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Homélie du Père Sébastien VAAST (Messe télévisée du dimanche 22 mars)

Depuis la crise sanitaire provoquée par le coronavirus Covid 19, Réunion La Première retransmet le dimanche à 10h 00 la célébration de l’Eucharistie en la chapelle de l’Eglise 2.0 à Ste Marie (https://www.facebook.com/Eglise2.0/). Nous sommes heureux de pouvoir vous communiquer l’homélie que le Père Sébastien VAAST, Jésuite, donna à cette occasion dimanche 22 mars…

Qu’elle puisse être le support d’un moment avec Jésus, Lui qui met dans nos coeurs « plus de joie que toutes leurs vendanges et leurs moissons » (Ps 4), une « joie » que St Paul appelle « consolation » en ces temps d’épreuves et de souffrances pour beaucoup… « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console dans toute notre tribulation, afin que, par la consolation que nous-mêmes recevons de Dieu, nous puissions consoler les autres en quelque tribulation que ce soit.De même en effet que les souffrances du Christ abondent pour nous, ainsi, par le Christ, abonde aussi notre consolation » (2Co 1,3-5). Et la Bible de Jérusalem de préciser en note : « La consolation est annoncée par les prophètes comme caractéristique de l’ère messianique (Is 40,1), et devait être apportée par le Messie, (Lc 2,25). Elle consiste essentiellement dans la fin de l’épreuve et dans le début d’une ère de paix et de joie, (Is 40,1s ; Mt 5,5). Mais, dans le Nouveau Testament, le monde nouveau est présent au sein du monde ancien et le chrétien uni au Christ est consolé au sein même de sa souffrance, (2Co 1,4-7 ; 7 4 ; cf. Col 1,24). Cette consolation n’est pas reçue passivement, elle est en même temps réconfort, encouragement, exhortation (même mot grec paraklèsis). Sa source unique est Dieu (2Co 1,3-4), par le Christ (2Co 1,5) et par l’Esprit (Ac 9,31), et le chrétien doit la communiquer (2Co 1,4.6 ; 1Th 4,18)… Elle est source d’espérance (Rm 15, 4) ».

 

Tout commence par un regard, celui que Jésus pose sur l’aveugle. Tout a commencé pour nous par le regard de tendresse posé par Dieu sur l’humanité. Cette humanité aveugle de naissance, qui cherche à tâtons son chemin. Et le Fils est venu pour être la lumière du monde…

Jésus a fait un geste sur les yeux de l’aveugle. Il lui a dit un mot. Puis, il a disparu. Il n’était même pas là quand les deux yeux de l’homme se sont ouverts à la Lumière. Il a créé l’événement et puis il laisse les hommes se débrouiller avec.

Et les réactions vont bon train. Ces réactions ce sont les nôtres, celles des hommes d’aujourd’hui, chaque fois qu’il est question du Christ et de son Eglise.

Il y a les amateurs de sensationnel, comme les voisins, qui veulent savoir comment ça s’est passé. Mais ils ne vont pas plus loin. L’actualité va vite et, bientôt, un autre fait-divers va défrayer la chronique, et bonjour les ladi lafé !

Il y a ceux qui ne veulent pas se mouiller, comme les parents. Cette histoire pourrait bien susciter des ennuis. Alors on ne sait rien, on a rien vu. La vie est assez difficile pour ne pas se rajouter des problèmes supplémentaires. Et l’on repart vers ses petits soucis sans se rendre compte qu’on est passé à côté de la Lumière.

Et puis, il y a les pharisiens qui possèdent la vérité et qui n’acceptent pas d’être remis en question. Si les faits ne cadrent pas avec leurs propositions, ce sont les faits qui ont tort. Défense à Dieu d’intervenir hors des chemins qu’ils ont prévus. Plus grave que la cécité naturelle, l’aveuglement du cœur.

Mais Dieu n’impose pas sa Lumière…Il est bien trop respectueux pour cela. Libre à moi de garder mes volets fermés. Il n’ouvrira pas les yeux de force.

Au milieu de tous ces gens qui se laissent aveugler par la paresse et le superficiel, par la peur, par la suffisance intellectuelle… il y a le témoin, cet aveugle guéri qui se débat comme il peut avec ses yeux fraîchement ouverts et qui visiblement gênent tout le monde.

Au début, il n’y voit pas beaucoup plus clair que les autres. Il sait seulement que le nommé Jésus lui a dit d’aller se laver à la piscine de Siloë. Et il sait mieux encore qu’il est passé des ténèbres à la Lumière. Cela, il ne peut le nier, et qu’on ne lui demande pas de dire le contraire ! Quant à expliquer pourquoi ou comment, ça il en laisse le soin aux savants. Seulement, toutes les explications que donnent ces messieurs ne tiennent pas devant ce que lui, il vient de vivre. Et plus on lui ordonne de rendre compte de son expérience, plus on lui demande des comptes sur son aventure, plus il réalise que lui, le mendiant aveugle qui n’est même pas parti à l’école, il est témoin d’une expérience formidable, exceptionnelle, incroyable…

Plus la clarté se fait en lui, plus il découvre l’origine de cette Lumière Nouvelle qui l’habite : c’est Dieu lui-même qui est venu le visiter.

C’est le dialogue difficile avec tous ces incroyants finalement qui l’amène à pouvoir dire, avec tout son être, dès qu’il rencontre à nouveau Jésus : « Je crois, Seigneur ! »

Mais celui qui s’enferme dans ses certitudes ne peut même plus ouvrir les yeux…

Et pour moi, à quel moment a commencé le passage des ténèbres à la Lumière ? Certains peuvent le dater avec précision parce que ça a été comme un éclair : soudain il y a eu une clarté nouvelle sur leur vie. Pour d’autres, l’illumination a été progressive. Tellement progressive qu’elle est difficilement repérable. Et si ce moment c’était le jour où leurs yeux d’enfants ont été lavés dans l’eau du baptême ?

Mais quelle qu’en soit l’origine, ma foi s’affermit toujours dans la mesure où j’essaie de la dire en réponse aux questions qu’on me pose : celles de mes amis, de mes enfants, de mes petits-enfants… celles des incroyants. En quoi tu crois ? En qui tu crois ? Pourquoi tu crois cela ? Parfois j’ai peur et je me sens bien maladroit pour répondre. Et pourtant, ces questions m’obligent à remonter jusqu’à la source de ma foi, jusqu’à l’intime de moi-même. Car les autres attendent. Ils attendent une réponse. Et ce qu’ils attendent, ce n’est pas que je récite ce que j’ai appris dans le catéchisme, non ! Ce que les autres attendent de moi c’est que je rende compte d’une expérience, de mon expérience de vie avec le Seigneur Jésus ; que je parle de ce que je vis avec Lui. Ainsi, poussé par leurs questions, poussé par eux, je prends conscience d’être moi aussi porteur d’une Lumière, d’une Lumière qui ne vient pas de moi, mais d’un Autre, de Dieu lui-même qui a posé son regard d’amour sur moi.

Alors je deviens témoin devant les autres de ce passage du Christ dans ma vie.

                                                                                   P. Sébastien VAAST, SJ