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FÊTE DE LA TOUSSAINT : son histoire (Noéline FOURNIER)…

          

« Heureux les pauvres de cœur,

        car le Royaume des Cieux est à eux.

   Heureux les cœurs purs, 

         ils verront Dieu. »

                                                                      (Mt. 5, 1-12)

Contraction de « fête de tous les saints », le nom féminin Toussaint désigne la  Fête Universelle de tous les « Saints » le 1er novembre.

Cette Fête, issue de la tradition, est attestée dès le IIème siècle parmi les Communautés Chrétiennes d’Orient : il s’agissait de célébrer les martyrs, hommes et femmes,  morts pour avoir affirmé leur Foi.

Essentiellement Catholique, la Toussaint est destinée à Célébrer l’ensemble des Saints et des Bienheureux.

En Occident, c’est Boniface IV, Pape de 608 à 615, qui le premier choisit de lui donner une date officielle, le 13 mai, date anniversaire de la transformation du Temple du  Panthéon, au début du VIè siècle, à Rome, en Église dédiée à Sainte Marie des Martyrs. Cette date ne fut probablement pas choisie par hasard, puisque l’on priait à l’époque du 9 au 13 mai pour que les morts ayant trouvé une fin violente ou tragique reposent en paix…

A quelle époque la fête de la Toussaint fut-elle transférée le 1er Novembre ?

 Plusieurs hypothèses prévalent. Peut-être en 731, lorsqu’un autre Pape, Grégoire III, dédie à son tour une Chapelle à tous les Saints, dans l’Eglise Saint-Pierre de Rome… A moins que ce ne soit en 830, quand Grégoire IV ordonne que la Toussaint soit désormais célébrée dans le monde entier.

            Au fil des siècles, la fête gagne en tout cas en importance. En 835, Louis le Pieux (778-840), successeur de Charlemagne (v.742-814) obéit au Pape  et impose la Toussaint à tout l’Empire Carolingien. Elle devient vite fondamentale, comme l’atteste ce sermon de Saint Bernard (v.1090-1153), fondateur de l’Abbaye de Clairvaux et Réformateur de la vie Religieuse de son temps.

            Au XIè siècle, un autre Pape, Sixte IV (1414-1484), lui attribue en 1480 une Octave, soit une extension de huit jours pendant lesquels sont répétés les mêmes textes et les mêmes chants.

            Enfin, Pie X, en 1914, la rend obligatoire : les fidèles sont tenus d’assister ce jour-là à la messe.

Pourquoi cette place solennelle accordée au culte des Saints ?

         Il s’agit de célébrer l’ensemble des croyants ayant vécu jusqu’au bout selon la Parole de Dieu, et « établis » dans la « Gloire », c’est à dire auprès de Dieu au Paradis, vivant une Béatitude Éternelle.

            GÂTEAUX DE MIEL ET DE BLÉ

         Comme le montre la Méditation de St Bernard, chaque chrétien doit aspirer à rejoindre la Béatitude, et conformer son existence à cette aspiration.

            Pour Saint Bernard, la Foi est marquée par une forme de radicalité spirituelle, d’aspiration à la pureté. Mais le Théologien montre combien cette Fête est au cœur de la Spiritualité Chrétienne, et qu’elle enjoint à vivre selon les préceptes de l’Evangile.

            La popularité de la Toussaint doit cependant beaucoup au fait qu’elle soit liée à la Commémoration des défunts, fixée quand à elle au 2 Novembre, jour où les Catholiques ont prit l’habitude d’aller se recueillir et de déposer des fleurs sur la tombe de leurs proches décédés.

            Dans l’Eglise Orthodoxe, on fête le « dimanche de tous les saints » le premier dimanche après la Pentecôte. Et c’est avant le Carême qu’on prie pour l’ensemble des fidèles défunts, tout en amenant à l’Eglise des gâteaux faits de miel et de blé dont la germination évoque la Résurrection.

    

SERMON DE SAINT BERNARD

  1. « Cette Fête aujourd’hui pour nous, et la solennité de ce jour compte parmi les plus grandes Solennités. Que dis-je ? De quel apôtre, de quel martyr, de quel Saint est-ce la fête ?

