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Fiche N°1 : Le Prologue de l’Evangile selon St Jean (Jn 1,1-18) Première partie

1 – D’après la conclusion de l’Evangile (Jn 20,30-31), pourquoi St Jean l’a-t-il écrit ? Cette réponse rejoint-elle « le cœur » du Prologue (Jn 1,10-13) ? Ces deux textes permettent déjà de deviner deux thèmes principaux de l’Evangile : lesquels ((1) : Jn 4,41 ; 9,35-38 ; 11,42 ; en négatif : Jn 6,64 et 12,39 ; (2) Jn 3,15 ; 5,40 ; 6,47 ; 10,10) ? Le but de tout notre travail sur St Jean sera donc de faire grandir en nous (1) pour que nous puissions commencer à expérimenter la Présence de (2) au cœur de notre vie… Voilà l’aventure à laquelle nous sommes tous invités dès ici-bas, dans la foi…

2 – St Jean commence son Evangile en reprenant les deux premiers mots du premier chapitre du Livre de la Genèse (Gn 1,1-2,4) ; le lire en entier et noter tout particulièrement ce qui est dit de l’homme en Gn 1,26-27. Et d’après le début du verset 28, que reçoit-il aussitôt pour pouvoir accomplir sa vocation sur la terre ? Lorsque Dieu donne, il ne reprend jamais… Ce « cadeau » accompagnera donc tout au long de son existence tout être humain qui naît en ce monde… Et par cette allusion au Livre de la Genèse, St Jean nous dit déjà que toute l’œuvre de Jésus sera de faire en sorte que l’homme soit bien ce que Dieu veut qu’il soit, en accueillant bien ce que Dieu lui a déjà donné ! Tel est ce que nous appelons « le salut » : que l’homme soit vraiment ce que Dieu voulait qu’il soit lorsqu’il l’a créé… Jésus va donc se battre, avec les armes de la douceur, de l’amour et d’une continuelle bienveillance, contre tout ce qui peut « abîmer » l’homme, le blesser, l’écraser, le faire souffrir…

Dans le Livre de la Genèse, nous avons « Dieu dit… », « Dieu dit… », etc… Et l’on pourrait penser qu’il s’agit d’une seule Personne divine qui s’exprime. Mais dès le début de son Evangile, St Jean écrit : « Et le Verbe était Dieu » au sens où il participe pleinement à ce que Dieu est en Lui-même, c’est-à-dire à sa « nature divine ». Puis il emploie ce même mot « Dieu » avec un autre sens pour désigner non pas « le fait d’être Dieu », mais une autre Personne divine : « le Verbe était avec Dieu,… il était au commencement avec Dieu »… Noter comment ces deux Personnes divines sont nommées à la fin du Prologue (Jn 1,18)…

 

Lire Jn 20,19-23. Nous sommes à la fin de l’évangile et St Jean va de nouveau faire allusion aux premiers chapitres de la Genèse avec le second récit de la création de l’homme. Lire Gn 2,4-7. Comment Dieu crée-t-il l’homme en ce texte ; quelle réalité est à l’origine du Mystère de sa vie ? Noter qu’en Jn 20,22 c’est le Christ ressuscité qui agit comme Dieu en Gn 2,7… Et que donne le Christ à ses disciples en Jn 20,22, des disciples qui représentent ici le monde entier appelé au salut ? A quoi renvoie donc l’image du « Souffle de Dieu » dans la Bible ? Ainsi, le mystère de l’origine de la vie de tout être humain sur cette terre est à chercher dans la Présence en lui du « Souffle de Dieu »… Instant après instant, c’est donc Dieu qui nous fait vivre ! Il est donc infiniment proche de chacun d’entre nous, au plus profond de nous-mêmes, à la racine du Mystère de notre vie, présent à notre existence depuis ses tout premiers commencements… Si nous l’avions oublié, le Christ va commencer par nous le rappeler : ce sont ses premières paroles dans l’Evangile de Marc, « le Royaume de Dieu est tout proche », Dieu est tout proche, « convertissez-vous », tournez-vous vers lui, et vous recevrez aussitôt ce qu’il veut vous donner depuis toujours : sa vie en plénitude (Mc 1,15)… Et toute l’œuvre du Christ sera de faire en sorte qu’il en soit vraiment ainsi : que vivions dès maintenant le plus possible de ce Souffle de Vie qui nous habite déjà, en attendant la pleine révélation de cette Plénitude par-delà notre « mort »… « Je ne meurs pas, j’entre dans la Vie », disait Ste Thérèse de Lisieux… Et pour accomplir cette œuvre, Jésus veut nous débarrasser de tout ce qui pourrait faire obstacle à l’épanouissement en nous de cette Vie : qu’enlève-t-il d’après Jn 1,29 ? Retrouver la réponse dans cette phrase de la Bienheureuse Elisabeth de la Trinité : « Il n’y a qu’un mouvement au cœur du Christ : enlever les péchés et emmener l’âme à Dieu »… Jour après jour, instant après instant, inlassablement, de misère pardonnée en misère pardonnée, il est ainsi… pour que nous retrouvions grâce à lui la Plénitude de la vie que nous avions perdue par suite de nos fautes… Retrouver en Lc 24,46-48 ce grand cadeau que le Christ veut offrir à tous les pécheurs que nous sommes… Et c’est avant tout de cela dont nous devons être les témoins…

