Homélie du Père Sébastien PAYET (Messe télévisée du Dimanche 29 mars)

Homélie pour le 5ème dimanche de Carême – Année A.

« Moi, je suis la résurrection et la vie » (Jn 11, 25).

« Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. » (Jn 11, 21 et 32) Cette affirmation reprise par les deux soeurs, Marthe et Marie, nous interpelle et nous rejoint, peut être plus particulièrement encore en ces temps de pandémie de coronavirus. Toutes les deux en effet avaient interpellé plusieurs jours auparavant Jésus, elles l’avaient informé de la maladie de leur frère Lazare, l’ami de Jésus. Mais celui-ci s’est attardé deux jours de plus à l’endroit où il se trouvait, se contentant d’affirmer que cette maladie ne conduirait pas à la mort. Or, Lazare est mort. Jésus se serait-il donc trompé ? Aurait-il menti à ses disciples ? Non, évidemment. Mais alors, pourquoi n’a-t-il rien fait ? Comme certains des Juifs venus auprès des soeurs pour les consoler, nous pourrions nous demander : « Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? » (v.37). Si, bien évidemment il l’aurait pu. N’a-t-il pas à d’autres occasions guéri des malades en danger de mort ? Oui, Jésus pouvait très bien empêcher Lazare de mourir. 

Mais il ne l’a pas fait et il s’en réjouit, non pas de ce que Lazare soit mort en tant que tel, mais que cette mort devienne l’occasion pour lui d’affirmer la victoire de la vie sur la mort et d’annoncer déjà ce que lui-même va accomplir dans les prochains jours, lors de sa Passion sur la Croix et sa Résurrection le troisième jour. Oui, « cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié » (v.4). Devant le drame de la mort, nous pourrions être tentés de remettre en question notre foi, en nous demandant : « Que fait Dieu ? », « Pourquoi n’intervient-il pas ? « , « Pourquoi ne stoppe-t-il pas la maladie, le virus ? », « Pourquoi n’a-t-il pas empêché tel accident ou catastrophe naturelle de se produire ? »… c’est la question du mal et de la souffrance, question à laquelle nous sommes tous tôt ou tard confrontés. Mais Jésus affirme que toutes ces épreuves, aussi terribles soient-elles, ne sont pas là pour que nous perdions la foi, mais bien au contraire pour que nous nous tournions vers Dieu, pour que nous croyions ! (Cf. v. 15)

Mais alors, Jésus serait-il insensible à la détresse de tant d’hommes et de femmes qui souffrent ? Non, d’ailleurs, il compatit à la souffrance des deux soeurs, en particulier de Marie, il est saisi d’émotion, il pleure. (Cf. v. 35). En Jésus, Dieu pleure. Dieu n’est pas indifférent au mal qui nous atteint, à la souffrance, à la mort. Bien au contraire. Dieu souffre avec nous. Il n’empêche pas toujours le mal, et il n’en est pas l’auteur, mais il le combat et il en est vainqueur. Car Jésus est venu pour la vie et non pour la mort ; il est venu nous donner la vie et celle-ci découle de notre foi. Car nous dit-il, « ton frère ressuscitera » (v.23), celui ou celle que tu as perdu, cet être cher qui te manque tant, ressuscitera. Oui, nous dit Jésus : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt vivra ; quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? » (v. 25-26). Et un peu plus tard, à Marthe qui doute encore un peu parce que son frère est mort depuis quatre jours et qu’il « sent déjà », Jésus réaffirme : « Ne te l’ai-je pas dit ? Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu. » (v. 40). Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu. La foi, la foi qui déplace les montagnes, la foi qui ressuscite les morts, la foi qui nous donne d’avoir accès à la vie éternelle, à la vie en Dieu, à la vie divine. 

