L’Inspiration divine de la Sainte Ecriture et son interprétation (Voir le Concile Vatican II, « Dei Verbum, chapitre 3)
Inspiration et vérité de la Sainte Ecriture
« Pour qu’un discours soit inspiré, il faut que l’auteur bénéficie en parlant ou en écrivant d’un concours immédiat de Dieu, qu’il agisse sous une impulsion de l’Esprit Saint…
La Parole de Dieu que les prophètes avaient entendue demeurait vivante en eux. Ils ne la conservaient pas seulement à la façon d’un souvenir. C’était dans leur âme une force qui les poussait à l’action » (Dictionnaire de la Bible Supplément : DBS, article « Inspiration »)…
Les prophètes commencent donc par recevoir la Parole de Dieu qui les introduit dans le mystère d’une relation avec Dieu qui est avant tout « Vie », mystère de communion. Puis, sous l’impulsion de Dieu, au cœur de ce mystère de communion où ils restent pleinement eux-mêmes, ils vont parler et leur parole sera … Parole de Dieu.
Une Parole à recevoir et qui devient vie… Avec le prophète Ezéchiel, Dieu nous le fait comprendre par un geste symbolique tout simple : il commence par l’appeler, puis il lui présente un Livre et il l’invite à le manger ! Pour Ezéchiel, la Parole de Dieu est donc tout d’abord une nourriture reçue de Dieu qui va, comme toute nourriture, alimenter sa vie. Mais il ne s’agit pas ici de n’importe quelle nourriture : elle vient directement de Dieu. Elle nourrira donc en lui « la Vie de Dieu ». Ezéchiel accueille donc cette Parole de Dieu avec foi ; grâce à elle, il va recevoir en son cœur la Vie de Dieu. Puis, vivant de cette Vie, il parlera et sa Parole, dans ce mystère de communion avec Dieu, sera cette « Parole de Dieu » qu’il portera à ses frères…
« Ez 3,1-4 (J’entendis la voix de quelqu’un qui me parlait ; cf Ez 1,28) : Il me dit :
«Fils d’homme, ce qui t’est présenté, mange-le;
mange ce volume et va parler à la maison d’Israël.»
(2) J’ouvris la bouche et il me fit manger ce volume,
(3) puis il me dit : «Fils d’homme, nourris-toi et rassasie-toi de ce volume que je te donne.»
Je le mangeai et, dans ma bouche, il fut doux comme du miel.
(4) Alors il me dit : «Fils d’homme, va-t’en vers la maison d’Israël
et tu leur porteras mes paroles ».
Notons combien le sens de ce texte se rapproche de l’idée développée en St Jean, au chapitre 6.
En Ezéchiel, ce « pain de Dieu » est la Parole de Dieu écrite sur un Livre qui vient du ciel pour qu’Ezéchiel le mange et vive de la Vie de Dieu. En St Jean, Jésus se présente lui-même comme « le pain de Dieu qui descend du ciel et donne la vie au monde » : « Je suis le pain vivant descendu du ciel. Qui mangera ce pain vivra à jamais » (Jn 6,33.51). Or, dans toute la première partie de ce discours de Jésus à Capharnaüm (Jn 6,35-47) , Jésus est justement « pain de vie » par sa Parole. Et pour recevoir ce pain, pour le manger et en vivre, il suffit de « croire » : « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle » (Jn 6,47). Nous sommes donc tous invités à « manger la Parole de Jésus », c’est à dire à l’écouter avec foi ; et si nous croyons vraiment à ce que Jésus nous dit, Dieu agira en nos cœurs, en nos vies, selon sa Parole… Par son Esprit, il nous donnera d’avoir part à sa Vie, et il nous établira ainsi, dès maintenant, dans la foi, dans ce mystère de communion auquel toute l’humanité est appelée… Ce don qui nous vient du Christ « doux et humble de cœur » (Mt 11,29) est lui aussi « doux et humble », tout simple… Il est avant tout « paix », une paix que Dieu veut voir régner dans nos cœurs, une paix qui fera de chacun de nous des artisans de paix : « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix », nous dit Jésus ; « je ne la donne pas comme le monde la donne » (c’est à dire bien souvent en parole seulement, sans réel effet dans nos vies ; Jésus, Lui, fait régner sa paix en nous et de fait, il ajoute juste après 🙂 – « que votre cœur ne se trouble pas » (Jn 14,27)… Qu’il demeure en paix, quoiqu’il arrive…
Pour revenir à nos prophètes, Jérémie parle de son côté d’un feu qui brûle en son cœur et qu’il ne peut contenir. Et c’est sous l’influence de ce feu brûlant en lui, qu’Il va parler. Le Nouveau Testament mettra clairement en parallèle l’Esprit Saint et le feu : « Jésus est venu baptiser dans l’Esprit Saint et le feu » (Mt 3,11), cet Esprit Saint qui allume dans le cœur des baptisés ce doux feu de l’amour qui nous purifiera petit à petit de tout ce qui n’est pas en harmonie avec Dieu…
Jr 20,7-9 : Tu m’as séduit, Yahvé, et je me suis laissé séduire;
tu m’as maîtrisé, tu as été le plus fort…
(9) Je me disais : “Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son Nom”;
mais c’était en mon cœur comme un feu dévorant, enfermé dans mes os.
