitue en quelque sorte son testament spirituel, saint Paul recommande à son fidèle collaborateur de fréquenter constamment l’Écriture Sainte. L’Apôtreest convaincu que « toute l’Écriture est inspirée par Dieu ; elle est utile pour enseigner, dénoncer le mal, redresser, éduquer dans la justice » (cf. 3, 16). Cette recommandation de Paul à Timothée constitue une base sur laquelle la Constitution conciliaire Dei Verbum aborde le grand thème de l’inspiration de l’Écriture Sainte, une base dont émergent en particulier la finalité salvifique, la dimension spirituelle et le principe de l’incarnationpour l’Écriture Sainte.

Rappelant tout d’abord la recommandation de Paul à Timothée, Dei Verbumsouligne que « les livres de l’Écriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu a voulu voir consigner dans les Lettres sacrées pour notre salut » (n. 11). Puisque celles-ci enseignent en vue du salut pour la foi dans le Christ (2 Tm 3, 15), les vérités qu’elles contiennent servent à notre salut. La Biblen’est pas une collection de livres d’histoires ni de chroniques, mais elle est entièrement tournée vers le salut intégral de la personne. L’indéniable enracinement historique des livres contenus dans le texte sacré ne doit pas faire oublier cette finalité primordiale : notre salut. Tout est orienté vers cette finalité inscrite dans la nature même de la Bible, qui est composée comme histoire du salut dans laquelle Dieu parle et agit pour aller à la rencontre de tous les hommes, pour les sauver du mal et de la mort. Pour atteindre ce but salvifique, l’Écriture Sainte, sous l’action de l’Esprit Saint, transforme en Parole de Dieu la parole des hommes écrite de manière humaine (cf. Dei Verbum, n. 12). Le rôle de l’Esprit Saintdans la Sainte Écriture est fondamental. Sans son action, le risque d’être enfermé dans le texte serait toujours un danger, rendant facile l’interprétation fondamentaliste, d’où nous devons rester à l’écart afin de ne pas trahir le caractère inspiré, dynamique et spirituel que possède le texte sacré. Comme le rappelle l’Apôtre, « la lettre tue, mais l’Esprit donne la vie » (2 Co 3, 6). Le Saint-Esprit transforme donc la Sainte Écriture en une Parole vivante de Dieu, vécue et transmise dans la foi de son peuple saint.

  1. L’action de l’Esprit Saintne concerne pas seulement la formation de l’Écriture Sainte, mais agit aussi chez ceux qui se mettent à l’écoute de la Parole de Dieu. Elle est importante l’affirmation des Pères conciliaires selon laquelle l’Écriture Sainte doit être « lue et interprétée à la lumière du même Esprit par lequel elle a été écrite » (Dei Verbum, n. 12). Avec Jésus Christ, la révélation de Dieu atteint son accomplissement et sa plénitude ; pourtant, l’Esprit Saintcontinue son action. En effet, il serait réducteur de limiter l’action de l’Esprit Saintuniquement à la nature divinement inspirée de l’Écriture Sainte et à ses différents auteurs. Il est donc nécessaire d’avoir confiance en l’action de l’Esprit Saintqui continue à réaliser sa forme particulière d’inspiration lorsque l’Église enseigne l’Écriture Sainte, lorsque le Magistèrel’interprète authentiquement (cf. ibid., 10) et quand chaque croyant en fait sa norme spirituelle. Dans ce sens, nous pouvons comprendre les paroles de Jésus quand, aux disciples qui lui confirment avoir saisi le sens de ses paraboles, Il dit : « C’est pourquoi tout scribe devenu discipledu royaume des Cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien » (Mt 13, 52).