Car dans cet Evangile, comme dans les autres lectures que nous avons entendues tout-à-l’heure, il est question de deux morts et par conséquent de deux types de vie. Car il y a mort et mort, vie et vie. Il y a la mort physique, biologique, celle à laquelle nous sommes tous confrontés, la mort de Lazare, par exemple, suite à sa maladie. De celle-ci Paul nous dit dans sa lettre aux Romains : « le corps, il est vrai, reste marqué par la mort à cause du péché » (Rm 8, 10). Le péché, le mal auquel nous pensons, que nous disons, que nous faisons, le bien que nous omettons, c’est cela qui est la cause de la mort, nous dit Paul, et donc de la souffrance. C’est ce qu’il appelle être sous l’emprise de la chair. Mais de cela, Jésus nous a libéré, nous qui étions liés par le péché, Jésus nous a déliés pour nous faire entrer dans la vie de l’Esprit qui nous fait vivre et devenir des justes. Car Jésus a souffert sur la Croix, il a porté le poids de nos péchés et de nos souffrances, il est mort et il est ressuscité. Et, nous dit Paul, « si l’Esprit de celui (c’est-à-dire Dieu le Père) qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité Jésus, le Christ, d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels selon son Esprit qui habite en vous » (v. 11). Et le Seigneur de dire par son prophète Ezéchiel : « Je mettrai en vous mon esprit et vous vivrez » (Ez 37, 14). Nous qui croyons, nous ne sommes pas sous l’emprise de la chair, mais de l’Esprit, et l’Esprit de Dieu, le Saint Esprit, nous fait vivre. Celui, dit Jésus, « qui croit en moi, même s’il meurt vivra » (Jn 11, 25). Vivra de la vie éternelle. C’est pourquoi, nous dit Jésus :  « Quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » (v. 26). 

La mort dont il s’agit ici, c’est ce que Saint Jean, dans son livre l’Apocalypse, qualifie de « seconde mort », « d’étang embrasé de feu » (Ap 20, 14-15), c’est-à-dire l’enfer, la damnation éternelle, ce choix, ce péché contre l’Esprit, qui consiste à rejeter définitivement la miséricorde de Dieu, à refuser de croire et d’espérer en son Amour infini qui relève toute personne qui se tourne vers Lui, et cela quelque soit son péché. Or, si nous croyons en Jésus, si nous gardons sa Parole, si nous vivons sous l’onction du Saint Esprit, en faisant les oeuvres de l’Esprit, nous sommes assurés de passer de la mort à la vie et de vivre à jamais dans l’éternité de Dieu. Car « Voyez comme il l’aimait » (Jn 11, 36) disent les Juifs venus consoler Marthe et Marie. Oui, Jésus aimait Lazare, ainsi que Marthe et sa soeur Marie (Cf. v. 5). 

Dieu nous aime, chacun d’entre nous, qui que nous soyons. Il veut faire de nous tous ses enfants bien-aimés, partageant sa vie divine pour l’éternité. Dieu le Père t’aime, Jésus t’aime, le Saint Esprit t’aime, tu es aimé de Dieu, n’en doute pas. Crois seulement. Et tu verras alors la gloire de Dieu ! Oh, marcher à la suite de Jésus et vivre par lui, avec lui et en lui, ne t’épargnera pas les épreuves de la vie, le combat, la souffrance et, au terme de ta route ici bas, la mort ; mais sache qu’au milieu de tout cela tu n’es pas seul, Dieu est avec toi, il souffre et combat avec toi, il te donne la victoire et te fait entrer dans la vie véritable, celle qui ne passera jamais. Tu n’es pas seul car d’autres frères et soeurs en Christ, en humanité, sont là aussi pour te soutenir, t’encourager, au besoin te consoler et te soigner. Jésus agit à ton égard aussi à travers eux tout comme il agit à leur égard à travers toi. Alors, ouvre-toi à l’amour de Dieu, à sa miséricorde ; aime ton prochain comme toi-même, comme Jésus nous a aimés : il a donné sa vie pour toi, pour nous tous, pour tous les hommes. Dans cette Eucharistie, offrons-nous nous-mêmes, offrons-nous les uns les autres à Celui qui nous a tant aimé, qui nous fait passer de la mort à la vie, à la vie éternelle !

Aux Makes, le mercredi 25 mars 2020,

En la solennité de l’Annonciation.

Père Sébastien PAYET.

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