Devenir témoins du Christ (D. Alexandre ROGALA, Jn 17,11b-19)

Jeudi dernier nous avons célébré la solennité de l’Ascension de Notre Seigneur, et dans l’extrait du Livre des Actes, juste avant d’être enlevé au Ciel Jésus a promis à ces disciples qu’ils recevraient l’Esprit Saint : « vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Ac 1, 8)

Comme vous le savez, dimanche prochain nous allons commémorer ce don de l’Esprit Saint qui est l’acteur principal de la mission d’Évangélisation de l’Église.

Mais avant de célébrer la Pentecôte, la liturgie nous propose un ensemble de textes qui nous rappelle l’importance de la mission.

Dans la première lecture nous avons lu un épisode du Livre des Actes des Apôtres qui se situe précisément entre l’Ascension et la Pentecôte. Temps pendant lequel les disciples s’organisent pour se préparer à la mission qui leur a été confiée : être témoins du Christ.

Le récit de l’élection de Matthias, donne quelques informations qui peuvent être utiles à la mission d’évangélisation de l’Église.

Commençons par écouter saint Pierre : « il y a des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a vécu parmi nous, depuis le commencement, lors du baptême donné par Jean, jusqu’au jour où il fut enlevé d’auprès de nous. Il faut donc que l’un d’entre eux devienne, avec nous, témoin de sa résurrection » (Ac 1, 21-22).

Évidemment, nous n’avons pas fréquenté le Jésus historique. Donc, si nous prenons ce critère au sens littéral, aucun d’entre-nous ne pourrait être témoin de la Résurrection. Mais Pierre ici ne parle que du groupe symbolique des Douze. D’ailleurs dans la suite du Livre des Actes, l’Évangile se répand principalement par des hommes et des femmes ne faisant pas partie des Douze. Il est donc légitime de tirer du discours de Pierre un enseignement pour nous.

Pierre nous dit que la première qualité d’un témoin de la « Résurrection du Seigneur » est d’avoir accompagné Jésus de son baptême à son Ascension.

Même si la mort et la résurrection de Jésus sont au centre de notre foi chrétienne, nous devons nous rappeler que cet évènement n’est pas une réalité qui se situerait en dehors de l’histoire. Au contraire, la crucifixion et l’exaltation de Jésus sont l’aboutissement de son ministère public qui a commencé lorsqu’il a reçu le baptême. C’est pourquoi, le missionnaire doit avoir une certaine connaissance de la vie de Jésus.

De plus le verbe « accompagner » (συνέρχομαι) qu’emploie Pierre dans ce passage suggère que la connaissance intellectuelle ne suffit pas : il faut « avoir accompagné Jésus ». Le témoin que cherche Jésus est celui qui, au quotidien, « marche avec lui ».

Le texte d’évangile que nous avons entendu est un extrait du chapitre 17 de l’évangile selon Jean. Jésus adresse une prière à Dieu le Père dans laquelle il intercède pour ses disciples après avoir terminé son discours d’adieu.

Ce texte n’est pas facile. Ceux qui parmi vous viennent aux rencontres bibliques autour de l’évangile johannique en savent quelque chose puisque nous avons travaillé ce texte la semaine ensemble.

Ce matin, je voudrais simplement attirer votre attention sur deux éléments du texte.

Tout d’abord, cet extrait de l’évangile selon saint Jean confirme que l’apostolat n’est pas limité aux Douze. Dans sa prière, Jésus dit : « De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde ». (Jn 17, 18)

Le verbe que nous traduisons en français par « envoyer » est ἀποστέλλω qui a donné « apôtre ». Et puisque les évangiles ont été écrits pour les croyants qui n’ont pas connu le Jésus historique, c’est de nous dont parle Jésus : nous sommes « envoyés dans le monde » ; nous sommes apôtres.

Jésus dit encore : « Moi, je leur ai donné ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi je n’appartiens pas au monde. Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais » (Jn 17, 14-15).

Dans ce passage est exprimé tout l’enjeu de la mission d’évangélisation de l’Église : il s’agit du salut du monde. En effet, si Jésus ne veut pas que ses disciples soient retirés du monde, c’est parce qu’il veut que par leur annonce et leur témoignage, le monde croit en lui, et qu’ainsi, il soit sauvé.

Si le monde prend en haine les « envoyés » de Jésus, eux ne doivent pas haïr le monde. Au contraire les disciples de Jésus doivent aimer le monde comme Dieu l’a aimé.

D’ailleurs, plus tôt dans ce même évangile, Jésus a dit à Nicodème que « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (Jn 3, 16). Pour être un bon missionnaire de l’Évangile, le premier critère est « d’aimer ». C’est ce que nous enseigne le passage de la Première Lettre de Jean que nous avons entendu en deuxième lecture.

 « Bien-aimés, puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres ».

Jean ne nous dit pas que Dieu ne nous a aimé un petit peu, mais qu’il nous a « tellement aimé » ; c’est-à-dire qu’il nous a aimé jusqu’à nous donner ce qu’il avait de plus précieux, c’est à dire son Fils.

Et c’est parce que nous avons la certitude d’être aimés que nous pouvons nous aimer nous-mêmes et aimer à notre tour.

Saint Jean écrit encore : « Dieu, personne ne l’a jamais vu. Mais si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et, en nous, son amour atteint la perfection. Voici comment nous reconnaissons que nous demeurons en lui et lui en nous : il nous a donné part à son Esprit. Quant à nous, nous avons vu et nous attestons que le Père a envoyé son Fils comme Sauveur du monde » (1 Jn 4, 12-14).

Jean nous dit que nous ne pouvons pas voir Dieu, en revanche, si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous. Autrement dit, s’il est impossible à l’être humain de « voir » Dieu, il peut faire l’expérience de Dieu en aimant son frère. Puisque « Dieu est amour » (4,  8) par nature, lorsque j’aime mon frère, je fais l’expérience de Dieu. Ce n’est qu’à la condition qu’il vive concrètement l’amour fraternel, que le disciple missionnaire peut attester en vérité et par l’Esprit, que le Père a envoyé son Fils comme sauveur du monde.

Demandons donc au Seigneur de nous faire grandir dans l’amour afin que nous puissions devenir ses témoins pour l’humanité qui a tant besoin de se savoir aimée.

                                                               D. Alexandre ROGALA

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