  1. Dei Verbumprécise enfin que « les paroles de Dieu, passant par les langues humaines, sont devenues semblables au langage des hommes, de même que jadis le Verbe du Père éternel, ayant assumé l’infirmité de notre chair, est devenu semblable aux hommes » (n. 13). C’est comme dire que l’Incarnationdu Verbe de Dieu donne forme et sens à la relation entre la Parole de Dieu et le langage humain, avec ses conditions historiques et culturelles. C’est dans cet événement que prend forme la Tradition, qui elle aussi est Parole de Dieu (cf. Ibid., n. 9). On court souvent le risque de séparer entre elles l’Écriture Sainte et la Tradition, sans comprendre qu’ensemble elles sont l’unique source de la Révélation. Le caractère écrit de la première ne diminue en rien le fait qu’elle soit pleinement parole vivante ; de même que la Tradition vivante de l’Église, qui la transmet sans cesse au cours des siècles de génération en génération, possède ce livre sacré comme la « règle suprême de la foi » (Ibid., n. 21). D’ailleurs, avant de devenir un texte écrit, l’Écriture Sainte a été transmise oralement et maintenue vivante par la foi d’un peuple qui la reconnaissait comme son histoire et son principe d’identité parmi tant d’autres peuples. La foi biblique se fonde donc sur la Parole vivante et non pas sur un livre.

  1. Lorsque l’Écriture Sainte est lue dans le même esprit que celui avec lequel elle a été écrite, elle demeure toujours nouvelle. L’Ancien Testament n’est jamais vieux une fois qu’on le fait entrer dans le Nouveau, car tout est transformé par l’unique Esprit qui l’inspire. Tout le texte sacré possède une fonction prophétique : il ne concerne pas l’avenir, mais l’aujourd’hui de celui qui se nourrit de cette Parole. Jésus lui-même l’affirme clairement au début de son ministère : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre » (Lc 4, 21). Celui qui se nourrit chaque jour de la Parole de Dieu se fait, comme Jésus, contemporain des personnes qu’il rencontre ; il n’est pas tenté de tomber dans des nostalgies stériles du passé ni dans des utopies désincarnées vers l’avenir. L’Écriture Sainte accomplit son action prophétique avant tout à l’égard de celui qui l’écoute. Elle provoque douceur et amertume. Rappelons-nous les paroles du prophèteÉzéchiel lorsque le Seigneur l’invite à manger le rouleau du livre, il confie : « dans ma bouche il fut doux comme du miel » (cf. 3, 3). Même l’évangéliste Jean sur l’île de Patmos revit la même expérience qu’Ézéchiel de manger le livre, mais il ajoute quelque chose de plus spécifique : « Dans ma bouche il était doux comme le miel, mais, quand je l’eus mangé, il remplit mes entrailles d’amertume » (Ap 10, 10). L’effet de douceur de la Parole de Dieu nous pousse à la partager avec ceux que nous rencontrons au quotidien pour leur exprimer la certitude de l’espérancequ’elle contient (cf. 1 P 3,15-16). L’amertume, à son contraire, est souvent offerte lorsqu’on saisit à quel point il nous est difficile de vivre la parole de manière cohérente, ou se voit même refusée d’être touchée du doigt parce qu’elle n’est pas retenue valable pour donner un sens à la vie. Il est donc nécessaire de ne jamais s’accoutumer à la Parole de Dieu, mais de se nourrir de celle-ci pour découvrir et vivre en profondeur notre relation avec Dieu et avec nos frères.

  1. Une autre provocation qui provient de l’Écriture Sainte est celle qui concerne la charité. Constamment la Parole de Dieu rappelle l’amour miséricordieux du Père qui demande à ses enfants de vivre dans la charité. La vie de Jésus est l’expression pleine et parfaite de cet amour divin qui ne retient rien pour lui-même, mais qui s’offre à tous sans réserve. Dans la paraboledu pauvre Lazare, nous trouvons une indication précieuse. Lorsque Lazare et le riche meurent, celui-ci, voyant le pauvre dans le sein d’Abraham, demande qu’il soit envoyé à ses frères pour les avertir de vivre l’amour du prochain, pour éviter qu’eux aussi subissent ses propres tourments. La réponse d’Abraham est cinglante : « Ils ont Moïse et les prophètes, qu’ils les écoutent » (Lc 16, 29). Écouter les Saintes Écritures pour pratiquer la miséricorde: c’est un grand défi pour notre vie. La Parole de Dieu est en mesure d’ouvrir nos yeux pour nous permettre de sortir de l’individualisme qui conduit à l’asphyxie et à la stérilité tout en ouvrant grand la voie du partage et de la solidarité.

