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Les cinq trompettes (Ap 8,6-9,21)…

            Les sept Anges aux sept trompettes s’apprêtèrent à sonner. (7) Et le premier sonna… Il y eut alors de la grêle et du feu mêlés de sang qui furent jetés sur la terre : et le tiers de la terre fut consumé, et le tiers des arbres fut consumé, et toute herbe verte fut consumée.
(8)       Et le deuxième Ange sonna… Alors une énorme masse embrasée, comme une montagne, fut projetée dans la mer, et le tiers de la mer devint du sang : (9) il périt ainsi le tiers des créatures vivant dans la mer, et le tiers des navires fut détruit.
(10)    Et le troisième Ange sonna… Alors tomba du ciel un grand astre, brûlant comme une torche. Il tomba sur le tiers des fleuves et sur les sources ; (11) l’astre se nomme  Absinthe  : le tiers des eaux se changea en absinthe, et bien des gens moururent, de ces eaux devenues amères.
(12)    Et le quatrième Ange sonna… Alors furent frappés le tiers du soleil et le tiers de la lune et le tiers des étoiles : ils s’assombrirent d’un tiers, et le jour perdit le tiers de sa clarté, et la nuit de même.
(13)    Et ma vision se poursuivit. J’entendis un aigle volant au zénith et criant d’une voix puissante : Malheur, malheur, malheur aux habitants de la terre, à cause de la voix des dernières trompettes dont les trois Anges vont sonner.

   

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Souvenons-nous… Le Feu de l’Esprit répandu sur le monde accomplit le Jugement de Dieu par sa simple Présence. Mais ce n’est pas Lui qui juge ou qui condamne. Il n’est là que pour éclairer, faire la vérité, appeler au repentir, pardonner, guider, vivifier, donner la paix… Avec Lui et par Lui, le Christ Ressuscité poursuit dans l’histoire son œuvre de Sauveur du monde. « Dieu en effet a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas envoyé le Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui. Qui croit en lui n’est pas jugé ; qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils Unique de Dieu » (Jn 3,16‑18). C’est donc l’homme qui, en acceptant ou pas le Christ Sauveur, se « juge » lui-même : le refuser, c’est se condamner soi-même aux ténèbres et à la mort entendue comme une privation de la Plénitude de la Vie éternelle ; par contre, accepter le Christ, c’est accepter d’être l’heureux bénéficiaire de ce Salut qu’il est venu offrir gratuitement, par amour, à tous les pécheurs, et donc entrer avec Lui dans la Plénitude de sa Lumière et de sa Vie…
BonPasteur            Ce « jugement pour le salut » réalisé par la seule Présence de l’Esprit Saint répandu sur le monde, l’Esprit de Feu, sera évoqué dans le jeu des proportions de ce qui sera détruit ou pas. Notons d’abord qu’en Ap 8,6-12, l’expression « le tiers » apparaît 12 fois, soit 3 (symbole de Dieu en tant qu’il agit) x 4 (symbole d’universalité : les quatre points cardinaux, le nord, le sud, l’est, l’ouest). L’action de Dieu concerne donc bien le monde entier. « Dieu est à l’œuvre en cet âge, les temps sont les derniers. Dieu est à l’œuvre en cet âge, son Jour va se lever ! Ne doutons pas du Jour qui vient, la nuit touche à sa fin. Et l’Eclat du Seigneur remplira l’univers mieux que l’eau ne couvre les mers », chantons‑nous pendant le temps de l’Avent…Notons maintenant que si un tiers des réalités existantes disparaissent, ce sont bien les deux tiers qui demeurent… Alors, ce n’est plus « le petit reste » seul qui est sauvé (Ba 2,13 ; Is 1,9 ; Mi 5,6-7 ; Ez 6,8), mais « un grand reste »… Jean renverse complètement ici les proportions habituelles des prophètes Ezéchiel (Ez 5,2) et Zacharie (Za 13,8-9) pour qui seulement un tiers du peuple allait être sauvé et les deux tiers détruits. Cette manière de présenter les choses nous invite à l’espérance tout en maintenant la gravité du péché, avec ses terribles conséquences, la pire étant cette possibilité de vivre « fermé à Dieu » pour toujours… Mais puisque Dieu est partout, puisqu’il est « le Seigneur du ciel et de la terre et le Roi de l’univers » (Tb 10,14) cet état serait alors celui de quelqu’un qui, tout en étant dans la Lumière est fermé à la Lumière, tout en étant dans la Vie est fermé à la Vie, tout en étant dans la Paix est fermé à la Paix… Le Bonheur frappe à sa porte (Ap 3,20), et il refuse de lui ouvrir !
            A propos de tous ces fléaux, faisons encore avec Jean-Pierre Prévost la remarque suivante : « Il convient de souligner les emprunts que Jean a faits à une tradition bien attestée dans la Bible (Ex 7-11) au sujet des évènements qui ont mené à la libération du peuple hébreu. En effet, ici et au chapitre 16, pas moins de six fléaux (eau changée en sang, grenouilles, ulcères malins, orage mêlé de grêle, sauterelles et ténèbres) se trouvaient déjà dans les dix plaies d’Egypte. Cette constatation est décisive pour leur interprétation. D’une part, on évitera une interprétation trop littérale et fataliste, comme s’il s’agissait d’une description exacte et détaillée du déroulement de l’histoire. D’autre part, on comprendra que ces fléaux ont avant tout une fonction théologique, à double caractère. Premièrement, en faisant appel au récit déjà bien connu des plaies d’Egypte, Jean annonce à ses contemporains une libération semblable à celle du peuple hébreu ». Un jour, les persécutions de l’Empereur romain cesseront, et plus largement encore, Dieu, par sa Présence offerte à notre foi, se révèle dans l’histoire comme étant déjà victorieux de toutes les forces du mal (Jn 12,31-32) qui s’attaquent à son Eglise (Mt 16,18) et à tous les hommes de bonne volonté.  « Deuxièmement, comme c’était le cas pour le récit des plaies d’Egypte, la progression dramatique du déploiement des fléaux sert d’avertissement ultime à ceux-là qui refusent de croire et s’opposent, comme jadis le Pharaon, au déroulement du plan de Dieu. Plutôt qu’une prédiction de malheurs, il faut y voir une prédication en vue de la conversion ». « Prendrais-je donc plaisir à la mort du méchant – oracle du Seigneur Dieu – et non pas plutôt à le voir renoncer à sa conduite et vivre ? Par ma vie, oracle du Seigneur Dieu, je ne prends pas plaisir à la mort du méchant, mais à la conversion du méchant qui change de conduite pour avoir la vie. Convertissez-vous, revenez de votre voie mauvaise. Pourquoi mourir ? » (Ez 18,23 ; 33,11). 