            Ce n’est pas la Fête d’un Saint en particulier, mais la fête de « tous les Saints », car personne de nous n’ignore que cette fête est appelée et est, en effet, la Fête de tous les Saints (…). Et la sainteté des uns n’est pas celle des autres… Il y a une différence quelque fois même très grande entre un Saint et un Saint (…)

            En effet, il ne semble pas qu’on puisse honorer comme des athlètes triomphants ceux qui n’ont jamais combattu et, pourtant, pour mériter un culte différent, ils n’en sont pas moins digne des plus grands hommages, puisqu’ils sont vos amis, ô mon Dieu, et qu’ils ont toujours été attachés à votre volonté avec autant de félicité que de facilité. Après tout, peut-être pourrait-on croire qu’ils ne sont point sans avoir soutenu des combats. Aussi, quand ils ont résisté à ceux d’entre eux qui ont péché, et que, au lieu de se ranger du parti des impies, chacun d’eux s’est écrié : « Pour moi, il m’est bon de rester attaché à Dieu ».

            Ce qu’il faut Célébrer en eux, c’est donc la grâce qui les a prévenus des douceurs de la Bénédiction.

            Ce qu’il faut honorer, c’est la Bonté de Dieu qui les a (…) non point arrachés à la tentation, mais préservés de la tentation.

  1. Dans les hommes, il y a un autre genre de sainteté qui mérite des honneurs à part ; C’est la Sainteté de ceux qui sont venus en passant par de grandes afflictions et qui ont lavé et blanchi leurs robes dans le Sang de l’Agneau (Apo. 7,13-17), qui triomphent enfin après bien des luttes et reçoivent la couronne de la Victoire dans les Cieux, parce qu’ils ont combattu les légitimes combats.

  2. Mais à quoi bon les louanges que nous adressons aux Saints, à quoi bon célébrer leur Gloire et faire parmi nous la Fête ?

Pourquoi prodiguer les honneurs de la terre à ceux que, selon la Promesse véridique du Fils, le Père Céleste honore lui-même ?

Qu’ont-ils besoin de nos félicitations ? Ils ont tout ce qu’ils peuvent contenir de Gloire.

C’est vrai, mes bien-aimés, les Saints n’ont pas besoins de nos honneurs, et notre dévotion n’ajoute rien à ce qu’ils ont. Mais il y va de notre intérêt, sinon du leur, que nous vénérions leur souvenir.

Voulez-vous savoir quel avantage nous avons à leur rendre nos hommages ? Je vous avouerai que pour moi, leur mémoire fait naître en moi un violent désir (…). En effet, ils s’y trouvent en substance et nous n’y sommes qu’en désir ; ils y sont effectivement présents, nous ne nous y trouvons que par le souvenir.

Quand nous sera-t-il donné de nous réunir aussi à nos pères ? De leur être présenté en personne ?

Tel est le premier désir que le souvenir des Saints fait naître en nous, que dis-je ? Dont il nous embrase.

Quand jouirons-nous de leur société si désirable, quand serons-nous dignes d’être les concitoyens des esprits Bien-Heureux, d’entrer dans l’assemblée des patriarches (….), en un mot, et de nous réjouir en commun dans la troupe entière des Saints ? (..)

L’Église des Premiers-Nés nous attend, et nous négligeons de l’aller rejoindre ; les Saints nous appellent, et nous n’en tenons aucun compte.

Réveillons-nous enfin, mes frères, ressuscitons avec le Christ, cherchons, goûtons les choses d’en Haut..

            Saint Bernard, cinquième sermon sur la Toussaint,

Œuvres complètes de St Bernard, Traduction de l’Abbé Charpentier, 1866.

 

« L’un des Vieillards prit alors la parole et me dit : « Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d’où viennent-ils ? » Et moi de répondre : « Monseigneur, c’est toi qui le sais ». Il reprit : « Ce sont ceux qui viennent de la grande épreuve : il ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau. C’est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, le servant jour et nuit dans son Temple ; et celui qui siège sur le trône étendra sur eux sa tente.

