Dieu ne se laisse pas saisir ou expliquer par nos mots : il se vit…

La réalité profonde de l’histoire humaine, c’est l’homme lui-même, l’homme, fils et image de Dieu. Cette réalité n’est pas seulement humaine mais divine, car Dieu s’est uni l’homme à lui dans le Christ. Mais bien qu’on puisse la conceptualiser et la symboliser, cette réalité divine, qui est le cœur de l’histoire, ne peut en aucun cas être pleinement saisie ou contenue dans un symbole. On peut isoler[1] la réalité dans un symbole, mais il faut alors se rappeler qu’elle n’est pas le symbole, mais il faut alors se rappeler qu’elle n’est pas le symbole, et que le symbole, de son côté est incapable de communiquer la pleine réalité. Si bien qu’il faut être capable de dire, aussitôt après avoir utilisé le symbole : « Mais la réalité, ce n’est pas cela. » Qu’est-ce que la réalité ? Une seule réponse à cela : elle est inconnue, mais on la connaît par l’Inconnaissance.

Nous voici ramenés à la nécessité d’une profonde pénétration contemplative de la réalité. L’expression en elle-même est équivoque, évidemment. Mais quiconque a suivi avec attention notre traitement du sujet dans les pages qui précèdent fera d’instinct à présent les ajustement requis : la « réalité » à travers laquelle le contemplatif « pénètre » afin de trouver le contact avec ce qu’il y a de plus « profond » en elle, c’est en fait son être à lui, sa vie à lui. N’est pas contemplatif celui qui projette sur d’autres objets une intuition spirituelle magique, mais celui qui, étant parfaitement unifié en lui-même et recueilli au centre de son humilité, entre en contact avec la réalité par une immédiateté oublieuse[2] , pour ainsi dire, de la division entre sujet et objet. En un certain sens, c’est en se perdant et en s’oubliant comme objet de réflexion qu’il se trouve lui-même, et avec lui toute autre réalité. Ce genre de « trouvaille » se situe au-delà des concepts et au-delà des réalisations concrètes.

Le contemplatif ne se propose pas d’acquérir une sorte de maîtrise intuitive de l’histoire, ou de l’esprit humain, ou des choses divines. Il cherche à rejoindre le centre de sa propre vérité vivante, ou de l’esprit humain, ou des choses divines. Il cherche à rejoindre le centre de sa propre vérité vivante, et arrivé là, tout ce qu’il a besoin de percevoir de ces autres mystères lui est accordé au moment où il en a besoin. S’il n’a besoin de rien, rien ne lui est accordé. Et si rien ne lui est accordé, rien non plus n’est désiré. La sagesse du contemplatif, par conséquent, n’est pas la sagesse de celui qui a besoin de posséder savoir et culture (encore qu’il puisse être homme de culture) ; c’est la sagesse de celui qui, vivant dans l’oubli de lui-même et l’oubli de la sagesse, ne cherche pas à rien posséder parce qu’il n’a besoin de rien. Tout ce dont il a besoin lui vient de Dieu, avant même qu’il commence à en sentir le besoin.

[1] Au sens physico-chimique (N. d. T.)

[2] En anglais : … an immediacy that forgets the division…

                 Thomas Merton, “L’expérience intérieure”

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