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            Et la même logique se poursuit avec les dernières trompettes… La triple répétition « malheur, malheur, malheur » renvoient à nouveau à l’œuvre de Dieu, à son jugement, mais il ne s’agit pas ici d’un malheur qui viendrait de Dieu, mais d’un malheur qui n’est que le résultat du refus par les pécheurs de sa grâce répandue à profusion sur l’ensemble de ses enfants, sur le monde entier… Heureux alors tous les hommes de bonne volonté… Mais malheureux ceux qui se complaisent dans le mal, l’injustice et le mensonge… Dans les Evangiles, tous les « malheur à vous » que le Christ peut adresser à son auditoire (Mt 23,13-31 ; Lc 6,24-26) sont autant de lamentations sur le sort de ceux qui refusent de l’accueillir et donc de se convertir. Ils ne peuvent que connaître le malheur, et Dieu est le premier à en être désolé. « Quand Jésus fut proche de Jérusalem, à la vue de la ville, il pleura sur elle, en disant : « Ah ! si en ce jour tu avais compris, toi aussi, le message de paix ! Mais non, il est demeuré caché à tes yeux. Oui, des jours viendront sur toi, où tes ennemis t’environneront de retranchements, t’investiront, te presseront de toute part. Ils t’écraseront sur le sol, toi et tes enfants au milieu de toi, et ils ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas reconnu le temps où tu fus visitée ! » (Lc 19,41‑44).