            Jamais plus ils ne souffriront de la faim ni de soif ; jamais plus ils ne seront accablés ni par le soleil, ni aucun vent brûlant. Car l’Agneau qui se tient au milieu du trône sera leur pasteur et les conduira aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. » Apo. 7, 13-17

Et nous pouvons prendre l’exemple de Saint Paul qui nous dit (2 Tm 4,6-8) :

« J’ai combattu jusqu’au bout le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la Foi. Et maintenant, voici qu’est préparée pour moi la couronne de justice, qu’en retour le Seigneur me donnera en ce Jour-là, Lui, le juste Juge, et non seulement à moi mais à tous ceux qui auront attendu avec amour son Apparition. »

            Nous avons compris, nous devons nous aussi mener le bon combat sur cette terre si nous voulons voir Dieu et entrer dans cette Béatitude Éternelle.

 Comment peut-on « mener le bon combat » ?  De quel combat s’agit-il ?

             C’est le Combat de l’Amour que nous devons mener  puisque Dieu est Amour !

Il ne faut pas se tromper de combat : Nous devons combattre le mal mais ne pas combattre l’homme ! Oui, nous devons combattre le mal et l’injustice mais respecter l’homme… Nous ne devons pas oublier que Jésus nous a demandé d’aimer notre prochain comme nous-mêmes et aussi nos ennemis !… Quel combat !…

Voici l’exemple de quelqu’un qui a mener le bon combat à la suite du Christ.

 

           En octobre 1964, Martin LUTHER KING reçoit le prix Nobel de la Paix. Il ne s’agissait pas uniquement d’un prix pour les droits civiques, mais de contribuer à la Paix dans le Monde. Lors de son discours à la remise du prix à Oslo, Martin déclara :

 

« Il me semble que ce prix m’a été donné pour quelque chose qui n’est pas encore atteint. Je le prends comme un encouragement à poursuivre avec encore plus de courage l’objectif dans lequel nous croyons » (….)

            Les hommes, depuis des années déjà, parlent de la guerre et de la Paix.

            Désormais, ils ne peuvent plus se contenter d’en parler ; ils n’ont plus le choix entre la violence et la non-violence en ce monde ; c’est la non-violence ou la non-existence. Voilà où nous en sommes aujourd’hui (…)

            Dressons-nous ce soir avec encore plus d’empressement. Levons-nous avec une plus grande détermination. Marchons en ces jours décisifs, en ces jours de défi…

 Nous avons une chance de bâtir une nation meilleure. Et je veux remercier Dieu, une fois encore, de m’avoir permis d’être ici avec vous.

            (…) Je ne sais pas ce qui va arriver maintenant.

           Nous avons devant nous des jours difficiles. Mais peu m’importe ce qui m’arrivera désormais, car je suis allé jusqu’au sommet de la montagne.

 Je ne m’inquiète plus. Comme tout le monde, j’aimerai vivre vieux. La longévité a son prix. Mais je ne m’en soucie guère, maintenant.

 Je veux simplement que la Volonté de Dieu soit faite. Et il m’a permis d’atteindre le sommet de la montagne. J’ai regardé autour de moi. Et j’ai vu la Terre promise.

Il se peut que je n’y pénètre pas avec vous. Mais je veux que vous sachiez, ce soir, que notre peuple atteindra la Terre Promise. Et je suis heureux ce soir.

 Je ne m’inquiète de rien. Je ne crains aucun homme. Mes yeux ont vu la Gloire de la Venue du Seigneur ».

                                                            3 Avril 1968, Memphis, Tennessee

                                             Extrait du dernier discours de Martin LUTHER KING Jr

avant son assassinat le lendemain 4 Avril

« La Véritable Paix n’est pas simplement l’absence de tension ;

C’est la présence de la justice. »

                         « L’amour est le pouvoir le plus durable du monde.

« Cette Force Créatrice, si magnifiquement illustrée dans la Vie du Christ, est l’instrument le plus puissant dont dispose le genre humain dans sa quête pour la Paix et la Sécurité » (Martin Luther).

           « Puis je vis un ciel nouveau, une terre nouvelle – car le premier ciel et la première terre ont disparu, et de mer, il n’y en a plus. Et je vis la Cité Sainte, Jérusalem nouvelle, qui descendait du ciel, de chez Dieu ; elle s’est faite belle, comme une jeune mariée parée pour son époux.

         J’entendis alors une voix clamer, du trône : « Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure avec eux ; ils seront son peuple, et lui, Dieu-avec-eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n’y en aura plus ; de pleurs, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé ». (Apo. 21,1-4)

 Bonne Fête de la Toussaint à tous !

    Noéline  FOURNIER