Je m’épuisais à le contenir, mais je n’ai pas pu.
(Et notons combien ce feu est en même temps expérience d’une Présence,
d’une communion avec son Dieu ; il ajoute en effet juste après 🙂
(11) Le Seigneur est avec moi comme un héros puissant…
« Aux yeux des Israélites, les prophètes passaient donc pour être « les hommes de l’Esprit ». Ils sont pourtant peu nombreux à nous parler de leur expérience de l’Esprit. Michée le fait par exemple comme en passant…
Mi 3,8 : Moi, en revanche – grâce à l’Esprit du Seigneur -,
je suis rempli de force, d’équité, de courage…
Néanmoins les prophètes nous apprennent ça et là que le don de prophétie consiste en une effusion du Saint Esprit :
Is 42,1-4 : Voici mon serviteur que je soutiens,
mon élu en qui mon âme se complaît.
J’ai mis sur lui mon Esprit, il présentera aux nations le droit.
(2) Il ne crie pas, il n’élève pas le ton, il ne fait pas entendre sa voix dans la rue;
(3) il ne brise pas le roseau froissé, il n’éteint pas la mèche qui faiblit,
fidèlement, il présente le droit;
(4) il ne faiblira ni ne cédera jusqu’à ce qu’il établisse le droit sur la terre,
et les îles attendent son enseignement.
Is 61,1-2 : L’Esprit du Seigneur Dieu est sur moi,
car le Seigneur m’a donné l’onction;
il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, panser les cœurs meurtris,
annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance,
(2) proclamer une année de grâce de la part du Seigneur…
Et Zacharie évoque de son côté l’attitude de ceux qui n’ont pas voulu ouvrir leur cœur à la Parole que Dieu leur avait envoyée par ses prophètes, par son Esprit…
Zac 7,9-12 : Ainsi parle le Seigneur:
Rendez une justice vraie et pratiquez bonté et compassion chacun envers son frère.
(10) N’opprimez pas la veuve et l’orphelin, l’étranger et le pauvre,
et ne méditez pas en votre cœur du mal l’un envers l’autre.
(11) Mais ils ne voulurent pas être attentifs :
ils me présentèrent une épaule rebelle;
ils endurcirent leurs oreilles pour ne pas entendre;
(12) ils firent de leur cœur un diamant,
de peur d’écouter l’instruction et les paroles que le Seigneur avait envoyées
– par son Esprit – par le ministère des prophètes du passé.
St Paul évoque lui aussi cette action de l’Esprit qui, par sa Présence dans les cœurs, permet de prendre conscience de « ce que l’œil n’a pas vu » ; c’est ainsi que l’Esprit « révèle », qu’il « fait connaître les dons de grâces que Dieu a faits aux hommes », et il donne à St Paul et à ses compagnons « d’exprimer en termes spirituels ces réalités spirituelles » :
1Co 2,7-13 : Nous parlons d’une sagesse de Dieu, mystérieuse, demeurée cachée,
celle que, dès avant les siècles, Dieu a par avance destinée pour notre gloire,
(8) celle qu’aucun des princes de ce monde n’a connue
– s’ils l’avaient connue, en effet, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de la Gloire –
(9) mais, selon qu’il est écrit, nous annonçons ce que l’œil n’a pas vu,
ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme,
tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment.
(10) Car c’est à nous que Dieu l’a révélé par l’Esprit;
l’Esprit en effet sonde tout, jusqu’aux profondeurs de Dieu.
(11) Qui donc entre les hommes sait ce qui concerne l’homme,
sinon l’esprit de l’homme qui est en lui?
De même, nul ne connaît ce qui concerne Dieu, sinon l’Esprit de Dieu.