 

La cinquième trompette (Ap 9,1-12) 

(9,1)   Et le cinquième Ange sonna… Alors je vis un astre qui du ciel avait chu sur la terre. On lui remit la clef du puits de l’Abîme ? (2) Il ouvrit le puits de l’Abîme et il en monta une fumée, comme celle d’une immense fournaise – le soleil et l’atmosphère en furent obscurcis – (3) et, de cette fumée, des sauterelles se répandirent sur la terre ; on leur donna un pouvoir pareil à celui des scorpions de la terre. (4) On leur dit d’épargner les prairies, toute verdure et tout arbre, et de s’en prendre seulement aux hommes qui ne porteraient pas sur le front le sceau de Dieu. (5) On leur donna, non de les tuer, mais de les tourmenter durant cinq mois. La douleur qu’elles provoquent ressemble à celle d’une piqûre de scorpion. (6) En ces jours-là, les hommes rechercheront la mort sans la trouver, ils souhaiteront mourir et la mort les fuira!
(7)       Or ces sauterelles, à les voir, font penser à des chevaux équipés pour la guerre ; sur leur tête on dirait des couronnes d’or, et leur face rappelle des faces humaines ; (8) leurs cheveux, des chevelures de femmes, et leurs dents, des dents de lions ; (9) leur thorax, des cuirasses de fer, et le bruit de leurs ailes, le vacarme de chars aux multiples chevaux se ruant au combat ; (10) elles ont une queue pareille à des scorpions, avec un dard; et dans leur queue se trouve leur pouvoir de torturer les hommes durant cinq mois. (11) À leur tête, comme roi, elles ont l’Ange de l’Abîme; il s’appelle en hébreu :  Abaddôn , et en grec : Apollyôn.
(12)    Le premier  Malheur  a passé, voici encore deux  Malheurs  qui le suivent…   
           astre d'en haut L’image de l’astre était souvent utilisée à l’époque pour parler des grands de monde (Is 14,12). Un texte relu dans la perspective de l’attente du Messie dit ainsi : « Je le vois, mais non pour maintenant ; je l’aperçois, mais non de près : un astre issu de Jacob devient chef, un sceptre se lève, issu d’Israël » (Nb 24,17)… Et une étoile guidera bien les mages jusqu’à Bethléem (Mt 2,1-12). Et St Luc appellera le Christ « l’Astre d’en Haut » (Lc 1,78) qui, dans sa Miséricorde, est venu illuminer les ténèbres des pécheurs…
            Mais ici, « l’étoile précipitée du ciel sur la terre » fait plutôt penser à « un des Anges déchus, peut-être Satan lui-même », écrit en note la Bible de Jérusalem. Plus loin, nous verrons en effet « un énorme Dragon rouge-feu, à sept têtes et dix cornes, chaque tête surmontée d’un diadème. Sa queue balaie le tiers des étoiles du ciel et les précipite sur la terre » (Ap 12,4). Nous retrouvons cet impact sur « un tiers » seulement, comme en Ap 8,6-12. Son pouvoir destructeur est donc limité ; ce ne sera pas le mal qui triomphera, mais le bien… Et peu après nous lisons : « On le jeta donc, l’énorme Dragon, l’antique Serpent, le Diable ou le Satan, comme on l’appelle, le séducteur du monde entier, on le jeta sur la terre et ses Anges furent jetés avec lui » (Ap 12,9).
            Il pourrait donc très bien être ici cet « astre chu sur la terre » à qui on remet « la clef du puits de l’Abîme », « ce lieu » écrit encore la Bible de Jérusalem, « où les anges déchus sont détenus en attendant le châtiment final ». St Jean évoquerait donc ici le combat spirituel auquel doit faire face tout croyant. Dans le Livre de la Genèse, le serpent pouvait « atteindre la femme au talon » (Gn 3,15), et l’on se souvient que, dans le Livre des Nombres, les serpents sont dits « brûlants » en raison des effets de leurs morsures (Nb 21,4-9)… Et cet épisode nous présentait le Peuple d’Israël succombant à la tentation : il « perd patience » et « parle contre Dieu et contre Moïse ». L’effet ne se fait pas attendre : « les serpents brûlants » mordent, et « beaucoup de monde périt en