Le Saint Sacrement par Francis COUSIN
« Celui qui mange ma chair
et boit mon sang a la vie éternelle. »
Après la Pentecôte et la Trinité, nous fêtons ce dimanche le Corps et le Sang du Christ, fête qu’on appelait autrefois la Fête-Dieu ou le Saint Sacrement. Pour beaucoup de personnes, le Saint Sacrement est lié à Jésus présent dans l’hostie consacrée qui est présenté dans l’ostensoir ou présent dans le tabernacle, ce qui est compréhensible puisque le Sang du Christ est toujours consommé intégralement au cours de la messe, et n’est donc jamais conservé. C’est pourquoi l’appellation actuelle est préférable.
On voit bien la logique des fêtes qui se suivent dans le calendrier liturgique : Après la résurrection de Jésus et son Ascension auprès de son Père, deux personnes qui sont UN, la venue de l’Esprit sur les disciples à la Pentecôte fait que les trois personnes de la Trinité sont toujours présentes à nos côtés : « En [l’Eucharistie], le Deus Trinitas, qui en lui-même est amour, s’engage pleinement avec notre condition humaine. Dans le pain et le vin, sous les apparences desquelles le Christ se donne à nous à l’occasion du repas pascal, c’est la vie divine tout entière qui nous rejoint et qui participe à nous sous la forme du Sacrement. (…) Mais c’est dans le Christ mort et ressuscité et dans l’effusion de l’Esprit Saint, donné sans compter (cf. Jn 3, 34), que nous sommes rendus participants de l’intimité divine. Par conséquent, Jésus Christ, qui, « poussé par l’Esprit éternel, (…) s’est offert lui- même à Dieu comme une victime sans tache » (He 9, 14), nous communique dans le don eucharistique la vie divine elle-même. » (Benoît XVI, Sacramentum Caritatis n°8). D’où la fête d’aujourd’hui. Vendredi prochain ce sera le Sacré-Cœur de Jésus d’où coulent l’eau et le Sang du Christ, et le lendemain, le Cœur Immaculé de Marie.
Saint Jean ne parle pas de l’institution de l’Eucharistie lors de la Cène, mais il rapporte la controverse qui eut lieu à la synagogue de Capharnaüm après la multiplication des pains : « Je suis le pain de la vie (v 48) … Je suis le pain vivant descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. ». Un tel message asséné ainsi ne pouvait pas être compris par les personnes présentes, d’où leurs remarques que l’on dirait de bons sens : « Comment peut-il nous donner sa chair à manger ? ».
Alors Jésus insiste, et il répète le même message plusieurs fois, de manières différentes, en positif, en négatif, pour montrer l’importance de se nourrir de lui, pas seulement de sa Parole, mais de sa chair et de son sang, et tout cela pour avoir la vie éternelle. Et pas seulement quand on sera mort, ou à la fin des temps, mais dès maintenant, dès que l’on mange sa chair et boit son sang, dès que l’on communie à la messe, on a la vie éternelle, on est dans la vie éternelle, on participe à la vie éternelle. Jésus le dit lui-même : « De même, celui qui me mange, lui aussi vivra par moi ». Et comme Jésus vit de toute éternité, nous aussi vivrons dans l’éternité. C’est ce qui permet à saint Augustin de dire : « Si vous les (le Corps et le Sang du Christ) avez reçus dans de bonnes dispositions, vous êtes ce que vous avez reçu. » (sermon 227). En conséquence, « nous sommes devenus, non seulement des chrétiens, mais le Christ lui-même » (PL 35, 1568), d’où cette injonction qu’il donnait à ceux qui venaient communier : « Devenez ce que vous recevez : le corps du Christ ».
Et c’est encore valable pour nous. C’est sans doute trop difficile pour nous ; qui oserait se comparer au Christ ? Mais on peut essayer de faire un petit peu, … ou un peu plus … pour que notre communion ait du sens. « On vous dit : « Le corps du Christ », et vous répondez « Amen ». Soyez donc membres du corps du Christ, pour que cet Amen soit véridique. » (St Augustin, sermon 272).
Dernière chose : Je pense que dans beaucoup de paroisses on ne lira (et sans doute encore moins chantera) la très belle hymne dûe à saint Thomas d’Aquin : Lauda Sion Salvatorem, à cause de sa longueur. Et c’est bien dommage, car c’est sans doute l’hymne la plus claire au niveau théologique concernant les Espèces Divines. Il serait bien que chacun la lise et surtout la médite.
Seigneur Jésus,
tu nous donnes à manger
ton corps et ton sang
pour que nous puissions
partager la vie divine, éternelle.
Nous n’en sommes pas dignes,
mais nous avons tellement besoin
de ta présence en nous.
Francis Cousin