(12) Or, nous n’avons pas reçu, nous, l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu,
pour connaître les dons gracieux que Dieu nous a faits.
(13) Et nous en parlons non pas avec des discours enseignés par la sagesse humaine,
mais avec ceux qu’enseigne l’Esprit,
exprimant en termes spirituels des réalités spirituelles.
C’est ainsi que l’on peut parler « d’Ecriture inspirée » :
2Tim 3,14-17 : Pour toi (écrit St Paul à Timothée), tiens-toi à ce que tu as appris
et dont tu as acquis la certitude.
Tu sais de quels maîtres tu le tiens;
(15) et c’est depuis ton plus jeune âge que tu connais les saintes Lettres.
Elles sont à même de te procurer la sagesse
qui conduit au salut par la foi dans le Christ Jésus.
(16) Toute Écriture est inspirée de Dieu
et utile pour enseigner, réfuter, redresser, former à la justice :
(17) ainsi l’homme de Dieu se trouve-t-il accompli, équipé pour toute œuvre bonne.
Et St Pierre écrit de son côté :
2P 1,19-21 : Nous avons la parole des prophètes qui est la solidité même,
sur laquelle vous avez raison de fixer votre regard
comme sur une lampe brillant dans un lieu obscur,
jusqu’à ce que luise le jour et que l’étoile du matin se lève dans vos cœurs.
Avant tout, sachez le bien :
aucune prophétie de l’Ecriture n’est affaire d’interprétation privée ;
en effet, ce n’est pas la volonté humaine qui a jamais produit une prophétie,
mais c’est portés par l’Esprit Saint que des hommes ont parlé de la part de Dieu ».
Un peu plus loin dans cette même Lettre, St Pierre évoque la figure de St Paul qui a « écrit selon la sagesse qui lui a été donnée » (2 P 3,15). La Lettre aux Ephésiens parlera de son côté d’un « Esprit de sagesse », une expression qui évoque la sagesse que donne l’Esprit Saint :
Ep 1,15-20 : Ayant appris votre foi dans le Seigneur Jésus
et votre charité à l’égard de tous les saints,
(16) je ne cesse de rendre grâces à votre sujet et de faire mémoire de vous dans mes prières.
(17) Daigne le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de la gloire,
vous donner un esprit de sagesse et de révélation,
qui vous le fasse vraiment connaître!
(18) Puisse-t-il illuminer les yeux de votre cœur pour vous faire voir
quelle espérance vous ouvre son appel,
quels trésors de gloire renferme son héritage parmi les saints,
(19) et quelle extraordinaire grandeur sa puissance revêt pour nous, les croyants,
selon la vigueur de sa force,
(20) qu’il a déployée en la personne du Christ,
le ressuscitant d’entre les morts
et le faisant siéger à sa droite, dans les cieux…
L’Esprit Saint qui vient du Père rejoint le cœur de ceux et celles qui l’accueillent avec foi. Par sa Présence, il « illumine les yeux du cœur » et communique ainsi cette « sagesse » qui vient de Dieu. Grâce à lui, il est alors possible de comprendre, dans la foi, « l’espérance que nous ouvre l’appel de Dieu », « les trésors de gloire qu ‘Il nous réserve », et « l’extraordinaire grandeur de sa puissance qu’il a déployée dans le Christ, le ressuscitant d’entre les morts.
Nous pressentons à travers ces lignes l’expérience de St Paul lui-même !
C’est pourquoi le Concile Vatican II (Dei Verbum chapitre III, & 11) peut dire en même temps que :
1 – Les Livres entiers, tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, ont Dieu pour auteur car ils ont été composés sous l’inspiration de l’Esprit Saint.
2 – Mais ces hommes choisis par Dieu pour la rédaction des Livres Saints sont restés pleinement eux-mêmes : Dieu « leur a laissé l’usage de leurs facultés et de toutes leurs ressources » ; il ne leur a pas « dicté » du ciel ce qu’ils avaient à écrire. Dans la lumière de l’Esprit Saint, « portés par l’Esprit Saint » (2 P 1,21), ils ont déployé tout leur savoir faire, toutes leurs capacités pour transmettre cette vérité qui les habitait, ce « feu qui brûlait en leur cœur » (Jérémie 20,7-9). Ils ont écrit « en auteurs véritables ». Mais l’Esprit de Dieu les guidait vers la vérité toute entière (Jn 16,13) de telle sorte qu’ils n’ont transmis que ce que Dieu voulait qu’ils transmettent.