Israël »… Ici, les sauterelles qui sortent du puits de l’abîme ont « un pouvoir pareil à celui des scorpions de la terre », dont la morsure est des plus brûlante, et parfois mortelle… St Jean évoquerait donc ici « les manœuvres du diable » et de ses armées : « Ce n’est pas contre des adversaires de chair et de sang que nous avons à lutter, mais contre les Principautés, contre les Puissances, contre les Régisseurs de ce monde de ténèbres, contre les esprits du mal qui habitent les espaces célestes » (Ep 6,12). Ici, ces « sauterelles » à « pouvoir de scorpion » s’en prennent « seulement aux hommes qui ne porteraient pas sur le front le sceau de Dieu ». Or cette notion de « sceau de Dieu » n’intervient dans le Livre de l’Apocalypse qu’ici et en Ap 7,2-4 : « Puis je vis un autre Ange monter de l’orient, portant le sceau du Dieu vivant ; il cria d’une voix puissante aux quatre Anges auxquels il fut donné de malmener la terre et la mer : « Attendez, pour malmener la terre et la mer et les arbres, que nous ayons marqué au front les serviteurs de notre Dieu. » Et j’appris combien furent alors marqués du sceau : cent quarante-quatre mille »[1]… Or l’image du sceau dans le Nouveau Testament renvoie très souvent au sacrement du baptême reçu par tous ceux et celles qui ont choisi d’obéir à Dieu et à sa Parole de Vie, cette Bonne Nouvelle qui nous invite tous au repentir pour notre salut : « C’est en lui que vous aussi », les païens, « après avoir entendu la Parole de vérité, l’Évangile de votre salut, et y avoir cru, vous avez été marqués d’un sceau par l’Esprit de la Promesse, cet Esprit Saint qui constitue les arrhes de notre héritage, et prépare la rédemption du Peuple que Dieu s’est acquis, pour la louange de sa gloire » (Ep 1,13-14). Ainsi, par notre « oui » au Christ Sauveur, nous avons été « marqués d’un sceau et Dieu a mis dans nos cœurs les arrhes de l’Esprit » (2Co 1,22). « Ne contristez donc pas » par un mauvais comportement, dit alors St Paul, « l’Esprit Saint de Dieu, qui vous a marqués de son sceau pour le jour de la rédemption » (Ep 4,30). Or cet Esprit reçu est participation à ce que Dieu est en Lui-même, car « Dieu est Esprit » (Jn 4,24). Si nous l’accueillons dans nos cœurs, il nous établira donc en Communion avec Dieu, nous serons unis à Lui dans la Communion d’un même Esprit, et là, nous n’aurons rien à craindre des ténèbres de toutes sortes, des « serpents brûlants » ou des « sauterelles à pouvoir de scorpion »… En effet, si Dieu est Esprit, il est aussi « Lumière » (1Jn 1,5), et « sa Lumière brille dans les ténèbres sans que les ténèbres ne puissent la saisir » (Jn 1,5). La Lumière est victorieuse ; rien ni personne ne peut l’empêcher de briller. Quiconque s’abandonne à elle avec confiance n’a rien à craindre de toutes les Puissances du mal. Elle est comme un bouclier contre lequel le mal se heurte sans pouvoir aller plus loin, un bouclier de Lumière qui anéantit toute forme de ténèbres… St Paul prendra cette image de « l’armure de Dieu » que revêt le croyant par le « oui » de sa foi lorsqu’il se confie à Dieu dans la prière pour que la Lumière de l’Esprit remporte la victoire dans sa vie… « Rendez-vous puissants dans le Seigneur et dans la vigueur de sa force ». En effet, celui qui est « dans le Seigneur » est uni au Seigneur dans la Communion d’un même Esprit : il bénéficie donc de la force paisible de l’Esprit. De plus, dans ce Mystère de Communion qui l’unit à son Seigneur, ce qui est vrai pour le Christ est aussi vrai pour lui, et ce dernier a dit : « Sur moi, le Prince de ce monde n’a aucun pouvoir » (Jn 14,30). Sur moi, dit Jésus, et donc aussi sur celui qui n’est qu’un avec Lui dans l’unité d’un même Esprit, car « celui qui s’unit au Seigneur n’est avec lui qu’un seul Esprit » (1Co 6,17).

