2ième Dimanche de Carême (Luc 9, 28-36) : « Seigneur, quand te verrai-je face à face ? » (Francis Cousin)
« Seigneur, quand te verrai-je face à face ? »
Cette antienne du psaume 41 est bien connu, et beaucoup aimerait qu’elle se réalise bien avant leur mort. C’est tout ce qu’on peut leur souhaiter.
C’est ce qu’ont vécu les trois apôtres qui accompagnaient Jésus sur la montagne du Thabor. Jésus étant en prière, « son visage devint autre » et il parlait avec Moïse et Elie. Pierre, Jean et Jacques, bien qu’accablés par le sommeil « virent la gloire de Jésus et les deux hommes à ses côtés ».
Voir Jésus dans sa gloire, avec son corps glorieux, son corps de ressuscité !
Une vision surprenante, inattendue, mais paisible, tellement que Pierre veut qu’elle dure et qu’il propose de planter trois tentes …
Une vision qui éblouit, mais qui fascine …
Comme certaines rencontres qu’on peut avoir avec des personnes « qui respirent Dieu », qui « vivent de Dieu ». Et on ne peut que souhaiter que chacun puisse rencontrer au moins une de ces personnes.
J’en ai rencontré une il y a plus de quarante ans. J’étais en vacances en Bretagne, seul, et j’avais décidé d’aller à l’abbaye de Boquen. Je pensais y trouver des moines, et en entrant dans l’abbatiale, j’y trouvais des sœurs, agenouillées dans le chœur avec quelques laïcs. C’était le début des vêpres. J’avançais jusqu’au premier banc et m’associais à leur prière. Quelle ne fut pas ma surprise de voir une sœur se lever et venir vers moi en souriant, me demandant de venir avec elles dans le chœur. Je refusais en disant que je peux prier avec elles d’où je suis et que je ne voulais pas déranger. Mais elle insista tellement que je la suivis.
Les vêpres terminées, tout le monde sortit et je m’apprêtais à partir quand la même sœur vint vers moi en sautillant, et me posant quelques questions. Elle avait un visage souriant plein de joie, « plein d’amour et de miséricorde », et ses yeux reflétaient la bonté de Dieu. Elle donnait à voir Dieu.
Est-ce que je la voyais de manière différente que celles des autres personnes présentes ce jour-là ? Je ne sais. Sans doute oui. Et encore maintenant, je revois ses yeux. Elle était tellement heureuse d’être avec Dieu. On en voit si peu que cela marque.
C’est peut-être ce qui est arrivé aux trois apôtres : ils ont vu le Christ, et ils l’ont décrit tel qu’ils l’ont perçu, tel que l’Esprit Saint leur a permis de le voir, comme la beauté d’amour et de miséricorde du Fils de Dieu.
Comme sans doute certains ’’guéris’’ par Jésus l’ont vu. Ce qui leur a permis de changer de vie, ou plutôt de lui donner une nouvelle orientation, éclairée par la bonté et la beauté du Fils de Dieu, comme par exemple Bartimée et Zachée …
On remarquera que les trois apôtres choisis par Jésus l’ont été parmi les « quatre premiers disciples » (dans les évangiles synoptiques), et qu’ils étaient avec lui dans des moments particuliers : la ’’guérison’’ de la fille de Jaïre où Jésus montre sa supériorité sur la mort, la transfiguration où Jésus se montre comme Fils de Dieu et continuateur de l’Ancien Testament, à Gethsémani où Jésus montre sa faiblesse humaine et son acceptation de la mission donnée par son Père…
Manque le quatrième : André !
Mais peut-être que celui-ci n’avait pas besoin de VOIR Jésus dans ces moments-là, car il avait tout compris dès le départ. Il avait vu et compris Jésus dès son premier contact : « Venez et voyez » (Jn 1,39). Pour preuve, en rencontrant son frère Simon-Pierre, il lui dit : « Nous avons trouvé le Messie » (Jn 1,41)
Dieu se donne à voir, par lui-même, avec l’aide de l’Esprit-Saint.
Mais c’est très rare qu’il le fasse de lui-même.
En fait, il compte sur nous, les Chrétiens.
C’est nous qui devons refléter auprès des autres « l’amour et la miséricorde de Dieu », qui devons refléter le visage glorieux de Jésus.
C’est nous qui devrions avoir « une gueule de Ressuscité » comme disait le père Bernard Régnier !
Malheureusement, nous en sommes souvent loin.
C’est l’occasion pour nous, pendant ce temps de carême, de « rentrer en nous-même pour retourner vers le Père » (cf la parabole du fils prodigue Lc 15,17), et de nous convertir en profondeur.
Saint Paul nous dit dans la deuxième lecture : « Regardez bien ceux qui se conduisent selon l’exemple que nous vous donnons ». Dieu se donne à voir.
Seigneur Jésus,
Tu te montres aux apôtres
tel que tu es depuis toujours,
dans ton corps glorieux.
D’autres, comme eux, t’ont vu ainsi,
et en sont totalement transformés :
c’est toi qui vit en eux.
Puissions-nous devenir comme eux,
pour ta gloire et le salut du monde.
Francis Cousin
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Prière dim carême C 2° A6