  1. L’un des épisodes les plus significatifs du rapport entre Jésus et les disciples est le récit de la Transfiguration. Jésus monte sur la montagne pour prier avec Pierre, Jacques et Jean. Les évangélistes se rappellent que, tandis que le visage et les vêtements de Jésus resplendissaient, deux hommes conversaient avec Lui : Moïse et Élie, qui incarnent respectivement la Loi et les Prophètes, c’est-à-dire les Saintes Écritures. La réaction de Pierre, à cette vue, est remplie d’un joyeux émerveillement : « Maître, il est bon que nous soyons ici ! Faisons trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie » (Lc 9, 33). A ce moment-là, une nuée les couvrit de son ombre et les disciples furent saisis de peur. La Transfigurationrappelle la fête des tentes, quand Esdras et Néhémie lisaient le texte sacré au peuple, après le retour de l’exil. Dans un même temps, elle anticipe la gloire de Jésus en préparation au scandale de la passion, gloire divine qui est également évoquée par la nuée qui enveloppe les disciples, symbole de la présence du Seigneur. Cette Transfigurationest semblable à celle de l’Écriture Sainte qui se transcende lorsqu’elle nourrit la vie des croyants. Comme le rappelle Verbum Domini : « Dans la saisie de l’articulation entre les différents sens de l’Écriture, il devient alors décisif de comprendre le passage de la lettre à l’esprit. Il ne s’agit pas d’un passage automatique et spontané; il faut plutôt un dépassement de la lettre » (n. 38).

  2. Sur le chemin d’accueil de la Parole de Dieu nous accompagne la Mère du Seigneur, reconnue comme bienheureuse parce qu’elle a cru en l’accomplissement de ce que le Seigneur lui avait dit (cf. Lc 1, 45). La béatitude de Marie précède toutes les béatitudes prononcées par Jésus pour les pauvres, les affligés, les humbles, les pacificateurs et ceux qui sont persécutés, car c’est la condition nécessaire pour toute autre béatitude. Aucun pauvre n’est bienheureux parce qu’il est pauvre ; il le devient, comme Marie, s’il croit en l’accomplissement de la Parole de Dieu. C’est ce que rappelle un grand discipleet maître des Saintes Écritures, saint Augustin : « Quelqu’un au milieu de la foule, particulièrement pris par l’enthousiasme, s’écria : Bienheureux le sein qui t’a porté. Et lui de répondre : Bienheureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la gardent. C’est comme dire : ma mère, que tu appelles bienheureuse, est bienheureuse précisément parce qu’elle garde la Parole de Dieu, non pas parce que le Verbe est devenu chair en elle et a vécu parmi nous, mais parce qu’elle garde la parole même de Dieu par qui elle a été créée, et qu’en elle Il s’est fait chair » (Comm. l’év. de Jn., 10, 3).

Que le Dimanche de la Parole de Dieu puisse faire grandir dans le peuple de Seigneur la religiosité et l’assiduité familière avec les Saintes Écritures, comme l’auteur sacré enseignait déjà dans les temps anciens « Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique » (Dt 30, 14).

Donné à Rome, près de saint Jean du Latran, le 30 septembre 2019

En la mémoire liturgique de saint Jérôme, en ce début du 1600e anniversaire de sa mort.

FRANÇOIS

[1] Cf. AAS 102 (2010), 692-787.

[2] « La sacramentalité de la Parole se comprend alors par analogie à la présence réelle du Christ sous les espèces du pain et du vin consacrés. En nous approchant de l’autel et en prenant part au banquet eucharistique, nous communions réellement au corps et au sang du Christ. La proclamation de la Parole de Dieu dans la célébration implique la reconnaissance que le Christ lui-même est présent et s’adresse à nous pour être écouté », Verbum Domini, 56.