[1] On se souvient que ce chiffre renvoie à tous les hommes de tous les temps. En effet, 144.000, c’est 12 x 12 x 1000. Le premier 12 renvoie aux Douze tribus d’Israël, à la période de l’Ancienne Alliance, et donc à tous les hommes qui ont vécu avant le Christ. Le second 12 évoque les Douze Apôtres, la période de la Nouvelle Alliance inaugurée par le Christ, et donc tous les hommes qui ont vécu après le Christ, et cela jusqu’à la fin des temps… Enfin, 1000 représente la multitude innombrable, la culture hébraïque n’ayant pas la notion d’infini… Conclusion : 144.000 évoque la multitude innombrable de tous les hommes de tous les temps que Dieu appelle au Salut… « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4)…

Telle est alors la vraie « armure de Dieu » : Dieu Lui‑même, avec son Fils et par Lui, devient notre roc, notre forteresse, notre bouclier (Ps 18(17),3.31.36 ; 28(27),7 ; 33(32),20…). St Paul écrit ainsi qu’au jour de notre baptême, nous avons revêtu le Christ : « Vous tous en effet, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ » (Ga 3,27 ; cf. Rm 13,14 ; Col 3,8‑15). L’Esprit Saint reçu nous unit ainsi au Christ, et c’est le Christ Lui-même qui va remporter la victoire dans nos vies sur toutes les forces du mal… « C’est pour cela qu’il vous faut endosser l’armure de Dieu », écrit encore St Paul, « afin qu’au jour mauvais vous puissiez résister et, après avoir tout mis en œuvre, rester fermes. Tenez‑vous donc debout, avec la Vérité pour ceinture, la Justice pour cuirasse, et pour chaussures le Zèle à propager l’Évangile de la paix ; ayez toujours en main le bouclier de la Foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Mauvais ; enfin recevez le casque du Salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu. Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l’Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable et intercédez pour tous les saints » (Ep 6,13-18 ; Rm 13,12 ; 1Th 5,8-10)).
shining dove with rays on a dark            « Les hommes qui portent sur leur front le sceau de Dieu » ont donc  dit « Oui ! » à l’appel de l’Evangile, ils ont reçu le baptême, et ils essayent, dans la prière du cœur, de rester fidèles à l’Esprit Saint qu’ils ont reçu. « Repentez-vous et que chacun de vous se fasse baptiser au nom de Jésus Christ pour la rémission de ses péchés, et vous recevrez alors le don du Saint Esprit. Car c’est pour vous qu’est la promesse, ainsi que pour vos enfants et pour tous ceux qui sont au loin, en aussi grand nombre que le Seigneur notre Dieu les appellera » (Ac 2,38-39). Maintenant, ils bénéficient donc, dans ce Mystère de Communion qui les unit à leur Seigneur, de la Lumière et de la Force de l’Esprit qui, seules, peuvent remporter la victoire sur les forces du mal. Ils connaissent la Paix (Col 3,15) et le repos intérieur (Mt 11,28-30). Tandis que ceux qui sont privés de ce soutien par leur refus de croire ou leur mauvaise volonté sont « tourmentés pendant cinq mois »… Notons encore une fois l’optimisme de la perspective : ils sont « tourmentés » mais non pas tués, et cela pendant seulement « cinq mois »… Certes, les souffrances sont à ce point intenses que « les hommes rechercheront la mort sans la trouver », mais ces « cinq mois » d’épreuves suggèrent qu’un jour elles prendront fin, c’est du moins l’espérance ouverte par St Jean…
            Le deuxième paragraphe (Ap 9,7-11) invite par contre à une nouvelle interprétation de ces sauterelles. En effet, elles font ici « penser à des chevaux équipés pour la guerre ». « Leur thorax » ressemble à des « cuirasses de fer » et « le bruit de leurs ailes » à « un vacarme de chars aux multiples chevaux se ruant au combat ».  Cette description fait vraiment penser ici à une armée puissante et bien équipée pour le combat. « À leur tête, comme roi, elles ont l’Ange de l’Abîme ; il s’appelle en hébreu : « Abaddôn » (destruction), et en grec : « Apollyôn » (« Le détruisant ») ». Comme l’indique en note la Bible de Jérusalem, St Jean évoque peut-être ici les ravages occasionnés par « les Parthes », une nouvelle épreuve après celle des Romains… Et avec eux, c’était encore quelque part le « Prince de ce monde », cet « Ange de l’Abîme », celui qui est « homicide dès le commencement » (Jn 8,44) qui accomplit son œuvre de mort par les violents, les dominateurs et les traîtres. C’est ce qu’il fit autrefois pour le Christ avec la collaboration de Judas (cf. Jn 13,2). Et l’on se souvient que « la Bête » dans le Livre de l’Apocalypse ne désigne pas d’abord le diable, mais l’empire romain qui, par ses persécutions et sa cruauté, fait le jeu du diable… Il en serait donc de même ici pour les Parthes, d’où « cet Ange de l’Abîme » à leur tête… Mais encore une fois, St Jean sème l’espérance en répétant que « leur pouvoir de torturer » est limité à « cinq mois »… Très bientôt, la paix reviendra, la justice finira par triompher… Courage et patience… « Dans le monde, vous aurez à souffrir », disait Jésus, « mais gardez courage : j’ai vaincu le monde » (Jn 16,33) et « je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20). Celui ou celle qui m’accueillera dans la foi participera déjà, au cœur de ses épreuves, à ma victoire, même si la violence ou la maladie semblent finalement l’emporter… Christ est là comme un soutien offert au cœur de toutes nos souffrances, il sera là aussi, par-delà notre mort, Ressuscité, pour nous prendre par la main et nous emporter dans sa Gloire… St Paul témoigne très souvent de cette Présence réconfortante au cœur de toutes ses difficultés de missionnaire. Et son témoignage est comme un nouvel Evangile, en actes… « Nous ne voulons pas que vous l’ignoriez, frères », dit-il. « La tribulation qui nous est survenue en Asie nous a accablés à l’excès, au-delà de nos forces, à tel point que nous désespérions même de conserver la vie. Vraiment, nous avons porté en nous-mêmes notre arrêt de mort, afin d’apprendre à ne pas mettre notre confiance en nous-mêmes mais en Dieu, qui ressuscite les morts. C’est lui qui nous a délivrés d’une telle mort et nous en délivrera ; en lui nous avons cette espérance qu’il nous en délivrera encore » (2Co 1,8-10). Il avait donc conscience de porter un trésor en son cœur, le trésor de l’Esprit, qui était toute sa force et sa consolation dans les multiples épreuves de la vie. C’est pourquoi, « si nous sommes pressés de toutes parts, nous ne sommes pas écrasés. Si nous ne savons qu’espérer, nous ne sommes pas désespérés. Si nous sommes persécutés, nous ne sommes pas abandonnés » à tel point qu’il pouvait écrire : « Je surabonde de joie dans toutes nos souffrances ». « Si nous sommes terrassés, nous ne sommes pas anéantis. Nous portons partout et toujours en notre corps les souffrances de mort de Jésus, pour que la vie de Jésus soit, elle aussi, manifestée dans notre corps » (2Co 4,7-10 ; 7,4). La Présence en son cœur « de l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63) l’encourageait, le soutenait, le réjouissait alors même qu’il traversait toutes sortes d’épreuves douloureuses… Et c’est le même Esprit qui est à l’œuvre aujourd’hui dans nos vies…