 

3 – Dès le 1° verset, St Jean nous entraîne au cœur du Mystère de la foi. Quel était le Crédo d’Israël (cf. Deutéronome (Dt) 6,4) ? St Jean y adhère-t-il (cf Jn 5,44 ; 17,3) ? Et pourtant, dès le début de son Evangile, il nous présente bien deux Personnes divines! Y-a-t-il contradiction ? Nous allons voir que non…

Noter en Jn 4,24 puis dans la Première Lettre de St Jean, vers la fin de notre Nouveau Testament, en 1Jn 1,5 ; 4,8, les trois grandes affirmations de St Jean sur « la nature divine », c’est-à-dire ce que Dieu est en lui-même. Le Père est Dieu ; nous pouvons donc lui appliquer ces trois affirmations. Jésus, le Fils, est Dieu ; nous pouvons donc les lui appliquer également…

Et nous allons maintenant aborder une difficulté liée à notre vocabulaire… Nous savons que Jésus, le Fils, nous a révélé le Mystère de Dieu comme étant « Trinité », c’est-à-dire trois Personnes divines… Pour l’instant, nous n’en avons rencontré que deux : le Père, et Jésus le Fils… La troisième, nous l’appelons « l’Esprit Saint », et nous pressentons sa Présence par exemple en Actes 8,29 : « L’Esprit dit à Philippe »… Une Personne s’adresse à une autre personne… Et en Ac 13,2, : « L’Esprit Saint dit : « Mettez-moi donc à part Barnabé et Saul en vue de l’œuvre à laquelle je les ai appelés. » Là aussi, une Personne divine s’exprime… En Jn 14,15-17, St Jean l’appelle « le Paraclet », c’est-à-dire le Défenseur, l’Avocat : « Si vous m’aimez », dit Jésus à ses disciples, « vous garderez mes commandements ; et je prierai le Père et il vous donnera un autre Paraclet, pour qu’il soit avec vous à jamais, l’Esprit de Vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit pas ni ne le reconnaît. » En disant « le Père vous donnera un autre Paraclet », Jésus pense à son départ tout proche : bientôt, il va souffrir, être mis au tombeau, ressusciter et monter au ciel, comme nous le disons dans notre Crédo. Les disciples ne le verront donc plus comme ils le voyaient jusqu’à présent. Mais Jésus leur promet qu’ils ne seront laissés à eux-mêmes… A sa prière, le Père va leur envoyer « un autre » Défenseur, « une autre » Personne divine qui prendra soin d’eux et veillera sur eux comme Jésus le faisait déjà lorsqu’il était avec eux (cf. Jn 17,12 ; Luc (Lc) 22,31‑32). Cette autre Personne divine, nous l’appelons « l’Esprit Saint ». Mais la difficulté vient du fait que ces deux mots « Esprit » et « Saint » servent aussi à décrire ce que Dieu est en lui-même, c’est-à-dire sa « nature divine » (cf. Jn 4,24). Ainsi, le Père est « Esprit » et le Père est « Saint ». Le Fils est « Esprit » et le Fils est « Saint ». Et nous pouvons dire aussi « l’Esprit Saint » est « Esprit » et « l’Esprit Saint » est « Saint »… N’oublions donc jamais ce double sens possible de l’expression « Esprit Saint » : « l’Esprit Saint » (Personne divine) est « Esprit » et il est « Saint » en tant qu’il participe lui aussi pleinement à la nature divine… Et la grande œuvre de « l’Esprit Saint » Personne divine sera justement de nous communiquer « l’Esprit Saint » nature divine. Le Père Yves Congar écrit : « L’Esprit Saint » (Personne divine) « se cache derrière ses dons » (l’Esprit Saint nature divine). Et ce cadeau est offert à tous. Nous avons tous été créés pour cela : participer selon notre condition de créature à la nature divine (cf. 2Pierre (2P) 1,3-4), et entrer ainsi dans le Mystère de la Plénitude de la Vie éternelle…

Le Père « Personne divine », le Fils « Personne divine » et l’Esprit Saint « Personne divine » partagent donc pleinement tous les Trois une seule et unique nature divine qui est tout à la fois « Esprit » et « Sainte ». Et l’on pourrait rajouter « Amour » (1Jn 4,8.16), « Lumière » (1Jn 1,5), « Vie », « Paix », « Force », « Vérité », etc… Que peut-on dire alors de chacune des Trois Personnes divines : quel Mystère vivent‑elles (cf 1Jn 1,2-3 ; 1Jn 1,6-7 ; 1Corinthiens (1Co) 1,9 ; 2Corinthiens (2Co) 13,13 ; Philippiens (Ph) 2,1‑2) ? St Jean évoque ce Mystère avec une autre expression en Jn 10,30 : « Moi », dit Jésus, « et le Père, nous sommes un », différents l’un de l’autre mais unis l’un à l’autre dans la Communion d’un même Esprit, d’une même Lumière, d’un même Amour… Et d’après Jn 17,20-23, dans quelle grande aventure Jésus désire-t-il tous nous entraîner ? Et cela se mettra concrètement en œuvre par le don de l’Esprit Saint « nature divine » (cf 1Thessaloniciens (1Th) 4,8 ; Ac 2,38-39)…