 

La sixième trompette (Ap 9,13-21) 

voix de dieu(13)    Et le sixième Ange sonna… Alors j’entendis une voix venant des quatre cornes de l’autel d’or placé devant Dieu ; (14) elle dit au sixième Ange portant trompette :  Relâche les quatre Anges enchaînés sur le grand fleuve Euphrate. (15) Et l’on relâcha les quatre Anges qui se tenaient prêts pour l’heure et le jour et le mois et l’année, afin d’exterminer le tiers des hommes. (16) Leur armée comptait deux cents millions de cavaliers : on m’en précisa le nombre. (17) Tels m’apparurent en vision les chevaux et leurs cavaliers : ceux-ci portent des cuirasses de feu, d’hyacinthe et de soufre; quant aux chevaux, leur tête est comme celle du lion, et leur bouche crache feu et fumée et soufre. (18) Alors le tiers des hommes fut exterminé par ces trois fléaux : le feu, la fumée et le soufre vomis de la bouche des chevaux. (19) Car la puissance des chevaux réside en leur bouche ; elle réside aussi dans leur queue : ces queues, en effet, ainsi que des serpents, sont munies de têtes dont elles se servent pour nuire. (20) Or les hommes échappés à l’hécatombe de ces fléaux ne renoncèrent même pas aux œuvres de leurs mains : ils ne cessèrent d’adorer les démons, ces idoles d’or, d’argent, de bronze, de pierre et de bois, incapables de voir, d’entendre ou de marcher. (21) Ils n’abandonnèrent ni leurs meurtres, ni leurs sorcelleries, ni leurs débauches, ni leurs rapines. 
            « Et le sixième ange sonna »… Dès que cette sixième trompette se fait entendre, la première réalité qui intervient est cette « voix venant des quatre cornes de l’autel d’or placé devant Dieu », cet autel d’où s’élevait en Ap 8,2-5 « la prière des saints », la prière des croyants… Cette « voix », sans aucune précision, évoque celle de Dieu Lui-même, tandis que « les quatre cornes » de l’autel rajoutent une idée de puissance (les cornes) universellement présente (le chiffre quatre). Le fléau qui suit, « relâche les quatre Anges enchaînés sur le grand fleuve Euphrate », a lui aussi une portée universelle avec à nouveau ce chiffre quatre… Mais que Dieu sois mentionné en premier, avec cette idée de toute puissance, nourrit encore l’espérance d’une victoire divine sur toutes ces forces du mal… Quelle que soit l’ampleur du cataclysme, St Jean invite donc ses lecteurs à tourner leur regard vers le Seigneur Tout Puissant et à espérer en lui contre toute espérance…

pain de vivant

            La Bible de Jérusalem explique en note que « la région à l’Est de l’Euphrate était occupée par les Parthes »… L’allusion aux Parthes se poursuit, mais il semble que son importance et son impact soient ici majorés aux dimensions de la terre tout entière. La mention des « quatre Anges » oriente déjà dans cette direction, tout comme le nombre exorbitant des cavaliers « deux cent millions », ainsi que les conséquences terribles de leur violence, répétée par deux fois : « ils exterminent le tiers des hommes » (Ap 9,15), là encore sans aucune précision… Toute l’humanité est donc concernée : « le tiers des hommes fut exterminé par le feu, la fumée et le soufre vomis de la bouche des chevaux » (Ap 9,18). St Jean évoquerait donc ici tous les fléaux des guerres de toutes sortes qui peuvent frapper les hommes où qu’ils soient sur cette terre.
            Et malgré toutes ces épreuves, tous ces morts, les survivants ne prennent pas conscience de la gravité de leur situation. Leur aveuglement demeure (cf. Is 42,18‑25)… Ils ne se convertissent pas (cf. Os 11,7)… Ils ne renoncent pas à leurs idoles « d’or, d’argent, de bronze, de pierre et de bois, incapables de voir, d’entendre ou de marcher »… St Jean cite ici les prophètes (Is 17,8 ; Dn 5,4 ; cf. Jr 2,26-29) ce qui montre bien que ce problème n’est pas nouveau. Cet aveuglement, cette obstination dans le mal, ce refus de se convertir était déjà le lot de beaucoup en Israël, et Dieu a poursuivi son œuvre de salut envers et contre tout, accomplissant toutes ses prophéties par l’Incarnation de son Fils… Et aujourd’hui encore, il est toujours à l’œuvre…
            Ce refus de se convertir, repris une fois de plus ici, souligne donc à nouveau l’urgence de se tourner vers le Dieu Vivant et Tout Proche, d’abandonner « les idoles », « les meurtres, les sorcelleries, les débauches et les rapines » qui ne peuvent qu’entraîner tous ceux qui les commettent sur des chemins où se renouvelleront encore toutes ces guerres, ces destructions et ces souffrances… Cet appel est bien sûr lancé à chacun d’entre nous. Mais nous sommes aussi invités, tous ensemble, à le transmettre à tous ceux et celles qui nous entourent… « Convertissez‑vous, renoncez au mal qui ne peut que vous détruire, apprenez à faire le bien, tournez-vous de tout cœur vers le Père des Miséricordes… Si vous acceptez son pardon toujours offert, Il sera le premier à s’en réjouir, Lui qui ne désire qu’une seule chose : voir sa Vie, sa Paix, sa Joie régner en Plénitude dans nos cœurs pour que nous puissions enfin connaître avec Lui le vrai Bonheur »…

dieu miséricorde

 Jacques Fournier

AP – SI – Fiche 18 – Ap 8,6-9,21 : cliquer sur le titre précédent pour ouvrir le document PDF