4 – Cette Personne divine que nous appelons Jésus, le Fils ou « le Verbe », « la Parole », va assumer notre nature humaine « de chair et de sang ». Lui qui jusqu’à présent n’était « qu’Esprit » va entrer historiquement dans le temps de l’aventure humaine et vivre notre condition d’homme et de femme sur cette terre… Tout en restant pleinement « Esprit », il se fait pleinement homme… C’est le Mystère de l’Incarnation. En quel verset apparaît-il dans le Prologue de l’Evangile de Jean ? Conclusion : tout ce qui est dit « avant » renvoie à « l’avant » de l’Incarnation… Noter toutes les expressions qui soulignent en cet « avant » la proximité de Dieu, sa Présence à la vie de tout homme… Et il en est bien sûr toujours ainsi aujourd’hui… Dieu, dans le Mystère de sa Bienveillance et de son Infinie Miséricorde est présent à la vie de tout homme, pour son bien, dans le respect total de sa liberté… Quiconque est « de bonne volonté » accueille cette Présence, qu’il en soit conscient ou non… Tel est le regard de foi, un regard universel, auquel St Jean nous invite ici… « Les siens » au verset 11 désigne « le Peuple d’Israël » auquel « le Verbe », « la Parole », s’était déjà adressé par tous les prophètes de l’Ancien Testament… Mais ils n’ont pas été accueillis…

La révélation contenue dans les Evangiles nous permet donc de prendre conscience d’une réalité qui existe depuis que le monde existe : un Dieu tout proche qui ne désire que le bien de sa créature et se met, par amour, au service de sa vie… Mais encore faut-il consentir à cette Présence et à son action… En nous aidant à en prendre conscience, l’Evangile nous permet de mieux collaborer à cette « œuvre de Dieu » qui ne désire que notre vie ! Heureux sommes-nous donc de croire ! Et Dieu nous invite tous à collaborer à son œuvre en le faisant connaître autour de nous…

5 – « En lui était la Vie », lit-on en Jn 1,4… Qui est « la Source de Vie » d’après le Psaume (Ps) 36(35),10 et le prophète Jérémie (Jr) 2,13 ? N’oublions pas que dans l’Ancien Testament, le mot « Dieu » renvoie le plus souvent à Celui que nous appelons « Dieu le Père » dans le Nouveau Testament…

Et d’après Jn 5,26 et Jn 6,57, que donne le Père au Fils de toute éternité ? C’est ainsi, comme nous le disons dans notre Crédo, qu’il « engendré, non pas créé, de même nature que le Père »… Depuis toujours et pour toujours, l’attitude fondamentale du Fils, au plus profond de son Cœur, est donc : se recevoir du Père. Et telle est aussi l’aventure à laquelle nous sommes tous conviés : apprendre par notre foi au Fils à nous recevoir comme Lui du Père… Noter comment Jésus résume sa mission en Jn 6,33 et 10,10… A quel temps les verbes sont-ils conjugués ? Cette action nous rejoint donc dès aujourd’hui… Pour en bénéficier, Jésus ne nous demande qu’une seule chose, laquelle (Jn 3,14-16 ; 3,36 ; 6,47 ; 20,30-31) ? Et tout ceci s’accomplira très concrètement par le Don de l’Esprit Saint, « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63)…

Or, en St Jean, cette « Vie » transmise par l’Esprit est aussi « Lumière » (cf Jn 1,4 et Jn 8,12) et le croyant qui la reçoit par une foi vivante, de tout cœur, devient ainsi « lumière dans le Seigneur », en tant que Dieu le Père, par le don de l’Esprit, l’a uni au Christ Seigneur dans la communion d’un même Esprit (cf Ephésiens (Ep) 5,8 ; 1Thessaloniciens (1Th) 5,5 ; Jn 12,36 ; Colossiens (Col) 1,11‑14 ; 1Pierre (1P) 2,9). Et c’est cette Lumière en lui qui petit à petit se révèlera finalement victorieuse des ténèbres (Jn 1,5), c’est-à-dire de ce mal qui en définitive nous fait mal, nous blesse et blesse aussi hélas tous ceux et celles à qui nous pouvons faire du mal… Mais grâce à une vie de prière de plus en plus fidèle, qui saura accueillir le don continuel que Dieu nous fait de sa Lumière, nous pourrons vaincre le mal et donc expérimenter de plus en plus la Plénitude de sa Vie…

                                                                                                                    Diacre Jacques Fournier

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